Quatrième partie – Les grands enjeux sociaux : quelles inégalités

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Quatrième partie – Les grands enjeux sociaux : quelles inégalités, entre quels groupes
sociaux, et pour quelle justice ?
Objectif : comprendre les grands problèmes sociaux auxquels sont confrontées les
sociétés modernes.
Chapitre 7 – Des classes sociales inégales en question :
Objectif : comprendre comment se structure et se stratifie la société entre des groupes
aux caractéristiques inégales.
On va maintenant devoir s’arrêter un peu dans notre analyse. Pour le moment, nous avons pris
le temps de décrire ce qu’il se passait en général dans une société et dans une économie et
pour le moment nous avons surtout pris le temps de parler des grands effets qui concernent la
majorité d’une population. Il faut cependant avoir en tête que tous les individus ne sont pas
affectés de la même manière par une mesure économique, notamment parce que tous les
individus ne sont pas identiques dans une économie. C’est la question des différences, et plus
spécifiquement des inégalités que nous allons aborder. On se posera donc deux grandes
questions dans ce chapitre. Quelles sont les inégalités qui traversent les sociétés
modernes ? Dans quelle mesure ces inégalités se combinent-elles pour composer des
classes sociales ?
Ces deux questions sont fondamentales en SES parce que, depuis le XIXème siècle et Alexis
de Tocqueville, on oppose les sociétés aristocratiques où l’inégalité est la règle aux sociétés
démocratiques où l’égalité serait la règle. C’est cette question fortement politique que l’on
étudiera donc indirectement.
I.
Inégalités et stratification sociale :
Comment parler scientifiquement des inégalités dans une société ? Nous allons présenter
le vocabulaire de base sur la question.
Attention aux mots de sens communs que vous risquez d’utiliser à la place dans les copies.
On mettra en évidence le caractère multiforme des
Inégalités
inégalités économiques et sociales ainsi que leur aspect
économiques,
parfois cumulatif.
inégalités sociales
On montrera que le niveau et l’évolution des inégalités sont
liés à des facteurs multiples : origine et appartenance
sociales, formation, accumulation patrimoniale, genre,
génération, etc.
salaire, revenu,
profit,
revenus de
transfert
A. Définition des inégalités sociales et de la stratification :
Comment parler des inégalités ?
1. Des différences aux inégalités sociales :
Pour entamer ce travail de définition, document 1 de la FD.
Document 1 – Toute différence n’est pas une inégalité
« Entre deux individus dont l’un a des cheveux bruns et l’autre des cheveux noirs, il y a une différence mais pas, toutes
choses égales par ailleurs, une inégalité. En revanche, ces différences deviennent des inégalités lorsqu’elles sont traduites en
terme d’avantages ou de désavantages. Si être brun permet d’accéder à des biens refusés à un individu aux cheveux noirs, la
différence devient une inégalité.
« Mais cette inégalité individuelle ne devient une inégalité sociale que si l’infériorité ou la supériorité est partagée par
des personnes aux caractéristiques sociales identiques. Ainsi, toute différence individuelle ne peut être utilisée pour mettre en
évidence des inégalités sociales. Pour qu’il y ait des inégalités sociales, il faut donc qu’existent des ressources socialement
valorisées, caractérisées par leur rareté et inégalement réparties entre les individus. […] Ces ressources constituent autant de
critères de différenciation permettant de classer les individus […].
« Les inégalités sociales impliquent des différences mais toute différenciation sociale n’est pas une inégalité sociale.
Une telle proposition implique que les inégalités résultent de processus sociaux qui peuvent se reproduire au fil du temps, de
génération en génération, indépendamment de la volonté des individus ; par opposition, une différence peut se cultiver,
fonder une stratégie consciente de différenciation, s’incarnant dans des styles de vie, des choix culturels et symboliques sans
impliquer nécessairement de dimension hiérarchique ».
P. Bonnewitz, Classes sociales et inégalités, Ed. Bréal, 2004
1
Question 1 : Justifiez le titre du document.
Question 2 : Les inégalités sociales sont-elles toujours les mêmes au cours du temps ?
Question 3 : Donnez différents exemples d’inégalités sociales.
Question 1 : L’inégalité désigne la situation dans laquelle une différence entre deux
individus est source d’avantages ou de désavantages. Cette inégalité devient sociale
lorsque des individus disposant de la même caractéristique différentielle partagent le
même avantage ou désavantage.
Bon exemple pour montrer la différence entre une différence et une inégalité : la position des
élèves dans la salle de classe ; pendant le cours, simple différence puisque accès identique au
contenu du cours ; en cas d’alerte incendie, inégalité puisque ceux proche de la porte ont un
accès plus rapide à la sortie.
Montre en même temps qu’une même différence peut conduire dans certains contextes à une
inégalité et dans d’autres non.
Exemple également de l’âge : source d’inégalité dans l’accès au cinéma pour voir certains
films d’horreur, mais pas source d’inégalités dans toutes les situations non plus puisqu’il n’y a
pas de critères d’âge pour aller au restaurant, tout dépend du restaurant, ou cas de la politique.
Question 2 et 3 : Dans toute société, il peut alors exister différents types d’inégalités,
inégalités fondées sur l’âge, le sexe, la profession, la famille d’origine, la religion, etc. Et
les différences qui sont interprétées comme des inégalités peuvent varier selon les
contextes (exemple de l’âge en politique et dans la vie professionnelle), mais également
dans le temps (exemple de la race noire aux Etats-Unis d'Amérique).
Par exemple, la couleur de peau aux Etats-Unis d'Amérique qui était source d’une inégalité
politique avant les lois sur la fin de la ségrégation en 1968.
2. Des inégalités sociales à la stratification sociale :
Maintenant qu’on a vu ce qu’est une inégalité sociale et leur variabilité, on peut s’interroger
un peu plus sur ce qu’on appelle la stratification.
 Est-ce quelqu'un se rappelle de ce qu’est la stratification sociale, vue en première ?
