LES VOIES AUDITIVES

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IV. LES VOIES AUDITIVES.
Les voies auditives sont de deux sortes :
- des voies ascendantes ou « afférentes » qui apportent les informations au cerveau ;
- des voies descendantes ou « efférentes » qui permettent au cerveau d’avoir un « effet » sur
l’oreille, c’est-à-dire d’exercer un rétrocontrôle.
A. LES VOIES AFFERENTES.
Dans les voies auditives, le message va être transporté sous forme d’influx nerveux, et modifié de
façon à être intégré par le cerveau. L’influx nerveux « code » les différentes caractéristiques des
sons: intensité, fréquence (en particulier contenu phonétique), caractéristiques temporelles.
L’intégration désigne l’analyse et la reconnaissance de ces caractéristiques.
Grossièrement on compte 5 niveaux de traitement des informations, de la périphérie jusqu’au
cortex: noyau cochléaire, complexe de l’olive supérieure (dans la protubérance du tronc cérébral),
le colliculus inférieur (tubercules quadrijumeaux du mésencéphale), le corps genouillé médian
(thalamus), le cortex auditif situé sur le lobe temporal.
Jusqu’au complexe olivaire, c’est la partie basse des voies auditives (tronc cérébral).
A partir du colliculus, c’est la partie haute (thalamus et cortex).
I. PARTIE BASSE (NERF ET TRONC CEREBRAL)
Les voies auditives basses effectuent la discrimination, c’est-à-dire l’analyse des composantes
sonores.
Cette analyse se fait par excitation ou inhibition, au niveau des synapses (potentiels postsynaptiques excitateurs ou inhibiteurs PPSE ou PPSI), des informations transmises par les cellules
sensorielles. La sommation, à chaque synapse, des PPSE et des PPSI, s’appelle l’intégration, car
c’est une somme dans le temps (comme une intégrale en mathématiques).
1. NERF COCHLEAIRE
Le nerf cochléaire ne contient que des neurones afférents, appelés neurones afférents primaires ou
de 1er ordre. Ces neurones ont un dendrite qui fait synapse avec les cellules ciliées, un corps
cellulaire dans le ganglion spiral et un axone (fibre) qui constitue le nerf. 95 % des neurones du
nerf cochléaire sont connectés avec les CCI (type I).
En l’absence de toute stimulation extérieure, les neurones cochléaires ont une activité spontanée
aléatoire pouvant atteindre 100-120 potentiels d’action par seconde.
Pour transmettre (« coder ») les caractéristiques du son, les neurones du nerf ne disposent que d’un
moyen : le potentiel d’action. Le codage se fait donc :
- par la fréquence des potentiels d’action : codage temporel ;
- par le nombre de neurones activés : codage spatial.
1.1. Codage de la fréquence
Le codage de la fréquence du son est double :
- Codage temporel: la fréquence des potentiels d’action est la même que la fréquence du
stimulus. On dit que l’activité du neurone est synchronisée sur la fréquence du son. Ceci
n’est possible que pour les fréquences graves (<1000Hz) où la période du son est plus
longue que la période réfractaire (1 ms) des neurones. Pour les sons de fréquence >1000
Hz, la synchronisation des PA avec les périodes du stimulus est imparfaite, donc le codage
est seulement spatial.
-
Codage spatial: grâce à la tonotopie dans le nerf auditif. Chaque neurone a une fréquence
caractéristique (FC) pour laquelle il est le mieux stimulé (avec le seuil le plus bas). Plus
on s’éloigne de la fréquence caractéristique d’un neurone, plus il faudra augmenter
l’intensité pour que ce neurone reconnaisse la fréquence.
On peut ainsi tracer la courbe d’accord des neurones qui n’a un aspect pointu que si les CCE sont
fonctionnelles (sélectivité fréquentielle.)
La sélectivité fréquentielle d’un neurone est meilleure pour les fréquences supérieures à sa
fréquence caractéristique que pour les fréquences inférieures.
Il y a donc une tonotopie dans le nerf cochléaire.
1.2. Codage de l’ intensité
Le codage est là aussi spatial et temporel.
Codage spatial: plus l’intensité est forte plus il y aura de neurones activés en même temps.
Codage temporel: plus l’intensité est forte plus il y aura de potentiels d’actions sur chaque
neurone (taux proportionnel à l’intensité). Il existe cependant un seuil de saturation.
(Mécanismes de codage à comprendre et savoir)
2. LE NOYAU COCHLEAIRE (N.C.)
Il se situe à la jonction entre le bulbe rachidien et la protubérance dans la partie latérale, dans le
plancher du 4e ventricule. Il est constitué 100000 cellules environ et de deux parties : ventrale et
dorsale.
