Un conducteur actif et singulier : le neutre

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Collection Technique ..........................................................................
Cahier technique n° 212
Un conducteur actif et singulier :
le neutre
J. Schonek
Building a New Electric World *
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n° 212
Un conducteur actif et
singulier : le neutre
Jacques SCHONEK
Ingénieur ENSEEIHT et Docteur-Ingénieur de l’Université de Toulouse,
il a participé de 1980 à 1995 à la conception des variateurs de vitesse
de la marque Telemecanique.
Il a été ensuite gérant de l’activité Filtrage d’Harmoniques.
Il est actuellement en charge des études Applications et Réseaux
Electrotechniques au sein de la Direction « Power Protection &
Control » de Schneider Electric.
CT 212 édition juin 2004
Lexique
ir, is, it, iN (A) :
IN (A) :
IL (A) :
Il (A) :
ih (%) :
valeurs instantanées des courants dans les phases et le neutre
valeur efficace du courant dans le neutre
valeur efficace du courant dans une phase
composante fondamentale du courant IL
taux d’harmonique de rang h du courant IL
Ih (A) :
valeur efficace du courant harmonique de rang h, ih (%) =
THD (%) :
taux de distorsion harmonique
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.2
Ih (A)
100
I l (A)
Un conducteur actif et singulier :
le neutre
Un paradoxe : le conducteur neutre est un conducteur actif dans lequel il
ne devrait circuler aucun courant, et pourtant…
Il existe un regain d’intérêt pour le conducteur neutre, lié à la prolifération
des charges électroniques, à la circulation de courants harmoniques et au
risque de surcharge.
Dans ce contexte, l’objectif de ce document est de faire le point sur les
habitudes et recommandations d’installation : coupure, protection et
dimensionnement du conducteur neutre.
Sommaire
1 Un conducteur actif dans la
distribution électrique
2 Règles traditionnelles de dimensionnement
et de protection du neutre
1.1 Schéma général de Distribution Electrique
1.2 Neutre, mais pas innocent
1.3 Rappels sur les Schémas des Liaisons à la Terre
(dits « régimes de neutre »)
p. 4
p. 4
1.4 Court-circuit phase – neutre
p. 7
p. 4
2.1 Section du conducteur neutre
p. 8
2.2 Coupure du conducteur neutre
p. 10
2.3 Protection du conducteur neutre
2.4 Appareillage adapté à la coupure et à la protection
du conducteur neutre
p. 11
p. 12
3.1 Charges non linéaires monophasées
p. 13
3.2 Charges monophasées dans un système triphasé
p. 14
3.3 Courant dans le conducteur neutre dans un système triphasé
3.4 Taux de charge du conducteur neutre
p. 15
p. 18
3.5 Effet des courants harmoniques sur
les canalisations électriques
3.6 Estimation du taux d’harmonique 3
p. 19
p. 19
3.7 Dimensionnement des constituants d’une installation
3.8 Harmoniques et Schémas des Liaisons à la Terre
p. 20
p. 21
3.9 Comment gérer les harmoniques impactant le neutre
4 Synthèse
p. 22
p. 24
5 Conclusion
Annexe 1 : Rappels
p. 25
p. 26
Annexe 2 : Cas particulier des installations BT alimentées par plusieurs sources
Annexe 3 : Bibliographie
p. 27
p. 29
3 Et vinrent les harmoniques…
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.3
1 Un conducteur actif dans la distribution électrique
1.1 Schéma général de distribution électrique
Le schéma le plus courant de la distribution
électrique en Basse Tension est de type
triphasé, avec neutre distribué. Cette disposition
permet à la fois l’alimentation de charges
triphasées non raccordées au neutre (moteurs,
par exemple) et de charges monophasées
courantes.
Les niveaux de tension les plus utilisés en
Europe sont de 400 V entre phases, et 230 V
entre phases et neutre (cf. fig. 1 ).
Le secondaire du transformateur d’alimentation
est donc généralement couplé en étoile, voire en
zigzag.
Le conducteur neutre est réglementairement de
couleur bleu clair, quand il n’est pas également
utilisé comme conducteur de protection (PEN,
couleur vert/jaune).
1
400 V
400 V
400 V
2
230 V
230 V
3
230 V
N
Fig. 1 : les tensions d’alimentation en BT.
1.2 Neutre, mais pas innocent
Le conducteur neutre présente des particularités
par rapport aux autres conducteurs de la
distribution électrique.
c Il a un rôle spécifique dans la définition des
Systèmes des Liaisons à la Terre
v il est en général possible et recommandé de le
raccorder à la terre,
v il peut être utilisé comme conducteur de
protection.
c Le conducteur neutre est un conducteur actif
v il assure l’alimentation des charges
monophasées,
v il assure la circulation des courants de
déséquilibre,
v il assure la circulation des courants harmoniques
de rang 3 des charges non linéaires,
v il est parcouru par des courants de défaut
(défauts d’isolement, surcharge, court-circuit).
Lorsqu’il est utilisé comme conducteur de
protection, il est parcouru par des courants de
fuite capacitive.
Un certain nombre de précautions en découlent,
dans la conception d’une installation électrique :
c le dimensionnement et la protection du
conducteur neutre doivent suivre des règles
précises ;
c la continuité du conducteur neutre est
impérative lorsqu’il est utilisé comme conducteur
de protection ;
c la coupure du conducteur neutre est
indispensable si son potentiel par rapport à la
terre s’élève et atteint un niveau dangereux.
1.3 Rappels sur les schémas des liaisons à la terre (dits « régimes de neutre »)
Ces rappels ont pour objectif de bien préciser le
rôle spécifique tenu par le conducteur neutre
dans la définition des Systèmes des Liaisons à
la Terre -SLT-.
Le choix d’un schéma de liaisons à la terre
répond à 2 objectifs :
c la protection des personnes et des biens,
c la continuité de service.
Contre le risque de chocs électriques, les
normes d’installations ont défini les principes
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.4
fondamentaux de la protection des personnes
qui sont :
c la mise à la Terre des masses des équipements
et récepteurs électriques,
c l’équipotentialité des masses simultanément
accessibles qui tend à éliminer les tensions de
contact,
c la coupure automatique de l’alimentation
électrique en cas de tensions ou de courants
dangereux provoqués par la circulation du
courant de défaut d’isolement.
Il existe, pour les réseaux BT, 3 types de SLT.
Ils diffèrent par la mise à la terre ou non du point
neutre de la source de tension et par le mode de
raccordement des masses (cf. fig. 2 ). Le choix
du régime de neutre dépend des caractéristiques
de l’installation et des conditions et impératifs
d’exploitation.
Schéma TT
Dans ce type de schéma (cf. fig. 2a), dit de
« neutre à la terre » :
c le neutre de la source est relié à une prise de
terre distincte de celle des masses,
c toutes les masses protégées par un même
dispositif de coupure doivent être reliées au
même système de mise à la terre.
C’est le cas typique de la distribution publique en
France.
La figure 3 indique le circuit parcouru par le
courant en cas de défaut : la tension de contact
sur la masse de l’appareil en défaut atteint une
valeur dangereuse.
Le schéma TT impose donc la coupure au
premier défaut d’isolement. Le dispositif de
coupure mis en œuvre est un Dispositif
Différentiel à courant Résiduel (DDR).
c-
a - Neutre à la terre (TT)
Mise au neutre (TN-S)
1
2
3
N
PE
1
2
3
N
PE
RB
RA
RB
b - Mise au neutre (TN-C)
d - Neutre isolé (IT)
1
2
3
PEN
RB
1
2
3
N
PE
RB
Contrôleur permanent d'isolement
Fig. 2 : les trois principaux schémas des liaisons à la terre ou SLT sont les schémas TT, TN et IT, définis par la
CEI 60364-3. Le TN peut être soit TN-C (neutre et PE confondus) soit TN-S (neutre et PE distincts).