La stratification sociale est le produit de la division de la société en groupes sociaux (de
grande taille) hiérarchisés selon le pouvoir qu'ils exercent, la richesse qu'ils possèdent
et/ou le prestige qu'ils inspirent.
Les individus aux caractéristiques sociales identiques forment des groupes de droit ou
de fait, plus ou moins structurés, et entretenant avec les individus des autres groupes
sociaux des relations de subordination, d’exclusion et d’exploitation.
Leur demander ensuite un travail actif. Par deux, choisir trois inégalités différentes et former
des groupes et une hiérarchie entre ces groupes.
Par exemple, choisir trois critères, âge, sexe et famille d’origine. On peut alors obtenir le
groupe des jeunes hommes nobles qui sont bien différents dans leur possibilité sociale que les
vieux hommes roturiers. Ou bien les femmes nobles d’âge moyen qui n’ont pas du tout les
mêmes privilèges que les hommes nobles d’âge moyen. Mutualiser différentes stratifications
pour montrer leur diversité en fonction des inégalités sociales les plus pertinentes. Puis bien
leur faire noter cette idée, avec des exemples à l’appui.
L’agencement spécifique de ces rapports d’inégalités et de domination explique la
diversité des stratifications sociales.
Différents exemples : lignages hiérarchisés en Afrique (âge, sexe, famille), système des
castes en Inde (âge, sexe, caste d’origine, religion), sociétés d’ordre en Europe médiévale
(âge, sexe, ordre de naissance, religion), sociétés de classe en Europe contemporaine
(âge, sexe, niveau de richesse, profession), sociétés d’esclavage comme les Etats-Unis
d'Amérique à leur origine (âge, sexe, race, religion).
2
B. Observer les inégalités et la stratification :
Comment observer la stratification sociale et les inégalités ?
1. Des outils pour observer la stratification dans son ensemble : les grilles de
classification :
* Le principal outil dont on dispose en France pour observer la stratification sociale dans son
ensemble, donc pour observer les inégalités sociales pertinentes pour observer les groupes
sociaux, est les PCS.
 Quelqu'un peut-il rappeler quel est l’objectif des PCS ?
L’outil principal pour observer la stratification sociale en France est les PCS qui ont
pour objectif de regrouper les Français dans des catégories socialement homogènes.
 Quels sont les différents groupes qui existent dans les PCS :
Cette grille des PCS construite par l’INSEE (1954 puis 1982) comporte 8 groupes :
6 groupes d’actifs (en gros) :
- 1 = agriculteurs exploitants
- 2 = artisans, commerçants et chefs d’entreprise
- 3 = cadres et professions intellectuelles supérieures
- 4 = professions intermédiaires
- 5 = employés. Attention, à ne pas confondre avec le fait d’avoir un emploi.
- 6 = ouvriers
2 groupes constitués d’inactifs (en gros) :
- 7 = retraités
- 8 = personnes sans activité professionnelle et n’en ayant jamais eu.
 Quels sont les critères qui servent à construire les PCS ?
Ces groupes sont constitués en fonction de différents critères source d’avantages ou
d’inconvénients : existence d’un statut professionnel ou non, statut salarié ou
indépendant, niveau hiérarchique et niveau de diplôme. Cf. document à distribuer.
* Attention, il n’y a pas une grille absolue qui supplante toutes les autres. Tout va
dépendre de la stratification sociale que l’on étudie et des critères que l’on considère
comme importants.
Leur donner un exemple, la grille des PCS de 1954. Transparent.
2. Des outils pour observer des inégalités spécifiques : l’exemple des inégalités
économiques :
Après avoir observé différents outils pour observer la stratification sociale dans son ensemble,
on peut s’intéresser plus spécifiquement aux inégalités prises en elles-mêmes.
Attention, à partir de maintenant, quand vous parlez d’inégalités, il faudra toujours
préciser deux choses :
- de quel type d’inégalités on parle : de revenu, de patrimoine, d’épargne,
d’espérance de vie, de niveau d’éducation. On doit donc choisir une variable.
- entre quels groupes s’observent les inégalités. Choisir une grille d’analyse.
S’il manque un des deux éléments, vous ne dites rien de scientifique, que du blabla !
a. Présentation de l’objet d’étude : les inégalités économiques de revenus et
de patrimoine :
Premier type d’inégalité étudiable : les inégalités de revenus et les inégalités de patrimoine.
Mais que signifient ces notions ?
Dans un premier temps, on peut parler des revenus.
* Les revenus (touchés par un ménage) sont la somme des revenus primaires (flux de
ressources perçus par les agents pour leur participation à la production sous la forme du
3
travail ou du capital) et des revenus de transfert (flux de ressources provenant des
pouvoirs publics et perçus par les agents en contrepartie de certains risques).
Ceux-ci se déclinent de manière plus détaillée de la façon suivante, par un schéma (8 lignes) :
Les salaires
Dividendes et
intérêts
Revenus primaires
Les revenus du
patrimoine
Revenus
fonciers (loyers,
fermage)
Les revenus
mixtes
Revenu brut
Allocations :
- famille
- maladie (civile ou
professionnelle)
- retraite
- chômage
Revenus de transferts
Minima sociaux :
- RSA, ex-RMI
- ASS
- AAH
- etc.
Attention, pour calculer le revenu disponible d’un ménage, ce avec quoi il peut véritablement
consommer, que doit-on faire ? Prendre en compte les prélèvements obligatoires.
Revenu disponible = Revenus primaires – PO + revenus de transfert.
Au sein de ce schéma, on se rend compte qu’il y a une autre notion qu’on entend
fréquemment, c’est le patrimoine. Qu’en est-il et quelle est sa différence avec les revenus ?