Les neurones du nerf cochléaire se terminent le NC et y font synapse avec des neurones de
deuxième ordre dont les axones vont jusqu’au complexe olivaire supérieur. La plupart de ces
neurones de 2ème ordre croisent la ligne médiane : les voies auditives croisées sont plus
nombreuses que les voies homolatérales. Donc l’oreille gauche est connectée avec l’hémisphère
droit du cerveau et vice-versa.
Le noyau cochléaire est un centre d’intégration et de traitement des informations et non un simple
relais.
- Rôle principal : réhaussement des contrastes : le NC facilite le passage des informations
modulées en fréquence et en intensité car, dans la vie ces informations sont la voix et la parole.
Dans le NC, on trouve même des neurones spécifiques de chaque voyelle. Le NC repère les
modulations de fréquence et d’intensité et les transmettra plus facilement que les autres fréquences
et intensités qui ne sont pas modulées (bruits de fond).
- Rôle accessoire : discrimination de la fréquence et de la durée. On trouve dans le NC des
neurones spécifiques en fréquence (Tonotopie: noyau ventral => basses fréquences ; noyau ventral
=> hautes fréquences) et NC des neurones spécifiques en durée qui réagissent différemment
suivant que le son est court (bref) ou long (prolongé).
3. L’OLIVE SUPERIEURE.
Elle se situe aussi à la jonction entre bulbe et protubérance, sur le plancher du 4e ventricule mais
plus médiale que le noyau cochléaire. On y trouve des synapses entre neurones de 2e ordre venant
du NC et ceux de 3e ordre ( 3e neurone des voies auditives.)
Divers noyaux : l’olive supérieure latérale (OSL), 4000 cellules multipolaires.
Tonotopie :représentation privilégiée des hautes fréquences.
l’olive supérieure médiane (OSM), 11 000 cellules. Tonotopie : représentation
privilégiée des basses fréquences.
- Rôle principal : localisation des sons.
La localisation se fait par comparaison des informations venant de l’oreille droite (par le NC droit)
et celles venant de l’oreille gauche (NC gauche). Cette comparaison est possible dans chaque olive
car elle reçoit des neurones venant des deux côtés (certains croisés et d’autres directs).
L’intégration des informations binaurales permet le codage, par l’OS, des différences d’intensité
(DI) et des différences temporelles (DT) interaurales .
- Rôle accessoire de relais du système efférent (voir plus loin).
II- PARTIE HAUTE (THALAMUS ET CORTEX)
1. COLLICULUS INFERIEUR ET CORPS GENOUILLE MEDIAN
Colliculus = tubercule quadrijumeau inférieur= 3e relais des voies auditives, où les neurones issus
de l’OS font synapse avec des neurones de 4e ordre.
Corps genouillé médian = 4e relais des voies auditives, où les neurones issus des CI font synapse
avec des neurones terminaux (de 5e ordre).
Regroupés car rôle similaire. On retrouve une tonotopie dans ces deux centres.
- Rôle principal : discrimination d’une voix parmi d’autres et dans le bruit.
CI et CGM assurent ce rôle grâce à la présence de neurones spécialisés dans :
- la sensibilité aux sons modulés en fréquence et en intensité,
- la détection des voyelles et des consonnes (analyse phonétique),
- la discrimination binaurale : le son doit être transmis ou inhibé selon I et T interaurales,
- la discrimination tonale (sélectivité fréquentielle avec tonotopie).
- Rôle accessoire d’intégration multisensorielle : le thalamus reçoit aussi de nombreuses
afférences somesthésiques et visuelles. Il va permettre d’adapter notre comportement à ces
stimulations : déplacement, orientation du corps et des yeux vers la source sonore, vers la cible
visuelle, vers le contact….
Les lésions à ce niveau ne provoquent pas de perte de l’audition en tonale (car la tonale teste
surtout la partie des voies auditives) mais il existera des problèmes de localisation des sons et des
problèmes de compréhension dans le bruit.
A partir du colliculus inférieur il va y avoir un « aiguillage » : les mots (informations lexicales)
seront traités par l’hémisphère gauche, la mélodie de la voix et la musique (informations tonales)
par l’hémisphère droit.
2. LE CORTEX AUDITIF.
Les neurones originaires du CGM se terminent dans le cortex auditif.
Le cortex est une couche de substance grise (riche en corps cellulaires de neurones) de 1 à 2 cm
d’épaisseur qui recouvre toute la surface des hémisphères cérébraux. Le cortex traite les
informations pour qu’elles soient perçues consciemment.
