La mondialisation: acteurs, flux et débats Mondialisation: - Processus de mise en relation et d'intégration des différentes régions de la planète et de rapprochement des hommes qui les habitent, porté par la croissance des flux de toute nature. - Ce processus résulte notamment de la libéralisation des échanges, du développement des moyens de transport de personnes et de marchandises, et des retombées des technologies de l'information et de la communication à l'échelle planétaire => explosion des flux de toute nature. - Elle se manifeste notamment par l'interdépendance croissante des économies (cf. conséquences mondiales de la crise de 2008 débutée aux EU). ‐ Quels types d’acteurs sont impliqués dans le système mondialisé où se produisent et se consomment les biens et les services ? Comment s’organisent-ils ? Quelles sont leurs stratégies ? ‐ Comment s’organisent les flux de biens, de services, d’informations à l’échelle planétaire ? Que révèlentils du fonctionnement de la mondialisation ? ‐ Quels débats et quelles contestations le processus de mondialisation nourrit-il ? I. Les acteurs de la mondialisation: A. Les firmes transnationales, principaux agents de la mondialisation = FTN: Entreprise implantée dans de nombreux pays et qui réalise la majeure partie de son chiffre d'affaires en dehors de son pays d'origine. Les FTN, des acteurs économiques de poids : - 82 000 FTN (13 fois plus nombreuses qu'en 1967) font travailler 80 millions de salariés dans 815 000 filiales. - Elles réalisent 25 % du PIB industriel mondial et plus des deux tiers des flux commerciaux mondiaux. - Un petit nombre concentre l'essentiel de ce pouvoir économique: les 500 premières comptent pour 80 % des flux d’IDE annuels. Leur chiffre d'affaires est supérieur au PIB de nombreux États. La puissance économique de Wal-Mart, entreprise américaine spécialisée dans la grande distribution et première FTN au monde, est comparable au PIB de la Norvège, 25e puissance économique mondiale. Cette puissance économique leur permet de faire pression sur les autres acteurs en se constituant en véritables lobbys (= groupes de pression). Les activités des firmes transnationales (FTN) concernent tous les secteurs économiques. Ces firmes peuvent être d'importantes sociétés pétrolières (Shell, Exxon), agroalimentaires (Nestlé, Coca-Cola Company), automobiles (Toyota. General Motors) ou de télécommunications (Nokia), des entreprises de grande distribution (Wal-Mart, Carrefour) ou encore des groupes financiers (Japan Post Holdings). Les firmes transnationales suivent des stratégies d'implantation mondiales qui s'inscrivent dans le cadre de la NDIT. Elles exploitent les avantages comparatifs des différents territoires du monde. Les activités de décision, de recherche et de développement se concentrent dans leurs pays d'origine, tandis que les activités de fabrication et d'assemblage sont souvent délocalisées. Ces firmes transnationales gardent un solide ancrage national pour les fonctions les plus stratégiques (sièges sociaux, recherche, production à haute valeur ajoutée). Si leur puissance repose sur leur capacité à maîtriser la gestion de l'espace mondial (approvisionnements, productions, ventes), elles réalisent en permanence des arbitrages territoriaux => choix de la localisation de leurs activités. Elles doivent tenir compte des risques géopolitiques, des réglementations nationales, des cultures des consommateurs et des résistances des États et des citoyens. Dans l’ancienne DIT, les pays développés échangent des biens manufacturés contre des biens de faible valeur (ressources alimentaires, minières, etc.) venus des pays pauvres. Avec la mondialisation et l’émergence d’une Nouvelle DIT, les flux (informations, pièces détachées, produits finis…) se multiplient et se complexifient : flux intra-firmes entre filiales d’une même FTN ; flux avec les sous-traitants. Les fonctions de conception restent souvent dans les PDEM, les opérations d'assemblage dans des pays ateliers à faible coût de main-d'œuvre, etc… Un même produit est construit dans une multitude de pays, et non un seul. 1 Ce schéma est théorique car les firmes ont des logiques d'implantation différentes selon leur activité. Si elles maîtrisent toute la chaîne dans les secteurs agroalimentaires ou miniers (Rio Tinto), de l'approvisionnement à la vente, elles se contentent de délocaliser leur production et de la réimporter après transformation dans l'industrie à faible valeur ajoutée (Textile, produits électroniques de consommation courante). Pour les activités plus élaborées, elles cherchent à s’implanter, y compris pour leurs sites de production, au plus près de leurs marchés (cf. stratégie de Toyota). L'activité des firmes