Id
DDR
N
Ud
RB
Rd
RA
Fig. 3 : défaut d’isolement avec schéma TT Avec un
réseau 400 V / 230 V, RA et RB de 10 Ω, la tension de
contact Ud est de 115 V !
Schéma TN
Le principe de ce schéma dit de « mise au
neutre » est de transformer tout défaut
d’isolement en court-circuit monophasé
phase – neutre.
Dans ce type de schéma :
c le point neutre BT de chaque source est relié
directement à la terre,
c toutes les masses de l’installation sont reliées
à la terre et donc au neutre :
v par un seul conducteur (PEN) de protection et
de neutre avec le SLT TN-C (conducteur
Commun de protection et de neutre), (cf fig. 2b) ;
v par les conducteurs de protection (PE) et de
neutre (N) distincts avec le SLT TN-S
(conducteurs Séparés), (cf fig. 2c).
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.5
Le courant de défaut est équivalent à un courtcircuit Phase/Neutre. Il génère une tension de
contact dangereuse (cf. fig. 4 ). Le déclenchement
du disjoncteur par une protection « court retard »
ou un déclencheur magnétique est donc
obligatoire (DPCC : Dispositif de Protection
contre les Courts-Circuits).
Le schéma TN permet d’utiliser les protections
de surintensité habituelles pour protéger contre
les défauts d’isolement par déclenchement au
premier défaut.
L’emploi de DDR permet de s’affranchir des
vérifications sur la valeur du courant en cas de
défaut, mais il est totalement inadapté et exclus
en schéma TN-C.
Le schéma TN-C n’est pas recommandé pour
l’alimentation des dispositifs électroniques en
raison de la possible circulation de courants
harmoniques dans le neutre, sujet abordé dans
les chapitres suivants.
Id
N
PE
DPCC
Rd
Ud
RB
Fig. 4 : défaut d’isolement en cas de schéma TN-S.
configuration du réseau, par des DDR protégeant
des groupes de masses interconnectées.
Avec le respect de cette obligation de rechercher
et d’éliminer le premier défaut, le schéma IT
procure la meilleure continuité d’alimentation.
La distribution du neutre est déconseillée en IT.
En effet, en cas de premier défaut (maintenu) la
tension phase – terre sur les phases saines est
égale à la tension composée. Les appareils
monophasés raccordés à ces phases sont alors
soumis à des tensions d’isolement phase –
masse supérieures à la normale, ce qui peut
conduire à leur détérioration. (Exemple :
alimentation de matériel informatique).
La non distribution du neutre interdit le
raccordement d’appareils monophasés entre
phase et neutre et évite donc ce risque. Dans le
cas contraire, les appareils devront être spécifiés
pour une tension d’isolement égale à la tension
entre phases.
Schéma IT
Dans ce type de schéma dit « à neutre isolé »,
le neutre du transformateur est :
c soit isolé de la terre (neutre isolé),
c soit relié à la terre par une impédance élevée
(neutre impédant).
Toutes les masses de l’installation sont reliées à
la terre (cf. fig. 2d).
En schéma IT, le premier défaut d’isolement
n’impose pas le déclenchement, mais ce défaut
doit être détecté au moyen d’un Contrôleur
Permanent d’Isolement (CPI), et éliminé. Sinon
un deuxième défaut survenant sur un autre
conducteur actif provoque un court-circuit entre
les conducteurs actifs concernés (cf. fig. 5 ).
Le déclenchement est alors nécessaire pour
éliminer la tension de contact dangereuse. Ce
déclenchement est normalement obtenu par les
protections de surintensité et parfois, selon la
Id
Id
3
2
1
N
N
PE
Contrôleur
permanent
d'isolement
(CPI)
Limiteur
de
surtension
DPCC
Id
Ud2
DPCC
Id
Rd2
Ud1
Rd1
RB
Fig. 5 : courant de défaut en cas de double défaut avec le SLT IT et tensions dangereuses Ud1 et Ud2.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.6
1.4 Court-circuit phase – neutre
Le calcul du courant de court-circuit entre phase
et neutre diffère légèrement du calcul du courant
de court-circuit triphasé. La figure 6 représente
schématiquement les 3 possibilités de courtcircuit dans une installation avec :
V : tension simple (phase – neutre) en sortie de
transformateur,
U : tension composée (entre phases) en sortie
de transformateur,
ZT : impédance d’un enroulement du
transformateur,
ZL : impédance d’un conducteur de phase,
ZN : impédance du conducteur de neutre,
Icc_tri : courant de court-circuit triphasé,
Icc_ph : courant de court-circuit entre phases,
Icc_ph-N : courant de court-circuit phase – neutre.
ZL
1
ZT
ZT
Phase-neutre
ZL
Triphasé
2
ZT
ZL
3
Phase-neutre
ZN
N
Fig. 6 : les possibilités de court-circuit sur un réseau
triphasé.
En général l’impédance de raccordement du
neutre du transformateur est négligeable, d’où
les équations :
I cc_tri =
V
(Z T + ZL )
I cc_ph =
U
V. 3
3
I
=
=
2.(Z T + ZL ) 2.(Z T + ZL )
2 cc_tri
I cc_ph-N =
V
(Z T + ZL + ZN )
Si les conducteurs de phases et de neutre sont
identiques, ZN = ZL , et donc :
I cc_ph-N =
V
(Z T + 2.ZL )
Pour de grandes longueurs de câbles, en
particulier en distribution terminale, l’impédance
du transformateur est négligeable devant
l’impédance des conducteurs, et alors :
I cc_tri ≈
I cc_ph ≈
V
ZL
3 V
.
2 ZL
I cc_ph-N ≈
V
2.ZL
D’où l’inégalité :
Icc_tri > Icc_ph > Icc_ph-N
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.7
2 Règles traditionnelles de dimensionnement
et de protection du neutre
Les règles et indications exposées dans ce
chapitre ont pour principales sources les normes
de conception et de réalisation des installations
BT : CEI 60364 et NF C 15-100.
2.1 Section du conducteur neutre
En régime sinusoïdal, le courant dans le
conducteur neutre dépend du déséquilibre
entre les charges monophasées raccordées
entre phases et neutre.
Charges équilibrées : le courant dans le
conducteur neutre est nul (cf. fig. 7 ).
Charges déséquilibrées : le courant dans le
conducteur neutre n’est pas nul comme illustré
sur la figure 8 page ci-contre.
Dans le cas de charges déséquilibrées de même
nature, le courant dans le neutre est inférieur ou
égal au courant phase le plus élevé (cf. fig. 9
page ci-contre).
Dans le cas de charges déséquilibrées de nature
différente sur chacune des phases (résistive,
inductive, capacitive) il peut arriver que le
courant neutre soit supérieur au courant dans
chacune des phases. Ce cas de figure n’est
toutefois pas très courant dans la pratique.
De plus, la présence d’harmoniques (objet du
chapitre suivant) dans le conducteur neutre est
aussi un facteur important pour la détermination
de sa section.
La section du conducteur neutre, déterminée en
fonction du courant véhiculé, peut être :
c inférieure à la section des conducteurs de
phases… si les conditions suivantes sont
remplies simultanément :
v la section des conducteurs de phases doit être
supérieure à 16 mm2 Cuivre ou 25 mm2 Aluminium,
v la section du conducteur neutre doit être au
moins égale à 16 mm2 Cuivre ou 25 mm2
Aluminium,
v les charges alimentées en service normal sont
supposées équilibrées, avec un taux
d’harmonique de rang 3 inférieur à 15 %,
v le conducteur neutre doit être protégé contre
les surintensités.
i
i1
0
t
i2
i3
iN
0
Fig. 7 : courants phases et courant neutre avec des charges linéaires équilibrées.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.8
iN
t
Une pratique courante consiste à avoir un
conducteur neutre de section « moitié » de la
section des conducteurs de phases.
c égale à la section des conducteurs de phases.
