SIGNES PIERRE BLANCHETTE MAISON DE LA CULTURE MARIE-UGUAY 13 SEPTEMBRE 25 NOVEMBRE 2012 > SIGNES PIERRE BLANCHETTE RENÉ VIAU Voir et éprouver la peinture de Pierre Blanchette dans le « désordre »! Un peu comme on dit du tirage de la loto. Non pas que les notions d’ordre et de désordre soient les thèmes de cette peinture; analyser cependant cette peinture en fragments, comme le propose cette exposition, n’est en fait qu’un moyen de renforcer sa cohérence afin de mieux comprendre son évolution. L’exposition tente de montrer comment les signes ou les figures qui constituent cette peinture naissent, réapparaissent pour se distribuer en un mode inédit. Puisés par l’artiste, certains de ces signes « tombent » d'un tableau à l'autre, selon les besoins de la construction de la toile et les injonctions de l'imaginaire. Ces figures qui se recoupent, on peut les voir surgir et revenir. On reconnaît en elles quelque chose vue ailleurs qui se transforme, s’amalgamant à de nouveaux ensembles. Comme le ferait un lexique, l’exposition cerne ce vocabulaire. Elle dresse une forme d’inventaire de cette réserve. On peut ainsi mieux identifier les signes à la base de cette peinture. Ceux-ci en constituent, pour ainsi dire, l’ossature. La présentation se veut le « guide » de ce qui, à un moment ou un autre, a traversé la tête ou les yeux de l’artiste alors que ces signes passent et repassent sur la toile. Constituant un lieu ouvert à l’observation et au partage, l’exercice est dressé afin de mieux comprendre une écriture, un phrasé mais surtout afin de mieux évaluer comment s’articulent les principes actifs de la peinture de Pierre Blanchette. Chevrons. Rayures. Faisceaux… Ces signes se lient ou se délient, se montent et se démontent. On pense à autant de matrices, aux thèmes d’une musique. Empruntant au bris de discours, la méthode à la base de l'exposition ne veut en aucun cas couper la mélodie de ces éléments constitutifs et de son rythme en isolant ses composantes. Au contraire, elle vise à faire tourner et se retourner les figures qui se redistribuent hors de leur contexte habituel en s’agitant, se heurtant, s’apaisant. On pressent le peintre au travail faisant évoluer ces figures, les brassant à nouveau, les réinventant sans cesse. L'exposition le démontre. Carré. Cercle. Triangle. Séquence. Ces « signes premiers », déjà présents dans l'art pariétal comme nous l'ont appris les archéologues, se font le socle de la peinture de Pierre Blanchette. La Cueva de las Manos (Grotte des mains), Argentine Paléolithique supérieur, 13 000 ans 2002 Peinture Nº 552 Acrylique sur toile 200 x 200 cm Avec notamment les peintures du Cycle Ispahan, (ill. 1980) Blanchette décide au départ d’explorer le carré. Le long des bandes, des chevrons se succèdent sur un fond all-over. Un hiatus est introduit. En rupture avec les dogmes alors en vigueur, le peintre crée avec ces alignements de nouvelles icônes contrastantes. Grilles, quadrillés, tracés en peigne, structuration des aplats découpant la surface en découlent. Idem pour le cercle qui amène les sphères, la spirale, une profusion de mouvements giratoires. Le triangle rejoint l’angulaire, les trouées en escalier, les chevrons, la diagonale. Alors que les divisions et partitions, mais aussi l’alternance rythmée d’aplats ou de traitement au lavis introduisent une forme de déroulement cinématique, la séquence devient partie intégrante du quatuor d’éléments perpétuellement transgressés, défaits, refaits et reformés sur lesquels se fonde la peinture de Blanchette. Recyclant ces mêmes caractéristiques, Blanchette se défend d’agir de façon systématique ou de toujours s’appuyer sur des procédures