Université de Rennes 1 Master 2 Ecologie Fonctionnelle Comportementale et Evolutive Année 2009-2010 Mémoire Bibliographique Processus physiques et Stœchiométrie des transferts dans les écosystèmes Pauline BRYERE Sous la direction d’André-Jean FRANCEZ et Myriam BORMANS Laboratoire : UMR 6553 Ecobio 0 Sommaire Recherche Bibliographique : ................................................................................................... 2 Introduction : ............................................................................................................................ 2 I) Turbulence ............................................................................................................................ 4 1) ..................................................................................................................... Profondeur de mélange .................................................................................................................................................... 4 2) Upwelling ............................................................................................................................... 6 II) Bioturbation ........................................................................................................................ 9 1)Effet de la bioturbation sur le ratio C : N de la litière ........................................................... 9 2) Minéralisation et infiltration de l’azote ............................................................................... 10 3) Impact de la bioturbation sur la disponibilité en phosphate ............................................... 11 4) Augmentation de la surface de l’interface eau-sédiments ................................................... 11 5) Effets des modifications de la disponibilité en nutriments par la bioturbation sur les autres organismes ............................................................................................................................... 12 III) Changements globaux ..................................................................................................... 13 1)Effet de la hausse des températures en milieu terrestre ....................................................... 13 2)Effets conjugués de l’acidification des océans et de la température .................................... 14 3) Effets des UV sur la stœchiométrie ...................................................................................... 14 Conclusion……………………………………………………………………………………15 1 Recherche Bibliographique : Mes recherches ont débuté par la définition de mots-clés nécessaires à la recherche d’articles. Pour cela, je me suis aidée du diaporama fourni par mes maîtres de stage concernant la stœchiométrie écologique et les relations trophiques. J’ai pu définir la liste suivante : ecological stoichiometry, C : N : P ratios, light-nutrient hypothesis, nutrient availability, bioturbation, upwelling. Cela m’a permis, par l’utilisation de moteurs de recherches tels que Web of Knowledge et Google Scholar, de trouver une première partie de mes références. Ces articles m’ont permis de trouver d’autres références. Mes maîtres de stage m’ont également fourni un certain nombre de publications, notamment celles qui n’étaient pas accessibles via les moteurs de recherches, ainsi que le livre « Ecological stoichiometry: the biology of elements from molecules to the biosphere » (Sterner et Elser, 2002). Introduction : La stœchiométrie écologique permet une approche différente de l’approche classique utilisée en écologie pour étudier les relations trophiques. En effet, alors que les interactions entre les organismes et des organismes avec leur milieu sont souvent analysées à des échelles allant de l’individu à l’écosystème, la stœchiométrie écologique propose une approche basée sur les éléments chimiques. Cette discipline étudie ainsi l’équilibre des éléments chimiques dans les interactions et les processus écologiques. Elle s’intéresse également aux flux d’énergie et de matière au sein des écosystèmes (Sterner et Elser, 2002). Les organismes vivants ont des compositions relativement constantes en divers éléments tels que le carbone, l’azote et le phosphore. La plupart des études en écologie stœchiométrique sont axées sur ces trois éléments et ce, depuis l’exemple de référence en écologie stœchiométrique décrit par Redfield en 1958. Le rapport de Redfield prédit que le ratio C : N : P du phytoplancton marin est constant pour toutes les espèces et est égal à 106 :16 : 1 (Redfield, 1958 in Sterner et Elser, 2002), une proportion égale à celle de la photosynthèse. Ces proportions sont différentes et varient selon les milieux et les organismes (Tableau 1). On peut observer une grande variabilité des autotrophes selon leur environnement et leur besoins en éléments. Les plantes terrestres ont une composition plus élevée en carbone, nécessaire à leur maintien et assurant une fonction de défense face au broutage (Elser et al, 2000). 2 Bruyère (toundra) Couvert forestier Sphaignes tourbières tempérées tourbières boréales Phytoplancton (eau douce) Phytoplancton (milieu marin) C: N: P 1943:33:1 1212:28:1 C: N 59 43.6±3.5 N: P 34 27.8±1.4 1986:32:1 59.9±17.0 33.5±10.8 2823:36:1 75.3±23 36.4±12.6 166:20:1 10.0±3.0 30.0±16.0 106:16:1 6.6 16 Références Jonasson et al, 1999 McGroddy et al, 2004 Francez, non publié Pakarinen, 1977 Elser et al, 2000 Redfield, 1958 Tableau 1 : Stœchiométrie des autotrophes dans différents écosystèmes. Les rapports en éléments constitutifs des organismes sont différents le long de la chaîne trophique : les herbivores n’ont pas les mêmes ratios que les plantes qu’ils mangent et ainsi de suite en remontant dans les niveaux trophiques. McGroddy et al (2004) ont montré que les rapports C : N : P (116 : 28 : 1) des herbivores en milieu forestier étaient nettement inférieurs à ceux des végétaux. La différence est moins importante en milieu aquatique où ces mêmes ratios sont plus faibles au sein des autotrophes. Selon les besoins des organismes, certains éléments vont être davantage stockés ou recyclés. La régulation homéostatique permet aux organismes de ne pas voir leur composition en éléments changer avec les modifications du milieu extérieur. Kooijman (1995 in Sterner et Elser, 2002) définit l’homéostasie comme « la capacité des organismes