Outline Décembre 2016 ING Private Banking magazine Expo « Guggenheim – Full Abstraction » à l’ING Art Center Interview : Rencontre avec Thierry van Alphen Business : À la rencontre des entrepreneurs Reportage : Abattre les murs de l’indifférence ING Private Banking magazine Édito Sommaire L’été dernier, j’ai été appelé à rejoindre le Comité de direction d’ING afin de succéder Interview à Colette Dierick en tant que Managing Director Retail & Private Banking. 4/ Le 1er décembre, j’ai cédé officiellement les commandes du Private Banking. Dans le cadre de mes nouvelles fonctions, je 6/ continuerai bien entendu à suivre de près l’activité Private Banking. C’est avec plaisir que je vous présente mon 4 successeur Thierry van Alphen. Il a débuté sa carrière chez ING en 1999 et apporte 28 avec lui une large expérience commerciale. Vous en apprendrez davantage à son sujet dans l’interview qui compter sur lui et sur l’équipe Private Banking Management Marchés 8/ 12/ d’ING, ainsi que sur votre Private Banker. Notre ambition est de continuer à mériter votre confiance, aujourd’hui et demain. Vous avez certainement appris qu’ING a l’intention 16/ faire face à la réalité : les taux bas et leurs effets sur les frais des dépôts qui nous sont confiés ainsi que la législation de plus en plus stricte ne constituent que quelques-uns des éléments 28/ Acquérir un bien immobilier en prenant une avance sur votre assurance groupe L’intérêt de mettre son portefeuille " au vert " À la rencontre des entrepreneurs : Dandoy et Studio 100 Reportage 32/ Abattre les murs de l’indifférence Événement 38/ Expo Guggenheim – Full Abstraction à l’ING Art Center 24/ Être propriétaire d’une entreprise qui impactent notre rentabilité. L’arrivée d’une concurrence inattendue de secteurs opérant en dehors du monde financier 38 motive également notre intention de transformation. La première raison réside dans le souhait de plus en plus de clients d’exécuter leurs opérations bancaires quotidiennes n’importe familiale impliqué est un métier à part entière 16 où et à n’importe quel moment. Par ailleurs, les clients attendent que leur banque fournisse conseil et compétences. Aujourd’hui et demain, nous souhaitons figurer aux avantpostes des services bancaires en Belgique afin de vous offrir encore plus de simplicité et de conseil. Tel est le défi de notre stratégie : nous réinventer pour vous proposer les services que vous attendez de notre part, au moyen de canaux numériques et de conseils personnalisés. Sachez que nous avons l’intention de conserver dans le futur 650 agences en Belgique, un réseau comparable à celui qui existe actuellement chez ING. Nous restons donc à proximité. Si nos plans devaient s’exécuter, notre banque s’en trouvera plus forte et nous pourrons encore mieux vous servir. Je vous souhaite d’ores et déjà à vous ainsi qu’à votre famille de magnifiques fêtes de fin d’année. Outline - D é cembre 2016 Wealth Engineering Politique monétaire 2.0 Business d’entreprendre une transformation fondamentale. ING doit 2 Un carré d’as à votre écoute Investir lui est consacrée dans cette édition. Vous pourrez évidemment Philippe Wallez Managing Director Retail & Private Banking ING Belgique Thierry van Alphen prêt à relever de nouveaux défis au sein du Private Banking 32 Outline – ING Private Banking magazine – Décembre 2016 Comité de rédaction : Aleksandra Barcewicz, Luc Charlier, Sandra Crokaert, Caroline De Moor, Kris Depaepe, Marie Helsmoortel, Thierry Masset, Sébastien Rochedy, Mireille Staelens, Philippe Wallez Edouard Zurstrassen Ont participé à la réalisation de ce numéro : Business Writers, Luc Charlier, Björn Crul, Eva De Baerdemaeker, Caroline De Moor, Patricia De Peuter, Benjamin Francq, Marie Helsmoortel, Kurt Lamquet, Geoffrey Minne, Anne Petre, Studio 100, Joris Tiebout, Thierry van Alphen, Marc Vankeirsbilck, Peter Vanryckeghem Maquette et mise en pages : Kris Depaepe Édition : Mireille Staelens Production : Patrick Bataillie Photos : Adobe Stock, BelgaImage, Laetizia Bazzoni, Vincent Everarts, Jessica Hilltout La couverture : Jean Dubuffet (1901–1985) L'instant propice, le 2 et 3 janvier 1962 - Huile sur toile, 200 x 165 cm Solomon R. Guggenheim Museum, New York - 74.2080 Photo Kristopher McKay. © Jean Dubuffet, SABAM Belgique 2016 Éditeur responsable : Inge Ampe, Cours Saint-Michel 60, B-1040 Bruxelles – Z711972F – 12/2016 Outline - D é cembre 2016 3 Interview Interview Thierry van Alphen prêt à relever de nouveaux défis au sein du Private Banking Le 1er décembre dernier, Thierry van Alphen a pris la succession de Philippe Wallez en qualité de General Manager d’ING Private Banking Belgium. Faisons connaissance avec ce Gantois de 44 ans, qui a réalisé quasiment toute sa carrière dans la banque. Ce n’est pas banal : Thierry van Alphen a choisi d’étudier à l’université les cultures et les langues orientales. Mais malgré un intérêt pour le bouddhisme à l’adolescence, il n’est pas un contemplatif. C’est au contraire un homme qui aime l’action, le changement, les résultats. Le dimanche matin, il bataille sur un terrain de hockey sur gazon. Et la semaine, il n’aime rien tant que bousculer (gentiment) ses clients entrepreneurs pour les aider, dit-il, à « réaliser leurs rêves ». « Ce qui me donne une incroyable énergie, c’est d’accompagner les entreprises depuis leur création jusqu’à leur transmission. Un entrepreneur familial tient à son entreprise comme à la prunelle de ses yeux et veille sur elle, comme il le fait avec ses enfants. Créer avec lui une relation de confiance afin de pouvoir l’épauler durant tout le cycle de vie de son entreprise est extrêmement motivant. » L’importance du relationnel La passion de l’entreprise découle forcément de son cursus : un post-graduat en management, puis un MBA à la Solvay Business School sont venus compléter sa formation en langues. Ajoutez à l’environnement familial un père fabricant et distributeur de produits chimiques pour la construction et le destin de Thierry van Alphen commence à s’écrire avec la précision d’un trait de calligraphie. Il y a quelques semaines encore, ce Gantois de 44 ans, amateur de kayak et de lectures historiques, dirigeait le département Midcorporates & « La manière la plus efficace de faire avancer les choses est d’avoir des gens enthousiastes à ses côtés » 4 Outline - D é cembre 2016 Institutionals pour la Flandre Occidentale et Orientale – soit quelque 5.000 clients entrepreneurs et institutionnels. Depuis le 1er décembre, il a pris la direction générale d’ING Private Banking Belgium, en remplacement de Philippe Wallez. « J’ai beaucoup travaillé avec les équipes du Private Banking dans mes fonctions antérieures. Et d’entrée de jeu, ce qui me plaît dans ma nouvelle fonction, c’est encore une fois l’aspect relationnel et l’importance de mériter la confiance des clients. Tant du côté du Business Banking que du Private Banking, nous voulons construire des relations fortes avec nos clients afin de leur apporter de la valeur ajoutée. Il faut continuer dans cette voie », argumente Thierry van Alphen. Un mode de gestion participatif Thierry van Alphen rejoint ING Belgique en 1999 et se voit d’abord confier la relation avec les fonds de pension, ce qui le plonge d’entrée de jeu dans la gestion de patrimoine. En 2001, il est chargé d’assurer les relations avec les grandes entreprises japonaises clientes au niveau du groupe ING – l’occasion pour lui d’effectuer de nombreux voyages au Japon et de continuer à s’imprégner de sa culture fascinante. « C’est passionnant parce qu’en tant qu’étranger, je sais que je ne vais jamais réellement comprendre cette culture… », dit-il en riant. Toute sa carrière au sein de la banque, Thierry van Alphen l’a menée en Belgique. Il a également été Risk Manager pour la Flandre Occidentale durant deux ans et directeur des Business Centres de Bruges et de Bruxelles Nord sur une période de quatre ans et demi. Thierry van Alphen a la poignée de main ferme et l’on sent poindre derrière son sourire jovial une détermination sans faille. Son style de gestion, il aime le définir comme participatif. « Je crois que la manière la plus efficace de Outline - D é cembre 2016 5 Interview Son dernier livre de vacances « J’aime lire, en particulier les ouvrages qui ont un lien avec l’histoire. J’ai évidemment beaucoup lu au sujet de l’histoire du Japon, mais l’une de mes lectures marquantes cet été fut Het verlies van België de Johan Op de Beeck, qui relate la lutte entre le roi des Pays-Bas, Guillaume 1er, et les révolutionnaires belges, une lutte qui conduira à l’indépendance de la Belgique. On y apprend beaucoup de choses sur l’histoire de notre petit pays, ainsi que sur les évolutions économiques à long terme et le fait que tous les métiers évoluent en permanence. C’est une chose qu’il faut toujours garder à l’esprit dans notre métier de banquier aussi. » Interview faire avancer les choses est d’avoir des gens enthousiastes à ses côtés. J’accorde une grande importance au feedback : celui que je donne et celui que je reçois de mes collaborateurs. J’aime stimuler les idées, notamment dans le but d’améliorer encore nos services pour les clients. Cela dynamise le travail d’équipe et permet à chacun de s’améliorer, y compris moi. » • « D’entrée de jeu, ce qui me plaît dans ma nouvelle fonction, c’est l’importance du relationnel » Un carré d’as à votre écoute Outline a mis autour de la table les quatre responsables d’ING Private Banking pour débattre de vos attentes et des préoccupations actuelles en matière de gestion de patrimoine. Quatre personnes que l’on sent passionnées par leur job ! Un environnement financier et fiscal peu favorable Jusqu’il y a peu, prendre sa retraite avec un capital d’un million d’euros permettait de vivre confortablement. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Marie Helsmoortel : Une personne dotée d’un patrimoine d’un million d’euros, avec 5 % de rendement annualisé sur ses placements, pouvait jusqu’il y a peu profiter confortablement de sa retraite puisqu’elle disposait de 50.000 euros nets par an en complément de sa pension. La situation est devenue beaucoup moins simple aujourd’hui en raison de la baisse des taux d’intérêt sur les actifs peu ou pas risqués, couplée à une hausse de la fiscalité. Et ce, dans un contexte où l’espérance de vie augmente. Cet environnement défavorable contraint un nombre toujours croissant de personnes à entamer leur capital. On entre là dans un cercle vicieux de déperdition de richesse et de pouvoir d’achat. Marc Vankeirsbilck : La situation est devenue plus critique encore depuis que la Banque centrale européenne (BCE) a fixé des taux d’intérêt négatifs. Cet environnement impose à nos clients de s’orienter vers des produits plus risqués et de diversifier davantage encore leur patrimoine. Dans ce contexte, il est plus que jamais important d’être bien conseillé. 6 Outline - D é cembre 2016 Beaucoup de Belges possèdent un bien immobilier, voire plusieurs, en sus de leur patrimoine mobilier. Est-ce toujours le socle du patrimoine familial ? Benjamin Francq : Grâce à la croissance régulière du marché et aux rendements générés, l’immobilier a longtemps constitué l’une des pierres angulaires de la diversification de patrimoine. Il est devenu aujourd’hui une autre source d’inquiétude, tant en ce qui concerne la valeur des biens que leur rendement. Attirer l’attention de nos clients sur ces évolutions structurelles est d’une importance capitale. Il faut, en effet, envisager toutes les voies de diversification possibles, au niveau mobilier mais aussi dans des produits alternatifs comme les œuvres d’art, les bijoux, les voitures anciennes ou le private equity. À cet égard, le renforcement de notre équipe Wealth Engineering est un plus appréciable pour nos clients. Kurt Lamquet : En Flandre Occidentale, pratiquement tous les entrepreneurs ont un hobby commun : l’immobilier ! Ils possèdent deux, trois, quatre et parfois même dix biens. Si, en tant que Private Banker, vous gérez la totalité du patrimoine d’un client, vous devez donc prendre en compte ce patrimoine immobilier et réfléchir à la meilleure transmission possible à la génération suivante. La famille au cœur de notre approche La famille est au centre des conseils patrimoniaux dispensés aux clients Private Banking, qu’ils soient ou non entrepreneurs. En quoi cette approche est-elle originale ? Kurt Lamquet : Notre rôle vis-à-vis des familles est triple : sensibiliser, coacher et proposer des solutions techniques appropriées. Il s’agit toujours de solutions sur mesure. Parallèlement, nos Private Bankers et fiscalistes jouent le rôle de coaches au sein de l’Académie des Successeurs et sont ainsi en contact avec la génération appelée à prendre les rênes des entreprises familiales. Nous nous efforçons de leur donner les outils nécessaires pour une reprise optimale. Marie Helsmoortel : L’ambition d’ING est connue : nous voulons devenir la banque préférée des entrepreneurs familiaux à l’horizon 2020. Les problématiques de transmission concernent souvent l’ensemble du patrimoine familial dont l’entreprise familiale n’est qu’un des piliers. Il n’est pas inconcevable d’échanger un Brueghel ou un