BIQ (2001-2002) n° 2 ASSEMBLÉE RÉUNIE DE LA COMMISSION COMMUNAUTAIRE COMMUNE Bulletin des interpellations et des questions orales Commission de la santé RÉUNION DU JEUDI 28 FÉVRIER 2002 Assemblée réunie de la Commission communautaire commune - Bulletin des interpellations et des questions orales - Session ordinaire 2001-2002 2 ASSEMBLÉE RÉUNIE DE LA COMMISSION COMMUNAUTAIRE COMMUNE BULLETIN DES INTERPELLATIONS ET DES QUESTIONS ORALES SOMMAIRE INTERPELLATION de Mme Dominique Braeckman (F) à MM. Jos Chabert et Didier Gosuin, membres du Collège réuni compétents pour la politique de la santé, concernant “les politiques intersectorielles (notamment via ‘Ville et Santé’) à mettre en oeuvre pour répondre aux problèmes de santé publique liés aux intoxications par le plomb”. (Orateurs: Mme Dominique Braeckman et M. Didier Gosuin, membre du Collège réuni compétent pour la politique de la santé). QUESTION ORALE de M. Denis Grimberghs (F) à MM. Jos Chabert et Didier Gosuin, membres du Collège réuni compétents pour la politique de la santé, concernant “l’organisation de la coordination des soins de santé de première ligne”. (Orateurs: M. Denis Grimberghs et M. Didier Gosuin, membre du Collège réuni compétent pour la politique de la santé). Assemblée réunie de la Commission communautaire commune - Session ordinaire 2001-2002 RÉUNION DU JEUDI 28 FÉVRIER 2002 Présidence successive de M. Marc COOLS, doyen d’âge, et de Mme Françoise BERTIEAUX, présidente. - La réunion est ouverte à 14h15’. INTERPELLATION DE MME DOMINIQUE BRAECKMAN A MM. JOS CHABERT ET DIDIER GOSUIN, MEMBRES DU COLLÈGE RÉUNI COMPÉTENTS POUR LA POLITIQUE DE LA SANTÉ, concernant “les politiques intersectorielles (notamment via ‘Ville et Santé’) à mettre en oeuvre pour répondre aux problèmes de santé publique liés aux intoxications par le plomb”. Mme Dominique Braeckman .- Le plomb est un métal connu de longue date mais il n’a été abondamment utilisé qu’à partir de la révolution industrielle. Dans les années 60, il a été reconnu comme cause d’un problème de santé publique. Très répandu dans notre environnement quotidien, notamment dans les vieilles peintures et dans l’eau, il peut contaminer l’organisme par différentes voies: digestive, respiratoire, conjonctivale, placentaire. 3 lations les plus fragilisées. Le dépistage des personnes intoxiquées, de leur habitat et la prévention de cette intoxication sont essentiels. L’étude de 1991 proposait quelques actions à court terme parmi lesquelles l’information des parents aux différentes sources d’intoxication, le dépistage systématique des familles à risque par voie de questionnaire, la recherche des causes d’intoxication et l’introduction de la notion de risque saturnin dans les textes légaux concernant le logement en termes de salubrité et de rénovation. En 95 et 96, des enquêtes réalisées par l’ISP, l’ONE et l’hôpital Saint-Pierre dans les quartiers à risque ont montré que les résultats de l’enquête de 91 se confirment avec des augmentations liées notamment au fait que le dépistage a été effectué sur des publics à risque. Ce dépistage a été possible grâce à un ciblage des enfants à risque sur base des critères mis en évidence lors de l’enquête de 1991. Cela fait quelques années que le plomb a quitté l’essence, des rénovations ont eu lieu et on peut espérer que les anciennes peintures commencent à disparaître totalement. L’ensemble de l’habitat bruxellois n’a certes pas été rénové mais des actions de sensibilisation ont été menées avec notamment des brochures. Les principales victimes sont les enfants. Or, la capacité d’absorption digestive et pulmonaire et cérébrale sont proportionnellement plus importantes chez l’enfant que chez l’adulte. Le réseau des amenées d’eau va, prochainement, se conformer à une directive européenne qui prévoit des limitations de plomb par litre d’eau. Le plomb peut être la cause de retard de croissance et avoir des effets sur le système nerveux, les reins, l’audition. Une grave intoxication au plomb peut conduire au coma et le décès n’est pas exclu, même s’il est rare. Pourtant le tableau de bord de la santé des Bruxellois indique que si on applique les résultats de l’étude de 91 à l’ensemble de la Région, un dépistage des 20.000 enfants de moins de 6 ans habitant des secteurs statistiques similaires devrait entraîner plus de 8000 contrôle de plombémie. Mille enfants nécessiteraient un suivi rapproché; 1.200 enfants intoxiqués sérieusement devraient être suivis médicalement. Les signes permettant de diagnostiquer le saturnisme ne sont pas évidents. L’identification des sources d’intoxication s’effectue au domicile des personnes contaminées et si leur éviction s’impose, elle reste malheureusement exceptionnelle. Les conseils aux familles sont