1 UNIVERSITÉ DE CERGY Année 2013-2014 U.F.R. Économie & Gestion Licence d’Économie et Mathématiques MATH104 : Mathématiques Chapitre II : L’ensemble des nombres réels 1 Quelques notions générales sur R 1.1 Définitions On suppose les notions de N (entiers naturels) et Z (entiers relatifs) connues. Définition 1. L’ensemble Q des nombres rationnels est défini par : ( Q= p / p ∈ Z et q ∈ N∗ q ) Remarque : Un sous-ensemble important de Q est l’ensemble des nombres décimaux : p D = r ∈ Q/ ∃p ∈ Z et k ∈ N; r = k 10 Définition 2. Une première définition sommaire (et qui devra être approfondie dans un chapitre ultérieur) de l’ensemble R des nombres réels, est l’ensemble des nombres qui peuvent s’écrire de la forme : ±a1 a2 · · · an , d1 d2 · · · Remarques : 1. Une telle écriture est appelée développement décimal.Tout rationnel est un réel, mais il existe des réels non rationnels (dits irrationnels). 2. On a les inclusions : N ⊂ Z ⊂ Q ⊂ R √ 2 est irrationnel. Exemple 1. L1/S1 - MATH 104 - Mathématiques J. Stéphan - Université de Cergy-Pontoise - UFR Économie & Gestion 1.2 Opérations 1.2 2 Opérations • R muni de l’addition est un groupe commutatif : 1. L’addition est une opération interne : ∀(x, y) ∈ R2 , x + y ∈ R. 2. L’addition est associative : ∀(x, y, z) ∈ R3 , (x + y) + z = x + (y + z). 3. L’addition est commutative : ∀(x, y) ∈ R2 , x + y = y + x. 4. 0 est l’élément neutre pour l’addition : ∀x ∈ R, x + 0 = 0 + x = x. 5. Tout réel possède un opposé pour l’addition : ∀x ∈ R, ∃y ∈ R, x + y = y + x = 0 L’opposé d’un réel est unique : soit x ∈ R supposons qu’il existe (y, z) ∈ R2 tel que : x + y = y + x = 0 et x + z = z + x = 0, alors y = y + 0 = y + (x + z) = (y + x) + z = 0 + z = z On note −x l’opposé de x. • R muni de l’addition et de la multiplication est un corps commutatif : 1. La multiplication est une opération interne. 2. La multiplication est associative. 3. La multiplication est commutative. 4. 1 est l’élément neutre pour la multiplication. 5. Tout réel non nul possède un inverse. ∀x ∈ R∗ , ∃y ∈ R∗ , xy = yx = 1 : un tel inverse est 1 unique et il est noté x−1 ou x 6. La multiplication est distributive par rapport à l’addition : ∀(x, y, z) ∈ R3 , x × (y + z) = (x × y) + (x × z) Remarque : La soustraction et la division se définissent naturellement : ∀(x, y) ∈ R2 , x − y = x + (−y) et ∀x ∈ R, ∀y ∈ R∗ , Exercice 1. 2 x = x × y −1 y Q est également un corps commutatif. Mais Z ne l’est pas ... pourquoi ? Ordre sur R - Topologie de R Définition 3. On définit la relation « ≤ » sur R par : soient (x, y) ∈ R2 , x ≤ y signifie que x est inférieur ou est égal à y (i.e. x − y ≤ 0) Théorème 1. R est un corps totalement ordonné. Justification : 1. La relation « ≤ » est : – Réflexive : ∀x ∈ R : (x ≤ x) – Antisymétrique : ∀(x, y) ∈ R2 , ((x ≤ y et y ≤ x) ⇒ x = y) L1/S1 - MATH 104 - Mathématiques J. Stéphan - Université de Cergy-Pontoise - UFR Économie & Gestion 3 – Transitive : ∀(x, y, z) ∈ R3 , ((x ≤ y et y ≤ z) ⇒ x ≤ z) Ces trois propriétés font de R un ensemble ordonné. – L’ordre est total : ∀(x, y) ∈ R2 , (x ≤ y ou y ≤ x). R est dit totalement ordonné. 