à garder constante la composition en éléments chimiques de leur corps, malgré les changements de la composition chimique de leur environnement, incluant leur nourriture ». Cependant, cette capacité diffère selon les types d’organismes. Les autotrophes par exemple peuvent être plastiques concernant leur stœchiométrie, principalement au niveau des rapports C : N : P (Droop, 1974 ; Ågren, 2004, 2008) et ce, en raison de leur capacité à stocker différents éléments en excès dans l’environnement via une consommation de luxe (Klausmeier et al, 2004, 2008). Certains autotrophes sont d’ailleurs considérés comme non homéostatiques. C’est le cas notamment d’une algue unicellulaire, Scenedesmus, dont le ratio N : P suit parfaitement celui des ressources disponibles dans l’environnement (Figure 1 ; Rhee, 1978 in Sterner et Elser, 2002). Les animaux en revanche montrent beaucoup moins de variations dans leur composition en éléments et ont davantage tendance à être homéostatiques (Hall, 2009). 3 Figure 1 : Rapport N : P de l’algue unicellulaire Scenedesmus en fonction du rapport N : P du milieu. (A) axes linéaire (B) axes logarithmiques. D’après Rhee, 1978. La disponibilité en nutriments et leur stœchiométrie dans le milieu peuvent ainsi être à l’origine de variations des rapports en nutriments (les rapports C : N, C : P et N : P étant davantage développés dans les études réalisées) au sein des organismes, en particulier chez les producteurs primaires. Différents facteurs peuvent être à l’origine de variations en éléments : des processus chimiques (fertilisation, en agriculture notamment), biologiques (décomposition, excrétion…) ou physiques. Il a en effet été montré que les différents ratios des espèces végétales variaient en réponse aux différents apports de nutriments d’une part, mais également aux apports d’énergie (Rastetter et al, 1997 ; Sterner et al, 1997). Tout facteur susceptible d’avoir une influence les cycles biogéochimiques et sur la quantité de nutriments ou de lumière disponibles aux organismes peut avoir un effet indirect sur leur stœchiométrie ou leur croissance, notamment chez les autotrophes. Ce rapport a pour but de montrer comment les processus physiques vont influencer la stœchiométrie des ressources et des organismes et ainsi, par une redistribution des flux d’éléments, le fonctionnement de l’écosystème. En particulier, nous examinerons les effets de la turbulence et de la bioturbation. Les effets des changements globaux seront également abordés. I) Turbulence 1) Profondeur de mélange La composition en éléments des autotrophes varie en réponse aux apports relatifs en énergie et en nutriments majeurs (C, N, P) (Sterner et al, 1997). Tout processus ou facteur affectant ces apports est susceptible d’entraîner des modifications dans la stœchiométrie des producteurs primaires. 4 Les plantes aquatiques sont en « compétition » pour la lumière avec les autres molécules (matières dissoutes, éléments inorganiques, sédiments…) présentes dans la couche supérieure turbulente des lacs et océans, où la plupart des producteurs primaires pélagiques se situent (Huisman et al, 1999 ; Berger et al, 2006). La disponibilité en lumière accessible aux végétaux aquatiques (et plus particulièrement au phytoplancton), dépend de plusieurs facteurs tels que le rayonnement lumineux incident, la turbidité de l’eau ou encore la « profondeur de mélange » (définie comme l’extension verticale de la colonne d’eau mélangée, soumise à la turbulence) (Huisman et Weissing, 1994 ; Diehl 2002). L’hypothèse « lumière : nutriments » suppose que les rapports C : nutriment du phytoplancton sont influencés par les ratios de lumière : nutriments disponibles. Par exemple, de forts apports en lumière ou de faibles apports en phosphore peuvent entraîner des ratios C : P élevés dans le phytoplancton (Sterner et al, 1997). Il a également été montré qu’il existe une corrélation négative entre la densité de phytoplancton et le ratio C : P des algues avec l’augmentation de la profondeur de mélange, les apports en lumière étant évidemment plus faibles avec la profondeur (Figure 2) (Berger et al, 2006). La turbulence, susceptible de mettre et de conserver la mise en suspension de particules minérales et organiques, contribue de ce fait à diminuer la disponibilité en lumière pour les espèces végétales aquatiques. Il y a cependant une variation considérable dans la réponse de la stœchiométrie du phytoplancton à la lumière et aux nutriments. Figure 2 : Courbes de (a) l’intensité des radiations lumineuses utilisables pour la photosynthèse (% de la surface d’irradiation) et (b) le ratio C : P du seston (moles), en fonction de la profondeur de mélange (mixing depth). D’après Berger et al, 2006. 5 Trois approches sont généralement utilisées pour étudier les effets du ratio lumière : nutriments : études de laboratoire sur une espèce de phytoplancton, études comparatives et expérimentales de terrain sur des communautés de phytoplancton (Dickman et al, 2006). Les études réalisées sur une seule espèce de phytoplancton révèlent des effets relativement importants de la lumière et des nutriments sur la stœchiométrie. Une augmentation du rayonnement entraîne ainsi des ratios C : N et C : P élevés dans les cellules de phytoplancton, les quantités d’azote, de phosphore et de chlorophylle a décroissant avec une hausse de la lumière (Sterner et Elser, 2002). Les études comparatives de terrain ont également montré des effets de la lumière et des nutriments. L’hypothèse « lumière-nutriments » a ainsi été confirmée par l’étude de Hasset et al (1997) dans laquelle les résultats montrent que le rapport C : P du seston et le ratio lumière : phosphore sont fortement corrélés. Il a de plus été observé que le rapport C : P du seston était plus élevé à proximité de la surface, où la disponibilité en lumière est plus importante, que dans les couches situées davantage en profondeur (Hochstädter, 2000). D’autres études expérimentales réalisées sur le terrain montrent l’importance de l’influence de la lumière sur la stœchiométrie du phytoplancton. Elser et al (2003) ont testé l’hypothèse « lumière : nutriments » sur les communautés pélagiques d’un lac limité en phosphore. Les effets de trois niveaux d’intensité lumineuse et de trois niveaux d’apports en nutriments ont ainsi été analysés. Les résultats de cette étude montrent que la lumière a principalement un effet sur le ratio C : P du seston. 