L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S6 UE4 – Dr N GUILLAUME - Allogreffes et rejets Allogreffes et rejets 1 Définitions et généralités - - Transplantation d’organes ou de tissus = remplacement d’un organe ou d’un tissu défectueux par un organe prélevé sur un donneur. o Le terme « transplantation » sous-entend un rétablissement d’une continuité vasculaire (ex : greffe d’organes) o Le terme « greffe » sous-entend l’absence de ce rétablissement (ex : greffe de cellules souches hématopoïétiques) Transplantation d’un organe allogénique = exposition à des antigènes du non soi = induction d’une immunité du receveur vis-à-vis du donneur RISQUE DE REJET Risque de destruction +/- rapide du greffon 2 Rappels : Alloantigènes et CMH - - - Les antigènes majeurs d’histocompatibilité (HLA) : o Classe I (A, B, C) à la surface de toutes les cellules nucléées de l’organisme et présentent les peptides aux LT CD8+ o Classe II (DR, DQ, DP) à la surface des CD, LB, monocytes, macrophages et LT activés et présentent les peptides aux LT CD4+ o Transmission autosomale dominante (6 gènes du père et 6 gènes de la mère). Expression co-dominante (12 gène exprimés) Les antigènes mineurs d’histocompatibilité : o Fragments peptidiques issus de la dégradation de protéines intracellulaires pour lesquelles il existe un polymorphisme génétique mais n’appartenant pas au CMH o Transmission indépendante des gènes HLA. Ex: Ag H-Y sur chromosome Y, HA-1,-2,-3. o Ces Ag mineurs, dans un contexte de greffes HLA-identique, explique les phénomènes de réaction du Greffon contre l’Hôte (GvH Cf définition plus bas dans le cours) Les antigènes des groupes sanguins : o Importance des Ag de groupes sanguins ABO +++ en transplantation car ils sont présents à la surface de plusieurs types cellulaires dont les cellules endothéliales. 3 Mécanismes d’alloréactivité - Alloréactivité indirecte : les CPA du receveur capturent et présentent des Ag du donneur ce qui active les LT Alloréactivité directe : les CPA du donneur peuvent présenter des Ag issus du donneur OU du receveur, et ainsi activer les LT. 1 L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S6 UE4 – Dr N GUILLAUME - Allogreffes et rejets 4 Les réactions de rejet en transplantation d’organes (ex rein) 4.1 Rejet hyper aigu - Dans les 24 1ères heures (ou même directement sur la table d’opération) Rejet Humoral dû aux anticorps anti-ABO ou anti-HLA préformés Thrombose des vaisseaux en quelques minutes ou heures après rétablissement de la vascularisation Origine de ces anticorps : o ATCD de transfusions, o ATCD de grossesses (10% après 1, 60% après 3), o ATCD de transplantation etc… 4.2 Rejet aigu - Dans les 90 jours (1 à 5 jours = rejet accéléré) Mécanisme d’alloréactivité directe : Responsable des rejets aigus dans les 1ers jours, 1ères semaines Mécanisme d’alloréactivité indirecte : Responsable des rejets survenant à distance de la transplantation Le diagnostic est conforté par une ponction de biopsie rénale (PBR) : o Rejet vasculaire : prédominance de lésions vasculaires o Rejet cellulaire : infiltration inflammatoire interstitielle massive par des lymphocytes, macrophages et polynucléaires neutrophiles 4.3 Rejet chronique - Après 90 jours, plusieurs mois à plusieurs années après la transplantation Dégradation progressive et irréversible de la fonction du greffon Néphropathie chronique de l’allo-transplantation PBR : fibrose interstitielle et périvasculaire, vasculopathie chronique Réponse immunitaire mixte cellulaire et humorale Mauvaise réponse au traitement 4.4 Comment éviter / prévenir le rejet ? - - - 2 Pour le RECEVEUR : o Typage HLA A, B, DR, DQ o Recherche des Anticorps anti-HLA (pour éviter le rejet hyper aigu ++) o Groupe sanguin Pour le DONNEUR (vivant / décédé) : o Typage HLA A, B, DR, DQ o Groupe sanguin + Cross match (mise en contact in vitro des cellules du donneur et du sérum du receveur) L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S6 UE4 – Dr N GUILLAUME - Allogreffes et rejets - Full-match HLA complet entre donneur et receveur N’EST PAS nécessaire MAIS compatibilité ABO Rh +++ But: o Sélectionner un donneur le plus compatible possible o Éviter au maximum les phénomènes d’alloréactivité après transplantation o Améliorer durée de vie du greffon 4.5 Technique et interprétation du cross match - - - Vérification ultime avant transplantation : Absence d ’Ac lymphocytotoxique chez le receveur contre les cellules du donneur Mise en contact in vitro des cellules du donneur (lymphocytes isolés d’un échantillon de rate ou de ganglion si donneur mort, ou de sang si donneur vivant : importance de la qualité de l’échantillon) et du sérum du receveur (conservés en sérothèque tout au long du suivi du patient) Technique : lymphocytotoxicité « classique » : o Technique de référence, obligatoire o Sérums traités au Dithiothreitol (DTT) (réduit les ponts di-S des IgM) o Vis-à-vis des lymphocytes T (classe I) et des lymphocytes B (classe II) La présence d’IgG Classe I interdit la greffe La présence d’IgM ne l’interdit pas en théorie (variable selon les équipes, attention à IgM anti-classe I sur sérum le plus récent) 3 L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S6 UE4 – Dr N GUILLAUME - Allogreffes et rejets 5 Allogreffe de cellules souches hématopoïétiques 5.1 Généralités - - - - - 4 Infusion, chez un patient malade, de cellules souches hématopoïétiques (CSH) en provenance d’un donneur sain. Objectifs : o Destruction du système hématopoïétique du Receveur o Remplacement par le système hématopoïétique du Donneur Indications: o Hémopathies malignes (leucémies aigües, lymphomes…) o Hémopathies non malignes (aplasie médullaire, hémoglobinopathies…) Conditionnement et greffe : o Conditionnement « myélo-ablatif » (chimiothérapie + irradiation corporelle totale) ou d’intensité réduite selon indication et receveur, réalisé 8 à 10 jours avant l’injection de CSH o Allogreffe sur cathéter central tunnélisé, en secteur stérile sous flux laminaire par simple transfusion o Traitement immunosuppresseur (Méthotrexate, ciclosporine +/corticoïdes…) La CSH : o Indifférenciée o Pluripotente o Localisée dans la moelle osseuse (passage occasionnel dans le sang) o Rare (0.01 à 0.05% des cellules médullaires) o Non identifiables morphologiquement o Profil immunophénotypique immature (CD34+, Thy1+, Lin-, HLA-DR-) Les sources de greffon : o Moelle osseuse (MO) : Ponctions itératives au niveau des crêtes iliaques du donneur sous AG o Cellules Souches Périphériques (CSP) : recueillies par voie veineuse (cytaphérèse) après administration de G-CSF o Unité de Sang Placentaire (USP) : recueillie à la naissance après clampage du cordon L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S6 UE4 – Dr N GUILLAUME - Allogreffes et rejets - - Choix du donneur : o Intra-familial : Allogreffe géno-identique avec compatibilité HLA de 10/10 voire 12/12 mais éléments d’incompatibilités tissulaires au niveau des antigènes mineurs d’histocompatibilité (sauf allogreffe syngénique) o Non apparenté : Allogreffe phéno-identique système HLA (10/10) ou avec un mismatch (9/10) o USP : Pool de 2 cordons possibles Définitions : o Greffe syngénique : jumeaux monozygotes (pas de GVH mais pas de GVL) o Greffe géno-identique : entre deux membres d’une même fratrie en full match o Greffe phéno-identique : donneur volontaire non