immeuble bien situé contre une partie des actions de l’entreprise familiale dans le cadre d’un règlement de transmission de patrimoine. Ces situations passionnantes mais souvent délicates font que notre rôle de conseiller financier et patrimonial doit s’accompagner de compétences psychologiques importantes. En tant que personne externe à la famille, le Private Banker peut contribuer à dénouer des situations complexes ou délicates, par exemple en matière de succession, de donation ou d’investissement. Extrêmement digitale et extrêmement personnelle Comment la digitalisation de certains services est-elle perçue par les clients Private Banking ? N’est-ce pas difficile parfois pour des personnes peu ou pas « digitalisées » ? Kurt Lamquet : La digitalisation est un service complémentaire que nous apportons et qui n’interfère en rien dans notre disponibilité vis-à-vis du client. Il s’agit de personnes actives qui désirent suivre l’évolution de leur patrimoine à tout moment et gérer leurs affaires financières où qu’ils soient avec efficacité. Qui est qui ? Vous avez très certainement déjà eu l’occasion de rencontrer l’un(e) ou l’autre des responsables Private Banking. Marie Helsmoortel dirige la zone Centre (Bruxelles et sa périphérie) depuis huit ans. Kurt Lamquet pilote la zone Ouest (Flandre Occidentale et Orientale) depuis douze ans. Leurs collègues Marc Vankeirsbilck et Benjamin Francq ont pris respectivement les commandes des zones Est (Anvers-Brabant flamand-Limbourg) et Sud (Wallonie) il y a quatre ans. De gauche à droite : Benjamin Francq, Marie Helsmoortel, Kurt Lamquet, Marc Vankeirsbilck privées les plus personnalisées du marché belge. Mais au travers des contacts personnels avec mes clients, je constate aussi que ceux-ci sont particulièrement séduits par le côté intuitif de nos applications mobiles. J’aimerais d’ailleurs rappeler que les paiements digitaux sont plus sûrs que les paiements par carte de crédit. Benjamin Francq : Au final, ce qui est privilégié dans notre approche, c’est de pouvoir passer le plus de temps possible avec nos clients pour les conseiller de manière professionnelle au niveau financier et de manière plus globale. • Marc Vankeirsbilck : ING Private Banking est considérée, selon différentes enquêtes, comme l’une des banques Outline - D é cembre 2016 7 Marchés Marchés Politique monétaire 2.0 Depuis la crise financière de 2008, la politique monétaire semble avoir basculé dans une nouvelle dimension et les banques centrales des pays développés ont été forcées à réinventer leur rôle. Les programmes d’achats obligataires massifs sont devenus monnaie courante et même si le terme « assouplissement quantitatif » a été inventé en 1994, il n’a été appliqué au-delà des frontières japonaises qu’après 2008. C’est la même histoire pour les taux d’intérêt négatifs, qui, avant 2008, n’avaient été utilisés qu’épisodiquement pour enrayer une appréciation sur le marché des changes. Plus le temps passe, plus la situation d’avant crise parait inaccessible et les outils monétaires ne semblent plus capables de ramener l’économie sur les mêmes rails. Alors doit-on s’adapter à une nouvelle réalité où les taux bas seraient la norme ou bien croire en une convalescence un peu plus longue que d’habitude ? Explication de Geoffrey Minne, économist chez ING Belgique. La question n’est pas si simple puisque la raison des taux d’intérêt extrêmement bas en zone euro est à chercher parmi des éléments liés à la conjoncture économique actuelle mais aussi à des facteurs plus structurels. La situation économique actuelle reste extraordinaire et certains pays de la zone euro par exemple n’ont pas encore entièrement recouvré leur niveau de 2007. En Espagne, Italie et Portugal, par exemple, malgré une reprise timide mais présente, le PIB agrégé reste 5 % en dessous de son niveau atteint fin 2007 et plus de trois millions d’emplois nets n’ont pas encore été récupérés. La crise financière de 2007-2008 reste exceptionnelle tant au niveau de l’ampleur de son impact initial que par l’incapacité des autorités monétaires à répondre rapidement à ce choc. À l’heure actuelle, force est de constater que malgré un taux de facilité de dépôt fixé à -0,4 %, malgré 80 milliards d’achats mensuels d’obligations privées et publiques et malgré un engagement sans faille à rétablir l’inflation proche de 2 %, l’investissement et la consommation n’ont pas vraiment décollé comme d’aucuns auraient pu s’y attendre il y a 20 ou 30 ans. Le résultat est que les taux d’intérêt ont plongé plus bas que terre et si l’on en croit les banquiers centraux et spécialistes, ils ne sont pas prêts à remonter de sitôt en zone euro. La conjoncture économique joue certainement un rôle important mais d’autres éléments risquent de peser plus durablement sur les taux d’intérêt et l’action des banques centrales n’est certainement pas à blâmer pour l’entièreté de la baisse des taux. Cette tendance baissière n’est pas neuve et elle ne se limite pas à nos contrées. Depuis les années 1980, chaque décennie a été caractérisée par des taux courts plus bas en moyenne, que ce soit aux États-Unis, au Canada, au Royaume-Uni ou en Allemagne. En moyenne, les taux inter­ bancaires à 3 mois - qui servent de référence pour de nombreuses catégories de taux d’intérêt - ont perdu environ 3 % par décennie. Au-delà d’un simple passage à vide, il semble Stanley Fischer – vice-président de la Fed © BELIMAGES Bâtiment du Parlement européen à Bruxelles 8 Outline - D é cembre 2016 Outline - D é cembre 2016 9 Marchés Marchés donc que le taux d'intérêt qui prévaudrait si l’économie était à pleine puissance et si la politique monétaire était en mode neutre (le taux d’intérêt naturel ou neutre) ne soit destiné à rester à un niveau plus faible que par le passé. mondial selon le FMI (soit 152 millions de millions de dollar américains). Il y a moins de 10 ans, ce ratio était inférieur à 200 %. Un niveau élevé de dettes en comparaison au revenu appelle généralement à un plafonnement ou parfois à un processus de désendettement qui symbolise généralement la période suivant une crise économique. Finalement, d’autres éléments peuvent aussi entrer en jeu et accroitre le côté offre du marché des crédits, tels que l’absorption plus marquée des pays émergents d’actifs plus sécurisés ou la surabondance d’épargne mondiale. En définitive, alors que la demande de crédit se contracte naturellement, l’offre semble être de plus en plus poussée dans le dos. Une partie de l’explication tient sa source dans l’évolution de la société dans les pays développés et de l’économie internationale. Un premier facteur est la démographie et en particulier le fait que la société actuelle soit plus âgée et repose sur un taux de fertilité plus faible. En Europe, en l’espace de 50 ans, le nombre d’enfants par femme est passé d’approximativement de 2,5/3 à 1,6 et la croissance de la population sur 10 ans de 10 % à 1 %. Une population moins jeune a tendance à compresser la demande de crédit, ce qui tend à diminuer le taux d’intérêt. Deuxièmement, un ralentissement de la productivité risque ensuite d’agir sur les anticipations des agents économiques et selon Stanley Fischer – vice-président de la Fed - de refroidir certains investisseurs quant aux oppor­ tunités à saisir mais aussi certains ménages quant à leurs perspectives de salaires. Troisièmement, le niveau d’endettement public et privé n’a jamais été aussi élevé à l’échelle mondiale et le total atteint désormais environ 225 % du PIB L'implication principale d'un taux d'intérêt structurellement inférieur est que la politique monétaire conventionnelle visant à stimuler l'économie en période de ralentissement économique est moins efficace. Une explication provient de son impact négatif sur la solidité du secteur bancaire mais aussi de la perception négative d’une frange importante de la population, à savoir les épargnants. Ces éléments ont d’ailleurs récemment poussé la Banque du Japon à redéfinir techniquement l’objectif visé dans le cadre de son assouplis- Taux interbancaires (3 mois) 20 15 10 5 -5 États-Unis Allemagne Canada Royaume-Uni Moyenne par décennie Oct-15 Sep-14 Jul-12 Aug-13 Jun-11 Apr-09 May-10 Mar-08 Feb-07 Jan-06 Dec-04 Nov-03 Oct-02 Sep-01 Aug-00 Jul-99 Jun-98 Apr-96 May-97 Feb-94 Mar-95 Jan-93 Dec-91 Oct-89 Nov-90 Sep-88 Jul-86 Aug-87 Jun-85 Apr-83 May-84 Feb-81 Mar-82 Jan-80 0 sement quantitatif et qualitatif. Désormais la Banque du Japon a pour objectif l’ensemble de la courbe des taux d’intérêt et vise à supporter l’économie tout en maintenant un certain écart entre les taux à court terme et ceux à plus long terme. Fort à parier qu’à l’avenir les mesures non conventionnelles telles que l’assouplissement quantitatif ou les indications prospectives feront partie des outils communément utilisés par les banques centrales. Cependant il faut se rendre à l’évidence que la politique monétaire a désormais un impact limité sur l’économie dans son ensemble. Les autorités vont certainement devoir réévaluer de façon critique l'efficacité de leurs approches actuelles et soigneusement réfléchir à la refonte des stratégies de politique économique pour les temps à venir. Cela comprend notamment un examen des politiques économiques pouvant accroitre le taux d’intérêt naturel via une augmentation des gains de productivité (éducation, recherche et développement) ainsi que des mesures monétaires et budgétaires qui seraient plus efficaces dans le cadre de taux faibles (dépenses publiques plus réactives en cas de récession). Banque du Japon © BELIMAGES En conclusion, les taux d’intérêt extrêmement bas sont certainement justifiés par la situation économique somme toute exceptionnelle mais même si rebond il devait y avoir dans les années à venir, il est probable que les niveaux d’antan ne soient plus accessibles. Cela appelle évidemment à une refonte du fonctionnement de la politique monétaire mais aussi de notre perception quant à ce qui est communément accepté comme niveau d’inflation, croissance du PIB ou simplement des taux d’intérêt. Au-delà de la simple constatation, il y a ici une opportunité de mieux se prémunir face à d’autres chocs et ainsi de mieux préparer l’avenir. • Bâtiment de la Commission européenne à Bruxelles 10 Outline - D é cembre 2016 Outline - D é cembre 2016 11 Investir Investir Graphique 1 Le respect de l’environnement est récompensé en bourse (performance en % en euro, base 100 = fin 2014) 20 L’intérêt de mettre son portefeuille " au vert " 15.30268 10.69181 10 5 Les titres des entreprises qui ont à cœur d’optimiser leur consommation de matières premières et/ou qui 0 essaient de se prémunir contre les risques associés aux aléas climatiques ont tendance à générer un return sur fonds propres plus élevé. 12 -5 La plupart des pays signataires de l’Accord de Paris visant à limiter le réchauffement climatique à moins de 2° C au-dessus de la température moyenne observée avant la révolution industrielle, se sont engagés à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Pour ce faire, les Européens et les Américains mettent l’accent sur davantage d’efficience énergétique, alors que les pays émergents, comme l’Inde et la Chine, se focalisent sur le développement des sources d’énergies alternatives moins polluantes (vent, soleil,…). L’objectif commun est d’éviter de franchir d’ici 2100 le seuil des 1.000 milliards de tonnes de dioxyde de carbone rejetées dans l’atmosphère. Le hic, c’est que plus de la moitié de ce « budget » théorique de CO2 a déjà été consommé entre le début de la révolution industrielle et 2011. Pire, au rythme actuel (40 milliards de tonnes par an), notre budget carbone sera déjà épuisé dans une vingtaine d’années. Ce qui veut dire que si l’on souhaite tenir l’engagement pris, il faudra renoncer, selon le World Resources Institute, à exploiter les trois-quarts des réserves prouvées de gaz, charbon et pétrole ! Même si le défi paraît immense, il ne faut pas baisser les bras. Le combat contre le réchauffement climatique et ses effets pervers n’est pas perdu d’avance. Pour preuve, depuis le Protocole de Montréal signé il y a 30 ans, la diminution des émissions de chlorofluorocarbones (CFC) dans l’atmosphère a permis de réduire le trou qui se forme chaque printemps dans la couche d’ozone. Depuis l’an 2000, ce trou s’est contracté d’une superficie équivalente à la taille de l’Inde ! L’enjeu est colossal : les effets induits par le dérèglement du climat pourraient se chiffrer entre 5 % et 20 % du produit intérieur brut mondial chaque année jusqu’en 2100. Il s’agit non seulement des dommages causés par des phénomènes climatiques violents (ouragans, inondations, sécheresses, …) de plus en plus fréquents, mais aussi des coûts inhérents à des régulations climatiques plus strictes ainsi qu’aux nécessaires adaptations technologiques comme celles qui sont à l’œuvre dans les domaines des énergies renouvelables ou des batteries. Miser sur les énergies et les technologies « vertes » Outline - D é cembre 2016 Indice MCSI Monde Indice MCSI Monde des entreprises visant à limiter leurs émissions de carbone Mar Jun Quelle que soit la voie empruntée, notre conviction est qu’incorporer des considérations