Le SEXE dans la publicité... Où sont les limites ? Bulletin(s) Canadian Marketing, Advertising & Regulatory Law Update Citation(s) Numéro 11 Expertise Marketing, publicité et réglementation Publicité En bref : Comme chacun le sait, dans la vie, il n'existe que trois certitudes : la mort, les impôts et le fait que le SEXE est bon vendeur. Pour s'en convaincre, il suffit de penser à l'immense succès du livre 50 nuances de gris, qui représente à lui seul près de 20 % de toutes les ventes américaines du printemps dans la catégorie romans pour adultes, et qui est le plus important ouvrage à succès en Grande-Bretagne depuis toujours. Mais jusqu’où peut-on aller en matière de sexe dans les publicités sans que les annonces soient retirées trop rapidement ? Si les limites sont assez floues, les plaintes déposées, elles, reflètent clairement l’opinion que la sexualité affichée doit avoir un lien avec le produit et ne pas être utilisée gratuitement. Elle ne doit pas non plus dénigrer un groupe donné ni être plus explicite qu’il est nécessaire ou raisonnable (ce qui peut également dépendre du lieu de diffusion). Enfin, elle NE DOIT PAS comporter des jeunes ou des personnages religieux. En étant si générales, ces lignes directrices permettent aisément de repousser les limites. Voici quelques réflexions à cet égard. Comment s'oppose-t-on aux annonces qui utilisent le sexe ? Les principaux arguments utilisés contre les annonces abusant de la sexualité sont fondés sur les articles 14 (c) et (d) du Code canadien des normes de la publicité (le Code) qui sont gérés par notre organisme d'autoréglementation, Les normes canadiennes de la publicité (NCP). L'article 14 vise une gamme d'annonces « offensantes », allant du racisme au fait de ridiculiser autrui de manière indue. En matière de sexe, le Code interdit essentiellement les publicités qui déprécient un groupe donné (généralement des femmes, bien qu'il s'agisse parfois d'hommes et, dans un des cas, d'infirmières !) ou affichent une indifférence manifeste envers certains comportements ou certaines attitudes « portant atteinte aux bonnes mœurs courantes au sein d’un important segment de la société évalué par le Conseil des NCP ». L'article 14 du Code permet de s'opposer à des annonce offensantes 14. Descriptions et représentations inacceptables Il est reconnu que des publicités peuvent déplaire, sans toutefois enfreindre les dispositions de l’article 14; et le fait qu’un produit ou un service en particulier est offensant pour certaines personnes ne constitue pas en soi un motif suffisant pour s’opposer à une publicité sur ce produit ou ce service. Les publicités ne doivent pas : tolérer quelque forme de discrimination personnelle que ce soit, y compris la discrimination fondée sur la race, l’origine nationale, la religion, le sexe ou l’âge; donner l’impression d’exploiter, de tolérer ou d'inciter la violence; ni donner l’impression de tolérer, d’encourager expressément ou être indifférent à une conduite illégale; déprécier, discréditer ou dénigrer une ou des personnes, un groupe de personnes, des entreprises, des organismes, des activités industrielles ou commerciales, des professions, des entités, des produits ou services identifiables ou tenter d’en faire l’objet de mépris public ou de ridicule; miner la dignité humaine, ou afficher une indifférence manifeste à l’égard d’une conduite ou d’attitudes portant atteinte aux bonnes mœurs courantes au sein d’un important segment de la société, ni les encourager gratuitement et sans raison. Quels cas ont dépassé les limites dans le passé ? Lorsque les limites sont floues, on se rend compte parfois trop tard qu’elles ont été dépassées. Vous vous souviendrez que nous nous sommes penchés sur diverses publicités à connotation sexuelle dans les derniers numéros, ce qui a déclenché une vague d'émotions intenses et un amoncellement de plaintes aux portes des NCP. Qu’ont en commun les vêtements, les téléphones cellulaires et la bière ? Sont-ils