les quatre vautours d`europe presentation - LPO Rhone

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PARC NATUREL REGIONAL DU VERCORS
LES QUATRE VAUTOURS D’EUROPE
PRESENTATION COMPAREE
Jean-Pierre Choisy
Chargé d’étude Faune, Milieu Naturel
Septembre 2004
Quelques corrections et actualisations en mai 2006
I. – PLACE DANS LA CLASSIFICATION DES ETRES VIVANTS
Les grands oiseaux planeurs charognards appartiennent à deux lignées évolutives qui ne sont
nullement apparentées : les vautours de l’Ancien Monde et ceux des Amériques, en dépit de leurs
grandes analogies de forme, de taille, d’écologie et de comportement, ne se ressemblent que du fait
d’une évolution les ayant adaptés à des modes de vie analogues, et non pas du fait d’une étroite
parenté1.
Vautours du Nouveau Monde
Dès 1876 Huxley avait montré que les trois Condors et quatre Urubus n’étaient nullement
apparentés aux autres Rapaces diurnes. Il y a plus d’un siècle qu’on les a placés dans une famille
distincte (Carthartidés), apparentée à celle des Cigognes2 sensu lato. A la fin du XX° siècle, la
révision de la classification de la classe des Oiseaux sur des bases de biologie moléculaire en a
confirmé l’essentiel et, dans cas particulier, accentué l’apparentement, incluant ces sept espèces
dans les Ciconiidés3.
Vautours de l’Ancien Monde
Les vautours d’Eurasie et d’Afrique ne constituent nullement une famille à part : ce sont quinze
espèces à niche écologique très originale par les 237 de la famille des Accipitridés, qui regroupe
l’essentielle des « Rapaces diurnes »4. Ils se sont spécialisés éco-éthologiquement dans une
potentialité de nombreuses espèces de la famille5, sans que leur évolution morphologique s’éloigne
radicalement de celle-ci.
II. - ASPECT
La majorité des espèces de vautours sont très grandes, les autres sont simplement grandes.
Envergure
Poids
V. moine
V. fauve
Gypaète
Aigle royal
2,50 – 2,95 m. 2,80 – 2,40 m. 2,50 – 2,82 m. 1,95-2,20
Jusqu’à 13 kg 9 – 10 kg
5 – 7 kg
3,5 – 6,5 kg
Percnoptère
Buse variable
1,55 – 1,80 m. 1,13 – 1,28 m
2 kg environ
0,75-1,2 kg
Tableau I. – Dimensions des vautours d’Europe comparées à deux autres Rapaces (en italique) plus connus.
Bien entendu, quelques individus peuvent se situer en dehors de ces fourchettes : un gypaète des Alpes atteignait
2,90 m. d’envergure, un vautour fauve épuisé ne pesait plus que 3,95 kg, etc.
Seul le Vautour fauve, au long cou à duvet ras et collerette, correspond tout à fait à l’image que
chacun se fait d’un vautour. Mais, tous sont extrêmement originaux : avec un bon manuel
d’identification, l ne peut les confondre avec aucune autre espèce … dans de bonnes conditions
d’observations! Sur le terrain les conditions sont fréquemment loin d’être optimales. C’est pourquoi
j’ai rédigé une feuille qui, sans pouvoir remplacer les manuels d’identification, aide à s’en servir
pour savoir si, oui ou non, l’on a observé l’un des quatre vautours d’Europe.
1
Les exemples abondent de telles convergences évolutives, rapprochant superficiellement l’apparence de lignées bien
distinctes : par exemple les Dauphins et Baleines, qui à première vue évoquent plus des Poissons, alors que, comme les
Ongulés ou les Chauve-Souris ce sont des Mammifères.
2
Parmi celles-ci, notons que les Marabouts sont très volontiers charognards.
3
Ce qui n’est pas unanimement admis, mais remarquons qu’il ne s’agit que de divergence sur le degré de
l’apparentement, personne ne remettant en cause son existence même.
4
Les Faucons et espèces apparentées constituent une autre famille, distincte, comptant 61 espèces dans le monde.
5
Inversement, certaines espèces de la famille ne sont pas, normalement, charognardes (Aigle de Bonelli, Bondrée, etc.).
Tous les intermédiaires existent : prédateurs ne dédaignant pas la charogne, à l’occasion (Aigle royal, Buse, etc.) ou très
habituellement (Pygargue, Milans, etc.). Un vautour africain, le Palmiste a même abandonné la nourriture animale, se
spécialisant dans la consommation des fruits de certains palmiers.
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III. – BIOGEOGRAPHIE
Vautour fauve Gyps fulvus
Répartition paléarctique tempérée occidentale : tout autour de la Méditerranée, Maghreb inclus, au
nord jusqu’aux Alpes, à l’est jusqu’en Arabie et Azerbaïdjan6.
Vautour moine ou Vautour noir Aegypius monachus
Répartition biogéographique paléarctique tempérée, originellement du Portugal à la Chine, la
preuve qu’il ait niché fait défaut au Maghreb7.
