A l’occasion de la célébration du centenaire de la naissance de Roland Barthes, l’Institut supérieur des arts et métiers de Sfax et l’Union des écrivains tunisiens organisent un colloque international sur le thème de : Les visages multiples de Roland Barthes Sfax, 13-15 Avril 2016 Roland Barthes figure parmi les grands écrivains et critiques littéraires qui se focalisent sur les multiples aspects des diverses formes d’activité culturelle donnant lieu à des approches académiques qui touchent des domaines très variés. Roland Barthes s’intéresse à la lecture du roman en premier lieu et des textes de manière générale pour les critiquer et occupe, par ce biais, une place importante dans le monde de la critique littéraire. Avec lui, la lecture se métamorphose en une sorte de fouille archéologique dans la mémoire du texte pour démasquer d’abord et analyser ensuite les traits spécifiques du discours narratif. Il pratique l’interprétation et plonge dans les études linguistiques et sémiologiques eu égard à la variété de leurs applications, ce qui lui accorde un statut privilégié dans le paysage sémiologique contemporain. En effet, nous assistons au sein de son œuvre à une rencontre inédite entre les éminents théoriciens de la sémiologie, Saussure et Peirce, où Roland Barthes sachant mieux que quiconque réconcilier les deux théories sans pour autant être totalement d’accord avec elles. Sur cette base, il réussit à donner à la sémiologie un sens tout à fait particulier par-delà l’autorité de la linguistique ce qui lui vaut l’obtention d’une chaire au Collège de France. Roland Barthes pratique profondément la théorisation littéraire et critique dans le sens où il excelle dans l’art d’appartenir au structuralisme tout en se soustrayant à ses contraintes. Il fait ses preuves en échangeant avec les plus éminents de ses contemporains, sans oublier qu’il procure à l’écriture littéraire, à la lecture, à la critique, et à l’interprétation dans le domaine du texte littéraire et artistique un plaisir croissant en le libérant surtout de l’auteur. Roland Barthes est différent des autres. Il est à la fois solidaire avec eux mais s’affirme aussi comme leur perpétuel adversaire sur tous les plans. Il habite les lignes de fuite sans pour autant se donner l’occasion de les capturer. C’est par enchantement qu’il mène ses recherches dans tous les champs de la connaissance et de la culture. Il s’intéresse à la culture populaire transformée par la bourgeoisie en Mythologies de la vie ordinaire. Roland Barthes n’est en aucun cas convaincu par les réalisations des théories critiques et sémiologiques en vogue à son époque. Habitant le langage et se rebellant contre ses divers contextes linguistiques et discursifs, il s’aventure dans tous les champs du signe allant de l’écriture au degré zéro, à la chambre claire s’envolant le plus loin possible dans les divers univers sémiologiques. Roland Barthes s’intéresse à la Linguistique pour attirer notre attention sur le pouvoir de la langue et sur la sémiologie du pouvoir, afin de mener à bien la stratégie de leur dépassement vers une sémiologie des pratiques et des applications dans les domaines de la sociologie, des mythologies, de la photographie, du cinéma, de la musique, etc. Roland Barthes penche plutôt pour un changement dans l’orientation culturelle et intellectuelle de la société en se focalisant davantage sur les signes là où les êtres humains peuvent, de nos jours, saisir que le sens prend toujours le signe comme sa terre natale et que le monde n’est autre chose qu’un signe qui demande à être incessamment interprété. Roland Barthes plaide pour une sémiologie non linguistique qui s’occupe des signes visibles et il ne cesse d’être convaincu que l’avenir de la sémiologie dépend de ses applications dans des champs autres que celui de la linguistique pure. Son intérêt sémiologique se métamorphose en des sortes de bifurcations avec la vie ordinaire dans ses aspects culturels, anthropologiques et communicationnels. Il s’intéresse à l’image en tant que champ sémiologique, exploitant toutes les manifestations de la culture populaire imposées par la société : la mode, le corps dans la publicité, le monde des arts martiaux, le bourgeois et toutes ses contradictions, ses mythologies, le savon et les produits de nettoyage, le vin et