1 Introduction « Faire du commerce sans publicité, c'est comme faire de l'oeil à une femme dans l'obscurité. Vous savez ce que vous faites, mais personne d'autre ne le sait.» Steuart Britt, journaliste américain. Dévalorisée ou encensée mais toujours aussi regardée, la télévision est aujourd'hui un phénomène social de première importance qui cristallise tous les excès de l'idéologie communicationnelle. Elle est un lieu majeur d'investissements de tous ordres de la part des acteurs économiques et politiques, mais aussi culturels et éducatifs qui lui prêtent des pouvoirs quasi illimités. Le XIXème siècle a vu s’installer progressivement un genre nouveau de messages argumentatifs, destiné, non pas à défendre une opinion ou une cause, mais à promouvoir un produit et à inciter à son achat: la publicité. Aimer ou détester la publicité, nous devons tous reconnaître qu’elle est omniprésente dans notre vie quotidienne: affichages, slogans radiodiffusés, presse et surtout télévision. La publicité est une stratégie d'incitation à la consommation ciblant un public particulier. Elle joue un rôle important d’informer aux clients l’apparition de nouveaux produits, d’étendre de nouveaux besoins et aussi d’attiser les désirs. D’après Adame J.M. et Bonhomme M. (2005 : 4), “La publicité est la fleur de la vie contemporaine: elle est une affirmation d’optimisme et de gaieté, elle distrait l’œil et l’esprit…Vraiment, la publicité est la plus belle expression de notre époque, la plus grande nouveauté du jour, un Art. Un art qui fait appel à l’internationalisme, à la psychologie des foules et qui bouleverse toutes les techniques statistiques ou dynamiques connues, en faisant une utilisation intensive, sans cesse renouvelée et efficace de matières nouvelles et de procédés inédits.” Avec les progrès de la télécommucation, les téléspectateurs vietnamiens peuvent accéder maintenant aux programmes des chaînes internationales et naturellement aux publicités étrangères. Les marchandises, nées de l’ère de la mondialisation, sont internationales, mais utilisera-t-on toujours la même publicité pour un même produit dans tous les pays? La réponse n’est pas souvent positive. Des spectateurs francophones vietnamiens, en regardant la chaîne TV5 Monde, ne comprennent pas pourquoi la publicité 2 de différents pays est quelques fois contradictoire. Sur le petit écran, les filles, souvent belles et heureuses, utilisent la crème de même marque Nivea mais les Françaises ayant pour but de bronzer et les Vietnamiennes pour blanchir. Et donc, nos téléspectateurs féminins se trouvent bizarres ces filles européennes qui ne portent pas de gants et ne s’enfuient pas de soleil. Pourquoi cette incompréhension? Car les francophones vietnamiens n’écoutent pas bien et donc ne comprennent pas bien le français et qu’il leur manque encore des connaissances culturelles? Ou c’est parce que les Français utilisent des stratégies publicitaires différentes? Toujours au sujet de la publicité, nous nous sommes tous demandé par quelle force mystérieuse, toutes les femmes se mettent en mini-jupes au même moment, en noir ou en rouge selon la saison? Pourquoi le consommateur lambda achètera-t-il le produit A plutôt que le produit B, tandis que les deux donnent les mêmes résultats? Le multimédia constitue non seulement une source des informations, mais il devient de plus en plus un matériel éducatif. Les spécialistes des langues se préoccupent des analyses différentes et proposent de renforcer leurs efforts en prêtant plus d’attention aux compétences textuelle (discursive) et socio-culturelle. Des possibilités énormes pour développer ces aptitudes sont fournies par la publicité. Elle nous renseigne sur les plus grandes marques françaises, sur les tendances et effets de mode, elle constitue aussi une base à l’approche civilisationnelle originale. Actuellement, la publicité fait partie du quotidien des étudiants, notamment sous sa forme télévisuelle. L’activité du spot de publicité permet donc d’introduire en classe un support de travail familier stimulant la motivation des étudiants, et ce sans restreindre les apports pédagogiques (travail de l’argumentation, de l’organisation du discours, du regard et de la voix). Cependant, la publicité télévisuelle, objet si riche linguistiquement, et qui emprunte les deux principaux canaux de communication, l’ouïe et la vue, est encore peu traitée par les linguistes vietnamiens. Chez nous, quand on évoque l’utilisation de matériels authentiques en cours de langue, on pense d’habitude à des extraits littéraires, des chansons, des films, etc., mais rarement à la publicité. Elle est pourtant entrée solidement dans notre vie quotidienne et reflète le mode de vie de la société contemporaine. La publicité est alors un outil à ne pas négliger. Nous aimons bien le slogan de la marque Kiabi: Kiabi habille à la mode. Le jour où 3 nous avons vu ce slogan dans un hypermarché en France, très surprise, nous nous demandions: Quoi? Kiabi, c’est bien «qui habille»? C’est un jeu là! Depuis, nous répétions souvent ce slogan: Kiabi habille à la mode. Puis un jour, à Hanoï, nous avons acheté une robe qui n’est pas de notre style mais puisqu’elle est un produit de Kiabi. Et nous commençons à chercher des vêtements de Kiabi… Avec cette petite expérience réelle (nous posons toujours la question pourquoi nous sommes séduites par Kiabi), en plus avec la nouvelle exigence de l’Université de Vinh, où nous travaillons comme professeur de français, selon laquelle nous devrons enseigner le français spécifique aux étudiants en économie, en commerce extérieur,…et aussi devant l’extension actuelle du phénomène, devant sa complexité et son caractère polymorphe, nous avons décidé de faire une recherche sur la publicité télévisuelle, sous l’angle linguistique et extralinguistique. Le mémoire abordera donc deux problèmes: l’argumentation et les structures argumentatives de la publicité télévisuelle. Questions et hypothèses de la recherche: Fondamentalement, dans ce cadre, nous allons répondre progressivement aux questions suivantes: - Quelles structures argumentatives utilise-t-on dans les spots publicitaires télévisuels pour les produits de beauté et produits alimentaires? - Comment ces structures argumentatives sont-elles mises en place ou plus précisément quels rôles jouent les composantes verbales, paraverbales et nonverbales d’un spot publiciaire dans ces procédés de la mise en argumentaiton? Suite à ces questions et des observations de notre corpus, deux hypothèses de recherche suivantes sont formulées: Hypothèse 1: la structure de base de l’argumentation publicitaire, comme autres types d’argumentation, est une mise en relation de données avec une conclusion. Hypothèse 2: chacune joue son rôle mais toutes les trois composantes verbales, paraverbales, non-verbales interagissent, se complètent, s’éclairent dans l’argumentation publicitaire. 4 Objectifs de la recherche: Ainsi la présente recherche vise à: - comme l’objectif théorique, construire le cadre théorique concernant l’argumentation et la généralité sur la publicité télévisuelle. - le second objectif, d’ordre pratique, analyser des spots publicitaires afin d’en relever les stratégies, les structures argumentatives, chercher à comprendre la mise en évidence l’argumentation publicitaire et en quoi il est profitable d’introduire la publicité comme support de l’enseignement/apprentissage dans une classe de langue. Nous ferons recours à deux techniques de collectes et d'analyse d'information qualitatives et quantitatives, se subdivisant en deux phases, nous ont permis de mener notre recherche à savoir : Phase de collecte des documents et du corpus: - Etude documentaire des ressources - Collecte du corpus Phase d'analyse des résultats: - Saisie des données et traitement statistique - Analyse des résultats et interprétation Nous adopterons alors dans notre mémoire la méthode descriptive des théories servant à notre sujet. Nous avons consulté des documents concernant l’argumentation et la publicité des auteurs étrangers tels que: Adam J.M. et Bonhomme M., Baylon C. et Mignot X., Kerbrat-Orecchioni C., Moirand S., Plantin C,.…également des auteurs vietnamiens Duc Dan NGUYEN, Huu Chau DO,… Les travaux de ces auteurs ont constitué les sources de références très utiles pour notre compréhension des concepts théoriques fondamentaux et nous ont bien mené dans notre recherche. Et puis, une analyse statistique nous aidera à traîter des données de notre corpus. Dans le cadre de notre mémoire, nous n’étudierons que les schémas argumentatifs de base des 40 spots publicitaires de la chaîne TV5 monde et de TF1 et seulement dans les deux secteurs que nous estimons apparaître le plus de publicités: produits de beauté et produits alimentaires. 5 Nous organisons ce travail en trois chapitres: Dans le premier chapitre, nous exposerons brièvement la théorie de l’argumentation, pour savoir comment s’élabore une argumentation, plus précisément dans cette partie nous étudierons les procédés de la mise en argumentation, la structure argumentative de texte et l’enchaînement entre les données et la conclusion. Nous analyserons au deuxième chapitre tout d’abord la définition de la publicité, et puis celle de la publicité télévisuelle ainsi que ses constituants et les conditions d’obtenir une publicité réussite. Une méthode de description et de classification des spots publicitaires y sera ensuite présentée, ayant pour objectif de dégager les types de publicité télévisuelle et leur structure représentative. Le troisième chapitre présentera l’analyse du corpus recueilli à l’aide des grilles qui regroupent toutes les trois composantes de la publicité télévisuelle: composantes verbales, paraverbales et non-verbales. L’analyse des résultats des enquêtes nous permettra encore de confirmer les hypothèses de recherche et d’en tirer des conclusions. A partir des observations retenues, nous donnerons des orientations méthodologiques au niveau d’apprentissage et d’enseignement. Ce sera un des contenus de notre conclusion. Dans le cadre de notre mémoire, nous essayerons de répondre à nos questions de recherches et à nos hypothèses formulées. Nous espérons enfin que notre étude pourra d’une part être utile dans un cours de langues et apporter d’autre part un éclairage aux préoccupations des enseignants soucieux du même problème. 6 Chapitre 1: Argumentation On distingue deux fonctions des actes de langage (Tanase N., 2003 : 6): la fonction communicative, assurée par un acte de langage élémentaire, et la fonction argumentative, assurée par la prise en compte de l’acte élémentaire dans sa finalité dialectique. L’acte d’argumentation ne se situe pas au niveau de la phrase, mais à un niveau textuel plus large, puisqu’il se réfère à un point de vue présent dans le contexte de l’énonciation. 1. Qu’est-ce qu’une argumentation ? Argumenter consiste à soutenir ou à contester une opinion, une thèse sur un thème ou un sujet, mais aussi à agir sur le destinataire en cherchant à le convaincre ou à le persuader. Selon Plantin C. (2002 : 5), «l'argumentation est une activité à visée rationnelle, menée dans la langue de tous les jours». « De façon générale: argumenter c'est adresser à un interlocuteur un argument pour lui faire admettre une conclusion, et bien sûr, les comportements adéquats. Une argumentation est composée d'une conclusion et d'un ou plusieurs "éléments de preuve", que l'on appelle des prémisses ou des arguments, et qui constituent des raisons d'accepter cette conclusion. Une argumentation se compose donc des deux éléments essentiels: un argument --->une conclusion ». Dans un texte argumentatif, le locuteur (auteur, personnage) cherche à convaincre un destinataire (lecteur, autre personnage), et à lui faire adopter son point de vue. Il va donc utiliser des arguments et des types de raisonnements dans le cadre d’un plan plus vaste, qui les groupera, les enchaînera, les opposera en fonction du but final: c’est ce plan d’ensemble qu’on appelle stratégie de l’argumentation. Pour désigner deux stratégies argumentatives très différentes, mais qui peuvent se chevaucher au sein d’un même texte, on utilise les deux verbes «convaincre» et «persuader» dont le sens peut paraître très proche. Pour convaincre, celui qui argumente fait appel à la raison, aux facultés d’analyse et de raisonnement du destinataire pour obtenir son adhésion réfléchie: - Il formule donc une thèse, présente des arguments, autrement dit des éléments de preuve destinés à soutenir ou réfuter cette thèse. Il illustre ces arguments par des exemples (personnels, historiques, littéraires ou culturels). 7 - Il ordonne ces arguments dans le cadre d’un raisonnement (inductif, déductif, critique, dialectique, concessif, par analogie, par l’absurde…) et d’une progression argumentative où ils sont souvent articulés entre eux par des connecteurs logiques. Persuader, c’est agir sur la sensibilité du destinataire par différents procédés rhétoriques et oratoires pour obtenir son adhésion spontanée à une thèse: - les figures de rhétorique (tout ce qui est de l’ordre de l’esthétique, et non de la raison) - les procédés oratoires liés à l’énonciation et à la modalisation (s’impliquer soi ou impliquer son destinataire dans l’énonciation) - l’apostrophe, l’interrogation rhétorique et l’exclamation (procédés d’emphase qui procède d’une théâtralisation de l’énoncé) 2. Les procédés de la mise en argumentation D’après Charaudeau P. (1992 : 814), « la mise en argumentation consiste, pour le sujet qui veut argumenter, à utiliser des procédés qui, compte tenu des diverses composantes de ce mode d’organisation, doivent servir l’enjeu de communication qui est le sien, en fonction de la situation et de la manière dont il perçoit l’interlocuteur (ou le destinataire). » La fonction essentielle de ces procédés est de valider une argumentation, c’est-àdire de montrer que le cadre de questionnement est justifié. Et pour cela, il faut trouver des preuves. Les différents procédés de la mise en argumentation contribuent donc à mettre en place ce qui tend à prouver la validité d’une argumentation. Les procédés qui s’appuyent à la valeur des arguments sont les procédés sémantiques. Les procédés qui utilisent des catégories linguistiques dans le but de produire certains effets de discours sont les procédés discursifs. 2.1. Les procédés sémantiques Ces procédés utilisent un argument qui repose sur un consensus social du fait que les membres d’un groupe socio-culturel partagent certaines valeurs, dans certains domaines d’évaluation. 8 Nous avons 5 domaines d’évaluation. Le premier domaine concernant la vérité, qui définit de manière absolue, et en termes de vrai et de faux, d’une part ce qui concerne l’existence des êtres dans leur originalité, leur authenticité et leur unicité, d’autre part ce qui relève du savoir comme principe unique d’explication des phénomènes du monde. Argument type: “C’est vrai parce que c’est authentique (ou scientifique)” Le domaine de l’esthétique, qui définit en termes de beau et de laid ce que sont les êtres de la nature, les représentations les hommes en donnent ou les objets qu’ils fabriquent. Argument-type: “Cet objet a de la valeur parce qu’il est beau” Le troisième domaine, celui de l’éthique, qui définit en termes de bien et de mal ce que doivent être les comportements humains au regard d’une morale externe ou interne. C’est le domaine du devoir et de l’obligation dans lequel l’argument est pose comme origine d’une action. Celle-ci se réalise au nom d’un principe, et ce principe est l’argument lui-même: Argument-type: “C’est parce que je suis X que j’agis ainsi” (et non: “J’agis ainsi pour devenir X”) Concernant le domaine de l’hédonique, c’est la définition en termes d’agréable et désagréable ce qui relève des sens qui procurent du plaisir en relation avec les projets et les actions humaines. Ce plaisir est suscité par la satisfaction d’une fin désirée dans l’instant même de sa réalisation. Argument-type: “Je bois de la bière quand il fait chaud, parce que c’est frais”. (c’est dans l’instant de la consommation que l’on resent le plaisir de la fraîcheur) Bien des publcités utilisent ce domaine d’évaluation. Le domaine du pragmatique, qui définit en termes utile/inutile ce qui relève d’un calcul. C’est le domaine de l’intérêt dans lequel, à l’inverse de l’Ethique, l’argument est posé comme conséquence d’une action. Argument-type: “Il faut agir vite pour prendre l’ennemi par surprise” Les valeurs correspondent aux normes de représentation sociale, qui sont contruites dans chaque domaine d’évaluation. - concernant le domaine de la vérité: Ex:“Avec X vous retrouverez votre vrai visage” 9 - concernant le domaine de l’esthétique: Ex:“La beauté ne s’invente pas” - concernant le domaine de l’éthique: Les valeurs peuvent être de solidarité, fidélité, honnêteté, etc. On les trouve principalement dans le discourse politique: Ex:“Loin de concerner les seuls élèves, parents, enseignants de l’actuel lycée, cette grave question est en fait l’affaire de tous” - concernant le domaine du pragmatique: Les valeurs de ce domaine sont fondées sur l’expérience qui s’appuie tantôt sur ce qui est habituel, durable, fréquent et s’inscrit donc dans une norme de comportement, tantôt sur ce qui est singulier, original, unique et s’inscrit donc dans une différence par rapport à la norme de comportement. Ex:“Avec la méthode X, apprenez, vous aussi, à écrire sans faute” “Ecoutez la différence” - concernant le domaine de l’hédonique On ne s’étonnera pas que la publicité en soit le lieu privilégié. Ex:“La laine, plus on la porte, plus on l’aime” “Pas de plaisir sans X” 2.2. Les procédés discursifs Dans le cadre d’une argumentation, les procédés discursifs consistent à utiliser ponctuellement