Maladies virales des plantes cultivées au Sahel Les modes de transmission du virus de la panachure jaune du riz Traoré O.1, Traoré E.V.S.1, Allarangaye M.D.2, Traoré M.D.3, Fargette D.4, Konaté G. 1 INERA 01 BP 476 Ouagadougou 01, Burkina Faso; 2ITRAD, BP 5400 N'Djaména, Tchad; 3 IER/CRRA de Sikasso BP 183 Sikasso, Mali; 4IRD, BP 64501 34394 Montpellier cedex 5, France. 1 Introduction Le virus de la panachure jaune du riz ou Rice yellow mottle virus (RYMV) en anglais est responsable de la plus importante maladie virale du riz en Afrique, seul continent où il a été rapporté. Ce virus sévit dans la plupart des pays producteurs de riz au Sud du Sahara, y compris les îles de Pemba, Zanzibar et Madagascar dans l'océan indien. Il peut provoquer des pertes de récolte de 25 à 100% surtout chez les variétés de riz sensibles. C'est un virus très stable et hautement infectieux qui appartient au genre Sobemovirus. Son pouvoir d'infection n'est détruit qu'au delà de 70°C (Bakker, 1974). Dans un broyat de feuille de riz malade, il reste infectieux pendant 1 à 2 mois à température ambiante. Il reste aussi infectieux dans un extrait obtenu en broyant seulement 1g de feuilles malades dans 1000 litres d'eau. Ces caractéristiques font du RYMV un virus à fort potentiel de dissémination à l'échelle d'un champ, d'un pays, d'une région ou même d'un continent. Ce travail a pour objectif de donner des informations sur les modes de transmission actuellement connus du RYMV. Transmission mécanique C'est la méthode de transmission communément utilisée au laboratoire. Il s'agit de frotter les feuilles d'une plante saine avec un broyat de feuilles de plants malades (Bakker, 1970). Transmission par insectes vecteurs Environ une vingtaine d'espèces d'insectes sont capables de transmettre le RYMV. Il s'agit pour la plupart d'insectes coléoptères et aussi de quelques orthoptères. Les espèces les plus citées pour la transmission au champ sont Chatocnema spp., Sesselia pussila et Trichispa sericea. 1 mm 1 mm Sesselia pusilla Trichispa sericea 1 mm Quelques insectes vecteurs du RYMV (Source : Bakker, 1974) Chaetocnema abyssinica Transmission par des animaux mammifères Plusieurs animaux sont capables de transmettre le RYMV en s'alimentant sur les plants de riz (Sarra et Peters, 2003). Il s'agit des rats, fréquents dans les rizières et des animaux domestiques comme les bœufs et les ânes utilisés dans les travaux au champ ou qui cherchent du pâturage. Contact: Oumar Traoré, Tel : +226 50 31 92 02/08; [email protected] M. D. Allarangaye, Tel : +235 52 01 01; [email protected] Page 1 Transmission par le vent Le vent qui souffle soulève la poussière de sable fin et provoque le frottement des plants de riz entre eux. Avec ce frottement, le RYMV peut être transmis à partir de plants malades. Cette transmission est accentuée sous l'effet des grains de sable qui causent des blessures aux feuilles de riz facilitant ainsi le passage du virus (Sarra et al., 2004). Transmission par l'eau d'irrigation Le RYMV peut être détecté dans l'eau d'irrigation qui est donc une source possible du virus. Mais le seul arrosage de plants avec de l'eau contaminée ne permet pas la transmission du virus. Par contre si d'autres facteurs capables de provoquer des blessures aux plants de riz y sont associés, le RYMV peut alors se transmettre par l'eau d'irrigation. Transmission à partir de certaines opérations culturales L'homme lui-même participe à la transmission du RYMV au cours des travaux au champ. En touchant à des plants malades, il souille ses mains. En les touchant ensuite aux plants sains, il leur transmet le virus. Les principales opérations culturales incriminées sont : arrachage et mise en bottes des plantules de la pépinière Dans ce cas, les mains sont souillées au contact de plants malades pouvant se trouver dans la pépinière (plantules de riz, repousses de riz ou plants de riz sauvage Oryza longistaminata). De plus certains producteurs coupent l'extrémité des feuilles ou des racines des plantules déjà en bottes avec une machette ou d'autres outils