* Document 2 de la FD. Document 2 – Revenus et patrimoine :
« On rappelle que le salaire est un revenu du travail perçu par un salarié, c'est-à-dire un travailleur lié par un contrat de travail (de
subordination) à un employeur. Le revenu (qui comprend les salaires, bien sûr) est constitué par l'ensemble des sommes perçues
à un titre ou à un autre (revenus du travail, revenus du capital, revenus de transfert sociaux comme les prestations sociales par
exemple). Le salaire est toujours rattaché à une seule personne alors que le revenu est souvent celui du ménage (c'est-à-dire
l'ensemble des personnes vivant sous le même toit).
« Le patrimoine, enfin, est constitué par l'ensemble des biens possédés par un individu ou, le plus souvent, par un ménage :
il est composé d'immeubles (terres, maisons, appartement, bâtiments de production, etc.), de valeurs mobilières (actions et
obligations par exemple, mais également dettes, ce qui explique que le patrimoine puisse être négatif), de liquidités déposées sur des
comptes bancaires, d'objets d'art, de bijoux, etc. Les revenus sont donc des flux, alors que le patrimoine est un stock, que l'on
acquiert grâce à son revenu ou en héritant et que l'on peut transmettre à ses héritiers. Il est logique de penser que si on a des revenus
faibles, on aura souvent un patrimoine faible (même si ce n'est pas toujours le cas : un agriculteur propriétaire de son exploitation
peut avoir des revenus faibles alors qu'il détient un patrimoine) ».
Source : http://brises.org
Question 1 : Définissez le patrimoine. N’oubliez pas de prendre en compte les dettes dans la définition.
Question 2 : Expliquez la phrase soulignée.
4
Question 1 : Le patrimoine désigne, pour un agent économique, la somme, à un moment
donné, de ses avoirs (ce qu’il possède) et de ses dettes (ce qu’il doit).
On peut décliner un peu plus précisément les composantes du patrimoine par un schéma :
Patrimoine physique :
Logement, immeubles, terrains,
matériels productifs
Actifs non financiers
Patrimoine incorporel :
Fonds de commerce, brevets
Patrimoine des ménages
Actifs financiers
Patrimoine financier :
Dépôts, valeurs mobilières
(actions, obligations),
épargne, - les dettes.
Que pouvons-nous voir à partir du graphique ? Les différentes composantes du patrimoine
conduisent à différents types de revenu. Le patrimoine foncier permet en effet l’obtention de
revenus fonciers (loyers, usufruit, etc.). Le patrimoine financier permet l’obtention de revenus
financiers (intérêts, dividendes, etc.). Question 2 : Le patrimoine représente ainsi le stock
des richesses accumulées par un agent économique à un moment donné du temps tandis
que les revenus représentent les flux de richesse qui lui reviennent pendant une certaine
période. Exemple : le patrimoine qu’est une maison apporte un revenu qu’est le loyer.
b. Présentation des outils :
b.1. Les outils indirects :
On va parler ici des outils indirects d’observation des inégalités : on observe grâce à une
grille d’analyse extérieure à la variable les inégalités de cette variable.
2 outils pour observer les inégalités : coefficients multiplicateurs et/ou indices.
Appliquons tout de suite. Maintenant que ces notions de revenu et de patrimoine ont été
présentées à nouveau, on peut regarder un peu plus en détail les inégalités qui existent en
matière de revenu et de patrimoine.
Exemple 1 : comparer les inégalités de salaires annuels nets en EQTP (variable étudiée)
en fonction des PCS et du sexe (grille d’analyse).
Document 3 – Les inégalités de salaires nets moyens en EQTP en 2009 (privé et semi-public) :
Hommes
Femmes
Ensemble
50100
38360
46210
Cadres
26860
23140
25250
Professions intermédiaires
18940
17300
17780
Employés
19310
15820
18760
Ouvriers
Ensemble
26670
21320
24490
INSEE, France, Portrait Social, 2011
5
 Première constatation. Quelles sont les PCS qui en moyenne touchent plus ?
(Cadres et PI). Quelles sont les PCS qui en moyenne touchent moins ? (Employés et
ouvriers). Quel est le genre qui gagne en moyenne plus ? (Hommes)
 Si l’on avait alors à regarder plus nettement cet écart, comment faire ? On calcule
un coefficient multiplicateur. Ou bien on calcule un indice, c’est ce qu’on va faire ici.
On va prendre comme référence le salaire annuel net moyen de l’ensemble des salariés
Base 100 : salaire annuel net moyen de tous les salariés du privé et semi-public en 2009 :
Salaire Ensemble
Salaires Cadres
Salaires PI Salaires Ouvriers Salaires Employés
1.88
1.03
0.77
0.73
Cm
1
188
103
77
73
Indice
100
Phrase-type : On constate ainsi selon l’INSEE qu’un cadre gagne en 2009 en moyenne
1,88 fois le salaire annuel net moyen de l’ensemble des salariés du privé et semi-public
tandis qu’un employé n’en gagne en moyenne que 73%.
On voit alors clairement avec cet exemple qu’il existe des inégalités entre les catégories de la
population quant au salaire annuel net versé par les employeurs.
Ces inégalités sont d’ailleurs redoublées par des inégalités hommes/femmes que l’on peut
également calculer.
Salaire Ensemble
Salaires Cadres
Salaires PI Salaires Ouvriers Salaires Employés
1.31
1.16
1.09
1.22
Cm
1.25
Phrase-type : On constate ainsi selon l’INSEE qu’un salarié gagne en 2009 en moyenne
1.25 fois le salaire annuel net moyen d’une salarié.
On peut maintenant regarder une autre dimension des inégalités économiques.
 Qu’est-ce qui est observé dans le document ? Différence médiane / moyenne. On
s’intéresse aux patrimoines médians, c'est-à-dire aux patrimoine qui permettent de
décrire un groupe particulier : la moitié du groupe a un patrimoine supérieur au
patrimoine médian, l’autre moitié du groupe a un patrimoine inférieur au patrimoine
médian. Ceux-ci sont globalement inférieurs aux patrimoines moyens. Ceci signifie
qu’il y a beaucoup d’individus qui ont peu de patrimoine, d’où une médiane faible, et
certains individus qui ont énormément de patrimoine, d’où une moyenne qui augmente
par rapport à la médiane.
