Fiche Technique – La Commission Européenne à la Concurrence. Introduction. Police des marchés européens, la Commission veille à la concurrence, à l’unification des marchés et à la compétitivité des l’économie de l’UE. Critiquée par son parti pris idéologique elle reste pourtant la seule garantie d’accès de tous les opérateurs économiques à un marché commun. Agissant de façon indépendante et sous le contrôle de la Cour de Justice des Communautés Européennes, la Commission rend à la fois des avis sur des opérations concrètes ou poursuit en justice lorsqu’elle considère une disposition du Traité violée par une entreprise ou par un Etat membre. C’est en poursuivant un objectif très ambitieux qu’elle réussit à se battre sur quatre fronts, tout en faisant preuve de flexibilité lorsque les circonstances l’exigent. Origine et objectifs. Le précédant nord-américain : le Sherman Act de 1890. A la fin du XIXème siècle, la modernisation des moyens de communication aux EtatsUnis aident à mettre en place un marché unique à l’échelle nationale. On passe alors d’une multitude de marchés locaux à un vaste marché unique1. L’intensification de la concurrence risque alors d’aboutir en une concentration industrielle dans les mains de quelques opérateurs économiques. Les industriels n’hésitent pas à créer des ententes pour s’assurer des prix élevés pour préserver leurs marges, au détriment des consommateurs qui ne bénéficient pas de l’accroissement du marché mais au contraire, souffrent de prix artificiellement hauts. La liberté économique à donc besoin d’une régulation. C’est donc en 1890 qu’est voté le Sherman Act, auquel s’ensuivent le Clayton Act et le FTC en 1914, véritables socles de la politique anti-trust aux USA. La recherche d’une concurrence saine et loyale sur les marchés. Dès 1950, le souci de paix en Europe pousse la CECA - Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier – à assurer l’accès égal aux ressources de base, à savoir le charbon et l’acier. Ainsi, toute pratique discriminatoire entre les pays concernant la gestion du charbon et de l’acier était désormais considérée comme anticoncurrentielle. 1 Mathieu DENOIX et Olaf KLAARGARD in La Politique de la Concurrence dans l’UE - De surcroît, c’est à cette époque que le principe de libre concurrence devient le mot d’ordre des politiques publiques en Europe. Il faut unifier des marchés nationaux et pour cela, seule la libre concurrence pourrait imposer les mêmes règles du jeu aux pays membres. La politique anticoncurrentielle est donc animée par la recherche d’une allocation optimale des ressources, par l’encouragement de l’efficacité économique et du progrès technique et enfin, le bien-être des consommateurs2 Domaines d’action. Les quatre domaines d’action. - Antitrust 1) Limiter les accords entre entreprises : Art. 81 du Traité de Rome Les accords entre entreprises peuvent affecter le commerce entre Etats membres et ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun. Il est donc interdit aux entreprises de se répartir géographiquement les marchés, de définir les quantités produites ou de fixer les prix du marché. Le cartel est le type d’accord le plus célèbre ; son objectif est de fixer un prix supérieur à celui qui résulterait du libre jeu de la concurrence. D'autres ententes peuvent consister en des échanges d'informations confidentielles ou à des accords sur la stabilisation des parts de marché. 2) Lutter contre l’abus de position dominante : Art. 82 du Traité de Rome La position dominante d'une entreprise est une situation de puissance économique qui lui permet d'agir indépendamment du comportement de ses concurrents, de ses clients et, au final, des consommateurs. Le Traité prohibe non pas la détention de ce pouvoir, mais son utilisation pour mettre en œuvre des pratiques prédatrices, discriminatoires ou fidélisantes, ayant pour objet ou pour effet de restreindre les conditions de concurrence. - Fusions. La Commission est aussi chargée de contrôler les fusions entre grandes entreprises qui ont des effets transfrontaliers. Elle ne les autorise que si la nouvelle entité ne restreint pas considérablement la concurrence ou le choix du consommateur en créant une position dominante. - 2 Libéralisation Mathieu DENOIX et Olaf KLAARGARD op. cit. La Commission Européenne à la Concurrence veille à garantir l’ouverture des marchés tels que les services postaux, le transport ferroviaire ou la production d’électricité. Lorsque des autorités publiques nationales accordent des droits spéciaux à une entreprise chargée de fournir des services d’intérêt public, la Commission doit veiller à ce que ceux-ci n’excèdent pas ce qui est nécessaire à la prestation effective du service. Par exemple, les droits spéciaux peuvent être justifiés s’ils garantissent à tous la jouissance d’une qualité de service acceptable à des prix abordables. Ils ne seraient pas fondés si l’objectif était simplement d’empêcher une concurrence loyale. La Commission surveille également la concurrence dans le secteur des services publics (télécommunications, électricité et gaz) où l’Union a supprimé les anciens monopoles d’État. Dans ce cas, elle cherche une solution équilibrée afin que les anciens monopoles ne fassent pas usage de leur pouvoir de marché pour nuire aux nouveaux concurrents. - Aides d’Etat : Art. 87 à 89 du Traité de Rome. Si une société reçoit une aide publique, cette dernière peut représenter pour elle un avantage déloyal par rapport à ses concurrents. La Commission les contrôle donc de près. Les aides ne doivent donc pas servir à financer des «champions nationaux» ou à conférer à certaines entreprises un avantage indu sur leurs concurrents. Elles sont cependant autorisées dans certains cas. En effet, l’aide d'Etat contrôlée par la Commission peut être considérée comme compatible avec le marché commun. La Commission évalue le bilan entre la distorsion de concurrence due à l'aide et la contribution de celle-ci à l'intérêt communautaire. Peuvent être ainsi déclarées compatibles des aides destinées à remédier au sous-développement régional, à la protection de l'environnement ou encore à une perturbation grave de l'économie… La Commission à la concurrence à l’épreuve de la crise. La crise financière et économique qui frappe l’économie mondiale pousse les Etats à soutenir leurs entreprises en risque de faillite. Dans ce contexte, la Commission a fait preuve de pragmatisme. En effet, même si son dogme reste celui des bienfaits de la libre concurrence, elle raisonne en termes du too big to fail, c'est-à-dire que les conséquences économiques de la faillite d’un champion national seraient plus lourdes pour les consommateurs que la distorsion provoquée. Face à la vitesse de la crise, la commissaire chargée de la politique de concurrence - Neelie Kroes - s’est vu octroyer des pouvoirs de décision autonomes du reste du collège. Elle a décidé d’appliquer l’article 87-3 B du Traité qui lui permet de déclarer comme compatibles avec le Marché Commun les aides massives dont bénéficie le secteur bancaire. Cependant, la Commissaire à posée quatre conditions pour que les aides soient compatibles : - Elles doivent se limiter à la période de crise. Les actionnaires ne doivent pas se bénéficier indument par ces aides. Les aides ne doivent pas financer des stratégies agressives vis-à-vis des concurrents. Le Secteur privé doit contribuer au coût des plans de sauvetage. On voit donc que ces conditions encadrent les aides et les font compatibles avec le marché commun car aucun opérateur économique ne devrait être privilégié au détriment d’un autre. Le pragmatisme dont fait preuve la Commission devrait écarter une partie des critiques sur le dogmatisme néo libéral de cette institution.