C’est le cas général, en particulier dans les
circuits monophasés à 2 conducteurs, ou
lorsque la section des conducteurs de phases
est inférieure à 16 mm2 Cuivre ou 25 mm2
Aluminium. C’est également vrai dans le cas
d’alimentation de charges non linéaires et que le
taux d’harmonique 3 se situe dans la fourchette
de 15 à 33 %.
c supérieure ou égale à la section des conducteurs
de phases, dans le cas d’alimentation de charges
non linéaires et que le taux d’harmonique 3
dépasse 33 %. L’intensité dans le conducteur
neutre est alors prépondérante pour la
détermination de la section des conducteurs.
i
i1
0
t
i3
i2
iN
0
t
Fig. 8 : courants phases et courant neutre avec des charges linéaires déséquilibrées.
Dans un réseau triphasé il circule un courant de
déséquilibre dû à l’impossibilité d’un équilibrage
permanent parfait des charges monophasées.
10 A
Ce courant est égal à :
→
→
→
→
I N = I1 + I2 + I 3
N
20 A
Il peut être très variable comme le montre
l’exemple ci-dessous :
1 2 3 N
15 A
Voire même supérieur au courant de phase si
la phase 2 est coupée :
IN = 17,32 A
N
20 A
15 A
10 A
10 A
N
20 A
Fig. 9 : importance des courants de déséquilibre dans le neutre.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.9
2.2 Coupure du conducteur neutre
Les règles de coupure ou de non-coupure du
conducteur neutre ont pour objet de limiter les
risques d’électrocution consécutifs à une
élévation de son potentiel.
Ces risques sont particulièrement présents dans
les étages d’un immeuble de grande hauteur, où
il est plus difficile de garantir la qualité des
liaisons à la terre du fait de la longueur
exceptionnelle du câblage. Il a déjà été mesuré
sur une installation un cas extrême où le
potentiel du neutre par rapport à la terre était de
80 V en fonctionnement normal. Ce cas
présente un risque d’électrocution.
Afin de ne pas créer de situations dangereuses,
il est donc vivement conseillé d’appliquer la règle
de coupure du neutre sans dérogation.
En schéma TN-C
Le conducteur neutre a également le rôle de
conducteur de protection (PEN). Le maintien de
sa continuité est donc impératif en toutes
circonstances, et de fait interdit tout dispositif de
coupure sur sa liaison.
En schéma TT ou TN-S
Le neutre est relié à la terre à l’origine de
l’installation. Dans des conditions normales, son
potentiel se trouve voisin du potentiel de terre.
Cependant, pour différentes raisons, le potentiel
du conducteur neutre peut s’éloigner
sensiblement du potentiel de terre et atteindre
des tensions dangereuses par rapport à la terre.
En schéma IT
Le conducteur neutre peut se trouver à un
potentiel quelconque, même s’il est généralement
voisin du potentiel de terre. En présence d’un
défaut (par exemple une phase à la terre) le
potentiel du neutre par rapport à la terre peut
s’élever jusqu’à la tension simple. Pour la
maintenance d’une partie d’installation réputée
hors tension, donc a priori non dangereuse, le
personnel d’intervention peut cependant être en
situation dangereuse si le conducteur neutre
n’est pas coupé. Pour ces raisons, il est
impératif de couper le conducteur neutre dans
tous les cas. Seule la coupure du neutre garantit
l’égalité des potentiels entre masse et terre
après déclenchement.
La figure 10 illustre un phénomène possible : la
circulation de courant dans le conducteur neutre
provoque l’élévation du potentiel du neutre au
niveau d’une charge, même si celle-ci n’est plus
reliée à la phase à la suite d’une manœuvre ou
d’un déclenchement.
De plus, une inversion de câblage entre phase
et neutre au niveau d’une charge étant toujours
possible, la non-coupure de l’une des polarités
risque en fait de maintenir la tension phase
appliquée à la charge.
Recommandations importantes
c Le neutre ne doit jamais être coupé seul : il
doit être coupé après les phases et rétabli avant
les phases.
Le non respect de cette règle provoque, en
régime triphasé déséquilibré, des surtensions
sur les appareils monophasés : la tension entre
phases pouvant être appliquée à un circuit
conçu pour être alimenté par la tension simple
(phase – neutre). Ce risque est illustré sur la
figure 11 page ci-contre.
La coupure simultanée de la phase et du
neutre est donc recommandée.
Par ailleurs, en cas de défaut dans une partie de
l’installation (coupure accidentelle du conducteur
neutre en amont, augmentation des
impédances, défaut MT/BT, coup de foudre sur
les lignes basse tension...), le potentiel du neutre
au niveau des charges utilisatrices peut s’élever
de façon brutale et dangereuse.
I
ZL
N
ZN
!
Fig. 10 : élévation du potentiel du neutre.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.10
1 2 3 N
N’
Z1
Z2
Z3
Z3 << Z1 et Z2
3
N'
1
N
individuel du neutre ou la coupure par appareils
unipolaires (cf. CEI 60364).
De plus, du fait des tensions mises en jeu,
l’appareillage de coupure du conducteur neutre
devra avoir aussi les caractéristiques
nécessaires au sectionnement, notamment une
tension d’isolement suffisante (exemple : tenue
à une onde de choc de 12,3 kV en BT pour
l’appareillage industriel, selon la norme
CEI 60947).
c Pour être coupé le neutre doit être sûrement
identifiable, c’est pourquoi les normes
d’installation imposent son repérage par la
couleur bleu clair et la lettre N sur les bornes et
les schémas.
Nota : Dans le cas d’une distribution sans
Neutre, le conducteur de couleur bleue peut être
utilisé en tant que phase, mais ceci n’est pas
recommandé.
En ce qui concerne la position du pôle Neutre
dans l’appareillage, elle n’est que rarement
précisée dans les normes, hormis par exemple
en France dans la C 62-411, pour les
disjoncteurs de branchement BT. Toutefois
l’habitude dans un grand nombre de pays
européens, y compris en France, est de disposer
les bornes de raccordement du Neutre à gauche
de celles des phases (cf. fig. 12 ).
2
Fig. 11 : risque de surtension en cas de coupure du
conducteur neutre.
Si la charge connectée entre la phase 3 et le
neutre est beaucoup plus importante que les
charges des autres phases (1 et 2), en cas de
rupture du conducteur neutre le point neutre
artificiel N’ se trouve porté à un potentiel voisin
de celui de la phase 3. Les charges connectées
entre les phases 1, 2 et N’ se trouvent donc
soumises aux tensions V1N’ et V2N’, voisines de
V13 et V23.
Il est donc vivement recommandé de couper ou
de sectionner le neutre avec des appareillages
omnipolaires afin d’éviter le sectionnement
Fig. 12 : le pôle du conducteur Neutre est à gauche
(disjoncteur Compact NS100N, marque Merlin Gerin).
2.3 Protection du conducteur neutre
En schéma TN-C
Le conducteur de protection (PE) ne pouvant
être coupé en aucune circonstance il n’est pas
possible de couper le conducteur (N) dans une
installation de type TN-C pour laquelle ces deux
conducteurs sont confondus en un seul (PEN).
En conséquence, la section du neutre sera
choisie de manière appropriée puisque la
protection par coupure automatique n’est pas
applicable.
En schéma TT ou TN-S
En cas de surcharge ou de court-circuit phase –
neutre sur un départ donné, le même courant de
défaut parcourt les conducteurs de phase et du
neutre. Deux cas sont donc à considérer :
c Section du neutre égale à la section des
phases
La protection du neutre n’est pas obligatoire. Le
conducteur neutre est protégé par le dispositif de
protection du conducteur de phase.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.11
c Section du neutre inférieure à la section des
phases
Un dispositif de protection contre les surcharges
approprié à la section du conducteur neutre est
obligatoire.
