Nanoélectronique supraconductrice : la logique RSFQ Alain GAUGUE et Alain KREISLER Laboratoire de génie électrique des universités Paris 6 et Paris 11 (LGEP) UMR 8507 CNRS SUPÉLEC, 11 rue Joliot Curie, Plateau de Moulon, 91192 GIF/YVETTE Cedex Résumé : L'électronique supraconductrice, fondée sur un principe nouveau - la logique RSFQ (Rapid SingleFlux Quantum) - connaît aujourd'hui un regain d'intérêt du fait de ses performances exceptionnelles, très au delà de celles des filières électroniques classiques. Cette technologie, basée sur l'utilisation de jonctions Josephson shuntées de dimensions submicrométriques, offre comme principal avantage d'être ultra-rapide tout en présentant une consommation ultra-réduite. De nombreuses fonctions électroniques ont déjà été réalisées et pourraient être amenées, au terme de la prochaine décennie, à remplacer avantageusement les circuits à base de semiconducteurs. 1 - Introduction L’évolution de l’électronique fait une place de plus en plus grande aux circuits logiques au détriment des circuits analogiques. Cette croissance exponentielle de l'électronique numérique en cette fin de siècle est sans aucun doute due aux techniques de traitements numériques de l'information omniprésentes dans notre environnement quotidien (télécommunications, multimédia, automobile, domotique, etc). Les besoins sans cesse croissants en circuits numériques vont de plus de pair avec des performances (densité d'intégration, rapidité) de plus en plus élevées. Les composants principaux des circuits logiques sont aujourd’hui basés sur des technologies semiconductrices sur silicium (transistors à effet de champ de type MOS). Ces circuits intégrés ont suivi une progression déterministe, régie par la loi de Moore, de sorte qu’il est actuellement possible de réaliser des circuits intégrant, sur une puce de silicium de l’ordre du centimètre carré, plusieurs dizaines de millions de transistors fonctionnant à plusieurs centaines de MHz et qu'il sera sûrement possible, lors de la prochaine décennie, de réaliser des processeurs avec des densités d'intégration de l'ordre de 2×109 Transistors/cm2 fonctionnant à une fréquence d'horloge de 3 GHz. Néanmoins l’augmentation de la densité d'intégration et de la rapidité des circuits se heurtera inévitablement à la difficulté d’extraire la puissance dissipée dans ces circuits et à des défis technologiques (technologie 35 nm). L'électronique supraconductrice [1,2], dès les années 60, a été présentée comme une alternative possible aux semiconducteurs pour la réalisation de composants logiques. En effet, cette technologie présente des atouts indéniables pour la réalisation de composants ultrarapides : i) les lignes supraconductrices sont nondispersives ce qui permet de véhiculer des impulsions électriques ultra-brèves (de l'ordre de la picoseconde) sans aucune déformation ; ii) les temps de commutation des jonctions supraconductrices (jonction Josephson) sont de l'ordre de la picoseconde ; iii) la puissance dissipée dans une cellule élémentaire est très faible. Cependant, malgré des efforts considérables et des projets de grande envergure calculateur supraconducteur de IBM (1969 - 83) et le projet MITI au Japon (1981 - 90) - jusqu’à une date récente aucune réalisation pratique n’a pu concurrencer les filières électroniques traditionnelles, et cela pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il a fallu longtemps pour imaginer une logique à supraconducteur présentant des performances intéressantes. Jusqu'à la fin des années 80 les fréquences de fonctionnement étaient limitées aux alentours du GHz, fréquences d’un ordre de grandeur à 1 THz Fréquence d’horloge Haut Tc (65-77K) ??? supraconducteurs 100 GHz Bas Tc (4-5K) 30M JJ 0,4 µm 3M JJ 0,8 µm 10 GHz 10k JJ 3,5 µm 300k JJ 1,5 µm 0,03 µm 0,07 µm semiconducteurs 0,13 µm 0,18 µm 0,20 µm 1 GHz ??? 