environnementales et de Dec Sep 2015 Mar M1WDLCT Index (MCSI ACWI LOW CARBON TARGET Net USD Index) clean engy low carbon Jun 2016 Sep Copyright© 2016 Bloomberg Finance L.P. 25-Oct-2016 09:28:53 Graphique 2 Les gagnants et les perdants de l’Accord climatique de Paris (performance en % en euro, base 100 = fin 2012) Si les gouvernements, les investisseurs et les consommateurs ont mis du temps à intégrer et évaluer l’ampleur des défis à relever, ils sont désormais poussés dans le dos par la multiplication des phénomènes climatiques destructeurs. Cette évolution comporte, pour les investisseurs soucieux de gérer au mieux leurs portefeuilles, d’importants risques, mais aussi de grandes opportunités. Tout l’enjeu est évidemment de s’adapter au mieux (minimiser les risques et maximiser les opportunités) à l’inévitable transition vers une économie faiblement émettrice de carbone. Pour ce faire, deux approches sont possibles. La première consiste à protéger les portefeuilles de l’impact des soubresauts du climat. La seconde vise à déterminer les entreprises susceptibles de bénéficier le plus de la transition d’une économie faisant la part belle aux énergies fossiles vers une économie moins énergivore et polluante. -10 500 401.11224 300 200 111.32499 95.48719 0 Indice Bloomverg des principales entreprises mondiales actives dans l’énergie éolienne Indice MCSI du secteur des énergies alternatives mondiales Indice Bloomberg des principales “big caps” du secteur de l’énergie solaire Indice Stowe relatif au secteur du charbon à l’échelle mondiale Mar Jun 2013 Sep Dec Mar Jun 2014 COAI Indec (STOWE GLABAL COAL INDEC) cola versus alternative FR Dily 31DEC2012-16D -76.26199 -100 Sep Dec Mar Jun 2015 Copyright© 2016 Bloomberg Finance L.P. Sep Dec 24-Oct-2016 14:02:05 Outline - D é cembre 2016 13 Investir Investir Graphique 3 développement durable dans le processus d’investissement va de plus en plus se révéler être une nécessité. Mais relier la performance financière d’une entreprise à son impact environnemental ne signifie pas pour autant qu’il faille renoncer aux exigences de rendement. L’indice MSCI monde, qui reprend les entreprises ayant comme objectif de réduire leurs émissions de carbone (indice MSCI All Countries Low Carbon Target), se comporte d’ailleurs pas mal par rapport au reste du marché (indice MSCI World All Countries) puisqu’il affiche une surperformance de près de 5 % (en euro) depuis fin 2014… La plupart des ETF « verts » ont sous-performé l’indice S&P cette année (%, in USD) First Trust Global Wind Energy ETF First Trust NASDAQ Clean Edge Smart Grid Infra Ix Fd Powershares Cleantech Portfolio Global X Yieldco Index ETF Etho Climate Leadership US ETF S&P 500 Index SPDR MSCI ACWI Low Carbon Target ETF SPDR S&P 500 Fossil Fuel Reserves Free ETF EcoLogical Strategy ETF iShares Trust iShares MSCI Global Impact ETF Powershares Global Clean Energy Pflo Vaneck Vectors Global Alt. Energy ETF iShares Global Clean Energy EFT First Trust NASDAQ Clean Edge Energy Ix Fd Powershares Wilderhill Clean Energy Pflo Guggenheim Solar ETF VanEck Vectors Solar Energy ETF Ce qui tend à démontrer que les sociétés qui réduisent le plus leur empreinte carbone se comportent mieux en bourse que celles qui ne le font pas. L'accord de Paris va probablement entraîner une accélération des investissements dans les technologies « vertes », les énergies renouvelables et les véhicules électriques. A fortiori, si d'autres pays emboitent le pas à l'Union européenne et instaurent une sorte de taxe carbone. Les Nations Unies évaluent à plus de 1.000 milliards de dollars par an les dépenses nécessaires pour « décarboniser » l'économie mondiale et empêcher des hausses de températures qui, selon les scientifiques, pourraient provoquer des inondations des villes côtières, bouleverser les pratiques agricoles et détruire de nombreux écosystèmes. Selon un scénario élaboré par l'Agence internationale de l’Énergie (AIE), les énergies renouvelables attireront 59 % des investissements dans le secteur de l'électricité au cours de la prochaine décennie et cette part devrait grimper à près de 65 % entre 2026 et 2040. Les sociétés actives dans les secteurs du futur tels que les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique (panneaux solaires, isolation high-tech, éclairage basse consommation...) s'apprêtent donc à connaître des opportunités sans précédent. A contrario, les producteurs d'énergies fossiles, en particulier dans le secteur du charbon, et les pays qui en dépendent, risquent de devoir payer un lourd tribut au changement de paradigme. 14 Outline - D é cembre 2016 Énergies vertes Faible émission CO2 iShares MSCI ACWI Low Carbon Taret ETF -40 -20 0 20 C’est d’ailleurs l’image qui prévaut en bourse puisque l'indice reprenant les 26 principaux producteurs de charbon sous-performe de près de 75 % depuis fin 2012, alors que les actions des principaux acteurs dans l’énergie éolienne ont vu leurs cours être multipliés, en moyenne, par quatre, contre un gain de 110 % pour le secteur solaire. Sur la période sous revue, les actions liées aux énergies renouvelables se sont appréciées de 95 %. Si le constat est sans appel, l’intégration en portefeuille des actions « vertes » s’avère plus compliquée. Le marché des fonds indiciels (ETF) est, à cet égard, assez évocateur. Même si le nombre d’ETF dits « verts » a augmenté de 50 % au cours des deux dernières années, cette classe d’actifs, dont la genèse remonte à il y a 10 ans, ne pèse qu’à peine 1 milliard de dollars. Outre leur faible liquidité, ces produits, qui se focalisent essentiellement sur les énergies alternatives et les sociétés faiblement émettrices de CO2, pèchent aussi par une forte volatilité comme en témoigne la grande disparité de performance entre les différents véhicules. Il est donc souhaitable, pour l’investisseur intéressé par cette thématique, de privilégier la piste des fonds d’investissements spécialisés. Les obligations « vertes » devraient aussi prendre du galon Les investisseurs obligataires peuvent, eux aussi, avoir une influence sur la problématique des enjeux climatiques par le biais des obligations vertes (« green bonds ») qui ont pour vocation de financer les projets visant, essentiellement dans les secteurs des transports, des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique, à réduire les effets négatifs induits par les changements climatiques. tation, etc.) commencent, elles aussi, à prendre leur part du gâteau : Bank of America évaluait leur part du marché à 45 % en 2015. Même si la performance de ces obligations est en retrait par rapport aux obligations des pays développés (depuis fin 2015, elles font état d’un return moyen de 16 % en euro, contre 5,6 % pour les obligations vertes), elles devraient, à l’avenir, pouvoir prétendre à une prime par rapport à leurs pairs, si l’on en juge par l’appétit croissant des investisseurs pour ce type de papiers. Bien que le marché des obligations vertes ne dispose encore que d’un encours limité (Bloomberg l’évalue à 130 milliards de dollars, soit juste 0,15 % de l’ensemble du marché des obligations), il semble avoir le vent en poupe et, selon Blackrock, il devrait s’ériger peu à peu au rang de classe d’actifs à part entière (au cours du seul second semestre 2016, 50 milliards de dollars de nouvelles émissions vertes devraient avoir vu le jour). Encore faut-il accroître leur liquidité et la taille des tranches obligataires afin de pouvoir satisfaire la demande des grands gestionnaires de fonds. Et c’est là que les autorités publiques pourraient jouer un rôle appréciable. Sachant qu’une grande partie des projets, visant à réduire les émissions de gaz à effets de serre ou atténuer l’impact des catastrophes naturelles, sont localisés dans les pays émergents, on comprend que certains investisseurs puissent être refroidis par les risques politiques et de change qui y sont associés. Mais cette retenue pourrait être atténuée si, par exemple, lesdits risques étaient contrebalancés par des incitants fiscaux ou des garanties publiques… Les 600 obligations, qui constituent actuellement l’univers des green bonds, sont réparties sur 24 pays et libellées dans 23 devises. La majorité d’entre elles sont dotées de la meilleure qualité crédit qui soit, par le biais d’un rating « AAA », qui s’explique par le fait que leurs émetteurs sont essentiellement des États ou des entités supranationales. Mais les banques et les entreprises (dans les secteurs de l’automobile, de l’alimen- Comme les infrastructures considérées comme nécessaires pour limiter le dérèglement climatique nécessitent des financements à hauteur de 13.000 milliards de dollars d’ici 2030, les green bonds sont indiscutablement appelées à jouer un rôle. A fortiori lorsque l’on sait que la part allouée aux infrastructures durables par les fonds de pension dans leur allocation d’actifs n’a, selon l’OCDE, représenté que 3,5 % sur la période 2011-2015. • Outline - D é cembre 2016 15 Business Business À la rencontre des entrepreneurs Plusieurs fois par an, ING Private Banking invite certains de ses clients entrepreneurs à découvrir d’autres entreprises familiales. Les événements Family Business Get Together constituent une opportunité unique de visiter des sociétés performantes dans des secteurs très diversifiés, mais aussi de discuter de sujets importants pour les entrepreneurs familiaux dans une ambiance conviviale. Plusieurs entreprises familiales ont collaboré cette année encore aux événements Family Business Get Together d’ING. L’occasion d’en apprendre plus sur les ressorts de leur développement, les clés d’une transmission réussie et d’autres sujets passionnants. En septembre dernier, une centaine d’entre vous ont ainsi pu découvrir la Biscuiterie Dandoy à Bruxelles et la maison de production Studio 100 à Schelle. Biscuiterie Dandoy : qui va piano va sano Peu d’entreprises de chez nous peuvent se targuer d’être nées avant la Belgique. C’est le cas de la Biscuiterie Dandoy, fondée en 1829, la même année que la Maroquinerie Delvaux. Entrons ensemble dans le saint des saints : l’atelier où l’on fabrique spéculoos et pains à la grecque… Mais comme le rappelle avec justesse Alexandre Helson, en charge des ventes, du marketing et du développement de l’entreprise familiale, « ce qui est particulièrement incroyable, c’est que notre société soit restée aussi petite aussi longtemps ». Qui va piano va sano est l’adage qui correspond sans doute Ce n’est pas encore l’effervescence des semaines qui précèdent la Saint-Nicolas et les fêtes de fin d’année lorsque nous poussons la porte de l’atelier de la Biscuiterie Dandoy, avec 120 clients d’ING Private Banking par l’odeur alléchés. Bientôt, Salem, le chef d’atelier, ne saura plus où donner de la tête : les équipes vont être dédoublées et la production grimpera en flèche. Mais ni l’approche du moment le plus stressant de l’année ni la croissance de l’entreprise elle-même ne viennent altérer les gestes quasiment immuables posés par les employés de Dandoy depuis près de 190 ans. Tout, ici, continue d’être fabriqué de manière artisanale, de la mise en forme de la pâte avant cuisson au saupoudrage de sucre sur les pains à la grecque en passant par le remplissage des moules à spéculoos. La qualité des produits et la fierté de mettre la main à la pâte : c’est ainsi que « Papy » Daniel - 43 ans de maison, prépensionné depuis quelques mois et guide passionné dès qu’il peut reprendre du service – résume le secret de la réussite de Dandoy, qui fut son unique employeur depuis l’âge de 15 ans et demi. Comme en écho, Pascal, pâtissierchocolatier et sous-chef de l’atelier, nous glisse à l’oreille : « Ce n’est pas mon atelier, mais c’est un peu mon chez-moi quand même. » Depuis deux ans, Dandoy a déménagé ses ateliers du centreville de Bruxelles vers un bâtiment plus spacieux à WoluweSaint-Lambert, avec à la clé de sérieux gains de productivité et une capacité à produire beaucoup plus qu’aujourd’hui. 16 Outline - D é cembre 2016 Bernard Helson - CEO Dandoy Outline - D é cembre 2016 17 Business Business Une longue histoire familiale le mieux à la philosophie de la Biscuiterie Dandoy. Du moins jusqu’il y a peu car ces dernières années, le commerce familial local s’est mué en une entreprise conquérante. En langage marketing : une marque globale. Comme Marcolini, par exemple, l’a réussi avant elle dans la chocolaterie. C’est en 1829 que Jean-Baptiste Dandoy, boulanger de son état, ouvre son commerce rue Marché aux Herbes, dans le cœur historique de Bruxelles. En 1858, il migre vers la rue au Beurre – où l’enseigne est installée aujourd’hui encore. Il faudra attendre la 4e génération pour qu’une femme, Fernande Dandoy, prenne les commandes de l’entreprise, ayant racheté les parts de ses trois frères pour six millions de francs belges. Elle est violoniste, son mari Valère Rombouts, professeur de gymnastique, mais bon sang ne saurait mentir… Leur fils Jean prendra la relève en 1979. Les ateliers déménagent vers une autre artère du centre-ville de Bruxelles, mais des investissements trop élevés et une conjoncture difficile plombent les résultats de Dandoy. Jean ne devra son salut qu’à la créativité et au développement