Exemple 2 : comparer les inégalités de patrimoine (variable étudiée) en fonction des
PCS (grille d’analyse).
Document 4 – Les inégalités de patrimoines en 2010 :
Patrimoine brut médian Patrimoine brut moyen
642 100
845 900
Agriculteur
338 700
642 800
Artisan, commerçant, industriel
555 900
911 400
Profession libérale
296 700
415 300
Cadre
177 200
208 400
Profession intermédiaire
26 600
118 100
Employé
41 800
122 300
Ouvrier qualifié
8 500
67 900
Ouvrier non qualifié
Ensemble
150 200
259 000
« Les inégalités de patrimoine s’accroissent entre 2004 et 2010 », INSEE Première n°1380, 2011
 Qu’est-ce que l’on observe assez rapidement ? On voit que certaines PCS ont un
niveau de patrimoine médian en 2004 très élevé, supérieur à 100 000 euros, tandis que
les catégories des employés et des ouvriers sont bien en-dessous.
 Pour bien comparer, on va calculer également des indices en prenant pour base 100
les professions intermédiaires (dont on a vu qu’ils ont un niveau de revenu moyen
proche du revenu moyen de l’ensemble des salariés).
6
Base 100 : patrimoine médian de l’ensemble des professions en 2010 :
Agriculteur
Artisan
Prof Lib Cadre
PI
Emplo
OQ
ONQ
4.27
2.25
3.70
1.98
1.18
0.18
0.28
0.06
Cm
427
225
370
198
118
18
28
6
Indices
Phrase-type : en 2010, on constate que les agriculteurs ont un patrimoine médian 4.3 fois
plus important que celui de l’ensemble des professions, que les cadres en ont un 2 fois
plus important, tandis que le patrimoine médian des employés ne représente que 18%
du patrimoine médian de l’ensemble des professions et le patrimoine médian des
ouvriers non qualifiés n’en représente que 6% du patrimoine médian.
b.2. Les outils directs :
On va parler ici des outils directs d’observation des inégalités : on observe les inégalités
d’une variable avec une grille d’analyse construite à partir de cette variable.
Le problème est alors : comment construire cette grille d’analyse particulière. On a
besoin pour cela de parler de quantiles.
* Lire le document 5 de la FD qui présente tout ce dont on aura besoin, on commence juste
par le quantile.
 Quelqu'un peut-il expliquer ce qu’est un quantile ? On va voir un exemple avec des
quartiles de taille.
Transparent Daltons.
On peut dire pareil avec des quartiles de revenus.
Parlons simplement. Prenons une société dans laquelle il y a 4 individus. On classe ces
individus selon leur niveau de revenu. Soumia < Elsa < Raphaël < Sofiane.
Ce qui fixe alors la valeur du quartile, c’est le seuil de passage du premier groupe au
deuxième groupe (sur 4 groupes au total), c’est donc par exemple le niveau de revenu du
plus riche parmi les plus pauvres. Et ainsi de suite.
 Si l’on a compris le principe, quelqu'un peut-il expliquer ce qu’est un décile ? un
centile ? etc.
Remarque 1 : avec des quantiles, on a toujours un groupe de plus que le nombre de
seuils de passage calculés. On calcule 3 quartiles pour 4 groupes. On calcule 4 quintiles
pour 5 groupes. On calcule 9 déciles pour 10 groupes. On calcule 99 centiles pour 100
groupes.
Remarque 2 : il y a un flou de vocabulaire. On utilise parfois (mais il ne faut pas le faire)
le mot décile pour parler du groupe plutôt que du seuil de passage (1 er décile serait les
10% les plus pauvres). Préférez toujours l’expression la plus explicite plutôt que le mot
décile, quartile, quintile.
Phrase-type :
Selon l’INSEE, en France, en 2009, les 10% de salariés à temps complet percevant les
salaires nets les plus bas recevaient au maximum 1 128 euros par mois tandis que les
10% de salariés à temps complet percevant les salaires nets mensuels les plus élevées
recevaient au minimum 3 248 euros en une année.
A partir des quantiles, on peut alors faire généralement trois choses importantes.
* La première utilisation élaborée des quantiles consiste à calculer un rapport
interdécile. On compare le seuil qui permet d’appartenir aux plus favorisés au seuil qui
permet d’appartenir aux moins favorisés.
7
Phrase-type : Le salaire net mensuel minimum (D9) des 10% les plus dotés en 2009 est
2,9 fois plus important que le salaire net mensuel maximum (D1) des 10% les moins
dotés.
* La deuxième utilisation élaborée des quantiles consiste à construire une courbe de Lorenz.
A partir des déciles, on constitue des groupes de taille égale. Au sein de chaque groupe, on a
le même nombre d’individus, et comme ils sont classés par ordre croissant, on sait que dans le
premier groupe on a les plus pauvres, etc. Les 10 premiers % sont les 10% les plus pauvres,
les 20 premiers % sont les plus 20% les plus pauvres, etc.
Au sein de chaque catégorie, on connaît également qui est dans le groupe. Donc, si on fait la
somme des revenus qui composent le groupe par exemple, on peut aussi rapporter ces revenus
à la totalité des revenus dans l’économie. Donc on peut voir les % que constituent les revenus
du groupe le plus pauvre par rapport à l’ensemble des revenus de l’économie.
On a alors toujours deux informations disponibles, d’un côté la répartition de la population en
groupe, les 10% les plus pauvres, les 20% les plus pauvres, etc., de l’autre côté l’importance
des revenus de chaque groupe par rapport au revenu global, lui aussi exprimé en pourcentage.
Si on prend toute la population et tous les revenus, on a à la fin 100% de la population
représentée et 100% des revenus représentés.
