COMMISSION ISLAM ET LAÏCITÉ Assemblée générale Rapport moral Je ne reviendrai pas sur le travail de l'année qui se termine. Je crois que nous avançons sur le chemin de l'évolution nécessaire de notre association. Mais nous n'avons pas encore tiré toutes les conséquences de la transformation de la commission en association autonome. Les objectifs étaient clairs pendant les premières années dans le cadre de la Ligue française de l'enseignement. La Ligue souhaitait connaître la situation de l'islam et des musulmans en France : il fallait savoir si la religion musulmane posait des problèmes de compatibilité avec la laïcité de l'État, en partie sur le plan des idées et des conceptions de la place de cette religion dans une société laïque sécularisée, et surtout d'un point de vue concret par rapport aux conditions de l'exercice pratique du culte et de la vie religieuse. Une large participation de musulmans de divers horizons et de non musulmans membres de diverses associations, organisations syndicales, religieuses ou philosophiques, a permis d'élaborer pour tous une meilleure connaissance mutuelle, une connaissance précise des aspects concrets du culte et de sa pratique, une meilleure connaissance de la laïcité elle-même. Cela a permis de constater que des solutions pouvaient être trouvées dans le cadre des lois et des pratiques juridiques existantes et que le culte musulman avec toute possibilité d'être exercé comme les autres cultes, même si des problèmes se posent toujours et doivent être résolus dans un climat qui n'est malheureusement pas aussi serein dans tous les cas qu'on pourrait le souhaiter. Le travail s'est ensuite poursuivi sous l'égide de la Ligue des Droits de l'Homme et du Monde diplomatique. La commission a poursuivi son travail d'information de ses membres en s'attachant à mieux connaître les rapports entre les musulmans et la société en France et dans d'autres pays européens. Elle a fait connaître ses travaux en créant un site Internet bien fréquenté et reconnu pour son sérieux, par une large liste de diffusion, par l'organisation de colloques publics et la publication des actes de ces colloques. Les thèmes choisis ont permis d'apporter un éclairage différent sur des questions d'actualité. Pour diverses raisons, la création d'une association autonome s'est révélée souhaitable. Sous la présidence d'Alain Gresh, de nouvelles pistes ont été étudiées entre nous, en particulier à travers le rapport qu'il avait rédigé avant de quitter la présidence en 2007. Quels sont les questions qui se posent à nous aujourd'hui ? Nous avons toujours besoin de partager de l'information sur la manière dont les musulmans vivent leur foi et leurs pratiques religieuses et leur vie de citoyens dans la société laïque sécularisée en France et en Europe ; sur la manière dont les institutions d'une part et la société d'autre part permettent des pratiques ; sur les points de friction que l'on peut constater pour les analyser et doter les acteurs des outils de compréhension et d'action pour travailler à la résolution des problèmes. Depuis près de deux décennies, c'est à propos de l'islam que se sont réveillées des réflexions et des prises de position dans le monde intellectuel, les médias, le monde politique et la société en général. Mais aujourd'hui, du fait des prises de position du Président de la République, c'est la question de la place des religions en général dans les institutions et le débat social qui est à nouveau posée. Si notre entrée particulière dans ce débat reste l'islam, le contexte nous invite à élargir nos préoccupations à la place des religions dans la société. Cette perspective me paraît d'ailleurs plus favorable à une meilleure prise en compte de l'islam dans la laïcité, de la participation des musulmans à l'avis de la société civile et politique aux côtés des autres citoyens croyants et incroyants. De ce point de vue, nos travaux de cette année ont bien montré que notre perspective doit dépasser celle d'un regard porté de l'extérieur par des chercheurs et d'autres représentants de la société « française » sur l'islam et les musulmans considérés comme un corps étranger à intégrer. Certes, cela n'a jamais été l'état d'esprit de la commission. Mais l'état des ressources, mais sans doute aussi nos habitudes, ont fait que l'on a eu davantage recours à des intervenants non musulmans. Dès cette année, nous avons eu le souci de donner davantage la parole à des « musulmans », chercheurs, responsables d'association. Mais il faut encore aller plus loin. De nombreux travaux de recherche sont menés par des chercheurs et des universitaires venus de milieux de religion/culture/histoire familiale « musulmanes ». Nous aurons le souci de les entendre et de faire connaître leurs travaux, sans pour autant nous interdire bien sûr de solliciter toutes les compétences, quelles qu'elles soient. Cela devrait se faire dans le cadre de thèmes qu'il nous faut définir en fonction de nos interrogations d'une part, des travaux disponibles d'autre part. Ceci est un appel à tous les membres de l'association pour proposer thèmes et intervenants. Mais aussi et surtout, nous avons bien compris que ceux et celles qui se définissent comme musulmans mais aussi citoyennes et citoyens de ce pays veulent être des participants actifs à la connaissance et à l'expression de l'islam dans la société française et européenne et participer avec leur personnalité propre au débat public comme habitants et citoyens de ce pays. Ils sont groupés en association, mais nous avons entendu, grâce notamment à Ismahane Chouder et Abdelaziz Chaâmbi, qui sont membres de notre bureau, qu'il existe des lieux de parole et de rencontres, alors que notre association est un des rares endroits, peut-être le seul, à permettre ces rencontres.