Les mesures prises face aux problèmes agro - Agri

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Merci d'utiliser le titre suivant lorsque vous citez ce document :
Vojtech, V. (2010), « Les mesures prises face aux
problèmes agro-environnementaux », Éditions OCDE.
doi : 10.1787/5kmjrzdr9s6c-fr
Les mesures prises face
aux problèmes agroenvironnementaux
Vaclav Vojtech
*
La version originale de ce document a été publiée comme suit :
Vojtech, V. (2010), “Policy Measures Addressing Agrienvironmental Issues”, OECD Food, Agriculture and
Fisheries Working Papers, No. 24, OECD Publishing.
doi: 10.1787/5kmjrzg08vvb-en
*
OCDE, France
Les mesures prises face
aux problemes agro-environnementaux
Résumé
La production agricole affecte la qualité de l’eau, de l’air et du sol, influe sur les
écosystèmes et la biodiversité et façonne les paysages ruraux. Nombre de ces effets sur
l’environnement, qui sont très divers dans les pays de l’OCDE, présentent les
caractéristiques d’externalités négatives ou positives ou de biens publics pour lesquels il
n’existe pas de marchés privés ou pour lesquels ceux-ci fonctionnent mal. Face à cette
demande, des mesures agro-environnementales ont été élaborées dans les pays de
l’OCDE. Un éventail d’instruments a été développé pour faire face aux problèmes
environnementaux comme par exemple : les exigences réglementaires, paiements agroenvironnementaux, taxes et redevances écologiques, droits et contingents négociables,
écoconditionnalité. L’Inventaire des mesures prises face aux problèmes
environnementaux en agriculture (Inventaire) mis en place par l’OCDE avec la
coopération des pays membres, prend en compte ce large éventail de mesures en se
focalisant non seulement sur les politiques agricoles abordant les problèmes
environnementaux (politiques agro-environnementales) mais aussi sur les mesures
environnementales (exigences réglementaires, par exemple) affectant la production et les
pratiques agricoles.
Ce rapport d’inventaire se concentre sur l’évolution de l’ensemble des politiques
s’attaquant aux problèmes environnementaux en agriculture dans les pays de l’OCDE au
cours de la dernière décennie (depuis le milieu des années 1990). Cet inventaire des
politiques a été entrepris: (i) sous l’angle des objectifs environnementaux que poursuivent
les politiques ; et (ii) sous l’angle des mesures mises en œuvre. Pour atteindre leurs divers
objectifs en termes d’environnement, les pays de l’OCDE associent différents moyens
d’action lorsqu’il n’existe pas de marché pour les externalités et les biens publics. Les
instruments utilisés sont le reflet de la démarche politique globale du secteur ; des
problèmes environnementaux spécifiques et de leurs liens perçus avec les activités
agricoles ; de la nature des droits de propriété liés à l’utilisation des ressources naturelles
(terres, eau) et des inquiétudes de la société liées aux problèmes environnementaux.
Mots-clés
Politiques
agricoles ;
mesures
agro-environnementales ;
payements
environnementaux ; régulations environnementales ; politiques environnmentales.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
agro-
TABLE DES MATIERES – 3
Table des matières
Résumé................................................................................................................................................. 3
Introduction........................................................................................................................................ 11
Ciblage des politiques sur les problèmes environnementaux en agriculture ..................................... 13
Protection et qualité des sols .......................................................................................................... 14
Qualité de l’eau /protection de l’eau (y compris la réduction de la pollution) ............................... 14
Biodiversité .................................................................................................................................... 15
Paysage ........................................................................................................................................... 17
Changement climatique – Pollution atmosphérique ....................................................................... 17
Mesures prises face aux problèmes environnementaux en agriculture .............................................. 18
Instruments économiques................................................................................................................... 19
Paiements aux agriculteurs ............................................................................................................. 20
Taxes et redevances environnementales......................................................................................... 34
Droits/permis négociables .............................................................................................................. 35
Mesures à l’échelon local................................................................................................................... 36
Mesures réglementaires ..................................................................................................................... 36
Exigences réglementaires ............................................................................................................... 36
Dispositifs d’éco conditionnalité .................................................................................................... 41
Mesures consultatives et institutionnelles .......................................................................................... 42
Recherche et développement .......................................................................................................... 42
Assistance technique/vulgarisation ................................................................................................ 42
Étiquetage/normes/certification ..................................................................................................... 43
Conclusions........................................................................................................................................ 44
Bibliographie ..................................................................................................................................... 47
Tableaux
Tableau 1. Mesures prises face aux problèmes environnementaux
en agriculture dans les pays de l'OCDE ........................................................................................... 19
Tableau 2. Total des paiements agroenvironnementaux dans certains pays de l’OCDE, 1996-200821
Tableau 3. Paiements agroenvironnementaux mis en œuvre
dans les États membres de l'OCDE en 2008 .................................................................................... 22
Figures
Graphique 1. Distribution des dépenses au titre du FEADER par axe et par mesure en 2008 ........ 24
Graphique 2. Structure des paiements agroenvironnementaux
dans certains pays OCDE pour la période 1996-98 et 2006-08 ....................................................... 34
Encadrés
Encadré 1. Mesures prises face aux problèmes environnementaux en agriculture .......................... 19
Encadré 2. Paiements agro-environnementaux dans l'Union européenne ....................................... 23
Encadré 3. Comment les paiements agro-environnementaux sont-ils classés dans l'ESP ? ............ 33
Encadré 4. L’écoconditionnalité dans l’UE ..................................................................................... 42
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
RÉSUMÉ – 5
Résumé
La production agricole affecte la qualité de l’eau, de l’air et du sol, influe sur les
écosystèmes et la biodiversité et façonne les paysages ruraux. Nombre de ces effets sur
l’environnement, qui sont très divers dans les pays de l’OCDE, présentent les
caractéristiques d’externalités négatives ou positives ou de biens publics pour lesquels il
n’existe pas de marchés privés ou pour lesquels ceux-ci fonctionnent mal. Si une
multitude de facteurs expliquent les choix des agriculteurs quant aux types et aux modes
de production, les incitations économiques exercent une grande influence sur leurs
comportements individuels et collectifs. En effet, la production agricole est très sensible
aux signaux des marchés, car les agriculteurs tentent d’augmenter les recettes et de
réduire les coûts. Lorsque les signaux transmis par les marchés à l’égard des biens
environnementaux sont faibles ou inexistants, il est possible que les activités individuelles
prises dans leur ensemble n’atténuent pas assez les dommages ou ne procurent pas
suffisamment d’avantages au plan environnemental. Cependant, il est important de
reconnaître que certains agriculteurs sont motivés pour mettre en œuvre des pratiques
agricoles qui sont bénéfiques pour l’environnement et la conservation des ressources.
Face à cette demande, des mesures agro-environnementales ont été élaborées dans les
pays de l’OCDE. Un éventail d’instruments a été développé pour faire face aux
problèmes environnementaux comme par exemple : les exigences réglementaires,
paiements agro-environnementaux, taxes et redevances écologiques, droits et contingents
négociables, écoconditionnalité. L’Inventaire des mesures prises face aux problèmes
environnementaux en agriculture (Inventaire) mis en place par l’OCDE avec la
coopération des pays membres, prend en compte ce large éventail de mesures en se
focalisant non seulement sur les politiques agricoles abordant les problèmes
environnementaux (politiques agro-environnementales) mais aussi sur les mesures
environnementales (exigences réglementaires, par exemple) affectant la production et les
pratiques agricoles. Ce rapport d’inventaire se concentre sur l’évolution de l’ensemble
des politiques s’attaquant aux problèmes environnementaux en agriculture dans les pays
de l’OCDE au cours de la dernière décennie (depuis le milieu des années 1990). Cet
inventaire des politiques a été entrepris: (i) sous l’angle des objectifs environnementaux
que poursuivent les politiques ; et (ii) sous l’angle des mesures mises en œuvre.
Ciblage des politiques sur les objectifs environnementaux dans l’agriculture
Les objectifs de la politique agroenvironnementale sont souvent faciles à cerner dans
les grandes lignes, mais difficiles à définir et à mesurer de façon précise. De plus,
certaines politiques ciblent plusieurs objectifs simultanément, soit parce que ces objectifs
sont interdépendants, soit parce que la modification d’une activité agricole peut avoir
plusieurs conséquences. La présente section tente de clarifier certaines de ces questions
en jetant un éclairage sur les principaux objectifs de la politique agroenvironnementale.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
6 – RÉSUMÉ
L’agriculture est l’un des principaux utilisateurs de ressources naturelles en
particulier de la terre et de l’eau. De nombreuses politiques incitent à l’utilisation de
pratiques agricoles spécifiques sur les terres agricoles (conversion de terres arables en
prairies, pâturage extensif, couvert végétal, etc.) ou à la mise hors culture de terres (mise
en réserve de longue durée, conservation des terres, boisement des terres agricoles, etc.),
et sont souvent décrites comme combinant plusieurs objectifs environnementaux, dont
l’amélioration de la qualité des sols, de la qualité de l’eau, de la biodiversité et des
paysages. Ce sont les conditions locales qui détermineront le degré d’importance de ces
objectifs. Ces types de politiques représentent également l’essentiel des politiques agroenvironnementales en termes de paiements accordés ou de superficie incluse dans le
programme.
Certaines mesures ciblent des régions spécifiques pour remédier à des problèmes
environnementaux spécifiques (ciblage spatial). C’est le cas, par exemple, des
écosystèmes dépendants de l’eau en Australie (Bassin de Murray-Darling), aux ÉtatsUnis (Grands Lacs) ou au sein de l’UE, où la directive nitrates est appliquée dans les
régions à haut niveau de pollution ; dans le cadre du projet Natura 2000 les régions de
grande valeur aux plans de la biodiversité, du paysage et de l’environnement ont été
identifiées dans les États membres. De plus en plus, les programmes
agroenvironnementaux sont appliqués à l’intérieur d’un cadre obligatoire (niveau
national, niveau de l’UE) qui établit les grands principes directeurs, les mesures
spécifiques étant définies et appliquées à des niveaux administratifs inférieurs (niveau
d’un État, niveau provincial). C’est le cas en Australie, au Canada et aux États-Unis.
Dans l’UE, les politiques sont mises en œuvre par les membres (à l’intérieur du cadre
communautaire obligatoire) et dans certains États, par des paliers d’administration
inférieurs (par exemple, les provinces, les régions ou les länder, ou même au niveau
local). Cette structure a été adoptée par des pays tels que l’Allemagne, l’Autriche,
l’Espagne, la France, l’Italie et le Royaume-Uni.
Les règlements et quelques autres mesures comme les permis négociables sont
généralement liés à un problème environnemental spécifique (utilisation d’une
ressource), par exemple la qualité des sols ou de l’eau ou la biodiversité. Les objectifs
environnementaux (et les résultats) ne sont définis et mesurables avec précision que pour
un nombre limité de programmes offrant des paiements agroenvironnementaux. La
plupart de ces paiements concernent des pratiques de gestion spécifiques, bien définies et
maîtrisées, qui visent à donner des résultats sur le plan environnemental supérieurs à
celui défini par le niveau de référence (par exemple le niveau minimal de performance
environnementale établi par la réglementation, ou les « bonnes pratiques agricoles »).
Dans la plupart des cas, les résultats de ces programmes sont définis par la région où la
pratique de gestion spécifique a été adoptée, qui peut être un indicateur quelque peu
grossier du respect du critère de qualité environnementale.
Moyens d’action utilisés face aux problèmes environnementaux en agriculture
Les différentes combinaisons d’instruments d’action utilisées par les pays de l’OCDE
pour atteindre leurs divers objectifs en matière d’environnement sont le reflet de la
démarche politique globale du secteur ; des problèmes environnementaux spécifiques et
de leurs liens perçus avec les activités agricoles ; de la nature des droits de propriété liés à
l’utilisation des ressources naturelles (terres, eau et végétation) et des inquiétudes de la
société liées aux problèmes environnementaux. De plus, des mesures de « persuasion »
sont destinées à changer les perceptions et priorités dans le cadre de décision des
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
RÉSUMÉ – 7
agriculteurs en relevant
environnementales.
le
niveau
de
sensibilisation
et
de
responsabilité
Bien que moins visibles dans l’analyse des politiques et le débat politique, les
réglementations environnementales (exigences réglementaires) sont au cœur des
politiques mises en œuvre face aux problèmes environnementaux en agriculture. Tous les
pays de l’OCDE mettent en œuvre des politiques et/ou des mesures réglementaires pour
éviter l’impact négatif de l’agriculture sur l’environnement. La plupart de ces
réglementations sont liées à l’utilisation (stockage, manipulation et application aux
plantes et aux animaux) d’intrants agricoles (pesticides, engrais industriels, fumier) qui
sont susceptibles d’avoir sur l’environnement des effets négatifs (pollution des sols, de
l’eau et de l’air). Ces exigences réglementaires vont de l’interdiction pure et simple, à
l’établissement de normes relatives aux intrants et d’exigences quant à l’utilisation des
ressources. La plupart de ces réglementations sont appliquées à l’échelle du secteur
agricole. Mais dans les zones présentant un intérêt environnemental plus grand (réserves
naturelles), les zones de captage de l’eau potable, les zones écologiquement sensibles ou à
proximité des zones à forte densité de population, des réglementations supplémentaires
peuvent s’appliquer. Au fil des ans, ces exigences réglementaires ont généralement été
appliquées plus largement, et avec le développement de la prise de conscience des
risques, elles sont devenues plus contraignantes.
Certains pays de l’OCDE (l’Australie et la Nouvelle-Zélande) s’en remettent
essentiellement aux exigences réglementaires pour s’attaquer aux problèmes
environnementaux en agriculture. Outre les réglementations, les problèmes
environnementaux spécifiques sont abordés principalement par des programmes
environnementaux ciblés sur des zones spécifiques. Dans un grand nombre de cas,
exploitants agricoles et propriétaires terriens (regroupés dans les initiatives locales) sont
impliqués dans ces programmes, qui peuvent bénéficier d’une aide financière à court
terme destinée à faciliter les activités collectives qui améliorent la durabilité écologique et
l’autonomie du secteur agricole. L’aide financière peut également consister en une
assistance technique et des actions de vulgarisation ; une partie de cette aide va à des
investissements en infrastructures et des investissements sur les exploitations. Outre les
exigences réglementaires, le Canada a lui aussi principalement recours à la vulgarisation
et aux mesures locales et plus récemment à des paiements plutôt limités pour des
pratiques agricoles spécifiques.
D’autres pays (principalement, les pays de l’UE, la Norvège, la Suisse et les ÉtatsUnis) ont également imaginé un large éventail de payements agro-environnementaux
dans le cadre de programmes volontaires incitant les agriculteurs (par des paiements) à
adopter des pratiques agricoles spécifiques ayant des effets positifs sur l’environnement
et/ou à fournir des biens publics (paysages, biodiversité, etc.). Bien que ces programmes
offrent une grande variété de mesures, la plupart des paiements sont liés au soutien de
formes extensives d’agriculture (reposant pour la plupart sur les prairies, une gestion
extensive des prairies, des pâturages extensifs). De tels programmes existent dans tous les
pays et représentent l’essentiel des dépenses au titre des programmes agroenvironnementaux. Au Japon et en Corée, les paiements agro-environnementaux n’ont
été introduits que récemment et ne représentent qu’une part infime du soutien total à
l’agriculture. Néanmoins, le niveau des paiements agroenvironnementaux ne représente
pas l’ensemble des efforts réalisés par les pays pour atteindre leurs objectifs
environnementaux liés à l’agriculture.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
8 – RÉSUMÉ
L’agriculture biologique est aidée dans la plupart des pays de l’OCDE. Les
méthodes de production biologique peuvent contribuer à améliorer la performance
environnementale de l’agriculture, en particulier par le faible (ou l’absence de) recours
aux intrants chimiques, bien que les rendements soient souvent inférieurs à ceux obtenus
par les systèmes de production « intensifs ». Si certains pays se bornent à élaborer une
réglementation de la production biologique et à mettre en place des organismes de
certification, d’autres accordent également une aide financière aux agriculteurs pendant la
période de passage de l’agriculture traditionnelle à l’agriculture biologique.
Des programmes prévoyant des paiements pour la mise hors production des terres
agricoles sont également mis en place dans toute une série de pays (pays européens,
États-Unis). Ces programmes prévoient principalement des paiements pour la conversion
des terres agricoles en terres humides ou en forêts. Toutefois, dans la plupart des pays,
l’importance de ces programmes est plutôt limitée, excepté aux États-Unis où les
paiements pour mise en réserve des terres fragiles (Conservation Reserve Program CRP) représentent la plus grande part des paiements agro-environnementaux.
Certains pays de l’OCDE ne paraissent pas être des acteurs de premier plan en
matière d’utilisation des paiements agro-environnementaux. Dans les cas du Mexique et
de la Turquie, par exemple, cela peut être dû au fait que la part de l’agriculture dans
l’économie et dans l’emploi y est relativement grande, ce qui peut constituer un frein à
l’utilisation de mesures agro-environnementales qui impliqueraient des coûts budgétaires
élevés. Ces pays ont probablement d’autres priorités pour les ressources dont ils
disposent.
Dans certains pays, des taxes et redevances écologiques frappent les ventes d’intrants
identifiés comme susceptibles d’avoir un impact préjudiciable sur l’environnement. Des
taxes et redevances frappent actuellement les pesticides au Danemark, en France, en
Finlande, en Italie, en Norvège et en Suède, tandis qu’une redevance sur les engrais est
prélevée en Italie, en Suède et dans certains États des États-Unis.
D’autres instruments économiques, comme les droits et contingents négociables, sont
utilisés dans un nombre limité de pays. Citons notamment les droits négociables pour le
développement des zones humides aux États-Unis, les droits négociables sur les
prélèvements d’eau (mis en place au niveau des États/régions aux États-Unis) et le
perfectionnement des mécanismes du marché pour libérer les échanges de droits
négociables sur l’eau en Australie dans le cadre du programme de réforme l’Eau pour le
futur (Water for the Future).. Les droits négociables basés sur des contingents, des permis
et des restrictions dans le domaine de l’environnement ne semblent pas jouer un rôle
important dans les politiques agro-environnementales, malgré le recours grandissant à ce
type de mesures pour les politiques environnementales d’autres secteurs.
Écoconditionnalité. Des mesures subordonnant les programmes de soutien à
l’agriculture au respect de normes environnementales minimales sont établies aux ÉtatsUnis, en Norvège et en Suisse, et ont été mises en œuvre plus récemment en Corée.
Certains états membres de l’UE (le Royaume-Uni, par exemple) appliquent
l’écoconditionnalité depuis les années 1990. A compter de 2005, l’écoconditionnalité (y
compris les composantes environnementales) est devenue obligatoire dans l’UE15. Dans
les nouveaux États membres, l’écoconditionnalité s’applique déjà partiellement et
s’appliquera totalement entre 2009 et 2013.
Un certain nombre de pays dont l’Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande,
mettent l’accent sur l’utilisation d’approches au niveau local des problèmes
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
RÉSUMÉ – 9
environnementaux, en soutenant des actions collectives pour remédier à la pollution de
l’environnement. Ces approches tendent à cibler l’intérêt personnel mutuel des
agriculteurs pour la conservation de l’environnement dans une zone de captage spécifique
et à utiliser l’expertise locale pour résoudre les problèmes environnementaux.
De nombreuses mesures sont également mises en place pour faire face aux problèmes
environnementaux en agriculture, au niveau sectoriel. Au cours des vingt dernières
années, la plupart des pays de l’OCDE ont porté une attention accrue à l’amélioration de
la base de savoirs relatifs aux problèmes environnementaux en agriculture, augmentant
leurs dépenses au titre de recherches agro-environnementales souvent entreprises en
coopération avec des acteurs du secteur privé. Une évolution notable dans ce domaine a
été l’élaboration d’indicateurs agro-environnementaux dans un certain nombre de pays de
l’OCDE pour le suivi de la performance environnementale.
De façon générale, on a également mis davantage l’accent sur la communication aux
agriculteurs d’informations sur les problèmes environnementaux via l’assistance
technique et les actions de vulgarisation, de manière à induire des changements
volontaires dans les pratiques agricoles pour améliorer les résultats au plan de
l’environnement. Ces mesures incorporent un ensemble de plus en plus exhaustif
d’informations et utilisent désormais un large éventail d’outils de communication comme
l’Internet.
Une attention accrue a été portée à la fourniture d’informations consommateurs sur
les qualités environnementales des produits afin de répondre à la demande d’un public de
mieux en mieux informé et de plus en plus exigeant. En particulier, une série de normes
d’éco-étiquetage et de processus de certification ont été utilisés dans les pays de l’OCDE
au cours des deux dernières décennies, en particulier pour la production agricole
biologique ou intégrée, qui influencent indirectement les modes de production agricoles.
Évaluation globale
Les pays de l’OCDE continuent d’élaborer des mesures pour s’attaquer aux
problèmes environnementaux en agriculture. S’agissant de la panoplie de mesures prises,
les approches demeurent variées. Certains pays comme l’Australie et la Nouvelle-Zélande
s’en remettent encore pour l’essentiel à la réglementation environnementale et aux