ou systématiquement certaines catégories de langue, ou les procédés d’autres modes d’organisation du discours pour produire certains effets de persuasion. On relèvera principalement: la définition, la comparaison, la citation, la description narrative, l’accumulation et le questionnement. La définition consiste en particulier à décrire les traits sémantiques qui caractérisent un mot en propre, dans un certain type de contexte. Dans le cadre d’une argumentation, la définition est utilisée à des fins stratégiques. Même dans le cas où il ne s’agit pas d’une véritable définition (elle se donne l’apparence d’une définition), elle sert à produire un effet d’évidence, et de savoir pour le sujet qui argumente. On distinguera deux types de définition, selon que celle-ci s’attache à définir un être ou un 10 comportement: - définition d’un être: La France est la France - définition d’un comportement: Avec la carte bleue, signer c’est payer Grandir c’est Nestlé Dans le cadre d’une argumentation, la comparaison est utilisée pour renforcer la prévue d’une conclusion ou d’un jugement, en produisant soit un effet pédagogique (comparer pour illustrer ou mieux faire comprendre) lorsque la comparaison est objective, soit un effet d’aveuglement (détourner l’attention de l’interlocuteur vers un autre fait analogique qui sous couvert de ressemblance empêche de considérer la validité de la preuve) lorsque la comparaison est subjective. Les marques de la comparaison sont diverses: - mots grammaticaux: comme, tel, de même que, ainsi, plus que, moins que,… - mots lexicaux: ressembler, paraître, correspondre, rapprocher, comparer, opposer,… La comparaison peut porter sur une ressemblance ou une dissemblance, et elle peut être objective ou subjective. Ex: “Parce que le temps qu’il fait cette année ressemble à celui de l’année dernière” Le procédé description narrative s’apparente à la comparaison, dans la mesure où est décrit un fait, ou racontée une histoire pour renforcer une prevue ou tenir lieu. Cependant ce procédé a une existence propre car il peut servir à développer tout un raisonnement dit “par analogie”, qui produit un effet d’exemplification. Ex: “C’est comme quand tu roules sur la route, tu dépasses tout le monde, tu crois que tu es le plus rapide, et puis subitement tu es arrêté par un passage à niveau fermé, et au moment de redémarrer, les autres te dépassent.” La citation participe au phénomène linguistique appelé discourse rapporté. La citation consiste à rapporter, le plus fidèlement possible, des propos écrits ou oraux, émis par un autre locuteur que celui qui cite, pour produire dans l’argumentation un effet d’authenticité. La citation joue un rôle de source de vérité qui témoigne d’un dire, d’une expérience, d’un savoir. Ex: “Parce qu’il dit qu’il l’a vu” L’accumulation utilise plusieurs arguments pour servir une même prevue. Cela peut être fait par une simple accumulation, une surenchère ou une tautologie. 11 Ex: “Moi c’est moi et lui c’est lui. Moi je fais ça parce que c’est moi, et lui fait autrement parce que c’est lui.” Le questionnement consiste à mettre en question un propos, dont la réalisation dépend de la réponse de l’interlocuteur. Le questionnement à valeur argumentative correspond à un type de validation hypothétique: “Est-ce que…? (alors)…” équivaut à: “Si…, alors…” Ex:“Est-ce que vous avez des piles dans la radio? Sinon elle ne fonctionnera pas.” (Si vous n’avez pas mis des piles dans la radio, alors la radio ne fonctionnera pas). Le questionnement argumentatif peut avoir plusieurs visées: incitation à faire, proposition d’un choix, vérification du savoir,… 3. Opérateurs argumentatifs, connecteurs argumentatifs et topoï Selon Moescheler J. (1985 : 61), « un opérateur sémantique est un relateur propositionnel, alors qu'un connecteur pragmatique est un relateur d'actes illocutoires. » Toujours d’après J.Moescheler, l'opérateur argumentatif est un morphème qui, appliqué à un contenu, transforme les potentialités argumentatives de ce contenu. Le connecteur argumentatif est un morphème (de type conjonction, adverbe, locution adverbiale, groupe prépositionnel, interjection, etc.) qui articule deux ou plusieurs énoncés intervenant dans une stratégie argumentative unique. Contrairement à l'opérateur argumentatif, le connecteur argumentatif articule des actes de langage, c'est-à-dire des énoncés intervenant dans la réalisation d'actes d'argumentation. Il serait intéressant d'étudier la manière dont ces connecteurs articulent le discours pour former des schèmes argumentatifs, des unités textuelles argumentatives. J.Moescheler en a proposé une, basée sur la distinction des prédicats à deux places et des prédicats à trois places. Les connecteurs donc, alors, par conséquent, car, puisque, parce que, eh bien constituent des prédicats à deux places. Par contre, un connecteur argumentatif est un prédicat à trois places s'il est nécessaire de faire intervenir, entre les deux variables argumentativement associées à X et à Y, une troisième variable implicite à fonction d'argument ou de conclusion. C'est le cas de décidément, pourtant, quand même, finalement, mais, d'ailleurs, même. Si l'on prend pour critère classificatoire la fonction argumentative de l'énoncé introduit par le connecteur, on distinguera les connecteurs introducteurs d'arguments (car, 12 d'ailleurs, or, mais, même) des connecteurs introducteurs de conclusion (donc, décidément, eh bien, quand même, finalement). Lorsque le connecteur est un prédicat à trois places, il faudra distinguer les connecteurs dont les arguments sont coorientés (décidément, d'ailleurs, même) de ceux dont les arguments sont anti-orientés (quand même, sinon, pourtant, finalement, mais). Il nous faut maintenant mettre en relation les notions de connecteur et d’opérateur argumentatifs avec les topoï. Le topos est le garant qui autorise le passage de l'argument A à la conclusion C. C'est un principe général sous-jacent à un enchaînement argumentatif présenté dans un discours. Ainsi, par exemple, dire: (1) Pierre a travaillé toute la journée, c'est produire le topos: «Il est fatigué.» Les topoï se caractérisent par trois traits principaux: (i) Ce sont des croyances présentées comme communes à une certaine collectivité dont font partie au moins le locuteur et son allocutaire. (ii) Le topos est donné comme général, en ce sens qu'il vaut pour une multitude de situations différentes de la situation particulière dans laquelle le discours l'utilise. (iii) Le topos est graduel. Il met en relation deux prédicats graduels, deux échelles discursives. Ce trait n'est pourtant pas obligatoire. Si nous écartons pour l'instant les argumentations inductives, il faut donc, dans toute argumentation déductive, bien distinguer le topos spécifique, qui forme la prémisse générique, du topos commun, qui garantit et légitime la conclusion à partir des prémisses. 4. Structure de texte argumentative 4.1. Structure argumentative de texte Nous rappelons qu’une argumention est constituée de trois éléments: (1) Des prémisses: ce sont les affirmations, les éléments de preuves qui vont être avancés afin de défendre, soutenir et/ou justifier une conclusion. (2) Des liens, des connexions: qui existent entre les prémisses et la conclusion. (3) Une conclusion: il s’agit de l’affirmation que l’on veut défendre, soutenir et/ou justifier. 13 On peut représenter ce qu’est une argumentation par le schéma suivant: La structure globale d’une argumentation se décompose donc en trois moments: les prémisses, les arguments et la conclusion (ou thèse). Mais, selon Moirand S. (1990 : 145), l’ordre peut être différent et l’on trouve également: (1) Les prémisses - la thèse - les arguments (2) L’anthithèse - les prémisses - les arguments et contre-arguments - la conclusion (3) La conclusion - les prémisses - les arguments Toujours d’après Moirand, l’un des éléments peut être implicite (non verbalisé), par exemple les prémisses dans l’argumentation publicitaire, ou visualisée par une photo ou un dessin dans la communication professionnelle. De plus, l’autorité dispense parfois le locuteur, s’il l’a de droit, de donner des arguments. Et voici la présentation visuelle de la structure de texte argumentative: Structure de texte argumentative Texte général - 1er paragraphe (et parfois plus): Introduction - Prémisse - sujet amené; - sujet posé; - sujet divisé (parfois). - paragraphes suivants: Développement - 1er argument avec les éléments qui l'appuient; - conclusion secondaire (conclusion de l'argument). 14 - autres paragraphes: - 2ème argument avec les éléments qui l'appuient; - conclusion secondaire (conclusion de l'argument); - 3ème argument avec les éléments qui l'appuient; - conclusion secondaire (conclusion de l'argument). - dernier paragraphe: Conclusion - conclusion du texte 4.2. Syllogisme et enthymème En logique aristotélicienne, le syllogisme est un raisonnement logique à deux propositions (également appelées prémisses) conduisant à une conclusion. Par exemple, «Tous les hommes sont mortels, or les Grecs sont des hommes, donc les Grecs sont mortels» est un syllogisme; les deux prémisses (dites majeure et mineure) sont des propositions données et supposées vraies permettant de vérifier la véracité formelle de la conclusion. Le syllogisme permet de mettre en rapport dans une conclusion deux termes, le majeur et le mineur, au moyen d'un moyen terme. Le majeur et le mineur ne doivent apparaître qu'une fois chacun dans les prémisses, le moyen terme est présent dans chaque prémisse (puisqu'il permet la mise en rapport des deux autres termes) tandis que la conclusion expose le rapport entre le majeur et le mineur, de sorte que le syllogisme est un rapport de rapports: 15 Termes moyen Prémisse majeure majeur Tous les hommes sont or... mineur Prémisse mineure Tous les Grecs Conclusion mineur Tous les Grecs mortels moyen sont donc... sont des hommes majeur mortels Les syllogismes sont constitués de propositions, ou affirmations faites d'un sujet (désigné par S) relié par une copule à un prédicat (désigné par P), de type: S {sujet} est {copule} P {prédicat} Ces propositions doivent être construites dans un ordre précis: le sujet de la conclusion, en effet, doit être présent dans une des prémisses (normalement la mineure), son prédicat dans l'autre (la plupart du temps la majeure), pour que le syllogisme soit valide. Le moyen terme (M) établit le rapport: {M est P} or {S est M} donc {S est P}. Il est donc exclu que le moyen terme apparaisse dans la conclusion ou que l'une des prémisses mette en relation les deux termes extrêmes (termes mineur et majeur). L'enthymème est un syllogisme rhétorique fondé sur le probable, c'est-à-dire à partir de ce que le public pense. Il s'agit d'une déduction dont la valeur est concrète par opposition à une déduction abstraite fondée sur l'analyse. Dans cette acception, l'enthymème procure la persuasion et non la démonstration, il est fondé sur le caractère vraisemblable de ses prémisses et constitue donc un raisonnement public manié facilement par des hommes incultes. L'enthymème est donc un syllogisme dont on a supprimé l'une des deux prémisses ou la conclusion car la réalité de cette proposition est incontestable et de ce fait gardée dans l'esprit. 16 Chapitre 2: Généralités sur la publicité "La publicité, c'est la plus grande forme d'art du XXème siècle" Marshall Mc Luhan La publicité, on peut être pour ou contre, mais pas sans. On ne peut pas la refuser, on vit dedans. Tous fils de pub. Si on ne la regarde pas, on la voit quand même. Et en plus c’est elle qui vous regarde et vous cible. Elle n’en agit que mieux, Il vaut donc mieux l'étudier 1. Qu’est-ce que la publicité ? La publicité est considérée comme toute communication ayant comme but direct ou indirect de promouvoir la vente de produits ou de services, y compris les biens immeubles, les droits et les obligations, quel que soit le lieu ou les moyens de communication mis en œuvre. Au sens le plus large du terme, la publicité englobe tous les moyens utilisés par des particuliers et des organismes pour faire connaître les produits et les services qu'ils ont à offrir et donner d'eux mêmes une image positive. Toutefois, les commentateurs préfèrent généralement une définition plus restrictive selon laquelle le terme ne s'applique qu'à la publicité directe faite dans les moyens d'information de masse, les dépenses correspondantes comprenant le coût de la création des annonces publicitaires elles-mêmes et celui de l'achat d'espace ou de temps pour leur diffusion. La publicité est un des aspects de la communication commerciale, c'est-à-dire un des quatre éléments d'action sur le marché (le produit, le prix, la distribution, la communication). Elle se donne pour premier but d'attirer l'attention du client sur le produit ou la marque, puis de familiariser le consommateur avec lui afin de faire aller de soi l'acte d'achat. C'est pour atteindre cet objectif que la publicité cherche comment toucher, puis convaincre, séduire 1'acheteur potentiel. En second but, elle cherchera éventuellement à: - créer un besoin (je n'ai jamais utilisé ce produit, mais au fond pourquoi pas?) - persuader que le produit répond au besoin (je serais plus heureux si j'en avais un) - et parfois convaincre qu'il le fait mieux que d'autres produits. On parle de publicité cognitive (faire connaître), conative (faire bouger, acheter) et 17 affective (faire aimer). Le mot média désigne le canal par lequel cette incitation est délivrée: annonce dans un journal, spot publicitaire à la radio ou à la télévision, affiche sur la voie publique,... La publicité est une forme de communication. Elle peut concerner: - un bien de consommation (nourriture, électroménager,…), un service (assurance, banque, tourisme,…). Le terme de réclame était traditionnellement appliqué à cette branche de la publicité. - une personne, un groupe (par exemple un parti politique), ou encore un projet ou une action (organisation d'événement sportif, action caritative,…). - un concept ou une information, officielle ou d'origine privée (associations, fondations,…). Pour atteindre son but, la publicité a généralement très peu de temps. Il lui faut donc presque simultanément capter l'attention, la retenir, et faire passer son message. En ce sens, la publicité pourrait être classée dans la catégorie des techniques de manipulation de la conscience. 2. Publicité télévisuelle 2.1. Qu’est-ce que la publicité télévisuelle ? «Constitue une publicité toute forme de message télévisé diffusé contre rémunération ou autre contrepartie en vue soit de promouvoir la fourniture de biens ou services, y compris ceux qui sont présentés sous leur appellation générique, dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale ou de profession libérale, soit d'assurer la promotion commerciale d'une entreprise publique ou privée.» (Derruau F., 2007 : 6) Cette définition du message publicitaire télévisuelle exclut la vente en direct ou la location en direct de produits ou services, afin de ne pas assimiler l'écran publicitaire ou téléachat. Ainsi, la publicité télévisée doit respecter: - dans son contenu, les règles générales régissant la communication audiovisuelle et la publicité - dans sa diffusion, les obligations découlant notamment des cahiers des missions et des charges et des conventions. La diffusion d’écrans publicitaires est soumise à un certain nombre de contraintes législatives et réglementaires qui font de la télévision un média à très faible charge publicitaire. 