Mais si on représente par étape, on peut visualiser comment se répartit une richesse au sein de
la population. C’est ce que fait le document 3 que vous avez sous les yeux à partir des
informations du tableau.
Le principe étant admis, il reste une derrière chose à faire.
* A partir de la courbe de Lorenz, on peut synthétiser les informations grâce au
coefficient de Gini.
 A votre avis, comment doit être la courbe pour représenter la situation la plus
égalitaire qui soit ? (Courbe identique à la bissectrice).
On peut alors mesurer l’écart qui existe entre la situation d’égalité pure et la réalité (ce qui est
bien un des objectifs du chapitre), en regardant l’écart qui existe entre la bissectrice et la
courbe de Lorenz.
Pour mesurer l’écart entre la situation la plus égalitaire qui soit (bissectrice) et la
situation réelle, on calcule un coefficient de Gini. Pour mesurer cet écart, on peut en fait
calculer un indicateur appelé le coefficient de Gini. Il s’agit de rapporter l’écart entre l’égalité
pure et la réalité à la situation la plus inéquitable qui soit, c'est-à-dire le triangle ABC.
Si l’indicateur est proche de 1, la situation réelle est très inéquitable. Si l’indicateur est
proche de 0, la situation réelle est très équitable.
8
II.
Le caractère multidimensionnel et cumulatif des inégalités :
Quels sont les liens qui existent entre les différentes inégalités économiques et sociales ?
Nous allons essayer de voir les mécanismes qui relient les différentes inégalités entre
elles.
On mettra en évidence le caractère multiforme des
inégalités économiques et sociales ainsi que leur aspect
parfois cumulatif.
On montrera que le niveau et l’évolution des inégalités sont
liés à des facteurs multiples : origine et appartenance
sociales, formation, accumulation patrimoniale, genre,
génération, etc.
Inégalités
économiques,
inégalités sociales
salaire, revenu,
profit,
revenus de
transfert
A. Les inégalités économiques se renforcent entre elles :
On va d’abord rester dans le champ économique pour bien comprendre les liens importants.
NB : bien comprendre les liens entre les inégalités économiques permet de voir comment
lutter contre les inégalités.
1. Des inégalités de revenus aux inégalités d’épargne :
On va repartir des inégalités de revenu dont nous avons déjà parlé.
Quel va être l’impact de revenus différents dans l’économie ?
Document 6 de la FD.
Document 6 – Des revenus à l’épargne :
« La loi psychologie fondamentale […] est qu’en moyenne et la plupart du temps les hommes tendent à
accroître leur consommation à mesure que leur revenu croît, mais non d’une quantité aussi grande que
l’accroissement du revenu. […] En général une proportion de plus en plus importante du revenu est épargnée à
mesure que le revenu réel croît ».
J.M. Keynes, Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie, 1936
Epargne moyenne (en % du niveau de vie) selon l’appartenance aux différentes quintiles de niveau de vie :
« Les inégalités entre ménages dans les comptes nationaux », INSEE Première n°1265, novembre 2009
Question 1 : Selon la « loi » de Keynes, un ménage à bas revenus épargne-t-il beaucoup ou peu ? Et un ménage
à hauts revenus ?
Question 2 : Est-ce que cette « loi » se vérifie bien quand on regarde le document chiffré ?
Question 1 : On constate généralement que plus le revenu d’un ménage augmente et
plus son épargne, c'est-à-dire la part de son revenu qui n’est pas consommée augmente.
C’est ce que Keynes expliquait en parlant de la propension marginale à consommer.
2. Des inégalités d’épargne aux inégalités de patrimoine :
Quel va être l’impact du taux d’épargne sur le patrimoine détenu ?
9
Document 7 – De l’épargne au patrimoine :
50,0%
700 000
45,0%
600 000
40,0%
500 000
35,0%
30,0%
400 000
25,0%
300 000
20,0%
15,0%
200 000
10,0%
100 000
5,0%
0,0%
0
Artisans,
commerçants, chefs
d'entreprises et
professions libérales
Cadres
Professions
intermédiaires
Employés
Taux d'épargne (en %)
Ouvriers
Ensemble des actifs
Patrimoine moyen (en euros)
INSEE, Comptes nationaux pour l’année 2003
On constate que ce sont les mêmes PCS qui ont des taux d’épargne élevés et une
quantité importante de patrimoine.
On peut donc constater que plus le revenu est important, plus la proportion d’épargne
est importante et plus le patrimoine va grandir.
3. Des inégalités de patrimoine aux inégalités de revenus :
On peut maintenant boucler la boucle. Est-ce que le patrimoine ne va pas conduire à des
revenus plus importants ?
C’est ce que l’on va observer en regardant le document suivant. Document 8 de la FD en
transparent.
Rappel : Que sont les revenus du patrimoine ?
= Revenus financiers (dividendes, intérêts) + Revenus non financiers (loyers, etc.)
Document 8 – Du patrimoine aux revenus :
Décomposition du revenu disponible annuel moyen en 2009 selon le niveau de vie :
Ensemble
D10
D9
D8
Salaires
Revenus d'indépendants
Pensions et retraites
Revenus du patrimoine
Prestations sociales
Prime pour l'emploi
Impôts directs
D7
D6
D5
D4
D3
D2
D1
-40000
-20000
0
20000
40000
60000
80000
100000
120000
INSEE, Enquête revenus fiscaux et sociaux, 2009
Question unique : Présenter le document puis montrez les inégalités économiques qui existent dans la société
française.
10
 Que constate-t-on dans ce document ?
On constate en 2009 en France que plus le niveau de vie est important, plus le montant
et plus la part de niveau de vie issue des revenus de patrimoine est importante.
On peut rapidement faire le calcul pour le premier groupe et le dernier groupe.
Phrase-type : Selon l’INSEE en 2009 en France, pour les 10% d’individus disposant des
plus hauts niveaux de vie, sur 100 euros de niveau de vie, 27,8 euros proviennent de
revenus de patrimoine contre 3,4 euros sur 100 pour les 10% d’individus disposant des
plus bas niveaux de vie.