instruments économiques tels que les contingents et les permis négociables, par
opposition aux paiements agroenvironnementaux. Cependant, nombre de pays de l’OCDE
ont mis en œuvre divers systèmes de paiements agroenvironnementaux afin de rétribuer
les agriculteurs en échange de la prestation volontaire de services environnementaux, ou
de financer une partie des coûts de la lutte contre la pollution. Jusqu’à maintenant, ces
programmes ont mis l’accent sur l’adoption de pratiques agricoles spécifiques et non sur
les effets mesurables sur l’environnement. Aux États-Unis, la nouvelle loi agricole fait
également une plus large place aux paiements agroenvironnementaux visant à encourager
l’adoption de pratiques spécifiques sur des terres en exploitation, qu’aux paiements liés à
la conservation des terres. L’Union européenne privilégie les paiements pour traiter les
problèmes environnementaux des exploitations. L’UE, les États-Unis et la Suisse
accordent de l’importance à l’écoconditionnalité et à l’association entre les mesures
environnementales et les mesures agricoles. Des méthodes d’évaluation de la politique
agroenvironnementale sont en cours d’élaboration dans de nombreux pays. Toutefois,
cela s’inscrit dans un long processus ardu du fait que nombre de problèmes
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
10 – RÉSUMÉ
environnementaux sont spécifiques au site et que l’évaluation et la mesure des effets sur
l’environnement sont complexes.
Globalement, la cohérence des politiques agricoles, agroenvironnementales et
environnementales s’est améliorée au cours des deux dernières décennies. Certains pays
de l’OCDE ont pris des mesures pour rationaliser les politiques agroenvironnementales à
l’intérieur de cadres ou de plans d’action obligatoires s’attaquant à des objectifs
environnementaux ou de développement rural. Mais, dans un contexte plus large, lorsque
les politiques agroenvironnementales compensent les effets dommageables pour
l’environnement de l’utilisation d’intrants et des politiques liées à la production, les coûts
de l’amélioration de l’environnement sont plus élevés qu’ils ne le seraient en l’absence de
telles mesures de soutien à la production tant que les prix intérieurs sont maintenus à un
niveau plus élevé que les prix mondiaux. En revanche, certaines mesures
agroenvironnementales ne visent pas seulement à compenser les effets nuisibles de
l’agriculture sur l’environnement et accordent des paiements facultatifs en échange de
services environnementaux additionnels (définis et ciblés avec plus ou moins de
précision) fournis par le secteur agricole. Dans la plupart des cas, ces services
additionnels sont associés à des pratiques agricoles spécifiques, par opposition à des
effets sur l’environnement.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
INTRODUCTION – 11
Introduction
Contexte
La production agricole affecte la qualité de l’eau, de l’air et du sol, influe sur les
écosystèmes et la biodiversité et façonne les paysages ruraux. Nombre de ces effets sur
l’environnement, qui sont très divers dans les pays de l’OCDE, présentent les
caractéristiques d’externalités négatives ou positives ou de biens publics pour lesquels il
n’existe pas de marchés privés ou pour lesquels ceux-ci fonctionnent mal. Si une multitude
de facteurs expliquent les choix des agriculteurs quant aux types et aux modes de
production, les incitations économiques exercent une grande influence sur leurs
comportements individuels et collectifs. En effet, la production agricole est très sensible
aux signaux des marchés, car les agriculteurs tentent d’augmenter les recettes et de réduire
les coûts. Lorsque les signaux transmis par les marchés à l’égard des biens
environnementaux sont faibles ou inexistants, il est possible que les activités individuelles
prises dans leur ensemble n’atténuent pas assez les dommages ou ne procurent pas
suffisamment d’avantages au plan environnemental. Cependant, il est important de
reconnaître que certains agriculteurs sont motivés pour mettre en œuvre des pratiques
agricoles qui sont bénéfiques pour l’environnement et la conservation des ressources.
Le secteur agricole entretient une relation complexe avec l’environnement en tant
qu’utilisateur et pollueur des ressources naturelles, et en tant que fournisseur d’écosystèmes
et de paysages culturels. Globalement, dans l’ensemble de la zone OCDE, l’agriculture
utilise environ 40 % des ressources en terres et en eau. Elle constitue une source majeure de
pollution de l’eau par le ruissellement d’éléments nutritifs et de pesticides. Elle a un impact
notable sur la biodiversité et elle façonne le paysage. Elle génère des émissions de gaz à
effet de serre, mais elle sert aussi de puits de carbone. On trouvera un examen global et
exhaustif des performances environnementales de l’agriculture dans les pays de l’OCDE
depuis 1990 dans un rapport publié récemment par l’OCDE (OCDE, 2008).
L’agriculture est un secteur dans lequel les politiques jouent un rôle important dans la
plupart des pays de l’OCDE. Les politiques agricoles opèrent des transferts monétaires qui
influent – directement ou indirectement et à des degrés variables – sur ce qui est produit et
en quelle quantité, où et dans quelles conditions. Ces politiques et les réglementations
environnementales imposent aux agriculteurs d’adopter certaines pratiques ou de fournir
certains résultats, soit à leurs frais soit avec l’aide de subventions. L’ensemble des
politiques mises en œuvre constitue un réseau complexe de mesures incitatives et
dissuasives pour les agriculteurs dont l’effet net sur l’environnement est parfois difficile à
cerner. Les gouvernements des pays de l’OCDE portent un intérêt croissant au suivi des
performances environnementales de l’agriculture, cherchant à identifier les problèmes
environnementaux que pourraient poser les activités agricoles dans l’avenir et à mieux
comprendre les effets sur l’environnement des différentes mesures de politique agricole.
Les formes prédominantes d’aide à l’agriculture dans les pays de l’OCDE, ces
40 dernières années, ont été étroitement liées à la production ou à l’utilisation d’intrants. Le
soutien accordé aux agriculteurs des pays de l’OCDE (estimation du soutien aux
producteurs ou ESP en %) représentait en moyenne environ 23 % des recettes agricoles
totales pour la période 2006-08 (contre 37 % pour la période 1986-88) ; il reste pour
l’essentiel lié à la production et à l’utilisation d’intrants mais dans une moindre mesure que
sur la période 1986-88 (56 contre 86 %). Il est possible que les politiques liées à la
production et l’utilisation d’intrants sans contrainte aient incité les producteurs à intensifier
la production (ce qui a accru les intrants variables par hectare) et à exploiter des terres
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
12 – INTRODUCTION
écologiquement sensibles, contribuant ainsi à divers problèmes environnementaux tels que
la pollution de l’eau, des sols et de l’air, et la surexploitation de ressources rares, en
particulier de l’eau (OCDE, 2001). Toutefois, ces politiques ont également contribué au
maintien de certaines activités de production agricole — telles que la gestion des prés, des
pâturages, des zones sèches et des terrasses — qu’un certain nombre de pays de l’OCDE
associent à des avantages pour l’environnement, par exemple la biodiversité et la lutte
contre les crues et les sécheresses.
Afin de tenir compte de ces externalités et biens publics, les pays de l’OCDE ont
élaboré un éventail de mesures agroenvironnementales dont l’envergure et l’importance ont
été accrues au fil des ans. Outre les transferts aux producteurs visant à réaliser des objectifs
environnementaux, les mesures appliquées englobent les règlements et les directives, les
taxes, les limites d’émission ou de consommation et les exigences telles que la conservation
des terres dans de bonnes conditions agricoles et environnementales au titre de
l’écoconditionnalité. L’Inventaire des mesures prises face aux problèmes
environnementaux en agriculture (Inventaire) établi par l’OCDE en coopération avec les
pays membres, fait état de ce large éventail de politiques en mettant l’accent non seulement
sur les politiques agricoles abordant les problèmes environnementaux (politiques
agroenvironnementales) mais aussi sur les mesures environnementales (exigences
réglementaires, par exemple) affectant la production et les pratiques agricoles.
Objectifs et structure du rapport
Ce rapport fait le point sur l’utilisation des mesures de politique agro-environnementale
dans les pays de l’OCDE, pointant les similitudes aussi bien que les différences entre les
approches adoptées. Le rapport examine également les objectifs environnementaux ciblés
par ces politiques et la manière dont ils sont définis. Il relie également les politiques agroenvironnementales au contexte général des politiques agricoles mises en œuvre et au
soutien global à l’agriculture qui en résulte. Cet inventaire ne cherche pas à évaluer de
manière exhaustive les mesures exposées, en termes d’efficacité environnementale ou
d’efficience économique. Toutefois, les informations contenues dans ce rapport seront
exploitées dans le cadre des travaux en cours au sein de l’OCDE sur l’évaluation des
politiques (les rapports Suivi et évaluation, par exemple) et contribueront à une utilisation
plus large des outils (indicateurs, inventaire, modèles) dans les études analytiques
effectuées par l’OCDE, en particulier dans celle sur l’élaboration de Lignes directrices pour
la conception et la mise en œuvre de mesures agro-environnementales d’un bon rapport
coût-efficacité – Guidelines for the design and implementation of cost-effective agrienvironmental policy measures.
Le rapport est divisé en deux parties. La première partie expose les objectifs
environnementaux poursuivis par ces politiques et la manière dont ils sont définis dans les
différentes mesures. La deuxième partie fait le point sur les évolutions intervenues dans les
mesures prises face aux problèmes environnementaux en agriculture dans les pays de
l’OCDE. Les mesures y sont examinées sous l’angle du type de mesure utilisé, en
s’appuyant sur la classification établie par l’Inventaire des mesures prises face aux
problèmes environnementaux en agriculture (Inventaire), sur la base de données ESP/ESC
de l’OCDE et sur sa documentation. Le résumé met en lumière les évolutions générales des
politiques, ainsi que les similitudes et les différences entre les approches adoptées par les
pays membres de l’OCDE.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
CIBLAGE DES POLITIQUES SUR LES PROBLÉMES ENVIRONNEMENTAUX EN AGRICULTURE – 13
Ciblage des politiques sur les problèmes environnementaux en agriculture
Les objectifs de la politique agroenvironnementale sont souvent faciles à cerner dans
les grandes lignes, mais difficiles à définir et à mesurer de façon précise. De plus, certaines
politiques ciblent plusieurs objectifs simultanément, soit parce que ces objectifs sont
interdépendants, soit parce que la modification d’une activité agricole peut avoir plusieurs
conséquences. La présente section tente de clarifier certaines de ces questions en jetant un
éclairage sur les principaux objectifs de la politique agroenvironnementale.
L’agriculture est le principal utilisateur de terres et d’eau dans la plupart des pays de
l’OCDE. Il s’ensuit que de nombreuses politiques accordent des paiements liés à
l’utilisation de certaines pratiques agricoles sur les terres agricoles (utilisation d’intrants,
technologie), à des affectations spécifiques des terres (conversion de terres arables en
prairies, pâturage extensif, couvert végétal) ou à la mise hors culture de terres (mise en
réserve de longue durée, conservation des terres, boisement des terres agricoles). De telles
politiques peuvent viser à améliorer, par exemple, la qualité des sols ou de l’eau, la
biodiversité et le paysage façonné par l’homme. Ce sont les conditions locales qui
détermineront le degré d’importance de ces objectifs. La réalisation de ces derniers
représente l’essentiel des politiques agroenvironnementales en termes de paiements
accordés ou de superficie incluse dans le programme.
Certaines mesures ciblent des régions spécifiques pour remédier à des problèmes
environnementaux spécifiques (ciblage spatial). C’est le cas, par exemple, des écosystèmes
dépendants de l’eau en Australie (Bassin de Murray-Darling), aux États-Unis (Grands Lacs)
ou au sein de l’UE, où la directive nitrates est appliquée dans les régions à haut niveau de
pollution et les régions de grande valeur aux plans de la biodiversité, du paysage et de
l’environnement qui ont été identifiées dans les États membres dans le cadre du projet
Natura 2000. De plus en plus, les programmes agroenvironnementaux sont appliqués à
l’intérieur d’un cadre obligatoire (niveau national, niveau de l’UE) qui établit les grands
principes directeurs, les mesures spécifiques étant définies et appliquées à des niveaux
administratifs inférieurs (niveau d’un État, niveau provincial). C’est le cas en Australie, au
Canada et aux États-Unis. Dans l’UE, les politiques sont mises en œuvre par les membres
(à l’intérieur du cadre communautaire obligatoire) et dans certains États, par des paliers
d’administration inférieurs (par exemple, les provinces, les régions ou les länder, ou même
au niveau local). Cette structure a été adoptée par des pays tels que l’Allemagne, l’Autriche,
l’Espagne, la France, l’Italie et le Royaume-Uni.
Les règlements et quelques autres mesures comme les permis négociables sont
généralement liés à un problème environnemental spécifique (utilisation d’une ressource),
par exemple la qualité des sols ou de l’eau ou la biodiversité.
Les objectifs environnementaux (et les résultats) ne sont définis et mesurables avec
précision que pour un nombre limité de programmes offrant des paiements
agroenvironnementaux. La plupart de ces paiements concernent des pratiques de gestion
spécifiques, bien définies et maîtrisées, qui visent à donner des résultats sur le plan
environnemental supérieurs à celui défini par le niveau de référence (par exemple le niveau
minimal de performance environnementale établi par la réglementation, ou les « bonnes
pratiques agricoles »). Dans la plupart des cas, les résultats de ces programmes sont définis
par la région où la pratique de gestion spécifique a été adoptée, qui peut être un indicateur
quelque peu grossier du respect du critère de qualité environnementale.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
14 – CIBLAGE DES POLITIQUES SUR LES PROBLÉMES ENVIRONNEMENTAUX EN AGRICULTURE
Protection et qualité des sols
Le principal problème de protection des sols est le risque d’érosion. Le risque d’érosion
résulte de l’action des forces naturelles (érosion due à l’eau, érosion due au vent) et des
pratiques culturales (mise en culture de sols fragiles, surpâturage, mauvaise prise en charge
des pratiques de conservation des sols par les agriculteurs, etc.). Le principal problème de
qualité des sols est la teneur du sol en matières organiques et le risque de contamination,
qui résulte de l’utilisation excessive ou inadéquate d’intrants chimiques en agriculture et
des retombées de pollution industrielle dans les sols, par exemple la contamination par des
métaux lourds (mais cette dernière sort du champ des politiques agroenvironnementales et
est traitée par la législation environnementale).
La question de l’érosion des sols est abordée essentiellement dans la réglementation
environnementale de base concernant les sols, notamment dans les bonnes pratiques
agricoles1 élaborées dans la plupart des pays de l’OCDE. De nombreux pays de l’OCDE
ont également développé des programmes promouvant des pratiques agricoles spécifiques
pour réduire le risque d’érosion des sols. Plus précisément, les principales pratiques
agricoles encouragées pour réduire le risque d’érosion des sols sont : les transferts de terres
arables en herbages, le pâturage extensif, le couvert végétal (principalement en période
hivernale), un travail du sol réduit ou nul. Certains pays utilisent des programmes qui
encouragent la mise hors production agricole des terres vulnérables. Le boisement des
terres agricoles est encouragé dans certains pays de l’OCDE. Mais, en termes de transferts
des terres, le boisement revêt une importance mineure (ou locale). Aux États-Unis, le
programme CRP de mise en réserve des terres fragiles est le programme agroenvironnemental le plus important en termes de dépenses budgétaires et de superficie
couverte. Initialement, le CRP avait pour principal objectif de lutter contre l'érosion des
sols mais, au fur et à mesure de son évolution, d'autres objectifs ont été rajoutés, notamment
l'amélioration de l'habitat et de la qualité de l'eau, la fixation du carbone et l'amélioration de
la qualité de l'air.
D’autres processus de dégradation des sols (compactage, acidification, contamination
toxique, sodicité et salinisation) concernent largement des régions spécifiques dans certains
pays et sont abordés à la fois par les exigences réglementaires et par les politiques conçues
et mises en œuvre au niveau régional (local). Outre les incitations financières accordées aux
exploitations, des dépenses budgétaires sont également prévues pour financer l’assistance
technique aux exploitations en vue de les aider à s’attaquer aux problèmes d’érosion des
sols.
Qualité de l’eau /protection de l’eau (y compris la réduction de la pollution)
Dans tous les pays de l’OCDE, un grand nombre de mesures prises face aux problèmes
agroenvironnementaux en agriculture se rapportent aux ressources en eau et à la qualité de
l’eau. Le problème de la qualité de l’eau est traité par un vaste ensemble de
réglementations. Ces réglementations concernent non seulement l’utilisation de l’eau et la
gestion des ressources hydriques mais également les réglementations strictes de l’utilisation
d’intrants potentiellement pollueurs tels que pesticides, engrais industriels et effluents
d’élevage (stockage, gestion et application sur le terrain) et les mesures de gestion des
terres destinées à empêcher les agents polluants d’atteindre les eaux de surface et/ou les
eaux souterraines.
1.
Les bonnes pratiques agricoles abordent également d’autres problèmes environnementaux tels
que la pollution de l’eau et la biodiversité.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
CIBLAGE DES POLITIQUES SUR LES PROBLÉMES ENVIRONNEMENTAUX EN AGRICULTURE – 15
Dans la plupart des pays de l’OCDE, la qualité de l’eau et la réduction de la pollution
de l’eau sont un problème majeur. Outre les exigences réglementaires mentionnées cidessus, tout un arsenal de mesures est mis en œuvre pour s’attaquer à ce problème. Le plus
souvent, il s’agit de mesures prévoyant des paiements en faveur d’une production agricole
utilisant peu de pesticides et d’engrais ― voire aucun ― (par exemple la production
extensive, la production intégrée et l’agriculture biologique), pratiquant le couvert
végétal et les zones tampons. Ces mesures sont appliquées principalement dans les pays
européens, et depuis peu au Japon et en Corée.
La directive Nitrates de l’UE définit les zones vulnérables aux nitrates dans les États
membres et fixe des lignes directrices pour déterminer la concentration maximale de
nitrates autorisée dans l’eau. En outre, les programmes d’action visant à mettre en œuvre la
directive font état des mesures à prendre afin que la quantité totale d’azote d’origine
animale (utilisation des effluents d’élevage comme engrais) n’excède pas 170 kg par
hectare de surface épandable. Les agriculteurs ont également l’obligation de s’assurer que
l’utilisation des engrais est bien équilibrée pour répondre aux besoins des cultures. Les
États membres de l’Union ont conçu et mis en œuvre des mesures agroenvironnementales
pour abaisser les pertes d’azote dans l’eau au-delà des exigences réglementaires.
L’utilisation réduite d’intrants chimiques, les transferts de terres arables en prairies
extensives (pâturages), le couvert végétal et la rotation des cultures sont les principaux
instruments mis en œuvre par les États membres pour réduire les nitrates dans l’eau. De
plus, la directive-cadre sur l’eau impose l’objectif d’atteindre le bon état des eaux en 2015.
En particulier, la directive-cadre sur l’eau stipule que des plans doivent être établis avant
2009 pour chaque bassin versant, qui comprendront les pressions et répercussions des
activités humaines ; les objectifs environnementaux ; et spécifieront les mesures à mettre en
œuvre pour atteindre ces objectifs, notamment les instruments territoriaux et la gestion du
fumier organique.
De nombreux pays membres de l’OCDE appliquent également une réglementation plus
stricte concernant l’utilisation d’intrants agricoles et les pratiques culturales dans les
régions d’une grande valeur pour la nature (comme les zones de captage de l’eau potable et
les réserves naturelles) ou les zones écologiquement vulnérables. Certains pays indemnisent
les agriculteurs de ces régions (pour le manque à gagner). Comme nous le mentionnons cidessus, de nombreuses mesures prises afin de régler le problème de la qualité de l’eau et de
la pollution de l’eau peuvent également avoir des effets positifs sur la qualité des sols, la
biodiversité et les paysages.
Nombre de pays de l’OCDE ont réglementé la quantité d’eau mise à la disposition des
irrigants (agriculture) et celle qui doit être réservée à la protection de l’environnement. En
sus des exigences réglementaires, un vaste ensemble d’instruments d’action liés à l’eau
sont utilisés dans les pays de l’OCDE. L’irrigation représente une part très importante de
l’utilisation de l’eau dans la plupart des pays de l’OCDE, et les prélèvements excessifs
d’eaux souterraines sont un sujet de préoccupation dans un grand nombre de régions, en
particulier dans les régions sèches d’Australie, d’Europe méridionale et des États-Unis.
Certaines administrations (l’Australie et certains États américains, par exemple) gèrent un
système de droits de prélèvement de l’eau et un système de permis et de contingents
négociables pour l’utilisation de l’eau.
Biodiversité
La diversité biologique (biodiversité) est la variabilité entre les organismes vivants et
les complexes écologiques dont ils font partie ; cela comprend la diversité à l’intérieur des
espèces, entre les espèces et des écosystèmes. Cette variabilité est la conséquence naturelle
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
16 – CIBLAGE DES POLITIQUES SUR LES PROBLÉMES ENVIRONNEMENTAUX EN AGRICULTURE
de l’évolution des organismes vivants dans le contexte des facteurs biotiques et abiotiques
de leur environnement. L’intervention humaine peut avoir une grande incidence sur la
biodiversité.
En Australie, en Nouvelle-Zélande et sur le continent nord-américain, entre autres, les
habitats prisés sont essentiellement associés à des espaces naturels, notamment des prairies,
terres humides, forêts primitives et bush, qui ont été, dans certains cas, menacés par le
développement de l’agriculture – aux États-Unis, par exemple, on estime que la conversion
des prairies et des terres humides en terres de culture a contribué au déclin d’un certain
nombre d’espèces rares. Certaines des politiques actuellement appliquées ont été conçues
pour corriger cette tendance, et la plupart sont appliquées dans des sites spécifiques.
La biodiversité agricole est dans une large mesure créée, entretenue et gérée par une
série de systèmes agraires. Les pays de l’OCDE utilisent toute une série de politiques et
d’approches pour concilier la nécessité de la production agricole en puisant dans les
ressources génétiques en plantes et bétail et celle de réduire les effets préjudiciables pour la
biodiversité, en particulier pour les habitats et les espèces sauvages.
Les politiques s’attaquant aux objectifs de diversité des espèces sauvages et de diversité
des écosystèmes sont plus marquées dans les pays européens. De fait, en Europe, nombre
de régions les plus prisées pour leur faune et leur flore sauvages tendent à être des habitats
semi naturels dans lesquels les espèces ont cohabité avec les pratiques agricoles
traditionnelles pendant des siècles. Ces habitats ont été soumis à la pression grandissante de
l’évolution des pratiques culturales ― notamment l’augmentation de la superficie des
champs, la moindre rotation des cultures et l’utilisation accrue d’engrais et de pesticides ou
encore la déprise des terres agricoles.
Les politiques mises en œuvre pour accroître ou préserver la biodiversité agricole
peuvent être regroupées selon trois niveaux de biodiversité agricole : (i) diversité génétique;
(ii) diversité des espèces et (iii) diversité des écosystèmes.