Gypaète ou Vautour barbu, ou Casseur d’os Gypaetus barbatus
Elément de faune des montagnes du sud du paléarctique (des chaînes d’Asie centrale à la Péninsule
Ibérique, des Alpes au nord de l’Afrique), ayant différencié une sous-espèce en Arabie et sur les
reliefs de l’est de l’Afrique, jusqu’au sud.
Percnoptère ou Vautour blanc Neophron percnopterus
C’est au contraire une espèce essentiellement tropicale, du Sahel à l’Inde (deux sous-espèces
distinctes) dont certaines populations, migratrices, viennent se reproduire à la belle saison dans le
Paléarctique : dans les Préalpes en Haute-Savoie jusqu’à vers la fin du XIX° siècle, de nos jours
jusque dans la Drôme8.
NB
Si les vautours n’ont jamais niché au-delà du cinquantième degré de latitude. Pourtant, le
froid ne les rebute nullement : on peut les voir couver en hiver même en montagne, ou manger un
cadavre dans un demi-mètre de neige. La donnée d’oiseau la plus haute (obtenue en avion)
concerne un vautour de Rüppell : à 11 000 m. d’altitude. S’il faisait 45°C au niveau de la mer,
la température à cette altitude était d’environ –16°C. L’oiseau de cette espèce qui est resté plusieurs
mois dans la Drôme avec les vautours fauves, à Chamaloc montaient avec ces derniers en fin de
journée dormir dans un reposoir en falaises alors abondamment garni d’énormes stalactites de
glace. Mais sous les hautes latitudes, aérologie et brièveté de jours sont, une grande partie de
l’année, incompatibles avec la prospection de vastes étendues que pratiquent les vautours. Les
grands vautours ne peuvent esquiver la mauvaise saison par la migration car la reproduction les
occupe la majeure partie de l’année : parades, construction de l’aire, précèdent près de deux mois
d’incubation, autour de quatre mois de séjour au nid d’un jeune qui, après envol, continue
longtemps à quémander de la nourriture.
Quant au Percnoptère, le seul à hiverner sous les tropiques, il a évolué essentiellement comme
nettoyeur de carcasses, finisseur des bribes et autres restes laissés par les grands vautours (cf. infra).
Il niche donc essentiellement dans les mêmes régions qu’eux, même s’il y survit parfois à leur
élimination par l’Homme, vivant alors essentiellement dans l’exploitation des déchets de ce dernier.
6
D’autres espèces du genre Gyps, d’allure très proche et de même régime, le remplacent plus à l’est (Vautour
himalayen G. himalayensis, jusqu’à 3,10 m d’envergure) et plus au sud : en Asie (Vautour indien G. indicus, Chaugoun
= Vautour à dos blanc asiatique G. bengalensis) et en Afrique (Vautour de Rüppel G. rueppelli, Chassefiente ou
Vautour du Cap G. capensis , Vautour à dos blanc africain G. africanus). Les deux vautours à dos blancs, nicheurs sur
arbres, plus petits (envergure analogue à celle de l’Aigle royal) sont parfois séparés dans un genre Pseudogyps.
7
Remplacé plus au sud et à l’est par trois espèces d’écologie analogue :
- dans les régions arides de toute l’Afrique et d’Arabie l’Oricou Torgos tracheliotus extrêmement semblable de
forme (tête rouge, ventre blanc), placé par certains dans le même genre Aegypius que le Moine ;
- au sud du Sahara, dans des habitat moins arides, par le Vautour-à-tête-blanche Trigonoceps occipitalis ;
- de la Péninsule Indienne à l’Indochine par le Vautour royal Sarcogyps calvus qui ressemble au précédent, mais
avec une tête rouge.
8
Remplacé plus au sud en Afrique par le Charognard Necrosyrtes monachus, d’apparence analogue, mais brun très
foncé à face rose.
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IV. – REGIME ALIMENTAIRE
L’évolution des Vautours a été centrée sur l’exploitation des charognes d’Ongulés sauvages9. Celles
d’autres Mammifères de taille analogue ne sont nullement dédaignées. Mais, bien moins
abondantes, elles jouent ipso facto un rôle quantitatif mineur dans l’alimentation des populations.
Du fait de cette indifférence à l’identité zoologique précise des cadavres, le passage aux charognes
d’Ongulés domestiques n’a pas nécessité d’adaptation particulière et, inversement, avec le
renouveau des Ongulés sauvages, on voit de plus en plus de curées sur les cadavres de ces derniers.
A. – APTITUDES NECESSAIRES
Les charognes d’Ongulé représentent chacune une grande masse de nourriture, mais relativement
peu au kilomètre carré, très peu si on considère non pas la disponibilité annuelle mais instantanée,
disons à la semaine. L’exploitation de cette ressource suppose donc des aptitudes très particulières :
- pouvoir alterner bombances et jeunes : un vautour fauve affamé peut consommer jusqu’à près
de 20 % de son poids, mais deux semaine de jeune, voire trois, ne mettent pas ses jours en danger10.