0,25 µm - Litho. électronique 0 40 - UltraViolet Extrême Lithographie optique Années 100 MHz 1995 1998 2001 2004 2007 2010 Figure 1 : comparaison, en terme de fréquence de fonctionnement de système complexe (par exemple un processeur), entre la filière semiconductrice et la filière supraconductrice. Les données pour les semiconducteurs sont issues de la National Technology Roadmap [3] et celles pour les supraconducteurs du tableau I. peine plus élevée que celles des circuits semiconducteurs. Ensuite, il a été difficile de développer une technologie fiable pour réaliser les composants, Enfin, durant ces deux dernières décennies, les semiconducteurs ont vu leurs performances s’améliorer sans cesse permettant toujours d’atteindre les objectifs visés à un instant donné. Néanmoins l'électronique supraconductrice, fondée sur un principe nouveau - la logique RSFQ (Rapid Single-Flux Quantum) [4] - connaît depuis peu un regain d'intérêt du fait de ses performances exceptionnelles, très au-delà de celles des filières électroniques classiques (cf. figure1), qui par ailleurs se rapprochent de leur vitesse limite. Ainsi, au terme de la prochaine décennie, ces circuits pourraient être amenés à remplacer avantageusement les circuits à base de semiconducteurs tels que le prévoit l'autoritaire prospective de la National Technology Roadmap for Semiconductors [3]. 2 - Composants logiques supraconducteurs Avant l'apparition de la jonction Josephson, coeur de tout composant logique supraconducteur actuel, les dispositifs logiques (par exemple le cryotron) mettaient à profit le changement de phase supraconducteur/normal, permettant ainsi de commuter entre un état faiblement résistif (normal) et un état supraconducteur. De tels composants n'ont jamais débouché sur des applications concrètes du fait des principes thermiques intrinséque mis en jeu limitant par là même les vitesses de commutation. Au début des années 80, apparut une famille de composants logiques, dénommée logique à maintien latching logic -, qui utilisait la commutation d'une jonction Josephson présentant un effet d'hystérésis (cf. figure 2). Cette hystérésis, nécessaire pour le maintien des états logiques, nécessitait cependant la remise à zéro périodique (et pendant un certain temps) du courant de polarisation de la jonction, ce qui limitait intrinsèquement la fréquence d'horloge des composants aux alentours du GHz. Cette technologie ne perça donc pas et le choix technique, qui consistait à imiter les composants semiconducteurs, en codant les états logiques par des tensions, fut remis en cause puis abandonné. La logique Rapid Single Flux Quantum fit alors son apparition. Elle est fondée sur l'utilisation de jonctions Josephson shuntées, donc non hystérétiques, et met à profit, comme son nom l'indique, leurs comportements dynamique et quantique (cf. figure 3). Dans les composants RSFQ ce n'est pas un niveau statique de tension qui code l'information, mais la présence ou l'absence d'un quantum de flux magnétique (Fluxon) -15 F0 = h/2e = 2,07×10 Wb. La cellule élémentaire RFSQ est constituée d'une boucle supraconductrice fermée par une jonction et shuntée par une résistance. Chaque variation d'un quantum de flux dans la boucle (fluxon entrant ou sortant de la boucle) induit une Courant état "0" Tension Jonction Josephson I1 Hystérésique État "0" état "0" état "1" 0 V1 État "1" Jonction Josephson shuntée Tension État "0" Temps Figure 2 : principe de fonctionnement de la logique à maintien fondé sur l'utilisation d'une jonction Josephson avec une caractérisitque I-V hystérétique. Le courant de polarisation Ip de la jonction est fixé à une valeur légèrement inférieure au courant critique Josephson Ij. La jonction commute de l'état supraconducteur (état 0), à un état résistif (état 1), lorsqu’est appliqué un courant de polarisation qui dépasse momentanément Ij. Pour revenir à l'état 0 il faut que le courant de polarisation soit ramené à zéro pendant un certain temps. 