40 30 n°23 20 10 JUin 2006 0 Lettre gratuite et mensuelle. SOMMAIRE p.2 Sciences p.2 POLITIQUE p.2-3 Nathalie Kosciusko-Morizet Le Québec fait de la résistance Bruxelles veut renforcer le marché de quotas entrepriseS p.3 INITIATIVES p.3 ACTIONS LOCALES p.4 Pour un bâtiment décarbonisé Un 2e MDP pour Lafarge Swiss Re Nanterre à l’heure du climat ! DOSSIER Négociations internationales : Bonn donne le ton à Nairobi LE CARBONE ACTIF Les gaz à effet de serre passent à table DU CARBONE ET DES SOLUTIONS L’Inde 1 milliard C’est le nombre de tonnes de CO2 que le millier de projets MDP, actuellement dans les cartons ou les tuyaux, devraient permettre d’éviter d’émettre d’ici à 2012. -- L’USINE A GES la lettre des professionnels du changement climatique 1970 1980 1990 2000 2010 2020 2030 ÉDITO ENTRETIEN Halte aux vols de nuit Savez-vous compter vos GES ? © p.5-6 p.7 p. 8-9 L’Europe, une élève laborieuse mais aux résultats insuffisants La lutte contre le changement climatique, c’est un peu comme la Formule 1. Il ne suffit pas de baratiner pour avoir la « pole position ». Et côté verbiage, nous sommes assez bien servis. Il y a quelques jours encore, le Commissaire européen à l’Environnement, le très peu connu Stavros Dimas, rappelait que « le changement climatique demeurait la priorité la plus urgente et, heureusement, il est en tête de l’agenda politique ». En tête aussi des politiques les moins performantes. Car, un an après l’ouverture du marché des quotas d’émission de CO2, - le premier du monde !- il est beau le résultat… Après la pseudo découverte de la « surallocation de quotas », le cours des permis a pratiquement perdu la moitié de sa valeur. Et sans pour autant contribuer à réduire nos émissions carbonées. Qu’on en juge plutôt. Dans son dernier inventaire, l’Agence européenne de l’environnement (AEE) rappelle que les rejets européens ont une fois de plus augmenté, entre 2003 et 2004 : de 0,3% pour l’Europe des 15 (soit 11,5 millions de tonnes de gaz carbonique) et de 0,4% pour l’Union à 25 (+ 18 millions de tonnes). Bien sûr, il y a des explications à ce piètre résultat. Les voitures ont plus roulé, les sidérurgistes ont fabriqué plus d’acier, les raffineries ont produit plus de carburants et les installations frigorifiques laissé fuir plus d’hydrofluorocarbures. En revanche, les ménages et les électriciens ont réduit leur impact. De même que les exploitants de décharges de déchets ménagers. Quoiqu’il en soit, nous sommes encore loin de l’objectif que nous a fixé le protocole de Kyoto. Depuis 1990, nos émissions de GES ont seulement diminué de 0,9% quand le texte adopté en 1997 dans l’ancienne capitale nippone nous commande de les réduire de 6% d’ici à 2012. Une mission désormais impossible à remplir. Que l’on ne s’étonne plus alors d’apprendre, comme le fait ces jours-ci l’Académie des sciences américaine, que les 25 dernières années ont été les plus chaudes…. depuis Henri IV ! L’Usine à GES© est une co-publication mensuelle O2 France - Energograd. BRÈVES Sciences Halte aux vols de nuit Saint-Exupéry doit se retourner dans sa tombe. Selon une étude réalisée par l’université de Reading, et dont les résultats ont été publiés dans Nature, les avions de ligne volant la nuit ont un impact climatique plus important que les jets volant le jour. Pour simplifier, expliquent les chercheurs britanniques, les traînées de condensation qui se forment après le passage de l’Airbus ou du Boeing ont, le jour, deux actions qui se neutralisent : ils renvoient dans l’espace les rayons solaires et absorbent le rayonnement infrarouge émis par la terre. Problème, la nuit, il n’y a pas de rayonnement solaire à renvoyer. Aussi, les longues traînées blanches se contentent-elles d’absorber de l’infrarouge, une action contribuant au réchauffement climatique. Un nouvel argument en faveur de l’inclusion de l’aviation commerciale dans le système des quotas d’émissions. l [email protected] Savez-vous compter vos GES ? Un nouveau guide destiné aux inventaires des émissions en GES a été présenté par le GIEC lors de la 24e session des Organes subsidiaires de la convention à Bonn (lire dossier). Remplaçant l’édition de 1996, ce nouveau guide intègre les dernières connaissances scientifiques, de nouveaux secteurs et de nouveaux GES, comme le NF3, le SF5CF3 z et d’autres gaz halogènes. l www.ipcc-nggip.iges.or.jp Politique Le Québec fait de la résistance La province francophone aime à se distinguer de la fédération canadienne. Et au moment où Ottawa démantèle la politique climatique du Canada, Montréal affiche un plan climatique