tranchants. Cette pratique augmente le risque de contamination. repiquage des plantules de riz au champ: Le repiquage de plantules malades présentes dans les bottes laisse du virus sur les mains de l'homme qui le transmet ensuite en repiquant des plantules saines. Désherbage manuel du champ Au cours du désherbage, les mains peuvent se souiller au contact de plants malades et contaminer par la suite des plants sains. Modèle de dissémination du RYMV au champ La figure ci-dessous résume l'action conjuguée des différents modes de transmission dans la propagation de la panachure jaune du riz (Traoré, 2006). Schéma indiquant l'action conjuguée des différents modes de transmission du RYMVdans la propagation des la panachure jaune du riz Page 2 Modes de non-transmission du RYMV Le RYMV ne se transmet pas par la graine Chez le riz et les plantes hôtes sauvages du RYMV, le virus peut se retrouver dans les graines des plants malades. Mais il ne se transmet pas aux plantules issues de ces graines (Konaté et al., 2001; Allarangaye et al., 2006). Les graines provenant de plants malades ne sont donc pas responsables des épidémies. Le RYMV ne se transmet pas par le fumier de parc Lorsque le bétail est nourri avec de la paille de riz malade, le virus est détecté dans la bouse. Cependant, il est absent dans le fumier de parc. Le fumier de parc n'est donc pas une source de contamination du riz au champ. Le RYMV ne se transmet pas par les nématodes Les nématodes sont des parasites du sol qui attaquent plusieurs cultures dont le riz. Ils sont dans certains cas vecteurs de virus de plante mais ils ne transmettent pas le RYMV (Bakker, 1974). Recommandations de lutte contre la panachure jaune du riz Les mesures de lutte ci-dessous peuvent être prises pour empêcher ou limiter la transmission du RYMV et la propagation de la panachure jaune du riz. Certaines d'entre elles nécessitent la formation des agents de vulgarisation agricole et les producteurs de riz à une bonne reconnaissance de la panachure jaune du riz au champ. empêcher le bétail de brouter les plants en pépinières et dans les champs de riz Désherber régulièrement les pépinières et les champs de riz; nettoyer les diguettes et les canaux d'irrigation pour éliminer les hôtes alternatifs du RYMV et réduire ainsi la pression des insectes et rongeurs. Eradiquer les plants malades du champ surtout au cours des premières semaines après repiquage, l'effet de la maladie étant moins désastreux chez les plants infectés tardivement. Lors des opérations d'entretien, éviter de toucher les plants sains après que les mains aient été en contact avec des plants malades. L'usage de pesticides divers (insecticides, raticides, etc.) observé dans certains périmètres rizicoles est déconseillé. Ces produits chimiques parfois très dangereux polluent l'eau qui sert aussi à la consommation de l'homme et du bétail. Références bibliographiques Allarangaye MD, Traoré O, Traoré EVS, Millogo RJ, Konaté G (2006). Evidence of nontransmission of Rice yellow mottle virus through seeds of wild host species. Jounal of Plant Pathology (sous presse). Bakker W (1970). Rice yellow mottle, a mechanically transmissible virus disease of rice in Kenya. Netherlands Journal of Plant Pathology 76: 53-63. Bakker W (1974). Characterisation and ecological aspects of rice yellow mottle virus in Kenya. Thèse de doctorat, Université de Wageningen, Pays-Bas. Konaté G, Sarra S, Traoré O (2001). Rice yellow mottle virus is seed-borne but not seed transmitted in rice seeds. European Journal of Plant Pathology 107: 361-364. Sarra S, Oevering P, Guindo S, Peters D (2004). Wind-mediated spread of Rice yellow mottle virus (RYMV) in irrigated rice crops. Plant Pathology 53: 148-153. Sarra S, Peters D (2003). Rice yellow mottle virus is transmitted by cows, donkeys, and grass rats in irrigated rice crops. Plant Disease 87: 804-808. Traoré O (2006). Ecologie, pathogénie et évolution du virus de la panachure jaune du riz en zone soudano-sahélienne. Thèse de doctorat d'état es science, Université de Ouagadougou, Burkina Faso. Page 3