Le Gypaète, en outre, constitue des provisions d’ossements dans des failles en paroi ;
- pouvoir prospecter de très vases superficies11 avec de très faibles dépenses d’énergie : d’où
l’extrême spécialisation dans le vol à voile et l’évitement du vol battu, qui coûte environ trente fois
plus d’énergie aux vautours fauves ou moines. Par temps couvert (donc sans ascendances
thermiques) ni vent (sans ascendances dynamiques) endurer le jeûne est, pour eux, plus rentable que
prospecter en vol battu, du point de vue du bilan d’énergie. Si les autres espèces cerclent souvent
pendant des heures, le Gypaète, de voilure très différente, pratique couramment la prospection le
long des versants, qu’il scrute la tête en oblique, battant beaucoup moins rarement des ailes que les
autres vautours. Contrairement au Vautour fauve, il ne craint pas de pénétrer l’encaissement d’une
étroite gorge. Il est absolument courant d’identifier par leur bague à Chamaloc des vautours fauves à 45 km, voire 60
km, de leur œuf ou leur poussin, aux bons soins du conjoint : dans les Baronnies. Plus exceptionnel : en 2002, on y a
identifié une femelle dont le mâle couvait à 150 km de là : dans les gorges du Verdon. Or, cette reproduction a réussi !
- pouvoir détecter les charognes à grande distance : cette détection se fait exclusivement à vue12,
soit directement, soit indirectement, en observant le comportement d’autres oiseaux charognards de
la même espèce, d’autres espèces de vautours, ou autres que des vautours : milans, corvidés, etc.
Un vautour peut distinguer un objet à approximativement dix mille fois son diamètre, que ce soit un
cadavre ou un autre oiseau. Les vautours fauves fréquemment observés en groupe de plusieurs dizaines, sont vus
également isolés…pour nous : des oiseaux à 10 ou 20 km l’un de l’autre, eux, se voient. Une quarantaine d’individus en
moyenne à 5 km l’un de l’autre scrutent 1000 km2… à un instant donné, beaucoup plus en se déplaçant. Si l’un descend
sur un cadavre, son mouvement, remarqué par les plus proches congénères, se propage à l’ensemble du groupe 13.
9
On entend dire, et parfois on lit, que les vautours ont « de tout temps » dépendu de l’élevage. Voire…Le début de
l’élevage ne remonte guère à plus de dix mille ans, sept mille en Europe de l’Ouest, alors qu’on connaît des fossiles de
vautours vieux de quelques millions d’années. La tendance d’Homo sapiens à considérer son nombril comme le centre
de l’Univers s’explique sans doute psychologiquement, sociologiquement, historiquement, etc. Du point de vue de la
biologie de l’évolution, on ne sait s’il faut plus s’étonner de son extrême arrogance ou rire de sa fantastique naïveté !
10
Même s’il ne meurt qu’au bout d’environ 40 jours d’inanition, au-delà de 20 sa situation est critique. De plus en plus
affaibli, il peut de moins prospecter. Sa survie dépend de plus en plus d’un heureux hasard.
11
Avec d’énormes écarts journaliers, la moyenne est de l’ordre de 400 g. par jour pour un vautour fauve. Admettant
qu’un cadavre fournisse en moyenne la ration journalière de 50 vautours et que les Ongulés du territoire fournissent, en
moyenne, chaque année, une charogne par km2. Dans ces conditions, une population de cinquante vautours doit donc
prospecter 365 km2 et une population de 500 vautours 3650 km2. En réalité, les surfaces doivent être encore plus
grandes : certaines charognes (en forêt, au fond de ravins, etc.) ne sont pas accessibles aux vautours et d’autres
charognards (oiseaux comme mammifères) consomment une partie de celles qui le sont.
12
Au contraire, les Urubus sont parmi les rarissimes oiseaux pouvant détecter leur nourriture à l’odeur, ce qui leur
permet d’exploiter les charognes même sous le couvert amazonien et d’autres forêts d’Amérique tropicale. Un des trois
condors, le Vautour pape, y parvient... en suivant les Urubus, qu’il domine sur les charognes, car nettement plus grand.
13
Il arrive que, ayant déposé une charogne sans apercevoir le moindre vautour en l’air, on en voit atterrir plusieurs
dizaines quelques de minutes après : planant à quelques milliers de mètres d’altitude, invisible à l’œil humain, ils ont
très bien repéré le cadavre.
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B. – UNE COMMUNAUTE DE CHAROGNARDS COMPLEMENTAIRES
Un peuplement de vautours complet fonctionne en système complet d’élimination des cadavres :
Vautour fauve : fouilleur-tireur à préférence marquée pour les parties molles. Ouvrant les cadavres
par les orifices naturels et les zones de moindre épaisseur de la peau (aines, aisselles), il introduit
son cou serpentiforme dans la cavité générale, arrache les viscères, consomme les masses
musculaires, racle la peau, souvent en la retournant. Sa catégorie de nourriture représentant une fraction de
chaque cadavre supérieure à celle des autres vautours, il est plus abondant qu’eux.
