SURVEILLANCE DE LA SONDE NASO-GASTRIQUE 8.10 Objectif La sonde naso-gastrique est un dispositif médical dont les indications d’utilisation sont très diversifiées. Ces indications peuvent être à visée thérapeutique, diagnostique ou nutritionnelle. La mise en place d’une sonde naso-gastrique demeure un geste invasif pour lequel il est indispensable de prendre des précautions d’hygiène pour la pose et les manipulations, et d’instaurer une surveillance afin de prévenir tout risque d’apparition d’infections ou complications secondaires. Techniques et méthodes La mise en place d’une sonde naso-gastrique relève d’une prescription médicale précisant le matériau de la sonde, la charrière et la longueur choisie. I – CHOIX DES SONDES 1) Matériau Les sondes en polychlorures de vinyle plastifiés ou PVC : ces sondes sont utilisées pour des sondages de courte durée (3 à 4 jours) et essentiellement pour les prélèvements. Le PVC est dégradé par l’acidité digestive. Les sondes en polyuréthane : ces sondes sont de plus en plus utilisées en raison de leur très bonne tolérance et de leur souplesse. Leur résistance face à l’acidité digestive leur confère l’avantage d’être choisies pour des sondages de longue durée (> 30 jours). Les sondes en silicone : ces sondes offrent en plus des qualités des précédentes une inertie chimique très importante, elles sont choisies par excellence pour des sondages de très longue durée. 2) Types de sondes Les sondes, en fonction de l’indication posée, présentent des profils légèrement différents selon les utilisations qui en sont faites. Les sondes pour l’alimentation entérale : ces sondes sont, en principe, de petit calibre. Elles peuvent être lestées ou non, le lest permet le maintien de la sonde en bonne position et il favorise le passage du pylore lors de la pose. Les sondes pour les aspirations gastro-duodénales : ces sondes sont à canal unique ou double. Le canal double permet des aspirations douces par la pénétration d’air dans la cavité gastrique préservant ainsi la muqueuse. Elles peuvent être lestées ou non. La sonde est d’un gros calibre pour les occlusions ou les hémorragies digestives. Toutes les sondes sont munies de repères à type de graduation et sont radio-opaques. II – MISE EN PLACE DE LA SONDE La mise en place de la sonde naso-gastrique par l'infirmier doit faire l'objet d'une prescription médicale. La surveillance et le changement de sonde relèvent de son rôle propre. Guide Technique d'Hygiène Hospitalière – 2004 Page 1 / 6 C.CLIN Sud-Est – Fiche n° 8.10 Attention : la sonde naso-duodénale ou naso-jéjunale est posée par un médecin. 1) Préparation du soin - Informer le patient. Prendre connaissance de la prescription. Matériel - Préparer le matériel nécessaire selon les indications : Sonde adaptée Lubrifiant (huile de vaseline, eau) Verre d’eau Cône-sonde (ou seringue à gavage) Serviette Haricot Adhésif ou cordonnet (parfois une fixation nasale avec un fil de suture peut être choisie) Stéthoscope Compresses non stériles Gants à usage unique non stériles Collecteur de déchets de soins à risque infectieux Obturateur de sonde - Ajouter pour une aspiration : un bocal d’aspiration et un manomètre de vide ou un sac collecteur (drainage en siphonnage). Ajouter pour un prélèvement de liquide gastrique : un pot étiqueté pour le prélèvement et des compresses stériles. Attention : le lubrifiant ne doit pas être à base de silicone si la sonde est en silicone. L’eau semble être le meilleur lubrifiant. 2) Pose de la sonde La pose de la sonde naso-gastrique demeure un geste simple, néanmoins susceptible d’entraîner des complications chez tout patient. La vigilance doit être accrue chez les patients présentant des troubles de la déglutition ou de la vigilance. En dehors du contexte de l’urgence, elle est réalisée chez un patient à jeûn ou au moins quatre à six heures après le dernier repas. Le succès de la pose est avant tout lié à la douceur du geste. Procédure de pose - Se désinfecter les mains par friction avec une solution hydro-alcoolique sur des mains non souillées macroscopiquement ou par un lavage avec un savon antiseptique (recommandation de catégorie A). - Placer le patient demi-assis, cou fléchi. - Déterminer la longueur de sonde à introduire : mesure de la distance du nez à l’appendice xyphoïde en passant par l’oreille, et inscription d’un repère indélébile. - Mettre les gants à usage unique. - Lubrifier la sonde à l’aide d’une compresse. - Introduire la sonde dans la narine et la pousser lentement sans forcer jusqu’à la glotte. - Encourager le patient à avaler (1 verre d’eau peut aider). - Pousser la sonde jusqu’au repère souhaité. - S’assurer que la sonde est dans