2) Upwelling Le phénomène d’upwelling est le résultat de divergences horizontales dans la couche supérieure de l’océan (Lehman et Myrberg, 2008). Ces phénomènes se produisent lorsque de forts vents marins, généralement des vents saisonniers, poussent l’eau de surface et permettent la remontée d’eaux plus profondes, plus froides, denses et riches en nutriments vers la surface, remplaçant ainsi les eaux chaudes et épuisées en nutriments (Figure 3). Ces évènements sont souvent associés à une augmentation de la productivité biologique. 6 Figure 3 : Schéma illustrant le processus d’upwelling (Source : Cordell Bank National Marine Sanctuary Official Site) De nombreuses études ont été réalisées sur ce phénomène, notamment en mer Baltique (Lehman et Myrberg, 2008) où il a été montré que les évènements d’upwelling étaient à l’origine des blooms de phytoplancton et de cyanobactéries (Kuvaldina et al, 2009 ; Nausch et al, 2009) et avaient un impact sur le stockage du nitrate dans le phytoplancton (Bode et al, 1997). L’azote inorganique dissous (essentiellement NO3 et/ou NH4, NO2) est en général le nutriment limitant la croissance du phytoplancton en milieu marin, particulièrement pendant les périodes de stratification (Codispoti, 1983). Les remontées d’eaux froides durant les évènements d’upwelling, riches en azote (sous forme de nitrate et de nitrite), permettent une augmentation particulièrement importante de la production de phytoplancton. Le phytoplancton doit être capable de s’adapter rapidement aux changements de concentrations en nutriments. Bode et al (1997) ont étudié les relations entre le stockage du nitrate, la disponibilité en azote inorganique dissous et la biomasse et la production du phytoplancton, ainsi que l’adaptation des populations de phytoplancton aux variations rapides d’apport en azote. Ces observations ont été réalisées en comparant des données récoltées pendant des évènements d’upwelling avec des périodes de non-upwelling. Les résultats montrent que les profils de nitrate et d’ammonium pendant les upwellings sont différents de ceux obtenus hors période d’upwelling et que le stockage du nitrate dans le phytoplancton est un bon indicateur d’un évènement récent d’upwelling. Les concentrations internes en nitrate du phytoplancton passent de 0.005 mmol N/m² hors période d’upwelling à 0.064 mmol N/m² en conditions d’upwelling et reflètent ainsi celles du milieu extérieur ([NO 3-]= 10.968 mmol N/m² (non7 upwelling) et 26.965 mmol N/m² pendant l’upwelling) (Figure 4). On peut également voir que les concentrations intracellulaires en NH4 et NO3 sont supérieures en conditions d’upwelling. Ces résultats sont les moyennes obtenues pour l’ensemble des populations de phytoplancton. Les ratios C : N et N : P du phytoplancton varient donc également avec les quantités d’azote stockées. Le rapport C : N est plus faible en conditions d’upwelling alors que le rapport N : P est plus élevé. Cependant, d’autres études ont montré que les quantités d’azote stockées variaient considérablement d’une espèce à l’autre (Martinez, 1991; Marsot et al, 1992). Ainsi, les diatomées s’adaptent plus rapidement que d’autres aux pics d’azote. Les variations de ratios sont donc également différentes en fonction de la famille de phytoplancton considérée ainsi que de la profondeur à laquelle se trouve le phytoplancton. -3 Figure 4 : Profils verticaux de température (°C), concentrations en nitrate et ammonium (mmol.m ), chlorophyle a -3 -3 -1 -3 (mg. m ) et production (mg C. m .h ), nitrate intracellulaire (µg. m ) effectués dans des stations en conditions de non-upwelling et d’upwelling. D’après Bode et al, 1997. Comme nous l’avons vu dans la partie précédente, la lumière a un effet sur le prélèvement de l’azote et plus le phytoplancton est situé à la surface, plus grande sera la quantité d’azote prélevée. Les résultats de l’étude de Bode et al (1997), ainsi que ceux de l’étude de Martinez et al (1991) permettent de conclure que les populations de phytoplancton présentes dans les zones d’upwelling sont capables de prélever le nitrate immédiatement (lorsqu’il est disponible), et de l’assimiler par la suite dans la matière organique (protéines, molécules organiques riches en azote). Il apparaît également que le prélèvement de l’azote et 8 la fixation du carbone soient en compétition pour l’énergie métabolique qui leur est nécessaire (Collos et Slawyk, 1979). Lorsqu’aucun élément n’est limitant et que l’organisme est capable de stocker plus de nutriments qu’il n’en a besoin (consommation de luxe), c’est l’énergie disponible de cet organisme qui limite le prélèvement des éléments. L’incorporation massive d’azote diminuerait la fixation du carbone par le phytoplancton. Cela entraînerait une baisse supplémentaire du rapport C : N au sein du phytoplancton. II) Bioturbation La bioturbation est un réarrangement physique du profil de sol ou des sédiments par la macrofaune et les systèmes racinaires des plantes. En creusant terriers et galeries, les invertébrés mélangent de grandes quantités de sol, de sédiments et de matière organique. Ils ont un rôle majeur dans la dégradation de la matière organique et dans la libération et le recyclage des nutriments qu’elle contient (Edwards, 2004) et ce, dans les écosystèmes aquatiques et terrestres. De par ces effets, ces invertébrés sont considérés comme des organismes ingénieurs, c’est-à-dire qu’ils modulent directement ou indirectement la disponibilité en ressources pour les autres espèces en provoquant des changements d’état physiques de la matière biotique ou abiotique (Jones et al, 1994). De plus, les invertébrés contribuent indirectement au recyclage de la matière par la stimulation de l’activité microbienne (Binet et al, 1998 ; Mermillod-Blondin et al, 2004 ; Mermillod-Blondin et Rosenberg, 2005). En écosystème aquatique, les invertébrés permettent également l’augmentation de l’interface eau-sédiment et sont à l’origine de la hausse des échanges d’éléments entre ces deux compartiments (Mermillod-Blondin et al, 2004). 