18 La télévision est un instrument intéressant pour les publicitaires. Elle nécessite un public passif, plus réceptif et moins critique que lors d’une lecture. Les téléspectateurs ne font que peu d’efforts intellectuels et la séquentialité de ce média ne laisse que peu de choix, regarder ou zapper. Regarder la télévision se fait la plupart du temps dans un lieu privé. Les téléspectateurs ne regardent pas spécialement les publicités qui sont insérées dans leur programme, mais les subissent. Pour parer à ces inconvénients, les publicitaires ont recours à des adoucisseurs sous la forme d’images agréables, de beaux acteurs, de musiques douces, de formes harmonieuses,... Les annonceurs utilisent des accroches (ouvertures) qui intriguent les téléspectateurs et les invitent à poursuivre leur vision du clip. Pour le développement, ils ont recours à des stratégies différentes attirant le téléspectateur et l’encouragent à aller jusqu’au bout. 2.2. Constituants de la publicité télévisuelle 2.2.1. Le signifiant iconique En publicité, le champ de l’icône se fixe principalement sur l’image (ou le visuel), avec ses deux propriétés paradoxales: - D’un côté, elle est intransitive, se montrant dans son évidence, sa compacité et sa présence envahissante, ce qui explique son grand pouvoir de mémorisation. D’après une expérience menée de Dale rapporté par Adame J.M. et Bonhomme M. (2005 : 56), 30% des gens se souviennent de ce qu’ils voient et seulement 10% de ce qu’ils lisent. En cela, la sphère du visuel renferme dans sa nature même un potentiel infopersuasif élevé. - D’un autre côté, l’image publicitaire se caractérise par sa transivité. Toujours image de quelque chose et se développant dans la monstration, elle possède un signifiant motivé par l’objet qu’il désigne et ayant une ressemblance figurative avec lui, quand le langage se contente de renvoyer à ses objets. Cela ne signifie pas qu’en publicité le visuel recopie passivement les données du monde, mais il fabrique à son niveau un analogon de réalité qui l’érige en ancrage référentiel de l’annonce. Nous énumérons maintenant les quatre caractéristiques élémentaires de l’image publicitaire: 19 - Sa dimension faiblement séquentielle (peu de marqeurs chronologiques ou syntaxiques) et largement tabulaire, avec sa spacialité, son organisation synthétique et sa structure paratactique. - Sa nature apparemment peu codée et grandement idiolectale qui en fait avant tout un style, au gré de l’inspiration de ses concepteurs. - Sa polysémie inhérente, due à son statut d’écriture concrète et source d’ambiguïtés interprétatives que l’argumentation exploite précisément. - Ses limitations métalinguistiques, contrecoup de son important potentiel référentiel: contrairement au texte, l’image a beaucoup de peine à s’évaluer et à se détacher d’elle-même. 2.2.2. Le signifiant linguistique Globalement organisé autour du mot et de la double articulation, le signifiant linguistique se répartit sur trois grands constituants dans l’annonce télévisuelle : 2.2.2.1. La marque, constituant minimal Il est plus facile pour tous de donner des noms de marques célèbres que de dire ce qu’est une marque. En effet une marque n’est ni un produit, ni une compagnie. Une compagnie comme Danone a des dizaines de marques (Danette, Dan’up, Danessa, Danacol…) et une marque a des dizaines de produits (Chanel fait des chapeaux, des robes, des lunettes, des sacs, des parfums …). La marque se veut une invention originale, puis une garantie de qualité, finalement elle vous situe dans un club fermé de l’élite, celui des fans de la marque qui acceptent tous d’être des supports publicitaires. Une marque est à la fois la création d’un groupe de professionnels et une production spontanée issue d’un imaginaire collectif. On ne peut plus la traiter comme un objet. Après sa devise, on lui donne une ligne de conduite puis une ligne de vie. Elle a été créée comme un enfant: elle a un nom, des prénoms, des surnoms, une âme et une histoire. Elle vit désormais, parle à la radio, écrit dans les magasines, dessine des affiches, se montre à la TV et dans les films. Ainsi Malboro, la cigarette à bout rouge pour le rouge à lèvres des femmes en 1954, passe en 1964 au Cow-boy de cinquante ans, rêveur et non casseur, pour devenir la cigarette la plus vendue dans cent quarante pays. 20 Elle doit tous nous satisfaire et chacun doit y trouver son profit. Tout le monde veut des marques, surtout les jeunes qui deviennent des objets publicitaires ambulants avec des noms de marque des pieds à la tête. «La marque est une Bible de signes qui deviennent très vite envahissants» (Descamps M.A., 2006 : 1). Elle est d’abord un nom connu de tous grâce à la publicité, un logo, un jingle puis elle acquiert une histoire et voudrait faire partie de l’histoire. Une marque finit par être une image qui s’impose à tous et se fait reconnaître à travers tous les médias. Le concept général de marque se décompose en 2 sous-catégories: - Marque de la firme: caractérisée par sa durée dans le temps, elle est en général arbitraire, liée au patronyme de ses fondateurs (Vichy, Hugo Bosse…) ou au relativisme de la langue qui l’a vue naître (Magna beads, Free dent, Eau Saint Armand). Tout en participant au conventionnalisme du signe linguistique, la marque contient une orientation incitative qui opère comme argument de vente: c’est sa fonction globalement persuasive. - Nom du produit: D’une durée plus ou moins longue selon la conjoncture économique, l’appellation du produit découle toujours d’une nomination volontaire de la part de ses promoteurs. Ordinairement le nom du produit forme un condensé de dénomination et de mini-description orientées positivement, ce qui lui confère d’emblée une portée argumentative découlant de divers procédés: - mise en évidence de ses effets bénéfiques: Eau Fresh de Bogart - mise en évidence de ses composantes scientifiques: Fluogum des Laboratoires Goupil - mise en évidence de son univers mythique: Symbiose de Stendhal Le nom du produit doit être euphonime, évoquer l’utilité du produit ou l’image que l’on veut lui donner. Mais le principal est qu’il doit être facilement mémorisable. 2.2.2.2. Le slogan, constituant condensé Quand la marque assure en priorité un rôle d’étiquetage linguistique du produit, le slogan est une composante phatique et conative, visant le contact et la pression sur le public. Il se présente, en effet, comme une proclamation de l’annonceur en vue de susciter une réaction spontanée et affective chez son récepteur. 21 Parmi les moyens discursifs et visuels à disposition du publicitaire, le slogan est sans aucun doute l’élément textuel qui jouit de la mémorisation. Son double rôle est d’une part de retenir l’attention du téléspectateur et d’autre part d’opérer un lien rapide entre la marque et certaines de ses caractériques: - Fondant tout au chocolat Alsa - Good bye cellulite seulement par Nivea body Les publicitaires distinguent des termes tels que: - L'accroche (ou titre, la forme anglaise headline est aussi employée): slogan utilisé pour un produit précis ou une campagne précise - La signature (la forme anglaise baseline est également usitée): slogan lié à la marque elle-même, qui fait partie de son identité 2.2.2.3. Le discours publicitaire Le discours publicitaire est souvent défini comme une forme de communication finalisée, s’accomplissant dans un contexte concurrentiel. Relayé par un support médiatique de masse ouvertement rémunéré (presse, radio, télévision, Internet), le discours publicitaire favorise la circulation de produits, de services ou de pensées dans un but promotionnel. Du point de vue de l’analyse linguistique, ce discours est essentiellement défini par sa dimension pragmatique spécifique, dont la finalité dominante, la recommandation d’achat, est assez systématiquement masquée par le biais d’actes de langage louangeurs subordonnés. C'est un discours persuasif qui implicite sa visée. Il vise à faire faire (à faire acheter, à faire choisir) mais n'explicite pas son but illocutoire: c'est un acte illocutoire indirect. L'acte illocutoire indirect est constatif. Parmi les sous-catégories du constatif, on rencontre, dans le discours publicitaire, des actes assertifs, descriptifs, attributifs et informatifs. On a un acte assertif quand la publicité montre un consommateur utilisant le produit ou un produit placé dans un contexte d'utilisation. Elle affirme alors que le produit est utilisé. On a un acte descriptif quand la publicité indique la marque du produit, quand elle le situe parmi une gamme de produits, qu'elle le déclare meilleur que les autres produits 22 sans la marque, enfin quand elle le décrit de façon plus ou moins développée: ses qualités, son mode d'emploi, les circonstances de son utilisation, etc. On a un acte attributif quand elle attribue une qualité à un produit, lorsqu'elle présente d'abord une valeur (mise en scène) et ensuite le produit, qui apparaît en surimpression ou en position de signature. On a un acte informatif lorsque la publicité annonce un produit nouveau: elle se présente comme accomplissant un acte d'information. Le recours à l'acte constatif a une fonction argumentative. Il permet de ne pas donner l'impression d'exercer une pression directe sur l'auditeur. L'acte indirect permet également d'accomplir simultanément les trois fonctions que doit, d'après les publicitaires, remplir la publicité: l'information, la suggestion (la publicité crée le désir mimétique en affirmant la conjonction du destinataire avec l'objet) et la gratification (la publicité agit également pour rassurer l'auditeur après l'achat en produisant une image positive du produit). Le discours publicitaire est un texte implicitement argumentatif. Sur le plan pragmatique, il est moins expressif que l’image, c’est pourquoi il est le lieu idéal pour développer l’argumentation publicitaire. 2.2.3. Le logo - un signifiant composite Version moderne des enseignes et de nature idiolectale comme le slogan, le logo constitue un signifiant publicitaire équivoque ou une image-mot, fluctuant entre le langage et le dessin. Avec le nom de la marque, le logo constitue la signature de l’annonce et remplit deux fonctions argumentatives (Adame J.M. et Bonhomme M., 2005 : 64): Premièrement, il assure la fonction de saisie immédiate de la marque. Etant une véritable image d’identité d’une entreprise, il doit être identifiable et mémorisable en un coup d’œil par la compacité de son emblème, notamment lorsqu’une initiale inductrice, comme le S de Suzuki, en enclenche la lecture; Deuxièmement la fonction de valorisation du concept de la marque, souvent suggérée par le signifiant iconique. C’est ainsi que le globe bleu de Kuoni concrétise l’activité mondiale de cette agence de voyages aériens ou que le S rouge de Suzuki 23 concentre dans son graphisme ouvert le dynamisme et dans sa couleur la vitalité de cette entreprise de motos. 2.3. Cadres participatifs dans les discours publicitaires D’après Baylon C. et Mignot X. (1994 : 294), toute communication de masse est un jeu d’échanges et d’influences de toutes sortes (autorité, séduction, pédagogie, chantage, complicité) entre trois acteurs partenaires, et dans le cas de la publicité, entre l’annonceurémetteur, «celui qui parle» (fabricant, producteur, agence de publicité), l’objet-référent, «la chose» dont on parle (le produit, l’objet, le service ou la marque) et le public-récepteur, l’ensemble des personnes destinataires du message (clients, usagers, consommateurs, acheteurs). Le discours publicitaire présente une particularité évidente en ce qui concerne les personnes entre lesquelles le message est transmis. Qui sont le locuteur et l'interlocuteur? Qui dit «je» dans le slogan? En fait, il y a beaucoup de termes qui décrivent les individus concernés par un texte du genre publicitaire: écrivain/lecteur, émetteur/récepteur, producteur/consommateur, locuteur/interlocuteur. Cette pluralité est due aux divers points de vue sur le processus de communication. Par exemple, les termes «lecteur» et «écrivain», caractéristiques pour les études littéraires; «émetteur» et «récepteur» évoquent l'idée de science; les termes «producteur» et «consommateur» appartenant aux sciences sociales mettent l'accent sur la nature commerciale de l'interaction; les termes «locuteur», «interlocuteur» appartiennent à la linguistique et interprètent le texte comme action face-à-face. Le locuteur, dans le cas de la publicité, est pratiquement le personnage (ou le narrateur au cas où il n'y aurait pas de personnage) ou du moins il est perçu comme tel par l’interlocuteur. La publicité est une convention où l'acteur impliqué connaît les règles du jeu. Il sait en fait que le slogan n'est pas le message du personnage ou du narrateur, bien qu'il le perçoive comme tel. Par conséquent, entre l'écrivain et le personnage (ou narrateur) a lieu un transfère d'attributs, le dernier empruntant la dimension encyclopédique du premier. Qu'est-ce que nous comprenons par cet «encyclopédique»? Ce sont les connaissances que l'auteur a du destinataire-vu sous la forme du public cible. Dans le cas des publicités dialoguées, les choses se compliquent un peu du point de vue de l’interlocuteur. En revenant à l'analogie avec la théorie littéraire, on peut se 24 demander: à qui s'adresse le message d'un personnage, à l'autre personnage ou au lecteur? De plus, on doit imaginer deux personnages d'un roman qui concentrent en deux-trois répliques toute l'intention de l'auteur. S'adressent-ils l'un à l'autre? Apparemment, oui. Mais tout est pure convention. L’interlocuteur reste toujours le client potentiel. Dans la réalité sociale, l’interlocuteur est pratiquement toute personne qui voit (entend, perçoit en quelque manière) la publicité: - Schwarzkopf: la qualité professionnelle pour vous (Corpus, publicité pour Schwarzkopf) En fait, le message est construit pour un certain type de récepteur, déterminé du point de vue socio-professionnel, du point de vue du sexe, de l'âge,… Des fois, cela devient évident par la construction même du message: - L’énergie des céréales complètes se libèrent progessivement, elle aide les enfants à tenir toute la matinée et à rester en forme jusqu’à l’heure du déjeuner (Corpus, publicité pour Chocapic Netslé) Voilà un exemple de publicité adressée aux enfants explicitement. Dans d'autres cas, comme les publicités pour les crèmes, les shampooing… le public cible est souvent suggéré par les personnages y présents. 2.4. Conditions de réussite d’un discours publicitaire Le discours publicitaire offre un exemple éloquent d'acte de langage complexe indirect. Qu'est-ce que nous entendons par cela? Le discours publicitaire accomplit en effet un acte directif: déterminer quelqu'un à faire quelque chose. «L'acte illocutoire dominant de la plupart des publicités est explicitement constatif et implicitement directif» (Adam J.M. et Bonhomme M., 2005 : 25). Il s'agit donc d'un acte indirect, mais on ne peut pas faire une analogie parfaite avec des énoncés tel «Peux-tu me passer le sel?» que l’interlocuteur décode comme «Donne-moi, s'il te plaît, le sel!». La plupart des actes illocutoires élémentaires sont de la forme F(P): ils se composent d'une force illocutoire F et d'un contenu propositionnel P. Ainsi, les assertions, les témoignages, les excuses, les promesses, les définitions, les supplications et les plaintes sont des exemples d'actes de discours élémentaires de la forme F(P). Cependant, d'autres actes illocutoires, comme les actes de discours plus complexes dont la forme logique n'est pas réductible à celle des actes illocutoires élémentaires, parce que leurs conditions de succès sont différentes. 25 On se limite donc aux conditions de réussite, telles qu'elles sont proposées par Searle (rapporté par Blanchet P., 1995 : 37). L'idée de départ est que chacune des conditions de réussite de l'acte de langage opère une restriction progressive de la sphère des acheteurs potentiels. La réussite d'un acte n'est pas seulement un problème de codage, mais surtout une question de décodage; c'est pourquoi un seul acte peut être réussi pour un récepteur et non réussi pour un autre. Il est vrai, en même temps, qu'un acte peut être échoué pour tous ses récepteurs, mais il est peu probable qu'un acte de langage-dans le sens où l'on conçoit la publicité comme acte de langage-soit réussi pour tous ses récepteurs. 2.4.1. La condition préparatoire « A peut accomplir Q » (Blanchet P., 1995 : 37), autrement dit, le récepteur R peut acheter le produit X. Cette première condition restreint considérablement la sphère des acheteurs potentiels parce qu'elle recouvre une multitude de conditions psycho-sociales, qui ne sont pas influencées par la publicité elle-même, mais plutôt par le produit: par son prix, ses dimensions, son utilité,... Tous ces facteurs actionnent simultanément pour exclure un nombre considérable de récepteurs parce que, par exemple, même si un produit est utile à un certain acheteur, si le produit est trop cher la personne en question ne peut pas se le permettre. Si nous avons quelques réserves, elles sont liées à l'aspect de l'utilité. Un produit peut ne pas être utile à un récepteur de la publicité, mais justement la publicité le convaint de l'utilité du produit. En ce qui concerne la sélection opérée par la condition préparatoire, nous considérons l'utilité une condition absolue seulement dans ce sens que, par exemple, un paysan ne pensera jamais à acheter un vaisseau cosmique (même s'il peut se le permettre) tout d'abord à cause de son inutilité. On obtient, par conséquent, un premier ensemble de récepteurs qui pourraient acheter le produit X. 2.4.2. La condition de sincérité « L veut que A fasse Q. » (Blanchet P., 1995 : 37). La condition de sincérité n'est pas un critère réel de sélection à cause de deux raisons: d'abord elle tient exclusivement du locuteur et, de ce point de vue est strictement 26 une question de codage, et ensuite parce que le but de toute publicité est justement de déterminer le récepteur à acheter et c'est pourquoi son intention est toujours sincère, étant à la fin sa propre raison d'exister en tant que publicité. 2.4.3. La condition du contenu propositionnel « L prédique l'action future Q de A. » (Blanchet P., 1995 : 37). Il y a plusieurs niveaux auxquels cela se passe dans le cas des publicités, surtout qu'il n'y a que des cas isolés où cette opération est explicite. Une publicité ne dira que très rarement «va et achète le produit» ou «je te conseille d'acheter le produit X» ou une autre formule semblable. Le plus souvent on a affaire à une atténuation de l'ordre (conseil, exhortation). Dans le cas de la publicité, la prédication se réfère au produit et de façon indirecte à l'éventuelle action d'acheter du récepteur. Pourtant, dans la majorité des cas, le récepteur est conscient du contenu propositionnel implicite de l'acte directif, même s’il ne perçoit comme telle la force illocutoire (comme étant de nature directive). Le degré d'atténuation est le critère qui opère la sélection à ce niveau-ci. Même si, du point de vue esthétique, une publicité «intélligente», drôle est réussie, les recherches montrent qu'une publicité efficace est une publicité qui impose le nom du produit et qui souligne les qualités du produit, induisant ainsi un besoin qui n'existait auparavant et stimulant la sensation d'utilité, de nécessité. Par conséquent, à ce niveau, la sélection se réalise par le succès ou l'échec de la publicité de transmettre au récepteur le message «Achète ce produit!» ou, autrement dit, de le rendre conscient de l'intention pratique et le but final de la publicité. 