Vautour moine : découpeur à goût prononcé pour les parties dures : peau, tendons, cartilages,
capsules articulaires, aponévroses, etc. Il débite les cadavres de l’extérieur, grâce à un bec encore
plus puissant et tranchant que celui du Vautour fauve. Quoique dominant, il arrive souvent en
milieu ou fin de curée : quand le précédent a déjà évacué une bonne partie des parties molles ?
Percnoptère : picoreur de bribes et autres restes. Son bec fin et long, peu efficace pour ouvrir la
peau des Ongulés, l’est tout à fait prélever les bribes, nettoyant les os jusque dans leurs petites
cavités, entre les côtes, vidant le crâne. Il consomme également le contenu de la panse, délaissé par
les autres vautours.
Gypaète : le Casseur d’os trouve par kilogramme de tissu osseux un peu plus calories que dans les
parties charnues. Ce n’est donc nullement « la part du pauvre »…à condition d’être apte à le
digérer et d’abord à l’ingérer. Les os trop grands pour être avalés et trop gros pour être brisés au bec
sont emportés au vol puis lâchés sur des rochers, autant de fois qu’il le faut pour les casser. De ce
fait, c’est le seul Vautour à avoir conservé les serres préhensiles des Rapaces prédateurs14.
Cette co-adaptation correspond à une optimisation de l’exploitation des ressources, non pas dans le sens, naïf, d’une
perfection absolue, aussi immuable qu’immanente, mais comme le meilleur compromis entre contraintes opposées,
résultat statistique de millénaires de cohabitation et de survie différentielle, « triant » entre les comportements, les
aptitudes, etc. D’ailleurs, le fonctionnement peut varier selon les conditions : ainsi, là où le Gypaète est le seul vautour,
il dispose aussi la chair des charognes. Mais là où il cohabite avec d’autres grands vautours, s’il ne lui reste que le
squelette, il en trouve beaucoup plus, guidé par leurs déplacements et les curées.
NB
Le Vautour fauve, exceptionnellement grégaire, ne s’intéresse pas, sauf disette extrême, aux charognes plus
petites que celles d’Ongulés : quelques dizaines d’individus qui seraient descendus sur un cadavre d’écureuil
dépenseraient à se renvoler plus d’énergie que celui-ci n’en représente !
Les trois autres espèces, beaucoup moins grégaires, et même franchement territoriales pour les adultes nicheurs de
Gypaète et de Percnoptère, ne dédaignent nullement les petits Vertébrés. Il y a des populations de Vautour moine et/ou
de Percnoptère pour qui les charognes de Lapin sont une ressource majeure. Les très petits cadavres sont entièrement
consommés. Il leur arrive de donner le coup de grâce à petits Vertébrés blessés, malade, agonisant, alors que le Vautour
fauve, souvent posé à proximité, attend habituellement avec patience que l’animal meurt. La prédation proprement dite
s’observe chez deux espèces :
- Gypaète : là où vivent des tortues terrestres, en exploite les populations, brisant la carapace comme il le fait avec les
gros os : en les larguant sur des rochers ;
- Percnoptère : lorsqu’ils sont faciles à capturer des Amphibiens, petits Reptiles, Invertébrés sont tués 15. Parmi ces
derniers, beaucoup sont trouvés en décortiquant les bouses et autres fèces. Si celles-ci sont bien peuplées, le total est
avalé. On a observé la consommation de gros œufs (Autruche en Afrique, Flamant en Europe) après en avoir brisé la
coquille en utilisant des cailloux. Les balles de golf trouvées dans un nid de Provence lors du baguage d’un jeune ontelles été prises pour des œufs ? Toutes ces petites proies occasionnelles ne représentent qu’une fraction négligeable de
la masse de nourriture consommée.
NB
On a rapporté des cas de vautours fauves ayant tué du bétail (sources : exposé d’un vétérinaire travaillant sur la
question, discussion avec un autre). Ce fut toujours dans des conditions anormales, voire carrément artificielles, très
différentes de celles auxquelles l’évolution a adapté ce charognard :
- effectivement, des vautours fauves peuvent tuer une chèvre…très bien ligotée et pouvant à peine bouger :
une telle « expérience », d’une parfaite mauvaise foi, a été faite !
- plus sérieusement, on a observé des cas de blessure, ou de mort directement ou par nécessité d’euthanasie, lors
de mises bas difficiles en plein-air : nouveau-né inerte, en mauvais état, ou mourant ; femelle dont le fœtus
mort dépassant de la vulve est attaqué par les vautours qui, tirant dessus, sortent l’utérus, etc.
Deux facteurs artificiels sont susceptibles d’augmenter la fréquence de telles anomalies :
14
Les autres Vautours, qui ont perdu cette aptitude, portent les matériaux de leur nid au bec, comme des Passereaux.
Les observations analogues concernant le Vautour moine restent totalement anecdotiques.