de la gamme de produits. En 1984, son beau-fils Bernard Helson lui succède comme CEO. « Médecin de formation, je suis tombé amoureux de Catherine, la fille de Jean, et j’ai d’abord été autorisé à travailler dans l’entreprise comme étudiant », Spectaculoos speculoos Avec l’aide de consultants, la stratégie a été redéfinie et l’image de marque dépoussiérée. Logo repensé autour de la marque Maison Dandoy, design des emballages mis au goût du jour, points de vente relookés : l’entreprise a réussi le pari de conjuguer habilement tradition et modernité. Le concept store ouvert place Stéphanie, à Bruxelles, est l’incarnation de ce vent de fraîcheur. Bienvenue dans la maison du spectaculoos speculoos ! Dandoy compte aujourd’hui huit magasins à Bruxelles et en périphérie, ainsi qu’une boutique à Tokyo ; elle développe des corner shops dans les plus prestigieuses enseignes multimarques de la planète et cible résolument les marchés étrangers… mais aussi la Flandre, où elle est curieusement absente. Avec, à chaque nouvelle initiative, la volonté de surprendre et de séduire : un corner a, par exemple, été ouvert récemment chez Smets à Luxembourg, une enseigne hyper-pointue dans le prêt-à-porter de luxe et le design. « Nous finançons notre développement commercial sur fonds propres, en écartant tout système de la franchise. L’enjeu, pour nous, est de déterminer jusqu’à quel point l’entreprise peut grandir sans mettre en péril son savoir-faire et la transmission de celui-ci des aînés aux plus jeunes », précise Alexandre Helson. Alexandre est le fils aîné de Bernard Helson, CEO de l’entreprise, et de Catherine Rombouts, héritière en ligne directe du fondateur de la biscuiterie, Jean-Baptiste Dandoy. Il incarne la septième génération des actionnaires familiaux. Avec, à ses côtés, un frère (Antoine, qui a rejoint Dandoy en 2016), une sœur et trois cousines. « L’actionnariat familial n’a jamais été dispersé. Il se compose de deux branches seulement : la mienne et celle de ma belle-sœur Christine Rombouts », commente Bernard Helson. L’arrivée d’une nouvelle génération a stimulé, dès 2014, une réflexion commune des actionnaires familiaux autour de la consolidation et de la pérennité de l’entreprise. Ils se sont faits accompagner dans ce processus par Deminor. « Notre génération est fortement demandeuse de transparence, de dialogue et aussi de sens, et les générations futures le seront encore plus », estime Alexandre. Le secret de la longévité « Nous avons commencé par redéfinir la mission, la vision et les valeurs de l’entreprise », explique le CEO de Dandoy. Trois valeurs clés ont émergé de ce brainstorming : la pérennité, l’excellence et le respect (des anciens et des traditions). « Il est très rare que les valeurs familiales soient à ce point ancrées dans la vie d’une 18 Outline - D é cembre 2016 raconte ce dernier avec un sourire. Il est rejoint par sa belle-sœur Christine Rombouts en 1990. Depuis peu, Bernard Helson a fait entrer dans l’entreprise ses deux fils, Alexandre et Antoine. Dandoy a réalisé un chiffre d’affaires de 6 millions d’euros en 2015, en croissance de 50 % sur les quatre dernières années, et emploie 60 personnes. entreprise. L’enjeu est donc surtout de les faire connaître aussi en dehors de l’entreprise », relève Alain Englebert, partenaire du cabinet-conseil Family House, présent en tant qu’expert à la soirée d’ING. Est-ce là le secret de la longévité de la biscuiterie bruxelloise, restée ancrée dans son terreau familial malgré les soubresauts de l’Histoire ? Ce n’est pas à exclure. « Le cercle familial est demeuré assez étroit depuis la création de l’entreprise et nous avons toujours conservé une vision commune faisant primer l’avenir de l’entreprise sur les gains financiers à court terme. L’argent a toujours été placé au second plan », confie Bernard Helson. Le 31 août dernier, tous les actionnaires familiaux ont apposé leur signature sur le Pacte d’actionnaires qui est le fruit de ces deux années de travail. Parallèlement, le groupe a été restructuré avec la création de deux holdings patrimoniales chapeautant l’immobilier d’un côté et les activités d’exploitation de l’autre - une structure rendant possible l’arrivée d’administrateurs indépendants dans le futur. Une première étape ? « Je ne serais pas contre l’idée que l’on rédige aussi une charte familiale », glisse Alexandre Helson. D’ici là néanmoins, c’est sur une base déjà bien solide que la Biscuiterie Dandoy compte poursuivre son développement. • Outline - D é cembre 2016 19 Business Business Studio 100, le Disney européen Ni Mega Mindy ni les filles du groupe musical K3 ne surgiront au cours de la soirée durant laquelle les invités d’ING Private Banking visitent avec beaucoup de curiosité les studios télé de Studio 100 à Schelle, près d’Anvers. Pas de chance pour Outline : il n’y a aucun tournage ce soir-là. À moins que ce ne soit justement une opportunité car cela va nous permettre de visiter les différents studios et même de jouer les stars d’un jour ! Nous découvrirons aussi le studio de danse où des dizaines d’enfants concentrés répètent pour les futurs shows Samson & Gert (Fred & Samson pour le public francophone). Dans quelques semaines tombera le couperet : les enfants sauront qui pourra danser dans le spectacle de Noël et qui en sera exclu. Parfois, la concurrence se manifeste très tôt dans la vie… Fondée en 1996 par Gert Verhulst, Hans Bourlon et Danny Verbiest, Studio 100 a beau être une entreprise de divertissement, elle doit être rentable comme n’importe quelle société. Ce qui est bien le cas grâce à son approche à 360° du marché de la jeunesse – un modèle dont elle est très fière : à côté de séries télévisées très populaires au nord du pays, Studio 100 produit des films, des applications mobiles, des livres, exploite des parcs à thème (notamment Plopsa Coo en Wallonie), crée des spectacles et développe le merchandising, ce qui lui permet d’être présente à chaque instant de la vie des bambins. Les enfants (et leurs parents) ont accès n’importe où, n’importe quand et sur n’importe quel support à leurs stars favorites. Ce qui fait tinter le tiroir-caisse : en vingt ans, le chiffre d’affaires de Studio 100 a grimpé de 5 à 165 millions d’euros. Croissance interne et par acquisitions Le développement de Studio 100 n’a pas toujours été un long fleuve tranquille. Lors du débat passionnant qui a suivi la visite des studios, le cofondateur de l’entreprise, Hans Bourlon, et le CFO, Koen Peeters, ont ouvertement parlé des avancées mais aussi des revers qui ont ponctué la vie de Studio 100. Hans Bourlon : « Dès le départ, les choses n’ont pas été évidentes. Qui démarrerait aujourd’hui une entreprise avec pour seuls atouts un homme et son chien ? La série Samson & Gert n’intéressait au surplus que la VRT. Mais nous n’avions heureusement pas de problèmes financiers grâce à la gigantesque avance payée par Universal Music et au fait que les droits de diffusion télé étaient versés à l’avance. » Très vite, quelqu’un eut l’idée Koen Peeters - Studio 100 de créer un personnage de lutin et cela plut immédiatement à VTM. C’est ainsi que naquit Plop. Il sera suivi par Pat le Pirate, Mega Mindy et le petit clown Bumba. Au total, Studio 100 est à l’origine d’une vingtaine de personnages. Avec des histoires et des chansons, monter sur scène devenait une évidence. Les premiers spectacles de Noël ont attiré 150.000 personnes, un public à l’époque plus nombreux que celui de Torhout-Werchter ! « Grâce à ces excellents chiffres, nous avons pu éditer des livres et lancer le merchandising. L’entreprise s’est petit à petit professionnalisée. Ce qui devenait une exigence absolue à partir du moment où nous avons décidé de lancer des parcs à thème, un nouveau saut dans l’inconnu. Grâce à Bumba, ciblant les tout-petits, et à la série Anubis destinée aux jeunes adolescents, notre public-cible s’est par ailleurs élargi, ce qui nous a permis de stabiliser davantage nos revenus. » « Nous avons grandi de manière graduelle, mais avec des paliers importants », détaille Koen Peeters. « Il y eut d’abord, en 1999, le rachat de Melipark, qui était déficitaire et dont nous avons fait un parc à thème avec les personnages de Studio 100. Pour diluer le risque, cette opération a été menée conjointement avec la Vlaamse Mediamaatschappij (la maison-mère de Gert Verhulst et Hans Bourlon - Studio 100 20 Outline - D é cembre 2016 Outline - D é cembre 2016 21 Business VTM notamment, aujourd’hui rebaptisée Medialaan, ndlr). Nous avions constaté que l’offre de parcs d’attractions pour les moins de 12 ans était limitée. Nous savions aussi que les spectacles estivaux Samson & Gert attiraient près de 100.000 visiteurs belges supplémentaires à Efteling, aux Pays-Bas. » La levée de capitaux externes, après le départ du cofondateur Danny Verbiest, a constitué une deuxième étape importante. Cette ouverture du capital est allée de pair avec une plus grande discipline sur le plan financier, en termes de reporting et de gestion des risques. Enfin, en 2008 (soit en pleine crise financière !), Studio 100 a fait l’acquisition de la division « divertissement » de la société allemande EM. Sport Media AG Group, cotée en Bourse. Ce qui lui a permis de faire main basse sur un important portefeuille indépendant Au commencement, il y eut un chien Studio 100 a été fondée en 1996 par trois associés : Hans Bourlon, Gert Verhulst et Danny Verbiest. Leur unique production, commandée par la VRT, était Samson & Gert (qui deviendra Fred & Samson lors de sa diffusion dans le sud du pays). Vingt ans plus tard, l’entreprise s’est muée en un groupe international spécialisé dans les divertissements familiaux, une sorte de « Disney européen ». En se basant sur un modèle immersif, Studio 100 crée à la fois des chansons, des livres, des films, des spectacles et des pièces de théâtre gravitant autour de personnages populaires à la télévision. Par le biais d’acquisitions, Studio 100 s’est dotée de l’un des plus grands catalogues indépendants de classiques pour enfants au monde. Ils bénéficient actuellement d’un lifting dans les studios du groupe à Paris et Sydney. Studio 100 a par ailleurs développé par acquisitions plusieurs parcs à thème à succès en Belgique, aux Pays-Bas et en Allemagne, ainsi que trois chaînes de télévision populaires. Ses productions sont distribuées dans plus de 150 pays. Studio 100 a même pensé aux adultes créatifs : en collaboration avec des chefs belges réputés, elle a lancé la plate-forme culinaire Njam! Le groupe emploie actuellement un millier de personnes. 22 Outline - D é cembre 2016 Business de séries pour la jeunesse, avec des personnages mondialement connus comme Maya l’Abeille, Vic le Viking, Heidi et Fifi Brindacier. « Avec ces personnages, nous jouons la carte de l’économienostalgie », souligne Hans Bourlon. « Imposer de nouveaux personnages d’animation sur le marché nécessite des budgets marketing phénoménaux, alors que parents et grands-parents se font une joie de faire découvrir aux plus petits les héros de leur enfance. » Studio 100 a conçu des remakes en 3D de ces séries, qui n’ont absolument rien à envier aux séries plus récentes, et a décliné les produits dérivés. « Actuellement, nous tirons une majorité de notre chiffre d’affaires des parcs d’attractions et des spectacles. La musique était autrefois une vache à lait, mais le marché des CD a fortement décliné. C’est notre expérience immersive qui fait notre force : si la musique décline, quelque chose d’autre peut prendre sa place. Le fait que l’on ne puisse pas digitaliser l’ensemble du secteur du divertissement constitue un autre atout important », détaille Koen Peeters. Qui pointe dans la foulée la dernière étape importante franchie par l’entreprise : l’émission d’un emprunt obligataire en 2015, qui a permis de lever 90 millions d’euros pour financer la poursuite de son développement. « Celle-ci a été plusieurs fois sursouscrite, ce qui prouve que le public croit en nous. C’est un gros stimulant ! » Puissance créatrice « Je ne m’occupe plus de la gestion quotidienne, ce qui me permet de réfléchir posément avant de prendre des décisions stratégiques », indique Hans Bourlon. « Il y a dans l’entreprise une grande puissance créatrice car notre ligne de conduite est de donner sa chance à tout le monde et de faire confiance, et ce, à tous les niveaux. De nombreux jeunes sont embauchés chez Studio 100. Lors du choix du nouveau trio de K3, nous avons bénéficié d’une grande couverture médiatique, ce qui s’est aussitôt traduit par un afflux de candidatures dans ma boîte mails. Les parcs à thème nécessitent une tout autre approche : la sécurité et les procédures sont prépondérantes, et il n’est pas permis d’improviser. Il faut aussi se montrer très pragmatique : Plopsaland est situé sur la côte ; s’il fait beau, les gens préfèrent aller à la plage ; si le temps s’assombrit, ils viendront chez nous. Il faut en tenir compte dans la gestion du personnel. » Tout cela ne fait pas perdre le sommeil au fondateur de Studio 100. Quoique… « Comme chacun a pu le lire dans la presse, nous avons découvert au début 2016, à la faveur d’un contrôle interne, qu’un de nos collaborateurs