transnationales génère des flux de toutes natures. L'interconnexion des établissements des FTN entraîne des flux d'investissements, mais aussi de personnes, d'informations. de pièces détachées et de produits finis. Ces flux sont à la fois encouragés et contrôlés par les États et les organisations intergouvernementales, telle que l'OMC [Organisation mondiale du commerce]. Les FTN sont également des acteurs financiers. Leurs investissements directs à l'étranger [IDE] permettent aux FTN de créer ou de contrôler des filiales à l'étranger. Ces choix d'investissements déterminent l'insertion des territoires dans la mondialisation. Le rôle des FTN des pays émergents s'accroît, avec plus d'un quart des IDE émis en 2011. La montée des transnationales des Suds est la grande nouveauté de la dernière décennie. Si les pays développés dominent encore largement, les pays des Suds disposent de firmes de plus en plus nombreuses et influentes, en particulier les grands pays émergents. Dans les mines, l'énergie, l'électronique, les transports maritimes et la finance, elles partent à la conquête du monde. Ce sont de nouveaux concurrents redoutables qui transforment les rapports de forces mondiaux. Un tiers des principales FTN siège désormais dans un pays émergent. Les FTN des pays émergents se déploient dans tous les secteurs, à l'image de la société pétrolière Sinopec ou du groupe indien Tata (sidérurgie, construction automobile, télécommunications). B. Etats et organisations régionales: 1. Les Etats: Les États ont un rôle paradoxal dans l'épanouissement de la mondialisation. Historiquement, certains comme les États-Unis, ont favorisé le développement du commerce international sans entrave par la mise en place de législations nationales ou internationales favorables (cf. rôle clé des EU et des puissances économiques occidentales dans les négociations du GATT puis de l’OMC pour développer le libre échange). Cependant, affaiblis par l'essor de la concurrence internationale et l'effacement des frontières économiques, les États peuvent aussi percevoir la mondialisation comme une menace pour l'emploi sur leur propre territoire et comme un facteur de remise en cause de l’Etat-providence (retraites, chômage, assurance maladie) du renforcement de la concurrence à l’échelle mondiale entre des pays n’ayant pas les mêmes normes sociales ou salariales. Ainsi les Etats peuvent-ils parfois être tentés par la mise en place de politiques protectionnistes pour éviter les délocalisations, surtout en période de crise. Afin de trouver leur place dans la mondialisation, les États s'attachent ainsi à développer l'attractivité de leur territoire et la compétitivité de leur économie (politiques fiscales, aménagements du territoire, formation...). Mais leurs moyens d'action ont eu tendance à se réduire depuis une trentaine d'années au profit des échelons inférieurs (collectivités locales : régions, métropoles) et supérieurs (organisations régionales et internationales, firmes transnationales) . Il faut toutefois noter que ce sont les pays qui se sont s'appuyés sur la mondialisation pour se développer qui ont connu les taux de croissance les plus importants ces dernières années. Ce sont les pays émergents. Même si leur marge de manœuvre diminue dans une économie mondialisée, les Etats demeurent des acteurs incontournables, en particulier les plus puissants d'entre eux qui, à l'instar des Etats-Unis, pèsent sur tout le système. Par leur rôle géopolitique, géoéconomique, social et juridique, les Etats assurent la défense et la promotion de leurs intérêts. Ils participent, à des degrés variables selon leur puissance, à l'organisation et à la gestion des relations internationales et à la gouvernance mondiale (ONU, FMI, OMC...). La montée du terrorisme depuis 2001 et la crise économique de 2008 se sont traduits par un renforcement de l’action publique et un retour des Etats sur le devant de la scène dans les domaines sécuritaire (Patriot Act aux EU ; état d’urgence en France) et économique (plans de relance de l’économie, soutien financier aux entreprises et aux banques, baisse des taux d’intérêt…). 