importants, surtout si des rénovations non professionnelles sont prévues car elles exposent les habitants à davantage de poussières riches en plomb. En 1991, une enquête ayant pour but d’estimer la présence de saturnisme chez les jeunes enfants résidant dans les anciens quartiers bruxellois a démontré que l’intoxication par le plomb représente un problème de santé publique bien réel. La source principale incriminée est la présence d’anciennes peintures au plomb accessibles sous forme d’écailles et de poussières. En 1926, un arrêté royal interdisait déjà l’emploi de pigments de plomb pour toute peinture intérieure et objets d’ameublement. Mais, il faut attendre les années 1970 pour que soit effectivement interdit le plomb dans les peintures. Dès lors, dans les habitats anciens, les teneurs en plomb par gramme de peinture peuvent atteindre plusieurs centaines de milligrammes. Si on sait que les habitants de maisons vétustes sont les principales victimes et qu’une alimentation carencée en fer est un facteur favorisant le risque d’intoxication, on peut poser comme postulat que le saturnisme touche davantage les popu- Sur le terrain, des actions ont été entreprises: la création de l’asbl Risque a permis le décloisonnement des approches épidémiologiques, environnementales et toxicologiques. Son action se concentre sur la question du plomb dans l’eau et l’analyse des teneurs en plomb dans les dents de lait tombées. D’autres associations travaillent à la prévention, au dépistage et au suivi de ces recherches et mettent en avant la nécessité de nouvelles normes de salubrité. Les spécialistes de l’ambulance verte ont déjà eu l’occasion d’aborder le saturnisme mais n’ont pu effectuer des dépistages systématiques. Cet outil est idéal pour faire le lien entre les questions environnementales, de logement, médicales et sociales. Malgré le travail accompli, il faut aller plus loin. En France, les Ministres de la Santé et de la Recherche, en collaboration avec l’Inserm, ont inscrit la lutte contre le saturnisme dans un plan gouvernemental très large. Ce problème est, au niveau institutionnel, un beau cas d’école: s’agit-il d’une compétence de santé publique, d’environnement, de logement, sociale? BIQ (2001-2002) n° 2 4 ASSEMBLÉE RÉUNIE DE LA COMMISSION COMMUNAUTAIRE COMMUNE BULLETIN DES INTERPELLATIONS ET DES QUESTIONS ORALES L’interscolarité et l’"inter-institutionnalité" seront de mise pour traiter cette question. Il faut visualiser l’ensemble de la question, depuis l’émission des polluants jusqu’à leurs impacts et trouver, à chaque niveau, des solutions dans une vue systémique dont un des aspects est l’inégalité des personnes devant leur environnement et la santé. Il faudrait prendre contact avec le Ministre compétent pour intégrer les savoirs concernant la présence du plomb dans les formations à la rénovation. Avec le Ministre compétent pour le logement, l’ intégration de la question du plomb dans le code du logement et dans le règlement régional d’urbanisme devrait être abordée. Par ailleurs il faudrait entreprendre des recherches sur les possibilités de rénovation à "petits prix". Des contacts avec le Centre scientifique et technique de la construction pourraient-ils être pris? Au niveau de la prévention, la coordination avec les communautés est nécessaire. Même si les solutions à la pathologie se trouvent essentiellement du côté environnemental, il y a des aspects au niveau de la santé. Une des clés se trouve dans les mains du fédéral pour un prise en compte par l’Inami de ce qui se mettra en place et pour un contrôle des normes de la proportion de plomb présent dans certains produits. Je souhaiterais entendre le Ministre s’exprimer sur les initiatives prises ou en vue de contacts avec ces différents interlocuteurs. Notre récente inscription dans le Réseau des Villes en Santé de l’OMS nous permet de répondre à ce défi. Ce programme met en avant la nécessité d’intersectorialité. Le Ministre compte-t-il s’appuyer sur le Réseau des Villes en santé pour apporter une réponse au problème du saturnisme? M. Didier Gosuin, membre du Collège réuni compétent pour la politique de la santé .