Diversité génétique. La plupart des pays de l’OCDE conduisent leurs activités de
conservation des ressources génétiques en plantes et animaux sous la forme d’une
conservation in situ (à la ferme, sur le terrain) ou ex situ (banques de gènes). En vertu du
Règlement sur le développement rural, la plupart des États membres de l’UE effectuent
des paiements pour la conservation des espèces de plantes cultivées et d’animaux
d’élevage menacées d’extinction, ou par tête d’espèce de bétail menacée de disparition.
Aux États-Unis, la conservation in situ est principalement une activité du secteur privé et
ne bénéficie d’aucune aide financière.

Diversité des espèces. Les politiques en la matière sont généralement ciblées sur les
espèces sauvages qui utilisent les terres agricoles comme habitat principal ― par
exemple, les populations d’espèces d’oiseaux nicheurs choisies qui dépendent des terres
agricoles pour leur nidification et leur reproduction. Les agriculteurs sont rémunérés pour
des pratiques agricoles adoptées volontairement qui contribuent à la préservation des
espèces sauvages sur les terres agricoles (par exemple, utilisation réduite d’intrants
chimiques, gestion extensive des herbages avec fauchage tardif, création et entretien de
bandes de terrains, haies, arbustes, etc.).

Diversité des écosystèmes – Les politiques élaborées pour atteindre les objectifs se
rapportant à la diversité des écosystèmes encouragent un schéma spécifique d’utilisation
des terres (l’utilisation extensive des pâturages dans la plupart des cas). Certaines de ces
politiques prévoient le changement de la vocation des terres agricoles (la conversion de
terres arables en pâturages ou la création de zones humides et de mares), alors que
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
CIBLAGE DES POLITIQUES SUR LES PROBLÉMES ENVIRONNEMENTAUX EN AGRICULTURE – 17
d’autres politiques favorisent la création d’habitats semi naturels sur des terres agricoles
(par exemple, espaces boisés et terres en jachère). La plupart de ces activités sont
considérées contribuer également à l’objectif paysage.
Paysage
L’objectif paysage va de spécifique à un site à très générique et est associé à différentes
séries de mesures. Il est mis en œuvre principalement dans les pays européens, au Japon et
en Corée, où les paysages sont façonnés par l’agriculture depuis des siècles. Les États
membres de l’UE et la Suisse accordent des paiements pour la construction, l’amélioration
et/ou le maintien d’éléments de paysages spécifiques (fixes) tels que les arbres (seuls ou en
rangées), haies, buissons, murs de pierre, mares et marais, etc. Dans la plupart des cas, ces
éléments contribuent également à la réalisation d’autres objectifs environnementaux tels
que la protection des sols et de l’eau et la biodiversité.
L’objectif paysage est également associé à des paiements destinés à financer des
modifications de l’utilisation des terres prenant la forme d’une sortie des terres agricoles
(boisement, espaces boisés agricoles, création ou réhabilitation de zones humides et de
mares) ou de modifications de l’utilisation des terres agricoles (conversion des terres
arables en prairies extensives, jachère verte et jachère florale). La Norvège associe
l’objectif paysage à un paiement général au titre de toutes les terres agricoles sous réserve
que les agriculteurs se conforment à de bonnes pratiques agricoles.
Changement climatique – pollution atmosphérique
Environ le quart des émissions acidifiantes totales de l’OCDE, 8 % de l’utilisation de
substances susceptibles d’épuiser la couche d’ozone et 8 % des gaz à effet de serre (GES)
ont été imputables aux activités agricoles sur la période 2002-04 (OCDE, 2008). Leur part
dans les émissions de polluants spécifiques de l’air est plus importante : 90 % des
émissions d’ammoniac d’origine anthropique, près de 75 % des émissions de bromure de
méthyle et, pour les GES, environ 70 % de l’oxyde d’azote et plus de 40 % du méthane.
L’apport de l’agriculture aux émissions de GES varie considérablement selon le pays
membre de l’OCDE ; en Nouvelle-Zélande, près de 50 % des émissions nationales de GES
sont attribuables à l’agriculture pastorale.
De nombreux pays adoptent des politiques pour inciter les agriculteurs à modifier leurs
pratiques agricoles, par exemple à modifier leurs méthodes d’élimination des déjections du
bétail et leurs pratiques de travail du sol, ce qui peut réduire les émissions de GES par unité
de volume produit et qui peut également avoir pour avantages conjoints de réduire les
émissions d’ammoniac et d’accroître le stockage du carbone dans le sol. La mise en œuvre
de ces pratiques a été, dans certains cas, imposée par des réglementations et soutenue par
des aides à l’investissement (stockage et gestion des effluents d’élevage), ou encouragée
par les pouvoirs publics par le biais de services de vulgarisation et par une aide financière
aux agriculteurs. D’autre part, ces pratiques peuvent également augmenter l’utilisation de
pesticides, avec des répercussions négatives sur l’environnement.
Les programmes incitatifs à une utilisation moins intensive des terres agricoles, à une
meilleure gestion de l’utilisation, en moindre quantité, d’engrais (voir ci-dessus)
contribuent également à réduire la pollution atmosphérique, les émissions d’ammoniac et
de GES au même titre que les programmes de mise hors production des terres agricoles
(boisement, programmes de conservation des terres, utilisation extensive des prairies). Ces
derniers contribuent également au piégeage du carbone.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
18 – MESURES PRISES FACE AUX PROBLÉMES ENVIRONNEMENTAUX EN AGRICULTURE
Mesures prises face aux problèmes environnementaux en agriculture
Tous les pays de l’OCDE ayant en commun l’objectif de progresser sur la voie de la
viabilité à long terme, l’amélioration des performances environnementales de l’agriculture
figure au premier rang de leurs priorités. Les différentes combinaisons d’instruments
d’action utilisées par les pays de l’OCDE pour atteindre leurs divers objectifs en matière
d’environnement sont le reflet de la démarche politique globale du secteur ; des problèmes
environnementaux spécifiques et de leurs liens perçus avec les activités agricoles ; de la
nature des droits de propriété liés à l’utilisation des ressources naturelles (terres, eau et
végétation) et des inquiétudes de la société liées aux problèmes environnementaux. De plus,
des mesures de « persuasion » sont destinées à changer les perceptions et priorités dans le
cadre de décision des agriculteurs en relevant le niveau de sensibilisation et de
responsabilité environnementales. De telles mesures peuvent prendre la forme de formation
ou de partage de connaissances et d’information, ainsi que de « persuasion morale » telle
que la pression de la société, la négociation, la menace d’action réglementaire ou de
représailles que ce soit de la part de clients ou de la société en général. Elles peuvent donc
encourager les exploitations agricoles à mettre au point et à respecter des codes de conduite
volontaires.
Une prise de conscience accrue du public, conjuguée à la multiplication des recherches
et des informations disponibles, s’est traduite au cours des dernières décennies par une
exigence croissante d'amélioration de la performance environnementale de l'agriculture
dans les pays de l'OCDE. Face à cette exigence, de nombreuses mesures ont été mises en
place depuis le milieu des années 80 pour s’attaquer aux problèmes environnementaux liés
à l’agriculture. Certaines de ces mesures ont visé spécifiquement le secteur agricole,
d’autres se sont inscrites dans des programmes nationaux plus larges de défense de
l’environnement affectant un grand nombre de secteurs, dont l’agriculture. Dans le présent
rapport, toutes ces mesures sont classées dans la catégorie générale des mesures agroenvironnementales. Les autres mesures susceptibles d’influer sur les résultats
environnementaux mais dont l’objectif premier est différent, comme les mesures de
régulation de l’offre, débordent du champ de cet inventaire.
Cette partie du rapport évoque brièvement quelques-unes des principales évolutions des
mesures agro-environnementales adoptées dans l'ensemble des pays de l'OCDE. Pour la
compilation de ces informations, l'Inventaire des mesures prises face aux problèmes
environnementaux en agriculture (ci-après dénommé « l'Inventaire ») de l'OCDE a été
amplement mis à profit, ainsi que d’autres sources disponibles tels que les chapitres par
pays des indicateurs agro-environnementaux (OCDE, 2008) et la Base de données sur les
instruments employés dans la politique de l’environnement, élaborée par la Direction de
l’environnement de l’OCDE. L’Inventaire a été établi pour collecter des informations et des
données sur les mesures agro-environnementales prises dans les pays de l'OCDE
(Encadré 1) et classe ces informations, entre autres, en fonction du type de mesure. Le
tableau 1 résume les grandes lignes des principaux types d’instruments de politique utilisés
dans les pays de l’OCDE.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
INSTRUMENTS ECONOMIQUES – 19
Tableau 1. Mesures prises face aux problèmes environnementaux en agriculture dans les pays de l'OCDE
Mesure / pays
AUS
CAN
EU
JAP
KOR
MEX
NZL
NOR
SWI
TUR
USA
Dispositions réglementaires
XXX
XXX
XXX
XXX
XXX
XXX
XXX
XXX
XXX
XXX
XXX
Écoconditionnalité
NA
NA
XXX
X
X
NA
NA
XX
XXX
NA
XXX
Paiements au titre des pratiques agricoles
X
X
XXX
X
X
X
X
XX
XXX
X
XX
Paiements pour mise en réserve des terres
NA
X
X
NA
NA
X
NA
NA
X
NA
XXX
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
NA
NA
X
NA
NA
NA
NA
X
NA
NA
X
Droits/permis négociables
X
NA
X
NA
NA
NA
NA
NA
NA
NA
X
Assistance techniques/vulgarisation
XX
XX
X
X
X
X
XX
X
X
X
XX
Mesures à l'échelon local
X
X
NA
NA
NA
NA
X
NA
NA
NA
NA
Paiements au tire du capital fixe
Taxes/redevances environnementales
NA – pas appliqué ou marginale; X – importance faible; XX – importance moyenne; XXX – importance haute.
L'importance des mesures dans ce tableau est liée à la panoplie des instruments utilisés dans le pays en question. On ne peut pas
utiliser ces niveaux d'importance pour faire une comparaison entre les pays pour une mesure spécifique.
Encadré 1. Mesures prises face aux problèmes environnementaux
en agriculture
L’Inventaire doit être considéré dans le contexte des travaux de l’OCDE sur la réforme des politiques agricoles et
le développement durable et donc comme un complément aux bases de données de l’Organisation sur les politiques
de soutien à l’agriculture et sur les indicateurs agro-environnementaux. Les mesures englobées dans l’Inventaire
couvrent un large éventail de mesures prises face aux problèmes environnementaux qui se posent dans le secteur
agricole. Elles se ventilent en :
• mesures agricoles dont l’objectif premier est d’obtenir des résultats environnementaux ;
• mécanismes liant les programmes généraux de soutien à l’agriculture à des conditions écologiques ; et en
• mesures environnementales à caractère général ayant un impact significatif sur l’agriculture.
Il convient de souligner que d’autres mesures agricoles ou macroéconomiques influent également sur l’impact
global (positif ou négatif) de l’agriculture sur l’environnement – soit directement, soit indirectement – mais ces mesures
n’entrent pas dans le champ de l’Inventaire, même si elles sont pertinentes pour l’évaluation des politiques. Toute la
panoplie des politiques agricoles donnant lieu à des transferts en direction des agriculteurs est décrite et analysée
dans le rapport annuel Suivi et évaluation des politiques agricoles, et figure dans la base de données des ESP.
Instruments économiques
Les instruments économiques ont une incidence sur les coûts et avantages des
différentes actions que peuvent engager les agriculteurs, l'effet recherché étant d'influencer
les comportements d'une manière qui améliore les résultats environnementaux. En règle
générale, ces instruments impliquent soit un transfert monétaire – c’est-à-dire des
paiements (dont des bonifications de crédits ou des allégements fiscaux) et des
redevances/taxes — soit la création de nouveaux marchés, autrement dit des droits ou
permis négociables accordés à des fins de protection de l'environnement.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
20 – INSTRUMENTS ÉCONONOMIQUES
Paiements aux agriculteurs
La plupart des pays de l'OCDE accordent des paiements monétaires (notamment des
transferts implicites tels qu'allégements fiscaux et bonifications d’intérêts) aux exploitants
agricoles et autres propriétaires terriens pour remédier aux problèmes environnementaux
(par exemple lutte contre la pollution) et/ou promouvoir l’offre d'aménités
environnementales associées à l’agriculture. Toutefois, les montants relatifs de ces
paiements (à savoir leur part de la dépense budgétaire totale consacrée à l’agriculture ou du
total des transferts en faveur des agriculteurs) varient. La plupart de ces paiements sont
effectués dans le cadre de programmes mis en œuvre volontairement. Mais il en est
également qui sont effectués aux agriculteurs (principalement les subventions à
l’investissement) pour les aider à respecter les réglementations environnementales. Dans la
pratique, de nombreux paiements agro-environnementaux tendent à être liés à la terre ou à
d'autres facteurs de production. Tandis que les paiements directement liés aux résultats
environnementaux – comme « l'amélioration du paysage » ou « une plus grande
diversité » – sont rares, certain pays commencent à développer des paiements basés sur des
résultats environnementaux plus liés aux pratiques agricoles (par exemple en France un
paiement est lié à la réduction du montant des pesticides utilisés).
Des différences existent aussi concernant le mode d’établissement du niveau des
paiements : à la suite d’un appel d’offres (adjudication), sur la base de taux fixes établis
pour une région ou pour l’ensemble du territoire national, ou d’un pourcentage fixe des
coûts d’investissement. En règle générale, l’idée est de rembourser les agriculteurs pour les
coûts de mise en conformité calculés sur la base du manque à gagner, en ajoutant parfois un
élément incitatif. Dans bon nombre de cas, les programmes comportent aussi un volet
formation et assistance technique pour aider les agriculteurs à entreprendre des activités
ciblées.
Un grand nombre de pays de l’OCDE proposent aux agriculteurs, sur une base
volontaire, des paiements pour les encourager à mettre en œuvre des pratiques agricoles
plus respectueuses de l’environnement. En particulier, l’Union européenne, la Norvège, la
Suisse et les États-Unis ont développé l’utilisation des paiements agro-environnementaux
dans la panoplie des mesures utilisés.
Le tableau 2 présente les tendances de l’indice des paiements agroenvironnementaux
nominaux dans l’Union européenne, en Norvège, en Suisse et aux États-Unis. Il convient
de souligner que ces données comprennent uniquement les mesures agroenvironnementales
qui prévoient des paiements pour les exploitations agricoles. Comme la panoplie
d’instruments d’action utilisés pour traiter les questions environnementales dans
l’agriculture varie d’un pays à l’autre, l’analyse du niveau et de la structure des paiements
agroenvironnementaux devrait être considérée dans cette perspective plus large. Cela
signifie que le niveau des paiements agroenvironnementaux ne représente pas l’ensemble
des efforts réalisés par les pays pour atteindre leurs objectifs environnementaux liés à
l’agriculture. Des pays comme la Norvège et la Suisse disposent d’importantes obligations
réglementaires pour améliorer la performance. Cela signifie que le niveau des paiements
agroenvironnementaux ne représente pas l’ensemble des efforts réalisés par les pays pour
atteindre leurs objectifs environnementaux liés à l’agriculture. Par exemple, en Suisse
jusqu’en 1998, la plus grande part des paiements agroenvironnementaux bénéficiait à la
production intégrée. Depuis 1999, ces paiements ont été abolis et les exigences
réglementaires de la production intégrée sont obligatoires pour tous les paiements directs
(écoconditionnalité). Toutefois, ces paiements ne sont pas inclus dans les ―paiements
agroenvironnementaux‖. Cette modification de politique se traduit par une forte chute des
paiements agroenvironnementaux en 1999.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
INSTRUMENTS ECONOMIQUES – 21
Tableau 2. Total des paiements agroenvironnementaux1 dans certains pays de l’OCDE, 1996-2008
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
UE272
EUR
1996=100
3004
100
3817
127
3931
131
4390
146
5623
187
5828
194
5250
175
5133
171
5527
184
6118
204
6525
217
5620
187
6809
227
Norvège
NOK
1996=100
923
100
922
100
994
108
1 043
113
1 071
116
1 001
108
1 198
130
683
74
695
75
712
77
874
95
966
105
998
108
Suisse3
CHF
1996=100
605
100
721
119
689
114
177
29
184
30
193
32
203
34
213
35
224
37
231
38
233
39
239
40
245
40
États-Unis
USD
1996=100
2 690
100
2 731
102
3 030
113
2 676
99
2 751
102
2 964
110
3 501
130
4 093
152
4 550
169
4 911
183
4 946
184
4 524
168
4 876
181
1. Ce tableau présente les paiements agroenvironnementaux octroyés en soutien aux exploitants agricoles qui mettent en œuvre des
pratiques agricoles conçues pour atteindre des objectifs environnementaux spécifiques qui vont au-delà des exigences de la
réglementation environnementale. Le soutien à l’agriculture lié au respect des réglementations (écoconditionnalité) et les paiements
aux zones défavorisées ne sont pas inclus ici en tant que paiements agroenvironnementaux (l’examen des paiements accordés aux
zones défavorisées qui peuvent être considérés comme des paiements agroenvironnementaux est en cours au sein des pays de
l’OCDE dans le contexte du projet sur l’Inventaire).
2. UE15 en 1996-2003; UE25 en 2004-06; UE27 à partir de 2007.
3. En Suisse jusqu’en 1998, la plus grande part des paiements agroenvironnementaux bénéficiait à la production intégrée. Depuis
1999, ces paiements ont été abolis et les exigences réglementaires de la production intégrée sont devenues obligatoires pour tous
les paiements directs (écoconditionnalité). Toutefois ces paiements ne sont pas inclus dans les paiements
« agroenvironnementaux ». Cette modification de politique se traduit par une forte chute des paiements agroenvironnementaux en
1999.
Source : OCDE, base de données des ESP et des ESC, 2009.
Les sections ci-dessous présentent les principaux types de programmes agroenvironnementaux de paiements aux exploitations agricoles, classés selon les catégories
utilisées dans l’Inventaire.
Paiements au titre des pratiques agricoles
Les paiements au titre des pratiques agricoles sont des mesures accordant des transferts
monétaires annuels (y compris les transferts implicites tels que les allégements fiscaux et
les bonifications de crédit) aux agriculteurs pour les inciter à mettre en œuvre des pratiques
agricoles plus respectueuses de l'environnement au-delà de celles requises par la
réglementation et/ou définies comme étant de bonnes pratiques agricoles. Ces paiements
sont pratiqués dans la plupart des pays européens de l’OCDE (tous les États membres de
l’UE, la Norvège et la Suisse) et aux États-Unis. Ces dernières années, ils ont été introduits
au Canada, au Japon et en Corée. Le tableau 3 donne un aperçu général des paiements agroenvironnementaux mis en œuvre dans les pays de l’OCDE en 2008.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
22 – INSTRUMENTS ÉCONONOMIQUES
Tableau 3. Paiements agroenvironnementaux mis en œuvre dans les États membres de l'OCDE en 2008
Programme/Pays
Paiements au titre des pratiques agricoles
Ammélioration des terres (chaulage, prev. de l'érosion)
Paiements au titre de la réduction des nitrates
Plan de gestion des élements nutritif
Production extensive des cultures
Agriculture biologique
Production integré de vin, fruits et légumes
agriculture integré
Méthodes de cultivation traditionnelles
Travail réduit du sol, désherbage mécanique
Rotation des cultures
Protection biologique des plantes
Engrais verts
Mise en réserve/jachère verte
Cultures dérobées, couvert végetal/hivernal
Gestion extensive de toutes les terres
Gestion extensive des herbages (pâturages/prairies)
Conversion des terres arables en herbages
Herbages/biodiversité/habitats
Biodiversité - races locales
Biodiversité - espeèces locales et variétés de cultures
Entretien des zones humides et des mares 5
Zones écologiquement sensibles/ vulnérables, protégées
Brise-vent/zone tampons
eléments de paysage/ aménités
Maintien et amélioration de la couverture végétale des sols
Conservation de l'eau
Economies d'énergie sur l'exploitation
Paiements au titre de la mise en réserve des terres
Mise en réserve sur le long terme
Boisement
Conversion des terres agricoles en zones humides et mares
Conversion des pâturages en végetation pérenne
AUT
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X
AUS1 BEL2 CAN
X
X
X
X
X
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X
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IRL
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JAP KOR
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UK4
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X
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X
X
1.
En Australie, au Canada et en Nouvelle Zélande les paiements directs au fermiers sont peu utilisés (si ils sont appliqués il s'agit des paiements transitoires) et
la plus grande partie du soutien aux programmes agri-environnementaux est procuré sous la forme des services généraux.
2.
En Belgique seulement les programmes utilisés dans la région des Flandres sont reportés.
3.
Pour la Finlande, la Grèce et les Pays-Bas les informations concernant 2008 ne sont pas disponibles et les programmes correspondent aux programmes