trafiquait les factures et avait détourné des montants considérables à son profit grâce à d’ingénieuses constructions. J’ai d’abord eu quelques insomnies, puis j’ai agi rapidement. Une fois l’uppercut encaissé, j’ai recherché une solution. C’est cela aussi être une entreprise créative et donc émotionnelle. J’ai d’abord cru à une fraude limitée, mais son ampleur a progressivement gonflé. Nous avons commencé à voir des complots là où il n’y en avait pas. Bien que nous sachions que la procédure allait être longue, nous avons saisi les tribunaux pour que justice soit faite. Cela a été un grand choc dans l’entreprise ; au réfectoire, les employés se jetaient des regards suspicieux. Mais dès que l’affaire a été clarifiée, l’équipe s’est ressoudée, ce qui est une bonne chose. Nous sommes à nouveau prêts à attaquer ensemble les vingt prochaines années ! » • Outline - D é cembre 2016 23 Business Business Être un propriétaire d’une entreprise familiale impliqué est un métier à part entière On ne peut nier que les entreprises familiales ont connu une forte évolution au cours des 20 dernières années. À l’heure actuelle, la plupart des entreprises familiales sont dans une plus ou moins grande mesure professionnalisées. Mais cela ne signifie pas qu’il ne reste pas de pain sur la planche. La propriété et la possession d’entreprises familiales sera un thème important les prochaines années. Le sujet est abordé par l’avocat Jozef Lievens, spécialisé dans les entreprises familiales et co-administrateur délégué de l’Instituut voor het Familiebedrijf (l’Institut de l’entreprise familiale en Flandre). Dans son nouveau livre « Betrokken eigenaars, sterke familiebedrijven », il explique que les propriétaires qui gèrent leur entreprise avec passion, mais aussi sur un mode professionnel et structuré, apportent un avantage compétitif à l’entreprise. La propriété de l’entreprise familiale n’avait pas encore fait l’objet d’une grande attention jusqu’à ce jour. Pourtant, la possession dominante par une ou plusieurs familles est une caractéristique fondamentale des entreprises familiales. Dans une entreprise avec un actionnariat fortement morcelé, le pouvoir du management est beaucoup plus grand, justement parce que la propriété est répartie entre de nombreux propriétaires. Vision à long terme et intendance Dans de nombreuses entreprises familiales, toutes les actions sont la propriété de la famille. Dans de telles entreprises familiales, il règne une dominance totale de la famille, qui décide selon ses propres vues. Mais, en soi, une majorité des droits de vote à l’assemblée générale suffit pour avoir le contrôle de l’entreprise familiale. Concrètement : 50 % plus une des actions sont suffisants dans une société anonyme. Diamétralement opposée à cette réflexion à court terme, on trouve l’intendance de la plupart des propriétaires familiaux. Il s’agit ici de possession responsable avec un engagement à long terme de la famille à l’égard de l’entreprise familiale. Dans les sociétés cotées en Bourse, le seuil est encore plus bas. Étant donné que de nombreux actionnaires ne participent pas à l’assemblée générale, le seuil pour obtenir la majorité des droits de vote se situe parfois sous les 50 % plus un. L’organisation European Family Businesses qualifie une entreprise cotée en Bourse d’entreprise familiale dès que la famille possède 25 % ou plus des actions. 24 Outline - D é cembre 2016 Outre la propriété dominante, les entreprises familiales et non familiales diffèrent encore par leur philosophie de base. Les actionnaires dans les entreprises non familiales cotées en Bourse ont généralement peu de liens avec l’entreprise et se focalisent sur le rendement qu’ils peuvent tirer de leur investissement. Cela crée un climat d’impatience avec peu de loyauté vis-à-vis de la société dans laquelle ils inves­tissent. Aujourd’hui ils préfèrent l’acier, demain les cacahuètes. L’intendant chérit l’entreprise familiale et vise à la transmettre à la génération suivante dans un meilleur état. Lors de la Journée de l’entreprise familiale organisée par l’Instituut voor het Familiebedrijf au début octobre 2016, Herman Van de Velde, administrateur du producteur de lingerie du même nom, a déclaré : « Je considère presque de mon devoir de transmettre l’entreprise plus belle et plus grande que lorsque je l’ai reçue moi-même de mes parents. » L’approche de l’intendance signifie qu’on ne raisonne pas qu’en termes de succès financier et de rendement. Les objectifs sociaux Outline - D é cembre 2016 25 Business ou les réalisations technologiques sont aussi importants. Diverses études et analyses ont néanmoins démontré que les entreprises familiales affichent de meilleures performances financières que les entreprises non familiales. Des chiffres récents sur le cours de la Bourse du fabricant de biscuits Lotus Bakeries et de Sioen Industries (textile technique) au fil des ans le confirment. L’influence des propriétaires Dans les entreprises où les actions et donc la possession sont réparties entre de nombreuses parties, l’influence d’un actionnaire est minimale. Il en va autrement dans les entreprises familiales avec des propriétaires dominants. Les propriétaires exercent une forte influence sur la culture d’entreprise, la stratégie et la gouvernance. Dans une entreprise familiale à succès, la culture et les valeurs sont des moteurs importants. Michèle Sioen de Sioen Industries explique à ce sujet : « La force des entreprises familiales est leur capacité de changer. Leurs dirigeants sont disposés à aller loin pour maintenir leur entreprise et la développer. Dans les bonnes et moins bonnes périodes. C’est la force de la famille qui surpasse tout. Ce qui est beau, c’est que les chefs d’entreprises familiales parviennent à transmettre cette force familiale à tous leurs collaborateurs. Le sentiment d’appartenance y est souvent très grand. » Dans les entreprises avec une possession morcelée, la détermination de la stratégie relève du domaine du management. Le conseil d’administration y approuve la stratégie. Dans les entreprises familiales, par contre, la stratégie doit cadrer avec la vision des propriétaires, qui est formulée par ces derniers. Elle est donc définie en partie par les visions des propriétaires. L’architecture de la gouvernance de l’entreprise familiale est déterminée dans une large mesure par les propriétaires. Ils définissent la façon dont la gouvernance est organisée, qui fait partie du conseil d’administration, si des administrateurs externes sont nommés et quelles sont les priorités. Paul Buysse, homme d’affaires et auteur du code de même nom pour la gouvernance d’entreprise : « La gouvernance a aussi gagné en importance dans les entreprises familiales. Nous voyons que la transparence et le contrôle sont de plus en plus enracinés dans leur administration. Ce qui est essentiel, également pour les entreprises qui ne sont pas cotées en Bourse. Je suis particulièrement satisfait de voir que le Code Buysse donne également lieu à de meilleures entreprises familiales. » La propriété évolue dans le temps L’actionnariat des entreprises familiales est une matière soumise à nombre d’aspects sensibles : juridiques et financiers, mais surtout émotionnels et relationnels. De plus, il s’agit d’une donnée évolutive : à chaque stade ses défis. Au fur et à mesure 26 Outline - D é cembre 2016 Business que l’entreprise familiale est en mesure d’affronter les défis de façon constructive, la transition au stade suivant se déroule plus facilement. Le premier stade est celui du propriétaire/fondateur qui exerce le contrôle. La propriété et l’administration de l’entreprise familiale sont ici entre les mains d’une seule personne (ou d’un couple), qui est le patron à tous points de vue. La délégation n’est pas son point fort et le personnel est censé accepter inconditionnellement les idées du propriétaire qui exerce le contrôle. Dans cette phase, il n’est généralement pas ou à peine question de gouvernance. Ce stade connaît des défis importants : l’entreprise est extrêmement dépendante d’une seule personne, avec tous les risques qui s’ensuivent. Celle-ci devra progressivement passer à l’arrièreplan et partager le pouvoir avec une équipe de direction. Le suivi requiert de l’attention. Et puisque le propriétaire qui exerce le contrôle est absorbé par l’entreprise familiale, on ne prête parfois pas assez attention à la famille. Au stade de l’équipe des frères et sœurs, la propriété est répartie entre frères et/ou sœurs. Ils forment une équipe, parfois un véritable partenariat où frères et sœurs fonctionnent côte à côte en égaux. L’équipe des frères et sœurs doit avoir la même vision sur l’entreprise et doit pouvoir collaborer avec aisance. À ce stade aussi, il y a de grands défis. L’entreprise familiale et ses principaux acteurs doivent s’habituer à un nouveau modèle de leadership. Les nouveaux leaders doivent développer et implémenter leur propre stratégie. Et il arrive parfois que la collaboration pâtisse de conflits personnels historiques. C’est pourquoi une professionnalisation du management est indiquée. Au troisième stade, celui du réseau de cousins et cousines, l’entreprise familiale a déjà bien grandi. La propriété est fortement répartie entre un grand nombre d’actionnaires, qui sont généralement cousins et cousines. À ce stade, la distance entre les propriétaires et l’entreprise familiale s’accroît. Des efforts doivent être fournis pour la surmonter et rationaliser les rapports entre les différents groupes d’actionnaires. La gouvernance au niveau de l’administration est un must absolu, tout comme une bonne gouvernance familiale équilibrée. Lorsqu’on continue de remonter les générations et que les propriétaires ne sont même pas des cousins ou cousines mais des membres éloignés de la famille, il est question d’une dynastie familiale. Des exemples belges concernent entre autres Solvay, Bekaert et Colruyt. Qui est Jozef Lievens ? Les rivalités personnelles passent à l’arrière-plan. Le défi consiste à présent à maintenir l’unité dans le groupe. « Bekaert a développé une approche structurée à cet effet », explique l’administrateur Baudouin Velge : « Nous avons un intranet où sont regroupées toutes les informations concernant la famille et l’entreprise. Ainsi, tout le monde a facilement accès aux informations. Et après la publication des résultats semestriels, nous organisons systématiquement une réunion – qui ressemble à une réunion d’analystes – spécifique pour les actionnaires familiaux, où le président et le management viennent donner des explications. La réunion de la famille et du management assure une implication forte et durable dans l’entreprise. » Jozef Lievens est conseiller pour les entreprises familiales et avocat. Il est professeur à l’EHSAL Management School, cofondateur de l’Instituut voor het Familiebedrijf et auteur de différents ouvrages sur les entreprises familiales. Une nouvelle mentalité : des propriétaires professionnels et impliqués Au fur et à mesure que de plus en plus d’entreprises familiales vieillissent et se retrouvent dans une phase plus avancée, l’importance de la possession augmente. La question est la suivante : quelle mentalité s’avère alors indispensable pour survivre en tant qu’entreprise familiale et rester fructueuse sur la durée ? Les propriétaires doivent adopter une autre attitude à deux niveaux. Ils doivent réaliser que le fait d’être propriétaire requiert une approche professionnelle : il s’agit d’un métier en soi. Et il faut gérer délibérément les défis de la possession. En deux­ ième lieu, il est important de devenir un propriétaire impliqué. Le président d’Alcopa Axel Moorkens l’a formulé comme suit : « Chacun continue de jouer un rôle. Tous les membres de la famille sont dans le stade, tels des spectateurs impliqués. Si l’entreprise se porte bien, ils doivent exiger que la barre soit placée plus haut. Si les affaires vont mal, ils doivent continuer de soutenir l’équipe. Ils doivent être plus que des actionnaires financiers. » Les propriétaires impliqués s’investissent donc activement en tant qu’actionnaires et ont confiance dans l’entreprise familiale et sa direction. Ils sont également fiers de faire partie de l’entreprise familiale. C’est justement pour cela que les propriétaires impliqués sont aussi qualifiés de propriétaires responsables. Le livre « Betrokken eigenaars, sterke familiebedrijven » comporte huit actions, qui font des actionnaires d’une entreprise familiale des propriétaires impliqués et qui les aident donc aussi à faire de la propriété un avantage compétitif pour l’entreprise. Il s’agit de ce qui suit : • Préciser et communiquer la vision des propriétaires, et en particulier l’objectif et les valeurs de la famille ; • Organiser la gouvernance de l’entreprise familiale, entre autres via un conseil d’administration actif ; • Organiser la gouvernance familiale, par exemple via une charte familiale et un forum familial (ndlr : voir l’article Outline, avril 2016) ; • • • • • Attirer d’excellents managers et administrateurs externes ; Se comporter comme des propriétaires impliqués ; donner l’exemple en se basant sur les bonnes intentions ; Développer des compétences