ambitieux. Présenté le 15 juin, le programme prévoit d’investir 1,2 milliard de dollars sur six ans (850 M€) pour diminuer les rejets de GES. Cette manne sera le fruit d’une nouvelle taxe sur les hydrocarbures. Avec cet argent, le gouvernement régional financera la mise en place de 24 mesures qui permettront de réduire les émissions régionales de 10 millions de tonnes de GES par an. Soit une diminution de 11% des rejets d’ici à 2012. Ce qui permettra au Québec de revenir à un niveau d’émissions inférieur de 1,5% à celui de 1990. Bien, mais loin de l’objectif fixé au Canada par le protocole de Kyoto : - 6%. l w ww.mddep.gouv.qc.ca/changements/plan_ action/index.htm ENTRETIEN Nathalie Kosciusko-Morizet Co-auteure d’un excellent rapport parlementaire sur l’effet de serre, la député UMP de l’Essonne propose une politique énergétique conjuguant durabilité et protection du climat. Notre approvisionnement énergétique est-il durable ? Nathalie Kosciusko-Morizet : Jusqu’à présent, on ne considérait la question de l’approvisionnement énergétique qu’au travers du prisme de la géopolitique ou de la technique. Le premier nous oblige à regarder l’évolution du monde. Le second à prendre en compte le peak oil. Or, l’adoption récente de la Charte de l’environnement et de la loi d’orientation sur l’énergie et la lutte contre le changement climatique nous invitent à changer de vision, à élargir le champ. Et pour quelles raisons ? Nathalie Kosciusko-Morizet : Tout simplement, parce que nous sommes confrontés au défi climatique. Nous devons construire un système adapté. Ce qui n’est pas simple, car, en la matière, nombreuses sont les fausses bonnes idées. Lesquelles? Nathalie Kosciusko-Morizet : Le fait de croire que l’on réduira nos émissions de carbone à mesure que flamberont les prix du pétrole et du gaz. C’est totalement faux. On sait très bien que les énergéticiens, si les prix des hydrocarbures restent à un niveau élevé, les remplaceront par du charbon, qui émet bien plus de CO2 que le fioul ou le gaz. Comment imaginez-vous le système énergétique de demain ? Nathalie Kosciusko-Morizet : Dans mon esprit, et pour ce qui concerne la production d’électricité, nous ne pouvons pas nous passer de l’énergie nucléaire, que ce soit pour des questions stratégiques, d’indépendance et de lutte contre le changement climatique. A cet égard, je suis très satisfaite de voir que la France s’est récemment dotée d’une nouvelle politique nucléaire, qui n’est pas seulement industrielle. C’est-à-dire ? Nathalie Kosciusko-Morizet : En adoptant les lois sur la gestion des déchets et sur la gouvernance et la transparence, le Parlement permet au pays de rendre le nucléaire viable et exportable. Jusqu’à présent, nos industriels faisaient d’excellentes machines, mais la France n’était pas forcément exemplaire dans l’encadrement juridique du nucléaire comme dans sa gouvernance. Ces deux lois nous permettent de disposer d’un système nucléaire industriellement performant, doté d’une perspective de bouclage de son combustible et soumis à l’autorité d’une institution indépendante. Ainsi, ce système est socialement acceptable en France et potentiellement exportable. On ne fera pas avancer des voitures avec le nucléaire... Nathalie Kosciusko-Morizet : Effectivement, ce sujet ne doit pas empêcher de considérer les autres aspects du problème. La question du nucléaire a ainsi trop longtemps stérilisé les recherches sur les énergies renouvelables. Raison pour laquelle nous sommes devenus faibles dans l’énergie solaire ou l’utilisation de la biomasse, alors que nous étions parmi les premiers dans les années 1970. Nous devons revenir dans le peloton de tête des nations utilisant le plus possible ces autres énergies propres. Quid des transports ? Nathalie Kosciusko-Morizet : Nos constructeurs automobiles sont en retard. Nos politiques publiques sont faibles. C’est pour cela que nous avons proposé, dans notre rapport, de prélever une petite partie de la TIPP pour donner un véritable élan à des solutions alternatives de mobilité, comme le ferroutage. Nous devons aussi travailler sur l’habitat. C’est un sujet dans lequel les paradoxes prospèrent. Certains travaux très rentables ne sont même pas effectués. Nos devons progresser sur les normes bien sûr mais aussi sur la rénovation de l’ancien. Des financements innovants sont indispensables. Propos recueillis par Sophie d’Anhalt -- L’Usine à GES© est une co-publication mensuelle O2 France - Energograd. INITIATIVE BRÈVES Swiss Re Bruxelles veut renforcer le marché de quotas Swiss Re en 2005 Chiffre d’affaires Nombre