appliqués en 2000-06.
4.
Pour le Royaume-Uni seulement les programmes utilisés en Angleterre sont reportés.
5.
En Espagne les paiements pour la qualité de l'eau sont inclus dans cette ligne.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
INSTRUMENTS ÉCONONOMIQUES – 23
L'Union européenne cofinance avec ses États membres un vaste ensemble de
programmes de paiements agro-environnementaux au titre des pratiques agricoles
dans le cadre d’une politique mise en place dés 1985 en vertu du Règlement
N° 797/85 puis élaborée en 1992 en vertu du Règlement agro-environnemental
(N° 2078/92) et ultérieurement intégrée au Règlement sur le développement rural
(N° 1257/99) puis, à compter de 2007, au Règlement (CE) N° 1698/2005 (encadré 2).
Encadré 2. Paiements agro-environnementaux dans l'Union européenne
En 1992, les États membres de l’UE ont dû mettre en œuvre des programmes de paiements agroenvironnementaux, en vertu du Règlement agro-environnemental (N° 2078/92). Ces règlements ont
fourni le cadre principal à l’intérieur duquel les programmes de paiements agro-environnementaux de
l’Union européenne ont été élaborés dans chaque État membre. Bien que la mise en œuvre des
programmes soit obligatoire au niveau des États membres, les agriculteurs ont le choix de continuer leurs
pratiques agricoles normales ou de participer – habituellement par contrat – à des programmes
particuliers mises en œuvre par les états membres.
En 2000, ces mesures ont été intégrées à d’autres mesures de développement rural dans le cadre du
Règlement sur le développement rural (N° 1257/99). Le Règlement sur le développement rural
(N°1257/99) a précisé le cadre de mise en œuvre des programmes agro-environnementaux dans les
États membres de l’UE ; toutefois, les grands principes régissant l’élaboration de ces programmes sont
demeurés en grande partie inchangés. Les États membres de l’UE ont adopté un large éventail de
programmes agro-environnementaux qui sont souvent mis en place à différents niveaux administratifs
(national, infranational et régional).
Les programmes agro-environnementaux doivent permettre de s’assurer des avantages
environnementaux allant au-delà de ceux obtenus par la simple application de « bonnes pratiques
agricoles » (définies comme des niveaux de qualité environnementale qui devraient être atteints aux frais
de l’agriculteur). Souvent, les exploitants agricoles peuvent choisir des activités particulières à partir d’un
« menu » complémentaire de programmes. Les taux des paiements sont calculés sur la base des coûts
supplémentaires supportés par les agriculteurs pour entrer dans ces activités et du manque à gagner en
résultant. Les paiements sont effectués aux agriculteurs en fonction des engagements pris en matière
environnementale, le soutien se fondant sur la superficie de l’exploitation à laquelle s’appliquent les
engagements agro-environnementaux. En général, les programmes étaient d’une durée minimum de
5 ans, à l’exception des mises hors culture à long terme, qui portent sur une période d’au moins 20 ans.
La Communauté cofinance les programmes à hauteur de 75 % des coûts dans les régions de l’Objectif 1
(définies comme des régions peu développées) et à hauteur de 50% des coûts dans les autres régions.
Pour la période 2007-13, le Règlement (CE) N°1974/2006 de la Commission du 15 décembre 2006 fixe
les modalités d’application du Règlement (CE) N° 1698/2005 du Conseil concernant le soutien au
développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER). Pour
l’axe 2, ce règlement définit à sa partie (a) les mesures ciblées sur l’utilisation durable des terres
agricoles via :
i) les paiements aux agriculteurs des zones de montagne visant à compenser les handicaps naturels,
ii) les paiements aux agriculteurs des zones, autres que de montagne, souffrant de handicaps,
iii) les paiements Natura 2000 et les paiements liés à la directive 2000/60/CE,
iv) les paiements agro-environnementaux,
v) les paiements en faveur du bien-être des animaux,
vi) l’aide aux investissements non productifs;
A sa partie (b), qui traite de l’utilisation durable des terres forestières, le règlement prévoit des
paiements au titre de :
i) l’aide au premier boisement de terres agricoles, et
ii) l’aide à la première installation de systèmes agroforestiers sur des terres agricoles.
Le graphique 1 donne un aperçu de la distribution des paiements du FEADER dans les pays
membres et notamment la part des paiements agro-environnementaux.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
24 – INSTRUMENTS ÉCONOMIQUES
Graphique 1. Distribution des dépenses au titre du FEADER par axe et par mesure en 2008
%
Autres que axes 1 et 2
Axe 1
Autres paiements de l'axe 2 aux agriculteurs
Autres paiements forestiers
Boisement
Payments dans des zones à handicaps
Paiements agroenvironnementaux
100
90
80
70
60
50
40
30
20
10
0
UE27 : représente les 27 États membres depuis 2007.
Source : Commission européenne, dépenses FEADER en 2008
Parmi ces mesures, les plus importantes sont les paiements destinés à soutenir
l’adoption de pratiques agricoles utilisant moins d’intrants. Au milieu des années 90, la
plupart des États membres de l’UE avaient introduit toute une variété de programmes
nationaux ou régionaux pour soutenir la production agricole biologique. Ces dispositifs
accordent généralement aux agriculteurs un soutien fondé sur la superficie, d’une durée
d’au moins cinq ans, pour les encourager à passer d’une agriculture traditionnelle à une
agriculture biologique. La plupart des États membres accordent également des
paiements annuels réguliers à l’agriculture biologique au-delà de la période initiale de
conversion.
Les États membres de l’UE mettent également en œuvre toute une variété de
programmes de paiements pour encourager d’autres formes de pratiques agricoles
utilisant moins d’intrants et/ou plus respectueuses de l’environnement. Ces pratiques
englobent, par exemple, une production intégrée et des programmes visant à promouvoir
la culture extensive (faible utilisation de fertilisants et de pesticides) et une gestion
extensive des pâturages (restrictions sur la consommation d’engrais et faible taux de
chargement en bétail, prairies extensives assorties de restrictions visant les pratiques de
fauche).
La plupart des États membres de l'UE accordent aussi des paiements agroenvironnementaux au titre des pratiques agricoles, ciblés sur des objectifs de
biodiversité et de paysage de culture. Ces programmes sont soit appliqués à l’ensemble
du territoire, soit ciblés sur des zones spécifiques dans lesquelles la possibilité d’obtenir
les résultats souhaités est grande. Au Royaume-Uni, par exemple, dans le cadre du
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
INSTRUMENTS ÉCONONOMIQUES – 25
Environmentally Sensitive Areas Scheme, programme de protection de l'environnement
dans les zones écologiquement sensibles (ZES), des paiements incitatifs à l’hectare sont
accordés aux termes de contrats de dix ans, aux agriculteurs qui adoptent des pratiques
agricoles de nature à préserver et mettre en valeur des zones particulièrement prisées
pour leurs paysages, leur faune et leur flore sauvages ou leur intérêt historique. En
Suède, certains de ces programmes sont proposés dans des régions spécifiques et, pour
des raisons d’ordre budgétaire, le soutien va aux projets offrant le plus d’avantages au
plan de l’environnement.
Il existe également toute une variété de programmes de paiements au titre du
Règlement sur le développement rural dans un certain nombre d’États membres de l’UE
pour encourager les pratiques agricoles permettant de préserver des superficies cultivées
spécifiées (Portugal, Suède et Italie, par exemple), des races animales/des variétés de
plantes cultivées rares (ou menacées d’extinction), ou d’autres éléments de la flore et de
la faune (dans la plupart des pays de l’UE). Pour éviter l’érosion des sols, certains pays
accordent une aide à la conversion de terres arables en herbages extensifs (pâturages ou
prairies). D’autres pays (Belgique, France, Finlande, Italie et Suède) accordent des
paiements pour des cultures dérobées ou pour un couvert végétal/hivernal.
Dans la plupart des États membres de l’UE, les programmes prévoyant des
paiements au titre de pratiques agricoles spécifiques sont proposés sur une base
volontaire aux agriculteurs qui peuvent choisir l’association de ces pratiques qui leur
convient et recevoir les paiements correspondants. Toutefois, certains pays (Finlande,
Irlande, par exemple) ont mis en place des dispositifs de base faisant obligation aux
agriculteurs de se conformer à un ensemble de pratiques requises par ces dispositifs
(5 mesures de base + une optionnelle, en Finlande ; 11 mesures de base en Irlande) pour
obtenir le paiement.
Les politiques susmentionnées renvoient principalement aux politiques
agroenvironnementales s’inscrivant dans le cadre des programmes de développement
rural mis en œuvre durant la période 2000-06. En 2007, la mise en œuvre du programme
de développement rural pour la période 2007-13 a débuté (bien que les paiements aient
été effectués pour des programmes adoptés précédemment), et tous les plans de
développement rural (PDR) ont été approuvés avant novembre 2008. Des programmes
offrant des paiements agroenvironnementaux aux exploitations agricoles (au titre de
l’axe 2 du Règlement sur le développement rural [RDR]) ont été élaborés dans tous les
États membres de l’UE, bien que l’importance de ces paiements dans le PDR varie selon
le pays (pour obtenir des précisions, voir le chapitre 5 sur l’élaboration de la politique de
l’UE, graphique 5.8). Les États membres de l’UE continuent de développer les mesures
mises en place durant les périodes de programmation antérieures et d’introduire de
nouvelles mesures ; cela vaut tout particulièrement pour les nouveaux États membres,
où les mesures agroenvironnementales n’étaient pas obligatoires pendant la période
2004-06. En plus des paiements agroenvironnementaux proprement dits, l’axe 2 offre
également un soutien spécifique consistant en un cofinancement des mesures Natura
2000 visant à préserver la biodiversité de la plupart des sites les plus précieux et les plus
menacés, et des mesures liées à la Directive-cadre dans le domaine de l’eau (Directive
2000/60/CE) ; l’axe 2 prévoit également une aide aux investissements non productifs
pour l’amélioration de l’environnement et de la campagne.
Des paiements au titre des pratiques agricoles ont également été mis en place dans
d’autres pays européens. En Suisse, la loi fédérale sur l'agriculture de 1996 (modifiée
périodiquement durant une période de quatre ans) prévoit toute une série de paiements
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
26 – INSTRUMENTS ÉCONOMIQUES
calculés sur la base des différentes normes en matière de pratiques agricoles. La plupart
de ces paiements continuent d’être appliqués en vertu de la politique agricole pour la
période 2008-11. Dans le cadre de programmes volontaires, des paiements sont accordés
aux agriculteurs pour des biotopes spécifiques, tels que herbages extensifs, jachères
florales, arbres fruitiers haute tige et haies. Des paiements sont également prévus pour le
soutien de la culture extensive de céréales et d’oléagineux, ainsi que de l'agriculture
biologique. En 1991, la Norvège a introduit des paiements destinés à encourager
l'agriculture biologique et actuellement elle offre un paiement à l’hectare pour la
conversion à l'agriculture biologique, ainsi que des paiements permanents à la superficie
et par tête de bétail aux exploitants qui font de l'agriculture biologique. Sur la période
1994-2001, des paiements ont également été accordés pour soutenir l’élevage laitier de
montagne, afin de contribuer au maintien du paysage cultural par l’estivage. Depuis
1994, dans le cadre de paiements au titre de la conservation des sols modifiés, un
paiement à l’hectare est accordé pour que les sols sujets à l’érosion ne soient pas
cultivés en automne, pour que des cultures de couverture soient plantées dans les
champs de céréales et que des bandes soient mises en herbe le long des cours d’eau. En
2004, la Norvège a introduit un système général de paiement au titre de la protection des
paysages : ce paiement à taux fixe est accordé par hectare de terres agricoles sous
réserve que l’agriculteur applique de bonnes pratiques agricoles. L’Islande accorde des
paiements aux agriculteurs qui participent aux dispositifs de conservation des sols et
forestiers destinés à empêcher la désertification et l’érosion des sols (envahissement du
sable) et à la restauration des terres dégradées.
Les États-Unis accordent, dans le cadre d’un large éventail de programmes, des
paiements fondés sur un partage des coûts et sur des éléments incitatifs, pour soutenir
les pratiques agricoles respectueuses de l’environnement adoptées de façon volontaire.
Certains de ces programmes sont appliqués à l’ensemble du territoire, tandis que
d’autres visent des zones spécifiques posant un problème particulier sur le plan de
l’environnement ou des ressources naturelles. La plupart de ces programmes financent
aussi l'assistance technique nécessaire aux exploitants pour les aider à développer et
mettre en œuvre les programmes. Le Programme en faveur de la qualité de
l'environnement (EQIP - Environmental Quality Incentives Program) a été institué en
vertu de la loi agricole (Farm Act) de 1996 (modifiée par le FSRI Act de 2002 et
maintenue par le FCEA de 2008) pour offrir une aide financière et technique aux
exploitants agricoles afin de les encourager à adopter des pratiques respectueuses de
l'environnement dans les zones écologiquement sensibles, dans le but essentiellement de
réduire les problèmes de sols et de ressources en eau. Le programme EQIP prévoit une
aide à hauteur de 75 % (mais plus généralement de 50 %) du coût de certaines pratiques
de conservation, comme la gestion des éléments nutritifs, la gestion des effluents
d’élevage, la lutte intégrée contre les ravageurs des cultures, la gestion de l'eau
d'irrigation et la gestion de l'habitat des espèces sauvages (60 % du budget du
programme sont consacrés à des entreprises liées à l’élevage). Les exploitants
bénéficient de contrats d'une durée de 1 à 10 ans. Le Programme de conservation et de
protection (CSP – Conservation Security Program), qui s’inscrit dans la FSRI Act de
2002, est opérationnel depuis 2004. Ce programme volontaire accorde des paiements
aux producteurs pour les inciter à adopter ou conserver un large éventail de pratiques
agricoles visant une ou plusieurs ressources qui constituent des sujets de préoccupation,
telles que les sols, l’eau ou l’habitat des espèces sauvages. Il offre un accès équitable
aux prestations à tous les producteurs, quelle que soit la taille de leur exploitation, leurs
productions ou leur situation géographique. Contrairement à d’autres programmes de
conservation, le CSP est axé sur des activités qui ont déjà tenté de remédier aux
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
INSTRUMENTS ÉCONONOMIQUES – 27
problèmes environnementaux tout en maintenant les terres en production. Jusqu’en
2008, ce programme offrait trois niveaux de participation qui différaient par la durée des
contrats et le montant total des paiements en fonction de la quantité de traitements et de
la surface de l’exploitation retenue pour ce programme. Des limites de paiement par
exploitation ont été établies pour les trois niveaux. Les autres programmes accordant des
paiements au titre des pratiques agricoles sont le Programme pour les eaux souterraines
et superficielles (GSWP – Ground and Surface Water Program), le Programme de
protection des terres agricoles (FPP – Farmland Protection Program) et le Programme
de mise en réserve de pâturages (GRP – Grassland Reserve Program).
La loi agricole de 2008 (FCEA) assure la poursuite des programmes de
conservation environnementale amorcés en vertu de la loi agricole de 1985. La
FCEA de 2008 a autorisé de nouveau presque tous les programmes de conservation
visés par la loi agricole de 2002, a augmenté les dépenses de près de 8 milliards USD,
a modifié plusieurs programmes et a créé plusieurs programmes de conservation. La
FCEA de 2008 poursuit le changement d’orientation en matière de conservation, c’està-dire que les autorités mettent l’accent, non plus sur la démobilisation des terres
agricoles, mais plutôt sur la protection des terres exploitées en augmentant le budget
du programme EQIP et du nouveau Programme de gestion de la conservation
(Conservation Stewardship Program [CSP], qui a remplacé le Conservation Security
Program).
Au Canada, les principaux programmes agroenvironnementaux sont mis en œuvre
en vertu du Cadre stratégique pour l’agriculture (CSA) en vigueur sur la période 200308. Ces programmes sont financés (ou co-financés) sur le budget fédéral. Le
Programme national de gérance agroenvironnementale (PNGA) prévoit des paiements
au titre de pratiques agricoles spécifiques et de l’adoption des standards techniques.
Pour la période 2003-08, le montant des dépenses budgétaires a été de 216 millions
CAD et quelque 49 000 contrats ont été signés pour des pratiques de gestion
bénéfiques (PGB). Pour bénéficier du financement dans le cadre du PNGA, les
participants doivent effectuer une évaluation des risques agroenvironnementaux
approuvés par les autorités. Le Programme de couverture végétale du Canada prévoit
également une assistance financière et technique aux agriculteurs et se focalise sur les
composants de conversion des terres, les zones critiques, l’assistance technique et les
brise-vent (les dépenses à ce titre sont passées de 2 millions CAD en 2003/04 à
27.6 millions CAD en 2007/08). Le Programme national d'approvisionnement en eau
(PNAE) fournit une assistance technique et financière aux producteurs canadiens (sous
forme de remboursement des dépenses des activités achevées) pour les aider à
développer, protéger et valoriser l’approvisionnement en eau à long terme des terres
agricoles (le montant dépensé est passé de 5 millions CAD en 2003/04 à 32.1 millions
CAD en 2007/08).
Au Mexique, un programme en faveur de l’agriculture durable et la
reconversion productive dans les zones de catastrophes naturelles récurrentes
accorde des paiements à la superficie et par tête de bétail aux agriculteurs qui
présentent un projet de développement rural durable et/ou un projet de reconversion
productive. En 1999, la Corée a introduit des paiements directs au profit des
agriculteurs qui suppriment ou limitent l’utilisation d’engrais et de pesticides dans les
zones de conservation de l’eau potable. En 2002, ce programme a été révisé et
l’application de paiements incitatifs a été étendue à l’ensemble du pays. Trois
dispositifs de base sont proposés aux agriculteurs qui adhèrent au programme sur une
base volontaire (agriculture biologique : ni pesticides, ni engrais chimiques ;
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
28 – INSTRUMENTS ÉCONOMIQUES
agriculture sans pesticides : aucune utilisation de pesticides, utilisation réduite
d’engrais chimiques ; et agriculture à faibles apports agrochimiques : utilisation
réduite de pesticides et d’engrais chimiques). En 2004, la Corée a introduit un système
de paiements destinés à soutenir les pratiques d’élevage respectueuses de
l’environnement, qui sont accordés aux exploitants appliquant des procédures
spécifiques de gestion des effluents d’élevage et limitant le chargement en bétail. Des
paiements supplémentaires par exploitation sont accordés aux exploitants qui gèrent de
façon appropriée (les éléments de) l’architecture paysagère aux alentours des
installations d’élevage. En 2007, le Japon a introduit un système de paiements directs
pour pratiques agricoles respectueuses de l’environnement dont bénéficient les
agriculteurs qui s’engagent à réduire l’utilisation d’engrais chimiques et de pesticides
de moitié par rapport aux pratiques agricoles traditionnelles.
En Australie, les activités du Fonds pour le patrimoine naturel (NHT – National
Heritage Trust) ont été prolongées de 2002/03 à 2006/07 et les 23 anciens programmes
du Fonds ont été simplifiés et regroupés en quatre grands programmes : (i) Programme
de protection des terres (Landcare) : mettre un terme à la dégradation des terres et
promouvoir une agriculture durable ; (ii) Programme de protection du bush (Bushcare)
– conserver et restaurer l’habitat de la flore et de la faune indigènes australiennes
uniques en leur genre et indispensables à la protection des paysages ; (iii) Programme
de protection des cours d’eau (Rivercare) – améliorer la qualité de l’eau et l’état
écologique des réseaux hydrographiques et des zones humides ; et (iv) Programme de
protection des côtes (Coastcare) – protéger les bassins versants côtiers, les
écosystèmes et le milieu marin. Les programmes Landcare, Bushcare et Rivercare
comportent des mesures destinées à encourager l’adoption de pratiques agricoles
durables, mises en œuvre par l’intermédiaire d’activités collectives.
Ces programmes ont pris fin en juin 2008 et ont été remplacés par une nouvelle
initiative de l’État, Caring for our Country, qui a pour objectif un environnement sain,
mieux protégé, bien géré et résistant, qui réunit les fonctions écologiques essentielles
dans le contexte des changements climatiques. Caring for our Country est un
programme intégré qui vise à promouvoir l’investissement dans une optique de
rentabilité, avec des résultats et des priorités clairement définis, et un meilleur contrôle
des comptes. Un budget initial de 2.25 milliards AUD a été établi pour les cinq
premières années (1er juillet 2008 au 30 juin 2013). Les résultats stratégiques seront
liés à six priorités nationales :