2.4.4. La condition essentielle Consiste en la « tentative de L d’amener A à faire Q » (Blanchet P., 1995 : 37), c'est-à-dire la tentative du locuteur de déterminer le récepteur d'acheter X. Il est bien évident qu'au moment où la condition essentielle est accomplie, nous trouverons les vrais récepteurs de l'acte de langage réussi, autrement dit, la sélection finale sera déjà opérée. Cette tentative de L sera réussite ou non, en fonction des stratégies argumentatives mises en scène. Cette partie repose donc sur une idée simple que la publicité est, dans sa structure de profondeur, un acte de langage directif. Ce que nous avons tenté de démontrer est le fait 27 que l'apparence d'un acte assertif-évaluatif est la forme sous laquelle une publicité essaie de transmettre son intention. «Nous avons défini la publicité comme acte de langage indirect dans le sens proposé par Searle, mais dont la force illocutoire est tellement modifiée que l'acte primaire se traduit pratiquement toujours par l'intention du locuteur.» (Tanase N., 2003 : 8 ) 2.5. Types de publicité télévisuelle et leur structure représentative D’après les publicités que l’on peut habituellement voir à la télévision, il est possible de déterminer un schéma de base valable pour presque toutes. En grande majorité, les publicités possèdent une ouverture, un développement et une clôture. Chacune de ces trois parties possède au moins une des 6 fonctions cardinales définies par R.Jakobson: fonctions référentielle, émotive, conative, phatique, poétique, méta-linguistique. Pour nos publicités, on peut lier fonctions de la communication et schéma publicitaire par le petit tableau suivant (Adam J.M. et Bonhomme M., 2005 : 26): Facultatif Ouverture Fonction phatique principalement Facultatif Développement Fonction poétique et/ou émotive et/ou référentielle et/ou conative Obligatoire Clôture Fonction conative et référentielle principalement On n’indique évidemment que les principales fonctions pour l’ouverture et la clôture, mais on peut les trouver toutes lors du développement car tous les moyens sont bons pour nous convaincre. Et on peut l’exprimer simplement: a. Restez devant votre télévision et regardez ce qui va suivre b. Voyez comme notre produit vous est nécessaire c. Regardez-le et allez l’acheter On comprend que les parties un et deux soient facultatives et la partie trois soit obligatoire. Après une observation des publicités de notre corpus (et aussi des publicités diffusées sur les chaînes vietnamiennes VTV1, VTV3-pour avoir une vue plus globale), en nous basant sur le schéma de base donné par Dupupet M. (2002 : 25) , nous avons 28 déterminé plusieurs types de publicité télévisuelle. Ceux-ci correspondent à des synopsis typiques facilement reconnaissables. Bien évidemment une publicité peut être un mélange de ces types. Nous reconnaissons que certaines publicités peuvent échapper à ce classement, mais leur nombre est petit. Nous avons deux catégories qui se subdivisent, les publicités à structure libre (I) qui s’opposent à celles à structure imposée (II). I-Publicité à structure libre A. Interview 1. De personne connue ou de star 2. D’un professionnel 3. D’un consommateur 4- Annonceur B. Fiction 1- Anecdotique a. Imaginaire b. Réaliste 2- De genre (ou d’impression) C. Raccourcis II-Publicité à structure imposée A- Appels de publicité B- Rappel de publicité Nous allons voir en détail ci-après ces différents types de publicité. 2.5.1. Publicité à structure libre A. Le type Interview est comme son nom l’indique un court interview de personne(s) dont le statut est assez différent. La ou les personne(s) interviewée(s) peut(vent) être soit: - Une personnalité connue ou une star du spectacle qui valorise le produit grâce à son image personnelle. - Le professionnel qui valorise le produit par ses compétences d’expert en la matière. - Le/la consommateur(trice) qui peut réagir selon deux modes: - Soit il est à convaincre, conviction qui se réalise à la fin du spot et qui permet de mettre en avant une chaîne argumentaire. - Soit il est convaincu dès le début et fait lui-même l’argumentation. - L’annonceur se met en scène pour défendre son produit. B. Le type fictionnel indique un certain travail du scénario. C’est le type le plus productif 29 car il fait appel à l’imagination des publicitaires et parfois des consommateurs: - Anecdotique, c’est-à-dire le produit est utilisé dans un usage extraordinaire où des consommateurs sont confrontés à un problème lui aussi extraordinaire ou présenté comme tel et le produit qui aurait été la solution miraculeuse n’est montré que lors de la clôture. + Imaginaire, c’est-à-dire le produit est utilisé ou montré dans un contexte d’usage extraordinaire. - Le produit est mis en valeur lors du développement, il fait partie de l’action. - Le produit est mis en valeur dans la clôture, il est absent de l’action. + Réaliste: Le produit est utilisé ou montré dans un contexte d’usage ordinaire. - La mise en situation est démonstrative. Les acteurs ainsi que la voix-off expliquent le fonctionnement du produit et ses avantages en l’utilisant dans une situation de vie quotidienne. - La mise en situation est comparative. Le produit est comparé à un produit générique auquel on assimile la concurrence, puis on en donne des avantages. - De genre: Le produit développe une atmosphère particulière qui est seule à être mise en valeur. C. Raccourcis: ce sont des publicités appartenant à l’une des classes ci-dessus, mais plutôt de type fictionnel anecdotique, qui sont raccourcies. On leur enlève l’ouverture et une grande partie du développement afin qu’elles ne durent plus que cinq à dix secondes. 2.5.2. Publicité à structure imposée A. Le type Appel est une publicité non autonome, de courte durée. Elle ne donne pas le nom du produit, mais en général joue avec un symbole. Ce type de publicité est lancé plusieurs semaines avant la sortie officielle du produit et ne sert donc qu’aux produits nouveaux. Ce sont des publicités brèves, elles font moins de 10 secondes. C’est une ouverture longue, sans développement ni clôture. Réalisé de manière énigmatique, sans nom de marque ou de produit, sans image du produit. L’annonceur joue sur des symboles en général. Ce genre de publicité est réservé aux produits nouveaux et effectué sur tous les média. B. Rappel de publicité: ce sont des publicités situées en général après une publicité à structure libre et obligatoirement dans la même plage publicitaire. Elles reprennent une partie de la clôture de la publicité de la classe I et durent entre 5 et 10 secondes. Elles peuvent promouvoir soit le même produit soit un autre produit de la marque. 30 C’est une clôture longue. Le spot est diffusé dans la même plage publicitaire, décalé de quelques spots et a pour sujet le même annonceur et la même gamme de produits. Le centre de l’image est en général occupé par le packaging du produit présenté. La théorie de l’argumentation et la généralité sur la publicité qui constituent une base théorique et qui nous permettent maintenant de chercher à répondre à nos questions de recherche. 31 Chapitre 3 : Etude des structures argumentatives Dans ce chapitre, nous nous permettons de présenter tout d’abord notre corpus et puis nos grilles d’analyse; en nous basant sur ces dernières que nous analyserons les composantes importantes de la publicité télévisuelle afin de dégager ses structures argumentatives et voir comment l’argumentation sera mise en place. 1. Présentation du corpus Les objets de notre corpus sont des spots publicitaires. C'est surtout sous l'angle de la linguistique que s'envisage l'étude du corpus. Le corpus se compose de 40 spots publicitaires, diffusés sur les deux chaînes: TF1 et TV5 monde, dans les deux secteurs différents: produits de beauté (avec 20 spots) et produits alimentaires (avec 20 spots). Nous avons choisi TV5 monde car c’est une chaîne en français, les publicités sur cette chaîne sont les mêmes apparues en France et dans tous les pays francophones. Nous avons choisi TF1, parce que c’est la première chaîne la plus regardée en France. Nous avons aussi regardé les spots publicitaires diffusés sur les chaînes vietnamiennes VTV1, VTV3 mais ils ne sont pas analysés dans notre mémoire, nous les considérons seulement comme éléments de référence. Il est important de noter qu’il n’y a pas eu de choix des spots publicitaires sur des critères internes, mais sur un critère temporel. Les deux secteurs ont été retenus car on constate leur présence fréquente en spots publicitaires. L’avantage est de trouver les annonceurs les plus homogènes. Ils vendent presque tous des produits de grande consommation et sont des entreprises de taille nationale ou internationale. Le résultat est que toutes ces entreprises ont fait appel à des agences de publicité. Il serait dangereux de dépenser beaucoup d’argent pour une diffusion d’un spot qui n’ait pas une bonne efficacité. Nous avons commencé à sélectionner et à enregistrer notre corpus le premier avril 2006 et fini l’enregistrement le 30 avril 2006. 32 2. Présentation des grilles d’analyse Pour pouvoir analyser les spots publicitaires de notre corpus de façon la plus précise, sous l’angle de la linguistique et aussi extralinguistique, nous avons rédigé quatre grilles d’analyse qui contiennent les composantes verbales, paraverbales, non-verbales, les éléments essentiels qui constituent un spot publicitaire. Dans la 1e grille - la structure de surface - les parties suivantes feront l’objet de l’analyse: - Le nom de la marque ou de l’annonceur, le type de produit (par exemple: Garnier body tonic; Eau minérale Saint Amand). - L’apparition de la voix-in, voix-off. A savoir que la voix-in est celle des personnages présents sur l’écran de la télévision et quand on entend la voix mais on ne voit pas la personne qui parle, il s’agit là de la voix-off. - Les textes simple, animé. - La présence d’un slogan ou non. - La musique. Nous avons considéré pour le critère musique sa présence occupant au moins la moitié du temps de la publicité. - Le bruit La 2e grille - types publicitaires et la 3e grille - schémas argumentatifs ont pour objectif d’essayer de comprendre la structure globale de l’argumentation. En fait chaque type publicitaire a une structure argumentative différente, donc après avoir dégagé les types utilisés dans la 2e grille, nous allons analyser la mise en place des composantes qui forment les schémas argumentatifs de la publicité télévisuelle dans la 3e grille La 4e grille - composantes verbales - a pour objectif d’analyser plus profondément les éléments qui constituent l’argumentation et de voir comment les éléments argumentatifs s’enchaînent entre eux pour composer une structure complète. Comme nous étudions la publicité télévisée, donc les éléments extralinguistiques tels que image, musique, geste, mimique,…sont vraiment importants. Les composantes paraverbales et non-verbales seront analysées ensuite, ayant pour tâche de savoir si l’argumentation iconique et sonore constituent une partie importante dans la structure argumentative de la publicité télévisuelle, de chercher dans quel cas ces composantes peuvent remplacer les composantes verbales. 33 3. Analyse du corpus Nous rappelons que notre objectif est en premier temps de pouvoir dégager les structures argumentatives utilisées dans les spots publicitaires de notre corpus, et puis de comprendre comment ces structures seront mises en place par les publicitaires. Pour l’atteindre, la première et la deuxième grille d’analyse constitueront les données de base, la structure argumentative sera éclaicie dans la troisième grille et dans la 4e grille nous verrons comment elles sont mises en évidence. Pour comprendre les tableaux, nous utilisons les abréviations et les conventions suivantes: - «Pub no»: Publicité numéro - A: Produit alimentaires. Nous avons numéroté de A1 à A20 pour les produits alimentaires selon l’ordre alphabétique. - B: Produit de beauté. Nous avons numéroté de B1 à B20 pour les produits de beauté selon l’ordre alphabétique. - «x»: présence de telle caractéristique et «0»: absence de telle caractéristique, par exemple: Pub no Voix-in Bruit A1 x 0 Il s’agit ici d’un spot publicitaire pour un produit alimentaire, plus précisément le produit Actimel-A1-avec la présence de la voix-in et l’absence du bruit. - Ouv.: Ouverture - Dév.: Développement - Conc.: Conclusion 34 3.1. Grille 1: Structure de surface Texte Pub no Nom A1 Actimel x x 0 0 x x 0 A2 Alsa x x 0 0 x 0 0 A3 Apéricube 0 x x 0 x x x A4 Bjord 0 x 0 0 x 0 x A5 Bresse Bleu x 0 0 0 x 0 0 A6 Cacolac 0 x x 0 0 x 0 A7 Canderel x x 0 0 x x 0 A8 Carlsberg 0 x 0 0 0 x 0 A9 Chocapic Netslé 0 x 0 0 x x 0 A10 Coca cola 0 x 0 0 0 x 0 A11 Curly x x 0 0 x x 0 A12 Danacol x x x 0 x 0 0 A13 Eau St Amand 0 x 0 x x x 0 A14 Fjord x x 0 0 0 0 0 A15 Freedent x x 0 0 0 0 x A16 Joker 0 x 0 0 x x 0 A17 Kinder x x 0 0 x x 0 A18 Roquefort 0 x x 0 x 0 0 A19 Taillefine fiz 0 x 0 0 0 x 0 A20 Weight Watchers x x 0 0 x 0 x Voix-in Voix-off Slogan Musique Bruit Simple Animé 35 Texte Pub no Nom B1 Aquafresh 0 B2 Bosse parfum B3 B4 Voix-in Voix-off Slogan Musique Bruit 0 x x 0 0 0 x x 0 x 0 0 0 0 0 0 x x 0 x x 0 x x 0 0 0 x x 0 x x 0 x x 0 0 x 0 0 x x 0 Linéance 0 x x 0 0 x 0 0 x 0 0 0 x 0 0 x x 0 0 x 0 B11 Magna beads Nivea visage DNAge Nivea body 0 x 0 0 0 x 0 B12 Roc x x x 0 x x 0 B13 Sanogyl x x 0 0 0 x 0 B14 Sensodyne x x x 0 x 0 0 B15 Schwarzkopf 0 x 0 x x 0 0 B16 Timotei bamboo 0 x 0 0 0 x 0 B17 Vénus Vichy Normaderme Vichy Lipocure XLS duo 0 x 0 x x x 0 0 x 0 0 x 0 x 0 x 0 0 x x 0 0 x 0 0 0 x 0 Simple Animé x 0 0 x Demak’up x B7 Diadermine Eau précieuse lotion Garnier body tonic Garnier movida B8 B9 B5 B6 B10 B18 B19 B20 Nous avons le tabeau de synthèse suivant en calculant le pourcentage pour chaque en-tête: Pub Nom Voix-in Voix-off Simple Animé Slogan Musique Bruit A 100% 50% 95% 20% 5% 70% 60% 20% B 100% 25% 100% 30% 10% 55% 80% 10% 37.50% 97.50% 25% 7.50% 62.50% 70% 15% no A+B 100% 36 A travers ces tableaux, nous voyons très bien qu’on fait une publicité pour une marque, un produit précis. Dans un spot publicitaire il faut absolulement le nom du produit (100% des spots en portent un). Ordinairement le nom du produit forme un résumé de dénomination et de mini-description orientées positivement. Avec la forme linguistique restreinte centrée sur le nom, la marque se présente comme un facteur d’identité et de permanence du produit. Nous trouvons que les voix-in (37.50%) sont nettement moins utilisées que les voix-off (97.50%). Les voix-in sont présentes généralement dans les publicités où elles peuvent se substituer à la voix-off. Par contre cette dernière est employée malgré la présence de la voix-in. La voix-off sert souvent à expliquer, à convaincre les clients de l’utilité, de la nécessité du produit. Pour les produits de beauté, on utilise 100% des voixoff, et 95% pour les produits alimentaires. Peu de publicités utilisent les textes (32.50%), parmi lesquels les textes animés sont moins utilisés que les simples (20% contre 5% pour les produits alimentaires et 30% contre 10% pour les produits de beauté). Selon une expérience de Dale rapporté par Adam J.M. et Bonhomme M. (2005 : 56), 30% des gens se souviennent de ce qu’ils voient et seulement 10% de ce qu’ils lisent. Nous supposons que les publicitaires aient profité de cette expérience. L’utilisation du slogan est aussi répandue (70%). La réalité montre que le slogan est aussi (même plus) important que la marque. Car dans le slogan on retrouve le nom du produit ou de la marque. Il se présente en effet comme une proclamation de l’annonceur en vue de susciter une réaction spontanée et affective chez son spectateur. Le slogan est une des bases de la publicité, il se caractérise par une brièveté, une simplicité grammaticale, une tonalité péremptoire. Il s'agit d'une phrase, souvent assez courte, qui a comme but d'être retenue facilement par celui qui l'entend et parfois d'associer un produit (objet du slogan) à des images positives qui inciteront le consommateur à acheter le produit. Les slogans sont souvent associés à une musique qui, en rythmant la phrase publicitaire, aide le consommateur à s'en souvenir. La présence de la musique est assez fréquente puisque 70% en utilisent une. 15% des publicités doivent avoir recours aux bruits. Nous constatons que le bruit est utilisé souvent pour montrer l’ambiance, le contexte. 37 Généralement, la voix-off, le slogan et la musique sont présents dans la plupart des publicités. La voix-in, les textes et le bruit sont moins utilisés. Qu’est-ce qu’on pourra alors déduire de cette structure de surface? Premièrement, les publicitaires préfèreraient les stratégies argumentatives directes: la voix-off explique, convaint les clients de l’utilité, de la nécessité du produit; le slogan fait retenir le nom du produit et la musique est là pour animer l’ambiance, pour faire chanter le produit. Deuxièmement, comme on utilise essentiellement la voix-off, on a beaucoup plus d’images sur l’écran plein (car l’apparition de la voix-in signifie aussi l’apparition du sujet parlant). Nous parlons ici de l’argument esthétique. Nous savons que l’esthétique relève principalement de l’image. Les qualités du produit sont de l’ordre du voir, plutôt que du dire. Ce n’est pas, au premier abord, une argumentation explicative que la beauté requiert mais une argumentation séductrice. 