En schéma IT
En cas de double défaut, l’un sur une phase,
l’autre sur le neutre, des départs de calibres
différents peuvent être concernés (reliés par les
défauts).
La protection des seules phases n’est pas une
solution sûre : la protection de phase d’un
calibre supérieur sur un départ peut être
inadaptée à la section du neutre de l’autre
départ.
La protection et la coupure du neutre sont donc
obligatoires, sauf cas particuliers (exemples :
circuits monophasés, protection par DDR…).
2.4 Appareillage adapté à la coupure et à la protection du conducteur neutre
Si les conditions précédentes sont remplies et si
le neutre est repéré sans risque d’erreur, il est
possible, voire recommandé pour des raisons
économiques, de ne pas le protéger. Dans les
autres cas, les risques d’inversion phase/neutre
justifient la protection du neutre.
Le cas des appareils de coupure d’urgence
Pour assurer une mise hors tension rapide d’un
circuit, la coupure omnipolaire (de tous les
conducteurs actifs y compris le neutre) est
recommandée au niveau de l’appareil de
coupure ou de l’arrêt d’urgence.
Le cas des coupe-circuits
Sauf cas très particuliers (utilisation de
cartouches fusibles à percuteurs associés à un
appareil de coupure), la fusion d’un fusible placé
sur un conducteur actif ne permet pas
d’interrompre le courant dans les autres
conducteurs actifs : la coupure est unipolaire.
Pour éviter la coupure du neutre seul, celui-ci ne
devra donc jamais être protégé par fusible.
De même, le conducteur neutre ne sera pas
coupé automatiquement en cas de fusion d’un
fusible sur l’une des phases.
Le cas du contrôle – commande
Pour les appareillages (contacteurs, télérupteurs,
interrupteurs, délesteurs, régulateurs...) non
destinés à la protection mais employés pour la
commande ou le contrôle de charges (machines,
éclairages), la coupure du neutre n’est pas
imposée par la normalisation. Toutefois, lorsque
des contacts auxiliaires des appareils de
protection sont utilisés pour réaliser des
fonctions logiques ou de signalisation, il est
parfois difficile de prédire le potentiel de chacun
des conducteurs en situation de défaut (surtout
dans un schéma triphasé). Dans ce cas, la
coupure du neutre est aussi recommandée.
Le cas des disjoncteurs
L’appareillage bipolaire (Phase/Phase ou Phase/
Neutre) ou tétrapolaire, permet de couper
simultanément les phases et le neutre pour
mettre un circuit hors tension.
Les appareils phase/neutre, dont seule la phase
est protégée, sont plus économiques et moins
volumineux, mais nécessitent un repérage sans
faille du neutre (cf. fig. 13 ).
Le cas des DDR
Les DDR sont considérés comme des appareils
apportant une grande sûreté de fonctionnement
d’une installation électrique : ils participent à la
protection contre les contacts directs et indirects,
ainsi qu’à la protection incendie.
De plus, une inversion entre phase et neutre au
niveau des DDR n’affecte pas leur fonctionnement.
Toutes ces fonctions réunies dans un même
dispositif font que les DDR sont recommandés
dans les nouvelles installations comme lors des
extensions.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.12
Fig. 13 : « Déclic » disjoncteur Phase – Neutre avec
identification du pôle neutre (Marque Merlin Gerin).
3 Et vinrent les harmoniques…
3.1 Charges non linéaires monophasées
Une part croissante de l’électricité est consommée
par des charges électroniques non linéaires
monophasées (éclairage fluorescent à ballast
électronique, appareils électroniques domestiques,
informatique, variateurs de vitesse…).
Ces appareils disposent en général d’une
alimentation à découpage, dont le schéma
d’entrée le plus répandu est du type redresseur
monophasé à diodes avec filtrage capacitif
(cf. fig. 14 ).
La forme d’onde de courant et son spectre
harmonique typique sont représentés sur les
figures 15 et 16.
%
100
90
80
70
60
50
Charge
40
30
20
10
Fig. 14 : redresseur monophasé avec filtrage capacitif.
0
1
Le courant absorbé par ces charges est
constitué d’impulsions positives et négatives, en
synchronisme avec les crêtes de la tension
réseau. De ce fait, sa composante harmonique
de rang 3 peut atteindre 85 % du fondamental.
3
5
7
9 11 13 15 17 19 21 23 25
Rang
Fig. 16 : spectre harmonique du courant phase.
Ici le taux de distorsion (THD) est de 110 %,
le taux d’harmonique 3 (i3) est de 85 %.
Tension réseau
Courant ligne
0
t
Fig. 15 : allure du courant.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.13
Le tableau de la figure 17 donne des exemples
d’appareils monophasés générateurs de
courants harmoniques, et leurs principales
caractéristiques typiques.
Type d’appareil
P (W)
IL (A)
i3 (%)
Micro-ordinateur
Micro-ordinateur + imprimante active
Photocopieur en veille
Photocopieur actif
Tube fluo à ballast magnétique
Tube fluo à ballast électronique
Ballon fluorescent
Lampe fluo compacte
Moteur avec variateur de vitesse
60
300
70
1500 - 2200
36
36
250
25
500 - 3000
0,5
1,45
0,32
7 - 10
0,2
0,16
1,4
0,2
4 - 18
85
35
65
15
25
10
10
80
80
P (W) : puissance active consommée
IL (A) : valeur efficace du courant absorbé
i3 (%) : taux de courant harmonique de rang 3
Fig. 17 : les principaux générateurs d’harmoniques de rang 3 dans les installations industrielles et tertiaires.
3.2 Charges monophasées dans un système triphasé
Dans un système simplifié constitué d’une
source triphasée équilibrée et de trois charges
monophasées identiques, connectées entre
phases et neutre (cf. fig. 18 ) considérons deux
cas particuliers :
v celui de trois charges linéaires,
v celui de trois charges non linéaires.
c Dans le cas de charges linéaires, les courants
constituent un système triphasé équilibré. La
somme des courants de phases est nulle, ainsi
donc que le courant dans le neutre.
c Dans le cas de charges non linéaires, les
courants de phases ne sont pas sinusoïdaux et
contiennent donc des harmoniques, en
particulier de rang multiple de 3.
Les courants des trois phases étant égaux, les
courants harmoniques, de rang 3 par exemple,
ont la même amplitude et peuvent s’écrire sous
la forme :
ir3 = I 3 .sin 3.(ωt)
2π 

is3 = I 3 .sin 3. ωt −
 = I 3 .sin (3ωt − 2π) = ir3

3 
4π 

it3 = I 3 .sin 3. ωt −
 = I 3 .sin (3ωt − 4 π) = ir3

3 
Dans cet exemple, les courants harmoniques
de rang 3 des 3 phases sont donc identiques.
Le courant dans le neutre étant égal à la somme
des courants des phases, la composante de
rang 3 du courant neutre est donc égale à la
somme des composantes de rang 3, soit :
in3 = 3.ir3
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.14
N
it
Source
Charge
is
Charge
ir
Charge
iN
Fig. 18 : charges monophasées.
D’une manière générale, pour des charges
équilibrées, les courants harmoniques de rang
multiple de 3 sont en phase et s’additionnent
arithmétiquement dans le conducteur neutre,
alors que les composantes fondamentales et les
harmoniques de rang non multiple de 3
s’annulent.
Les courants harmoniques 3 sont des courants
homopolaires qui circulent en phase dans les 3
phases.
3.3 Courant dans le conducteur neutre dans un système triphasé
La figure 19 réunit plusieurs courbes
représentant les courants circulant dans les
phases de 3 charges monophasées non
linéaires identiques (comme décrites en 3.1),
et connectées entre phases et neutre.
Le courant résultant dans le conducteur
neutre, somme des trois courants de phase,
est également représenté.
ir
0
t
is
0
t
it
0
t
iN
0
t
Fig. 19 : courants phases et neutre alimentant 3 charges monophasées non linéaires identiques.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.15
Les spectres harmoniques des courants phases et
neutre sont représentés sur les figures 20 et 21.