d’employés Présence dans Tonnes CO2 émises en 2004 Ventilation des émissions 27,8 milliards francs suisses (17,8Md€) 8 882 30 pays 47 000 Électricité 44 % Chauffage 13 % Transports 43 % Secteur peu connu du grand public, les réassureurs ont été probablement les premières entreprises à se préoccuper réellement des conséquences des changements climatiques. Et pour cause. Leur activité consiste à « assurer » les risques les plus aigus ou les plus onéreux ; ceux qui sont devenus trop chers et, par conséquent, dont nos assureurs ne veulent ou ne peuvent plus s’occuper. Voilà des années que les deux ténors de la réassurance, Swiss Re et Munich Re, interpellent leurs clients et les pouvoirs publics sur les dommages croissants imputables à la folie du climat. Restait à savoir si le plus gros des deux, Swiss Re, mettait ses actions en accord avec ses discours. La surprise est plutôt bonne. La vielle dame de Zurich (l’entreprise affiche ses 163 printemps) a lancé, en 2003, un programme pour « compenser », en dix ans, ses émissions de dioxyde de carbone. Deux types d’actions permettront au groupe, dirigé par Jacques Algrain, d’atteindre cet objectif ambitieux. Les soixante-dix représentations du groupe suisse (dans 30 pays) sont invitées à réduire leur consommation d’énergie. Ce qui passera par différentes solutions techniques : remplacement d’halogènes par des ampoules à basse consommation, changement de combustible de chauffage ou encore acquisition d’ordinateurs très économes. Certaines filiales opteront, bien sûr, pour l’achat d’ « électricité verte », dans les pays où le choix de la couleur et de la qualité des électrons est possible. Autre exemple : la filiale française paie à ses salariés la totalité du coût de l’abonnement mensuel aux transports publics. La Commission fourbit ses armes pour préparer les esprits à de nouvelles législations climatiques. Dans son rapport du 2 juin, le Groupe à haut niveau sur la compétitivité, l’énergie et l’environnement, recommande de renforcer le marché des quotas. Composé de représentants des institutions, des entreprises et de membres de la société civile, le groupe mixte préconise notamment de prévoir des incitations aux investissements dans les technologies à faible intensité en carbone, de réduire l’impact dudit marché sur la compétitivité des industries à forte intensité énergétique, et de constituer, après 2012, un cadre de référence attrayant pour les systèmes d’autres pays à fort volume d’émissions. À suivre… Entreprises Pour un bâtiment décarbonisé Des industriels de la construction, des collectivités locales et des banques ont annoncé, le 16 mai, la création d’Effinergie. L’association a pour objectif de promouvoir les techniques permettant la construction de bâtiments économes en énergie et en carbone. Dès l’année prochaine, elle devrait aussi créer un label national. Une action qui vient à point, quelques semaines après la publication du rapport Viguerie (lire L’Usine à GES n°22). Selon les statistiques, environ 30 millions de bâtiments mal chauffés et mal isolés rejettent, chaque année, 100 millions de tonnes de CO2. Un 2e MDP pour Lafarge Gare aux voyages d’affaire En Suisse, une bonne partie des bureaux est logée dans des bâtiments certifiés « Minergie », l’équivalent suisse de la Haute qualité environnementale (HQE). Ces actions directes devraient permettre de faire un peu plus de 20% du chemin. Le reste, soit 37 000 tonnes d’équivalent CO2 par an, passera par l’acquisition d’URCE, (la monnaie des projets de mécanisme de développement propre, ndlr), via le Community Development Carbon Fund, l’un des fonds climatiques gérés par la Banque mondiale. Très diversifiée, la politique climatique de Swiss Re donne déjà des résultats. Entre 2003 et 2005, le premier réassureur mondial est parvenu à diminuer de 9,1% les émissions de CO2 imputables à la consommation de courant et de 3,2% celles résultant du chauffage. En revanche, les rejets carbonés résultant des voyages d’affaires ont explosé de 23,8% : les fruits empoisonnés de la croissance du groupe en Asie. Mais Swiss Re n’entend pas en rester là. N’oubliant pas que des entreprises et des citoyens bien informés peuvent devenir, souvent indirectement, ses clients de demain, le groupe helvétique n’hésite pas à mettre la main à la poche pour aider à la diffusion de la connaissance climatique. Depuis six ans, l’entreprise participe ainsi au projet Carbon Disclosure qui recense les politiques climatiques des plus grandes entreprises mondiales. Swiss Re a aussi financé un projet de recherches de la Harvard Medical