La chirurgie à haute fréquence: son mode d`action

publicité
Numéro 5 2004
La chirurgie à haute fréquence: son mode
d’action, ses risques et comment les minimiser
L
es mains sont les principaux instruments de travail de
l’homme. Les gants les protègent contre le froid, la
saleté, la contamination et les blessures.
Dans le secteur médical, on a recours à des gants
spéciaux pour la protection des patients et du personnel.
Utilisés correctement, les gants médicaux doivent éviter
la transmission de germes entre le personnel médical et
les patients.
Un maximum de sensibilité au toucher, une élasticité
élevée et un port agréable comptent également parmi les
qualités indispensables de ces produits. Une faible
épaisseur de 0,2 mm permet de bien répondre à ces
exigences ; il s’agit alors toutefois de savoir si, et dans
quelle mesure, un tel gant d’opération peut assurer une
protection contre les tensions d’environ 1300 volts, telles
qu’elles sont utilisées dans la chirurgie à haute
fréquence.
nisme : l’effet faradique, l’effet électrolytique et l’effet
thermique.
1.1.1. L’effet faradique
Les cellules nerveuses et musculaires peuvent être
excitées électriquement et sont irritées par le courant
électrique.
Pour les tissus humains, l’effet d’irritation est maximal
pour un courant alternatif d’environ 100 Hz ; au fur et à
mesure que la fréquence augmente, l’irritation diminue
et le courant perd son effet nocif ou dangereux pour la
vie (fig. 1).
1.1.2. L’effet électrolytique
Le courant électrique provoque un flux d’ions dans les
tissus biologiques. Les ions sont de minuscules
particules électriquement chargées.
Lorsqu’on applique un courant continu, les ions à charge
positive se déplacent vers le pôle négatif, et les ions
1. Aspects généraux de la chirurgie à haute fréquence
négatifs vers le pôle positif, où ils endommagent le tissu
Au moyen d’énergie électrique transbiologique. Le courant continu ne
formée en chaleur, on peut couper
convient donc pas à l’application en
Effet d’irritation neuromusculaire
des tissus biologiques et arrêter des
chirurgie.
hémorragies.
Par contre, si l’on utilise un courant
Cette technologie, utilisée avec des
alternatif à très haute fréquence,
tensions électriques élevées, comles particules chargées changent
porte certains risques. Afin de résans cesse de direction, c’est-à-dire
duire ces risques au minimum, il imqu’elles sont amenées à osciller et
porte de bien comprendre le mode
n’ont donc pas d’influence nocive.
d’action du procédé.
1.1.3. L’effet thermique
1.1. Interaction entre le courant
Sous l’effet du courant électrique, le
électrique et le tissu biologique
tissu est échauffé, le degré de cet
Fig. 1 :
Trois effets entrent en jeu lorsque le
échauffement dépendant des facRapport entre la fréquence du courant
courant électrique agit sur l’orgateurs suivants :
alternatif et l’effet d’irritation sur les cellules
1
ale
Ch
à l’extérieur de la cellule sans détruire la
membrane cellulaire (fig. 3). Le tissu
rétrécit, ses éléments en mesure d’être
coagulés sont thermiquement cautérisés. On obtient ainsi un arrêt de l’écoulement du sang, même de vaisseaux de
plus grande taille.
ale
ur
Fig. 2 :
Processus dans la cellule lors de la coupe
3. Techniques de la chirurgie à haute
fréquence
Dans la chirurgie à haute fréquence, on
applique deux méthodes qui se distinguent par la voie empruntée par le
courant électrique : la technique monopolaire et la technique bipolaire.
Ch
électrique
Plus la densité de courant est élevée,
plus l’augmentation de la température, et
donc l’effet thermique, sont importants.
A l’extrémité de l’électrocautère monopolaire (électrode active), la densité de
courant augmente, un arc électrique se
forme et, localement, apparaît une température très élevée. A cet endroit, le
tissu peut être coupé ou cautérisé.
Par contre, au niveau de la surface importante de l’électrode neutre, la densité
de courant et l’augmentation de la température sont si faibles qu’elles restent
sans effet.
ur
• de la densité de courant
• de la résistance spécifique du tissu
• de la durée d’application de l’énergie
3.1. Technique monopolaire
Dans la technique monopolaire, un
puissant effet thermique apparaît au
2. Principe de la chirurgie HF
niveau de la fine électrode active (pointe
Le principe de la chirurgie HF s’appuie sur les phénode l’électrocautère) en raison de l’augmentation de la
mènes décrits ci-dessus. Au moyen de l’effet thermique,
densité de courant. Dans les tissus avoisinants du champ
on coupe des tissus et arrête des hémorragies. Afin
opératoire, on peut ainsi procéder à une coupe ou à
d’éviter la lésion des tissus par l’effet électrolytique et
une coagulation. Dans les tissus plus éloignés, la densité
l’irritation des cellules nerveuses et
de courant est nettement réduite ; sans
musculaires par l’effet faradique, on
effet thermique, le courant quitte le corps
utilise des courants alternatifs à haute
en tant qu’énergie électrique par la
fréquence d’au moins 100 kHz.
grande surface de contact de l’électrode
Fondamentalement, la chirurgie HF peut
neutre (fig. 4).