0 Tension Passage de l’impulsion Tension Ip Courant IJ état "1" État "0" État "1" Temps Horloge État "0" Temps Données Figure 3 : principe de fonctionnement de la logique RFSQ fondé sur l'utilisation d'une jonction Josephson shuntée avec une caractérisitque I-V non hystérétique. Lorsque le courant de polarisation Ip atteint le courant critique Josephson Ij de la jonction, un quantum de flux pénètre dans la boucle ce qui induit une impulsion de tension aux bornes de la jonction. Par convention, on définit l'état logique 1 par la présence d'une impulsion durant la période du signal d'horloge et, l'état 0 par l'absence d'une impulsion durant la période du signal d'horloge. impulsion de tension aux bornes de la jonction, dont la valeur de l'intégrale temporelle est égale à F0 soit 2,07 mV×ps. La durée et l'amplitude de cette impulsion dépendent de la géométrie de la jonction et du matériau qui la compose; pour une jonction en Nb de 1 µm2 l'impulsion dure environ 1 ps et a 2 mV d'amplitude. Le traitement des données revient donc à manipuler des impulsions de tensions résultant du transfert de quantum de flux, avec comme avantage que l'énergie dissipée lors du transfert d'un quantum de flux est indépendante de l'amplitude de l'impulsion et, est égale à Ij×F0 : soit pour un courant critique Josephson de 100 µA, une énergie -19 de 2×10 J ; ce qui est 5 ordre de grandeur plus faible que pour les semiconducteurs. 3 - Structure et performances des composants RSFQ Tout circuit RSFQ est constitué de trois cellules élémentaires [2] (cf. figure 4). La première, composée d'une inductance et d'une jonction, joue le rôle de buffer, elle assure la transmission des impulsions picosecondes. La seconde cellule, constituée également d'une inductance et d'une jonction assure le stockage de l'information (impulsion), sous forme d’un courant de boucle persistant. Enfin, la troisième constituée d'une inductance et de deux jonctions différentes, contrôlée par un signal d'horloge, réalise deux fonctions. Tout d'abord, elle joue le rôle de cellule tampon, qui empêche un signal arrivant sur la sortie de réagir sur l'entrée et de plus, assure la prise décision : transmettre ou non l'information (impulsion). Les inductances associés aux jonctions font partie intégrante de la fonction et servent soit à coupler les différentes cellules entre elles (cf. cellule 1), soit à stocker l’énergie (cf. cellule 2). Un fonctionnement optimal est obtenu lorsque la relation L×Ij = F0/2 est vérifiée (pour Ij ~ 100 µA, L ~ 10 pH). Quant au signal d'horloge, il sert de référence aux impulsions de tensions pour définir les états logiques 0 Polarisation (cont inu) I S = Courant persistant Polarisation (continu) · · Inductance · · ·· T ransmission de l'information Signal d'horloge · Polarisation (continu) · · ··· Double jonctions IS Buffer Prise de décision Stockage de l'information Figure 4 : Structure de base d’une porte RFSQ constituée de 3 cellules : buffer, stockage de l’information et prise de décision. et 1. Par convention, l'état logique 1 est défini par la présence d'une impulsion durant la période du signal d'horloge et, l'état 0 par l'absence d'une impulsion durant cette même période. Les performances des composants RSFQ sont intrinséquement supérieures à celles des composants semiconducteurs, aussi bien sur les