Conclusion : Les revenus de patrimoine sont donc une source importante
d’augmentation du revenu.
On a donc le cycle cumulatif des inégalités économiques : les inégalités de revenus vont
conduire aux inégalités de patrimoine en raison du taux d’épargne différent, qui
conduisent à des inégalités de revenu plus importantes.
B. Les inégalités économiques cohabitent avec des inégalités sociales :
En quoi les inégalités économiques se combinent à des inégalités sociales ?
Document 9 – Les inégalités économiques et sociales coexistent :
III.
Des inégalités aux classes sociales :
On présentera les théories des classes et de la stratification
sociale dans la tradition sociologique (Marx, Weber) ainsi
que leurs prolongements contemporains et on s’interrogera
sur leur pertinence pour rendre compte de la dynamique de
la structuration sociale.
On mettra en évidence la multiplicité des critères de
différenciation sociale dans les sociétés post-industrielles
(statut professionnel, âge, sexe, style de vie) et on se
demandera dans quelle mesure cette multiplicité contribue
à brouiller les frontières de classes
Classes sociales,
groupes de statut,
catégories socioprofessionnelles
groupe social
Classes sociales,
groupes de statut,
catégories socioprofessionnelles
groupe social
11
Il s’agira maintenant de faire le dernier pas dans notre analyse. Nous avons vus qu’il existe
des inégalités économiques et sociales en France. Mais ces inégalités suffisent-elles pour
constituer des groupes sociaux homogènes appelés « classes sociales » ?
C’est cette question que nous allons devoir aborder désormais, en se dotant d’un cadre
conceptuel pour savoir de quoi l’on parle, puis en testant ce cadre conceptuel pour voir s’il
permet de comprendre efficacement ce qu’il s’est produit dans la société française.
A. Les classes sociales : une stratification sociale particulière :
On va dans un premier temps rappeler la base sur la question des classes sociales, notamment
les auteurs de référence, et nous pourrons ensuite appliquer leur théorie au cas français.
1. La genèse des classes sociales :
Les classes sociales renvoient à une notion qui apparaît à la fin du XVIIIème siècle en
raison de la fin de la société d’Ancien Régime :
- comme la loi ne définit plus à quel groupe appartient chaque individu
(noblesse, clergé, Tiers-Etat), il faut trouver une nouvelle manière de classer
les individus pour comprendre le fonctionnement de la société
- comme la Révolution Industrielle fait ses premiers pas, le travail prend de
plus en plus d’importance pour comprendre les différences entre les
individus.
2. Deux manières différentes de penser les classes sociales : Marx et Weber :
Document 10 – Les classes sociales selon Karl Marx :
Une vision conflictuelles de l’histoire sociale et politique (« la lutte des classes ») et l’accent mis sur les
relations entre protagonistes (« les rapports de classes ») sont à la base de l’analyse. […]
L’origine de la division sociale se situe dans la sphère de la production, plus précisément dans « les
rapports sociaux de production ». Marx désigne par cette expression les modalités selon lesquelles les hommes
entrent en relation pour produire, échanger et répartir les richesses : possession ou non-possession des moyens
de production et d’échange […] Hormis certaines sociétés primitives, la division du travail a toujours existé et,
surtout, ses formes constituées sont basées sur l’exploitation et la domination : loin qu’elle soit limitée à une
répartition technique des tâches dans le cadre d’une coopération fructueuse pour tous, elle est organisée de façon
inégalitaire aussi bien dans l’acte de production lui-même que dans la répartition des richesses. Les inégalités ne
résultent pas de la différence des talents individuels mais de rapports de force sociaux. Les rapports « de
domination et de servitude » se transforment tout au long de l’histoire. A chaque mode de production correspond
une « forme économique spécifique par laquelle du surtravail non payé est extorqué aux producteurs
immédiats », forme qui génère une certaine configuration des rapports sociaux […]
Dans le mode de production capitaliste, « il y a séparation radicale du producteur immédiat (c’est-àdire du travailleur) d’avec les moyens de production ». Dans le même temps sont affirmées la logique du marché
et la liberté de la force de travail. Aussi le « rapport officiel entre le capitaliste et le salarié », objectivé par le
contrat de travail a-t-il « un caractère purement mercantile » : sous une apparence de réciprocité (liberté de
l’employeur, liberté du travailleur, accord sur le contrat), il y a la réalité d’une relation foncièrement inégale : le
prolétaire n’a pas d’autre solution que de vendre sa force de travail, en renonçant à tout titre de propriété sur
son propre produit. Alors que dans d’autres modes de production, l’appropriation de son travail est transparente,
inscrite dans un système de domination légale (par ex. la corvée dans le système seigneurial), elle prend une
forme voilée dans le rapport social capitaliste : liberté formelle du travailleur, invisibilité du travail impayé
(différence entre la valeur du travail fourni et le salaire octroyé).
Sur la base de ces rapports de production se constituent les deux groupes fondamentaux de la société
capitaliste. Les travailleurs salariés [prolétaires] et les propriétaires/entrepreneurs du capital [bourgeois ou
capitalistes]. Cependant, la société industrielle naissante est encore largement tributaire du passé : artisans et
petits commerçants, paysans et propriétaire fonciers sont les représentants de rapports de production
précapitalistes. Même en Angleterre, pays pionnier du capitalisme industriel, « la division en classes n’apparaît
pas sous une forme pure », « les stades intermédiaires et transitoires estompent les démarcations précises ».