Ces diagrammes montrent que le courant neutre
ne contient que des composantes de rang impair
multiple de 3 (soit : 3, 9, 15...), dont les
amplitudes sont 3 fois supérieures à celles des
courants de phase. Le rang 3 est bien sûr
prépondérant et les autres composantes de rang
multiple de 3 (soit : 9, 15…) contribuent très peu
à la valeur efficace.
Le courant neutre est donc pratiquement égal à
3 fois le courant harmonique 3 de chaque phase,
soit : IN ≈ 3.I3
Le courant neutre considéré ici est le résultat de
la recombinaison des courants des circuits
monophasés. Dans les installations électriques,
il concerne donc en premier lieu les systèmes de
répartition (triphasé vers monophasé) et les
dispositifs dits « têtes de tableau ».
Ce phénomène concerne uniquement les circuits
triphasés, les courants phase et neutre dans les
circuits monophasés étant bien sûr identiques.
Calcul de la valeur efficace maximale du
courant neutre
Supposons, comme sur la figure 19, que les ondes
de courant des 3 phases ne se chevauchent pas.
Sur une période T du fondamental, le courant
d’une phase est constitué d’une onde positive et
d’une onde négative, séparées d’un intervalle où
le courant est nul.
La valeur efficace du courant ligne peut être
calculée par l’expression :
T
IL =
1 2
. il .dt
T ∫
0
La valeur efficace du courant neutre peut être
calculée sur un intervalle égal à T/3.
Sur cet intervalle, le courant neutre est également
constitué d’une onde positive et d’une onde
négative, identiques à celles du courant phase.
La valeur efficace du courant neutre peut donc
être calculée de la manière suivante :
T/3
IN =
∫ in2 .dt
0
T/3
IN = 3 .
1
.
T
∫ in2 .dt
0
T/3
et comme :
T
∫ in2 .dt = ∫ il
0
2
.dt
0
T
alors : IN = 3 .
1 2
. il .dt = 3 . IL
T ∫
0
Le courant dans le conducteur neutre a donc
ici une valeur efficace e fois supérieure à
celle du courant dans une phase.
Lorsque les ondes de courant des 3 phases se
chevauchent (cf. fig. 22 et 23 page suivante), la
valeur efficace du courant dans le neutre est
inférieure à e fois la valeur efficace du courant
dans une phase.
De même, lorsque les charges comportent une
part de circuit linéaire, le courant absorbé ne
présente pas de palier nul (cf. fig. 24 ci-contre), et
la démonstration fournie ci-dessus ne s’applique
pas. La valeur efficace du courant dans le neutre
est alors strictement inférieure à e fois la valeur
efficace du courant dans une phase.
%
300
%
300
250
250
200
200
150
150
100
100
50
50
0
1
.
T/3
0
1
3
5
7
9 11 13 15 17 19 21 23 25
Rang
Fig. 20 : spectre du courant phase.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.16
1
3
5
7
9 11 13 15 17 19 21 23 25
Rang
Fig. 21 : spectre du courant neutre.
Le facteur e ne peut donc être obtenu qu’en
cas d’alimentation exclusive de charges, telles
que décrites en 3.1, identiques sur les 3 phases.
La puissance de ces dispositifs étant
relativement faible (en général quelques
dizaines de watts chacun), ceci ne peut donc
i
is
it
concerner que des départs de faible intensité. Le
courant neutre peut alors dépasser le courant
phase, mais sur des départs peu chargés. Il n’y
a donc pas de dépassement de la capacité du
conducteur neutre, si sa section est égale à celle
des phases.
ir
0
t
Fig. 22 : courants dans les 3 phases, avec chevauchement.
iN
0
t
Fig. 23 : courant dans le neutre, avec chevauchement.
i
0
t
Fig. 24 : courant absorbé par une charge avec circuits linéaire et non-linéaire.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.17
3.4 Taux de charge du conducteur neutre
Le courant dans le neutre peut donc dépasser le
courant de chaque phase dans des installations
telles celles possédant un grand nombre de
dispositifs monophasés (équipements
informatiques, éclairage fluorescent). C’est le
cas dans les immeubles de bureaux, centres de
calcul, Internet Data Centers, centres d’appels
téléphoniques, banques, salles de marchés,
zones d’éclairage en Grande Distribution…
Cette situation n’est pas générale, en raison de
l’alimentation simultanée de charges linéaires et/
ou triphasées (chauffage, ventilation, éclairage
incandescent…) ne générant pas de courant
harmonique de rang 3. Une attention particulière
doit cependant être apportée aux sections des
conducteurs neutre, pour leur détermination lors
de la conception d’une nouvelle installation, ou
pour leur adaptation lors d’un changement des
charges alimentées.
Une approche simplifiée permet d’estimer le taux
de charge du conducteur neutre.
Comme indiqué en 3.3, pour des charges
équilibrées, le courant dans le neutre IN est très
voisin de 3.I3 , soit :
IN ≈ 3.I3 qui peut s’écrire : IN ≈ 3.i3 .I1
Pour de faibles valeurs de distorsion, la valeur
efficace du courant est proche de la valeur
efficace du fondamental, donc :
IN ≈ 3.i3.IL d’où : IN /IL ≈ 3.i3 (%)
Cette équation lie tout simplement le taux de
surcharge du neutre (IN /IL) au taux de courant
harmonique de rang 3. Elle permet d’observer,
en particulier, que lorsque ce taux atteint 33 %,
le courant dans le conducteur neutre est égal au
courant dans les phases.
Pour des valeurs quelconques de distorsion, des
simulations ont permis d’obtenir une loi moins
approximative, présentée sur la figure 25 .
IN / IL
2,0
1,8
1,6
1,4
1,2
1,0
0,8
0,6
0,4
0,2
0
Sans information détaillée sur les émissions
d’harmoniques des appareils installés, une autre
approche simplifiée consiste à lier directement le
taux de charge du conducteur neutre au
pourcentage de charges électroniques.
La courbe de la figure 26 a été établie compte
tenu d’un taux de courant harmonique 3 généré
par les charges électroniques égal à 85 %.
IN / IL
2,0
1,8
1,6
1,4
1,2
1,0
0,8
0,6
0,4
0,2
0
i3 (%)
0
20
40
60
80
100
Fig. 26 : surcharge du conducteur neutre en fonction
du pourcentage de charges non linéaires.
Dans les installations de forte puissance (ordre
de grandeur : P > 100 kVA ou I > 150 A),
plusieurs facteurs contribuent à réduire la
surcharge du neutre :
c de plus en plus d’équipements informatiques
(stations de travail, serveurs, routeurs, ASI…)
utilisent des circuits de compensation du facteur
de puissance (Power Factor Correction -PFC-)
pour réduire considérablement les harmoniques
de rang 3 générés ;
c les installations de chauffage, ventilation,
climatisation des bâtiments de grande taille sont
alimentées en triphasé, elles ne contribuent donc
pas à la génération d’harmoniques de rang 3 ;
c les dispositifs d’éclairage fluorescent (à
ballasts magnétiques ou électroniques) génèrent
proportionnellement moins d’harmoniques de
rang 3, et ceux-ci compensent partiellement les
harmoniques générés par les équipements
informatiques.
i3 (%)
0
20
15
40
60
80
100
33
Fig. 25 : taux de charge du conducteur neutre en
fonction du taux d’harmonique 3.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.18
Ce foisonnement des charges est d’autant plus
important que la puissance de l’installation est
importante. Sauf cas exceptionnel, le taux
d’harmonique dans ces installations ne dépasse
pas 33 % et le courant dans le conducteur
neutre ne dépasse pas le courant dans les
phases. Il n’est donc pas nécessaire de surdimensionner le conducteur neutre par rapport
aux conducteurs de phases. (cas des
conducteurs unipolaires).