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-
mise en alpage de races peu rustiques (Blonde d’Aquitaine dans les Pyrénées), qui ne devait pas être exposées
à mettre bas privées de la possibilité immédiate d’assistance humaine en cas de difficultés, fréquentes ;
vautours nombreux affamés par l’équarrissage de charognes précédemment laissées à leur disposition : observé
en Espagne dans certaines régions, du fait de règlements européens.
Le Gypaète : d’étrange fantasmes, localisés dans l’espace et dans le temps
Somptueux, étrange, le Casseur d’Os, impressionnant à nos yeux, mais qu’un spécialiste de l’espèce qualifiait de
« gagne-petit timide et besogneux », a été affublé, d’une réputation de véritable dragon, tuant bouquetins, chamois,
chevreuils, cerfs, moutons, vaches, capable d’arrêter un troupeau, attaquant enfants, bergers, chasseurs ! Très
curieusement, ces fantasmes littéraires romantiques, non seulement ne se développent qu’à partir de la seconde moitié
du XVIII°mais, en outre, sont localisés dans l’espace : « Chose étrange, alors que les Suisses, peuple calme et pondéré,
ont raconté du gypaète les faits les plus invraisemblables, des peuples chez qui le gypaète vit aussi en grand nombre :
les Espagnols, les Catalans et même les Andalous, qu’on pourrait croire plus portés à l’exagération et à l’emphase, ont
conservé en face de lui un calme et une indifférence complets » L. Lavauden16, 1991. Ce délire romantique germanique
a débordé son aire culturelle d’origine jusqu’aux Alpes françaises, mais a épargné les Pyrénées : « Dans notre pays,
d’aucun temps, on a donné au gypaète pareille réputation de terreur : il n’est redouté ni des bergers, ni des chasseurs et
personne non plus ne se plaint de ses rapines » Miègemarque 1902.
V. – HABITATS
Exclusivement visuels, les vautours de l’Ancien Monde n’exploitent pas les boisements fermés17,
bien qu’ils puissent manger une charogne sur leur lisière.
Vautour fauve et Percnoptère habitent surtout, mais non pas exclusivement, des régions à climat
sec, voire aride. En Europe, ils nichent du niveau de la mer à la moyenne montagne18. Mais la haute
montagne est fréquentée, surtout à la belle saison : par les nicheurs, très couramment jusqu’à une
cinquantaine ou une soixantaine de kilomètre de l’aire, à l’occasion bien plus loin ; les immatures et
autres non nicheurs, eux, peuvent transhumer à des centaines de kilomètres des territoires de
reproduction : ceux de populations du littoral et d’îles de Croatie n’ont jamais cessé d’estiver dans
les Hohe Tauern et d’autres hautes régions d’Autriche entre ce massif et la frontière méridionale.
Gypaète : l’espèce peut prospérer sous les climats des plus divers, bien qu’elle ait fait son évolution
initiale dans les massifs montagneux d’Asie centrale (Himalaya et alentours) probablement
exploitant particulièrement les cadavres des Caprinés (Bouquetins, Chamois, Mouflons, etc.), dont
cette région est aussi le berceau évolutif. Mais il ne dédaigne nullement d’autres charognes, ni de
nicher aux basses altitudes, jusqu’aux côtes marines si le relief est accidenté (au moins des collines
avec quelques sites rocheux). S’il prospecte toute l’année la haute montagne, les aires ne dépassent
guère la limite supérieure des forêts19 (dans les Pyrénées, actuellement, de 630 à 2300 m.).
Vautour moine. L’espèce vit dans deux types d’habitats :
- en Asie Centrale steppes et pelouses d’altitude, explorées jusqu’à 4 500 m, niche en falaise ;
- ailleurs, il fréquente des altitudes analogues à celles du Vautour fauve, nichant du niveau de la
mer à la moyenne montagne, mais exploitant jusqu’aux pelouses alpines. Il place alors son nid sur
un arbre, de préférence sur pente, à feuillage persistant et à houppier largé, non pointu : chêne
vert, pin sylvestre. De rares cas de nidification en falaise sont connus. Contrairement aux trois
autres, il exploite jusqu’aux habitats semi-boisés, voire les forêts (très) claires. Contrairement au
Vautour fauve, il peut descendre avec précision sur un arbre ou dans une trouée forestière, à la
verticale queue relevée comme un Troglodyte20.
16
Naturaliste dauphinois.
Au contraire de divers Vautour américains cf. supra note 13.
18
On connaît des nids beaucoup jusqu’à la limite des forêts voire au-delà (jusqu’à 2750 m. dans le Caucase) : lorsque
les sites à basse altitude sont saturés (Vautour fauve dans certaines régions d’Espagne), ou encore là où l’archaïsme
culturel fait encore persécuter les Rapaces en général, éliminant les nids de vautours des zones plus accessibles.
19
Celle-ci ne dépend pas de l’altitude, mais de la température : au sud, dans l’Himalaya, en Afrique, elle atteint et
dépasse 4000 m. La nidification du Gypaète aussi.