tous intimement liés au sexe ? Parmi les publicités antérieures, notons l’annonce d’un chemisier publiée à la dernière page d'un hebdomadaire gratuit du Québec dans laquelle une femme exposait ses fesses (neuf plaintes aux NCP), et d’autres annonces plus audacieuses telles que celle d'American Apparel dans laquelle une jeune femme portait une combinaison moulante de dentelle noire, et était penchée sur un lit dans une position très provocante. Il a été jugé que cette annonce dépassait les limites (voir l'image p. 18). Il ne faudrait surtout pas oublier l'annonce de Virgin Mobile montrant deux hommes qui s'embrassent passionnément sur un bureau, avec le slogan « Hook up fearlessly » (Connectez-vous sans crainte). Ici aussi, il a été jugé que les limites avaient été dépassées. Et que penser de la publicité pour la bière Minhas Creek, dans laquelle deux infirmières en robes courtes séduisantes aident à réanimer une bouteille de bière sur un lit d'hôpital. Une vague de protestations s’est soulevée au sein de la communauté infirmière, selon lesquelles cette image discrédite la profession. Néanmoins, il a été jugé que le Code n'avait PAS été violé dans ce cas (voir l'image ci-dessous). En tant qu’exemple d’une publicité qui ne contrevenait PAS au Code, nous examinions il y a quelques années l’annonce classique de la bière A Marca Bavaria qui est devenue un modèle du genre d'annonce qui respecte le Code que de très peu. Avec l'aide de Pietra, un mannequin brésilien qui ne passe pas inaperçu, la bière A Marca Bavaria de Molson est venue s'échouer sur les côtes canadiennes en 2003. Dans l'annonce qui a mis le feu aux poudres, deux jeunes hommes d'environ 25 ans sont assis sur une plage privée du Brésil, le regard fixé au large. L'un d'entre eux plonge la main dans une glacière et en ressort une bouteille de bière A Marca Bavaria. Au moment où il soulève sa bière, Pietra émerge de la vague. Alors qu'il tourne et retourne lentement la bouteille, elle suit le mouvement, d'abord vers la droite, puis vers la gauche, révélant ainsi tous les aspects de sa... personne, et finit par se coucher sur une serviette de plage. Au point culminant de l'annonce, il entreprend de détacher l'étiquette de la bouteille. Son visage exprime... comment dire, ce qu'on s'attend à y voir chez un homme dans ce contexte. Du plaisir. De l'émerveillement. De l'extase. De l'incrédulité devant sa chance. Alors qu'il détache l'étiquette trempée du goulot, Pietra commence à détacher le cordon de l'un des côtés de son bikini. L'homme a la bouche béante, les yeux écarquillés, et bien qu'on ne puisse entendre les battements de son cœur, on les devine. Mais toute bonne chose a une fin, et juste avant le point de non-retour, Pietra suspend son geste, secoue la tête en souriant dans un signe de refus et met fin à l'échange. Les deux hommes grimacent de déception, mais finissent par rire d'eux-mêmes. Pas de chance, mais quelle expérience ! Au chapitre des représentations « sexuelles », et malgré que nous sommes sur une plage au Brésil, c’est le gros plan du fessier de Pietra et non son bikini string, qui a suscité des plaintes invoquant l'importance exagérée accordée à la sexualité. Selon certaines personnes, l'homme contrôle Pietra, ce qui, selon elles, est inacceptable. Peut-être connaissons-nous mal les hommes, mais si celui-ci avait vraiment une emprise sur Pietra, le dénouement n’aurait-il pas été très différent ? Quant au Conseil, il a tranché en faveur de Molson, en expliquant que si certains plans du corps de la jeune fille ont créé un malaise chez certains de ses membres, il n'y a pas eu violation du Code. Le Conseil a également examiné la relation entre l'homme et la femme de l'annonce. Après avoir visionné l’annonce, il a reconnu l'intention de Molson, de mettre en scène un jeu réciproque sur lequel c’est la femme qui a le contrôle. Selon lui, si cette dernière n'avait pas dit « non » à la fin de l'annonce, leur conclusion aurait été différente. Filmée