aspects rapidité et énergie dissipée pour une même densité d'intégration. La limite ultime de la fréquence de fonctionnement d'un composant RSFQ réalisant une fonction logique élémentaire (par exemple la bascule flip-flop) est fixée par la largeur de l'impulsion créée par le fluxon, et peut s'exprimer grâce à un modèle de type RSJ (ResistivelyShunted Junction) [5] : FJ = wJ / 2p = (bc JJ /2pF0 CA)½, où bc est le paramètre de McCumber fixé, en général, par la résistance de shunt au voisinage de 1, Jj la densité de courant critique Josephson et CA = C/A la capacité spécifique du dispositif de surface A. L'épaisseur de la barrière tunel est l’un des paramètres clefs (comme la dimension de la jonction) des performances fréquentielles des composants, car elle détermine la densité de courant critique Josephson Jj. Sa diminution augmente de manière linéaire avec CA et de manière exponentielle avec Jj, ce qui fait que la fréquence de fonctionnement fj croit comme ÖJj, d'où la nécessité d'avoir des jonctions à fort Jj pour réaliser des composant rapides. Pour des circuits asynchrones de complexité moyenne, les fréquences de fonctionnement sont comprises entre wJ/15 et wJ/10 (expression empirique), mais peuvent être limitée entre wJ/60 et wJ/25 pour des circuits très complexes (processeur, par exemple) [5]. Les fourchettes de fréquences données dans le tableau I et représenté figure 1 ne dépendent que de la conception/implantation des composants RSFQ et ne représentent nullement les limites physiques théoriques. La puissance consommée dans une porte logique RSFQ est inférieure au µW. Elle est essentiellement due au courant de polarisation de quelques centaines de µA qui traverse les résistances environnentes (résistance de polarisation, résistance de shunt). Dans les composants actuels, la contribution due à l'énergie dissipée dans la jonction Josephson reste négligeable (cf. ci-dessus, de l'ordre de 2×10-19 J). Notons que la puissance ne peut pas être minimisée en diminuant le courant de polarisation, car le produit F0×IJ doit être toujours très supérieur au produit kT sinon la contribution en terme de bruit, dû aux fluctuations thermiques, n'est pas négligeable ce qui entraîne un taux d'erreur bit rédhibitoire pour la plus part des applications. La densité d'intégration de jonction Josephson (en Nb) réalisée à ce jours est de 60×103 JJ/cm2 [6], elle n'est pas limité par les dimensions ultimes des jonctions, mais surtout par la résistance de shunt qui vient considérablement augmenter la surface de la cellule élémentaire. En effet cette résistance nécessite une surface comprise entre 50 et 200×D2, où D est la dimension de la jonction [7]. Des travaux récents sur Nb ont décrit la possibilité de réaliser des jonctions de moins de 300 nm qui ne nécessite plus de résistance de shunt (bc intrinséque ~ 1) [8]. De plus, l'utilisation de processus planaire multicouches (8 couches de Nb au lieu de 3 actuellement) permettrait de limiter la surface d'une porte RSFQ à 25×D2, densité d'intégration comparable à celle des composants semiconducteurs. Avec une technologie à 0,3 µm, une densité théorique de 40×106 JJ/cm2 pourrait êre atteinte, mais en pratique ne pourrait pas dépasser 15×106 JJ/cm2 si on tient compte des aspects thermiques. 