School sur les conséquences sanitaires du réchauffement de la planète. Plus étonnant, le réassureur a grandement participé au financement du grand documentaire télévisé sur les effets du changement climatique : « The Great Warming » ; une série de quatre émissions que l’on aimerait bien découvrir sur les écrans français. Après avoir alimenté, en partie, sa cimenterie de Tétouan par de l’électricité éolienne (lire L’Usine à GES n°14), le cimentier français récidive. En mai dernier, Lafarge a fait enregistrer son projet de substitution de charbon par des coques de noix de palmier à huile pour sa cimenterie malaise. Ce nouveau projet MDP permettra à l’industriel de diminuer de 60 000 tonnes par an ses rejets de GES. l [email protected] 100 000 tonnes C’est le bilan des émissions de CO2 du Mondial de football. La plupart de ces émissions sont imputables aux transports des équipes. Seul le Costa Rica s’est engagé à compenser les rejets imputables à la participation (courte il est vrai) de ses joueurs. Volodia Oprotchnik L’Usine à GES© est une co-publication mensuelle O2 France - Energograd. -- Actions locales BRÈVES Nanterre à l’heure du climat ! Un Atelier Climat et Territoire en Alsace Depuis un an, la préfecture des Hauts-de-Seine s’organise pour relever le défi climatique à l’échelle de son territoire. Un programme où se conjuguent bilan des émissions, démocratie participative et énergie bois. Une première en zone urbaine ? En juillet 2005, Nanterre se lance comme une dizaine d’autres collectivités dans l’expérimentation Bilan Carbone territorial proposée par l’Ademe. Menée sur tout le territoire de Nanterre, cette initiative a permis d’identifier les principales sources d’émissions de la ville mais également de ses administrés et de ses entreprises. Résultats : 34% des émissions pour le résidentiel et le tertiaire, 32% pour les procédés industriels, 24% pour les transports. Une fois ces résultats présentés à la population, la municipalité a décidé de constituer des ateliers thématiques pour pouvoir co-construire un programme d’actions partagé avec l’ensemble des acteurs locaux : habitat, déplacement, jardins – espaces verts, déchets, actions transversales. En août 1789, Nanterre fut l’une des premières villes de France à rédiger ses cahiers de doléances. La démocratie participative reste inscrite dans les gènes de ses habitants. Le rôle des citoyens dans la diminution des principaux postes est donc primordial pour la réussite d’une stratégie locale de réduction des émissions de gaz à effet de serre. S’agissant de l’habitat, la restitution des travaux des ateliers montre que la population a le sentiment de manquer d’information et d’exemples à suivre. La population attend notamment de la municipalité qu’elle serve d’intermédiaire et d’animateur entre les différents acteurs de l’habitat. Et surtout qu’elle diffuse plus d’informations et de meilleures pratiques climatiques. Un message bien reçu par les édiles : un Relais Info Energie vient d’être créé pour répondre aux besoins des habitants en matière de conseil sur la maîtrise de l’énergie et les énergies renouvelables. En matière de transports, les Nanterriens demandent un engagement fort sur la limitation des besoins et le développement des modes de transport doux. Mieux : ils se disent prêts à changer leurs propres comportements. Ce qui est plutôt une bonne chose. Car, dans la capitale des Hauts-de-Seine, le recours à la voiture particulière reste majoritaire dans les déplacements intra-muros. Petit paradoxe pour une ville qui fut la première de France à être reliée à Paris par le train. Mais c’était en 1837 ! À l’initiative de la Mission Interministérielle de l’effet de serre, de la DRIRE et de la DIREN Alsace, une journée d’atelier sur la mise en place d’actions locales pour le climat s’est tenue à Strasbourg le 22 juin au Parlement Européen. Quels retours d’expériences sur l’intégration de l’énergie dans les démarches territoriales ? Avec qui agir en local ? Comment aller vers la mise en place d’un Plan Climat Territorial ? l w ww.effet-de-serre.gouv.fr Les Néerlandais testent la « climate box » 5 000 foyers des Pays-Bas vont tester, pour le compte du secrétariat d’État à l’Environnement, une « climate box ». Cet engin coupe l’électricité aux appareils en veille mais ne fonctionnant pas. Combiné à l’utilisation de lampes à basse consommation, cette petite boîte pourrait diminuer la consommation de courant de chaque famille test de 10%, espère le gouvernement néerlandais, qui soutient l’opération à hauteur de 2 millions Climatiquement exemplaire