1) Effet de la bioturbation sur le ratio C : N de la litière De nombreuses études se sont intéressées à l’effet de la bioturbation sur la dynamique de l’azote et du carbone (Lavelle et al, 1992 ; Bohlen et al, 1997 ; Decaëns et al, 1999 ; Amador et al, 2003). L’étude de Bohlen et al (1997) a examiné l’influence de Lombricus terrestris sur la décomposition de la litière dans un agrosystème. Des populations de L.terrestris ont été soumises à trois traitements différents : populations contrôles, avec ajout ou retrait d’un certain nombre de lombrics. Les auteurs ont tout d’abord remarqué que L.terrestris augmentait le taux de décomposition de la litière de surface pour les deux années étudiées. De plus, le ratio C : N de la litière subsistant à la surface était significativement plus 9 élevé pour les placettes contenant des populations non modifiées ou augmentées de lombrics. Ce même ratio est cependant moins élevé dans les turricules de lombrics déposés à la surface ou dans les galeries creusées. Il a également été montré que ces excréments étaient riches en azote (Lavelle et al, 1992 ; Edwards et Bohlen, 1996). Cette baisse du rapport C : N dans les excréments de lombrics suggère que ceux-ci ingèrent préférentiellement la litière ayant un faible ratio C : N, ce qui a pour conséquence d’augmenter le rapport de la litière restante. 2) Minéralisation et infiltration de l’azote Les excrétions de lombrics sont donc riches en azote, particulièrement en ammonium (NH4+) (Lavelle et al, 1992 ; Decaëns et al, 1999 ; Amador et al, 2003). Cette forte teneur en NH4+ peut être expliquée par la stimulation de la minéralisation de la matière organique et de l’activité microbienne dans l’intestin des lombrics (Barois et Lavelle, 1986). Cette forte concentration en NH4+ est observée dans les turricules « frais ». Plusieurs auteurs ont constaté une baisse de cette concentration (Lavelle et al, 1992 ; Decaëns et al, 1999). Dans leur étude, Decaëns et al (1999) constatent que le premier mois suivant l’excrétion, les excréments présentent une forte concentration en ammonium. Une baisse de cette concentration est ensuite observée et serait due à la production de NO 3- via un processus de nitrification (Lavelle et Martin, 1992). Certaines études montrent une accumulation du NO 3- (Syers et al, 1979) alors que d’autres ne constatent aucune augmentation de la concentration en NO3- dans les turricules de lombrics (Lavelle et Martin, 1992 ; Decaëns et al, 1999). La diffusion rapide du NO3- dans le sol pourrait expliquer que l’on ne retrouve pas de forte concentration en nitrate dans les excréments. Decaëns et son équipe observent trois pics de nitrate qu’ils expliquent par trois processus différents. Le premier pic serait dû à la production de NO3-, le second à la diffusion rapide du nitrate avec les flux d’eau s’infiltrant dans les galeries et le troisième pic à une diffusion latérale avec l’eau ruisselant sur les excréments, plus lente. Le processus de bioturbation augmenterait la vitesse d’infiltration de l’azote dans le sol. Il a en effet été observé que l’augmentation des populations de lombrics entraîne une augmentation de l’infiltration de l’azote dans le sol dans les agrosystèmes (Domìnguez et al, 2004). Cette étude a également montré que la densité des populations de lombrics expliquait 50% de la variabilité des flux totaux d’infiltration d’azote dans le sol. L’azote est ainsi disponible en quantités supérieures et plus facilement prélevable par les racines des plantes. Cela entraîne l’augmentation du rapport N : P et la diminution du ratio C :N. 10 3) Impact de la bioturbation sur la disponibilité en phosphate La bioturbation a une influence sur la distribution et la disponibilité en phosphore dans le sol. Plusieurs études ont montré que les excréments de lombrics contenaient trois fois plus de phosphore que le sol environnant, ce qui signifie des ratios C : P plus faibles (LopezHernandez et al, 1993). Le rapport C : P des végétaux présentant une plasticité de leur stœchiométrie suit la même tendance et baisse avec le ratio du milieu. De plus, l’ingestion et le mélange du sol favorise la dissolution du phosphore et la disponibilité de ses composés dans le sol (Le Bayon et Binet, 2006). 4) Augmentation de la surface de l’interface eau-sédiments Les exemples évoqués précédemment sont tirés d’études réalisées en milieu terrestre. La bioturbation en écosystèmes aquatiques présente cependant quelques différences avec la bioturbation en milieu terrestre. La faune benthique joue un rôle clé non seulement dans la transformation de la matière organique mais également dans le cycle des nutriments à l’interface eau-sédiment (Aller, 1983). De nombreuses études ont montré l’importance de la faune présente dans les sédiments notamment dans le remaniement des sédiments et l’irrigation dans les écosystèmes lacustres, marins et de rivière (Mermillod-Blondin et al, 2004). L’action de la faune benthique sur la minéralisation de la matière organique est différente selon le mode de bioturbation. La faune benthique peut ainsi avoir une action de remaniement des sédiments ou un comportement de bio-irrigation. Selon l’espèce considérée, les impacts sur la disponibilité en nutriments ne seront pas les mêmes. Par exemple, l’activité de bio-irrigation en profondeur d’Arenicola marina sera à l’origine d’une meilleure minéralisation du carbone que celle plus en surface de Nereis diversicolor (Banta et al, 1999). Mermillond-Blondin et al (2004) ont étudié l’effet de trois espèces d’invertébrés sur les processus biogéochimiques et les cycles de nutriments dans l’eau (NO2-, NO3-, NH4+, PO43-, SiO44-). Ils se sont ainsi intéressés à une espèce de polychète, Nereis diversicolor, une espèce de bivalve, Cerastoderma edule ainsi qu’à Corophium volutator (amphipode). Ils ont observé que les trois espèces avaient une activité de bioturbation différente. Selon leurs résultats, N. diversicolor faciliterait la diffusion des éléments dans la couche de sédiments grâce à un réseau dense de galeries qui permet le transport des nutriments en profondeur alors que C. edule et C. volutator facilitent la diffusion des éléments par le remaniement des sédiments 11 (Figure 5). Les nutriments sont alors disponibles dans la colonne d’eau et peuvent être captés par les autotrophes, dont les rapports C : N et C : P diminuent avec l’augmentation de leur concentration en N et P. Figure 5 : Impact de la bioturbation par trois espèces d’invertébrés benthiques, Cerastoderma edule, Corophium volutator et Nereis diversicolor correspondant à trois modes de bioturbation. + indique un effet positif, - un effet négatif et 0 pas d’effet significatif du mode de bioturbation sur les processus biogéochimiques. D’après MermillodBlondin et Rosenberg, 2005. En augmentant la surface de l’interface eau-sédiments, les invertébrés stimulent indirectement le processus de nitrification. En effet, l’oxygène est l’un des éléments qui diffusent des sédiments vers l’eau, entraînant ainsi une hausse de l’activité microbienne. Il y a une augmentation de la concentration en nitrate en profondeur et une baisse de la concentration en ammonium (Hüttel, 1990). Le nitrate formé est alors disponible pour les producteurs primaires. Cette augmentation de la concentration en NO 3- est particulièrement importante en milieu marin car dans ces écosystèmes, la croissance des organismes est principalement limitée par la quantité d’azote disponible (Elser et al, 2007). 