être utilisée à deux fins : pour couper ou
Par rapport à la coupe au bistouri, les
pour coaguler.
avantages suivants en résultent :
• hémorragies évitées
Fig. 4 :
2.1. Coupe de tissus
• transport de germes évité
Mode d’action de la technique monopolaire
Le courant à densité élevée échauffe si
• tissus ménagés
Le degré de coagulation de la surface
rapidement le liquide contenu dans les
de coupe dépend de la forme de l’éleccellules du corps que la pression de
trode et de la ligne de coupe, la profonvapeur qui en résulte fait éclater la
deur de la coagulation dépendant, quant
membrane cellulaire (fig. 2). On utilise
à elle, de l’intensité du courant HF.
ce principe pour couper, et dans une
moindre mesure pour coaguler des
3.2. Technique bipolaire
tissus. Les petits vaisseaux avoisinants
La technique bipolaire est surtout
sont également resserrés, de sorte que
appliquée en microchirurgie et neurol’hémorragie est stoppée.
chirurgie, et ne peut être utilisée que
pour la coagulation. On travaille ici avec
2.2. Coagulation
une électrode active bipolaire (pincette),
Dans le cas d’un échauffement lent du
Fig. 5 :
les deux pôles étant en contact avec le
tissu, le liquide s’évapore à l’intérieur et
Mode d’action de la technique bipolaire
Fig. 3 :
Processus dans la cellule lors de
la coagulation
2
champ opératoire. Une électrode
neutre n’est pas nécessaire. L’énergie électrique est appliquée à la
pincette, aux extrémités de laquelle
l’effet thermique assure la coagulation du tissu (fig. 5).
• manipuler les désinfectants avec
Courant
•
•
précaution (l’alcool qu’ils contiennent peut être enflammé par une
étincelle électrique)
déposer la poignée de l’électrode
à l’endroit prévu à cet effet
utiliser la tension la plus faible
possible
positionner correctement les électrodes neutres
4. La chirurgie HF en toute sécurité
•
Des standards de sécurité très
Fig. 6 :
stricts et des innovations techniques
Cheminement voulu du courant
4.3. Risques pour l’opérateur
font de la chirurgie à haute fréen chirurgie HF monopolaire
En raison des effets décrits ciquence, correctement appliquée,
dessus, la chirurgie à haute fréune méthode d’opération très sûre.
quence est une méthode d’opération sûre pour le
La connaissance des risques, à elle seule, contribue
chirurgien comme pour le patient. Néanmoins, il peut
déjà à éviter des effets indésirables tels que les
y avoir des décharges électriques accidentelles. Si
décharges électriques au mauvais endroit. Les gants
cela se produit au niveau de la main du chirurgien, on
chirurgicaux ne sont pas nécessaires comme protection,
parle de claquage. L’arc électrique entre l’instrument
mais doivent bien entendu être portés pour des raisons
chirurgical et la main du médecin provoque un bref
d’aseptie.
dégagement de chaleur. La température élevée ainsi
apparue détruit d’une part le film du gant chirurgical,
4.1. Risques pour le patient
et peut d’autre part entraîner des brûlures douloureuses
S’il y a entre le champ opératoire et l’électrode neutre un
de la main.
contact avec un objet mis à la terre (par exemple la
Les « claquages thermiques » apparaissent surtout
table d’opération), il peut y avoir des dérivations
lorsqu’on procède à une coagulation avec une électrode
indésirables du courant. Au lieu de sortir par l’électrode
monopolaire via une pincette. Si l’électrode est activée
neutre, l’énergie électrique se décharge par cette surface
trop tôt, alors que la pincette n’est pas encore en contact
de contact. Plus cette surface est petite (densité de
avec le tissu, le courant ne peut pas cheminer à travers
courant élevée), plus l’effet thermique est puissant et
le patient vers l’électrode neutre, et passe donc à travers
risque de provoquer une brûlure.
la pincette vers la main. Si la surface de contact entre la
pincette et la main du chirurgien est très petite (la
4.2. Sécurité du patient
pincette n’étant saisie que légèrePour la protection du patient, il conment) et la densité du courant
vient de tenir compte des aspects
par conséquent très élevée, une
suivants :
Claquage
veiller
au
positionnement
correct
grande chaleur est dégagée. On
•
(sec et isolé)
assiste ainsi à ce qui constitue en
éviter
tout
contact
avec
des
objets
fait l’effet voulu de la chirurgie HF,
•
mis à la terre
mais au mauvais endroit. L’énergie
éviter
tout
contact
ponctuel
de
thermique est si élevée qu’un
•
peau à peau (entre médecin/auxiclaquage peut se produire - le film
liaire et patient, entre différentes
de latex fond, un trou apparaît dans
parties du corps du patient)
le gant et la main de l’opérateur peut
câble
court,
pas
de
points
de
subir une brûlure.