apparenté en full match o Greffe mismatch (9/10) o Greffe haploidentique (5/10) o Greffe avec USP : double sang de cordon, compatibilité 6/6 en full match, mismatch autorisés o Compatibilité ABO Rh n’est pas nécessaire 5.2 Aspects immunologiques de l’allogreffe - Éléments favorisants le rejet de greffe : o Incompatibilités HLA majeure ou mineure o Dose insuffisante de cellules nucléées réinjectées o Conditionnement insuffisant du receveur o Conditionnement sans TBI (Total Body Irradiation) o Déplétion du greffon en cellules T (Moins de GvH mais aussi moins de GvL) 5 L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S6 UE4 – Dr N GUILLAUME - Allogreffes et rejets 5.2.1 Réaction du greffon contre l’hôte : GvH MAUVAIS - - - - - 6 Destruction par les cellules contenues dans le greffon, et majoritairement les LT, des tissus du receveur. Pré-requis: o Présence de cellules immunocompétentes dans le greffon o Présence d‘incompatibilités HLA entre donneur et receveur o Incapacité de rejet du greffon GVH aigüe : o survient dans les 100 jours, o complique près de 30% des allogreffes géno-identiques et jusqu’à 80% des allogreffes phéno-identiques o 3 organes cibles : peau, éruption maculopapuleuse (visage, paume des mains, plante des pieds) foie (cholestase ictérique sans insuffisance hépatocellulaire) tube digestif (diarrhée, douleurs abdo, vomissements) GVH chronique : o 100 jours après la greffe, environ 50% des patients, o sclérodermie, syndrome sec… Solution 1 = Déplétion du greffon en cellules T ? o Diminution de l’incidence des GvH MAIS augmentation de l’incidence : des rejets de greffe des rechutes (effet GvL diminué) des infections des syndromes lymphoprolifératifs liés à l’EBV o Mécanisme : Disparition des cellules immunocompétentes induisant la GVH mais aussi celles détruisant les LT résiduels du receveur et les cellules malignes résiduelles. Solution 2 = Le Campath® (alemtuzumab) = Anti-CD52 ? o Déplétions lymphocytaires T in vivo o Diminution du taux de GVH mais retard de la reconstitution immunitaire (LT), augmentation de l’incidence des infections virales, augmentation de la fréquence des rechutes L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S6 UE4 – Dr N GUILLAUME - Allogreffes et rejets - Solutions 3, 4, 5…? o Sélection dans le greffon de LT spécifiques de la tumeur o Infusion post-greffe de Tregs (CD4+CD25+Foxp3+) o Globulines anti-Thymocytes (ATG) o Amélioration des traitements immunosuppresseurs etc… 5.2.2 Réaction du greffon contre la leucémie : GvL BON - - Réponse immune des cellules du donneur dirigée contre les cellules tumorales Antigènes cibles des cellules tumorales : o Ag mineurs d’histocompatibilité : incidence de rechute augmentée en cas de greffes syngéniques par rapport aux greffes allogéniques o Protéines associées à la leucémies (ex BCR-ABL) o Perte d’expression de ligands inhibiteurs (CMH classe I) et déclenchement de la cytotoxicité des cellules NK o Surexpression de ligands activateurs des cellules NK (MIC-A, MIC-B) Potentialisation de l’effet GvL : o Injection de lympho alloréactifs du donneur (DLI Donor lympho injections) o Réponse corrélée à la présence de LT cytotoxiques contre les Ag mineurs HA-1 et HA-2 d’expression restreinte aux cellules hématopoïétiques o Si mismatch HLA-I : pas de phénomène d’inhibition des NK (effet des KIR) o Essais en cours: DLI après déplétions en Treg (CD4+CD25+ Foxp3+) 5.3 Reconstitution immunitaire post allogreffe - Influencée par : o Age, pathologie o Choix et manipulation du greffon o Type de conditionnement o Greffe apparentée / non apparentée / polymorphisme HLA o Évolution clinique (GvH, infections) o Protocole d’immunosuppression… 7