D’une manière générale, les administrés attendent de la municipalité qu’elle joue un rôle de catalyseur des acteurs du territoire notamment en montrant les bonnes pratiques. Autre message reçu cinq sur cinq. Alors que les émissions municipales directes ne représentent que 4% du bilan global, la ville dirigée par Patrick Jarry entend être « climatiquement exemplaire ». Des actions sur les consommations énergétiques et les transports — ses principales sources d’émissions — sont ainsi prévues dans les mois qui viennent. Avant d’acheter la moindre fourniture, la commune prendra désormais en compte son impact carbone dû aux transports. Une démarche déjà engagée pour les végétaux et le mobilier urbain. Mais le plus spectaculaire reste à venir. La commune possède environ 100 hectares de forêts. Bien géré, ce lieu de villégiature est aussi capable de stocker 500 tonnes équivalent carbone par an. Si le bois exploité est utilisé comme bois d’œuvre ou de chauffage et ensuite replanté, cette capacité de stockage pourra alors être comptabilisée. Un centre de loisirs sera bientôt alimenté par une chaufferie bois et de l’énergie solaire. Le Plan Climat de Nanterre aujourd’hui en cours d’élaboration et de concertation au sein du Collectif Climat est bien parti ! Contacts Nathalie Elbe Christine BOURCET, Adjointe au maire déléguée à l’environnement Paul Dolcerocca, Directeur de l’environnement la Ville Nanterre 84 000 4% habitants Part des émissions liées au patrimoine et au fonctionnement de la collectivité par rapport aux émissions du territoire. [email protected] Nathalie Elbe Chargée de mission Collectivités Mission Interministérielle de l’Effet de serre (MIES) – MEDD [email protected] L’Usine à GES© est une co-publication mensuelle O2 France - Energograd. -- DOSSIER Négociations internationales : Bonn donne le ton à Nairobi Durant dix jours, les experts climatiques du monde entier ont préparé le prochain sommet climatique mondial, qui aura lieu à Nairobi, en novembre prochain. Compte rendu. 160 pays représentés Régulièrement, les experts des pays ayant ratifié la Convention cadre des Nations unies sur le changement climatique et le protocole de Kyoto se réunissent pour faire avancer la lutte contre le « Global Warming ». La 24e rencontre internationale des corps subsidiaires, dite SB24, s’est ainsi tenue du 15 au 25 mai à Bonn, afin de préparer la négociation planifiée à Nairobi (où aura lieu le prochain sommet mondial de la convention et du protocole, ndlr) en novembre prochain. Conformément au Plan d’action adopté en décembre dernier lors de la dernière Conférence planétaire de Montréal (lire L’Usine à GES n° 17), l’attention des délégations s’est focalisée sur les enjeux de l’après 1ère période d’engagement du Protocole de Kyoto, appelé le « post 2012 » en jargon onusien. Deux processus sur le « post 2012 » étaient au programme de la session de Bonn. Les 15 et 16 mai, les experts des 160 pays représentés ont travaillé au « Dialogue sur l’action de coopération à long terme » au titre de la Convention de Rio. L’administration Bush et l’Australie y participèrent donc ; les deux pays ayant ratifié la Convention, mais non le protocole de Kyoto. Le second temps fort du sommet a incontestablement été le moment où le Groupe de Travail Spécial (GTS) du Protocole de Kyoto a tenu ses sessions. En effet, de ces débats d’experts doivent ressortir à terme des propositions pour réviser les engagements de réduction post-2012 des pays industrialisés ayant ratifié Kyoto. Convention : ça dialogue L’objectif premier du Dialogue était d’entamer un « échange ouvert et non contraignant de vues, de renseignements et d’idées » devant encadrer l’action de coopération à long terme sur les changements climatiques. Il s’articula autour de quatre thèmes prédéfinis : climat et développement durable, adaptation, potentiels technologiques et mécanismes de marché. Au terme de cette discussion inter-étatique, un peu molle selon les observateurs, les deux co-modérateurs de séance se sont engagés à produire d’ici au mois d’août un rapport pour organiser la prochaine séance prévue à Nairobi. À la condition, évidemment, que ledit texte ne soit pas contraignant pour les États. Le retour d’un diplomate hors pair Les discussions au sein du GTS apportèrent quelques bonnes nouvelles. La première fut la désignation de Michael Zammit-Cutajar à la co-présidence de ce groupe ad hoc. Une nomination qui contrecarre le total désengagement de la nouvelle présidence canadienne. Pour les adeptes des réunions internationales sur le climat, l’homme n’est