le lait……Barthes devient ainsi quelqu’un qui nous interpelle et nous invite en une compagnie amoureuse irrésistible pour le lecteur qui reste séduit par une stratégie d’écriture abrupte refusant toute lecture sous l’influence du désir d’un texte qui se meut dans l’angle d’une chambre éclairée et éclairant à la fois les confins du monde des signes au degré zéro. Roland Barthes réussit à nous fournir un dictionnaire langagier qui fait sortir la langue de la simple imitation et lui ouvre de nouvelles pistes d’expressivité du désir humain pour une aventure dans les sous-sols du sens. Il nous apprend comment s’aventurer dans l’écriture au-delà de l’autorité de celle-ci, comment écrire le désir dans son caractère nomade primitif et comment mettre à nu une sémiologie qui condamne le pouvoir culturel de la bourgeoisie. Roland Barthes ne cesse de pratiquer l’écriture et la critique, de dénouer les apories du roman, de lire l’image et d’explorer sans répit les mythes. Il transforme la sémiologie en faisant d’elle un monde truffé de signes totalement mystérieux ; des signes qui s’attirent et se repoussent sans pour autant engendrer des clivages excluant l’étonnement de la vie et du sens. Le monde inventé par Roland Barthes est un monde exceptionnel difficile à distinguer du héros aux visages multiples tel que nous le trouvons dans les romans de Dostoïevski. Il nous inculque la joie, l’amertume, l’esquive, le voyage jusqu’au bout de la distance sur le rythme d’une musique qui nous rappelle les traits propres de tout ce monde mythologique, fait de désir, de communication, de publicité, de culture de la mode…, du fond duquel émerge l’événement sémiologique. En célébrant le centenaire de sa naissance, nous cherchons surtout à inviter Roland Barthes au cœur de notre culture arabe, dans un moment de notre histoire où la relation entre « faire appel » et « être à l’écoute » devient de plus en plus complexe, afin de faire sortir Barthes de l’oubli, même si nous avons du mal à nous réjouir de son écoute. Or, se ressouvenir de Barthes, alors que la mémoire semble être déconnectée de son monde, c’est aussi la promesse que la mémoire se donne à ellemême un début et un retour incessamment renouvelés. Dans ces termes, l’acte de se ressouvenir de Barthes porte en lui les germes d’un monde authentique qui couvre sans doute tous les champs de la culture, de la littérature et de la connaissance, du côté de son écriture et de sa textualité autant que du côté de sa lecture, de sa déconstruction et de son déplacement en amont quant à son caractère sémiologique et mythologique propre. LES AXES THEMATIQUES : (1) Lecture(s) dans le réseau conceptuel de Barthes A. La littérature…la critique littéraire…la mort de l’auteur…la narrativité…. la narrativité du discours… B. L’écriture… le texte… le plaisir du texte… la langue…la vérité… la résistance…l’engagement… C. La sémiologie…la narrativité de l’image…l’autobiographie... (2) L’importance de Barthes dans le paysage littéraire et culturel A. Le paysage culturel entre l’attitude privée et l’engagement chez Barthes… B. L’écriture narrative dans les champs du texte artistique… C. La critique structuraliste et le dépassement du structuralisme… (3) Barthes et l’aventure sémiologique A. La critique, la construction et le dépassement… B. Les domaines de la sémiologie de Barthes… C. Bricolages sémiologiques… (4) La narrativité de l’image dans la sémiologie de Barthes A. L’image dans le discours photographique… B. L’image du corps dans la publicité et la mode… C. L’image cinématographique par-delà l’idéologie… D. L’image mythologique de la vie ordinaire… (5) Que reste-t-il après Barthes ? A. Le besoin de Barthes pour penser avec et contre lui… B. Barthes et ses contemporains… C. Barthes l’absent-présent dans le paysage culturel arabe… DATES IMPORTANTES 05 Janvier 2016 : date limite d’envoi des propositions avec résumés. 20 Janvier 2016 : notification d’acceptation ou non des propositions. 20 mars 2016 : dernier délai pour envoyer les textes définitifs et confirmer sa participation. Du 13 au15 Avril 2016 : les dates du colloque. Les propositions doivent être envoyées au comité d’organisation du colloque à l’adresse électronique suivante : [email protected] Cet argumentaire a été traduit de l’arabe par Hamdi Mlika (Université de Kairouan)