2. La relation « ≤ » est compatible avec l’addition : ∀(x, y, z) ∈ R3 , x ≤ y ⇒ x + z ≤ y + z 3. La relation « ≤ » est compatible avec la multiplication : ∀(x, y) ∈ R2 , ((0 ≤ x et 0 ≤ y) ⇒ 0 ≤ xy) Ainsi R est un corps totalement ordonné Exercice 2. 1. Montrer que si x est un réel qui vérifie x ≤ 0 alors 0 ≤ −x. 2. Montrer que le carré d’un réel est positif ou nul. 3. Montrer que : (0 ≤ x et y ≤ z) ⇒ (xy ≤ xz) 4. Montrer que l’on ne peut pas définir d’ordre sur C qui en fasse un corps ordonné. Définition 4. Soit x ∈ R , on définit la valeur absolue de x, notée |x | par : |x| = max{−x; x} Conséquences, propriétés : Pour tous réels x et y, pour tout entier naturel n : 1. |x| ≥ 0 2. |x| = | − x| 3. |xy| = |x| · |y| 4. |xn | = |x|n 5. |x| ≤ |y| ⇔ x2 ≤ y 2 Théorème 2. ∀(x, y) ∈ R2 , |x + y| ≤ |x| + |y| Conséquences : 1. ∀(x, y) ∈ R2 , |x − y| ≤ |x| + |y| 2. ∀(x, y) ∈ R2 , |x| − |y| ≤ |x + y| Exercice 3. On suppose que |x−1| ≤ 2 et que −5 ≤ y ≤ −4. Encadrer les expressions suivantes : 1) x + y 2) x − y 3) xy 4) |x| − |y| Définition 5. On dit qu’un sous ensemble I de R est un intervalle de R, si pour tous réels a et b appartenant à I et pour tout réel x tel que a ≤ x ≤ b, alors x appartient à I. Soient a et b deux réels tels que a < b. On dit que l’intervalle I des réels x est : L1/S1 - MATH 104 - Mathématiques J. Stéphan - Université de Cergy-Pontoise - UFR Économie & Gestion 4 1. un intervalle fermé [a; b] (ou un segment) si, pour tout x appartenant à I, a ≤ x ≤ b. 2. un intervalle ouvert ]a; b[ si, pour tout x appartenant à I, a < x < b. 3. un intervalle semi-ouvert à droite [a; b[ (respectivement à gauche ]a; b]) si, pour tout x appartenant à I, a ≤ x < b (respect. a < x ≤ b). Dans ces trois cas, I est un intervalle dit borné de R. De la même façon, on définit les intervalles non bornés de R : Illustration : Notation de l’intervalle C’est l’ensemble des réels x tels que [a; b] a≤x≤b [a; b[ a≤x<b ]a; b] a<x≤b ]a; b[ a<x<b [a; +∞[ x≥a ]a; +∞[ x>a ]−∞; b] x≤b ]−∞; b[ x<b Représentation sur la droite réelle Définition 6. On définit sur R une distance : soient x et y deux réels, on pose d(x, y) = |y − x| = |x − y| Conséquences : Soient x0 ∈ R et r > 0 1. L’ensemble {x ∈ R / |x − x0 | = r} = {x0 − r; x0 + r} 2. L’ensemble {x ∈ R / |x − x0 | ≤ r} = [x0 − r; x0 + r] 3. L’ensemble {x ∈ R / |x − x0 | ≥ r} =] − ∞; x0 − r] ∪ [x0 + r, ; +∞[ Exercice 4. 1. {x / |x + 2| < 4} = · · · Exercice 5. 