Système de réserves nationales – contribuer à conserver les paysages, les plantes
et les animaux distinctifs de l’Australie en créant un vaste système de réserves
adaptées et représentatives dans toute l’Australie.

Biodiversité et icônes nationales – protéger les sites du patrimoine mondial,
s’attaquer aux mauvaises herbes et aux animaux ravageurs qui menacent la
biodiversité, et mieux protéger au niveau national les espèces animales et
végétales et les communautés menacées.

Environnements côtiers et habitats aquatiques critiques – mettre en œuvre les
mesures de sauvetage de la grande barrière de corail, protéger et réhabiliter des
zones pour des espèces migratoires gravement menacées, améliorer la qualité de
l’eau déversée dans les environnements côtiers, et protéger les zones humides
inscrites sur la liste de Ramsar.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
INSTRUMENTS ÉCONONOMIQUES – 29

Pratiques agricoles durables – s’appuyer sur les succès du programme Landcare
pour encourager l’adoption de pratiques agricoles qui continuent à maintenir et
améliorer la production et fournissent des services relatifs à l’écosystème pour
l’ensemble de la communauté.

Gestion des ressources naturelles dans les zones reculées et septentrionales de
l’Australie – assurer de meilleurs résultats en matière d’environnement et de
ressources naturelles dans les zones reculées et septentrionales de l’Australie,
notamment faire participer les groupes autochtones en augmentant les zones
autochtones protégées et en donnant un emploi à des éleveurs autochtones
supplémentaires.