- La situation sur le terrain du saturnisme a évolué favorablement à Bruxelles. Plusieurs initiatives ont été mises en place. Certaines sources de pollution ont disparu, des efforts de sensibilisation ont été réalisés par des ASBL et le projet financé par le Fonds Houtman est prêt à démarrer. L’Institut de Santé Publique et le CRIDIS se sont retirés du projet initial mais poursuivent le travail en parallèle. De nombreux logements ont été rénovés et l’octroi de primes à la rénovation a privilégié les anciens quartiers. L’ambulance verte permet d’identifier les risques de santé liés à l’environnement et au logement. Malheureusement, c’est rarement la suspicion de saturnisme qui appelle leur intervention. Certaines inconnues comme les risques liés aux travaux de rénovation, ou à la remobilisation du plomb au cours de la grossesse méritent cependant d’être étudiées. Le problème du saturnisme ne peut être abordé que par des politiques intersectorielles. En matière de santé, la sensibilisaton des professionnels, permet de mieux dépister les groupes à risques. L’Observatoire de la santé pourrait établir une banque de données. En matière de logement, une meilleure formation des professionnels à la rénovation ainsi qu’une meilleure information sur l’environnement seraient nécessaires. J’ai, par ailleurs, mobilisé l’IBDE sur cette question. A Bruxelles, nous disposons d’outils performants qui permettent de dire que le saturnisme est presque sous contrôle. Le projet Ville/Santé est une opportunité d’établir une politique coordonnée. Ce projet est sur le point d’être reconnu par l’OMS. D’autre part, un partenariat est mis en place avec les maisons médicales, ainsi qu’avec l’Observatoire de la santé et du social. Les partenaires néerlandophones ont marqué leur intérêt pour collaborer. En Région bruxelloise, les facteurs à risques sont: les anciens logements sociaux, les familles nombreuses vivant dans des superficies réduites, les populations ayant été en contact fréquemment avec des facteurs de risques. En Région bruxelloise, certaines maladies que l’on pensait éradiquées réapparaissent. Cependant, nous disposons de multiples ressources: de nombreuses politiques intersectorielles, des équipes techniques sur le terrain, un important réseau de soins en première ligne, des services préventifs largement accessibles, une rénovation massive des bâtiments anciens et l’élaboration d’un nouveau code du logement. Nous devons utiliser ces ressources de la manière la plus efficace possible et poursuivre les efforts entrepris en créant des liens entre les différents acteurs concernés. Nous connaissons les moyens préventifs. Il faut maintenant les mettre en oeuvre. Les différents responsables ont été informés et l’engagement du médecin épistémiologiste supplémentaire au sein de l’Observatoire constitue une mesure concrète qui démontre les efforts entrepris. Mme Dominique Braeckman .- Il s’agit en effet d’un problème très important. Le dernier rapport montre que 10% de la population infantile de certains quartiers est peut être atteinte de saturnisme. Quand vous dites que l’ambulance verte n’est presque jamais appelée et que le saturnisme est rarement diagnostiqué, c’est parce que les symptômes de cette maladie sont communs à d’autres affections. Je salue les efforts de coordination: au niveau intersectoriel, tout semble se mettre en place. Cependant, il faudrait également une coordination avec les autres niveaux de pouvoirs, notamment le fédéral et la Communauté française. M. Didier Gosuin, membre du Collège réuni compétent pour la politique de la santé .- Nous contactons l’ensemble des partenaires. Quant aux médecins, ils ne sont pas assez formés à la détection des symptômes du saturnisme. Il faudra notamment veiller à ce qu’ils puissent appeler l’ambulance verte pour des symptomes autres qu’uniquement respiratoires. - L’incident est clos. BIQ (2001-2002) n° 2 RÉUNION DU JEUDI 28 FÉVRIER 2002 5 QUESTION ORALE absolument rencontrer les objectifs de structuration de la première ligne. L’organisation de la coordination des soins de santé de première ligne. A la fin de l’année passée, le gouvernement fédéral a saisi le Conseil d’Etat de deux projets d’arrêtés dont l’un fixe les normes d’agrément des cercles de médecins généralistes et l’autre les normes d’agrément des services intégrés des soins à domicile. Il serait intéressant de prendre connaissance de ces avis car il nous permettront de vérifier la pertinence des arguments invoqués tant par les bruxellois que par le fédéral. Cet avis est déterminant pour la suite de nos discussions. M. Denis Grimberghs .- A Bruxelles, la coexistence des structures de coordination francophones, néerlandophones et bicommunautaires est difficile. Le secteur bicommunautaire doit jouer son rôle en termes de coordination des politiques mises en oeuvre au niveau communautaire de notre région. Quel est le point de vue du collège quant au protocole d’accord préparé par le gouvernement fédéral en matière d’organisation des soins de première ligne? Quelles sont les modalités de cet accord en ce qui concerne la création des structures interdisciplinaires de soins à domicile? Comment peut-on structurer les actions entre les partenaires de la santé concernés par cette problématique, en particulier avec les médecins généralistes? M. Paul Galand .