3.2. Grille 2: Types publicitaires Maintenant nous allons examiner les types publicitaires pour comprendre mieux quelles méthodes, quelles stratégies les publicitaires ont utilisées pour mettre en place les spots publicitaires . Nous avons fait une grille d’analyse complète sur laquelle il y a eu tous les types publicitaires présentés dans la partie théorique, mais seuls les types présents dans notre corpus sont relevés dans ce tableau, en raison de la longueur du tableau. Les types de publicité sont déterminés grâce à un classement décrit au 1er chapitre, dans la partie 3.2. Pub no Interview Imaginaire Réaliste De genre Rappel de publicité A1 A2 A3 A4 A5 A6 A7 A8 A9 A10 A11 A12 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 x 0 0 0 x 0 0 0 x 0 0 0 0 0 x x 0 x 0 x 0 x 0 x 0 x 0 0 0 0 x 0 0 0 x 0 0 0 x 0 0 x 0 0 0 0 0 x 0 0 38 Pub no Interview Imaginaire Réaliste De genre Rappel de publicité A13 A14 A15 A16 A17 A18 A19 A20 x 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 x x x x 0 x x 0 0 0 0 0 x x 0 0 0 0 x 0 0 0 0 Pub no Interview Imaginaire Réaliste De genre Rappel de publicité B1 B2 B3 B4 B5 B6 B7 B8 B9 B10 B11 B12 B13 B14 B15 B16 B17 B18 B19 B20 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 x 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 x x x 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 x x x x 0 0 0 x x x x x x x x x x x x x 0 x 0 x 0 0 0 0 0 0 0 x 0 0 0 0 0 x 0 0 Nous avons le tableau suivant qui présente le pourcentage des types publicitaires utilisés: Pub no A B Interview 2 10% 0 0% Imaginaire Réaliste 2 10% 0 0% 13 65% 3 15% De genre Rappel de pub 4 20% 17 85% 4 20% 4 20% 39 Pour les produits alimentaires, 10% des spots publicitaires sont des interviews, 10% imaginaire, 20% de genre, 20% rappel de publicité et 65% réaliste. Pour les produits de beauté, les deux types interview et imaginaire ne sont pas utilisés. Les publicités sont du type réaliste (15%), de genre (85%) et rappel de publicité (20%). Nous voyons que la totale des proportions dépasse 100%. Car pour le type «rappel de publicité», souvent des spots de ce type appartiennent aussi aux autres types. Nous avons analysé dans la première partie les types publicitaires. Nous essayerons maintenant de chercher à comprendre pourquoi les publicitaires ont choisi ces types et pourquoi les deux types «réaliste» et «de genre» sont les plus utilisés. Nous nous rappelons qu’avec le type «de genre», le produit développe une atmosphère particulière qui est seule à être mise en valeur. Le son et les images sont centrés sur le produit et sur l’atmosphère qu’il crée. Le but de ce type est de provoquer une émotion positive à laquelle le produit sera associé. Pour le type «réaliste», le produit est utilisé ou montré dans un contexte d’usage ordinaire. La mise en situation est démonstrative. Les acteurs ainsi que la voix-off expliquent le fonctionnement du produit et ses avantages en l’utilisant dans une situation de vie quotidienne. Ce sont en général des spots réalisés pour des produits intéressant les ménagères. Le produit est montré dans son utilisation quotidienne, en général la cellule familiale, et le premier rôle est donné à l’homme ou la femme, le tout est agrémenté d’interventions d’autres personnages, enfants, grand-parents, amis. L’une des personnes utilise le produit avec plaisir et souvent d’une manière didactique. Une voix-off explique les avantages du produit, aidée parfois de graphiques pseudo-scientifiques. Pour le type «interview», comme son nom qui l’indique, il s’agit d’un court interview de personne(s) dont le statut est assez différent. Dans notre corpus, la personne interviewée est le consommateur qui réagit selon deux modes: - Soit il est à convaincre, conviction qui se réalise à la fin du spot et qui permet de mettre en avant une chaîne argumentaire. - Soit il est convaincu dès le début et fait lui-même l’argumentation. Pour les spots étudiés, l’interviewé est seul face à la caméra, l’interviewer est une voix-off. L’interviewé parle du produit ou répond à des questions sur le produit et pourquoi 40 il l’utilise. L’interviewer (la voix-off la plupart du temps) met en valeur certains éléments du produit par description ou par présentation de graphiques pseudo-scientifiques. Pour le type «imaginaire», le produit est utilisé ou montré dans un contexte d’usage extraordinaire. - Le produit est mis en valeur lors du développement, il fait partie de l’action. - Le produit est mis en valeur dans la clôture, il est absent de l’action. Pour le type «rappel de publicité», ce sont des publicités situées en général après une publicité à structure libre et obligatoirement dans la même plage publicitaire. Elles reprennent une partie de la clôture de la publicité de la classe I et durent entre 5 et 10 secondes. Elles peuvent promouvoir soit le même produit soit un autre produit de la marque. Avec ce type de publicité, la clôture est longue. Le spot est diffusé dans la même plage publicitaire, décalé de quelques spots et a pour sujet le même annonceur et la même gamme de produits. Le centre de l’image est en général occupé par le packaging du produit présenté. Faire la cuisine, s’occuper de la famille…ce sont des travaux chargés aux femmes. Construire une publicité avec l’image d’une famille heureuse, le mari satisfait, les enfants gourmands, les publicitaires cherchent à réveiller l’instinct et aussi le souhait des femmes. 65% des spots de notre corpus sont du type «réaliste» pour cette raison? Le «réaliste» et le «de genre» sont les plus utilisés, cela montre que les publicitaires voudraient créer une atmosphère familière aux téléspectateurs. Une stratégie des publicitaires posée est d’exciter le désir des clients potentiels: les autres ont utilisé ce produit, et nous pourquoi pas. Evidemment ces constatations ont un caractère général et ne forment pas des règles absolues. 3.3. Structures argumentatives Dans cette grille, nous voudrions dégager les structures argumentatives globalement utilisées dans les spots publicitaires de notre corpus. 41 Pub no A1 A2 A3 A4 A5 A6 A7 A8 A9 A10 A11 A12 A13 A14 A15 A16 A17 A18 A19 A20 4 éléments 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 x 0 0 0 x Pub no B1 B2 B3 B4 B5 B6 B7 B8 B9 B10 B11 B12 B13 B14 B15 B16 3 éléments x 0 0 x 0 0 0 x x 0 0 x x 0 0 0 0 0 0 0 2 éléments 0 x 0 0 0 x 0 0 0 0 x 0 0 0 x 0 0 x 0 0 1 élément 0 0 x 0 x 0 x 0 0 0 0 0 0 x 0 0 x 0 x 0 4 3 2 1 éléments éléments éléments élément 0 0 x 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 x x 0 0 0 0 0 x 0 x 0 x x x x 0 0 0 0 0 0 x 0 x 0 0 0 0 0 0 0 0 x 0 0 x 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 Autre 0 0 0 0 0 0 0 0 0 x 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 Autre 0 x x 0 0 0 0 0 x 0 0 0 0 0 0 0 Composition Ouv. Dév. Conc. x x x x x x x x x x x x 0 x x 0 x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x 0 x x x x x Composition Ouv. Dév. Conc. 0 x x 0 x 0 x x 0 x 0 x x x x x x 0 0 x x x x x x 0 x x x x x x 0 x x x x x x x x x x x x x x x 42 Pub no 4 3 2 1 éléments éléments éléments élément B17 B18 B19 B20 0 0 0 0 0 0 x 0 0 x 0 x x 0 0 0 Autre 0 0 0 0 Composition Ouv. Dév. Conc. x x x x x x x x x x x x Nous avons le tableau suivant qui présente le pourcentage de chaque en-tête: Pub no A % B % 4éléments 3éléments 2 6 10% 30% 2 7 10% 35% 2éléments 5 25% 6 30% 1élément Autre Ouv. Dév. Conc. 6 1 17 20 20 30% 5% 85% 100% 100% 4 1 14 17 20 20% 5% 70% 85% 100% 3.3.1. Schémas argumentatifs Nous rappelons que la structure globale d’une argumentation se décompose en trois moments: les prémisses, les arguments et la conclusion. Mais l’ordre peut être différent parce que l’un des éléments peut être implicite (non verbalisé). Comme l’ordre des éléments (cf 2.5 chapitre 1) dans une argumentation n’est pas le même dans toutes les publicités donc nous avons décidé de classer les spots de notre corpus en quatre catégories: 1, 2, 3 et 4 éléments et une colonne «autre» pour les cas exceptionnels (s’il y en a). Les éléments ici sont: la thèse/l’anthithèse, la prémisse, l’argument/le contreargument et la conclusion. Il est possible que les deux publicités soient classées dans la même catégorie «2 éléments» mais ces deux éléments peuvent être différents: l’une utilise la prémisse et la conclusion et l’autre l’argument et la conclusion par exemple. Vous considéreriez que notre analyse ne soit pas pertinente? Sur les deux tableaux ci-dessus, à cause de leur longueur, nous ne pouvons pas les présenter d’une façon très précise mais durant notre analyse nous avons évidemment énuméré tous les éléments présents dans chaque spot. Pour les produits alimentaires, nous voyons l’apparition de 4 éléments dans 10% des publicités; les 3 et 1 élément sont également présents dans 30% des cas; les 2 éléments apparaissent dans 25% des cas et 5% des spots appartiennent à la catégorie «autre». Pour les produits de beauté, la classe de 3 éléments est la plus représentée (dans 35% des cas), les 2 éléments et 1 élément sont respectivement utilisés dans 30% et 20% 43 des cas, on constate 4 éléments dans 10% des spots et comme pour les produits alimentaires, il y a un seul spot qui est classé dans «autre». Pour la catégorie «autre», il s’agit des spots qui contiennent soit plus de 4 éléments soit aucun élément. Dans notre corpus, se trouvent classées «autre» les publicités qui ne contiennent aucun élément. Ce sont des spots dont il n’y a pas de parole ou la seule phrase verbalisée est le slogan, prononcé vers la fin de la publicité. Toute argumentation qui cherche à convaincre l’autre essaye de répondre par avance aux questions et aux doutes, aux contre-arguments prévisibles de l’interlocuteur; on l’empêche ainsi de les exprimer lui-même. Soit (d’après J.B.Grize, rapporté par Moirand S., 1990 : 146): (a) B est supposé accepter ce que A dit. A n’a pas besoin d’expliquer, de justifier ce qu’il dit. Il n’a pas besoin d’expliciter ses arguments. Le texte est alors construit à partir de constats et de faits. (b) A estime que B ne sera pas convaincu d’emblée ou qu’il (A) n’a pas l’autorité pour imposer ses dires. L’énoncé sera étayé, expliqué, justifié. On trouvera à l’appui des arguments des dires empruntés à autrui. On trouvera inscrits dans le texte les dires que B pourrait opposer à A. Il s’agit d’une argumentation à «thèse» et les arguments peuvent apparaître alors sous la forme d’un raisonnement. (c) A peut réclamer la participation active de B et l’on trouvera dans le texte des marques qui inscrivent B («vous», «vous buviez quoi avant?») mais aussi des hypothèses, des questions, des injonctions. Ce sont bien entendu des «schémas-types». Lors d’une conversation en face à face, A peut changer de stratégie et passer à un autre schéma que celui qu’il avait initialement prévu. Le deuxième et le troisième parfois se combinent. Mais tels qu’ils sont, ils aident à comprendre et à observer les mouvements argumentatifs des textes et des dialogues. Pour nos spots publicitaires, comme il n’y aura pas d’intervention directe de l’interlocuteur, donc le producteur de publicités doit déterminer avant quel schéma qu’il utilisera pour le convaincre de façon la plus efficace possible. Si le producteur suppose que les téléspectateurs acceptent ce qu’il dit (le cas a), il n’a pas besoin d’expliciter ses arguments. Le texte est alors construit à partir de constats et de faits. Cela explique pourquoi il y a des publicités de 1 ou de 2 éléments. 44 Si le producteur estime que ses spectateurs ne seront pas convaincus d’emblée (le cas b), il devra recourir aux arguments. Il s’agit ici surtout des spots de 3 ou 4 éléments. Pour le cas c, il s’agit surtout des interviews. Nous pourrons dire que, comme il s’agit de l’analyse verbale dans cette partie, les spots contenant de 3 ou 4 éléments sont les publicités longues, la parole est présente presque dans toute la durée de la publicité et donc la présence de l’argumentation verbale est plus importante. Cependant on ne peut pas déduire qu’il y a moins de chance pour les publicités avec 2 ou 1 élément, parce qu’on a encore les images, les graphiques… qui puissent remplacer bien la parole. On n’a pas une proportion majoritaire pour une colonne précise. Pour la colonne 3 éléments qui prend 30% des cas, cela montre qu’il y a une orientation argumentative dans les publicités télévisuelles, et dans ce cas là les publcitaires suivent le schémas de base: données-conclusion. Pourtant, si dans une publicité qui possède seulement un élément, nous ne pouvons pas conclure qu’il n’y a pas d’argumentation; car on parle aussi de l’argumentation iconique. 3.3.2. Composition de la publicité télévisuelle Dans la partie 2.5 du premier chapitre, nous avons appris que la majorité des publicités possèdent une ouverture, un développement et une clôture. Ces trois composantes sont soit verbalisées soit exprimées en images. Pour les produits alimentaires, 100% des spots publicitaires possèdent un développement et une conclusion et la plupart d’entre eux (85%) sont introduits par une ouverture. Pour les produits de beauté, 70% possèdent une ouverture, 85% un développement et 100% une conclusion. Nous trouvons que la partie conclusion (ou clôture) paraît vraiment nécessaire. En effet, la clôture a pour principale fonction de faire vendre en permettant l’identification du produit, de la marque, du fabricant. Il est plus clair, voire cet objectif, que se trouve souvent en conclusion le slogan du produit, ou de la marque ou du fabriquant. Une conclusion telle que: Très nouveau, good bye cellulite seulement par Nivea body ou Roc, promesses tenues fait bien mémoriser la marque et fait croire aux téléspectateurs de la qualité du produit. 45 L’ouverture ou accroche a pour rôle d’interpeller les téléspectateurs, les inciter à regarder la suite du spot proposé afin d’éviter qu’ils ne zappent ou n’aillent vaquer à d’autres occupations en attendant que la plage publicitaire se termine. Les spots publicitaires de notre corpus commencent souvent par une question ou une affirmation. Une question, c’est pour susciter la curiosité des téléspectateurs de chercher la réponse eux-mêmes ou au moins de l’écouter (14 jours pour mincir visiblement? Publicité B8). Une affirmation, c’est pour l’objectif de faire poser les questions par les téléspectateurs à leur tour. Prenez cet exemple de la publicité pour «Eau St Amand»: «Vous buvez 1,5 litres d’eau par jour, autant savoir ce qu’il y a dedans…» Lorsqu’on écoute cette affirmation, les réactions seront différentes, une question pourrait se poser: «Qu’est-ce qu’il y a dedans alors?» Avec cette question, les arguments des producteurs de publicité ont une chance d’être écoutés par les téléspectateurs, qui ne peuvent plus quitter l’écran pour savoir «ce qu’il y a dedans» une bouteille d’eau St Amand. Suivant l’ouverture, l’objectif du développement est de convaincre, montrer, argumenter et expliquer les avantages du produit et/ou le comparer à un produit générique, et/ou distraire le public. Ce sont des opérations considérées comme nécessaires avant de présenter la marque et/ou le produit. La majorité des spots publicitaires de notre corpus utilisent le développement, cela signifie que l’étape convaincre/argumenter est vraiment importante, que l’on ne peut pas passer les moyens argumentatifs langagiers. Nous avons les structures argumentatives généralement utilisées dans la publicité télévisuelle, mais comment sont-elles mises en place? Nous savons très bien que pour réaliser un spot publicitaire, il faut au moins un de ces trois éléments: le langage, l’image et le son. Toutes ces trois composantes contribuent-elles à l’argumentation publicitaire? Si c’est bien le cas, chacune joue son rôle distinctif ou elles se combinent, se complètent entre elles? Pour répondre à ces questions, nous allons analyser tout d’abord le rôle des composantes verbales, à savoir que le langage est un élément fondamental de toute communication. 46 3.4. Procédés de la mise en argumentation Cette partie a pour objectif d’analyser plus profondément les éléments qui constituent l’argumentation et de voir comment les éléments argumentatifs s’enchaînent entre eux pour composer une structure complète. 3.4.1. Grille 4: Composantes verbales Pub Syllogisme, Topoï Mots de liaison Moyens mise en valeur no enthymème A1 x x A2 0 0 A3 x 0 C’est pourquoi A4 x x Mais,pour A5 0 0 Mais Tellement A6 0 0 Pour Délicieuse,plaire,surtout A7 0 0 Avec Belle,plaisir A8 x 0 A9 x x A10 0 0 A11 x 0 Avec,pour Plaisir,unique,tellement A12 0 0 Avec Equilibré A13 0 0 Pour Pureté naturelle,petit prix A14 0 0 Quand même Bon,si A15 0 0 Mais Horrible,cool A16 A17 A18 A19 x 0 0 0 x 0 0 0 Pour,et Pour,et,avec Et A20 0 0 Pour,et Bien,le problème Plus de surprise Facile,parfaitement,idéale,le même Manque Dommage,double plaisir très chocolat,grave trop bon Alors, et, avec, pour Équilibre,renforcer,plus,adore,nouveau Trop bien,trop bon,irrésistible Car,c’est pourquoi,avec,pour Plus d’ambiance Certifiés,uniques,équilibre, vrai goût Bon,c'est vrai,toujours,adorent Plaisir,liberté 47 Pub Syllogisme, Topoï no enthymème B1 0 0 Mots de liaison Moyens mise en valeur Différence,si, au-delà de,nouveau B2 0 0 B3 0 0 Et Irrésistible,anti,belle B4 0 x Pour,et Seulement,compétence,nouveau B5 0 0 Grâce à,pour B6 0 x Dès,pour B7 0 0 Et voilà,avec Depuis toujours,précieuse Plus,incroyable,nouveau,haute technologie naturelle La seule,facile à utiliser B8 0 x Avec Efficacité B9 0 0 B10 x x Grâce à,mais B11 0 0 B12 x x B13 x x B14 0 0 B15 x x B16 x 0 Plus que jamais,protégé,seulement par Simple,très nouveau,seulement,c'est prouvé Le plus bel,efficace,de moins Charmant/imparfait,2fois plus efficace,protégez Changé ma vie Plus,réparation totale,qualité professionnelle Aussi B17 x 0 Avec Encore plus, révèle B18 x 0 Parce que,pour Anti B19 0 x Et Anti B20 x x Avec Envie,si,alimentation équilibrée Avec,dès Pour,alors Qu’entend-on par “composante verbale” d’un spot publicitaire télévisé? Il s’agit de l’écrit (qui regroupe des mentions écrites contenues dans une publicité. Celles-ci sont divisées en deux classes: Texte simple, texte animé) et de la parole (qui contient la transcription des mentions orales des publicités, la présence et le type d’utilisation des voix-in et voix-off). Pour pouvoir bien analyser ces tableaux, nous devons revoir la grille 1-structure de surface. 48 Comme nous avons recensé, la voix-off est utilisée dans 97.50% des cas, la voix-in est moins présente (37.50% des cas). Pour les produits de beauté, on utilise 100% des voixoff, et 95% pour les produits alimentaires. 