Qualifications, connaissances et engagement au niveau des collectivités locales
– investir dans les qualifications et les connaissances des autochtones, des
volontaires et des collectivités locales dans leur ensemble pour leur permettre de
s’associer plus efficacement avec des organisations régionales et autres pour
entreprendre des changements à l’échelle du paysage.
Paiements au titre de la mise en réserve de terres agricoles
Les programmes entrant dans cette catégorie prévoient des paiements incitatifs
pour encourager la mise hors production de terres et leur conversion à des fins
écologiques. Ces programmes ont absorbé l'essentiel des dépenses consacrées à la
conservation des terres agricoles aux États-Unis depuis le milieu des années 80. Le
principal programme de mise en réserve de terres fragiles est le Conservation Reserve
Program (CRP), qui a été mis en place en vertu de la loi sur la sécurité alimentaire
(Food Security Act) de 1985. Le CRP verse un paiement locatif annuel aux exploitants
qui s’engagent, dans le cadre de contrats d'une durée de 10 à 15 ans, à mettre des terres
hors production. Depuis 1996, les paiements locatifs versés dans le cadre du CRP se
sont élevés en moyenne à plus de 1.5 milliard USD par an, soit environ 95 % du
montant total consacré à la mise en réserve de terres. En vertu du FSRI Act de 2002, la
superficie maximum de terres ouvrant droit à paiements dans le cadre du CRP a été
portée de 14.7 millions d'hectares à 15.8 millions d'hectares. Aux États-Unis, le
Programme de mise en réserve des terres humides (WRP – Wetland Reserve Program)
accorde des paiements annuels au titre du partage des coûts ou des paiements
forfaitaires ainsi qu’une assistance technique aux producteurs pour l’application d’un
plan approuvé de restauration et de conservation des terres humides et l’instauration
d’une servitude permanente ou de longue durée. La FCEA de 2008 maintient les
programmes de mise hors production des terres en accordant une attention particulière
aux zones humides. La superficie maximale visée par le Programme de mise en
réserve des terres fragiles (Conservation Reserve Program), le plus important
programme de conservation de par son budget annuel total, passera de 15.9 millions à
12.9 millions d’hectares à compter de 2010. Cependant, la superficie maximale visée
par le Programme de mise en réserve des terres humides (Wetlands Reserve Program)
est passée de 0.3 million à plus de 1.2 million d’hectares.
En 1993, la Suisse a institué des paiements au titre de la mise en réserve de terres
dans le cadre de ses programmes de jachère verte et de jachère florale, dans le but de
favoriser la biodiversité et la protection de l'habitat. Des paiements
agroenvironnementaux au titre de la mise en réserve de terres sont également accordés
dans l'Union européenne. La plupart des États membres ont mis en place divers
programmes de mise en réserve de terres répondant à des objectifs environnementaux
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
30 – INSTRUMENTS ÉCONOMIQUES
variés — en particulier pour protéger les approvisionnements en eau et les réserves de
biotopes — conformément au Règlement agro-environnemental (N°2078/92) et au
Règlement sur le développement rural (N°1257/99 et N°1698/2005). Par exemple,
dans le cadre des programmes de développement rural, plusieurs États membres ont
mis en place toute une série de paiements au titre de la mise en réserve de terres
alignés sur des objectifs environnementaux variés, entre autres la restauration des
zones humides, la mise en réserve de longue durée à des fins écologiques.
En 1992, l'Union européenne a également lancé une stratégie forestière
(Règlement du Conseil N° 2080/92), ultérieurement englobée dans le Règlement sur le
développement rural (N° 1257/99) et approfondie dans le RDR pour 2007-13
(N° 1698/2005), qui accorde des aides au financement des coûts de plantation en vue
du reboisement de terres agricoles. Des paiements en faveur du reboisement des terres
agricoles ont également été mis en place dans certains autres pays de l’OCDE
(Islande, Japon, Mexique et États-Unis, par exemple).
Enfin, quelques pays ont récemment mis en place des mesures destinées à réduire
les répercussions négatives sur l’environnement de certaines pratiques agricoles en
finançant le départ des agriculteurs. Début 2000, les Pays-Bas et la Belgique (Flandre)
ont adopté un ensemble de mesures en vue du rachat des quotas de production de porc.
On peut penser que ce programme réduira les excédents d’effluents d’élevage
nationaux et allégera les pressions sur l’environnement.
Paiements au titre du capital fixe des exploitations agricoles
Les paiements au titre du capital fixe des exploitations agricoles sont des mesures
qui accordent aux agriculteurs des transferts monétaires (y compris des transferts
implicites tels qu’allégements fiscaux et bonifications de crédit) afin de compenser le
coût des investissements à effectuer pour adapter la structure ou l’équipement des
exploitations en vue de l’adoption de pratiques agricoles plus respectueuses de
l’environnement. Au cours des vingt dernières années, de multiples paiements de ce
type ont été mis en place dans les pays de l'OCDE.
Aux États-Unis, le Programme en faveur de la qualité de l'environnement (EQIP Environmental Quality Incentives Program) accorde aux exploitants des paiements qui
couvrent jusqu'à 75 % des frais d'investissement requis pour créer des installations ou
procéder à des modifications structurelles en vue de favoriser la réalisation des
objectifs environnementaux, l'accent étant mis en particulier sur la lutte contre les
problèmes environnementaux liés au secteur de l'élevage – par exemple, la
construction d'installations pour la gestion des déchets animaux et la création de zones
de filtrage. En 2000, le Programme d'aide à la gestion de l'espace agricole (AMA –
Agriculture Management Assistance) a également été mis en place dans quinze États
afin de faire bénéficier de paiements au titre du partage des coûts les exploitants qui
mènent des activités visant à s'attaquer aux problèmes environnementaux, notamment
la construction ou l’amélioration d’infrastructures de gestion de l’eau ou d'irrigation, la
plantation de brise-vent ou l'amélioration de la qualité des eaux.
Un certain nombre de programmes de paiements structurels ont également été mis
en place dans l’Union européenne en vertu du Règlement sur le développement rural
(N°1257/99 et N°1698/2005). Les États membres, qui bénéficient d’une dérogation
temporaire, ont mis en place des programmes qui subventionnent les investissements
en capacités de stockage, de traitement et d’épandage des effluents d’élevage. Dans
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
INSTRUMENTS ÉCONONOMIQUES – 31
bien des cas, ces investissements ont été effectués afin que les agriculteurs puissent se
conformer aux exigences environnementales réglementaires renforcées visant à
atténuer l’impact de l’élevage sur l’environnement. Cela vaut tout particulièrement
pour les nouveaux États membres. Pour la période visée par le nouveau programme de
développement rural (2007-13), l’incidence environnementale des investissements a
été évaluée au préalable afin d’éviter les effets nuisibles. En outre, les investissements
dans les structures d’irrigation ont été subventionnés uniquement lorsqu’il s’agissait de
remplacer les installations par de nouveaux systèmes économiseurs d’eau. Plusieurs
projets d’investissement approuvés visaient à réduire les émissions d’ammoniac des
étables et à favoriser l’intégration rapide du fumier aux terres arables afin de limiter
ces émissions.
Des allégements fiscaux et des bonifications de crédit sont parfois accordés pour
compenser les investissements que requiert l'adaptation de la structure ou de
l'équipement des exploitations agricoles pour promouvoir une amélioration de
l’environnement. A titre d’exemple, depuis 1999 le Japon accorde aux exploitants
agricoles des prêts bonifiés pour le financement des dépenses d’investissement
destinées à promouvoir une agriculture plus durable du point de vue de
l’environnement. Les projets bénéficiant d’un soutien sont administrés par les autorités
préfectorales et comprennent l’achat de machines agricoles (installations de stockage
et épandeurs de compost, par exemple) et les améliorations apportées aux
infrastructures (par exemple, installations de stockage des effluents d’élevage). En
Australie, le gouvernement fédéral a introduit des allégements fiscaux dans les
années 80 afin de promouvoir la réalisation de divers objectifs environnementaux,
notamment la prévention de la dégradation des terres et la conservation de l’eau.
Certains pays ont également introduit des paiements en nature. Par exemple, au
Canada, dans le cadre du Programme brise-vent, des arbres et des arbustes à planter
dans les zones agricoles sont distribués (gratuitement) aux propriétaires terriens des
provinces des Prairies remplissant les conditions requises, afin d'améliorer la viabilité
écologique et la biodiversité. En 2001, ce programme a été complété par le Programme
de mise en valeur des brise-vent (SEP - Shelterbelt Enhancement Programme), dont le
but est d'améliorer le taux de réussite des plantations de brise-vent pour favoriser le
piégeage des émissions de gaz à effet de serre, dans le cadre du Plan d'action 2000 sur
le changement climatique.
Une autre tendance a été la mise en place de programmes structurels de partage des
coûts visant spécifiquement à aider les exploitants agricoles à faire face aux coûts
induits par les exigences réglementaires environnementales. A titre d’exemple, en
2000, les États-Unis ont lancé le Programme d'aide à la conservation des sols et de
l'eau (Soil and Water Conservation Assistance) pour aider les propriétaires terriens à se
mettre en conformité avec les législations environnementales adoptées au niveau
fédéral et des États, et à adopter des systèmes de production, de conduite des
pâturages, de gestion des éléments nutritifs et d'irrigation à la fois écologiques et
obéissant à un souci d’efficacité économique.
Modalités de mise en œuvre des paiements agro-environnementaux
L’expression paiement agro-environnemental est une appellation générique
englobant un large éventail de caractéristiques de mesures qui peuvent différer à bien
des égards par leurs :
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
32 – INSTRUMENTS ÉCONOMIQUES

ciblage spatial (paiement appliqué à une région spécifique bien définie,
principalement à l’aide de critères environnementaux ; à l’intérieur d’une région
administrative, ou sur l’ensemble du territoire) ;

durée (paiement ponctuel/ provisoire ; à moyen terme ; à long terme) ;

fondement des critères de paiement/de mise en œuvre (paiements au titre de
l’utilisation d’intrants ; à la superficie/au nombre d’animaux ; au titre de la mise
en réserve de ressources ; de la production de produits autres que des produits de
base) ; et

mode d’établissement du niveau des paiements (évaluation d’un projet
spécifique, procédure d’adjudication, application de taux fixes – à l’intérieur
d’une région donnée/sur l’ensemble du territoire national, part des coûts
d’investissement).
Dans l’Inventaire, les paiements agro-environnementaux sont classifiés en trois
grandes catégories en fonction des critères de mise en œuvre, bien que la description
des mesures de chaque programme prévoyant des paiements agroenvironnementaux
contienne des informations sur les autres caractéristiques mentionnées plus haut, dans
la mesure où l’information est disponible. Chaque année l’OCDE fournit également
une base de données de l’Estimation du soutien aux producteurs (base de données des
ESP), qui contient toutes les mesures gouvernementales prévoyant des transferts au
bénéfice des agriculteurs, y compris les paiements agroenvironnementaux. Cette base
de données est mise à jour chaque année et est utilisée dans la préparation du rapport
annuel de l’OCDE sur les politiques agricoles dans les pays de l’OCDE. Les paiements
sont classifiés dans la base de données des ESP en fonction des critères de mise en
œuvre. Pour plus d’informations sur la méthode des ESP et les catégories utilisées
dans la classification des ESP, veuillez vous référer au manuel des ESP qui est mis à la
disposition du public sur le site Internet des ESP de l’OCDE
(www.oecd.org/agriculture/pse).
Cette partie donne un aperçu de la base de versement des paiements agroenvironnementaux accordés dans les différents pays de l’OCDE, établie à l’aide des
critères de mise en œuvre de la classification de l’ESP (encadré 3).
Selon la classification en vigueur, les paiements agro-environnementaux se
classent dans les catégories suivantes :
 paiements au titre de l’utilisation d’intrants – avec contraintes sur les
intrants (pour l’essentiel, des paiements en faveur d’investissements
destinés à améliorer l’environnement)
 assistance technique/vulgarisation
 paiements au titre de la superficie actuelle /du nombre actuel d’animaux –
avec contraintes sur les intrants
 mise en réserve de ressources sur le long terme

production de produits spécifiques autres que des produits de base.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
INSTRUMENTS ÉCONONOMIQUES – 33
Encadré 3. Comment les paiements agro-environnementaux
sont-ils classés dans l'ESP ?
Les mesures de l’ESP sont classifiées selon des critères de mise en œuvre (la base sur laquelle
les transferts/payements sont effectués). Cela signifie, par exemple, que la catégorie « paiements
au titre de la production de produits autres que de base » n’englobe que les mesures agroenvironnementales dans lesquelles les paiements sont directement liés à (fondés sur) la
fourniture de produits spécifiques autres que des produits de base comme par exemple murs de
pierre, haies, éléments de paysage, etc. Toutefois, les mesures basées sur la superficie, le
nombre d'animaux ou tout autre critère de mise en œuvre, bien que visant l'amélioration de la
performance environnementale ou le bien-être animal, seront classées selon le titre principal
auquel elles sont mises en œuvre. De telles mesures sont actuellement classées comme des
« paiements au titre de la superficie/du nombre d'animaux/des recettes/du revenu » ou, dans le
cas de paiements finançant l'investissement, comme des « paiements au titre de l'utilisation
d'intrants ». Dans ces cas, des informations complémentaires sur la nature des mesures sont
alors fournies par le biais d’étiquettes (critères complémentaires). Pour ce qui concerne les
programmes environnementaux, l'étiquette établie sur la base des contraintes en termes
d’intrants est souvent appropriée. Ces mesures font obligation à l'agriculteur de réduire l'utilisation
d'intrants ou d'appliquer des pratiques agricoles spécifiques. Des travaux sont en cours pour
affiner encore la nouvelle classification de manière à fournir une information exhaustive sur le
contenu des catégories et sous-catégories qui peuvent actuellement regrouper des mesures
plutôt hétérogènes. Ceci devrait permettre à l'avenir d'attirer l'attention sur le fait qu'une part
importante du soutien est assortie de contraintes sur les intrants en rapport avec l’environnement,
le bien-être animal ou d’autres problèmes, le cas échéant.
Le graphique 2 fournit des informations sur la part de ces catégories dans le total
des paiements agro-environnementaux pour une sélection de pays de l’OCDE. Les
paiements fondés sur la superficie ou le nombre d’animaux avec contraintes sur les
intrants (par exemple pratiques spécifiques de gestion sur les terres agricoles)
dominent dans l’UE, en Norvège et en Suisse. Les programmes de mise hors culture
de terres constituent l’essentiel des paiements agro-environnementaux aux ÉtatsUnis, même si leur part a décliné entre 1996-98 et 2006-08. Les États-Unis ont
également une proportion relativement importante de dépenses au titre de l’assistance
technique aux exploitations.
Il convient toutefois de souligner que l’analyse présentée dans le graphique 2
porte uniquement sur les politiques agro-environnementales qui accordent des
paiements aux agriculteurs. Comme le montre les parts suivantes de ce chapitre, le
mix des instruments d’action utilisés pour s’attaquer aux problèmes
environnementaux en agriculture varie d’un pays à l’autre. Toute analyse du niveau
et de la structure des paiements agro-environnementaux doit s’effectuer dans ce
concept plus large.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
34 – INSTRUMENTS ÉCONOMIQUES
Graphique 2. Structure des paiements agroenvironnementaux dans certains pays OCDE pour la
période 1996-98 et 2006-08
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
UE27
Norvège
Suisse
2006-08
1996-98
2006-08
1996-98
2006-08
1996-98
2006-08
1996-98
0%
Ëtats-Unis
Paiements au titre de l'utilisation des instrants - avec contraintes sure les intrants
Assistance technique aux agriculteurs
Paiements au titre des superficies cultivées/nombre d'animaux - avec contraintes sur les intrants
Retrait des ressources à long terme
Production des produits particuliers autres que les produits de base
UE15 en 1996-98 ; UE26, 27 en 2005-07
Source : OCDE, Base de données des ESP et des ESC, 2009.
Taxes et redevances environnementales
Les mesures imposant une taxe ou une redevance en rapport avec la pollution ou
la dégradation de l’environnement englobent les taxes et les redevances sur les
intrants ou les produits agricoles qui sont une source potentielle de nuisances pour
l’environnement. L’application de taxes et redevances dans le secteur agricole
semble être rare, comparativement à d’autres secteurs. Cela reflète peut-être en partie
des problèmes pratiques d’évaluation ; à la différence de ce qui se passe dans une
usine où la pollution peut normalement être contrôlée à son point d’émission, la
pollution d'origine agricole est beaucoup plus diffuse car elle tend à provenir, dans
des proportions variables, d’un grand nombre d’exploitations différentes et
indépendantes.
Il existe néanmoins quelques exemples de mesures de ce type. Depuis 1998, les
Pays-Bas se sont attaqués au problème de l’évaluation en introduisant toute une série
de redevances sur les émissions d'éléments nutritifs hors exploitation supérieures à
un niveau fixé. Depuis 2006, ce dispositif régule directement la quantité maximale
d’engrais (effluents d’élevage plus quantités maximales de nitrates et de phosphates)
pouvant être utilisée sur l’exploitation. Le système antérieur (MINAS) régulait les
émissions et non pas l’utilisation, pour se conformer à la directive Nitrates de l’UE.
En Belgique, des taxes identiques frappent également le volume estimé d’éléments
nutritifs généré sur l’exploitation au-delà des niveaux déterminés. La République
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
INSTRUMENTS ÉCONONOMIQUES – 35
tchèque appliquait des taxe les émissions d’ammoniac par tête de ruminant dans les
grosses exploitations.
En agriculture, les taxes environnementales frappent le plus souvent la vente
d'intrants reconnus comme potentiellement néfastes pour l'environnement. Ainsi,
diverses taxes et redevances frappent actuellement les pesticides au Canada
(Colombie britannique), en Belgique (abolies en 2007 et remplacées par une
réglementation plus stricte), au Danemark, en France, en Italie, en Norvège et en
Suède, tandis que des taxes sur les engrais sont perçues en Italie, en Suède et dans
certains États des États-Unis. Les taxes sur les intrants sont généralement peu
coûteuses à administrer, mais peuvent se révéler moins efficaces qu’une taxe sur la
pollution elle-même, faute d’être axées sur la charge effective de pollution.
Droits/permis négociables
Les droits négociables basés sur des contingents, des permis et restrictions dans
le domaine de l’environnement ne semblent pas jouer un rôle important dans les
politiques agro-environnementales, malgré le recours grandissant à ce type de
mesures dans le cadre des politiques d’environnement appliquées par d’autres
secteurs (on a déjà une certaine expérience en matière de permis négociables
d’émission de CO2 dans le secteur de l’énergie). Néanmoins, au cours des dix
dernières années, les Pays-Bas ont mis en place des systèmes de permis négociables
fondés sur le volume d’effluents d’élevage produit par les exploitations agricoles.
Il existe également des exemples de dispositifs négociables appliqués dans un
certain nombre de secteurs, dont l’agriculture. Ce sont notamment les droits
négociables pour le développement des zones humides (Wetland Mitigation Banks ou
banques de compensation écologique) aux États-Unis, et les droits négociables de
prélèvement d’eau, qui ont été appliqués au niveau des États/régions aux États-Unis.
Le marché volontaire du carbone géré par la Bourse de Chicago (CCX) accepte aussi
les crédits pour la fixation du carbone par l’agriculture, mais il est très limité en
pratique. La Nouvelle-Zélande envisage la mise en place d’un système d’échange
des excédents d’éléments nutritifs.
Le régime du marché de l’eau a évolué en Australie au cours des deux dernières
décennies. Plus récemment, en se fondant sur l’Initiative nationale en faveur de
l’eau, le programme australien de réforme Water for the Future met fortement
l’accent sur l’amélioration des mécanismes du marché et la suppression des obstacles
aux échanges pour permettre à l’eau de s’orienter vers son utilisation qui a la plus
grande valeur. Au cœur de cette réforme se trouve le développement de la tarification
fondée sur la méthode du coût complet pour la distribution d’eau. Au titre de la loi
sur l’eau de 2007, le dispositif des redevances.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
36 – MESURES À L’ÉCHELON LOCAL
et
MEASURES RÉGLEMENTAIRES
sur l’eau devrait être introduit en 2009 pour le bassin Murray-Darling. Le dispositif
porte sur trois types de taxes et redevances : celles payables aux opérateurs des
infrastructures d’irrigation ; aux opérateurs de l’eau en vrac ; et aux agences
gouvernementales pour les services relatifs à l’eau. Il est destiné à assurer que les
redevances se basent le plus possible sur la couverture intégrale des coûts,
Mesures à l’échelon local
Dans certains pays (Australie, Canada et Nouvelle-Zélande), les politiques
d’information menées par les pouvoirs publics sont complétées de plus en plus par
des approches encourageant l’échange et le transfert d’informations à l’échelon
local, telles que les associations de protection des terres (landcare groups) ou les
clubs de sauvegarde de la nature (conservation clubs). Ces approches font appel à
l’expertise locale pour résoudre les problèmes environnementaux, ce qui valorise la
conservation de l’environnement, et elles tablent sur l’intérêt bien compris des
agriculteurs. Ces groupes semblent particulièrement bien placés pour s’attaquer aux
problèmes qui sont de nature locale, mais qui dépassent les limites de l’exploitation.
Certains de ces groupes bénéficient du soutien administratif ou financier des autorités
centrales ou régionales ; d’autres sont entièrement autofinancés et indépendants.
Mesures réglementaires
Les mesures classées dans cette catégorie imposent une restriction forcée du
choix des agents économiques, qui n’ont d’autre alternative que de respecter des
règlements spécifiques ou de s’exposer à des pénalités (notamment au retrait de
l’aide financière).
Exigences réglementaires
Les dispositions réglementaires sont des mesures obligatoires qui imposent aux
producteurs le respect de certaines exigences pour atteindre des niveaux spécifiques
de qualité de l'environnement ; il s'agit, entre autres, de restrictions
environnementales, d'interdictions, de conditions d'obtention de permis, de droits
maximums ou d'obligations minimums. Différents mécanismes, tels que recours
légaux ou amendes, sont utilisés pour les faire respecter lorsque les producteurs
contreviennent aux réglementations ou autres prescriptions juridiques.
Les exigences réglementaires jouent un rôle dans le traitement des questions
environnementales en agriculture dans tous les pays de l’OCDE. Certaines de ces
exigences sont spécifiques à la seule agriculture, tandis que d’autres s’inscrivent dans
une législation environnementale nationale plus large affectant un grand nombre de
secteurs, dont l’agriculture. Les exigences réglementaires tendent à être moins
flexibles que les instruments économiques, car elles ne laissent pas aux producteurs
la latitude de déterminer eux-mêmes les moyens les plus appropriés pour atteindre les
objectifs environnementaux. Mais elles tendent également à minimiser les risques et
les incertitudes et, de ce fait, constituent un élément clé des politiques de
l’environnement dans la plupart des pays de l’OCDE, en particulier pour les
problèmes environnementaux aigus.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
MEASURES RÉGLEMENTAIRES – 37
Les pays de l’OCDE ont œuvré à l’application du principe pollueur-payeur. Ce
principe, qui a été mis au point et accepté par les pays de l’OCDE en 1972, est
destiné à éviter les distorsions des échanges internationaux et des investissements et à
allouer le coût des mesures de prévention et de maîtrise de la pollution afin
d’encourager une utilisation rationnelle de ressources environnementales rares. Tous
les pays de l’OCDE ont appliqué des dispositions juridiques pour traiter les
problèmes liés à la pollution, ainsi qu’à la dégradation et à l’épuisement des
ressources naturelles. Parmi les principales catégories de dispositions figurent l’accès
des exploitants à certains intrants (par exemple, par l’homologation des pesticides et
autres produits agrochimiques) ; les pratiques agricoles (par exemple, la fixation de
limites visant l’épandage d’effluents d’élevage et le chargement en bétail) ; et
l’application de procédures obligatoires (par exemple, les processus de planification
ou d’autorisation concernant l’utilisation des terres, les prélèvements d’eau et la
construction d’installations d’élevage et de stockage du fumier). Il existe aussi de
nombreuses dispositions réglementaires destinées à protéger des espèces sauvages et
des habitats spécifiques d’un grand intérêt, et à protéger l’agriculture et
l’environnement des dommages que peuvent provoquer les espèces envahissantes et
les nouveaux organismes.
Au cours des vingt dernières années, les réglementations et les obligations
contraignantes ont eu tendance à se développer, mais pas toujours de manière
uniforme dans l’ensemble du secteur – aux États-Unis, par exemple, dans les grandes
unités d’élevage mais pas dans les petites. Une proportion importante des exigences
en vigueur dans les pays de l’OCDE s’applique aux niveaux local et régional. C’est
ainsi que dans l’Union européenne, les normes sont établies à des niveaux très divers,
allant de l’Union elle-même à certaines régions des États membres. Les exigences
réglementaires sont souvent appliquées dans le cadre d’une législation générale au
niveau national, fédéral (ou communautaire s’agissant de l’UE) : par exemple, dans
le cadre de la loi sur la gestion des ressources (RMA – Resource Management Act)
adoptée par la Nouvelle-Zélande en 1991, ce sont les conseils régionaux qui sont en
charge de l'élaboration de la politique environnementale concernant l’utilisation des
ressources naturelles. Toutefois, si la directive Nitrates de l’UE fixe une limite aux
niveaux de nitrates associés à l’application d’effluents d’élevage dans l’Union
européenne, elle laisse les États membres libres de déterminer leurs propres
programmes d’action en faveur des zones vulnérables désignées.
Les mesures réglementaires peuvent viser la réalisation des objectifs agroenvironnementaux par des moyens plus ou moins restrictifs pour les propriétaires
terriens. Pour mettre en évidence certaines des mesures les plus importantes, elles ont
été regroupées en trois grandes catégories.
Lutte contre la pollution
Depuis les années 80, on assiste à une généralisation des mesures réglementaires
visant à protéger les cours d'eau et les eaux souterraines, ainsi qu'à réduire la
pollution atmosphérique, en particulier dans les domaines suivants.