pas un inconnu. Il fait même figure de héros pour certains. Secrétaire exécutif de la Convention lors de l’échec de la conférence de La Haye, en 2000, il a dû aussi gérer le retrait des États-Unis. Par la suite, ce diplomate maltais fut un artisan important de l’élaboration des accords de Marrakech relatifs aux modalités d’application de Kyoto. -- L’Usine à GES© est une co-publication mensuelle O2 France - Energograd. Protocole de Kyoto : ça planifie Mais revenons à Bonn. Après de nombreuses consultations informelles entre délégations nationales, un accord a été arraché en fin de session sur la « planification des travaux futurs ». Ce document constitue le plan de travail des Pays industrialisés, au sein de la prochaine rencontre du GTS prévue à Nairobi. Il rappelle que l’objectif de ce GTS est d’arriver le plus rapidement possible à un accord international définissant de nouveaux engagements quantifiés de stabilisation ou de réduction des Pays industrialisés, afin d’éviter tout vide juridique entre la 1ère et 2ème période d’engagement. Ces travaux devront être guidés par le souci d’atteindre l’objectif ultime de la Convention, qui est de stabiliser les concentrations de GES à un niveau non dangereux pour l’humanité. Pour ce faire, le GTS pourra s’appuyer sur « toutes nouvelles données scientifiques, techniques et socioéconomiques », ainsi que l’a rappelé Feng Gao, le vice secrétaire chinois du secrétariat de la Convention Climat. Aussi, les pays industrialisés devront présenter leurs scénarios d’émissions, les potentiels de réduction des politiques et technologies déjà expérimentées, ainsi que les coûts et bénéfices en découlant. De son côté, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sera convié à présenter ses travaux sur les différents scénarios d’émissions de stabilisation des émissions de GES dans l’atmosphère. La référence aux scenarii du GIEC est d’autant plus pertinente, qu’elle ouvre la porte aux conclusions à venir de son quatrième rapport scientifique, dont la publication n’est prévue qu’en fin 2007. De plus, et grâce à Michael Zammit-Cutajar, le GTS dispose dorénavant d’une liste - certes indicative, mais néanmoins ciblée - de cinq thèmes majeurs de discussion : la base scientifique permettant de déterminer le niveau d’ambition de nouveaux engagements des pays industrialisés ; les évolutions des émissions et potentiels de réduction de l’Occident ; les enseignements tirés de l’application du Protocole de Kyoto ; l’architecture de la nouvelle période d’engagement (dont sa durée, les approches sectorielles, la différentiation des engagements…) ; et les questions juridiques. Ces éléments constitueront certainement la base substantielle sur laquelle le GTS consacrera ses prochains travaux. Enfin, le texte exprime le souhait des pays industrialisés d’échanger leurs vues avec les pays en développement sur le post-2012. Il insiste également sur la nécessité de maintenir le lien avec le Dialogue mené en parallèle sous l’égide de la Convention. Cinq thèmes majeurs de négociation Raphaëlle Gauthier Bonn, ce qu’ils en pensent « Nous n’avons pas sauvé la planète, mais nous avons fait un pas en avant. » Bill Hare, directeur de Greenpeace International chargé des problèmes de climat. « Les freins sont levés et le processus va aller de l’avant. » Jennifer Morgan, directrice du Programme international sur les changements climatiques du WWF. « Le plus important, c’est de continuer à impliquer le Japon. » Michael Zammit-Cutajar, diplomate maltais. L’Usine à GES© est une co-publication mensuelle O2 France - Energograd. -- LE CARBONE ACTIF Les gaz à effet de serre passent à table Les gaz à effet de serre (GES) résultant de notre alimentation proviennent d’abord du secteur agricole. S’ajoutent les émissions liées au transport et à la transformation des aliments et des emballages, ainsi que leur traitement de « fin de vie ». En moyenne, le contenu carbone d’un repas est ainsi de l’ordre de 3 kg éqCO2. Les productions végétales sont à l’origine d’émissions de GES via l’utilisation d’engrais et d’engins agricoles, le chauffage des bâtiments agricoles et éventuellement des serres. Ainsi les engrais, du fait de la libération de protoxyde d’azote (N2O), émettent 40 % des GES de la production de blé. Autre exemple, des fruits de saison ont un contenu en CO2 inférieur à celui de fruits cultivés hors saison sous serre chauffée. Pour les productions animales (viande mais aussi fromage, lait et beurre), les émissions de GES proviennent de la production de l’alimentation, mais également du chauffage des