l’estomac : - aspirer le contenu gastrique - injecter de l’air dans la sonde et écouter au stéthoscope (placé au niveau du creux épigastrique) : un bruit aérique caractéristique doit être entendu. En cas de doute renouveler la manœuvre et/ou demander une radiographie de contrôle - Fixer la sonde à l’aide de l’adhésif ou du cordonnet, ou bien un fil (geste médical). - Obturer la sonde ou mettre en œuvre la prescription : aspiration ou nutrition. - Elaborer la feuille de surveillance : date de pose, type de sonde, nom du soignant. Guide Technique d'Hygiène Hospitalière – 2004 Page 2 / 6 C.CLIN Sud-Est – Fiche n° 8.10 Attention : la sonde est fixée de façon à ne pas être dans le champ de vision du patient et à ne pas offrir de boucle trop importante qui augmenterait le risque d’arrachement. Remarque : il n’existe pas de consensus à ce jour quant au rythme de changement de la sonde, seulement des indications de durée de pose en lien avec la nature du matériau de la sonde. Néanmoins, Il est nécessaire de les prendre en compte afin de choisir la sonde adaptée à l’indication. Astuce pratique : En raison de la souplesse des sondes en polyuréthane et en silicone, des difficultés de pose peuvent être rencontrées. Pour limiter ce désagrément, la sonde peut être placée au réfrigérateur 30 minutes avant la pose afin de la rigidifier. III – SURVEILLANCE ET SOINS D'HYGIENE La mise en place d’une sonde naso-gastrique peut induire secondairement l’apparition de complications d’ordre mécanique ou infectieux. Une surveillance et la mise en œuvre de soins d’hygiène doivent être de rigueur, ces derniers sont consignés sur la feuille de surveillance. 1) Surveillance Position de la sonde L’emplacement de la sonde est vérifié quotidiennement. Cette vérification se fait par recherche du repère initialement déterminé et son maintien en bonne position, complétée par une vérification du bon positionnement de la sonde dans l’estomac par injection d’air et écoute au stéthoscope. Renouveler systématiquement cette opération lors de toute utilisation de la sonde à des fins nutritionnelles ou d’administrations thérapeutiques ou hydriques. Perméabilité de la sonde : il est indispensable de veiller à une bonne perméabilité de la sonde. Afin de prévenir toute obstruction, un rinçage à l’eau après toute utilisation de la sonde est systématique avec une quantité comprise entre 30 et 50 ml. Il est nécessaire de noter les quantités d’eau ainsi apportées ou de se référer aux quantités d’eau prescrites. En cas d’obstruction, la désobstruction se fait par un rinçage à l’eau sous pression à la seringue, mais attention : la sonde peut être déplacée, une radiographie peut s’avérer nécessaire avant toute manœuvre de désobstruction dans cette situation. Attention : ne jamais entreprendre de manœuvre de désobstruction avec un mandrin. Reflux gastro-œsophagien : la prévention de la survenue d’un reflux gastro-œsophagien passe par l’installation du patient en position demi-assise lors de toute utilisation de la sonde. Intégrité des muqueuses nasale et buccale : surveillance de l’apparition d’ulcération, de point de nécrose. La prévention s’assure par des soins d’hygiène locaux quotidiens. 2) Soins d’hygiène La mise en place d’une sonde naso-gastrique induit très rapidement une modification de la muqueuse bucco-pharyngée par l’apparition d’une sécheresse buccale consécutive à la suppression de toute absorption alimentaire ou liquidienne. Ce phénomène favorise la multiplication d’une flore microbienne. La prévention de l’apparition de complications est assurée par le maintien, dans la mesure du possible, d’apports hydriques par la bouche et de soins d’hygiène réguliers. Soins de bouche Ce soin est pratiqué au minimum deux fois par jour. Si la coopération du patient est suffisante, le bain de bouche peut être préférable Soins du nez Changer quotidiennement l’adhésif ou le cordonnet : c’est l’occasion de modifier le point d’appui de la sonde afin de prévenir l’apparition d’une escarre de l’aile du nez. Pratiquer régulièrement des instillations de sérum physiologique dans les narines. Guide Technique d'Hygiène Hospitalière – 2004 Page 3 / 6 C.CLIN Sud-Est – Fiche n° 8.10 Gestion du matériel Changer quotidiennement le cône-sonde, l’obturateur de sonde, le verre d’eau et l’eau. Le cône-sonde est rincé à l’eau après chaque utilisation et préservé protégé dans son emballage d’origine entre deux utilisations. Avant toute manipulation sur la sonde, se désinfecter les mains par friction avec une solution hydroalcoolique sur des mains non souillées macroscopiquement ou par un lavage avec un savon antiseptique. Manipuler la sonde à l’aide de compresses non stériles imbibées d’alcool à 70°. IV – ADMINISTRATION DE MEDICAMENTS Quelles que soient les indications de la pose de la sonde naso-gastrique, l’administration de médicaments per os par celle-ci peut être maintenue. Attention : si aspiration ou drainage, attendre un laps de temps d’environ 30 minutes après l’administration des médicaments avant de remettre l’aspiration ou le drainage en fonctionnement. 