3.5 Effet des courants harmoniques sur les canalisations électriques
La circulation de courants harmoniques
provoque un échauffement supplémentaire des
canalisations électriques, pour plusieurs
raisons :
c échauffement du conducteur neutre par la
circulation de courants harmoniques de rang 3,
alors que ce conducteur n’est normalement
parcouru par aucun courant en régime
sinusoïdal équilibré,
c échauffement supplémentaire de tous les
conducteurs par augmentation de l’effet de
peau et des pertes par courants de Foucault,
résultant de la circulation de tous les rangs
d’harmoniques.
Dans le cas des Canalisations Electriques
Préfabriquées -CEP-, des mesures
d’échauffement ont permis de déterminer le
facteur de déclassement à appliquer.
La figure 27 indique les courants maximaux
admissibles dans les conducteurs de phase et
de neutre, en fonction du taux d’harmonique
(Imax = k.Inominal).
Par exemple, les courants maximaux
admissibles dans une canalisation de calibre
1000 A avec circulation de courants
harmoniques tels que i3 = 50 % est de :
v courant phase maximal : 770 A,
v courant neutre maximal : 980 A.
Le choix du calibre de la canalisation doit bien
sûr tenir compte de l’intensité possible dans le
conducteur neutre, mais une canalisation dont
les conducteurs ont tous la même section est
parfaitement adaptée à cette situation.
k
1,4
1,2
1,0
0,8
0,6
0,4
0,2
i3 (%)
0
0
20
40
60
80
100
Iphase
Ineutre
Fig. 27 : courants phases et neutre admissibles dans
une CEP.
L’utilisation d’un conducteur neutre de section
double ou en cuivre à la place de l’aluminium
n’apporte pas d’amélioration sensible. En effet,
les pertes dans le conducteur neutre, même
réduites par ces constructions particulières,
contribuent sensiblement à l’échauffement global
de la canalisation. Un déclassement est donc
tout de même nécessaire.
3.6 Estimation du taux d’harmonique 3
La section du conducteur neutre dépend de
l’estimation du taux d’harmonique 3 dans
l’installation. Dans l’impossibilité d’effectuer des
mesures sur site (conception d’une installation
neuve, par exemple), deux démarches sont
envisageables : l’une simplifiée, l’autre plus
rigoureuse.
Démarche simplifiée
A partir de la nomenclature et des
caractéristiques des charges raccordées
dans l’installation, calculer :
c la somme des courants phases de toutes les
charges, mono et triphasées, soit Iph (A) ;
c la somme des courants harmoniques 3 des
charges électroniques monophasées seules,
soit I3 (A) ;
c le taux d’harmonique 3 :
i3 (%) = 100.
I3
Iph
Démarche plus rigoureuse
Pour obtenir une estimation plus précise du taux
d’harmonique 3, une démarche plus rigoureuse
doit tenir compte de facteurs supplémentaires :
c facteur de puissance des charges,
c facteur de simultanéité de fonctionnement,
c foisonnement de phase des courants
harmoniques de rang 3,
c spectre réel des charges installées (et non un
spectre typique).
La description détaillée d’une telle démarche
sort du cadre de ce document.
Exemple (démarche simplifiée)
Dans un bâtiment de bureaux, les charges
alimentées par phase sur chaque départ sont
relevées dans le tableau de la figure 28 page
suivante. A noter que pour simplifier, le courant
harmonique 3 est obtenu en multipliant le taux
d’harmonique 3 par le courant efficace (et non le
courant fondamental, en général inconnu).
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.19
Type de charge
Nombre Courant unitaire
efficace absorbé
(A)
(A)
(%)
Micro-ordinateur
10
0,5
5
85
4,25
Micro-ordinateur
+ imprimante
5
1,45
7,3
35
2,55
Photocopieur
en veille
2
0,32
0,64
65
0,42
Tubes fluo, avec
ballast magnétique
20
0,2
4
25
1
10
10
0
0
Chauffage
Total
Courant
efficace total
Taux
d’harmonique 3
27
Courant
harmonique 3
total
(A)
8,2
Fig. 28 : courants d’alimentation des charges présentes dans un immeuble de bureaux.
Le calcul donne un taux d’harmonique 3 global
égal à :
i3 (%) = 100 x
8,2
= 0, 30
27
Remarque :
Un taux d’harmonique 3 élevé (> 33 %) peut se
rencontrer dans une zone où de nombreux
appareils identiques sont alimentés par la même
ligne (cas de l’alimentation d’un ensemble de PC).
Dans cette zone, le courant neutre peut alors
dépasser le courant phase.
Par contre, si en amont l’appareillage de tableau
et les conducteurs sont dimensionnés pour une
puissance supérieure, le risque de surcharge du
neutre à ce niveau est très faible.
Si dans l’exemple qui précède, l’installation est
calibrée à 40 A, le taux d’harmonique 3 ramené
à cette valeur de courant n’est plus que de 20 %.
3.7 Dimensionnement des constituants d’une installation
Le taux d’harmonique 3 a un impact sur le courant
dans le neutre et donc sur le dimensionnement
de toutes les composantes d’une installation :
c tableaux de distribution,
c appareillage de protection et de répartition,
c câbles et canalisations.
Suivant le taux estimé d’harmonique 3, trois cas
sont possibles : taux inférieur à 15 %, de 15 à
33 %, et taux supérieur à 33 %.
Taux d’harmonique 3 inférieur à 15 %
(i3 i 15 %)
Le conducteur neutre est considéré comme non
chargé.
La section des conducteurs de phases est
fonction seulement du courant dans les phases.
La section du conducteur neutre peut être
inférieure à la section des phases si la section
est supérieure à 16 mm2 en Cuivre ou 25 mm2
en Aluminium.
La protection du neutre n’est pas nécessaire,
sauf si la section du neutre est inférieure à celle
des phases.
Taux d’harmonique 3 compris entre 15 et
33 % (15 < i3 i 33 %), ou en l’absence
d’information sur le taux d’harmoniques
Le conducteur neutre est considéré comme
chargé.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.20
Le courant d’emploi des canalisations
multipolaires doit être réduit d’un facteur 0,84
(ou inversement : choisir une canalisation dont le
courant d’emploi est égal au courant calculé,
divisé par 0,84).
La section du neutre doit être impérativement
égale à la section des phases.
La protection du neutre n’est pas nécessaire.
c Exemple de calcul dans le cas d’une CEP
v Hypothèse de dimensionnement :
Courant phase calculé = 1000 A
Taux d’harmonique 3 (i3) = 20 %
Courant neutre calculé (pour i3 = 20 %) = 600 A
(voir figure 25).
Dans ce cas, le calibre de la CEP est déterminé
en fonction du courant d’emploi dans les phases
(Iph > IN).
Courant d’emploi de la canalisation adaptée =
1190 A (= 1000 A / 0,84).
v Choix de la CEP et des protections
Calibre de la canalisation adaptée = 1250 A
(1er calibre catalogué > 1190 A).
Calibre du disjoncteur de protection = 1250 A
(idem calibre de la canalisation).
Le seuil de déclenchement de surcharge de
phases et de neutre est réglé pour le courant
phase calculé soit 1000 A.
Nota : le facteur 0,84 est donné par la norme
NF C 15-100, la CEI 60364-52 préconise un
facteur de 0,86.
Taux d’harmonique 3 supérieur à 33 %
(i3 > 33 %)
Ce cas rare correspond à un taux d’harmoniques
particulièrement élevé, provoquant la circulation
d’un courant dans le neutre supérieur au courant
dans les phases. Le dimensionnement du
conducteur neutre doit donc être réalisé avec
précautions.
Dans le cas général, le courant d’emploi des
conducteurs de phases doit être réduit d’un
facteur 0,84 (ou inversement : choisir une
canalisation dont le courant d’emploi est égal au
courant calculé, divisé par 0,84). De plus, le
courant d’emploi du conducteur neutre doit être
égal à 1,45 fois le courant d’emploi des
conducteurs de phases.