32.50% de publicités utilisent les textes, parmi lesquels les textes animés sont moins utilisés que les simples (20% contre 5% pour les produits alimentaires et 30% contre 10% pour les produits de beauté). Avec cet important pourcentage d’utilisation des paroles et textes, nous trouvons que la publicité télévisuelle, comme la publicité à la radio, sur les journaux, les affiches,…doit avoir recours au langage. Les mentions écrites et orales sont nécessairement utilisées dans la publicité télévisuelle pour mettre en évidence l’argumentation. Nous avons eu l’intention de mettre la partie “syllogisme et enthymème” dans la 3e grille-schémas argumentatifs, puisqu’avec le syllogisme on a un schéma argumentatif rationnel, mais ce serait plus logique de les analyser en même temps avec les topoï. Nous constatons que les textes apparus sur l’écran de la télévision sont souvent pour objectif d’illustrer la parole, c’est-à-dire que parrallèlement à la parole, on voit le texte. Prenons l’exemple de la publicité pour Diadermine: parrallèlement à l’explication de la voix-off des trois avantages du produit, le texte apparaît avec l’image: 1. affine 2. réduit l’effet de peau d’orange 3. raffermit Ce qui montre bien que le texte se trouve aussi dans la parole. Nous analysons alors essentiellement la mention orale dont la transcription se trouvera dans la partie “Annexe”. 3.4.1.1. Moyens mis en valeur A travers les deux tableaux présentés ci-dessus, nous voyons très bien que les publicitaires utilisent fréquemment les moyens mis en valeur pour argumenter et séduire leurs clients potentiels. Tout d’abord, pour transmettre l’idée selon laquelle leur produit est de bonne qualité, le meilleur et unique, les producteurs utilisent les adverbes, les adjectifs qualificatifs: - Nouveau DNAge, seulement par Nivea (Publicité B10) 49 - Nouveau Garnier movida, la seule coloration au lait d’abricot, sans ammoniaque (Publicité B7) - …se referme parfaitement pour une conservation idéale (Publicité A18) - Avec sa saveur unique Curly est croustillant et tellement fondant (Publicité A11) - Les produits Bjorg ont de vertues nutritionnelles uniques (Publicité A4) La nouveauté se présente fréquemment aussi comme un argument publicitaire ayant un grand impact sur le public: - Et maintenant le matin il adore les saveurs, avec le nouveau Actimel saveur vanille (Publicité A1) - Très nouveau good bye cellulite seulement par Nivea body (Publicité B11) Les publicitaires cherchent aussi à prouver que la qualité de leur produit est assurée, ils appelent la croyance du client en rassurant: - C’est prouvé (Publicité B11) - Roc, promesses tenues (Publicité B12) - Tous certifiés biologiques (Publicité A4) Avec les produits de beauté, les publicitaires donnent souvent un délai précis pour justifier l’efficacité de leur produit, et pour que leurs clients aient une référence pour vérifier l’honnêteé de la publicité : - Dès 8 jours la peau est lissée (Publicité B6) - Dès 4 semaines plus de 4 cm réduites et une taille en moins (Publicité B12) - En 3 semaines seulement (Publicité B4) Les publicitaires ont toujours le même but de convaincre pour faire acheter, obtenir l’efficacité voulue. Le consommateur qui a vu et mémorisé l’annonce, s’en souviendra (souvent inconsciemment) et reconnaîtra le produit devant lequel il se trouvera. Le positionnement d’un produit consiste à créer dans l’esprit d’un consommateur une image en cherchant à le distinguer des autres. On souligne souvent le type de clientèle ou bien le rapport entre le produit et le consommateur de même que les particularismes du mode d’emploi (accès facile, simple à utiliser). La facilité d’utilisation est aussi présentée comme un bon argument: - Le Roquefort Société est facile à ouvrir, facile à couper… (Publicité A18) - …Garnier movida, la seule coloration avec lait d’abricot, sans amoniaque, facile à utiliser (Publicité B7) 50 Et pour expliquer pourquoi leur produit est de meilleure qualité, les publicitaires ont bien précisé que c’est un travail des professionnels, très compétents et surtout que cette compétence est «pour vous» - futurs clients : - Notre compétence dermatologique, pour vous (Publicité B4) - La qualité professionnelle pour vous (Publicité B15) Finalement, le prix semble très important pour pouvoir obtenir la décision positive des clients potentiels. Les publicitaires ne peuvent se passer de ce détail comme argumentation. Un produit de bonne qualité, utile et en plus le prix raisonnable nous pousse plus vite à l’acheter: - Une pureté naturelle, sans grasse et à petit prix pour la partager (Publicité A13) Pour mettre en évidence la qualité, l’effet du produit, le comparatif (bien que ce soit interdit la publicité comparative) est souvent utilisé mais implicitement: - Innovation 2006 Roc…… maintenant c’est plus rapide. Dès 4 semaines plus de 4 cm réduites et une taille en moins (Publicité B12) - Des cheveux aussi brillants, aussi lisses, aussi forts que la nature. Nouveau Timotei bambou la nature est sublime vos cheveux aussi (Publicité B16) - Et leur défense naturelle peut être plus sollicitée que celle des aldultes (Publicité A1) Le meilleur procédé d’indiquer le plus haut degré c’est le superlatif. Outre la forme habituelle du superlatif (le meilleur et le mieux) on voit souvent apparaître, et de plus en plus fréquemment, le superlatif absolu qui exprime la qualité à un très haut degré, mais sans comparaison. Cette forme est marquée au moyen des adverbes fort, bien, infiniment ou des préfixes super-, extra-. Certains adjectifs ou substantifs équivalents au superlatif absolu, ce sont ceux qui marquent une qualité exceptionnelle: supérieur, optimal, éclatant, unique, sublime, ou bien perfection, exception: un prix d’exception, une protection optimale, une preuve éclatante. Comme les lexèmes essentiels la performance, la qualité, le prix sont devenus trop fréquents et donc peu efficaces, les publicitaires essayent de les remplacer par d’autres procédés langagiers qui sautent plus aux oreilles, frappent l’imagination, font réfléchir et rechercher l’essentiel. - Voyez la différence, sentez la différence Au delà de blancheur, la brillance (Publicité B1) - En chaque femme sommeille passion et force (Publicité B17) 51 - Votre peau comprendra (Publicité B10) Des substituts parfaits du degré très élevé sont aussi des noms de sémantique abstraite, renforcés par des indicateurs de sens. Nous rencontrons souvent le plaisir, l’amour, la passion, le goût,…. Bien sûr, ces noms peuvent avoir leur propre valeur sémantique dans le contexte littéraire, mais dans le message publicitaire ils servent à flatter le consommateur potentiel et constituent une condition de réussite: - Weight Watchers, pour aimer faut goûter (Publicité A20) - Pleateau dégustation de la Société, le même plaisir jusqu’au bout (Publicité A18) En général, le vocabulaire publicitaire se limite aux mots les plus courants de la langue française, l’histoire d'être comprise de tous. Mais la publicité n'hésite pas à parsemer son discours de termes scientifiques compliqués. Dans quel but? Donner le sentiment que le produit est de haute technicité ou que celui qui vante ses mérites est un expert. Les produits de beauté se vendent grâce à des liposomes, du prorétinol actif, des enzymes, de l’axide folique, des ingrédients biomimétiques ... - Un gel à la L carnitine prodigieux qui réduit l’aspect cellulite sans massage (Publicité B11) - Lipocure sérum d’attaque au manganèse et à l’adrénalise (Publicité B18) - Sa formule à l’axit folique protège activement l’adn des cellules de l’épiderme (Publicité B10) Une explication scientifique, même bancale, et même si elle n'explique rien à tel point elle a été vulgarisée pour pouvoir être comprise par tou(te)s, suffit en général largement à convaincre le consommateur. Un exemple très concret est celui de la publicité pour le yaourt à boire Actimel. Ce qui est frappant, c'est que la publicité n'utilise qu'un seul et unique argument pour convaincre: le «ferment actif» est une solution miracle, c’est une alimentation équilibrée qui participe à renforcer les défenses naturelles et qui aide votre enfant à être plus résistant. Toujours plus fort dans les arguments pseudo-scientifiques qui sont censés convaincre, il y a la publicité pour la crème antirides «Retin-Ox+», des laboratoires Roc. La publicité commence sur l'image d'une sculpture féminine dont la peau fait des plis à toutes les entournures. Le sous-titrage précise: «Ces images représentent une sculpture et ne traduisent pas l'effet avant-après». Ensuite on nous montre le principe actif à l'aide d'une image de synthèse, qui est sensée représenter la couche supérieure de l'épiderme qui se 52 retend en moins de deux, sous l'effet de la crème magique. Et pendant cette petite seconde d'images de synthèse, un grand 63% apparaît en haut à droite de l'écran puis disparaît aussitôt. Evidemment le téléspectateur ou plutôt la téléspectatrice est portée à comprendre que le produit raffermit la peau à 63%, ce qui est un bon pourcentage, 63%. En réalité, en regardant ce passage au ralenti, on peut lire en tout petits caractères, encadrant le 63%: «efficace chez 63% des femmes testées»; et en haut à gauche de l'écran on distingue aussi la mention « test in vitro »... Il fallait donc bien sûr comprendre que ce produit est efficace sur 63% des femmes testées in vitro. “Roc: Promesses tenues”. Les moyens mis en valeur constituent alors un procédé verbal de mise en argumentation bien efficace. En confrontant la partie 1.3 du premier chapitre, du cadre théorique, nous voyons que les procédés sémantiques et discursifs sont ici largement utilisés. On trouve les valeurs concernant le domaine de la Vérité: - Uhm les fourrés Bjorg: le vrai goût du chocolat (Publicité A4) concernant le domaine de l’Esthéti que: - Demak’up déjà belle pour demain (Publicité B3) concernant le domaine du Pragmatique: - Voyez la différence, sentez la différence (Publicité B1) concernant le domaine de l’Hédonique: - Avec sa saveur unique Curly croustillant et tellement fondant (Publicité A11) - Oh ça craque trop bon (Publicité A20) La définition, un procédé discursif, est répandue dans les spots publicitaires: - Taillefine fiz c’est l’eau de source des fruits (Publicité A19) - Un corps plus mince c’est toujours cet aspect cellullite (Publicité B6) - Cacolac c’est une delicieuse boisson rafraichissante (Publicité A6) Et la comparaison : - Des cheveux jusqu’à 95% plus résistants, jusqu’à 70% plus brillants (Publicité B15) - Plateau dégustation Société, le même plaisir jusqu’au bout (Publicité A18) Le procédé de questionnement à valeur argumentative correspond à un type de validation hypothétique: - Et vous si vous passez à la taille S (Publicité B20) 53 3.4.1.2. Mode d’enchaînement 3.4.1.2.1. Mots de liaison Les connecteur et opérateur constituent une catégorie des marques argumentatives ayant la fonction d’orientation argumentative. Les connecteurs sont des mots de liaison et d’orientation, qui articulent les informations et l’argumentation d'un texte. Ils mettent notamment les informations contenues dans un texte au service de l’intention argumentative globale de celui-ci. Sur les deux tableaux on constate un bon nombre de connecteurs logiques, parmi lesquels il y a les connecteurs introducteurs d’arguments (car, mais, parce que) et les connecteurs introducteurs de conclusion (alors, grâce à, pour que, c’est pourquoi). Pour convaincre, le texte argumentatif se doit d'être soigneusement structuré. Que ce soit dans la communication orale ou écrite, la clarté des relations entre les différents arguments permet au récepteur de suivre le fil du discours et d'adhérer à sa progression. Vous trouverez dans le tableau ci-dessous les mots de liaison (qui regroupent tous les connecteur, opérateur, préposition, coordination présents dans notre grille d’analyse) rangés autour des six relations principales qui peuvent s'instaurer entre les arguments et sont aussi présentes dans ce tableau les fonctions de ces foncteurs relationnels: Mots de liaison Relation logique Fonction Et,surtout,aussi,mais Addition Permet d’ajouter un argument ou un exemple encore,et puis… ou gradation nouveau aux précédents. Ainsi que, comme Parallèle Permet d’établir un rapprochement entre deux ou comparaison faits. Concession Permet de constater la validité d’arguments Malgré,quoique appartenant à la thèse adverse,tout en maintenant sa propre opinion. Mais,pourtant,alors que Car,parce que Opposition Donc,alors,c’est pourquoi Conséquence Cause Permet d’opposer deux arguments souvent pour mettre en valeur l’un d’entre eux. Permet d’exposer l’origine,la raison d’une idée. Permet d’énoncer le résultat,l’aboutissement d’un fait ou d’une idée. 54 Parmi les connecteurs introducteurs d’arguments, mais occupe une place importante dans la publicité. Très souvent, le mais introduit une opposition entre la réalité et l’idée reçue qui reste toujours implicite : - Les années passent mais plus que jamais je suis éclante de vie (Publcité B 10) - Ça ne rétablie pas tous les équilibres mais ça y récontribue (Publicité A4) Ce connecteur argumentatif, marqueur du principe de contradiction argumentative, relie deux énoncés: P mais Q. Il indique que le premier de ces énoncés comporte une visée argumentative (conclusion C) opposée à celle du second (conclusion non-C) et que le locuteur ne prend en charge personnellement que cette dernière conclusion. Soit cet exemple: - On ne peut pas vivre toujours auprès de la nature mais on peut faire un choix pour notre équilibre (Publicité A4) L’énoncé non P ( pas vivre toujours auprès de la nature) laisse prévoir une implication du type: pas de choix ( non P —>non Q). Malgré cette implication, la présupposition est renversée pour affirmer non P mais Q. Très varié et subtil, l’emploi de mais dans le message publicitaire renforce la persuasion de l’argumentation et requiert une certaine réflexion de la part de téléspectateurs. Le connecteur car est utilisé pour l’objectif de justifier l'argument précédent: - Maman sait que j’ai besoin d’énergie le matin, c’est pourquoi elle me donne des chocapics. C’est vrai. Car actuellement dans Chocapic il y a les céréales complètes (Publicité A9) Les connecteurs introducteurs de conclusion alors, grâce à, pour que, c’est pourquoi expriment l’idée que l'auteur déduit un argument de son argument précédent: - Joker presse les oranges à maturité dans 24h pour que les vitamines puissent bien réserver (Publicité A16) - …des cheveux jusqu’à 95% plus résistants et jusqu’à 70% plus brillants. Alors avant de les couper, essaie le nouveau gliss réparation totale (Publicité B15) La préposition est traditionnellement présentée comme un mot de liaison, un outil de subordination entre les groupes. Elle introduit un élément et le relie, le surbordonne à un autre élément. Toutefois, il faut reconnaître qu’outre ce rôle relationnel, les prépositions 55 ont un rôle sémantique. Elles contribuent à l’interprétation sémantique du groupe prépositionnel qu’elles introduisent. - Nouveau Garnier body tonic roll-on, pour lutter contre la cellullite rebelle (Publicité B6) - Les enfants ils profitent à fond de la vie. Et leur defense naturelle peut etre plus sollicitee que celle des aldultes (Publicité A1) - Les capitons ont des points d’encrage et c’est là qu’il faut agir (Publicité B19) 3.4.1.2.2. Topoï Il nous faut maintenant mettre en relation les connecteur et opérateur argumentatifs avec les topoï. Le topos, un principe général d'argumentation, est le garant qui autorise le passage de l'argument A à la conclusion C. C'est un principe général sous-jacent à un enchaînement argumentatif présenté dans un discours. Chaque topos peut apparaître sous deux formes, nommées formes topiques. Un topos concordant fixant pour deux échelles P et Q le même sens de parcours, peut apparaître sous des formes appelées converses, « +P, + Q » et « -P, -Q » - formes qui signifient qu'un parcours ascendant de P est associé à un parcours ascendant de Q, et qu'un parcours descendant de P est associé à un parcours descendant de Q. Cette forme topique concordante est visible dans de nombreuses situations du même type: - Maman sait que j’ai besoin d’énergie le matin, c’est pourquoi elle me donne des Chocapics. (Publicité A9) Un topos discordant, attribuant à P et à Q des directions de parcours opposées, peut se présenter sous les deux formes topiques converses: « + P, - Q » et « - P, + Q ». Nous rencontrons dans ce type de forme topique le principe de contradiction, réalisé par mais, comme en témoignent les exemples suivants: - On ne peut pas vivre toujours auprès de la nature mais on peut faire un choix pour notre équilibre. (Publcité A4) - Les années passent mais plus que jamais je suis éclatante de vie. (Publcité B10 ) - Les vitamines on en aura besoin pour rassurer toute la 56 journée. Le problème c’est que notre corps ne peut pas tout les stoker et chaque matin on repart au zéro. (Publicité A16 ) Les formes topiques fondent ainsi les schémas argumentatifs. Ce qui nous intéresse maintenant est de voir quels types de topos souvent utilisés par les publicitaires pour les produits cosmétiques et alimentaires? Tout d’abord, pour les produits alimentaires, on voit souvent les topoï concernant la santé. La santé est importante, alors pour avoir une bonne santé, il faut utiliser nos produits: - Maman sait que j’ai besoin d’énergie le matin (Publicité A9) - Les vitamines on en aura besoin pour rassurer toute la journée (Publicité A16) Avec la vie moderne, il est difficile d’avoir un moment calme. Un autre topos se pose: quand on ne peut pas éviter quelque chose, on essaye de vivre avec: - On ne peut pas vivre toujours auprès de la nature mais on peut faire un choix pour notre équilibre (Publicité A4) Ce type de topos se retrouve aussi dans les spots publicitaires pour les produits cosmétiques: - XLS duo: mincir, raffiner dans le cadre d’une alimentation équilibrée (Publicité B20) Paraître bien, c’est d’abord et avant tout être bien dans sa peau et être en accord avec ses propres critères de beauté et de santé. Pour y arriver, on fait de l’exercice, on refuse de sauter des repas. Et on commence tous les jours par un petit déjeuner équilibré. Le reste suivra bien. Faibles en gras, les céréales Bjorg sont une source essentielle d’éléments nutritifs. Se sentir bien, c’est être en accord avec ses propres critères de beauté et de santé. Pour les femmes, la beauté est question primordiale. Les publicitaires profitent de leur inquiétude pour les convaincre: plus on est vieille, moins on est séduisante, alors plus on doit s’occuper de sa beauté: - Les années passent mais plus que jamais je suis éclatante de vie (Publcité B10) - 40 ans c’est le plus bel âge tant qu’il n’ y a pas de rides là ou là (Publicité B12) Comment est une femme séduisante? Certainement pas une femme grosse. Alors pour être séduisante, on doit être mince. Les publicitaires comprennent très bien le souhait des femmes, ils commencent toujours leur publicité par ce type de topos: 57 - Un corps plus mince c’est toujours cet aspect cellullite (Publicité B6) - Avec une taille en moins tout y va (Publicité B12) - Innovation, la minceur en 3 dimensions (Publicité B4) - 14 jours pour mincir visiblement?