2 2. Les organisations régionales: De plus en plus, les États ne restent plus isolés dans leur volonté de peser dans la mondialisation. Ils s'entendent pour constituer des organisations régionales, à l'image de l'Union européenne, projet le plus abouti à ce jour, ou encore de l'ALENA en Amérique du Nord, du MERCOSUR en Amérique du Sud ou de l’ASEAN en Asie du Sud-Est. Fondées sur des solidarités de proximité, ces organisations développent les interdépendances entre Etats voisins. Elles contribuent à renforcer la régionalisation des échanges et l’émergence d’aires de puissance économiques régionales (Amérique du Nord, Europe occidentale). Les logiques d'intégration souscontinentales s'inscrivent dans des processus variables; alors que l'UE combine un projet politique et une logique d'intégration économique et territoriale poussée, l'ALENA, le MERCOSUR et l'ASEAN privilégient l'intégration économique. C. Les instances internationales de la gouvernance mondiale: Dans le cadre d'une gouvernance mondiale, des institutions internationales (ou intergouvernementales) ont été mises en place au XXe siècle. Elles sont fondées sur la participation d’Etats. La régulation politique, développée dans le cadre bipolaire de la Guerre froide, est aujourd'hui confrontée à un monde de plus en plus multipolaire (géopolitique) et polycentrique (géoéconomie). =Gouvernance mondiale: Depuis la fin des années 1980, la notion de gouvernance mondiale renvoie à l'idée d'un mode de régulation supranational édictant des règles d'organisation à l'échelle de la planète, issues de la coopération internationale. Depuis 1945, de vastes organisations ont été mises sur pied, dans le cadre du système des Nations unies, à vocation universelle et compétence générale comme l'ONU (=> préservation de la paix ; développement et réduction des inégalités) ou à compétence spécifique (FAO, Unicef, etc). Ces institutions internationales se préoccupent ainsi d'aide au développement (CNUCED, FAO) et certaines construisent des normes universelles dans des secteurs spécialisés: droit du travail (OIT), justice (TPI), culture (UNESCO). Entre 2000 et 2015, les objectifs du Millénaire ont offert à l'ONU un cadre général d'intervention. = Les objectifs du millénaire pour le développement (OMD), sont huit objectifs adoptés en 2000 à New York (États-Unis) avec la Déclaration du millénaire de l'Organisation des Nations unies par 193 États membres de l'ONU, et au moins 23 organisations internationales, qui sont convenus de les atteindre pour 2015. Ces objectifs recouvrent de grands enjeux humanitaires : la réduction de l’extrême pauvreté et de la mortalité infantile, la lutte contre plusieurs épidémies dont le SIDA, l'accès à l’éducation, l’égalité des sexes, et l'application du développement durable. Dans le champ de l'économie, trois organismes interviennent: - l'OMC (1995), contribue à l’extension du libre échange. - le FMI cherche à assurer la stabilité du système financier international (aide aux Etats qui traversent des difficultés économiques), et la Banque mondiale (BM) qui se consacre au développement économique à long terme et à la lutte contre la pauvreté dans les PED. Ces deux institutions préconisent auprès des Etats qu’elles aident des politiques libérales controversées inspirées par le « consensus de Washington ». Puissantes, ces institutions sont parfois jugées comme trop représentatives des pays richeset de leurs intérêts/ Depuis une trentaine d’années, les États s'orientent vers un pilotage informel de la mondialisation par de grands sommets internationaux (G8, G20), où sont représentés les pays émergents à côté des grandes puissances et de l'UE. 3 D. La montée en puissance d'autres acteurs transnationaux: Les acteurs transnationaux non gouvernementaux fonctionnant selon des logiques de réseaux se multiplient. - Aux anciennes diasporas (juive, arménienne, chinoise) répondent de nouveaux réseaux migratoires à grande distance (latino-américains, d'Afrique subsaharienne...). - Les associations, syndicats ou organisations non-gouvernementales (ONG), comme Amnesty International, Greenpeace, WWF, Max Havelaar, jouent un rôle croissant dans la construction d'une opinion publique mondiale mobilisée par quelques grands thèmes médiatisés. Les plus puissantes ONG influencent les États et interviennent dans des domaines très différents (protection de l’environnement, droits de l’homme, action humanitaire…). Elles contribuent à la prise de conscience des interdépendances économiques et environnementales, et posent la question des biens communs mondiaux. - réseaux sociaux => une opinion publique mondiale est en gestation (cf. printemps arabes). - agences de notations financières. - Les acteurs du grand banditisme s'adaptent également aux logiques mondialisées. Les mafias organisent une criminalité transnationale. Leurs trafics (drogue, produits de contrefaçon, bois tropicaux, main-d'œuvre) contournent le pouvoir des États. La large diffusion des médias fait du monde un « village global ». Cette expression, forgée en 1960 par un sociologue canadien (Marshall McLuhan), rend compte de la réduction des distances entre les individus permise par l'apparition de nouveaux médias comme la télévision. Cette proximité nouvelle s'accroît avec la généralisation de l'accès aux télécommunications. 4