bâtiments, de la gestion des déjections et… du méthane issu des rots des ruminants (vaches, moutons et chèvres). Les productions animales sont donc plus émettrices que les productions végétales, les émissions variant selon l’animal. Par exemple, produire 200 g de poulet émet 250 g éqCO2 : dix fois moins que pour produire la même quantité de bœuf. Contacts Les modes de conservation et les emballages en question La transformation des produits agricoles émet des GES. Les aliments surgelés 1 Anaïs Delbosc doivent, par exemple, être maintenus à une température très basse. Or les fluides @ [email protected] frigorigènes ont un fort pouvoir de réchauffement : surgélation et climatisation émettent ainsi 2 % des GES français. L’énergie utilisée pour le transport et le stockage des aliments surgelés représente, elle, 80 % des émissions de la surgélation. Le fait que l’électricité soit produite en France à 90 % par le nucléaire et l’hydraulique limite ces émissions. La fabrication et le traitement en fin de vie des emballages participent aussi aux émissions. Les 30 grammes de l’emballage plastique d’une bouteille d’eau sont responsables de plus de 40 % de ses émissions : 140 g éqCO2 sont émis à la fabrication et 50 g éqCO2 lors d’une incinération avec valorisation. Cette valorisation limite les émissions mais n’est pas toujours possible. Nos déchets alimentaires, qui représentent le quart du volume de nos poubelles, peuvent aussi être mis en décharge et entraîner alors des émissions importantes de méthane. Le transport : du producteur au consommateur Pour les transports longue distance, le transport aérien reste le plus émetteur : une tonne transportée sur 5 000 km émet environ 15 t éqCO2 : 60 fois plus que le transport par bateau ! Ce transport aérien est réservé aux aliments à forte valeur ajoutée qui se périment rapidement, comme beaucoup de fruits tropicaux (mangues, avocats, certains ananas…). Le transport maritime concerne lui des denrées plus résistantes (noix de coco, bananes…). Le transport routier, le plus répandu, est 6 fois plus émetteur que le transport ferroviaire et 10 fois plus que le transport fluvial. Les transports frigorifiques, utilisant le carburant comme source d’énergie pour la réfrigération, entraînent des émissions supplémentaires de GES. Pour finir, le transport du lieu de vente au domicile se fait en général par la route : 10 kilomètres en voiture émettent alors environ 2 kg éqCO2. Prendre le bus divise ces émissions par 2, mais prendre le vélo est encore mieux puisque les émissions sont nulles ! Nos choix d’alimentation ne sont donc pas anodins vis-à-vis des émissions de gaz à effet de serre. Celles-ci peuvent être facilement réduites si nous faisons attention à l’origine et à la présentation des aliments achetés : préférer des fruits et légumes frais, locaux et de saison, diminuer sa consommation de viande ou encore choisir des produits sans suremballage… Anaïs Delbosc Exemples de menus fortement et faiblement riches en CO2 MENU 1 1 L d’eau minérale 150g de bœuf 200g de haricots verts surgelés 1/4 d’ananas frais de Côte d’Ivoire (par avion) MENU 2 5,6 kg eqCO 2 1 L d’eau de ville 1 cuisse de poulet 200g de haricots 0,6 kg verts frais eqCO 2 1/4 d’ananas frais de Côte d’Ivoire (par bateau) Consommer le menu 1 émet autant de GES que de brûler 2 L d’essence ! Avec le menu 2, la note pour l’atmosphère est nettement moins salée, puisqu’il n’émet que l’équivalent de 20 centilitres d’essence. Source : Mission Climat, à partir du Bilan Carbone ©, ADEME. L’Usine à GES© est une co-publication mensuelle O2 France - Energograd. -- DU CARBONE ET DES SOLUTIONS Des idées pour vos MDP Chaque mois, L’Usine à GES vous présente un pays susceptible d’accueillir des projets entrant dans le cadre du mécanisme de développement propre. Ce mois-ci : L’Inde Situation générale Comme la Chine, sa grande voisine, l’Inde connaît un développement économique sans précédent. Ces quinze dernières années, sa richesse nationale a progressé de plus de 6% par an et le mouvement ne semble pas près de s’infléchir. Notamment en raison de l’apaisement des relations entre New Delhi et le Pakistan, de ses succès commerciaux et de l’augmentation de sa population (+ 15 millions d’habitants par an) et de ses besoins énergétiques. L’industrie et l’agriculture pèsent chacun environ 25% du PIB. Les services apportant déjà la moitié de la richesse nationale. Situation énergétique En dépit de la croissance de la population et d’un effort important en matière d’équipement, l’Inde reste, pour le moment, pratiquement autosuffisante en