Intrants. Réduire la pollution due à l'utilisation d'intrants agricoles par le biais de
lois réglementant la commercialisation et la vente d'intrants chimiques, en
particulier de pesticides, est un objectif important dans tous les pays de l'OCDE.
Les législations ont été habituellement modifiées au fil des ans, de sorte
qu’aujourd’hui de nombreux pays ne donnent leur agrément à la mise sur le marché
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
38 – MESURES À L’ÉCHELON LOCAL
et
MEASURES RÉGLEMENTAIRES
de nouveaux pesticides que pour une durée limitée (généralement de cinq à dix
ans). Certaines des exigences relatives aux intrants ont été imposées face aux
pressions internationales – par exemple, l'arrêt progressif de la commercialisation
et de l'utilisation de pesticides à base de bromure de méthyle en vertu du Protocole
de Montréal de 1987 relatif aux substances qui appauvrissent la couche d'ozone.

Utilisation de pesticides. Tous les pays de l’OCDE ont fixé des règles strictes
concernant le stockage et l’application d’engrais chimiques et de pesticides.
L'épandage aérien de pesticides est désormais interdit dans certaines parties de
l'Union européenne et de l'Australie. Il est sévèrement réglementé dans de
nombreux autres pays et régions, des licences ou des permis étant généralement
exigés pour y procéder. Dans de nombreux pays de l’OCDE, des restrictions
frappent également l'utilisation de pesticides à une certaine distance des cours
d'eau. Dans l’Union européenne, l’ensemble du dispositif intégré de lutte contre
les ennemis des cultures est en cours de renforcement. Les réglementations les plus
pertinentes seront probablement adoptées courant 2009.

Gestion des éléments nutritifs. Alors que depuis le début des années 70, la plupart
des pays de l’OCDE ont adopté des lois interdisant le rejet direct de déjections
animales dans les eaux de surface, de très nombreuses restrictions ont été
appliquées depuis aux pratiques agricoles en général pour réduire la pollution par
les éléments nutritifs. En particulier, les pays de l'OCDE ont adopté diverses
dispositions relatives à la gestion des effluents d'élevage afin de limiter la pollution
par les éléments nutritifs provenant de l'élevage, notamment des restrictions
limitant la quantité d'effluents d’élevage qui peut être épandue ; des interdictions
saisonnières à l'épandage d'effluents ; des prescriptions concernant le stockage du
fumier et des limitations du chargement en bétail et de l’extension des unités
d’élevage. Les mesures de ce type sont devenues particulièrement courantes dans
les États membres de l'Union européenne, qui sont tenus par la directive Nitrates
(N° 676/91) de limiter l’épandage d’effluents d'élevage dans les zones vulnérables
aux nitrates, à 170 kg par hectare et par an. De nombreux autres pays de l'OCDE
ont également durci leurs réglementations relatives à l’épandage d’éléments
nutritifs, soit au niveau national, soit au niveau des États ou des régions. En
Nouvelle-Zélande, les conseils régionaux fixent des limites à la quantité d’azote
provenant des effluents des élevages laitiers qui peut être épandue, de sorte que les
agriculteurs qui épandent les effluents des étables de vaches laitières sont soumis à
une limite de 150-200 kg N/ha/an. De plus en plus, les provinces canadiennes
imposent des plans de gestion des effluents d’élevage par le biais de modifications
apportées aux réglementations.

Échelle de production. Dans certains pays de l'OCDE, les unités d’élevage à grande
échelle sont contrôlées par le biais d’un système de permis, délivrés au niveau
national ou au niveau régional. Par exemple, en vertu de la directive relative à la
prévention et à la réduction intégrées de la pollution, qui est appliquée depuis 1999
aux nouvelles installations (et doit l’être à l’ensemble des installations existantes
depuis 2007), les États membres de l'Union européenne sont tenus d’imposer,
dans les permis environnementaux, des limites d'émissions, qui doivent
impérativement être respectées par les installations d'une taille donnée présentant
des risques de pollution – en particulier les très gros élevages de porcs et de
volailles. Au Japon, la loi sur la lutte contre la pollution de l’eau et ses règlements
d’application fixent des limites supérieures aux rejets de polluants par des
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
MEASURES RÉGLEMENTAIRES – 39
installations agricoles spécifiées, notamment par les élevages à grande échelle de
porcs et de bovins, et par les étables.