identiques. Ce qui est en cause serait davantage la distanciation face aux méthodes de l’abstraction gestuelle à laquelle on l’a quelquefois, et à tort, associé. Mais en ne laissant rien au hasard, ces opérations à partir d’éléments pré-établis ne cherchent pas non plus à faire la démonstration par trop évidente d’un processus de construction qui seul déterminerait le résultat final. Évitant de se recroqueviller sur tout formalisme, et loin de toute répétition, le recours à cet inventaire se double pour le peintre d’une vigilance autocritique. Ce dernier à chaque fois « casse » les écueils de l’habitude. Jamais, ces formes qui reviennent ne se rechargent à nouveau des connotations dont elles avaient été auparavant débarrassées. Par ailleurs, si la succession des cycles qu’elles induisent témoigne d’une grande diversité formelle, elle n’est en rien la marque d’une dispersion. Cette approche indique que les tableaux de Pierre Blanchette se construisent et s’affichent en fonction d’une histoire de la peinture à laquelle le peintre appartient et sur laquelle il se rattache tout en tentant à sa manière d’en influer le cours. Pas étonnant que l’on retrouve chez lui, alliées à de multiples sources délibérément extrapicturales, des références à des peintres aussi différents que Ribera 1 pour le baroque (ill. 1992) ou Ucello 2. Avec ces Signes, Pierre Blanchette nous rappelle que les formes ne sont jamais peintes à partir de rien. Reprises sans cesse, elles se teintent chez lui de désimprégnation pour ensuite devenir l'enjeu d'une réappropriation. On ne peut rendre un meilleur hommage à la peinture, croit Pierre Blanchette, qu’en lui restituant, pour mieux les subvertir, les éléments qu’elle a donnés. 1 2 José Di Rebera, peintre espagnol, 1591 - 1652 Paolo Ucello, peintre italien, 1397 - 1475 1978 P24-78 Acrylique sur toile 175 x 183 cm 1992 P22-92 d’après la Libération de Saint-Pierre de Ribera Acrylique sur toile 114 x 162 cm 1996 4e heure Acrylique sur toile 270 x 350 cm 2001 Peinture Nº 516 Acrylique sur toile 150 x 150 cm SIGNES PIERRE BLANCHETTE Né à Trois-Rivières, PIERRE BLANCHETTE a étudié à l’Université du Québec à Montréal. Au cours des années 80 et 90, il a effectué de fréquents séjours à Paris où il a exposé à la Galerie Regards, au Centre culturel canadien, à la Délégation du Québec et à la Galerie Véronique Smagghe. Au Québec, ses œuvres ont été présentées à la Galerie Gilles Corbeil, à la Galerie Michel Tétreault, à la Galerie Jolliet, à la Galerie Éric Devlin, à la Galerie Simon Blais, à la Galerie Madeleine Lacerte de Québec et Lacerte art contemporain de Montréal. Pierre Blanchette est lauréat de la Bourse de carrière Jean-Paul-Riopelle, édition 2010-2011, du Conseil des arts et des lettres du Québec. Les œuvres de Pierre Blanchette sont présentes dans de nombreuses collections tant privées que publiques; au Musée national des beaux-arts du Québec, au Musée des beaux-arts de Montréal, à la Banque d’œuvre d’art du Conseil des arts du Canada, au Musée d’art contemporain de Montréal. MAISON DE LA CULTURE MARIE-UGUAY 6052, BOULEVARD MONK, MONTRÉAL (QUÉBEC) MÉTRO MONK - AUTOBUS 36 EST RENSEIGNEMENTS : 514 872-2044 HEURES D’OUVERTURE : MARDI, MERCREDI : 13 H À 19 H JEUDI : 13 H À 18 H VENDREDI, SAMEDI ET DIMANCHE : 13 H À 17 H LUNDI : FERMÉ 1980 P3-80 (Cycle Ispahan) Acrylique sur toile 150 x 150 cm VILLE.MONTREAL.QC.CA/SUD-OUEST/MARIE-UGUAY ACCESCULTURE.COM ENTRÉE LIBRE POUR VISITER LES EXPOSITIONS PRODUCTION : MAISON DE LA CULTURE MARIE-UGUAY PHOTOGRAPHIES : PIERRE BLANCHETTE - COUVERTURE ET ŒUVRES DE 1978, 1980, 1992, 2001, 2002 DANIEL ROUSSEL - ŒUVRE DE 1996 GRAPHISME : BERNARD MÉOULE