2. {x / |x + 2| ≥ 5} = · · · Écrire sans valeur absolue les fonctions suivantes : 1. f : f (x) = |3 − x| + |3x + 1| 2. g : g(x) = 3|2x − 1| + |x2 + 1| L1/S1 - MATH 104 - Mathématiques J. Stéphan - Université de Cergy-Pontoise - UFR Économie & Gestion 5 Théorème 3. Inégalité de Cauchy-Schwarz Pour tout entier n ∈ N∗ , pour tous (x1 , x2 , · · · , xn ) et (y1 , y2 , · · · , yn ) éléments de Rn n X !2 ≤ xi yi i=1 n X ! x2i × i=1 n X ! yi2 i=1 Remarque : une autre formulation de cette inégalité est : n X xi yi ≤ i=1 3 n X !1 2 x2i × i=1 n X !1 2 yi2 i=1 La fonction « Partie entière » Exemple 2. la fonction « partie entière » Définition 7. Soit x un réel, il existe un unique entier (relatif) n tel que n ≤ x < n + 1. Cet entier est appelé « partie entière » de x. On le note E(x). La fonction « partie entière », notée E, définie sur R, associe à chaque réel sa partie entière. Illustration : Figure 1 – Courbe de la fonction « partie entière » Exemples 3. Exercice 6. E(π) = 3 ; E(−4, 35) = −5. 1. Montrer que ∀(x, y) ∈ R2 , x ≤ y ⇒ E(x) ≤ E(y) 2. Montrer que ∀x ∈ R r Z, E(−x) = −E(x) − 1. 3. Montrer que ∀x ∈ R; ∀p ∈ Z, E(x + p) = E(x) + p. 4. Montrer que ∀(x, y) ∈ R2 , E(x) + E(y) − E(x + y) ∈ {−1; 0} Tracer les courbes des fonctions suivantes x 1. f : x 7→ x − E(x) 2. g : x 7→ E(x) Exercice 7. L1/S1 - MATH 104 - Mathématiques J. Stéphan - Université de Cergy-Pontoise - UFR Économie & Gestion 6 4 Majorant - minorant - bornes sup. et inf. Définition 8. Soit A une partie non vide de R. 1. On dit que M ∈ R est un majorant de A si pour tout x ∈ A, x ≤ M . 2. On dit que m ∈ R est un minorant de A si pour tout x ∈ A, x ≥ m. On notera M j(A) (resp. M n(A)) l’ensemble des majorants (resp. minorants) de A. Exercice 8. Déterminer M j(A) et M n(A) : • Pour A = R+ • Pour A = Z • Pour A =]0; 1] Définition 9. Une partie non vide A de R est dite : • minorée si M n(A) 6= ∅ • majorée si M j(A) 6= ∅ • bornée si elle est minorée ET majorée. Exemples 4. • Z est une partie non majorée et non minorée de R. • ]0; 1] est une partie bornée de R. • N est une partie minorée mais non majorée de R. Théorème 4. Soit A une partie non vide de R. 1. Il existe au plus un élément a ∈ R vérifiant les conditions suivantes (a) a ∈ A (b) Pour tout élément x ∈ A, x ≤ a Si un tel élément existe, on dit que c’est le plus grand élément de A et on le note max A. 2. Il existe au plus un élément b ∈ R vérifiant les conditions suivantes : (a) b ∈ A. (b) Pour tout élément x ∈ A, x ≥ b Si un tel élément existe, on dit que c’est le plus petit élément de A et on le note min A. Exemples 5. • N est une partie de R qui possède un plus petit élément (0) et n’a pas de plus grand élément. • ]0; 1[ est une partie de R qui n’a ni plus petit ni plus grand élément. • Toute partie finie de R possède un plus grand et un plus petit élément. 1 • /n ∈ N∗ possède un plus grand élément (c’est 1) mais ne possède pas de plus petit n élément. Remarque : Si A possède un plus petit élément (resp. plus grand élément) alors A est minorée (resp. majorée). La réciproque est fausse (voir l’exemple de l’intervalle ]0; 1[ ci-dessus). L1/S1 - MATH 104 - Mathématiques J. Stéphan - Université de Cergy-Pontoise - UFR Économie & Gestion 7 Définition 10. Soit A une partie non vide de R. 1. Si A est majorée, et si M j(A) possède un plus petit élément M , on dit