20
On a vu des vautours fauves repérer une charogne en survolant un boisement clair, se poser en lisière, et à partir de là
gagner à pied, parcourant parfois ainsi quelques centaines de mètres. Intéressant exemple de souplesse
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VI. – REPRODUCTION
Les vautours d’Europe nichent dans des parois rocheuses, sauf le Vautour moine qui place son nid
sur un arbre21, solide, robuste, mais qui peut n’avoir que quelques mètres, surtout sur un versant
escarpé. Les espèces à feuilles persistantes et houppier étalé sont préférées : dans les Causses le
Chêne vert dans l’étage méditerranéen, le Pin sylvestre ailleurs. La « table » du Sapin sera-t-il aussi
utilisée dans les Alpes ? Ce n’est pas sûr : cet arbre n’a pas des branches aussi robustes.
Les deux sexes participent à la couvaison et à l’élevage, comme chez environ 80 % des espèces
d’oiseaux mais :
- monogamie sociale ne signifie nullement fidélité sexuelle absolue, comme chez la très grande
majorité, des plus petits Passereaux aux plus grands Rapaces22 !
- des ménage à trois polyandriques s’observent chez une minorité non négligeable de Percnoptère
et de Gypaète : les deux mâles ayant de statuts inégaux dans la famille.
La pérennité des populations de vautours dépend étroitement de la longévité des adultes23, de
l’ordre d’une quarantaine d’année, sauf accident, au contraire de la très grande majorité de petites
espèces d’oiseaux24. Comme chez tous les Rapaces, la mortalité est maximale au début de la vie
indépendante : entre la fin des apports de nourriture par les parents et l’acquisition d’une expérience
suffisante. Ensuite, elle est très faible chez les vautours, sauf anomalie, presque toujours du fait de
l’Homme.
La faiblesse du taux de production de jeunes a plusieurs causes qui s’ajoutent :
: normalement pas avant à trois ans révolus chez le
Percnoptère, quatre chez le Vautour fauve, cinq chez le Moine, rarement avant sept chez le
Gypaète ;
-
MATURITE SEXUELLE TARDIVE
-
TOUS LES COUPLES D’UNE POPULATION NE PONDENT PAS CHAQUE ANNEE
: le « taux
d’abstention » atteint souvent 20 à 30 %, parfois davantage ;
-
TRES FAIBLE NOMBRE D’ŒUFS PAR PONTE, DONT UNE FRACTION SEULEMENT DONNE UN JEUNE
L’ENVOL :
Vautour fauve : on ne connaît de ponte de plus d’un œuf ;
Vautour moine : un œuf habituellement, deux exceptionnellement ;
Gypaète : très fréquemment deux œuf, mais on ne connaît pas de cas de survie des deux poussins ;
Percnoptère : le seul à élever fréquemment deux jeunes.
Année
Jeunes à l’envol
2000
2001
2002
2003
1
0
1
2
2004
2005
2
1
Tableau 2. – Succès de reproduction du couple de Percnoptère installé dans les Baronnies en 2000. En 2001, le poussin
a disparu pour une cause indéterminée.
comportementale : n’ayant pas les capacités de vol qui permettent au Vautour moine d’avoir accès à une charogne entre
les arbres, le Vautour fauve arrive à contourner la difficulté pour accéder à la ressource.
21
Les seuls autres vautours nichant sur arbre sont tropicaux : le Charognard, les deux Vautours-à-dos-blanc, le
végétarien Palmiste et une sous-espèce du Vautour indien. Cela peut s’observer exceptionnellement chez le Percnoptère
et le V. fauve : ce dernier s’installe alors dans une aire de Vautour moine. Inversement, dans les régions arides d’Asie
centrale dépourvue d’arbre, le Vautour moine niche en falaise.
22
Encore un mythe romantique détruit par la recherche ! En effet, la fidélité, parfois à vie, existe néanmoins chez un
petit nombre d’espèce. Est-ce encore plus du fait de la rareté ? Je ne trancherai pas : hors sujet !
23
Ce que les spécialistes nomment : « démographie K ».
24
En dehors d’habitats aux ressources très constantes, telles que forêts équatoriales, quasiment toutes ces espèces ont,
au contraire, une « démographie r » : une production intense de jeunes compense une mortalité élevée. Ces deux types
de démographies sont les deux extrêmes d’un gradient. Notons que la corrélation avec la taille s’observe même entre
Vautour : plus petit, le Percnoptère est mûr plus tôt, produit davantage de jeûne, très probablement en rapport avec un
taux de survie moins élevé.
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NB
Des pontes de remplacement sont possibles chez toutes les espèces si la première a été détruite précocement.
-
LES PREMIERES REPRODUCTIONS, LE PLUS SOUVENT, ECHOUENT FAUTE D’EXPERIENCE25
des
jeunes nicheurs . Il n’est pas exceptionnel qu’un couple de Gypaète, espèce à maturité
particulièrement tardive (cf. supra) ne réussisse une reproduction qu’après avoir atteint dix
ans, voire douze !