- La défense de la première ligne à Bruxelles est un défi politique prioritaire à relever. Il faut garder en tête les spécificités de la situation bruxelloise, villerégion pluriculturelle et internationale. Les permanences téléphoniques des gardes médicales doivent être multilingues ce qui entraîne des coûts supplémentaires. Il s’agit d’une responsabilité bicommunautaire, que nous devons tous assumer. J’en viens à présent à la question de notre attitude vis-à-vis des médecins. Pour ce qui concerne les médecins généralistes bruxellois, une plate-forme de concertation s’est mise en place, entre francophones et néerlandophones, fin 2000. Mais à ce jour, aucun projet concret n’a été introduit par cette asbl en formation, ni aucun budget y afférent. Seule une déclaration d’intention nous est donc parvenue à ce jour. Par ailleurs, les deux Commissions monocommunautaires soutiennent les fédérations et la garde, alors même que le financement de celle-ci relève clairement des compétences fédérales. On peut certes apercevoir dans les récentes propositions du ministre fédéral des Affaires sociales une évolution positive vers un financement correct des gardes, mais ceci demeure encore de l’ordre de l’intention et certains aspects suscitent manifestement débat. Une majorité des patients veulent être soignés à domicile. Les médecins de famille doivent avoir une place primordiale dans ces discussions. Les médecins généralistes sont un maillon important des soins de première ligne. Ils ont certes été négligés par le passé. L’Observatoire de la Santé a développé plusieurs collaborations de recherches-actions avec les médecins généralistes. M. Didier Gosuin, membre du Collège réuni compétent pour la politique de la santé .- Le protocole d’accord porte uniquement sur la coordination des soins à domicile. A Bruxelles, le problème réside surtout dans le manque de prise en compte par le fédéral des spécificités bruxelloises. Nous avons parfois eu l’impression que les concertations organisées par la ministre fédérale de la Santé n’avaient pas le même souci d’équilibre entre les différents acteurs. C’est regrettable mais cela ne nous empêchera pas de veiller aux intérêts des acteurs bruxellois. Les négociations entre le cabinet de la ministre de la Santé publique et les entités fédérés durent depuis deux ans. M. Denis Grimberghs .- La conséquence des difficultés avec le fédéral a été que le gouvernement wallon, le gouvernement flamand et le gouvernement germanophone ont procédé à des accords séparés. Ceci est un coup de canif à l’unanimité des accords qui constitue une garantie. Bruxelles n’aurait pas dû accepter ces protocoles séparés. Les questions de la territorialité, et de la couverture hospitalière, ont toujours posé problème. Le cabinet de la ministre de la Santé publique a voulu imposer à Bruxelles un système basé sur une zone COCOF, une zone néerlandophone et une zone bicommunautaire. Une large concertation des acteurs bruxellois se poursuit de manière régulière. Si la Commission communautaire commune subsidie des services assurant des soins à domicile, la Communauté flamande soutient une plate-forme de concertation unique qui organise la coordination des soins à domicile. En 1999, la CCF a édicté un décret qui encadre les services de coordination de soins et de services à domicile. En préparation des discussions sur l’organisation de la première ligne, le cabinet de la ministre de la santé publique a voulu coupler la reconnaissance des cercles locaux de médecins généralistes et le financement de leur garde. Les médecins généralistes n’ont pas une position unanime. Or, il faudrait Quelle est la position du Collège réuni? Que proposezvous? M. Didier Gosuin, membre du Collège réuni compétent pour la politique de la santé .- La Région bruxelloise n’a donné aucun feu vert à des protocoles. Les droits opérés par la Région wallonne et la Communauté flamande s’engagent qu’ellesmêmes. Je ne crois pas qu’un protocole d’accord sera mis en oeuvre tant que Bruxelles n’y sera pas associée. Nous ne sommes pas encore arrivés à l’unanimité au sein du Collège réuni. Il y a des spécificités bruxelloises qui appellent une piste originale. Nous la cherchons comme nous cherchons le consensus. Je m’y emploie. M. Denis Grimberghs .- Il serait plus facile pour les interlocuteurs du fédéral de prendre en compte les spécificités BIQ (2001-2002) n° 2 6 ASSEMBLÉE RÉUNIE DE LA COMMISSION COMMUNAUTAIRE COMMUNE BULLETIN DES INTERPELLATIONS ET DES QUESTIONS ORALES bruxelloises si le Collège réuni avait réalisé un accord en son sein. M. Didier Gosuin, membre du Collège réuni compétent pour la politique de la santé .- La situation est plus nuancée que cela. - L'incident est clos. - La réunion est levée à 15h10’. BIQ (2001-2002) n° 2