Soit 1,45 / 0,84 fois le courant phase calculé,
donc environ 1,73 fois le courant phase calculé.
La méthode recommandée consiste à adopter
une canalisation multipolaire où la section du
neutre est égale à la section des phases. Le
courant du conducteur neutre est alors
prépondérant pour la détermination de la section
des conducteurs. La protection du neutre n’est
pas nécessaire, mais en cas de doute sur le taux
de charge du conducteur neutre, sa protection
est recommandée.
Cette approche est en particulier adoptée en
distribution terminale, où les câbles multipolaires
ont des sections identiques pour les phases et le
neutre.
Avec les CEP, la connaissance précise des
échauffements en fonction des courants
harmoniques permet d’aboutir à une approche
moins conservatrice. Le calibre d’une CEP peut
être choisi directement en fonction du courant
neutre calculé.
c Exemple de calcul dans le cas d’une CEP
v Hypothèse de dimensionnement :
Courant phase calculé = 1000 A
Courant neutre calculé
(pour ih3 = 50 %) = 1300 A (voir figure 25).
Le calibre de la CEP est déterminé en fonction
du courant neutre admissible (Iph < IN).
v Choix de la CEP et des protections
Calibre de la canalisation adaptée = 1600 A
(1er calibre catalogué > 1300 A)
Calibre du disjoncteur de protection = 1600 A
(idem calibre de la canalisation)
Le seuil de déclenchement de surcharge des
phases est réglé pour le courant phase calculé
soit 1000 A.
Le neutre est non protégé (disjoncteur en
configuration 4P-3D).
Une autre méthode consiste à adopter une
section du conducteur neutre supérieure à celle
des phases. Une solution communément
adoptée pour faire évoluer une installation
existante consiste à doubler le conducteur
neutre (« neutre à 200 % »). Les appareils de
protection et commande (disjoncteur, interrupteurs,
contacteurs…) doivent alors être dimensionnés
en fonction du courant dans le neutre.
c Dans le cas des câbles unipolaires, il peut être
plus économique de choisir des conducteurs de
phases de section inférieure à la section du
conducteur neutre.
La protection des câbles peut être assurée par un
disjoncteur dont le seuil de déclenchement sur le
neutre est supérieur et proportionnel au seuil de
déclenchement sur les phases (disjoncteur avec
neutre renforcé, « oversized neutral »).
Exemple : Disjoncteur de calibre 400 A.
Seuil de déclenchement sur un pôle de
phase = 150 à 250 A.
Seuil de déclenchement sur le pôle
neutre = 240 à 400 A.
3.8 Harmoniques et Schémas des Liaisons à la Terre
Dans le cas du régime de neutre TNC, un seul
conducteur (PEN) assure en principe
l’équipotentialité des masses (la protection) en
cas de défaut terre et le transit des courants de
déséquilibre.
En réalité, la circulation de courants harmoniques
dans ce conducteur pose certains problèmes.
c Au travers de l’impédance du PEN, les
courants harmoniques créent de petites
différences de potentiel entre appareils (de
l’ordre de quelques volts), qui peuvent entraîner
des dysfonctionnements de communication
entre des équipements électroniques.
c Ces courants « vagabondent » de manière
aléatoire et permanente dans les structures du
bâtiment, et perturbent les récepteurs sensibles
par rayonnement.
c Le PEN ne peut être protégé contre les
surcharges.
c Enfin, la circulation de courants harmoniques
dans le neutre entraîne une chute de tension
dans le PEN créant des différences de potentiel
entre les masses reliées au PEN, ce qui peut
présenter un danger.
Le régime de neutre TNC doit donc être réservé
à l’alimentation des circuits de puissance, en
tête d’installation, et est à proscrire dans le cas
de l’alimentation de charges sensibles
(équipements informatiques par exemple) avec
circulation de courants harmoniques.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.21
3.9 Comment gérer les harmoniques impactant le neutre
Plusieurs dispositions peuvent être prises pour
éliminer ou réduire les effets des courants
harmoniques, en particulier de rang 3.
Adaptations de l’installation
Les principales solutions pour éviter la surcharge
du conducteur neutre sont les suivantes :
c Utiliser un conducteur neutre séparé pour
chaque phase. Solution rarement mise en œuvre
car peu économique.
c Doubler le conducteur neutre. Le courant dans
le neutre ne pouvant pas dépasser 1,73 fois le
courant dans chaque phase, ceci est une
solution technologique simple dans une
installation ancienne.
c Utiliser des canalisations de calibre adapté au
courant dans le neutre, qui peut être le courant
prépondérant (cf. § 3.5)
Transformateur triangle – étoile
Ce couplage est couramment utilisé en
distribution, pour éliminer la circulation de
courants harmoniques de rang 3 dans les
réseaux de distribution et de transport.
A noter que cette élimination n’est totale que si
les charges au secondaire sont parfaitement
équilibrées. Dans le cas contraire, les courants
harmoniques de rang 3 des 3 phases ne sont
pas égaux, et ne se compensent pas totalement
aux sommets du triangle.
Transformateur à secondaire en zigzag
Ce couplage est également utilisé en distribution
et présente le même intérêt que le couplage
triangle – étoile.
A noter que l’élimination des courants
harmoniques de rang 3 n’est totale que si les
charges sont parfaitement équilibrées. Dans le cas
contraire, les courants harmoniques de rang 3
des trois phases ne sont pas égaux, et la
compensation des ampères-tours sur une même
colonne au secondaire n’est pas totale. Un
courant harmonique de rang 3 doit donc circuler
dans l’enroulement primaire… et dans la ligne
d’alimentation.
Réactance à couplage zigzag
Le schéma de principe de cette réactance est
illustré sur la figure 29 .
Comme dans le cas d’un transformateur zigzag,
on voit aisément sur cette figure que les
ampères-tours sur une même colonne
s’annulent. Il en résulte que l’impédance
parcourue par les courants d’harmonique 3 est
très faible (inductance de fuite du bobinage
seulement). La réactance zigzag procure donc
un chemin de retour de faible impédance aux
courants homopolaires, et harmoniques de rang 3
et multiple de 3. Elle réduit donc le courant iN
circulant dans le neutre de l’alimentation, comme
illustré figure 30 , dans le cas de charges
monophasées.
i3
i3
i3
Ih
iN
3i3
iN'
Fig. 29 : réactance zigzag.
i
iN'
iN
0
Fig. 30 : courants neutre iN avec et iN’ sans utilisation d’une réactance zigzag.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.22
t
Filtre de rang 3 dans le neutre
Le principe de ce dispositif consiste à placer un
circuit bouchon accordé sur l’harmonique 3 en
série avec le conducteur neutre (cf. fig. 31 ).
Sur la figure 32 sont représentées les formes
d’ondes obtenues en supposant raccordées
entre phases et neutre des charges
monophasées du type décrit en 3.1.
La réduction du courant neutre s’accompagne
d’une augmentation de la distorsion de tension,
mais qui n’est généralement pas préjudiciable au
fonctionnement des charges informatiques
usuelles.
a-
N
Source
it
is
ir
iN
Charge
Fig. 31 : filtre de rang 3 dans le neutre.
i
0
b-
t
iN
0
c-
t
i
0
d-
t
iN
0
t
Fig. 32 : Formes d’ondes : courant ligne [a] et courant neutre [b] sans filtre ;
courant ligne [c] et courant neutre [d] avec filtre.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.23
4 Synthèse
Le tableau présenté dans la figure 33 résume
les différents cas possibles où le conducteur
neutre est présent.