26
VII. – AJUSTEMENT DES POPULATIONS AUX RESSOURCES
Les vautours ne sont que très rarement tués par des prédateurs : lors de conditions exceptionnelles27.
Grands vautours et renard, exceptionnellement loup, en d’autres contrées chacal peuvent très bien
manger sur la même charogne28. Un effet pervers de la diffusion dans le public d’une certaine
information sur la fonction régulatrice des populations de prédateurs sur des populations de proies
est d’avoir répandu, même chez de gens de bonne foi, l’idée simpliste et erronée, que la prédation
soit le seul et unique mode d’ajustement des populations à leurs ressources. Il en existe bien
d’autres :
AUGMENTATION DE LA MORTALITE
Directement par disette, indirectement par affaiblissement de la résistance aux intempéries, aux
agents pathogènes. L’endurance au jeûne et l’aptitude aux grands déplacements rend les vautours
individuellement assez peu vulnérables à ce facteur, surtout les immatures, non liés à un domaine
vital. Même les adultes liés à un site de nidification ne connaîtront une augmentation de mortalité
marquée que dans des circonstances très exceptionnelles ou/et artificielles :
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catastrophe climatique, induisant d’abord une surabondance de cadavres d’Ongulés sauvages et/ou domestique
mais ensuite une pénurie, du fait de l’effondrement des effectifs ;
suppression de la disponibilité de charognes de bétail dans des régions où les densités de celles d’Ongulés
sauvages disponibles sont faibles, voire nulles. Cette suppression peut avoir des causes fort diverses :
règlements sanitaires dans les pays développés, disette extrême dans certains pays sous-développés, alors tout
bestiau qui paraît menacé d’une mort prochaine est abattu pour consommation ou vente.
Dans les sites de réintroduction du Vautour fauve dans les Préalpes, il n’y a qu’au Verdon qu’on ait observé des cas
de réussite de reproduction dès la première année de ponte : dans le Diois, en 2001 un couple a perdu son œuf peu avant
l’éclosion, l’autre a perdu son poussin âgé d’environ un mois et dans les Baronnies, de cinq couples ayant pondu en
1998 aucun n’a atteint l’éclosion. Le taux de réussite pour l’ensemble des Préalpes en 2004, 36 jeunes à l’envol pour 58
pontes : 62,1 % a atteint celui de populations établies encore en expansion et avec une fraction non négligeable de
jeunes couples inexpérimentés.
26
Comme on le voit habituellement chez les Oiseaux et Mammifères vivant longtemps…depuis qu’on l’a étudié grâce
à des marquages individuels : Bouquetins, Ours, Phoques, Mouettes, etc. Il en va tout autrement avec les animaux
domestiques : outre qu’ils n’ont pas à affronter les mêmes contraintes écologiques, l’éleveur peut pallier l’inexpérience
d’une femelle d’Ongulé primipare, s’il le faut en prenant complètement en charge le(s) jeune(s). Pour les volailles de
rapport, multipliées quasi-exclusivement de manière artificielle dans les pays développés, le problème ne se pose plus.
27
Ainsi, lorsque des vautours fauves achèvent de traverser le détroit de Gibraltar après y avoir rencontré des vents
contraires et approchent de la côte en vol battu, si épuisant pour eux, des groupes de Goélands, peuvent en profiter pour
les attaquer et les tuer pendant qu’il sont encore au-dessus de la mer. Ceci reste démographiquement négligeable, sans
commune mesure à leur quasi-éradication de la majeure partie du Maghreb du fait de l’empoisonnement visant le
Chacal (Trochard, comm. or ; pers.).
28
Ils échappent à la prédation par leur taille : en moyenne 9 à 10 kg chez le Vautour fauve (moyenne de nombreuses
captures en liberté pour baguage), en dépit de publications donnant des valeurs plus basses, fondées sur des données
anciennes et peu nombreuses. Environ 1 kg de plus chez le Moine. Mais il y a des limites : il semble bien qu’un des
oiseaux lâchés au Verdon et trouvé mort dans un zoo autrichien ait quand même « poussé le bouchon un peu loin » en
tenant de se nourrir…dans l’enclos des tigres !
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LES QUATRE VAUTOURS D’EUROPE
J.-P. Choisy
PRESENTATION COMPAREE
DIMINUTION DE LA PRODUCTION DE JEUNES PAR RAPPORT A LA SUPERFICIE EXPLOITEE
Variation du taux d’échec à tous les stades de la reproduction
Lorsque la nourriture se raréfie, ne serait-ce que relativement, du fait de l’accroissement de la
population alors que les ressources restent (en moyenne) constantes, on peut observer une diminution
du pourcentage de réussite, à tous les stades de la reproduction : augmentation de la fraction de
couple qui ne pondent pas et/ou de la fraction de pontes qui n’atteignent pas l’éclosion et/ou de la
fraction de poussins qui n’atteignent pas l’envol et/ou de la mortalité après envol. Et inversement en
cas d’augmentation durable des ressources.