pour communiquer et gérer les conflits ; Régler le suivi (en temps utile) ; Former les futurs propriétaires. Les propriétaires qui s’attellent à cette tâche ont évidemment droit à des revenus financiers provenant de leur entreprise. Le propre capital est sujet au risque et il est par conséquent logique que les propriétaires reçoivent une compensation à cet effet, par exemple sous la forme de dividendes. Mais un aspect encore plus important concerne l’identification avec l’entreprise et ses valeurs, la fierté et le respect dont ils jouiront. Colruyt ou Bekaert en sont des exemples : deux entreprises familiales où de nombreux efforts sont fournis pour être des propriétaires impliqués, même dans une phase particulièrement complexe et avec plusieurs propriétaires. • Le livre « Betrokken eigenaars, sterke familiebedrijven » est paru chez LannooCampus : http://www.lannoo.be/betrokken-eigenaars-sterke-familiebedrijven L’ouvrage existe uniquement en néerlandais. Outline - D é cembre 2016 27 Wealth Engineering Wealth Engineering Acquérir un bien immobilier en prenant une avance sur votre assurance groupe Vu le niveau bas actuel des taux d'intérêt, beaucoup de personnes veulent aujourd'hui investir dans l'immobilier, en faisant par exemple l'acquisition d'un appartement à la mer ou d'un immeuble de rapport. Vous pouvez le faire en investissant une partie de vos économies, en souscrivant un prêt hypothécaire, ou en combinant les deux. Mais il existe aussi une autre possibilité... Avant de partir à la pension, vous pouvez en effet investir une partie de votre assurance groupe, dont le rendement ne cesse de diminuer, dans l'immobilier. Comment procéder ? Dans quel type de biens immobiliers pouvez-vous investir ? Quelles sont les conséquences fiscales d'un tel investissement pour votre assurance groupe ? À quoi faut-il être attentif ? Assurance groupe Comme vous le savez, vous pouvez, en tant qu'entrepreneur, vous constituer une pension extralégale fiscalement intéressante par l'entremise de votre société, au moyen de votre assurance groupe ou de votre EIP (l'équivalent d'une « assurance groupe pour personne unique »). Votre société paie alors les primes qui sont versées dans le contrat d'assurance groupe. Les primes sont déductibles fiscalement dans son chef, sous certaines conditions. Ainsi, elles doivent entre autres satisfaire à la règle dite des 80 %. Cela signifie que votre pension de retraite (légale et extralégale), exprimée en rentes annuelles, ne peut pas dépasser plus de 80 % de votre dernière rémunération annuelle brute normale. Plus votre rémunération est élevée, plus votre société peut déduire des primes. De nombreux entrepreneurs se constituent ainsi une épargne pension plus que convenable tout au long de leur carrière. Le versement à terme du capital vous est en principe imposé à maximum 20 % (voir ci-dessous). Les employés peuvent eux aussi se constituer un capital pension extralégal, au moyen d'une assurance groupe financée (en partie) par l'employeur. Pour les cadres supérieurs en particulier, son montant peut vite devenir substantiel. Quel rendement ? Généralement, il n'est pas très élevé. Alors que les primes versées offraient encore un rendement de plus de 4 % il y a quelques années, les employés ne bénéficient maintenant plus que d'un rendement variable allant de 1,75 % à 3,75 %, tandis que les indépendants doivent se contenter de moins de 1,75 %. Et cela ne s'améliorera probablement pas dans les années à venir... Il serait dès lors utile de pouvoir prélever anticipativement ce capital, bloqué en principe jusqu'à votre pension, pour tenter d'obtenir par vous-même un rendement plus élevé. À partir de quand pouvez-vous prélever le capital ? Depuis le 1er janvier 2016, une pension complémentaire telle qu'une assurance groupe ou une PLCI (pension libre complémentaire pour indépendants) ne peut plus être versée qu'à la date de la pension légale (ou à la date où les conditions pour prendre sa pension légale sont réunies, si vous souhaitez continuer à travailler plus longtemps). Cela signifie que vous ne pourrez prélever votre capital pension extralégal que lorsque vous prendrez effectivement votre pension, ou répondrez aux exigences en matière de pension légale, à 65 ans (bientôt même à 67 ans) et pas plus tôt. Dans beaucoup de contrats, il est néanmoins stipulé que vous pouvez déjà réclamer votre pension complémentaire à vos 60 ans, même si vous continuez à travailler. En règle générale, ce ne sera toutefois plus possible étant donné que la nouvelle loi s'applique également aux contrats en cours (à l'exception d'un certain nombre de mesures transitoires pour les personnes qui auront au minimum 55 ans en 2016). Fiscalement plus avantageux de ne demander votre capital pension qu'à partir de 65 ans Si vous prélevez le capital de votre assurance groupe avant votre 65e anniversaire, vous serez pénalisés sur le plan fiscal. Si vous continuez à travailler jusqu'à 65 ans, vous ne payerez qu'un impôt de 10 % sur votre capital pension constitué (augmenté de la taxe communale). Si vous pouvez prendre votre pension à 60 ans et que vous demandez votre capital à ce moment-là, vous paierez en principe 20 % d'impôts. Ce taux chute à 18 % lorsque vous avez 61 ans, et à 16,5 % lorsque vous en avez 62. Si vous ne prélevez votre capital qu'à vos 65 ans et que vous continuez à travailler jusquelà, vous n'êtes imposés qu'à 10 %. Toutefois, si vous ne prélevez Mercator Marina Ostende - © BELPRESSNEWS 28 Outline - D é cembre 2016 Outline - D e cember 2016 29 Wealth Engineering votre capital qu'à vos 65 ans, mais que vous avez arrêté de travailler plus tôt, vous paierez là aussi 16,5 %. Le montant sur lequel l'impôt est prélevé se calcule en déduisant du capital constitué une cotisation INAMI de 3,55 %, et, dans la plupart des cas, une cotisation de solidarité supplémentaire de 2 %. Vous ne payez pas d'impôts sur la participation bénéficiaire, mais payez bel et bien sur les cotisations INAMI et de solidarité. Une avance sur votre contrat Il existe cependant une manière fiscalement intéressante de prélever avant vos 60 ans une partie conséquente de votre capital pension extralégal déjà constitué (votre « réserve »), à condition que vous investissiez dans de l'immobilier. Vous devez en effet utiliser cette avance pour acheter, construire, transformer ou rénover un bien immobilier. En outre, le bien dans lequel vous investissez l'avance doit pouvoir « générer des revenus imposables ». Cela ne signifie toutefois pas que vous devez nécessairement mettre le bien en location. Cette condition peut être remplie dans le cas d'un bien non loué pour lequel vous ne devez déclarer que le revenu cadastral, ainsi que dans le cas de votre habitation « propre ». Le fait que le bien doit générer des revenus signifie donc aussi que le bien que vous voulez vendre, construire, transformer ou rénover, doit vous appartenir en pleine propriété, en usufruit, en emphytéose ou en superficie. Si vous n'êtes que nu-propriétaire, c'est impossible, car vous ne pouvez en principe pas percevoir les revenus du bien immobilier. Vous ne pouvez pas non plus utiliser l'avance pour acheter un bien pour vos enfants, par exemple. Enfin, le bien doit être situé en Belgique ou dans un autre pays de l'Espace économique européen (EEE). Par exemple, vous pouvez aussi utiliser cette avance pour acheter une résidence secondaire en France. Il n'est pas obligatoire que vous habitiez dans le bien, ni même qu'il s'agisse d'une habitation. Autrement dit, cela peut tout aussi bien être un box de garage, un terrain à bâtir, un magasin, etc. Une nouvelle terrasse, l'aménagement d'un jardin ou d'une piscine, des travaux de peinture, etc. entrent aussi en ligne de compte. Vous pouvez même retirer une avance de votre assurance groupe pour rembourser anticipativement un prêt hypothécaire, ce qui peut parfois s'avérer plus avantageux que de continuer à rembourser ce prêt. 30 Outline - D é cembre 2016 Wealth Engineering Fiscalité Vous n'êtes pas imposés au moment du retrait de l'avance ! Vous n'êtes en effet imposés sur l'entièreté du capital qu'au moment où ce capital, évidemment diminué de l'avance pré­ levée, vous est versé définitivement. Quelle provision pouvez-vous prélever ? Jusqu'au 1er janvier 2015, vous pouviez prélever une avance d'environ 60 % de votre réserve. Pour le calcul de la provision, votre assureur tient compte des frais de rachat dus (qui peuvent s'élever à environ 5 %), des cotisations sociales (3,55 % de cotisation INAMI et 2 % de cotisation de solidarité) et des impôts (avant le 1er janvier 2015, maximum 33,31 %, taxe commune comprise). Si vous aviez par exemple déjà constitué une réserve de 150.000 euros et vouliez prélever une avance maximale, le calcul était le suivant : 150.000 euros - 5 % - 5,55 % - 33,31 % = 89.759 euros. En bref, vous pouviez retirer de votre réserve de 150.000 euros une avance de 89.759 euros, soit environ 60 %. Depuis le 1er janvier 2015, vous ne pouvez plus prélever votre capital pension avant 60 ans. Même si vous mettez un terme à votre mandat de gérant ou de dirigeant de votre société avant votre 60e anniversaire, vous ne pouvez plus faire verser (racheter) votre assurance groupe de manière anticipative. Cela implique aussi que vous payez maximum 20 % d'impôts sur votre capital pension. Il s'agit en fait du tarif applicable pour le versement de votre assurance groupe à 60 ans. Grâce à ces règles modifiées, vous pouvez aussi en principe retirer une provision plus élevée de votre assurance groupe. Votre assureur peut en effet tenir compte d'un impôt plus bas lors du calcul de la provision maximale : 20,19 % au lieu de 33,31 % (taxe communale comprise). Revenons à notre exemple. Nous partons à nouveau d'une réserve déjà constituée de 150.000 euros. Vous désirez retirer une avance maximale. Compte tenu des frais de rachat de 5 %, des cotisations sociales de 5,55 % (3,55 % + 2 %) et d'un impôt de 20,19 %, votre avance maximale est calculée comme suit : 150.000 euros - 5 % - 5,55 % - 20,19 % = 107.417 euros. De votre réserve de 150.000 euros, vous pouvez donc dorénavant prélever une avance de 107.417 euros, soit environ 71 %. Autrement dit, vous pouvez désormais prélever 17.658 euros d'avance en plus. Attention : certains assureurs ne veulent pas suivre la nouvelle méthode, et beaucoup s'en tiennent jusqu'à nouvel ordre à « l'ancien » calcul. En d'autres termes, ils ne voudront pas verser 70 % du capital déjà constitué comme avance, mais (toujours) uniquement 60 %. Une avance plus importante via un back service ? Si vous avez encore de la place pour un back service, vous pourrez faire accroître en une fois le capital constitué que vous pouvez prélever, et donc l'avance elle aussi, en effectuant un versement unique à votre assurance groupe. Un back service est une sorte de « prime de rattrapage » pour les premières années durant lesquelles votre société n'a pas versé la prime déductible maximale à votre assurance groupe. Ce sera par exemple le cas si vous n'aviez pas d'assurance groupe directement au lancement de votre société, ou si votre société n'a pas versé les primes maximales dès le départ. Si votre rémunération est plus élevée maintenant, on estime également, pour votre assurance groupe, que votre rémunération a toujours été aussi élevée, et que votre société a donc toujours pu verser une prime déductible aussi élevée que maintenant. Grâce à cela, votre société peut maintenant verser de manière rétro­active une prime supplémentaire, afin de compenser la part de la prime qu'elle aurait jadis dû payer en plus (fictivement). Ce back service (autrement dit, cette prime de rattrapage), est fiscalement déductible pour votre société - au même titre que les primes normales qu'elle verse à votre assurance groupe -, à condition bien sûr que la limite des 80 % soit respectée (voir ci-dessus). Vous pouvez aussi en principe verser une prime de back service pour les années (maximum dix) durant lesquelles vous avez été actif hors de votre société, comme indépendant en nom personnel ou comme employé. À quoi faut-il être attentif ? Vous ne pouvez retirer une telle avance que si cette possibilité est prévue dans votre contrat de pension, ce qui n'est pas toujours le cas. Vous devez donc d'abord vérifier auprès de votre assureur. Si votre contrat ne vous permet pas de prélever une avance, vous pouvez demander à votre assureur d'adapter votre contrat, via un avenant par exemple. Si le bien que vous avez acheté grâce à l'avance sur votre assurance groupe « disparaît de votre patrimoine » plus tard (par exemple parce que vous le revendez, le donnez à vos enfants...), vous devez rembourser l'avance prélevée ou investir à nouveau dans de l'immobilier. Il n'est pas possible de donner uniquement la nue-propriété. En effet, dans le cadre d'une planification successorale, il arrive régulièrement que seule la nue-propriété du bien soit léguée, et que les donateurs (généralement les parents) conservent l'usufruit à vie. Le don ou la vente de la nue-propriété sont considérés comme une « disparition d'une partie de votre patrimoine ». Vous devez donc aussi rembourser l'avance dans ce cas-ci. Pour plus