Malgré tout, ces rapports précapitalistes sont progressivement pénétrés par des logiques propres au système
capitaliste, à mesure que celui-ci se développe. Ainsi en est-il de l’agriculture et des paysans. Ceux-ci ne sont
plus soumis aux charges seigneuriales et aux impôts spéciaux de l’Ancien Régime. Ils n’ont pas obtenu leur
12
indépendance pour autant. Subissant les lois du marché (non-maîtrise des circuits de commercialisation), ils sont,
en outre, dépendants de la bourgeoisie propriétaire de nombreuses terres et quand ils accèdent à la propriété,
c’est souvent en s’endettant, à des taux usuraires au bénéfice des notables et des banquiers. […] A long terme, le
développement progressif des rapports capitalistes voue ces groupes au déclin inéluctable. Telle est la « loi de
bipolarisation » selon laquelle la structure sociale s’achemine vers une forme simple dans laquelle ne
subsisteraient pratiquement que des représentants du capital et la masse du salariat. Sur ce point, il est évident
que Marx n’a pu anticiper le changement économique et social. S’il a bien pronostiqué le développement du
salariat, il n’a pas ou peu prévu sa différenciation spectaculaire ni prévu la résistance des travailleurs
indépendants dans nombre de branches d’activité (agriculture, petit commerce, production artisanale, services…)
« Une situation commune » rapproche les individus qui la partagent, « des intérêts communs » les
rassemblent contre leur(s) adversaire(s). Ils ne forment pas pour autant des classes « réelles ». Cette thématique
est développée par Marx dans plusieurs textes célèbres et s’applique aussi bien à la bourgeoisie, aux ouvriers ou
aux paysans. Le passage de la classe virtuelle à la classe réelle est subordonné à deux critères extraéconomiques : l’existence ou la formation d’un lien social, l’auto-organisation politique du groupe. Le passage
consacré aux paysans parcellaires dans Le 18 Brumaire de Napoléon Bonaparte (1852) [comparés à un sac de
pommes de terre] dessine en creux les différents paliers de la réalité de classe. Les paysans constituent une classe
[en soi], dans la mesure où « les conditions économiques (…), leur genre de vie, leurs intérêts et leur culture les
séparent des autres classes de la société » (critère de fondement socio-économiques). [Mais] ils n’en constituent
pas une par défaut de « rapports variés » entre leurs membres, en l’absence de « communauté ». Apparaît ici, par
la négative, le critère du lien social sur lequel d’ailleurs Marx ne s’arrête pas. Ils ne forment pas non plus une
classe [pour soi] car ils n’ont « aucune liaison nationale », « aucune organisation politique ». […]
Le salariat engendre deux processus contradictoires : la concurrence des ouvriers entre eux (logique de
marché) mais aussi la coopération dans l’acte de production (logique de socialisation). La masse des travailleurs
se constitue en classe à travers la lutte économique (« même pensée de résistance, coalition ») puis la lutte
politique (entendue comme combat au niveau national avec des objectifs sociétaux). A plusieurs reprises dans
l’œuvre de Marx est évoquée la genèse de la classe ouvrière à travers les tribulations de la lutte sociale et
politique. Les défaites comme les victoires cimentent le groupe, lui donnent conscience de lui-même, l’instituent
en agent historique. Il faut ajouter que ces processus de constitution de classes ne sont pas isolés les uns des
autres : l’affirmation et le développement de la bourgeoisie, non seulement comme groupe social mais aussi
comme agent prétendant à l’hégémonie, conditionnent la formation et l’affirmation collective jouant sur
plusieurs registres.
S. Bosc, Stratification et classes sociales, 7ème édition, 2011
Question unique. Complétez pour retenir :
Vision de l’histoire et de la société
Origine de la division sociale
Type de rapports sociaux
de production capitalistes
Tendance à la bipolarisation
sur quelles classes ?
Qu’est-ce qu’une classe sociale « réelle »
Comment adviennent les « classes réelles »
Signification de « classe en soi »
Signification de « classe pour soi »
Document 11– Les classes sociales selon Max Weber :
L’approche de Weber ne se réduit pas aux classes sociales, qui ne constituent pour lui que l’un des
éléments de la stratification sociale. Sa classification retient trois sphères d’activité sociale conduisant à
l’établissement, chacune, d’une hiérarchie spécifique : la classe correspond à l’ordre économique, le statut à
l’ordre social et le parti à l’ordre politique. La classe est abordée d’un point de vue nominaliste : autrement dit,
si elle n’existe pas nécessairement en tant que groupe social « réel » (l’existence d’une loi historique conduisant
à un affrontement inéluctable est ainsi étranger à Weber), le sociologue peut se servir de ce concept pour rendre
compte d’une dimension de la réalité. Les classes rassemblent des individus ayant en commun une situation de
classe mesurable par l’accès différenciée à un ensemble de biens et la possession ou non des moyens de
production. […] Le statut social de l’individu peut également être fondé sur le prestige (« honneur social »)
attribué à tel ou tel groupe. Comme le souligne Weber, la considération sociale n’est pas étroitement liée à la
position économique : dans certaines sociétés la possession d’un niveau d’instruction élevé (prêtre,
professeur…), d’un honneur, en raison de la naissance (un titre de noblesse), l’exercice d’une profession
prestigieuse (savant, artiste…) sont valorisés et peuvent contribuer à rapprocher des individus et à leur faire
prendre conscience de leur appartenance à un même ensemble : une certaine homogamie peut renforcer la
13
cohésion. Au sein de l’ordre politique, une adhésion à un groupement (le parti) peut permettre à l’individu
d’obtenir certaines gratifications matérielles ou symboliques (postes, estime de soi…) et dans certaines
situations, la possibilité d’y faire carrière et d’avoir accès aux ressources publiques (un « contact » au
gouvernement, la possibilité de se faire entendre par un professionnel de la politique). Weber insiste, à la
différence de Marx, sur le fait que les différents ordres possèdent leur propre autonomie et, qu’a priori, aucun
d’entre eux ne saurait triompher des autres.
Source : Philippe Riutort, Précis de Sociologie, PUF coll. Précis, 2004, p401-402.