•
contact
L’échauffement local important peut
les
câbles
ne
doivent
pas
former
détruire des gants chirurgicaux en
•
de boucles ni être fixés par des
latex naturel comme en latex synFig. 7 :
attaches métalliques
thétique.
Coagulation contre l’air
3
Impressum
Édition et fabrication : Semperit Technische Produkte Ges.m.b.H. & Co KG, Editeur : Sempermed, Modecenterstrasse 22, A-1031 Vienne, Tel. +43-1-79 777-621,
Fax: +43-1-79 777-630, E-Mail: [email protected], Rédaction : Martina Büchele, Texte : Dr. Michael Höchtl, Peter Pöcksteiner.
4
08/2004 DM1500853
4.4. Conseils pour l’opérateur
au toucher et un port aussi agréable
Comme pour le patient, il y a égalque possible, l’épaisseur de paroi des
ement pour l’opérateur des mesures
gants chirurgicaux n’est que de 0,2
à prendre, qui permettent d’éviter
mm environ (soit 1/10 de l’épaisseur
aisément les incidents :
d’un gant d’électricien).
contrôler
l’appareil
avant
sa
mise
Ces gants protègent donc quelque
•
en service, éviter les boucles de
peu, mais certainement pas à 100 %
câble, vérifier le bon raccordement
contre le claquage. Rappelons toutedes électrodes et des commutafois que dans le cas d’une application
teurs, etc.
correcte de la chirurgie HF, le port
Fig. 8 :
Gant
d’électricien,
gant
chirurgical
de gants à titre de protection n’est
• utiliser par principe des accessoires correspondant à l’appareil
pas nécessaire.
L’effet isolant du caoutchouc dépend non seulement de
• utiliser des pincettes isolées
toujours
commencer
par
appliquer
l’électrode
(ou
la
son épaisseur, mais aussi de ses propriétés physiques.
•
pincette dans le cas de la coagulation) sur le tissu
Dans le cas d’interventions prolongées, le matériau des
avant de l’activer
gants a tendance à gonfler, c’est-à-dire à absorber de
plus en plus la sueur et les liquides s’écoulant de la
• changer régulièrement de gants pendant l’opération :
les graisses cutanées et le contact avec des liquides
plaie opératoire, ce qui réduit encore l’effet isolant du
font peu à peu gonfler le film de latex, ce qui finit par
caoutchouc.
réduire la résistance du gant
Des gants chirurgicaux frais et secs permettent de réduire
la probabilité d’un claquage. Dans son propre intérêt, le
chirurgien devrait donc changer de gants à intervalles
5. Un gant chirurgical assure-t-il une protection effiréguliers pendant des opérations de longue durée.
cace en chirurgie HF ?
Pour encore plus de sécurité, il est recommandé de
On attend d’un gant chirurgical qu’il protège entre autres
porter deux paires de gants. On a ainsi une double
contre les blessures par courant HF.
couche de caoutchouc, et la couche d’air entre les surFondamentalement, le caoutchouc est un isolant. L’effet
faces de caoutchouc a un effet isolant supplémentaire.
isolant dépend de la composition physique du film de
caoutchouc ainsi que de son épaisseur. Plus le film est
6. Conclusion
épais, plus l’effet est élevé.
Fondamentalement, on peut affirmer que l’application
Tableau : Résistivité de divers matériaux en [Ω.cm]
de la chirurgie HF n’exige pas le port de gants, et que
pour courants alternatifs de 0,3 à 1 mégahertz (MHz)
ces derniers ne peuvent pas être considérés comme
Tissus biologiques
Métaux
des gants de protection dans ce contexte. Si la
Sang
0,16.103
Argent
0,16.10-5
méthode est correctement appliquée et que le
3
-5
Muscles, reins
0,2.10
Cuivre
0,17.10
Foie, rate
0,3.103
Or
0,22.10-5
générateur HF ne présente pas de défaillance, une
Cerveau
0,7.103
décharge du courant électrique au travers du chirurgien
Poumons
1,0.103
3
est peu probable.
Tissus gras
3,3.10
Pour le cas où il y aurait malgré tout des courants
Gant chirurgical en latex naturel : 1010 – 1013 Ω.cm
« déviés » pendant le travail et donc un risque de claLa chirurgie HF utilise des tensions moyennes de
quage, des mesures de sécurité et d’isolation supplé1200 V avec des pointes jusqu’à 4000 V. Selon la norme
mentaires, telles que l’utilisation de pincettes spéciales
EN 60903, la protection contre des tensions aussi élevées
ou le port de deux paires de gants superposées,
exige des gants de protection pour électriciens de la
permettent de réduire au minimum la probabilité d’un
classe de protection II, d’une épaisseur de paroi de 2,3
tel claquage.
mm (fig. 8). Or, pour assurer un maximum de sensibilité
Téléchargement