d'informations, n'hésitez pas à contacter votre Private Banker. • Outline - D e cember 2016 31 Reportage Reportage Abattre les murs de l’indifférence Abattoir, la société qui exploite le site des anciens abattoirs d’Anderlecht, en Région bruxelloise, a l’ambition d’y créer un énorme pôle alimentaire durable qui soit en interconnexion avec le tissu urbain. De nombreuses initiatives sont déjà prises pour développer les liens avec les habitants du quartier et les Bruxellois en général. Comme chaque mercredi midi, d’agréables parfums se répandent sous l’immense halle métallique qui est le cœur historique des abattoirs de Cureghem, à Anderlecht. Un site de 10,5 hectares en plein cœur de Bruxelles, le « ventre » de la capitale : bien que le marché aux bestiaux ait disparu en 2009, quelque 230.000 animaux sont toujours abattus et découpés ici en l’espace d’une année et chaque week-end, plus de 100.000 personnes arpentent les allées du gigantesque marché alimentaire qui se tient sous la halle et alentours. Ce mercredi, c’est le fumet d’une soupe aux tomates et une bonne odeur de cannelle qui titillent les papilles de la vingtaine de personnes attablées devant le fourneau de Cyrille. Cuisine mobile, tables et bancs repliables, toiles cirées aux couleurs vives : on s’attable pour manger ou simplement pour papoter. D’avril à octobre, le Barattoir est ouvert à tous : la soupe et le dessert coûtent 1 euro, le plat (une assiette de légumes délicieusement épicés) 3 euros. Foodmet © Filip Dujardin Ce pop-up restaurant végétarien est l’une des nombreuses initiatives de l’ASBL Cultureghem, dont la vocation première est de créer du lien avec les habitants du quartier, une zone métissée et socio-économiquement défavorisée de la Région bruxelloise. Le poumon économique de Cureghem, c’est la SA Abattoir qui exploite l’ensemble du site et garantit ainsi le gagne-pain de 700 équivalents temps plein, pour la plupart faiblement scolarisés. « Nous ne vendons rien nous-mêmes, nous louons des espaces à une trentaine 32 Outline - D é cembre 2016 de sociétés actives dans la filière viande, à deux grossistes en poissons et à 650 maraîchers qui viennent ici écouler leur production », explique Joris Tiebout, administrateur délégué d’Abattoir. « Notre société a été créée en 1983 lorsque la commune d’Anderlecht a pris la décision de fermer l’abattoir, largement déficitaire. Cent soixante petits actionnaires - des commerçants, des professionnels de la filière viande, des restaurateurs du quartier, des propriétaires de biens avoisinants, Outline - D é cembre 2016 33 Reportage Reportage etc. – ont constitué le tour de table d’Abattoir, dotée d’un capital de départ de 2,5 millions d’euros. » Le beau-père de Joris Tiebout exploitait un commerce de salaisons dans le quartier et comme tous les membres de la famille, cet ingénieur qui s’était spécialisé dans les énergies renouvelables a été invité à souscrire des parts du capital… avant d’intégrer l’entreprise et de ne plus la quitter. une tonne et demie de fruits et légumes est collectée et distribuée chaque semaine à plus de 200 personnes. Très récemment, le collectif de volontaires de Collectmet s’est lui-même structuré en ASBL (Alimentab). « Et ce qui est fabuleux, pointe Eva, c’est que les deux tiers d’entre eux étaient, au départ, des bénéficiaires de ces dons alimentaires ! » Cuisiner, partager et dialoguer Dès la constitution d’Abattoir, le conseil d’administration a insisté sur le développement inclusif de l’entreprise. Celle-ci soutient donc de nombreuses initiatives économiques et socioculturelles dans le quartier. Elle est aussi à l’origine de la création de l’association Cultureghem, dirigée par une jeune femme volontaire, Eva De Baerdemaeker. « Mon Joris Tiebout, administrateur délégué d’Abattoir plan, dit celle-ci avec humour, est de ne pas faire de plans. Ce sont les attentes des habitants du quartier qui nous guident. » C’est ainsi qu’a été lancé, en tive de cohésion sociale et, pour nous, une sorte de laboratoire 2013, le projet Kookmet : cuisiner avec les personnes intéresà idées. Mais de nombreuses écoles, entreprises et adminissées un repas sain à prix réduit et échanger tout en le prétrations publiques ont progressivement demandé à pouvoir parant. Chaque vendredi, du printemps à la fin de l’automne, participer. Nous avons alors fait le choix de mêler ces différents ce repas est partagé par une centaine de personnes dans le publics : les élèves des écoles du quartier ont donc fait les couloir n° 5 du marché couvert. Au fil des mois, certains bénécourses et cuisiné avec des fonctionnaires de la Communauté ficiaires sont venus gonfler les rangs des bénévoles et Kookmet flamande ou des employés de grandes entreprises. » a pris une tout autre dimension. « C’était au départ une initiaDans la foulée de Kookmet est née l’initiative Barattoir ainsi qu’un autre projet visant à lutter contre le gaspillage alimentaire : Collectmet. « À la fin de chaque journée de marché, des personnes dans le besoin cherchaient à récupérer les fruits et légumes invendus, parfois au prix de quelques bousculades. Un collectif de bénévoles soutenu par Cultureghem et Abattoir a donc décidé d’organiser chaque dimanche le tri des invendus et leur répartition. Ce qui n’est pas emporté le jour même est conservé au froid et des associations en prennent livraison le lendemain », détaille Eva De Baerdemaeker. Une tonne, voire « Le projet Collectmet permet de distribuer chaque semaine au moins une tonne de fruits et légumes à des personnes dans le besoin » Eva De Baerdemaeker de l'association Cultureghem 34 Outline - D é cembre 2016 Eva De Baerdemaeker Ce sont également certains surplus du marché de Cureghem qui sont utilisés pour préparer des cookies le mercredi après-midi avec des enfants du quartier. Pendant que certains cuisinent, d’autres s’essayent à la boxe, dansent ou réalisent des constructions en bois. Transformée en immense plaine de jeux urbaine, la halle d’Abattoir résonne aussi des rires des mamans, que ce moment de partage familial sort d’un relatif isolement social. Ce projet-là s’appelle Ketmet, comme un clin d’œil à la population bruxelloise. Un pôle alimentaire durable Bien des choses restent à faire pour sortir Cureghem d’une « ghettoïsation » galopante. Mais il faut se projeter dix à vingt ans en avant pour comprendre que ce lieu est peut-être celui de tous les possibles. Le masterplan élaboré par la société Abattoir prévoit le développement sur le site d’un pôle alimentaire durable reposant sur l’économie circulaire et le circuit court, avec, en complément, une nouvelle mixité de fonctions pour tresser des liens plus solides encore avec le tissu urbain environnant. Ce projet inclut notamment la construction de logements. Le Foodmet, la nouvelle halle alimentaire d’Abattoir inaugurée en 2015, est la première étape du masterplan. Joli symbole : ce bâtiment a été choisi par le curateur de la dernière Biennale d’architecture de Venise pour illustrer sa thématique « Monument pour une société ouverte ». Sur le toit du Foodmet se construit actuellement une ferme urbaine de 4.000 m2 – la plus grande d’Europe. De longues rangées de légumes verdurisent déjà un côté de la toiture. En vis-à-vis vont se dresser bientôt un ensemble de serres qui seront chauffées grâce à la récupération de chaleur sur les groupes frigorifiques de l’abattoir. La start-up BIG – pour Building Integrated Greenhouses –, qui loue l’espace de toiture à Abattoir, compte y développer un projet d’aquaponie, c’est-à-dire un élevage de poissons (aquaculture) combiné avec la culture de légumes, de pousses et d’herbes aromatiques hors sol (hydroponie). Le toit du Foodmet abritera aussi la terrasse d’un restaurant – avec vue panoramique sur Bruxelles - qui s’approvisionnera en partie sur le site même. Abattoir est actuellement à la recherche d’un exploitant pour celui-ci : avis aux chefs qui nous liraient ! Dans les caves voûtées du site vient, par ailleurs, de s’implanter une champignonnière. La prochaine étape du masterplan est plus ambitieuse encore : elle englobe la restauration de la halle construite en 1885, le réaménagement des espaces extérieurs réservés au marché hebdomadaire et la construction d’un tout nouvel abattoir. Un investissement de 16 millions d’euros, financé en partie par la Région de Bruxelles-Capitale et l’Union européenne via les fonds FEDER (Fonds européens de développement économique et régional). « En regroupant dans un seul bâtiment les lignes d’abattage, les salles de découpe et l’ensemble de Kookmet : cuisiner avec des volontaires un repas sain à prix réduit Outline - D é cembre 2016 35 Reportage Reportage la filière viande, nous libérerons une énorme superficie que nous pourrons affecter à d’autres fonctions : bureaux, petits commerces, logements et pourquoi pas écoles », détaille Joris Tiebout. Depuis sa création en 1983, Abattoir a investi sur le site 58 millions d’euros, avec l’appui d’ING Belgique qui est le banquier principal de l’entreprise. Pour la réalisation de la deuxième phase de son masterplan, Abattoir compte procéder à une importante augmentation de capital. « C’est l’étape-clé pour que l’on devienne un grand pôle alimentaire urbain diversifié et durable. Le projet Manufakture d’Abattoir incarnera, pour les autres villes européennes, le mariage réussi entre des activités productives et la vie urbaine. » • Vue panoramique du site Abattoir 36 Outline - D é cembre 2016 Les collaborateurs d’ING Belgique soutiennent des initiatives durables Dans le cadre de sa politique de durabilité, ING Belgique propose depuis 2014 à ses collaborateurs de convertir un jour de travail par an en journée de volontariat. Environ 800 collaborateurs de la banque ont fait cette démarche en 2016. En octobre dernier, une vingtaine d’entre eux ont rejoint les bénévoles de l’ASBL Cultureghem. Ceuxci sont au nombre de 150 à 200 selon les périodes de l’année et leur engagement sans faille rend possible de multiples activités socioculturelles sur le site de Cureghem. Nos collaborateurs les ont aidés à désencombrer un des bâtiments de l’abattoir et à trier des montagnes d’objets et de vêtements destinés à être distribués aux personnes du quartier dans le besoin. ING Belgique est, par ailleurs, l’une des sociétés partenaires du Boeremet, un afterwork qui se déroule une fois par semaine sous le marché couvert de l’abattoir. Jusqu’à 4.000 personnes s’y pressent certains jeudis soir, à la belle saison, et les employés de la banque sont nombreux à profiter de l’espace qui leur y est réservé. Intéressé(e) par l’une des initiatives de l’ASBL Cultureghem, par exemple l’organisation d’un team building « cuisine » ? N’hésitez pas à prendre contact avec l’association ! www.boeremet.be et www.kookmet.be Les collaborateurs d’ING Belgique ne sont jamais à court d’idées « vertes ». Le saviez-vous ? Une équipe du département Finance and Risk Services est à l’origine d’un potager bio sur les toits du bâtiment de la banque au Cours Saint-Michel à Bruxelles. Beaucoup plus petit, certes, que celui qui se développe sur le site d’Abattoir, mais quand même ! Les initiateurs du projet souhaitent développer par ce biais des liens avec les riverains et des clients de la banque vivant dans le quartier. Le fruit de leur récolte est confié à un CPAS bruxellois. Suivant la même philosophie, les collaborateurs d’ING Belgique peuvent désormais commander des paniers bios. Envie d’en savoir plus sur la politique de durabilité d’ING Belgique ? https://www.ing.com/ING-in-Society/Sustainability.htm Quelques bénévoles de l’ASBL Cultureghem Outline - D é cembre 2016 37 Événement Événement Expo Guggenheim – Full Abstraction à l’ING Art Center D’une rive à l’autre de l’Atlantique Certaines expositions attirent le visiteur grâce à des œuvres nouvelles ou singulières. D’autres ont plus de profondeur encore car elles possèdent une histoire sous-jacente. C’est incontestablement le cas de l’expo « Guggenheim – Full Abstraction » qui a lieu actuellement à l’ING Art Center. Philip Rylands, directeur de la Collection Peggy Guggenheim à Venise, nous fait remonter le temps à la rencontre de cette femme hors du commun. Les débuts de la collection Peggy Guggenheim « L’histoire commence en réalité avec Solomon R. Guggenheim, qui s’est enrichi grâce à l’exploitation des mines et est devenu un fervent collectionneur d’œuvres d’art. D’abord composée de tableaux anciens, sa collection va se focaliser progressivement sur l’art abstrait », raconte Philip Rylands. Sa nièce Peggy, née à New York en 1898, évolue très jeune dans la bonne société new-yorkaise et parisienne. Lors de son vingt-et-unième anniversaire, celle-ci fait un héritage important. Elle travaille à ce moment bénévolement dans une librairie où se développe son intérêt pour la littérature et l’art. En 1921, elle se rend à Paris et y fait la connaissance de l’écrivain français Laurence Vail. « Peggy avait un faible pour les hommes intelligents et cultivés », glisse Philip Rylands. « C’est Vail, devenu l’époux de Peggy et le père de ses deux enfants, qui l’introduit dans le cercle des artistes parisiens où elle apprend notamment à connaître Marcel Duchamp et Constantin