5) Effets des modifications de la disponibilité en nutriments par la bioturbation sur les autres organismes Comme nous l’avons vu précédemment, la bioturbation permet, directement ou indirectement, la baisse du ratio C : N par une augmentation de la quantité d’azote disponible. La croissance des producteurs primaires des écosystèmes terrestres et marins étant principalement limitée par la quantité d’azote disponible, la bioturbation favorise la croissance des plantes dans ces milieux (Hüttel, 1990). Ces effets positifs ont ainsi été 12 observés en horticulture (Hidalgo, 1999) ainsi que dans les agrosystèmes (Pashanasi et al, 1996). De plus les autotrophes étant capables de modifier leur stœchiométrie via une consommation de luxe, la hausse de la quantité d’azote disponible peut être à l’origine de modifications des ratios en éléments au sein des producteurs primaires. Cela peut se traduire par une baisse du rapport C : N et une hausse du rapport N : P. III) Changements globaux Les activités anthropiques sont à l’origine de nombreux changements et perturbations des écosystèmes. Parmi ces nombreux changements, la hausse des températures, les perturbations dans le régime des précipitations, le changement d’usage des terres et la pollution sont des facteurs susceptibles de modifier les cycles biogéochimiques ou d’avoir un impact sur la stœchiométrie des organismes. De nombreuses études permettent d’obtenir des prédictions quant à la réaction des espèces face aux changements climatiques. 1) Effet de la hausse des températures en milieu terrestre La hausse des températures est l’un des problèmes majeurs liés aux activités humaines. Ces modifications peuvent avoir des effets sur les écosystèmes terrestres comme sur les écosystèmes aquatiques. Dans une étude réalisée sur 1 280 espèces de plantes terrestres (5 087 observations), Reich et Oleksyn (2003) ont analysé les effets de la température sur la composition en azote et phosphore. Les résultats montrent que les quantités d’azote et de phosphore contenues dans les feuilles des plantes analysées diminuent avec l’augmentation des températures moyennes annuelles (TMA), représentant une baisse des ratios C : N et C : P. A l’inverse, le rapport N :P augmente avec les TMA. Ces changements dans les ratios en fonction des températures moyennes pourraient être dus à l’adaptation des plantes aux conditions environnementales rencontrées. Les besoins des plantes en azote (synthèse de protéines riches en N) augmentant plus rapidement que ceux en phosphore (synthèse d’ARN riche en P), on observe une hausse du rapport N : P. L’augmentation des températures moyennes due au réchauffement climatique pourrait être à l’origine de modifications des ratios au sein des plantes terrestres. 13 2) Effets conjugués de l’acidification des océans et de la température D’autres études menées en milieu aquatique démontrent qu’il existe bien un effet de la température sur la stœchiométrie des producteurs primaires. La température peut avoir un effet indirect sur la stœchiométrie des cyanobactéries en renforçant les effets induits par l’augmentation de la concentration en CO2 (Fu et al, 2007). Dans leur étude réalisée sur des picocyanobactéries marines, Synechococcus et Prochlorococcus, ces auteurs se sont penchés sur les effets combinés de l’augmentation de température et de concentration en CO2 et ont ainsi comparé la croissance et la composition en éléments de ces cyanobactéries en les incubant dans les conditions actuelles de concentration en dioxyde de carbone et de température ainsi que dans les conditions prédites en 2100. Les deux facteurs combinés ont un impact sur la photosynthèse, ce qui, indirectement, modifie les rapports C : nutriments intracellulaires (Hyvönen et al, 2007). Les quantités de carbone et d’azote augmentent au sein des cyanobactéries au contraire du phosphore chez Synechococcus sous l’effet de la hausse de concentration en CO2. Cela entraîne une hausse d’environ 20% des rapports C : P et N : P. A l’inverse, chez Prochlorococcus, il n’y a pas d’effet de la concentration en CO2 mais la température entraîne le doublement des quantités en éléments, sans toutefois modifier significativement la stœchiométrie. De récentes expériences (Hutchins et al, 2007 ; Fu et al, 2007) ont montré que les hausses de températures attendues avec le réchauffement climatique au cours du siècle prochain auront sans doute des effets, certes mineurs, sur le ratio C : N : P. Cependant, l’effet de la température combiné avec d’autres changements tels que l’augmentation du CO2 pourrait avoir des conséquences bien plus importantes sur ce ratio, telles qu’une baisse des rapports C : N et C : P. De plus, les changements induits dans le phytoplancton sont susceptibles d’influencer la composition de la matière organique à des niveaux trophiques plus élevés. 