1) Principe Les médicaments utilisés ne sont que des produits dont la forme galénique autorise leur administration par sonde, les formes liquides ou poudre sont à privilégier, les formes « retard » ou libération prolongée sont proscrites. Lors d’une alimentation entérale, il est recommandé de ne pas mélanger les médicaments au nutriment, cette dernière est arrêtée pendant l’administration des médicaments. 2) Méthode Les médicaments sous forme liquide ou de poudre sont mélangés à de l’eau ; les autres formes sont pilées le plus finement possible dans un mortier propre désinfecté puis dilués dans de l’eau. L’administration est réalisée à la seringue. La sonde est ensuite rincée suffisamment ainsi que la seringue. Attention : la solution médicamenteuse obtenue doit être le plus homogène possible afin d’éviter l’obstruction des œillets de la sonde et d’éviter une possible accumulation en bout de sonde de produits médicamenteux susceptibles de se décharger brutalement. La seringue utilisée pour injecter les médicaments, tout comme celle utilisée pour rincer la sonde, doit être changée après chaque utilisation. Figure 1 : fixation de la sonde Guide Technique d'Hygiène Hospitalière – 2004 Page 4 / 6 C.CLIN Sud-Est – Fiche n° 8.10 Figure 2 : suggestion d’une fiche de surveillance Fiche de surveillance hebdomadaire de l'alimentation entérale Semaine Etiquette du patient DATE Type de produit(1) Quantité prescrite Cont / Discont Quantité reçue Débit Quantité d'eau administrée du ....../....../...... au ....../....../...... ....../....../...... ....../....../...... Alimentation Total Total Total Total Heure Début Fin Motif interruption de l'alimentation ou de non administration(2) Vérif. position sonde par IDE(3) Résidu gastrique Soins Soin de bouche d'hygiène(4) Soin jéjuno/gastro Soin de nez Chang adh/lacette Selles Nombre Aspect (1) préciser la qualité (avec fibres, sans fibres, hypercalorique, ...), vomissement, ...., (3) mettre le nom de la personne qui vérifie la sonde, (4) le soin sera mentionné par les initiales de la personne (2) préciser si examen, intervention, sonde enlevée par le patient, Responsables Le Clin est responsable avec l'EOH de la mise en place de procédures adaptées. Celles-ci doivent être appliquées par les infirmières, en accord avec le médecin prescripteur. Pour en savoir plus Références BENOIST C. nutrition entérale et rôle infirmier spécifique In : Modulo Pratique infirmier. Edition Esten, 2000, 277-279 ; 208-210 Hépato-gastro-entérologie DE GUIMBAUD R., PERLEMUTER G. Soins Infirmiers aux personnes atteintes d’affections digestives ème édition Nouveaux cahiers de l’infirmière. Edition Masson, 2000, 2 In : GUILLEMIN MC, MICHEL C. Techniques de soins infirmiers Collection IFSI. Edition Lamarre, 1997, 195-197 BELLON B., SACILOTTO K., ARSICAULT C.et al. Le point sur les dispositifs médicaux à l’hôpital : Les sondes digestives. Revue de l’ADPHSO 1995, Tome 20, n° 2: 15-25. (NosoBase n°3363) ATBIB A., FABREGUETTES JR, VEILLET B. et al. Nutrition entérale par sonde : administration de médicaments solides destinés à la voie orale. Pharmacie hospitalière française, 1996, 118: 187-196 Guide Technique d'Hygiène Hospitalière – 2004 Page 5 / 6 C.CLIN Sud-Est – Fiche n° 8.10 Guides et recommandations DECRET N° 2002- 194 DU 11 FEVRIER 2002 relatif aux actes professionnels et à l’exercice de la profession d’infirmière. Journal Officiel du 16/02/2002; 3040-3042. (NosoBase n°10023) ARRETE DU 22 JUILLET 1994 relatif au certificat d'aptitude aux fonctions d’aide-soignant et au certificat d'aptitude aux fonctions d'auxiliaire de puériculture. Bulletin Officiel 29/91, p. 167. Modifié par : ARRETE DU 19/02/1996. Bulletin Officiel 10/96, p.87. ARRETE DU 05/02/1997. Bulletin officiel 8/97, 87-88. ARRETE DU 11/03/1997. Bulletin Officiel 12/97, p.57 ARRETE DU 13/04/2001. Bulletin Officiel 17/2001, 97-98. AGENCE NATIONALE D’ACCREDITATION DES ETABLISSEMENTS DE SANTE (ANAES). Abords digestifs pour l’alimentation entérale chez l’adulte en hospitalisation et à domicile. Recommandations professionnelles pour les pratiques de soins. Service recommandations et références professionnelles, 2000, 18 pages. (NosoBase n°5298) Guide Technique d'Hygiène Hospitalière – 2004 Page 6 / 6 C.CLIN Sud-Est – Fiche n° 8.10