Question unique. Complétez pour retenir :
Ordre économique
Ordre social
Ordre politique
Nom du groupe social
Modalités d’appartenance au
groupe
Propriétés potentielles de ce
groupe
« les classes ne sont pas des
communautés » (Bosc p21-25)
Une même situation de classe peut
développer une « action
communautaire informelle », voire
une action communautaire au sens
plein du terme aboutissant au
« sentiment qu’ont les acteurs
d’être liés les uns aux autres » mais
cela est contingent (Bosc p21-25)
Synthèse des documents 10 et 11. Complétez pour retenir.
Points communs
« sont toujours des
communautés mêmes si
elles sont souvent plus ou
moins amorphes » (Bosc
p21-25)
« la considération sociale
n’est pas étroitement liée à
la position économique »
Différences
B. Les classes sociales en France aujourd’hui :
Nous allons surtout sur les points communs entre Marx et Weber pour continuer. On a vu que,
d’une manière générale, les classes sociales renvoient à l’existence de différents groupes
hiérarchisés entre eux et qui se caractérisent par des emplois différents et par des niveaux de
richesse différents. Mais est-ce une manière claire de décrire la société française ?
Dans quelle mesure peut-on alors dire que la notion de classes sociales décrit
correctement la société française contemporaine ?
On va voir que l’on peut répondre à cette question en différents temps, en gardant justement à
l’esprit qu’il y a différentes manières de considérer ce qu’est une classe sociale.
Méthode pour l’analyse de sujet : ne jamais oublier que l’on a différentes manières de
parler des classes sociales : dans notre cas, classe en soi, classe pour soi.
1. Un préalable : comment juger des évolutions des classes dans la société ?
On va maintenant reprendre ce qu’on a évoqué dans la partie sur Marx pour repartir de ce que
l’on sait.
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Selon Karl MARX, une société capitaliste se caractérise par l’opposition entre les
capitalistes et les prolétaires. En théorie, on devrait assister à une polarisation, c'est-àdire la hausse des inégalités économiques entre les capitalistes et les prolétaires en raison
de l’exploitation dans le processus de production.
Mais, face à cette théorie, on peut en opposer une autre quant aux évolutions de la société.
Voir document 12.
On peut insister sur trois choses sur la théorie de MENDRAS (1988) :
- la moyennisation qui signifie que la classe moyenne devient le groupe
majoritaire dans la société par réduction des inégalités économiques entre les
groupes extrêmes
- cette moyennisation s’observe de trois manières différentes :
o on constate une modification de la stratification sociale : avec la
tertiarisation, les PCS 3, 4 et 5 sont en croissance, tandis que la PCS 6
décline statistiquement (en % de la population active).
o on constate aussi une uniformisation des modes de vie : il y a une
baisse des inégalités pendant les Trente Glorieuses ainsi qu’une
apparition d’une consommation de masse.
o on constate enfin une uniformisation des attitudes : il y a une diffusion
d’attitudes communes dans l’ensemble de la population, notamment la
croyance dans l’école.
- même si on parle ici de « classe » moyenne, on peut voir que l’horizon de la
société, dans la théorie de Mendras, est la dissolution des classes sociales
puisque les inégalités se réduisent entre les différents groupes sociaux
2. Dans quelle mesure peut-on dire que l’on observe aujourd’hui des classes en soi ?
Maintenant que nous avons évoqué cela, nous devons répondre à notre problème. Qu’en est-il
des classes sociales aujourd’hui ? Commençons par le côté objectif des classes sociales, les
classes en soi. Pour ce faire, on va travailler sur le document 13 qui va permettre de faire le
tour de la question.
En conclusion du document 13 : on constate bien l’existence d’une stratification sociale
visible indirectement par le biais des PCS. Donc il existe toujours des classes en soi
aujourd’hui. Mais il y a bien eu un changement de la société avec la modification de la
classe populaire devenant moins ouvrière et plus parmi les employés, et une croissance
de la classe moyenne.
Gros plan sur l’évolution des inégalités économiques : Document 14 de la FD.
En conclusion du document 14 : A nouveau, on observe bien la moyennisation sur une
longue période, mais il existe de petits signes de polarisation de nos jours, mais bien loin
de la situation ancienne avec de très fortes inégalités.
En complément, cf. TD4 – Observer la moyennisation et ses limites.
3. Dans quelle mesure peut-on dire que l’on observe aujourd’hui des classes pour soi ?
Maintenant que l’on a vu qu’il existe encore des classes sociales en soi, on peut interroger
l’existence de classes pour soi. Il s’agit maintenant de voir si l’on observe de la conscience
de classe dans la société actuelle et quelles ont été les évolutions. Travail sur le doc 15.
En conclusion du document 15 : On observe une fluctuation du sentiment
d’appartenance au cours du temps, les années 1970 et la période récente de crise étant
plus propices au sentiment identitaire de classe tandis qu’il décline sur longue période.
Plus précisément, on constate que le sentiment d’appartenance à une classe sociale est
inégalement réparti dans la population : on le retrouve plus aux extrêmes de la société,
et surtout de manière explicite parmi les catégories supérieures.
15
4. En quoi les classes sociales sont-elles fragilisées de l’intérieur ?
Cela dit, on doit s’interroger sur un dernier problème. Nous avons vu que les sociétés
modernes sont des sociétés où la solidarité organique règne et où le niveau de revenu est
suffisamment élevé pour que les individus défendent autre chose que leur simple survie.
Quelles sont les conséquences de ces deux tendances sur les classes sociales ?
Travail sur le document 16.
En conclusion du document 16 : On peut donc observer que certaines caractéristiques
sociales viennent créer des divergences parmi les classes sociales. En soi, on observe
qu’un même groupe d’individus classés par PCS peut se traduire par des situations
financières différentes, signes d’inégalités internes au groupe. Pour soi, on observe que
les individus peuvent se réclamer de plusieurs identités sociales que de la seule identité
de classe, ce qui brouille les repères identitaires et le sentiment d’appartenance à une
classe sociale.
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