3) Effets des UV sur la stœchiométrie En milieu marin, d’autres changements sont également prévus tels qu’une modification des courants marins, une acidification des océans, des variations des UV-B dans la colonne d’eau supérieure ainsi que d’autres formes de pollution (Beardall et Raven, 2004 ; Raven et al, 2005a). L’appauvrissement de l’ozone dû aux activités anthropiques est associé à des modifications au niveau des radiations ultraviolets (UV) traversant l’atmosphère. Ces changements ont un impact sur la colonne d’eau supérieure, dans les océans (Beardall et 14 Raven, 2004). Les effets de ces radiations sur la composition en acides gras et sur les ratios des éléments (C, N, P) d’une algue unicellulaire, Selenastrum capricornutum, ont été étudiés par Leu et al (2006). Ils ont observé des modifications à la fois dans la composition en acides gras et sur les différents rapports, en réponse à une irradiations aux ultraviolets. Les résultats montrent une diminution importante des ratios C : P et N : P causée par de fortes quantités de phosphore dans les cellules. Cela indique que S. capricornutum réagit à une exposition aux ultraviolets par un prélèvement plus importants de ce nutriments. Les mêmes résultats ont été trouvés à la fois lors d’expérience en laboratoire ainsi que sur le terrain, avec de la lumière naturelle (Leu et al, 2006). Une explication possible à ce prélèvement élevé serait l’augmentation de la demande en phosphore à cause de la stimulation le l’activité de biosynthèse, nécessaire pour réparer les dommages créés par les UV. Le phosphore prélevé en grande quantité serait stocké temporairement, probablement sous forme de polyphosphates, avant d’être utilisé, par exemple dans la synthèse d’ARN riche en P. En s’accumulant, ces facteurs de stress sont susceptibles d’entraîner des modifications dans la composition des communautés de phytoplancton ainsi que dans la stœchiométrie du phytoplancton et des effets en cascade dans la dynamique des chaînes alimentaires et des cycles de nutriments (Beardall et Raven, 2004). Finkel et al (2009) ont résumé les effets potentiels des changements environnementaux (notamment les effets directs et indirects des changements de température) sur la taille des cellules phytoplanctoniques (pouvant influencer la stœchiométrie en éléments, de même que le taux de métabolisme), la composition des communautés et en éléments du phytoplancton. Conclusion Les différents processus abordés sont à l’origine de changements dans la stœchiométrie des organismes directement, par une modification de la capacité de prélèvement des nutriments par les autotrophes ou en modifiant leur besoins en éléments (C, N, P) (lumière, température, UV…) ou indirectement par l’induction de changements de la disponibilité de ces nutriments (bioturbation, upwelling). La majorité de ces processus permet une augmentation de la concentration interne des organismes en azote et phosphore, ce qui diminue les rapports C : N et C : P des organismes n’étant pas soumis à une homéostasie stricte (principalement les producteurs primaires). La modification de la croissance et de la stœchiométrie des organismes induit à sont tour des changements dans la quantité et la 15 composition de la matière organique transmise aux niveaux trophiques supérieurs. Si les hétérotrophes ne sont pas plastiques au niveau de leur stœchiométrie, ils sont à l’origine d’un feedback par la régulation effectuée (excréments, urée) sur les pools de nutriments disponibles, de même que les végétaux qui modifient la qualité de la litière (Hall, 2009). L’équilibre des éléments chimiques au sein des organismes et les cycles biogéochimiques sont ainsi interactifs et interdépendants. Les processus physiques sont ainsi à l’origine de l’augmentation des flux au sein des écosystèmes. Il existe cependant des différences concernant les effets des différents processus sur la stœchiométrie des organismes. L’influence de ces processus diffère selon qu’il se produise en milieu terrestre ou aquatique. C’est le cas notamment de la température qui a certes un effet semblable sur le rapport C : N mais dont la hausse entraîne une augmentation du ratio N : P en milieu terrestre et une baisse de ce même ratio en écosystème aquatique (effet conjugué de la concentration en CO2 et de la température). De même, les impacts de la bioturbation observés en milieu terrestre sont également présents en milieux aquatiques. Dans ces écosystèmes cependant, les invertébrés benthiques permettent la remise à disposition des nutriments dans la colonne d’eau. Les écosystèmes aquatiques et terrestres ne sont pas non plus soumis aux mêmes processus contrôlant leur stœchiométrie écologique. Par exemple, la turbulence n’est pas un facteur présent en milieu terrestre. Ces observations sont à replacer dans le contexte actuel de changements climatiques. Les activités humaines ont en effet de nombreux impacts sur les cycles biogéochimiques et sur les processus physiques les contrôlant. Nous avons ainsi pu voir les effets de la hausse moyenne des températures à la surface du globe et dans les océans ainsi que l’impact des UV et de l’augmentation de la concentration en CO2. Ces impacts sur la stœchiométrie seront de plus en plus importants sous l’effet des activités anthropiques, cependant, peu d’études permettent réellement de les prévoir. 16 Bibliographie Ågren GI, 2004. The C:N:P stoichiometry of autotrophs: theory and observations. Ecology Letters 7:185–91. Ågren GI, 2008. Stoichiometry and nutrition of plant growth in natural communities. Annual Review of Ecology and Systematics 39:153–70. Aller RC, 1983. The importance of the diffusive permeability of animal burrow linings in determining marine sediment chemistry. Journal of Marine Research 41:299–322. Amador JA, Görres JH, Savin MC, 2003. Carbon and Nitrogen Dynamics in Lumbricus terrestris (L.) Burrow Soil: Relationship to Plant Residues and Macropores. Soil Science Society of America 67:1755–1762. Banta GT, Holmer M, Jensen MJ, Kristensen E, 1999. The effect of two polychaete worms, Nereis diversicolor and Arenicola marina, on decomposition in an organic-poor and an organic-enriched marine sediment. Aquatic Microbial Ecology 19:189–204. Barois I, Lavelle P, 1986. Changes in respiration rate and some physicochemical properties of a tropical soil during transit through Pontoscolex corethrurus Glossoscolecidoe, Oligochmta). Soil Biology and Biochemistry 18:539-541. Beardall J, Raven JA 2004. The potential effects of global climate change on microalgal photosynthesis, growth and ecology. Phycologia 43 : 26-40. Berger SA, Diehl S, Kunz TJ, Albrecht D, Oucible AM, Ritzer S, 2006. Light supply, plankton biomass, and seston stoichiometry in a gradient of lake mixing depths. Limnology and Oceanography 51: 1898-1905. Binet F, Fayolle L, Pussard M, 1998. Significance of earthworms in stimulating soil microbial activity. Biology and Fertility of Soils 27 :79–84. Le Bayon RC, Binet F, 2006. Eartworms change the distribution and availability of phosphorous in organic substrates. Soil Biology and Biochemistry 38: 235-246. Bode A, Botas JA, Fernàndez A, 1997. Nitrate storage by phytoplankton in a coastal upwelling environment. Marine Biology 129: 399-406. Bohlen PJ, Parmelee RW, McCartney DA, Edwards CA, 1997. Earthworm effects on carbon and nitrogen dynamics of surface litter in corn agroecosystems. Ecological Applications 7: 1341-1349. Codispoti LA, 1983. Nitrogen in upwelling systems. In: Carpenter E.J, Capone D.G. Nitrogen in the marine environment. Academic Press, New York pp 573-564. Collos Y, Slawyk G, 1979. 