4 - Conclusion La technologie la plus mature actuellement est à base de jonction tricouche en Nb. Ce matériau nécessite cependant une température de fonctionnement de 4 à 5 K et est limité intrinsèquement à un temps de réponse de 0,7 ps. Notons qu'à ce jour le circuit le plus rapide (fréquence de l’ordre de 800 GHz) est une bascule FlipFlop réalisé en technologie niobium de 0,25 µm [9]. Par ailleurs, le plus grand nombre de jonctions mis en oeuvre, 90×103 JJ en technologie 1,75 µm, l'a été pour la réalisation d'un microprocesseur devant fonctionner à 20 GHz [6]. Une alternative serait d'utiliser une technologie NbN présentant l'avantage de fonctionner à une température de l'ordre de 10 K et d'être intrinsèquement 50 % plus rapide. Mais actuellement elle ne permet pas de réaliser des applications avec plus de 2×103 JJ. Enfin, la technologie YBaCuO, qui est loin d'être maîtrisée, mais qui présente l'avantage de pouvoir réaliser des jonctions non hystérétiques avec des temps de réponse de 0,1 ps et de ne nécessiter qu'un refroidissement vers 40-50 K. Cette température élevée de fonctionnement engendre cependant un bruit thermique excédentaire qui doit être obligatoirement compensé par un courant de polarisation dix fois plus élevé (car TYBCO = 10×TNb) qui a pour conséquence de mettre en oeuvre des inductances dix fois plus petite, à la limite des possibilités technologiques actuelle. JJ D µA/µm2 µm 10 20 40 100 200 500 1000 3,54 2,50 1,77 1,12 0,79 0,50 0,35 CA Fréquence de fonctionnement en GHz pour un circuit : FF/µm2 unitaire 50 54 58 64 70 80 90 124 169 230 346 468 693 927 standard complexe 52 – 78 71 – 106 97 – 145 145 – 217 196 – 294 290 – 435 388 – 582 13 – 31 18 – 42 24 – 58 36 – 87 49 – 118 73 – 174 97 – 330 Tableau I : Caractéristiques et performances fréquentielles des jonctions Josephson en fonction de leurs dimensions [5]. Type du composant Nombre de jonctions ×103 Applications Processeur, DSP 100 – 300 Matrice de commutation Corrélateur Convertisseur A/D, D/A Échantillonneur 10 – 300 Ordinateurs petaflops, SDR Télécommunications 10 – 300 1 – 10 0,1 – 1 Astronomie, radar Radar, SDR, métrologie Tableau II : Estimation des besoins en jonctions Josephson en fonction des principaux composants numériques. De nombreuses fonctions électroniques ont déjà été réalisées : des boucles à verrouillage de phase, des convertisseurs N/A et A/N, des mémoires, des autocorrélateurs, des filtres, des processeur. Les besoins en nombre de jonctions, pour une application donné sont évalués dans le tableau II [10], mais de nombreux progrès technologiques (et d'investissement financier!) doivent encore être fait pour que l'électronique RSFQ touche la production de masse. Références [1] K. Likharev, Superconductors speed up computation, Physics World, 10 (5), 39-43 (1997) [2] D. Brock, E. Track, J. Rowell, Superconductor Ics: the 100 GHz second generation, IEEE Spectrum, 40-46 (Dec 2000) [3] voir http://public.itrs.net/ [4] K. Likharev, K. Semenov, RSFQ logic/memory family: a new josephson-junction technology for sub-terahertz clock frequency digital systems, IEEE Trans. Appl. Supercond 1(1), 3-28 (1991) [5] A. Kleinsasser, High performance Nb Josephson devices for Petaflops computing, IEEE Trans. Appl. Supercond 11(1), 1043-1049 (2001) [6] M. Dorojevets, P. Bunyk, D. Zinoviev, FLUX chip: Design of a 20 GHz 16 bit ultrapipelined RSFQ processor prototype based on 1.75 µm LTS technology, IEEE Trans. Appl. Supercond 11(1), 326-332 (2001) [7] Y. Naveh, D. Averin, K. Likharev, Physics of high Jc Nb/AlO/Nb Josephson junctions and prospects of their applications, IEEE Trans. Appl. Supercond 11(1), 1056-1060 (2001) [8] A. Kadim, C. Mancini, M. Feldman, D. Brock, Can RSFQ logic circuits be scaled to deep submicron junctions?, IEEE Trans. Appl. Supercond 11(1), 1050-1055 (2001) [9] W. Chen, A. Rylyakov, V. Patel, J. Lukens, K. Likharev, Rapid single flux quantum T-Flip Flop Operating up to 770 GHz, IEEE Trans. Appl. Supercond 9, 3212-3215 (1999) [10] S. Tahara, S. Yorozu, Y. Kameda, Y. Hashimoto, H. Numata, T. Satoh, W. Hattori, M. Hidaka, Superconducting digital electronics, IEEE Trans. Appl. Supercond 11(1), 463468 (2001)