énergie, à l’exception de ses approvisionnements en hydrocarbures. Une quarantaine de mines lui fournissent l’essentiel du charbon dont elle a besoin et qui contribue à la production de 70% de son énergie primaire. Et cela devrait durer, car les réserves de houille et de lignite sont estimées à 211milliards de tonnes : de quoi satisfaire les besoins actuels pendant encore un siècle. Les champs de Mumbai, de l’Assam, de Cambay, de Krishna-Godavari, et de Cauvery fournissent le tiers du pétrole dont le pays a besoin. Mais cette proportion devrait diminuer dans les années qui viennent sous l’effet de la progression de la demande. Le tiers de l’énergie primaire du pays provient du pétrole. Récente, l’exploitation du gaz, qui fournit 5% de l’énergie primaire, devrait croître sensiblement ces prochaines années. Les champs offshore de Krishna-Godavari, d’Orissa, du Gujarat et de l’Andhra Predesh suffisent à peine à satisfaire les besoins. Raison pour laquelle, l’Inde entend construire une douzaine de terminaux de regazéification de GNL. Malgré un important potentiel, les énergies renouvelables sont encore peu utilisées. Selon les dernières statistiques, l’Inde exploite 6 000 MW d’ENR (dont 78% d’éolien et de petite hydroélectricité), soit environ 7% du potentiel identifié. Forte croissance de la consommation d’énergie (+5% par an) et secteur énergétique largement tributaire des combustibles fossiles expliquent pourquoi la plus grande démocratie du monde est le sixième émetteur du monde de gaz carbonique et le second par le rythme de croissance de ses rejets. Situation climatique -- Émissions nationales 1 450 millions de tonnes CO2/an Évolution annuelle des émissions de CO2 +2% Ratification de la CNUCC 21 mars 1994 Ratification du protocole de Kyoto 26 août 2002 Mise en place d’une AND Oui (CDM India) Signature d’un accord avec la France En cours Accord bilatéral avec : Pays-Bas, Finlande, Suède L’Usine à GES© est une co-publication mensuelle O2 France - Energograd. CONTACTS Projets climatiques en cours Il existe de nombreuses études sur le potentiel des projets MDP pouvant être développés en Inde. Dernièrement, le ministère indien de l’environnement estimait que de tels projets pourraient éviter l’émission de 400 millions de tonnes de CO2 par an. Très impliquée dans la lutte contre les changements climatiques, l’Inde a parfaitement intégré les mécanismes de développement propre (MDP). En avril dernier, la plus grande démocratie du monde a approuvé 263 projets MDP, dont une soixantaine durant les quatre premiers mois de l’année. La plupart de ces projets portent sur l’efficacité énergétique, l’amélioration des procédés industriels, les changements de combustible et sur les énergies renouvelables, à l’instar du projet mis en place par la société française Velcan Energy (lire L’Usine à GES n°17). Selon nos informations, Areva, Eco Carbone et Lafarge négocient des projets MDP, en attendant que la France et l’Inde signent un accord bilatéral. Idées à suivre... Au cours de la dernière conférence de Bonn (lire dossier pages 5 et 6), l’Inde a fait connaître ses besoins prioritaires, sur le plan énergétique. New Delhi réservera le meilleur des accueils aux projets intégrant des technologies solaires de dernière génération ou des piles à combustible. Sur le plan industriel, l’Inde cherche aussi à utiliser son charbon, le plus proprement possible. Raison pour laquelle, les projets de cycles combinés intégrant la capture et la séquestration du carbone ont de bonnes chances d’aboutir. Enfin, les responsables indiens ont fait montre d’un grand intérêt pour les dernières technologies de stockage d’électricité. Contacts CDM India 1 R. K. Sethi [email protected] @ O2 France est une agence d’éco-conception et de conseil en développement durable qui accompagne les entreprises et leur apporte des réponses concrètes. O2 FRANCE 31, rue de la Folie-Méricourt 75011 Paris Tél. 01 43 57 92 02 www.o2france.com ENERGOGRAD Energograd est une société spécialisée dans l’information sur l’énergie et le changement climatique. Energograd - Volodia OPRITCHNIK 73, rue de Cléry 75002 Paris Tél. 01 75 50 54 85 [email protected] DGTPE (Paris) 1 @ Franck Jesus [email protected] Mission économique (New Delhi) 1 Eric Pierrat @ [email protected] Rédacteur en chef : Volodia Opritchnik Rédacteurs ayant participé à ce numéro : Sophie d’Anhalt Anaïs Delbosc Nathalie Elbé Raphaëlle Gauthier Volodia Opritchnik Corrections : Caroline Faber Maquette et mise en page : Pascale Michon L’Usine à GES© est une co-publication mensuelle O2 France - Energograd. --