Brancusi. » En 1928, elle quittera Laurence Vail pour le critique littéraire anglais John Holms, qui décédera six ans plus tard. Installée à Londres, Peggy Guggenheim y fonde, en janvier 1939, la galerie d’art Guggenheim Jeune. Elle est conseillée par Marcel Duchamp et aussi par Samuel Becket, avec qui elle entretient une brève mais torride liaison. C’est ce dernier qui l’enjoint de se consacrer exclusivement à l’art moderne. Peggy a une grande capacité d’écoute et elle prête une oreille particulièrement attentive aux bonnes personnes, ce qui lui donne assez rapidement la capacité de distinguer les œuvres exceptionnelles des productions moyennes. Bien que sa collection soit encore relativement limitée, elle rêve déjà d’un musée, mais nous sommes en 1939 et les menaces de guerre se précisent, l’obligeant à renoncer provisoirement à ses projets. À cette époque, Peggy Guggenheim choisit de revenir à Paris et c’est à un rythme frénétique qu’elle se met à acquérir des œuvres. Auprès des artistes directement, mais aussi dans les ventes publiques où sont écoulées les œuvres d’art considérées Inauguration du Solomon R. Guggenheim Museum, New York, 21 octobre 1959 © Solomon R. Guggenheim Foundation, New York par les nazis comme « dégénérées ». Les artistes eux aussi perçoivent le bruit de bottes et ils sont prêts à vendre à bas prix ou à se défaire d’œuvres qu’ils auraient préféré conserver. Peggy, qui n’a jusque-là jamais été inquiétée par les nazis malgré ses origines juives, décide de cacher sa collection. Entre 1939 et 1942, elle a amassé pas moins de 170 œuvres surréalistes et abstraites. Elle dissimule cette imposante collection à Paris, puis dans le sud de la France, avant de réussir à l’expédier aux États-Unis grâce à une société de déménagement qui accepte de l’aider en faisant passer sa précieuse cargaison pour des « articles mobiliers ». Peggy Guggenheim, appartement de l’Île-Saint-Louis, Paris, printemps 1940. Photo Rogi André, Bibliothèque nationale de France, Paris, Département des Estampes et de la Photographie 38 Outline - D é cembre 2016 Outline - D é cembre 2016 39 Événement Événement « Nous voulions créer une atmosphère New York pendant la Seconde Guerre mondiale radicalement différente de celle de nos précédentes expositions et c’est ainsi que nous en sommes venus à l’abstraction. Il s’agit aussi pour la banque d’un retour à ses racines car Léon Lambert a débuté sa propre collection avec des œuvres de cette période En octobre 1942, Peggy Guggenheim inaugure à New York sa galerie-musée Art of This Century (L’Art de ce Siècle). Elle y expose sa collection d’art abstrait et surréaliste d’avant-guerre, et y vend par ailleurs les tableaux de la jeune génération d’artistes américains. Elle a confié la création de sa galerie-musée à l’architecte Frederick Kiesler, qui a imaginé une ambiance particulière pour chaque courant artistique. « À partir des années 1930, les États-Unis ont accueilli des artistes fuyant l’Allemagne nazie. Marc Chagall, Max Ernst, Fernand Léger, Piet Mondrian, Yves Tanguy, Roberto Matta et André Breton font partie de ceux qui ont émigré entre 1939 et 1942 », rapporte Philip Rylands. En 1941, Peggy épouse Max Ernst, qui a fui la France avec elle. Pour lui non plus, l’Europe n’était plus sûre : suite à l’Occupation allemande, il était considéré comme un ennemi de la nation et pour les nazis, il était l’un des promoteurs de l’Entartete Kunst1. Deux de ses œuvres ont sillonné l’Allemagne avec la fameuse exposition de 1937 consacrée à l’Art dégénéré. » Patricia De Peuter, Senior Art Advisor Head of Art Management ING Arshile Gorky (1904–1948) - Sans titre, été 1944 Huile sur toile , 167 x 178, 2 cm Peggy Guggenheim Collection, Venise - 76.2553 Photo David Heald © SABAM Belgique 2016 Bon nombre d’artistes sont invités à organiser dans la galerie de Peggy leur première exposition individuelle. Pour pallier le manque de ventes, elle achète elle-même une toile de chaque artiste afin de l’encourager. Elle en donnera plus tard un grand nombre, notamment à d’importants musées. Peggy est aussi la première galeriste à monter une grande exposition avec des femmes artistes. Elle en paiera d’ailleurs le prix sur le plan personnel. C’est en envoyant Max Ernst dans les ateliers de ces artistes afin de sélectionner au mieux leurs œuvres que celui-ci fait la connaissance de Dorothea Tanning. Cette rencontre scellera la fin de sa relation avec Peggy. En route pour Venise Après l’échec de son mariage avec Max Ernst, Peggy Guggenheim s’est, en effet, installée à Venise en 1947. C’est là qu’elle crée un musée permanent, la Collection Peggy Guggenheim. Elle continue à acquérir des œuvres, mais avec plus de parcimonie. Et de la même manière qu’elle avait aidé les artistes européens pendant la Seconde Guerre mondiale à se faire connaître aux États-Unis, elle décide de faire de même avec les artistes américains une fois rentrée en Europe. Les années 1940-1960 constituent une période complexe. L’aprèsguerre est non seulement une période de reconstruction et de croissance économique, mais aussi l’époque de la Guerre froide. Durant cette période, l’art occidental est largement dominé par l’abstraction et par les interrelations artistiques entre l’Europe et les États-Unis. Pollock, le petit protégé L’un des grands mérites de Peggy Guggenheim est sans conteste d’avoir lancé la carrière de Jackson Pollock. À l’occasion de son « Salon de printemps des jeunes artistes », elle met sur pied un jury dont font notamment partie Duchamp et Mondrian. Peu convaincue, elle attire l’attention de ce dernier sur une peinture « brute » expédiée par un certain Pollock. Mondrian y voit la chose la plus excitante qu’il ait pu découvrir à cette époque. Peggy montrera plus tard l’œuvre à un autre membre du jury en lui disant : « Je veux vous montrer un tableau très, très intéressant. » Elle achète les toiles de Pollock, monte des expositions et lui offre même un contrat (1943-1947) qui permet à l’artiste de se consacrer exclusive1 Art dégénéré (ou Entartete Kunst en allemand) était l’expres- sion utilisée par le régime nazi (1933-1945) pour désigner toute forme d’art ne répondant pas aux exigences du nationalsocialisme. 40 Outline - D é cembre 2016 ment à la peinture. En 1948, Jackson Pollock fait partie de la sélection de la collection de Peggy pour la XXIVe Biennale de Venise – la ville où elle organisera, deux ans plus tard, la première exposition individuelle de Jackson Pollock. Adolph Gottlieb (1903–1974) - En suspens (Floating), 1945 Huile gouache et caséine sur toile, 81 x 63,5 cm Solomon R. Guggenheim Foundation, New York Don anonyme - 2011.1 - Photo Sergio Martucci © Adolph and Esther Gottlieb Foundation, SABAM Belgique 2016 « Peggy a continué à soutenir l’avant-garde, même si cela nécessitait de puiser dans le budget destiné à l’entretien de la maison et à sa propre garde-robe », souligne Philip Rylands. Elle noue des relations étroites avec les peintres italiens Emilio Vedova et Giuseppe Santomaso. « Collectionneuse excentrique, Peggy s’entourait des plus grands peintres et artistes. Elle était également intime avec Nelly van Doesburg, veuve de Theo van Doesburg, l’un des plus grands représentants et défenseurs de l’art abstrait du XXe siècle. » Dix ans avant sa mort en 1979, Peggy Guggenheim fait don de la totalité de sa collection à la fondation qui avait été créée par son oncle Solomon. • Le coup de cœur d’Outline : la Boîte-en-valise de Marcel Duchamp (1941) La Boîte-en-valise est la quintessence même de l’exposition organisée à l’ING Art Center car elle symbolise cet échange artistique fructueux entre les deux rives de l’Atlantique avant, pendant et après la Seconde Guerre mondiale. Peggy Guggenheim a permis à New York de découvrir l’art surréaliste grâce à sa galerie. La valise de Marcel Duchamp évoque celle d’un voyageur de commerce. Il y résume l’ensemble de son parcours artistique sous la forme de modèles réduits de ses œuvres les plus importantes, joliment compartimentés dans une seule et même valise. En 1941, Marcel Duchamp est l’ami et le principal conseiller de Peggy. Il a décidé de s’installer définitivement aux États-Unis et c’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles il transporte un petit « musée portatif » dans ses bagages. Grâce au soutien financier de Peggy, la Boîte-en-valise a été éditée en 300 exemplaires, plus 20 éditions de luxe. C’est le premier exemplaire de l’édition de luxe, en cuir Louis Vuitton, dédié à Peggy Guggenheim, qui est présenté à l’exposition. Marcel Duchamp (1887–1968) - Boîte-en-valise, 1941 Valise en cuir, contenant des répliques en miniature et des reproductions en couleur des oeuvres de Duchamp, ainsi qu’une photographie avec rehauts au crayon, gouache et encre, 40,7 x 37,2 x 10,1 cm Peggy Guggenheim Collection, Venise - 76.2553 Photo Sergio Martucci © Succession Marcel Duchamp, SABAM Belgique 2016 Outline - D é cembre 2016 41 Événement Événement Philip Rylands, directeur de la Collection Peggy Guggenheim à Venise de doubler la superficie du musée et des bureaux. Un agrandissement nécessaire pour pouvoir accueillir, en 2012, les 200 œuvres de la collection Schulhof. Pour aiguiser l’intérêt du public, le musée organise trois à quatre expositions par an. La vente des tickets constitue sa principale source de revenus, la location des lieux pour des événements et les recettes de la boutique du musée complétant le budget. Quarante personnes y travaillent. La Peggy Guggenheim Collection de Venise, branche italienne de la Fondation Solomon R. Guggenheim de New York, est le plus visité des musées d’art moderne en Italie, avec quelque 400.000 visiteurs par an. Sous la direction de Philip Rylands, le Palazzo Venier dei Leoni – qui fut la demeure de Peggy Guggenheim et abrite sa collection – a été transformé et rénové, permettant Philip Rylands est responsable de la collection Peggy Guggenheim depuis 1979, il est ensuite devenu directeur adjoint, puis directeur du musée. Ce Londonien a décroché en 1981 un doctorat à l’université de Cambridge, alors qu’il vivait depuis huit ans déjà à Venise. Il donne régulièrement des conférences, publie des articles et contribue à la rédaction de catalogues, il est occasionnellement aussi le curateur d’expositions. Il a coécrit avec Susan Davidson l’ouvrage Peggy Guggenheim & Frederick Kiesler. The Story of Art of This Century (2004). Il a personnellement connu Peggy Guggenheim. Sam Francis (1923–1994) - Réflectant, 1958 Huile sur toile, 202,6 x 135,4 cm Solomon R. Guggenheim Museum, New York - 59.1560 Photo Kristopher McKay © 2016 Sam Francis Foundation, California, SABAM Belgique 2016 « Photo Vincent Everarts 42 Outline - D é cembre 2016 Il a fallu deux ans de travail pour monter cette exposition. La Fondation Solomon R. Guggenheim a accepté de nous prêter certaines de ses œuvres parce que nous nous sommes forgés une solide réputation au cours des trente dernières années et parce que nos salles d’exposition répondent aux normes les plus strictes Anne Petre, Art Advisor ING » Adolph Gottlieb (1903–1974) - Brouillard (Mist) 1961 Huile sur toile, 182,9 x 121,9 cm Solomon R. Guggenheim Museum , New York. Don de Susan Morse Hilles, 1978 - 78.2401 Photo David Heald © Adolph and Esther Gottlieb Foundation, SABAM Belgique 2016 Infos pratiques Ne manquez pas l’exposition Guggenheim Full Abstraction ! Quand : jusqu’au 12 février 2017 Où : ING Art Center – Place Royale 6 à 1000 Bruxelles Ouvert du mardi au dimanche de 10h00 à 18h00 Plus d’info sur : https://about.ing.be/A-propos-dING/Art/ Guggenheim.-full-Abstraction.htm Outline - D é cembre 2016 43 Vos interlocuteurs privilégiés au sein d’ING Private Banking Belgique ing.be/privatebanking General Manager Philippe Wallez Avenue Marnix 24 1000 Bruxelles Tél. +32 2 547 62 00 [email protected] Chief Investment Officer Thierry Masset Avenue Marnix 24 1000 Bruxelles Tél. +32 2 547 79 68 [email protected] Head of Business Development Kristof Kustermans Avenue Marnix 24 1000 Bruxelles Tél. +32 2 547 69 08 [email protected] Head of Portfolio Management Rudy Vandorpe Avenue Marnix 24 1000 Bruxelles Tél. +32 2 547 79 68 [email protected] Head of Wealth Engineering Edouard Zurstrassen Avenue Marnix 24 1000 Bruxelles Tél. +32 496 58 80 22 [email protected] ING Belgique SA – Banque – avenue Marnix 24, B-1000 Bruxelles – RPM Bruxelles TVA : BE 0403.200.393 – BIC : BBRUBEBB – IBAN : BE45 3109 1560 2789 Éditeur responsable : Inge Ampe – Cours Saint-Michel 60, B-1040 Bruxelles 711972F – 12/16 © Editing Team & Graphic Studio – Marketing ING Belgium Head of ING Private Banking Zone Sud (Wallonie) Benjamin Francq Office Park Namur Avenue des Dessus de Lives 8 5101 Loyers Tél. +32 499 97 06 40 [email protected] Head of ING Private Banking Zone Centre (Bruxelles) Marie Helsmoortel Avenue Marnix 24 1000 Bruxelles Tél. +32 498 25 13 37 [email protected] Head of ING Private Banking Zone Ouest (Flandre orientale / occidentale) Kurt Lamquet Kouter 173 9000 Gand Tél. +32 478 21 71 37 [email protected] Head of ING Private Banking Zone Est (Anvers / Limbourg-Louvain) Marc Vankeirsbilck Lange Gasthuisstraat 20 2000 Anvers Tél. + 32 475 37 01 57 [email protected]