13C and 15N uptake by marine phytoplankton. I. Influence of nitrogen source and concentration in laboratory cultures of diatoms. Journal of Phycology 15: 186-190. 17 Decaëns T, Rangel AF, Asakawa N, Thomas RJ, 1999. Carbon and nitrogen dynamics in ageing earthworm casts in grasslands of the eastern plains of Colombia. Biology and Fertility of Soils 30:20–28. Dickman EM, Vanni MJ, Horgan MJ, 2006. Interactive effects of light and nutrients on phytoplankton stoichiometry. Ecology 146: 676-689. Diehl S, 2002. Phytoplankton, light, and nutrients in a gradient of mixing depths: Theory. Ecology 83: 386–398. Domínguez J, Bohlen PJ, Parmelee RW, 2004. Earthworms Increase Nitrogen Leaching to Greater Soil Depths in Row Crop Agroecosystems. Ecosystems 7: 672–685. Droop MR, 1974. The nutrient status of algal cells in continuous culture. Journal of the Marine Biological Association of the United Kingdom 54:825–55. Edwards CA, 2004. Earthworm ecology. CRC Press pp 146-151. Edwards CA, PJ Bohlen, 1996. The biology and ecology of earthworms. Chapman and Hall, London, England. Elser JJ, Bracken ME, Cleland EE, Grüner DS, Harpole WS, Hillebrand H, Ngai JT, Seabloom EW, Shurin JB, Smith JE, 2007. Global analysis of nitrogen and phosphorus limitation of primary producers in freshwater, marine and terrestrial ecosystems. Ecology Letters 10: 1135–1142. Elser JJ, Fagan WF, Denno RF, Dobberfuhl DR, Folarin A, Huberty A, Interlandi S, Kilham S.S, McCauley E, Schulz KL, Siemann EH, Sterner RW, 2000. Nutritional constraints in terrestrial and freshwater foodwebs. Nature 408: 578-580. Elser JJ, Kyle M, Makino W, Yoshida T, Urabe J, 2003. Ecological stoichiometry in the microbial food web: a test of the light:nutrient hypothesis. Aquatic Microbial Ecology 31:49-65. Finkel ZV, Beardall J, Flynn KJ, Quigg A, Rees TA, Raven JA, 2007. Phytoplankton in a changing world: cell size and elemental stoichiometry. Journal of Phytoplankton Research 32:119-137. Fu FX, Warner ME, Zhang Y, Feng Y, Hutchins DA, 2007. Effects of increased temperature and CO2 on photosynthesis, growth, and elemental ratios in marine synechococcus and prochlorococcus (Cyanobateria). Physiological Society of America 43:485–496. Hall SR, 2009. Stoichiometrically explicit food webs: feedbacks between resources supply, elemental constraints and species diversity. Annual Review of Ecology, Evolution, and Systematics 40:503–528. 18 Hasset RP, Cardinale B, Stabler LB, Elser JJ, 1997. Ecological stoichiometry of N and P in pelagic ecosystems: comparison of lakes and oceans with emphasis on the zooplanktonphytoplankton interaction. Limnology and Oceanography 42: 648-662. Hidalgo P, 1999. Earthworm castings increase germination rate and seedling development of cucumber. Mississippi Agricultural and Forestry Experiment Station, Research Report 22. Hochstädter S, 2000. Seasonal changes in C:P ratios of seston, bacteria, phytoplankton and zooplankton in a deep, mesotrophic lake. Freshwater Biology 44:453-463. Huisman, J, P. van Oostveen, FJ. Weissing, 1999. Critical depth and critical turbulence: two different mechanisms for the development of phytoplankton blooms. Limnology and Oceanography 44:1781-1787. Huisman J, Weissing F.J, 1994. Light-limited growth and competition for light in well-mixed aquatic environments - an elementary model. Ecology 75: 507–520. Hutchins DA, Fu FX, Zhang Y, Warner ME, Feng Y, Portune K, Bernhardt PW, Mulholland MR, 2007. CO2 control of Trichodesmium N2 fixation, photosynthesis, growth rates, and elemental ratios: Implications for past, present, and future ocean biogeochemistry. Limnology and Oceanography 52: 1293-1304. Hyvönen R, Ågren GI, Linder S, Persson T, Cotrufo MF, Ekblad A, Freeman M, Grelle A, Janssens IA, Jarvis PG, Kellomäki S, Lindroth A, Loustau D, Lundmark T, Norby RJ, Oren R, Pilegaard K, Ryan MG, Sigurdson BD, Strömgren M, Van Oijen M, Wallin G, 2007. The likely impact of elevated [CO2], nitrogen deposition, increased temperature and management on carbon sequestration in temperate and boreal forest ecosystems: a literature review. New Physiologist 173: 463–480. Jones CG, Lawton JH, Shachak M, 1994. Organisms as ecosystem engineers. Oikos 69:373386. Jonasson S, Shaver GR, 1999. Within-stand nutrient cycling in arctic and boreal wetlands. Ecology 80: 2139-2150. Klausmeier CA, Litchman E, Daufresne T, Levin S.A, 2004a. Optimal nitrogen-tophosphorus stoichiometry of phytoplankton. Nature 429:171–74. Klausmeier CA, Litchman E, Daufresne T, Levin S.A, 2008. Phytoplankton stoichiometry. Ecological Research 23:479–85. Kooijman SA, 1995. The stoichiometry of animal energetic. Journal of Theoretical Biology 177: 139-149 in Sterner et Elser, 2002. Kulvadina N, Lips I, Lips U, Liblik T, 2009. The influence of a coastal upwelling event on chlorophyll a and nutrient dynamics in the surface layer of the Gulf of Finland, Baltic Sea. Hydrobiologia. 