de cette manière, cependant, la publicité ne déprécie pas les femmes et, donc, ne constitue pas une infraction au Code. Même les organismes à but non lucratif utilisent le sexe Dans certaines des annonces, le sexe n’est pas utilisé pour vendre des chemisiers, de la lingerie, des téléphones cellulaires ou de la bière, mais plutôt pour promouvoir une bonne cause ! C'est le cas de la publicité de People for the Ethical Treatment of Animals (PETA) mettant en scène l'actrice Pamela Anderson qui ne porte qu’un minuscule bikini et dont les parties du corps sont étiquetées comme chez le boucher (gigot, surlonge, côtes, etc.). Le titre est le suivant : « All animals have the same parts. Have a heart. Go vegetarian. » (Tous les animaux sont faits de la même manière. Ayez du cœur. Soyez végétarien.) Le Bureau du cinéma et de la télévision de Montréal, ne l'a tout simplement pas digéré et a refusé d'accorder à PETA le droit d'organiser une manifestation au cours de laquelle l'organisation devait dévoiler la publicité en question. Cette controverse a fait la une des journaux nationaux, ce qui a donné une visibilité exponentielle à l'organisation. Les publicités les plus osées de l'année Bref, vous avez saisi l'idée. Il n’est donc pas étonnant qu'au cours de la dernière année, de plus en plus d'annonceurs aient misé sur le sexe pour faire parler d'eux. Avant que vous poursuiviez, nous devons vous prévenir que certaines de ces publicités ne sont pas destinées aux âmes sensibles et s'adressent à un public averti. Peut-on montrer l'éjaculation et la masturbation dans une annonce ? Le Bal en Blanc de Montréal est un immense party rave ayant lieu chaque année à Pâques. Il attire plus de 15 000 personnes, homosexuels et hétérosexuels, et dure généralement plus de 14 heures. Des publicités publiées sur Internet au troisième trimestre de 2011 montraient des images à haute teneur sexuelle, illustrant notamment la masturbation et l'éjaculation. Il est étonnant que les NCP n'aient reçu qu'une plainte pour publicité vulgaire, offensante et indécente (peut-être seul un petit nombre de personnes les a-t-il vues ?). Il est moins étonnant, en revanche, que l'organisme ait jugé que la campagne de publicité était dégradante pour les hommes et pour les femmes et qu'elle offensait les bonnes mœurs d'une partie importante de la population, et contrevenait donc à l'article 14(d) du Code. Pluie et t-shirts moulants : des inséparables Vers la fin de 2011, la radio K-97 Classic Rock fait paraitre un panneau publicitaire annonçant leur émission du matin qui a engendré dix plaintes. Dans l'annonce une femme à poitrine généreuse porte un t-shirt blanc moulant. On ne voit pas sa tête, uniquement sa poitrine. Le titre était le suivant : PRAY FOR MORE RAIN (Priez pour qu'il pleuve). Se prévalant des articles 14(c) et (d), les NCP ont jugé que la publicité discréditait et dénigrait les femmes et encourageait gratuitement et sans raison des attitudes portant atteinte aux bonnes mœurs courantes. Publicité sur les bas : la vérité nue Au cours du deuxième trimestre de 2012, American Apparel a diffusé par Internet, au Québec, une publicité portant sur des bas. Qu'y a-t-il de mal à afficher des bas ? Comme le fait souvent cette société, son annonce montrait une femme de dos, ne portant QUE des bas et des jarretelles, et exposant ses fesses nues. Ici encore, les NCP ont conclu que la publicité affichait une indifférence manifeste à l'égard d'une conduite ou d'attitudes portant atteinte aux bonnes mœurs courantes au sein d'un important segment de la société. Des pratiques publicitaires sans risque Ce n'est plus à prouver, le SEXE attire beaucoup l'attention. Et si vous avez lu cet article jusqu'au bout, vous ne direz probablement pas le contraire. Mais la question qui se pose est la suivante : vautil la peine de prendre des risques dans votre cas ? En bref : En matière de sexe, si vous voulez garder votre emploi, apprenez les pratiques publicitaires sans risque !