Zones tampons et cultures dérobées. La création de zones tampons à proximité des
cours d’eau et des sources d’eaux souterraines pour limiter le ruissellement des
éléments nutritifs est devenue une exigence courante dans de nombreux pays de
l’OCDE, dont l’Australie, le Canada la France et la Nouvelle-Zélande. Certains
gouvernements ont également adopté des réglementations qui imposent aux
agriculteurs de maintenir un couvert végétal minimum durant certaines périodes de
l’année (cultures dérobées). Les exigences réglementaires concernant les cultures
dérobées sont particulièrement strictes au Danemark et dans certaines régions de
Suède.
Utilisation des ressources naturelles : eau et sols
Les restrictions quantitatives limitant les prélèvements d'eau à des fins
d'irrigation deviennent de plus en plus courantes dans les régions où l'eau est rare. En
Australie, par exemple, des plafonds ont été fixés dans les années 90 dans de
nombreuses zones d’irrigation pour limiter la quantité d'eau pouvant être prélevée et,
dans certains cas, la délivrance de nouvelles licences d’irrigation qui permettent de
puiser dans les eaux souterraines est suspendue. Notamment, en 1996 un plafond a
été fixé pour le prélèvement des eaux de surface dans la plus grande zone d’irrigation
en Australie (le bassin Murray-Darling)2. Parallèlement à l'instauration de ces
limites, on a parfois créé des droits négociables. Les restrictions frappant les
prélèvements d'eau sont également courantes aujourd'hui dans certains États des
États-Unis, par exemple en Floride où des permis d’une durée de 5 à 10 ans doivent
être obtenus pour pouvoir prélever de l'eau, construire des puits et installer de
nouveaux systèmes de gestion des eaux de surface. En France et en
Nouvelle-Zélande, les irrigants sont tenus de demander un permis d'utilisation de
l’eau et de se conformer à toutes les conditions imposées, notamment aux réductions
d’utilisation de l’eau pour préserver le débit minimum des cours d'eau. La directivecadre sur l’eau de l’Union européenne porte sur la gestion de l’eau dans les basins
versants par l’intermédiaire de mesures telles que la fixation des droits de
prélèvement d’eau par les agriculteurs ; le suivi et la surveillance de la qualité de
l’eau ; et les redevances pour l’utilisation des ressources en eau. La directive exige
également que des plans soient établis avant 2010 pour chaque bassin versant. Ces
plans comprennent des indicateurs des pressions et répercussions des activités
humaines ; des objectifs environnementaux ; et spécifieront les mesures à mettre en
œuvre pour atteindre ces objectifs, notamment les instruments territoriaux et la
gestion du fumier organique.
Les exigences réglementaires relatives à l'utilisation des terres se sont
généralisées en ce qui concerne la qualité des sols, soit au niveau national, soit au
niveau des États ou des régions. En Suisse, par exemple, l’ordonnance sur les
atteintes portées aux sols, promulguée en 1998, impose le recours à des pratiques
agricoles qui préviennent le compactage de longue durée et l'érosion des sols de
manière à en garantir la fertilité à long terme. Dans le Queensland, en Australie, la
loi sur la conservation des sols (Soil Conservation Act) de 1986 impose aux
propriétaires terriens de faire approuver des « plans fonciers » qui doivent préciser
2.
Un nouveau plafond durable sera établi en 2011 pour la totalité du bassin.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
40 – MESURES À L’ÉCHELON LOCAL
et
MEASURES RÉGLEMENTAIRES
les mesures prises au titre de la conservation des sols et indiquer également les
pratiques de défrichement et autres aspects de la gestion des terres.
Biodiversité
La plupart des gouvernements de l’OCDE, que ce soit au niveau fédéral ou au
niveau des provinces ou des États, ont adopté de longue date des législations
destinées à protéger les espèces sauvages et les habitats précieux, qui peuvent
influencer les pratiques agricoles. Ces mesures ont été élaborées en tenant compte de
considérations internationales mais aussi nationales et, notamment des obligations
faites aux pays membres de l’OCDE d’enrayer la perte de biodiversité, en vertu de la
Convention internationale sur la diversité biologique (CDB), adoptée en 1992 lors de
la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement.
En vertu de la directive Oiseaux (N° 409/79) et de la directive Habitats
(N° 43/92), les États membres de l’Union européenne sont tenus de prendre des
mesures pour protéger les espèces menacées d’extinction, ainsi que les habitats dont
elles ont besoin pour se nourrir et se reproduire. De la même manière, aux ÉtatsUnis, le Endangered Species Act de 1973 protège les espèces menacées et leurs
habitats et conditionne à l'obtention d'un permis fédéral certaines activités comme le
comblement de marécages à des fins de production agricole. De nombreux pays de
l’OCDE ont également adopté des lois pour protéger les habitats non agricoles de
valeur encore intacts qui sont souvent limitrophes des terres agricoles, tels que zones
humides, haies-clôtures, taillis et forêts. En 1997, par exemple, le Royaume-Uni a
promulgué une législation administrée par les autorités locales pour empêcher la
suppression délibérée des haies importantes qui bordent les terres agricoles. En 1992,
la Suisse a adopté une loi limitant plus strictement l'utilisation des terres agricoles,
notamment en interdisant ou en limitant l'utilisation de substances agrochimiques,
dans des zones spécifiques telles que les marais et les terres humides.
La Directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 sur la conservation des
habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, établit un réseau
écologique européen connu sous le nom de Natura 2000. Ce réseau comprend des «
zones spéciales de conservation » désignées par les États membres conformément
aux dispositions de la Directive et des zones spéciales protégées classées
conformément à la Directive 79/409/CEE sur la conservation des oiseaux sauvages.
La désignation des zones spéciales de conservation se fait en trois temps. Chaque
État membre doit dresser une liste des sites abritant des habitats naturels et des
espèces animales et végétales sauvages. Sur la base des listes nationales et par accord
avec les États membres, la Commission adoptera ensuite une liste de sites
d’importance communautaire. Au plus tard six ans après le choix d’un site
d’importance communautaire, l’État membre concerné doit désigner ce site comme
zone spéciale de conservation. Dans les zones spéciales de conservation, les États
membres doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la conservation
des habitats et éviter leur détérioration. La Directive prévoit le cofinancement des
mesures de conservation par la Communauté.
Des mesures réglementaires pour protéger l’agriculture contre les espèces
envahissantes ont été mises en place dans les pays de l’OCDE ; elles sont
particulièrement importantes dans les pays où la production agricole et les
écosystèmes sont les plus vulnérables, comme l’Australie et la Nouvelle-Zélande.
En outre, les mesures régulant l’introduction et l’utilisation de nouveaux organismes
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
MEASURES RÉGLEMENTAIRES – 41
– notamment de nouveaux produits agricoles issus des biotechnologies – ont, dans
bon nombre de cas, été développées ou renforcées.
Dispositifs d’éco conditionnalité
Les mécanismes d'écoconditionnalité sont des mesures qui consistent à imposer
aux agriculteurs de respecter certaines exigences environnementales ou niveaux de
performances environnementales pour pouvoir bénéficier de programmes spécifiques
de soutien à l'agriculture. Lorsque les aides accordées demeurent relativement
élevées, les mesures d'écoconditionnalité peuvent être qualifiées de facto d'exigences
réglementaires pour les agriculteurs susceptibles de bénéficier de ces paiements.
Au cours des vingt dernières années, de nombreux pays de l’OCDE ont
subordonné les programmes généraux de soutien qui accordent des paiements aux
producteurs agricoles, au respect de certaines contraintes environnementales ou à
l’obtention d’un résultat environnemental particulier. Ce type de conditions constitue
un élément important de la politique agro-environnementale des États-Unis (depuis
1995) où une superficie estimée à 44 millions d’hectares de terres cultivables
extrêmement sensibles à l’érosion et 31 millions d’hectares de terres humides est
soumise à des dispositions d’écoconditionnalité, témoignant du taux élevé de
participation aux programmes généraux de soutien des agriculteurs.
Depuis la fin des années 90, la plupart des paiements directs généraux accordés
par la Suisse à ses agriculteurs, dont les paiements au titre de la superficie et du
nombre d’animaux et les paiements au titre des droits antérieurs, sont également
subordonnés au respect par les bénéficiaires des normes environnementales et de
certaines pratiques de gestion des exploitations (agriculture intégrée). La Norvège
propose également diverses formes de paiements fondés sur la superficie et le
nombre de têtes de bétail, dont le versement est conditionné au respect par les
agriculteurs d'exigences environnementales.
Certains États membres de l’UE (le Royaume-Uni, par exemple) appliquent
l’éco-conditionnalité depuis les années 1990. Depuis 2005, l’éco-conditionnalité (les
composantes environnementales du principe de conditionnalité des paiements) est
devenue obligatoire dans l’UE15 (Encadré 4). Dans les nouveaux États membres
(EU12), l’éco-conditionnalité s’applique déjà partiellement et s’appliquera
totalement entre 2009 et 2013.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
42 –MEASURES CONSULTATIVES ET INSTITUTIONNELLES
Encadré 4. L’écoconditionnalité dans l’UE
La réforme de la PAC dans le cadre de l’Agenda 2000 a conditionné le soutien du marché au respect
par les agriculteurs des exigences en matière de protection de l’environnement. La réforme 2003 de la PAC
a mis davantage l’accent sur l’écoconditionnalité, la rendant obligatoire.
La réforme de la PAC dans le cadre de l’Agenda 2000 a introduit l’obligation pour les États membres
de prendre les mesures environnementales qu’ils considèrent appropriées compte tenu de la situation des
terres agricoles utilisées ou des productions concernées. Cette exigence a été intégrée au « règlement
horizontal » (N° 1259/1999) qui établit les règles communes pour tous les paiements octroyés directement
aux agriculteurs.
Les États membres disposaient de trois possibilités pour satisfaire à cette obligation. Ils pouvaient
subordonner les aides à des engagements agro-environnementaux ; fixer des exigences
environnementales générales (fondées sur la législation environnementale) et définir des exigences
environnementales spécifiques. En cas de non-respect de ces exigences environnementales par les
agriculteurs, des sanctions appropriées étaient appliquées, qui pouvaient prévoir la réduction, voire la
suppression des aides directes. Parmi les exemples de conditions environnementales figurent le respect
d’une charge maximum de bovins ou d’ovins, de conditions spécifiques de culture sur les terrains en pente,
de quantités maximales autorisées d’engrais à l’hectare, et de règles spécifiques concernant l’utilisation de
produits phytosanitaires.
Depuis 2005, tous les agriculteurs percevant des paiements directs sont soumis à l’écoconditionnalité
obligatoire (Règlement (CE) N° 1782/2003 du Conseil et Règlement (CE) N° 796/2004 de la Commission,
remplacé plus tard par le Règlement (CE) N° 73/2009). Dix-neuf textes de lois s’appliquant directement à
l’exploitation dans les domaines de l’environnement, de la santé publique, animale et végétale, et du bienêtre des animaux ont été introduits, et les agriculteurs sont sanctionnés en cas de non-respect des règles
(suppression partielle ou totale du soutien direct). Les bénéficiaires des paiements directs sont aussi tenus
de maintenir toutes les terres agricoles dans de bonnes conditions agricoles et environnementales. Ces
conditions sont définies par les États membres et doivent inclure des normes concernant la protection des
sols, le maintien des matières organiques du sol et de la structure des sols, la préservation des habitats et
des paysages, y compris la protection des pâturages permanents, et la protection et la gestion de l’eau. En
outre, les États membres doivent aussi veiller à empêcher une diminution sensible de la superficie totale
qu’ils consacrent aux pâturages permanents, au besoin en interdisant leur conversion en terres arables.
Mesures consultatives et institutionnelles
Recherche et développement
Dans tous les pays de l’OCDE, les gouvernements financent la recherche portant
sur la relation entre l’agriculture et l’environnement. Cette recherche est souvent
entreprise en vue de déterminer les meilleures pratiques de gestion à transmettre aux
agriculteurs par le biais d’une assistance technique au niveau de l'exploitation, ou
pour élaborer les réglementations ou autres mesures de politique les plus appropriées.
Elle porte sur un vaste champ d’investigation scientifique englobant l’écologie,
l’ingénierie, les pratiques de gestion des exploitations agricoles, le comportement des
agriculteurs et l’économie.
Assistance technique/vulgarisation
Les mesures d’assistance technique et de vulgarisation ont pour objectif
d’apporter directement aux agriculteurs des informations et une aide technique à la
planification et à la mise en œuvre de pratiques agricoles respectueuses de
l’environnement. La plupart des pays de l’OCDE ont établi de longue date des
programmes d’aide à l’adoption de nouvelles technologies et à l’amélioration des
pratiques agricoles. Ces programmes ont été de tout temps axés sur l’accroissement
de la productivité des exploitations, mais au cours des vingt dernières années,
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
MEASURES CONSULTATIVES ET INSTITUTIONNELLES – 43
l’accent a été mis davantage sur la sensibilisation des agriculteurs aux problèmes des
ressources et de l’environnement, afin de les inciter à modifier volontairement leurs
pratiques agricoles et, partant, à améliorer leurs performances environnementales.
Dans certains pays de l’OCDE comme l’Australie, le Canada, la NouvelleZélande et les États-Unis, une partie des sommes dépensées au titre des
programmes agro-environnementaux servent à financer l’assistance technique aux
exploitations liée à la mise en œuvre des pratiques imposées par les différents
programmes. Dans certains programmes (principalement en Australie et en
Nouvelle-Zélande), le financement de l’assistance technique est plus important que
l’aide financière directe aux exploitations agricoles. Dans les pays de l’UE
également, l’assistance technique est intégrée aux programmes agroenvironnementaux mais il est difficile d’estimer la part des dépenses au titre de
l’assistance technique à partir de l’aide financière directe.
Certains programmes sont spécifiquement ciblés sur l’assistance technique aux
exploitations. Au Canada, par exemple, l’assistance technique accordée aux
agriculteurs en vertu du Programme de planification environnementale à la ferme
(EFP – Environmental Farm Planning), pour les aider à élaborer leur plan agroenvironnemental (PAE) de manière à identifier systématiquement les risques et
avantages de leur propre exploitation agricole et à imaginer un plan d’action pour
atténuer les risques (les dépenses sont passées de 1 million CAD en 2003/04 à
21 millions CAD en 2007/08, et au 31 mars 2008, 76 900 producteurs et éleveurs
avaient participé à cette initiative nationale, et 56 700 PAE examinés étaient
achevés). Le Canada développe également un Service national d'information sur les
terres et les eaux (SNITE) : ce service d’accès en ligne à des informations agroenvironnementales vise à aider les Canadiens à prendre des décisions responsables en
matière d’utilisation des sols (élaboration progressive, sur la période 2006-09, du
système qui devrait être opérationnel en 2009).
Étiquetage/normes/certification
Au cours des dernières décennies, une attention accrue a été portée à la
communication d’informations sur les qualités environnementales des produits afin
de répondre aux demandes d’un public de mieux en mieux informé et de plus en en
plus exigeant. En particulier, des normes encadrant les « écolabels » ont été mises en
place dans de nombreux pays de l’OCDE, appuyées par des procédures de
certification visant à en vérifier l’authenticité, afin d’aider les consommateurs à faire
la différence entre des produits cultivés sans engrais chimiques ni pesticides et des
produits agricoles obtenus selon les méthodes traditionnelles. Les productions de ce
type tendent à entraîner des majorations de prix évidentes sur nombre de marchés.
Certains de ces systèmes d’attribution d’écolabels reposent entièrement sur le
marché et, bien souvent, ils sont introduits par des groupes de producteurs à la
demande de supermarchés ou autres distributeurs. D’autres sont soutenus par les
pouvoirs publics. C’est ainsi qu’un grand nombre de pays de l’OCDE – dont l’Union
européenne, le Canada, la Norvège, les États-Unis et la Suisse ont instauré des
normes nationales d’éco-étiquetage des produits biologiques, dont le respect est
assuré par les pouvoirs publics.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
44 – CONCLUSIONS
Conclusions
Pour atteindre leurs divers objectifs en termes d’environnement, les pays de
l’OCDE associent différents moyens d’action lorsqu’il n’existe pas de marché pour
les externalités et les biens publics. Les instruments utilisés sont le reflet de la
démarche politique globale du secteur ; des problèmes environnementaux spécifiques
et de leurs liens perçus avec les activités agricoles ; de la nature des droits de
propriété liés à l’utilisation des ressources naturelles (terres, eau) et des inquiétudes
de la société liées aux problèmes environnementaux. Bien que moins visibles dans
l’analyse des politiques et le débat politique, les réglementations environnementales
(exigences réglementaires) sont au cœur des politiques mises en œuvre face aux
problèmes environnementaux en agriculture. Tous les pays de l’OCDE imposent un
ensemble complexe de réglementations pour éviter l’impact négatif de l’agriculture
sur l’environnement. La plupart de ces réglementations sont généralement
appliquées. Mais dans les zones présentant un intérêt environnemental plus grand
(réserves naturelles), les zones de captage de l’eau potable, les zones écologiquement
sensibles ou à proximité des zones à forte densité de population, des réglementations
plus strictes s’appliquent. Au fil des ans, la portée de ces exigences réglementaires
s’est généralement élargie, et elles sont devenues plus contraignantes. Certains pays
de l’OCDE (l’Australie et la Nouvelle-Zélande) s’en remettent essentiellement à la
réglementation pour s’attaquer aux problèmes environnementaux en agriculture.
De nombreux autres pays de l’OCDE (principalement, les pays de l’UE, la
Norvège, la Suisse et les États-Unis) ont également élaboré un large éventail de
programmes volontaires incitant, par des paiements, les agriculteurs à adopter des
pratiques agricoles spécifiques sur les terres exploitées ayant des effets positifs sur
l’environnement et/ou à fournir des biens publics (paysages, biodiversité, etc.). Bien
que ces programmes offrent une grande variété de mesures, la plupart des paiements
sont liés au soutien de formes extensives d’agriculture (reposant pour la plupart sur
les prairies, une gestion extensive des prairies, des pâturages extensifs). En général,
l’objectif du paiement est défini en fonction d’une pratique agricole spécifique, par
opposition à un effet spécifique (mesurable) sur l’environnement. Les programmes
qui accordent des paiements aux exploitations qui mettent hors production des terres
agricoles à des fins écologiques ou de conservation des ressources sont également
mis en œuvre dans nombre de pays, mais, à l’exception des États-Unis, les
superficies couvertes sont peu importantes.
D’autres instruments économiques, comme les droits et contingents négociables,
sont utilisés dans un nombre limité de pays. Citons notamment les droits négociables
pour le développement des zones humides aux États-Unis, les droits négociables sur
les prélèvements d’eau (mis en place au niveau des états/régions aux États-Unis) et
l’amélioration des mécanismes du marché pour la libéralisation des échanges des
droits dans le cadre de la mise en œuvre du système de droits négociables sur l’eau
en Australie. Les droits négociables basés sur des contingents, des permis et des
restrictions dans le domaine de l’environnement ne semblent pas jouer un rôle
important dans les politiques agroenvironnementales, malgré le recours grandissant à
ce type de mesures pour les politiques environnementales d’autres secteurs.
Au cours des 20 dernières années, la plupart des pays de l’OCDE ont également
porté une attention accrue à l’amélioration de la base de savoirs relatifs aux
problèmes environnementaux en agriculture, augmentant leurs dépenses au titre de
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
CONCLUSIONS – 45
recherches agroenvironnementales souvent entreprises en coopération avec des
acteurs du secteur privé. Une évolution notable dans ce domaine a été l’élaboration
d’indicateurs agroenvironnementaux dans un certain nombre de pays de l’OCDE
pour le suivi de la performance environnementale. De façon générale, on a également
mis davantage l’accent sur la communication aux agriculteurs d’informations sur les
problèmes environnementaux via l’assistance technique et les actions de
vulgarisation, de manière à induire des changements volontaires dans les pratiques
agricoles pour améliorer les résultats au plan de l’environnement.
Globalement, la cohérence des politiques agricoles, agroenvironnementales et
environnementales s’est améliorée au cours des deux dernières décennies. Certains
pays de l’OCDE ont pris des mesures pour rationaliser les politiques
agroenvironnementales à l’intérieur de cadres ou de plans d’action obligatoires
s’attaquant à des objectifs environnementaux ou de développement rural. Mais, dans
un contexte plus large, lorsque les politiques agroenvironnementales compensent les
effets dommageables pour l’environnement de l’utilisation d’intrants et des
politiques liées à la production, les coûts de l’amélioration de l’environnement sont
plus élevés qu’ils ne le seraient en l’absence de telles mesures de soutien à la
production tant que les prix intérieurs sont maintenus à un niveau plus élevé que les
prix mondiaux. En revanche, certaines mesures agroenvironnementales ne visent pas
seulement à compenser les effets nuisibles de l’agriculture sur l’environnement et
accordent des paiements facultatifs en échange de services environnementaux
additionnels (définis et ciblés avec plus ou moins de précision) fournis par le secteur
agricole. Dans la plupart des cas, ces services additionnels sont associés à des
pratiques agricoles spécifiques, par opposition à des effets sur l’environnement.
Les pays de l’OCDE continuent d’élaborer des mesures pour s’attaquer aux
problèmes environnementaux en agriculture. S’agissant de la panoplie de mesures
prises, les approches demeurent variées. Certains pays comme l’Australie et la
Nouvelle-Zélande s’en remettent encore pour l’essentiel à la réglementation
environnementale et aux instruments économiques tels que les contingents et les
permis négociables, par opposition aux paiements agroenvironnementaux.
Cependant, nombre de pays de l’OCDE ont mis en œuvre divers systèmes de
paiements agroenvironnementaux afin de rétribuer les agriculteurs en échange de la
prestation volontaire de services environnementaux, ou de financer une partie des
coûts de la lutte contre la pollution. Jusqu’à maintenant, ces programmes ont mis
l’accent sur l’adoption de pratiques agricoles spécifiques et non sur les effets
mesurables sur l’environnement. Aux États-Unis, la nouvelle loi agricole fait
également une plus large place aux paiements agroenvironnementaux visant à
encourager l’adoption de pratiques spécifiques sur des terres en exploitation, qu’aux
paiements liés à la conservation des terres. L’Union européenne privilégie les
paiements pour traiter les problèmes environnementaux des exploitations. L’UE, les
États-Unis et la Suisse accordent de l’importance à l’écoconditionnalité et à
l’association entre les mesures environnementales et les mesures agricoles.
Des méthodes d’évaluation de la politique agroenvironnementale sont en cours
d’élaboration dans de nombreux pays. Toutefois, cela s’inscrit dans un long
processus ardu du fait que nombre de problèmes environnementaux sont spécifiques
au site et que l’évaluation et la mesure des effets sur l’environnement sont
complexes. Plus précisément, l’évaluation est rendue plus difficile par les lacunes
dans les données et par l’identification du type d’information nécessaire dans le cadre
du processus d’évaluation (voir également les actes du séminaire de l’OCDE sur
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
46 – CONCLUSIONS
l’évaluation des politiques agroenvironnementales – décembre 2004). Certains pays
ont mis au point leur propre ensemble d’indicateurs agroenvironnementaux pour
suivre la performance environnementale de l’agriculture. A cet égard, les rapports de
l’OCDE sur les Indicateurs environnementaux pour l’agriculture (volumes 1-4) et en
particulier le dernier rapport paru en 2008, La performance environnementale de
l’agriculture dans les pays de l’OCDE depuis 1990, sont des sources précieuses
d’information méthodologique et empirique. De même les travaux du Secrétariat de
l’OCDE sur la mise au point de Lignes directrices pour la conception et la mise en
œuvre de mesures agroenvironnementales économiquement rationnelles peut
contribuer à identifier l’information nécessaire pour évaluer l’efficience et
l’efficacité des politiques agroenvironnementales.
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
BIBLIOGRAPHIE – 47
Bibliographie
OCDE (2001), Indicateurs environnementaux pour l'agriculture: Volume 3, Méthodes et
résultat, Paris, France
OCDE (2008), La performance environnementale de l’agriculture dans les pays de
l’OCDE depuis 1990, Paris, France
OCDE (2009), Les politiques agricoles des pays de l’OCDE: Suivi et évaluation, 2009,
Paris, France
LES MESURES PRISES FACE AUX PROBLEMES AGRO-ENVIRONNEMENTAUX © OECD 2010
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