Comportement territorial
Ce mode d’adaptation de la production de jeunes aux ressources du territoire est des plus répandus
chez les oiseaux : les couples défendant contre leurs congénères adultes des territoires d’autant plus
grands que la nourriture est moins abondante, la production de jeune par unité de surface diminue
automatiquement et inversement là où la nourriture abonde29. Ce comportement territorial est de
règle chez Gypaète et Percnoptère.
Sélection de site
Chez beaucoup d’espèces d’oiseaux, des Martinets aux Vautours, les individus tentant leur première
reproduction ont sélectionné le site de nidification au cours de la saison de reproduction précédente,
en fonction de critère divers : sécurité, nourriture, etc. Chez le Vautour fauve, espèce
exceptionnellement grégaire, on a démontré statistiquement que les subadultes ayant à choisir entre
plusieurs colonies, nicheront l’année suivante de préférence dans celles non pas où les nids sont
déjà les plus nombreux, mais où la fraction de nids hébergeant une jeune est la plus élevée. Or
celles-ci sont les colonies qui disposent de ressources alimentaires abondantes par couple nicheur.
Ceci oriente les candidats à la nidification vers les sites disposant alentour des ressources
alimentaires les plus abondantes.
29
Chez de nombreuses espèces territoriales les adultes renonçant (provisoirement…) à revendiquer un territoire sont
tolérés. Mais ils ne se reproduiront pas. Un certains excès de reproducteurs potentiels est favorable à une population : en
cas de mort d’un oiseau territorial, la place vacante sera immédiatement occupée.
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LES QUATRE VAUTOURS D’EUROPE
J.-P. Choisy
PRESENTATION COMPAREE
VI. – GREGARISME, TERRITORIALISME
Le Vautour fauve est exceptionnellement grégaire, aussi bien sur une charogne qu’au vol ou en
falaises. Les nids eux-mêmes peuvent être n’être distants que de quelques mètres, ou encore
installés sur une vaste vire servant de reposoir à des dizaines de non nicheurs.
Au contraire les Gypaètes et les Percnoptères nicheurs défendent un territoire autour du nid contre
leurs congénères, comme le font la grande majorité des espèces d’oiseaux. Chez le Percnoptère, les
nicheurs chassent leurs congénères également d’une charogne loin du nid. Les non nicheurs sont
plus tolérants et peuvent se rassembler, qu’il s’agisse d’immatures ou, chez le Percnoptère,
d’oiseaux en halte migratoire ou en instance de départ.
Le comportement social du Vautour moine est intermédiaire : il niche en colonies lâches. Les douze
de couples nichant actuellement dans les Causses sont groupés, mais dans un espace de quelque huit
kilomètres. Il semble que le facteur déterminant soit qu’en étant installé sur son aire un Vautour
moine n’ait pas l’aire d’un congénère dans son champ visuel. Ceci ne dépend pas exclusivement de
la distance : le relief peut ainsi permettre parfois que deux couples nichent relativement près l’un de
l’autre, sans arriver toutefois à la quasi-contiguité du Vautour fauve.
Grégarisme entre espèces
Les vautours moines se mêlent volontiers aux groupes de vautours fauves, les suivant jusqu’aux
reposoirs en falaise, où ils arrivent qu’il dorme. Assez souvent ils se ravisent peu avant la nuit et se
renvolent pour s’aller percher sur un arbre. Inversement, lorsque sont présents un ou quelques
vautour(s) moine(s) il devient beaucoup moins inhabituel de voir des vautours fauves se poser sur
des arbres, parfois en nombre : il semble que la première espèce qui se décide à se poser entraîne
souvent l’autre.
Le Percnoptère, finisseur de restes, est attiré par les rassemblements des deux espèces ci-dessus.
Lorsqu’il se repose dans le même site rocheux que les vautours fauves, il a tendance à le faire un
peu à part. Une vire infime, un simple joint de strates à peine visible, lui suffit.
Le Gypaète semble ne pas aimer la foule : plutôt que se jeter dans la mêlée, il préfère souvent
attendre un peu l’écart que les autres grands vautours aient fini de « déshabiller » un squelette.
Le Vautour fauve, particulièrement grégaire et social, plus abondant que les autres vautours
d’Europe, joue aussi un rôle éthologique central dans le grégarisme entre espèces comme dans la
découverte des charognes par elles. Des vautours exotiques accidentels en Europe, ou encore des
grands Rapaces à l’occasion charognards, sont également attirés par les groupes de vautours fauves
ou/et la nourriture qu’ils décèlent. Exemples : de l’automne 2003 au printemps 2004 d’un Vautour de Rüppell
observé d’abord dans les Baronnies, ensuite dans le Diois et, quelques années auparavant, dans les Baronnies d’un
Pygargue en hiver, d’un Aigle des steppes au printemps, tous deux immatures.
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PRESENTATION COMPAREE
J.-P. Choisy
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