que M est la borne supérieure de A, et on note M = sup A 2. Si A est minorée, et si M n(A) possède un plus grand élément m, on dit que m est la borne inférieure de A, et on note m = inf A Remarques : • Si max A (resp. min A) existe, il en est de même de sup A (resp. inf A) et dans ce cas sup A = max A (resp. min A = inf A) La réciproque est fausse : par exemple : A =]0; 1] ne possède pas de minimum, mais inf A = 0. • Pour tout réel x, on peut définir la valeur absolue de x par |x| = sup{−x; x} = max{−x; x} Il existe des partiesnde Q majorées odans Q mais qui ne possèdent pas de borne supérieure dans Q (penser à l’ensemble x ∈ Q/x2 ≤ 2 ) Théorème 5. Soient A une partie non vide de R et M ∈ R. Alors M = sup A si et seulement si les deux conditions suivantes sont vérifiées : 1. Pour tout x ∈ A, x ≤ M . 2. Pour tout ε > 0, il existe a ∈ A tel que M − ε < a Remarque : On a bien entendu un énoncé analogue avec le minorant : (à faire en exercice) Théorème 6. Soient A une partie non vide de R et m ∈ R. Alors m = inf A si et seulement si les deux conditions suivantes sont vérifiées : 1. Pour tout x ∈ A, x ≥ m. 2. Pour tout ε > 0, il existe a ∈ A tel que m + ε > a 5 Quelques propriétés de R Remarque : Q ne permet pas de traiter certaines questions√... On a déjà vu qu’il existe des nombres irrationnels (comme 2) : ainsi Q ne permet pas d’étudier la longueur de la diagonale d’un carré de côté de longueur 1 ... Exemple 6. Il existe des parties de Q qui sont majorées mais qui n’admettent pas de bornes supérieures dans Q. On considère les deux suites u et v définie sur N∗ par : un = 1 1 1 1 + + ··· + et vn = un + 1! 2! n! n.n! On peut facilement montrer que u est croissante et v décroissante (à vérifier), et que pour tout entier n ≥ 1, un < vn (évident). Ainsi : 0 < u1 < u2 < · · · < un < un+1 < · · · < vn+1 < vn < · · · < v2 < v1 Soit A = {un / n ∈ N∗ }. A n’admet pas de borne supérieure rationnelle. L1/S1 - MATH 104 - Mathématiques J. Stéphan - Université de Cergy-Pontoise - UFR Économie & Gestion 8 a contrario on admet le théorème suivant : Théorème 7. Soit A une partie non vide de R. 1. Si A est majorée, elle admet une borne supérieure réelle. 2. Si A est minorée, elle admet une borne inférieure réelle. Remarque : L’hypothèse « non vide » est primordiale car l’ensemble vide est majoré par tout réel mais l’ensemble des majorants (R) n’admet pas de plus petit élément. Théorème 8. Pour tous X ∈ R et tous ε > 0, il existe n ∈ N∗ tel que nε > X. On dit que R est archimédien. Exercice 9. Soit x ∈ R, montrer que : 1. (∀ε > 0, 0 ≤ x ≤ ε) =⇒ x=0 1 ∗ 2. ∀n ∈ N , 0 ≤ x ≤ =⇒ x = 0 n Définition 11. Soit D une partie de R. on dit que D est dense dans R lorsque ∀(x, y) ∈ R2 , x < y ⇒ ∃d ∈ D/ x < d < y Théorème 9. Q est dense dans R. Exercice 10. Montrer que l’ensemble des irrationnels noté R r Q est également dense dans R. L1/S1 - MATH 104 - Mathématiques J. Stéphan - Université de Cergy-Pontoise - UFR Économie & Gestion