(Publcité B8) Pour les arguments suivants: - Les cheveux sont abimés, les couper pas question (Publicité B15) - Ce qui est charmant chez un enfant doit être parfait chez un aldulte (Publcité B15) Les publicitaires partent d’un principe: tout le monde aime le parfait. Alors, pour ce qui n’est pas parfait, il faut l’éliminer. Les cheveux abimés? On doit les couper. C’était votre habitude jusqu’au jour où vous découvez le shampooing Schwarzkopf. 3.4.1.3. Syllogisme et enthymème Si le topos est fondé sur l’opinion commune, le syllogisme ou l’enthymème sont la mise en forme rigoureuse de l’argumentation rationnelle. Dans la publicité, il existe rarement un syllogisme strict comme: Tout homme est mortel (majeure) Socrate est un homme (mineur) Donc il est mortel (conclusion) Soit la publicité pour le shampooing Timotei: - Des cheveux aussi brillants, aussi lisses, aussi forts que la nature Nouveau Timotei bambou, la nature est sublime vos cheveux aussi que l’on peut interpréter comme un syllogisme complet suivant: - Des cheveux sont aussi brillants, aussi lisses, aussi forts que la nature (or) la nature est sublime (donc) vos cheveux sont sublimes aussi Ce qui est ici intéressant, c'est que le syllogisme est effacé et qu'un autre énoncé («Nouveau Timotei bambou») apparaît en lieu et place de la conclusion attendue. Le mouvement qui va de la généricité à une assertion conclusive portant sur un objet particulier (Nouveau Timotei bambou), et non plus sur la classe générique (sublime), nous sort, en fait, du syllogisme logique et nous fait tout simplement entrer dans le discours argumentatif et dans le domaine de l'enthymème. 58 L’enthymème publicitaire sous-entend une ou deux propositions du syllogisme. Soit la publicité pour Chocapic: - Maman sait que j’ai besoin d’énergie le matin, c’est pourquoi elle me donne des Chocapics. Dans cet exemple, la prémisse mineure est effacée. Le passage de la prémisse majeure «Maman sait que j’ai besoin d’énergie le matin » à la conclusion « c’est pourquoi elle me donne des Chocapics» est rendu possible par l’intermédiaire de la prémisse: «Or Chocapic nous offre beaucoup d’énergie». L’analyse du corpus nous permet de conclure que contrairement au syllogisme, les enthymèmes sont abondants dans la publicité. Le choix de l’enthymème est expliqué par diverses raisons. C’est peut-être un mécanisme de la publicité pour surprendre et puis faire mémoriser le téléspectateur comme le cas du Timotei bambou. Plus subtilement, le publicitaire veut effacer la prémisse ou la conclusion pour rendre le slogan juridiquement intouchable, la publicité n’est ainsi pas dite mensongère, tel est le cas de Chocapic. Enfin ce choix peut être à but purement ludique pour la plupart des cas comme le rappelle Barthes: «L’enthymème n’est pas un syllogisme tronqué par carence, dégradation, mais parce qu’il faut laisser à l’auditeur le plaisir de tout faire dans la construction de l’argument: c’est un peu le plaisir qu’il y a à compléter soi-même une grille donnée». Il nécessite donc souvent un travail interprétatif de la part du téléspectateur. De ce qui précède, il ressort que l’importance porte sur le choix des données et des prémisses d’une argumentation en fonction du public spécifique. Il est nécessaire que le locuteur se fasse, parmi d’autres, une représentation de son auditeur. Non seulement des connaissances qu’il a, mais des valeurs auxquelles qu’il adhère. «Pour le convaincre, il faut le mettre dans une position telle qu’il n’y a pas la possibilité de refuser les propositions avancées, c’est-à-dire que les propositions sont les plus proches possible de l’opinion générale». (Grize) Le premier procédé de mise en argumentation est tâché aux composantes verbales. Cependant nous avons 2.5% des spots publicitaires qui ne contiennent pas la mention orale. Nous analysons les spots publicitaires télévisés, nous savons bien ce qui différencie la télévision avec d’autres supports c’est à la fois l’image et le son. 59 3.4.2. Composantes paraverbales et non-verbales D’après Kerbrat-Orecchioni C. (1990 : 137) dans la communication en face à face, les ingrédients suivants se trouvent impliqués : - Signes voco-acoustiques, qui se répartissent en deux catégories: + Matériel verbal, i.e. phonologique, lexical, et morpho-syntaxique. + Matériel paraverbal, prosodique et vocal: intonations, pause, intensité articulatoire, débit, particularités de la prononciation, différentes caractéristiques de la voix. - Signes corporo-visuels, de nature non-verbale, parmi lesquels on peut distinguer: + Les statiques, c’est-à-dire tout ce qui constitue l’apparence physique (le look) des participants: caractères naturels (physionomie, stature…), acquis (rides, cicatrices, bronzage…), ou surajoutés (vêtements et parures, maquillage, bijoux, décorations…) + Les cinétiques lents, c’est-à-dire essentiellement les attitudes et les postures; + Les cinétiques rapides: jeu des regards, des mimiques et des gestes. Les cinétiques lents et rapides relèvent de la discipline appelée depuis Birdwhistell “kinésique”. Les éléments présentés ci-dessus sont nécessaires pour compléter la structure argumentative de la publicité télévisuelle. Nous n’avons pas rédigé une grille d’analyse précise pour les composantes paraverbales et non-verbales, en raison de leur complexité analytique. Pour attirer l'attention de l'acheteur potentiel, les publicités sur Internet vont user et abuser des images clignotantes ou animées, et dont de nombreux sites Internet ou pages web nous abreuvent au fur et à mesure que nous surfons sur «la toile». De plus en plus de pages web nous bombardent aussi de fenêtres de publicité qui s'ouvrent automatiquement dès que l'on accède à la page; c'est un très bon moyen pour attirer l’œil de l'internaute, qui doit fermer la fenêtre pour consulter la page web. Les publicités télévisuelles, à leur tour, pour attirer l'attention, jouent à la fois sur le son et l'image; et le son joue souvent un rôle au moins aussi important que l'image: «95% des spots publicitaires diffusés pendant un programme ont un volume sonore qui dépasse de 50% celui du programme» (Léauté T., 2004 : 4). 60 3.4.2.1. Argumentation iconique Qu’elles soient ou non légendées, les images me parlent (Pierre Fresnault-Deruelle) Les critiques vertueux ignorent le caractère ludo-esthétique de la publicité. Ils supposent que le consommateur va considérer comme vrai tout ce qu’il verra en image, et que l’efficacité publicitaire est un effet d’endoctrinement. (Edgar Morin) Dans cette partie, nous essayerons de répondre aux questions suivantes: quel rôle les images jouent-elles dans l’argumentation publicitaire? Quelles sont les relations entre l'image et la parole? “L’apprenant d’une langue étrangère, qu’il soit en classe de langue ou en pays d’accueil, est d’abord et avant tout confronté à une “parole” étrangère. Or dans la parole, la langue ne se présente jamais nue mais au contraire toujours habillée du costume de la voix du locuteur et du pardessus de ses attitudes, gestes, mimiques et regards.” (Jean-Marc Colletta, 2005, p.32). Pour justifier le rôle de l’image dans l’argumentation, nous citons ici l’idée de Moirand S. (1990 : 140): “L’argumentation vise toujours à influencer l’autre en agissant sur ses “univers de croyance”. On voit comment le client est inscrit dans le texte: présence de marques personnelles (vous, votre, vos), impératifs (sentez, prends soin de toi, essayez…), position “sujet” dans certains énoncés (vous buvez). Une des stratégies de la mise en texte est de faire disparaître la conclusion ou les croyances que l’on prête à l’autre, et une des stratégies de l’annonce publicitaire est justement de mettre en image soit la conclusion, soit les arguments.” Un des modèles les plus répandus exprimant la communication publicitaire est le modèle dit AIDA. AIDA est un sigle: il tient lieu pour attirer l'Attention, faire naître l'Intérêt, susciter le Désir et inciter à l'Action. Dans ce modèle, le rôle d'attirer l'attention est dévolu à l'image. En pratique, le message efficace constitue un heureux mariage du texte et de l'image, ou mieux qu'un mariage: un couple marchant au pas. Reeves qui est un publicitaire expérimenté, prétend que l'image doit répéter la même chose que le texte (Quand vous dites “cette tablette se dissout en milliers de bulles minuscules”, montrez en même temps 61 la tablette se dissolvant en milliers de bulles minuscules.). La redondance image-texte n'est pas superflue en persuasion, les publicitaires le savent bien. Les messages publicitaires sont alors le plus souvent des messages bi-codés: image+texte. Le rôle de l'image dans ce travail d'équipe peut varier selon les circonstances, les problèmes à résoudre, le talent des communicateurs. L'image et le texte jouent un rôle redondant l'un par rapport à l'autre. L'image illustre alors ce que le texte dit déjà, et vice versa; c'est en quelque sorte un jeu de paraphrase. Mais l'image peut aussi apporter un complément d'information: montrer ce que le texte peut difficilement décrire, exprimer des qualités différentes du texte, ajouter des éléments suggestifs. Enfin, l'image peut jouer un rôle poétique; l'image participe alors de la communication de l'envoûtement. De toute évidence, elle dépasse dans ce cas sa fonction informative; c'est là qu'elle devient vraiment persuasive. Pouvons-nous comprendre cette phrase sans illustration des images: «Il y a encore 40 mille ans, on mettait souvent du temps avant de passer à table, c’est pourquoi on inventa Apéricube.»? L’image des primitifs qui vivaient de chasser et leur vie dépendait beaucoup de la nature illustrent bien la question de l’utilité du produit. Hors du côté utilité, un autre est vanté: Apéricube, un produit qui a existé depuis très longtemps, existait et existe pour toujours. Une marque daté de l’ère primitif qui survit encore de nos jours doit être une bonne. Les rapports entre l’image et le texte peuvent engendrer des effets divers auprès des récepteurs. Dans le cas de la relation d’illustration, l’image se contente de répéter le texte. Dans le cas d’une relation de complémentarité, l’image complète ce que dit le discours. Par ailleurs, les rythmes de l’image et du texte s’influencent mutuellement. L’image peut anticiper ou suivre le déroulement du texte. La publicité de Bjorg commence par les images qui sont filmées vite et donnent aux téléspectateurs la sensation d’être déséquilibre, désorienté. La voix-off commente: On ne peut pas vivre toujours auprès de la nature (Publicité A4) Heureusement: «mais on peut faire un choix pour notre équilibre», et ce choix «c’est Bjorg» L’image participle pleinement au dispositif stratégique de la publicité, à travers sa mise en scène attractive du produit et de l’impact qu’elle exerce consciemment ou non sur 62 son récepteur. Mais par son statut d’icône, elle établit un cadre argumentatif différent de celui du texte publicitaire. Prenons maintenant le spot publicitaire de Diadermine comme exemple pour évaluer le rôle de l’image dans la publicité télévisuelle: Par la mise en scène du diaporama pseudo-scientifique constitué de 3 images en gros plan, supposées prises à date régulières pendant 3 semaines, numérotées «grade 3» à «grade 1». L’endroit exact de la commissure étant encadré. On voit tout d’abord une argumentation par la preuve étant apportée par une image. Par la voix-off: - La structuration de l’intervention: Explication de l’apparition des rides suivie de celle de l’effet du produit, le tout illustré, ce qui ressemble à un discours scientifique. - Le contenu lexical de cette intervention: on retrouve l’isotopie médicale «...effet peau d’orange» et «résultats cliniques» et une grande précision du vocabulaire. - Le timbre de la voix-off: masculin, rassurant. Par les différentes mentions écrites: - «Test in vitro» et «Consultez votre pharmacien» sont des mentions obligatoires pour tout médicament. Les produits cosmétiques n’appartiennent pas à la catégorie de produits qui peuvent nuire à la santé si mal utilisés. Mais leur présence, dénuée de toute obligation légale conforte le sérieux du produit et l’identifie plus à un médicament qu’à un produit de beauté. Leur présence est une tentative de recatégorisation du produit. - «Test in vitro», «laboratoire», «3 semaines» et le texte animé «Grade 3» décrémenté jusqu’à 1 illustrent l’exposé scientifique en donnant des informations contextuelles sur les tests supposés. La voix-off explique la formation des rides, des images montrant des parties ridées du visage d’une jeune femme en sont un support visuel. Puis la voix-off commente l’action du produit. Des images arrêtées sur la même partie du visage, présentées comme un diaporama scientifique, ou chaque photo est numérotée sont le support de la voix-off. La publicité s’inscrit dans un ensemble de codes linguistiques et iconiques. En suivant les codes de lecture de l’image, le publicitaire facilite la compréhension de son téléspectateur et crée avec lui une certaine connivence. Pourtant, créer son propre code 63 visuel n’est l’ambition que des très grandes marques (comme Hugo Boss, par exemple). La plupart des marques tentent de trouver le point d’équilibre entre l’innovation visuelle et le code linguistique. Comme on l’a constaté au début, toutes les composantes de ce clip sont coordonnées pour imiter un exposé scientifique très bref et dans les moindres détails. Ceci a pour but de donner au produit une image de marque de médicament. Cette technique est très utilisée pour les produits de beauté (Par exemple: Garnier body tonic, XLX duo,…). Il est important pour ces annonceurs que leurs produits soient plutôt associés à une image scientifique qu’à celle de la poudre de perlimpinpin. L’un des intérêts de l’analyse de l’image publicitaire est alors de faire comprendre les relations entre le visuel et le verbal, relations déterminantes dans une société de l’image. Le rapprochement entre le discours et l’image donne un sens au message et peut influencer l’interprétation de ce dernier. Le discours explicite l’image comme l’image illustre le discours. Les mots et l’image interagissent, se complètent, s’éclairent. Il ne s’excluent pas, au contraire, ils se nourrissent mutuellement. La perception des figures n'est pas forcément consciente mais guide l'interprétation du message. Ecouter 100 fois une chose ne vaut pas une fois de la voir. C’est un proverbe international et les publicitaires en profitent bien. En réalité, un des avantages de la télévision par rapport à d’autres média est qu’elle possède à la fois les sons et les images. Si les explications ne suffisent pas pour convaincre les téléspectateurs, alors les images interviendrons. Et nous avons encore le rôle du son… 3.4.2.2. Argumentation sonore Nous avons vu que les statistiques et kinésique, qui constituent la composante nonverbale, sont un procédé efficace de la mise en argumentation publicictaire. Cependant, d’après Léauté T. (2004 : 4), “le son joue souvent un rôle au moins aussi important que l'image”. 