TT
Sn : section du neutre
Sph : section des phases
TN-C
TN-S
IT
Monophasé P-N
N
N
N
ou
N
ou
N
N
(voir nota)
Triphasé 3P-N
Sn u Sph
N
N
N
N
ou
N
(voir nota)
Triphasé 3P-N
Sn < Sph
N
N
N
ou
N
(voir nota)
Nota :
La détection de surintensité dans le neutre est nécessaire, sauf :
c si le conducteur neutre est protégé contre les courts-circuits par un dispositif placé en amont,
c ou si le circuit est protégé par un DDR dont le seuil de déclenchement est inférieur ou égal à 0,15 fois
le courant admissible dans le conducteur neutre.
Fig. 33 : les différentes situations du conducteur neutre.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.24
5 Conclusion
Le Neutre est un conducteur actif, parcouru par
des courants de déséquilibre, des courants
harmoniques et des courants de défaut.
Il présente temporairement des tensions
dangereuses par rapport à la référence de
potentiel des installations électriques (terre et PE).
Les normalisateurs se sont fortement
préoccupés de savoir s’il fallait ou non :
c le protéger,
c le couper,
c le sectionner,
ceci en fonction du schéma des liaisons à la
terre.
Il en résulte beaucoup de textes normatifs
parfois complexes.
Nous retiendrons, en pratique :
c La coupure du neutre est en général imposée
(schéma IT et TT) ou fortement conseillée
(schéma TN-S).
c Le sectionnement du neutre est un facteur
essentiel de sécurité (tous SLT).
c Les appareils de coupure et de sectionnement
doivent assurer la coupure omnipolaire des
conducteurs actifs.
c En présence de courants harmoniques, il est
conseillé de protéger le conducteur neutre,
même s’il a la même section que les phases.
Le respect de ces quatre règles, quel que soit le
régime du Neutre, permet d’assurer la protection
des personnes, des biens et d’éviter les
dysfonctionnements des matériels sensibles.
Le schéma TN-C reste un cas particulier, le PEN
ne pouvant être ni coupé ni sectionné.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.25
Annexe 1 : Rappels
Relations liant I1, IL et THD
Par définition :
D’où :
∞
I 
2
l
∑  Ih 
THD =
2
Valeur efficace du courant :
IL =
∞
∞
2
∑ ( Ih ) =
2
∞
I 
1+ ∑  h  =
I
2  l
IL
=
Il
1+ THD2
Donc :
I l 2 + ∑ ( Ih )
IL = I l . 1+ THD2
2
2
l
Taux de charge du conducteur neutre en fonction du THD (calcul approché)
En considérant que l’harmonique 3 est
l’harmonique prépondérant, le taux de distorsion
est voisin du taux d’harmonique 3. Soit :
THD ≈ i3
(%)
Par ailleurs, comme indiqué en 3.3, pour des
charges équilibrées, le courant dans le neutre IN
est très voisin de 3.I3 .
Soit:
IN ≈ 3.I3
(A)
Que l’on peut exprimer sous la forme :
IN ≈ 3.i3.I1 ≈ 3.THD.I1
En utilisant la formule générale :
Il =
IL
2,0
1,8
1,6
1,4
1,2
1,0
0,8
0,6
0,4
0,2
0
0
1+ THD2
On obtient :
IN ≈ 3.THD
IN / IL
IL
1+ THD
2
⇒
IN
≈
IL
3.THD
1+ THD
2
Cette formule approchée est valable tant que le
résultat est inférieur à e, et pour les faibles
valeurs de THD. Le taux de charge du
conducteur neutre varie donc en fonction du taux
de distorsion suivant la courbe suivante de la
figure 34 .
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.26
20
40
60
THD (%)
80
100
Fig. 34 : variation du taux de charge du conducteur
neutre en fonction du taux de distorsion.
Annexe 2 : Cas particulier des installations BT
alimentées par plusieurs sources
Beaucoup d’installations basse tension
comportent plusieurs sources : transformateurs
ou groupes de secours. L’alimentation par
plusieurs sources permet d’accroître la continuité
de service, de réaliser des économies sur le
contrat souscrit par effacement des pointes de
consommation, de fonctionner en co-génération.
Le plus souvent ces sources sont utilisées
séparément, mais il peut arriver que plusieurs
sources soient couplées pour gagner en
puissance et/ou en disponibilité.
Dans tous les cas, que les sources soient couplées
ou découplées, des précautions doivent être
prises pour assurer un fonctionnement correct des
protections de défaut à la terre, et sur ce point la
situation du Neutre a une importance particulière.
Le développement qui suit se rapporte à toute
installation dans laquelle le Neutre ne serait pas
coupé notamment au niveau des disjoncteurs
généraux et de couplage. Les deux sources
peuvent être deux transformateurs ou un
transformateur et un générateur.
Défaut d’isolement et Neutre non coupé
En cas de défaut d’isolement (cf. fig. 35 ), une
partie du courant de défaut (Id1) revient
normalement à la source par la terre ou le PE,
mais une autre partie (Id2) peut revenir à la
source via la terre et le conducteur de neutre.
Selon la répartition des courants, la protection
de la source concernée par le défaut peut ne
pas déclencher, son seuil de sensibilité n’étant
pas atteint.
Au contraire, la protection de la source non
concernée par le défaut peut déclencher si son
seuil de sensibilité est atteint.
A noter que le risque de fonctionnement
intempestif des protections est le même avec le
disjoncteur de couplage ouvert ou fermé.
Source 2
Source 1
Id1
Id2
M
Fig. 35 : défaut d’isolement avec Neutre non coupé.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.27
Couplage des sources en présence d’harmoniques ou de déséquilibre
Considérons maintenant les deux sources
toujours raccordées sans coupure du Neutre,
mais en présence d’harmoniques de rangs 3k ou
d’un déséquilibre dû à des charges
monophasées (cf. fig. 36 ).
Il en résulte une circulation de courant dans le
Neutre, qui du fait des liaisons du Neutre entre
les 2 sources peut se reboucler d’une source à
l’autre.
Ce courant résiduel, outre le fait qu’il peut
provoquer le fonctionnement intempestif des
protections à la terre associées aux sources,
génère un champ électromagnétique partout où
il circule et notamment dans les conducteurs de
terre et les structures conductrices du bâtiment.
Générateur
d'harmonique
de rang 3
Fig. 36 : courant harmonique ou de déséquilibre avec
Neutre non coupé.
Recommandation
La coupure omnipolaire sur le disjoncteur de
couplage permet d’éliminer ces inconvénients.
De plus, si cette coupure est également réalisée
sur les deux disjoncteurs de source, elle garantit un
bon fonctionnement dans tous les cas de figures.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.28
D’autres solutions sont envisageables, par
exemple : distribution sans Neutre au niveau des
sources et du couplage, et utilisation de
transformateurs triangle – étoile sur les départs.
Annexe 3 : Bibliographie
Normes
c CEI 60364, NF C 15-100 : Installations
électriques à basse tension.
Guides
c Guide NFC 15-105 : Installations Electriques à
basse tension, Guide pratique, Détermination
des sections de conducteurs et choix des
dispositifs de protection, Méthodes pratiques.
c Guide de l’Installation Electrique
(Schneider Electric).
Cahiers Techniques Schneider Electric
c Les schémas de liaisons à la terre en BT
(régimes de neutre), B. LACROIX, R. CALVAS,
Cahier Technique n° 172.
c Les schémas des liaisons à la terre dans le
monde et leurs évolutions,
B. LACROIX, R. CALVAS,
Cahier Technique n° 173.
c Perturbations des systèmes électroniques et
schémas des liaisons à la terre, J. DELABALLE,
Cahier Technique n° 177.
c Le schéma IT (à neutre isolé) des liaisons à la
terre en BT, F. JULLIEN, I. HERITIER,
Cahier Technique n° 178.
c Les singularités de l’harmonique 3,
J. SCHONEK, Cahier Technique n° 202.
Cahier Technique Schneider Electric n° 212 / p.29
Direction Scientifique et Technique,
Service Communication Technique
F-38050 Grenoble cedex 9
Télécopie : 33 (0)4 76 57 98 60
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