19 Lavelle P, Melendez G, Pashanasi B, Schaefer R, 1992. Nitrogen mineralization and reorganization in casts of the geophagous tropical earthworm Pontoscolex corethrurus (Glossoscolecidae). Biology and Fertility of Soils 14:49-53. Lavelle P, Martin A, 1992. Small-scale and large-scale effects of endogeic earthworms on soil organic matter dynamics in soils of the humid tropics. Soil Biology and Biochemistry 24:1491–1498. Lehman A, Myrberg K, 2008. Upwelling in the Baltic Sea - A review. Journal of Marine Systems 74: S3-S12. Leu E, Faerovig PJ, Hessen DO, 2006.UV Effects on stoichiometry and PUFAs of Selenastrum capricornutum and their consequences for the grazer Daphnia magna. Freshwater Biology 51:2296-2308. Lopez-Hernandez D, Lavelle P, Fardeau JC, Nino M, 1993. Phosphorous transformations in two P-sorption contrasting tropical soils during transit through Pontoscolex corethurus (Glossoscolecidae : Oligochaeta). Soil Biology and Biochemistry 25: 789-792. Marsot P, Mouhri K, Cembella A.D, 1992. Assimilation du nitrate en cycles diurnaux par Phaeodactylum tricornutum. Journal of Physiology and Biochemistry 30: 665-673. Martinez R, 1991. Transient nitrate uptake and assimilation in Skeletonema costatum cultures subject to nitrate starvation under low irradiance. Journal of Plankton Research 13: 499512. McGroddy ME, Daufresne T, Hedin LO, 2004. Scaling of C : N : P stoichiometry in forests worldwide: Implications of terrestrial redfield-type ratios. Ecology 85: 2390-2401. Mermillod-Blondin F, Rosenberg R, François-Carcaillet F, Norling K, Mauclaire L, 2004. Influence of bioturbation by three benthic infaunal species on microbial communities and biogeochemical processes in marine sediment. Aquatic Microbial Ecology 36: 271–284. Mermillod-Blondin F, Rosenberg R, 2005. Ecosystem engineering: the impact of bioturbation on biogeochemical processes in marine and freshwater benthic habitats. Aquatic Science 68: 434-442. Nausch M, Nausch G, Lass HU, Mohrholz V, Nagel K, Siegel H, Wasmund N, 2009. Phosphorus input by upwelling in the eastern Gotland Basin (Baltic Sea) in summer and its effects on filamentous cyanobacteria. Estuarine, Coastal and Shelf Science 83: 434442. Pakarinen P, Tolonen K, 1977. Distribution of lead in Sphagnum fuscum profiles in Finland. Oikos 28: 69-73. Pashanasi B, Lavelle P, Alegre J, Charpentier F, 1996. Effect of the endogeic earthworm, Pontoscolex corethurus on soil chemical characteristics and plant growth in a low-input tropical agroecosystem. Soil Biology and Biochemistry 28: 801-808. 20 Rastetter EB, Ågren GI, Shaver GR, 1997. Responses of N-limited ecosystems to increased CO2: a balanced-nutrition, coupled-element-cycles model. Ecological Applications 7:444-460. Raven JA, Caldeira K, Elderfield H et al, 2005a. Ocean acidification due to increasing atmospheric carbon dioxide. The Royal Society of London. Redfield AC, 1958. The biological control of chemical factors in the environment. American Scientist 46: 205-221 in Sterner et Elser, 2002. Reich BP, Oleksyn J, 2003. Global patterns of plant leaf N and P in relation to temperature and latitude. Proceedings of the National Academy of Science 101:11001-11006. Rhee GY, 1978. Effects on N: P atomic ratios and nitrate limitation limitation on algal growth, cell composition and nitrate uptake. Limnology and Oceanography 23: 10-25 in Sterner et Elser Sterner RW, Elser JJ, 2002. Ecological stoichiometry: the biology of elements from molecules to the biosphere. Princeton University Press, Princeton. Sterner RW, Elser JJ, Fee EJ, Guildford SJ, Chrzanowski TH, 1997. The light:nutrient ratio in lakes: the balance of energy and materials affect ecosystem structure and process. The American Naturalist 150:663–684. Syers, J. K., A. N. Sharpley, and D. R. Keeney. 1979. Cycling of nitrogen by surface-casting earthworms in a pasture ecosystem. Soil Biology and Biochemistry 11:181–185. 21 Résumé : La stœchiométrie écologique étudie les rapports entre les éléments chimiques au sein des organismes et dans leurs interactions avec l’environnement. Les organismes ont des compositions relativement constantes en divers éléments tels que le carbone, l’azote et le phosphore. Les rapports entre ces éléments (C : N : P) varient d’un type d’organisme et d’un milieu à un autre et peuvent être modifiés par la disponibilité en nutriments et en lumière au sein des organismes présentant une plasticité au niveau de leur stœchiométrie (autotrophes). Tout facteur, tels que les processus physiques, susceptible d’avoir une influence sur la quantité de nutriments ou de lumière disponible peut induire des changements dans les rapports en éléments des organismes et influencer les transferts de ces éléments vers les niveaux trophiques supérieurs. La turbulence, par la remise en suspension de particules organiques ou inorganiques, influe sur la profondeur de mélange et induit une diminution de la disponibilité en lumière dans les milieux aquatiques, ce qui se traduit par une baisse du rapport C : P du seston. Les phénomènes d’upwelling, causés par l’influence du vent sur les courants, provoquent des remontées de nutriments et sont à l’origine de blooms de phytoplancton ainsi que de modifications de leurs ratios C : N : P. La bioturbation modifie la disponibilité en azote entraînant une baisse du ratio C : N et une hausse du ratio N : P. La stœchiométrie écologique permet également de faire des prédictions quant à la réponse des organismes aux changements globaux et s’avère donc être un outil nécessaire à la compréhension du fonctionnement des écosystèmes de plus en plus altéré par les activités humaines. Mots-clés : stœchiométrie écologique, réseaux tropiques, hypothèse lumière-nutriments, upwelling, bioturbation, changements globaux. Abstract : Ecological stoichiometry deals with the balance of multiple chemical substances in ecological interactions et processes. Organisms have relatively constant compositions in different elements such as carbon, nitrogen and phosphorus. C: N: P ratios vary between organisms and ecosystems and may be modified by light and nutrient availability on organisms which are plastic in their stoichiometry (autotrophs). Any factor, such as physical processes, which may affect the amount of nutrient or the available light can induce changes in elemental ratios and influence the transfer of these elements to higher trophic levels. Turbulence, by resuspension of particulate organic and inorganic matter, affects mixing depths and induces a decrease in light availability in aquatic ecosystems, resulting in a decrease in seston C: P ratio. Upwellings, provoked by the influence of winds on oceanic currents, cause nutrients wind up and spark phytoplankton blooms off as well as C: N: P ratios modifications. Bioturbation modifies nitrogen availability, causing a decrease in the C: N ratio and an increase in the N: P ratio. Ecological stoichiometry can also make predictions about the response of organisms to global change and is therefore a necessary tool for understanding the functioning of ecosystems increasingly altered by humans activities. Key-words: ecological stoichiometry, food web, light-nutrient hypothesis, upwelling, bioturbation, global change. 22