64 En nous basant sur ce tableau que le son sera analysé: Repères Statut Voix Observations In, diégétique Dialogue ou monologue. Off, diégétique ou extra-diégétique Voix narrative, reconnue ou anonyme Musique In, diégétique Reconnaissance immédiate ou décalée du statut diégétique. Rôle de la musique dans la perception Off, diégétique ou extra-diégétique de la situation ou la caractérisation des personnages. Bruits In, diégétique Contribution à l'effet de réel. Pour comprendre ce procédé de la mise en argumentation sonore, nous devons revoir encore une fois la grille 1-structure de surface. Comme nous avons recensé, la voix-off est utilisée dans 97.50% des cas, la voix-in est moins présente (37.50% des cas). Pour les produits de beauté, on utilise 100% des voixoff, et 95% pour les produits alimentaires. La présence de la musique est assez fréquente puisque 70% en utilisent une. 15% des publicités doivent avoir recours aux bruits. Nous constatons que le bruit est utilisé souvent pour montrer l’ambiance, le contexte. Nous commençons notre analyse sonore par le résultat d’une statistique (Léauté, 2004 : 6): “S'il n'y a qu'un seul message dans une publicité, ce message sera mémorisé du premier coup par 76% du public, par 50% seulement s'il est dilué parmi 7 ou 8 autres messages, 44% s'il y a 15 messages.” Ces chiffres révélateurs nous montrent à quel point il est efficace de réduire une annonce publicitaire à quelques phrases-clés, quitte d'ailleurs à répéter plusieurs fois ces phrases pour qu'elles soient mieux assimilées par le public. La répétition du nom du produit et/ou de la marque est ainsi un moyen extrêmement utilisé dans tous les média audio, à l'image des publicités télévisées pour les céréales Chocapic ou pour le produit Curly, qui répètent respectivement 3 et 4 fois le nom du produit en 20 secondes de message publicitaire... Mais le record absolu dans cette catégorie est indéniablement tenu par les publicités qui utilisent un «jingle nominatif», c'est-à-dire une chansonnette dont les paroles reprennent le nom du produit ou de la marque, et le répètent encore et encore. Nous avons 65 tous fait l'expérience d'un thème musical que nous avons écouté ou simplement entendu un matin, et qui nous trotte dans la tête toute la journée; c'est précisément le but recherché par les annonceurs à travers ce type de publicité. Et quand une personne qui a entendu le jingle un matin, se met à le siffloter pendant la journée au bureau et en fait profiter tous ses collègues, c'est l'effet de la publicité qui en est découplé. Le produit ou la marque est alors irrémédiablement associé(e) à ce jingle immédiatement identifiable. Nous pouvons être sûrs que parmi vous, les jeunes téléspectatrices vietnamiennes, il y a des gens qui étaient au moins une fois confus en écoutant chanter cette musique par les garçons: Tôi muốn vô tư cùng bạn bè đi khắp nơi. Là, les publicitaires ont obtenu leur objectif (La mémorisation des chansons et donc du nom du produit). Parmi les influences les plus importantes qui se retrouvent dans notre société, on retrouve en grande partie la publicité qui accroche et attire les auditeurs. Chez les jeunes la passion pour la musique est aussi un facteur déterminant dans leurs manières de fonctionner dans la société. L’environnement sonore peut être un élément clé en ce qui attrait au comportement de la population et de leur consommation de biens et services. Les choix musicaux (environnement sonore) font généralement parties du message publicitaire. L’influence est l’effet direct et indirect que l’auditeur subit lors du visionnement de la publicité. Le bruit constitue aussi un moyen d’illustration efficace. - Vos cheveux sont abimés ? Les couper pas question (Publicité B15) Paralèlement à l’image d’une fille qui coupe ses cheveux, la voix qui parle en même temps avec le bruit causé. Et puis la conclusion: - Alors avant de les couper, essaie le nouveau gliss réparation totale (Publicité B15) Le bruit du ciseau cassé nous rend plus confiant au produit. Avec Schwarzkopf, les cheveux abimés ont plus d’une chance d’être restitués avant d’être coupés. 4. Conclusion de l’analyse Après avoir analysé les grilles contenant les éléments constituant un spot publicitaire, nous résumons maintenant la structure argumentative globale de la publicité télévisuelle ainsi que ses procédés de mise en évidence cette structure. 66 4.1. Les phases argumentatives De manière générale, on peut distinguer, au sein de l’argumentation publicitaire quatre principales phases: Première phase: La valeur d’attention. Deuxième phase: La compréhension de la promesse. Troisième phase: La crédibilité / adhésion / sympathie. Quatrième phase: La signature / attribution / mémorisation. Ce n’est qu’en passant par ces différentes phases qu’un message publicitaire peut espérer une efficacité maximale. Première phase: les stratégies d’attention La nécessité d’accrocher l’attention est absolue. Pour attirer l’attention des téléspectateurs, l’ouverture doit êtres séduisant. Les publicitaires utilisent soit les moyens linguistiques (le topos, les questions,…), soit les images animées, … Les publicités pour les produits de beauté attirent l’attention des téléspectateurs en construisant l’image des femmes soit inquiétant de leur beauté (dans ce cas-là on ne les laisse pas s’en inquiéter trop longtemps, la solution est donnée tout de suite), soit souriantes et fières de leur beauté. Une famille heureuse, les enfants sages et gloutons,…sont souvent les images qui commencent les publicités pour les produits alimentaires. Attirer l’attention est donc la première phase vers la persuasion. Toutefois, dans la plupart des cas, la publicité ne s’arrête pas à cette première exigence. Si la formule synthétique sur la création publicitaire est adéquate: «création = attraction + persuasion», il reste encore à découvrir ce que recouvre le terme de «persuasion». Il semble bien que ce soit une combinaison des trois autres phases de la persuasion publicitaire. Deuxième phase: la compréhension de la promesse La perception de la publicité étant garantie, il faut encore que le téléspectateur soit en mesure de comprendre le message. La compréhension constitue un moment central de la communication publicitaire dans la mesure où le consommateur doit saisir l’axe 67 publicitaire, la raison qui le motivera à acheter ce produit plutôt qu’un autre et la preuve qui rend la promesse crédible. Même s’il n’y a pas de critique, le concept de USP (pour Unique Selling Proposition) devrait gouverner le choix de la promesse, en garantissant l’unicité (une seule promesse par publicité) et l’exclusivité: la concurrence n’y ayant pas pensé ou n’étant pas en mesure de le faire. La difficulté principale consiste ici à trouver les meilleurs arguments pour convaincre le client potentiel. Troisième phase: la crédibilité, l’adhésion et la sympathie Le concept de cible prend ici une dimension toute particulière. Tout message publicitaire doit s’adresser à une cible à partir d’un langage et d’arguments qui coïncident avec les attentes des clients potentiels. L’adhésion ne recouvre pas seulement le partage de certaines valeurs ou la conviction face à certains arguments, mais aussi la levée de freins éventuels: réticences, préjugés, tabous, nature superflue, voire nocive, du produit. Nous verrons qu’on se trouve au cœur même de la persuasion publicitaire. Quatrième phase: la signature, l’attribution et la mémorisation Remarquer une publicité, la comprendre et être séduit par ses arguments peut conduire à une intention d’achat, mais encore faut-il que l’éventuel consommateur soit en mesure d’identifier l’annonceur et de se souvenir de son message. Le slogan et le logo jouent un rôle important dans cette étape. 4.2. Les vecteurs de la persusion Ce n’est qu’en passant par l’ensemble de ces phases qu’un message publicitaire peut espérer une efficacité maximale, c’est-à-dire un effet potentiellement persuasif. Mais quels sont les vecteurs de la persuasion? Ces vecteurs se jouent essentiellement au niveau de la troisième phase (crédibilité, adhésion, sympathie), qui mérite d’être auscultée avec plus d’attention. 68 La crédibilité: premier axe de la persuasion publicitaire Parmi les éléments assurant la crédibilité, l’un des plus fondamentaux est la mise en scène d’experts. Ces experts peuvent être réels, par exemple des stars, comme pour Chocapic. La crédibilité de l’annonceur peut aussi être «prouvée» via une démonstration. Le schéma publicitaire bien connu des images «avant» et «après» vise d’une certaine manière à garantir l’efficacité du produit et à entretenir la crédibilité de l’annonceur. Dans ce type d’argumentation, le rapport texte-image devient central: le texte «énonce» ce que l’image «prouve». L’adhésion: deuxième axe de la persuasion publicitaire Les techniques de base de l’adhésion sont la répétition et l’amplification. - La répétition est une technique largement éprouvée, que ce soit au niveau interne (mention à de multiples reprises de la marque sur une annonce) ou au niveau externe (multiplication des annonces). Pourquoi est-ce persuasif ? Parce que la répétition rassure, endort la vigilance et renforce la mémorisation. - Parmi les autres techniques, l’amplification est l’une des ficelles les plus fréquemment utilisées. Son fonctionnement est d’ailleurs particulier. Admettons que les clients potentiels considèrent que les produits anti-cellulite fonctionnent dans 50% des cas. Si une publicité leur dit qu’une crème fonctionne dans 98% des cas (100% ne serait pas crédible), ils penseront sans doute que c’est une exagération typiquement publicitaire, mais augmenteront inconsciemment leur estimation de départ (…des cheveux jusqu’à 95% plus résistants et jusqu’à 70% plus brillants - Schwarzkopf). Le processus est bien connu des négociateurs: demandez 150 si vous désirez obtenir 100. La sympathie : troisième axe de la persuasion publicitaire La publicité corporate n’a pas pour but de vendre directement quelque chose, mais de créer un climat favorable à la consommation. La persuasion devient alors indirecte. L’essentiel est de faire en sorte que le téléspectateur se sente bien avec telle ou telle marque: toucher la cible en lui adressant un discours euphorique. 69 Cette étape pré-persuasive est capitale aussi bien du point de vue de la crédibilité de l’entreprise que de sa capacité à associer ultérieurement un de ses produits ou services avec ce climat favorable. Aujourd’hui, la marque valorise souvent moins son produit que ses prospects: songeons aux slogans de Saint Amand: Vous buviez quoi avant? ou de Weight Watchers: pour aimer faut goûter. 4.3. Le double chemin de la persuasion Le cheminement global du processus de persuasion est aujourd’hui relativement bien connu. On sait ainsi qu’il existe deux chemins de la persuasion: une route centrale et une route périphérique. Qu’entend-on par là ? La route centrale est celle où les téléspectateurs d’un message persuasif évaluent avec attention les arguments proposés. La route périphérique est celle où la raison cède la place à l’émotion, l’intuition, les impressions. L’idée de base est que chaque être humain est tellement bombardé de messages persuasifs qu’il ne peut littéralement pas en faire le tour. Il fera donc un tri parmi les messages reçus, certains qu’il examinera avec attention, par exemple parce qu’il a un motif particulier de le faire (route centrale), d’autres, majoritaires, de manière superficielle (route périphérique). La route périphérique met en jeu des processus largement inconscients. D’abord, les arguments sont filtrés, ensuite on se soumet à des influences externes: on sera par exemple plus convaincu par la personne qui dit le message que par le message luimême. On fait confiance à des règles générales de bon sens, on perd une partie de son sens critique, on est sensible à certaines images. Le passage par la route périphérique diminue les capacités de rationalisation. Or, il est d’autant plus difficile pour une annonce publicitaire d’attirer l’attention via la route centrale que le lot de messages publicitaires rencontrés chaque jour nous incite à tout faire passer par la voie périphérique. Les publicités pour Vichy, Actimel, Timotei, Taillefine,… en deux parties, offre idéalement les deux voies. Le versant émotionnel, non rationnel, de la persuasion (beauté) vise la route périphérique. L’explication rationnelle des avantages du produit emprunte la route centrale. 70 En conclusion, on peut dire que l’enchaînement Accroche, Argumentation, Présentation du Produit suivi ou accompagné du Slogan de la marque est le schéma classique de la publicité télévisuelle et répond aux besoins spécifique du média télévisuel. Il est d’abord nécessaire d’intéresser les spectateurs afin d’éviter qu’ils relâchent leur attention, quittent leur écran de télévision, ou changent de chaîne. D’où l’utilisation de tous les moyens possibles pour attirer l’attention et la garder. L’exercice est difficile, les annonceurs n’ont que 3 à 4 secondes pour arriver à leur fin: persuader les gens de rester devant leur télévision et être attentifs. Les moyens sont les effets comiques, une création d’attente comme le suspens ou la mise en question d’une idée appartenant à la doxa ou une utilisation énigmatique d’un élément appartenant à la même doxa. D'une manière générale, le chemin de la persuasion publicitaire passe par la valeur d'attention, la compréhension de la promesse, la crédibilité, adhésion, la sympathie, la signature, l'attribution et la mémorisation. Et dire que le meilleur des produits ne pourra connaître une vie aussi durable sur le marché si personne n'est au courant de son existence, même s'il répond à un besoin spécifique. D'où l'importance d'une bonne communication. C'est pourquoi les publicitaires affinent les études sur les comportements et les styles de vie, mais aussi sur l'exposition du public à la publicité. Le consommateur est en fait une cible qu'il faut atteindre. Il faut s'adresser à lui directement, mais également être présent dans son environnement. 71 Conclusion générale Pour conclure, nous pouvons affirmer qu'il y a une intention injonctive, qui pousse le lecteur à acheter le produit dans les publicités. Pour que les téléspectateurs s'arrêtent sur une publicité, il faut attirer leur attention. Mais comment? Grâce à l'originalité et à l'attractivité du texte et de l'image, qui peut se manifester par les couleurs, la musique, mais aussi à une rhétorique précise qui inclut la figure de la répétition, celle des mots et celle des images. On a vu que la structure argumentative publicitaire est plus complexe que le simple schéma traditionnel «émetteur-message-récepteur». De nombreux aspects rentrent en compte. L'exercice n’est pas simple; argumenter suppose que celui qui s'y engage reconnaisse rentrer dans une situation de communication. On peut même aller jusqu'à poser les limites de l'argumentation en réfléchissant à la question de l'existence de l'argumentation. La structure argumentative des spots publicitaires n’est pas alors un simple procédé de mise en relation de données avec une conclusion. Plusieurs facteurs qui jouent et qui sont mis en évidence. Comme nous avons essayé de le montrer, l’argumentation publicitaire est le travail de combinaison entre les composantes verbales, paraverbales et non-verbales. Nous sommes encore une fois surprise de Kiabi. Le slogan a été changé, ce n’est plus «Kiabi habille à la mode» mais il s’agit actuellement de «Kiabi, la mode à petit prix». Avec le petit prix mais on est toujours à la mode, nous n’avons pas de raisons pour choisir une autre marque. Les spots publicitaires peuvent donc devenir un auxiliaire précieux, si nous voulons associer le média à l’enseignement de la langue. Pourtant l’application de la publicité dans l’enseignement n’est pas un travail facile, il exige la vraie passion des professeurs envers «cet art». Nous présentons ici quelques liens pour ceux qui voudraient traiter la publicité comme support dans un cours de FLE. Si vous ne disposez pas de magazines français, le site http://www.ma-collection-depubs.com répertorie de très nombreuses pages de publicité scannées et classées par marques. 72 Si vous pouvez travaillez avec la vidéo, consultez les ressources proposées par la fiche "Des ressources authentiques audio et vidéo" (http://www.francparler.org/fiches/comprehension_orale10.htm#pub). Pour en savoir plus sur le travail en classe avec la publicité, consultez les articles: - "La Pub à la télé: art, marketing et pédagogie" de Maria Filomena Capucho (http://www.francparler.org/articles/interculturel_filomena.htm) - "La dimension interculturelle dans l’enseignement du français langue de spécialité" de Marie-Thérèse Claes (http://www.francparler.org/articles/interculturel_claes.htm) ainsi que ces liens issus du parcours de Franc-parler consacré à l’interculturel (http://www.francparler.org/dossiers/interculturel.htm): analyse de publicités (http://www.laits.utexas.edu/sp/activities.html) TV5: activités pédagogiques autour de la publicité (http://www.tv5.org/TV5Site/upload_image/enseignants/lettres/20/pub.pdf) approche de la commercialisation (Académie de Rouen) (http://www.acreims.fr/datice/index.php) De cette façon, le langage de la publicité se manifeste dans toute sa diversité. D’une part, il est riche d’éléments lexicaux, de figures stylistiques et de constructions syntaxiques, d’autre part, il constitue un matériel spécifique, original, traitant de la problématique de la société contemporaine. L’analyse des messages publicitaires fait progresser la connaissance de la langue, contribue au développement des capacités textuelles et discursives, fait découvrir le mode de vie des Français (et le travail des entreprises françaises, pour les étudiants en économie par exemple). Bref, la publicité aide les étudiants à développer leurs aptitudes communicatives, ce qui constitue la motivation réelle de l’apprentissage. Des articles pédagogiques publiés dans Le Français dans le monde témoignent bien des possibilités éducatives illimitées qu’offre la publicité. Non seulement la problématique de l’apprentissage des langues est traîtée dans ces articles, les auteurs partagent également leur expérience, encouragent les professeurs de français de ne pas hésiter face aux innovations pédagogiques parce que ces efforts sont finalement justifiés par les résultats souvent brillants. 73 Bibliographie et Webographie En vietnamien: 1. Đỗ Hữu Châu et Bùi Minh Toán (2003), Đại cương ngôn ngữ học, tập 2, NXB Giáo dục, Hà Nội 2. Nguyễn Đức Dân (1998), Ngữ dụng học, tập 1, NXB Giáo dục, Hà Nội En français: 1. Adam J.M. et Bonhomme M. (2005), L’argumentation publicitaire, Rhétorique de l’éloge et de la persuasion, Armand Colin 2. Baylon C. et Mignot X. (1994), La communication, Nathan 3. Blanchet P. (1995), La Pragmatique d’Austin à Goffman, Paris, Bertrand-Lacoste 4. Charaudeau P. (1992), Grammaire du Sens et de l'Expression, Paris, Hachette 5. Cossette C. 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