Chaque hémisphère cérébral est formé de 5 lobes séparés par des scissures (sillons profonds): lobe
frontal, lobe temporal, lobe pariétal, lobe occipital, et lobe de l’insula.
Le cortex auditif est situé sur la face latérale des lobes temporaux.
Il se divise en plusieurs parties :
-cortex primaire = aire 41 de Brodman, correspondant au relief du gyrus temporal supérieur.
-cortex auditif secondaire = aire 42-22 (au dessous et en avant de l’aire primaire)
-cortex auditif associatif en arrière du primaire, rôle différent à droite et à gauche.
2.1. Cortex auditif primaire.
Situé sur la face dorsale de la circonvolution temporale supérieure, s’étend à la face externe du lobe
temporale + une partie enfouie dans le sillon sylvien.
C’est l’aire de décodage (perception consciente) des sons :
- perception de la fréquences sonore : l’aire primaire comprend plusieurs représentations
tonotopiques différentes ; les parties antérieures de chacune de ces représentations sont
activées par les basses fréquences, et les parties postérieures par les hautes fréquences.
- perception de l’intensité
- perception des configurations temporelles ( « enveloppe » des sons)
- localisation consciente de la source.
On observe beaucoup d’inhibition latérale entre les neurones de cette aire, ce qui donne une
activité des neurones de plus en plus sélective et donc confère de la précision à l’information.
2.2. Cortex auditif secondaire.
C’est l’aire où se fait la reconnaissance, l’identification des sons par comparaison avec ce qui est
déjà connu (utilisation d’informations en mémoire) : reconnaissance des sons de l’environnement,
distinction des sons vocaux et non vocaux.
2.3. Cortex auditif associatif.
Il assure une fonction différente à droite et à gauche.
A gauche, c’est l’aire de la compréhension du langage : aire de Wernicke. L’analyse porte
sur le vocabulaire (lexique) et la syntaxe, pour accéder au sens (analyse sémantique), pour
comprendre. (L’hémisphère gauche est l’hémisphère « logique », du raisonnement).
A droite, reconnaissance de la mélodie (air d’une chanson, intonation de la voix), analyse
acoustique (durée, timbre, accords musicaux) et compréhension émotionnelle. (L’hémisphère droit
est l’hémisphère « artiste », de l’affectif).
Les lésions de ces aires provoquent :
- lésion de l’aire associative gauche : incapacité à reconnaître la signification des mots
(surdité verbale ou agnosie verbale)
- lésion de l’aire associative droite : incapacité à reconnaître une mélodie, l’intonation de la
voix, à distinguer un locuteur d’un autre (amusie)
- lésion bilatérale des aires associatives : agnosie auditive = agnosie verbale + amusie =
incapacité à différencier et comprendre les bruits, la parole et la musique
(Rôle principal de chaque relais à connaître)
B. LES VOIES EFFERENTES.
1. GENERALITES.
Ces voies descendent du cortex vers la cochlée, et permettent aux centres d’influencer le récepteur
périphérique, en particulier en filtrant certaines informations. Elles effectuent donc un
« rétrocontrôle » de l’entrée des messages.
Les voies efférentes sont composées d’une série de projections descendantes :
- du cortex sur le thalamus (corps genouillé médian) et le colliculus inférieur,
- du colliculus inférieur sur les noyaux olivaires,
- des complexes olivaires sur les noyaux cochléaires, ou directement sur la cochlée par le faisceau
olivo-cochléaire latéral (CCI) et médian (CCE.) On connaît essentiellement le système efférent
olivo-cochléaire médian (SEOCM.)
2. LE SYSTEME EFFERENT OLIVO-COCHLEAIRE MEDIAN
Les neurones olivo-cochléaires médians croisent la ligne médiane et font
synapse avec les CCE de la cochlée controlatérale. Ils ont un effet inhibiteur sur les contractions
des CCE, ce qui produit indirectement une inhibition des réponses auditives afférentes.
On peut étudier le fonctionnement du SEOCM chez l’humain en enregistrant les
otoémissions dans une oreille (les otoémissions sont produites par les CCE). Lorsqu’on ajoute un
bruit blanc dans l’autre oreille, on observe une diminution des otoémissions, du fait de l’inhibition
des CCE par le SEOCM activé par le bruit controlatéral.
Le rôle des voies efférentes est encore mal connu. Elles jouent probablement un
rôle dans la discrimination des signaux dans le bruit, dans la protection contre les traumatismes
sonores, dans la modulation du fonctionnement cochléaire par les centres supérieurs (par exemple,
ces voies seraient mises en jeu lorsque l’on porte son attention sur une stimulation sonore parmi
d’autres : le cerveau va commander à la cochlée d’amplifier les sons pertinents, et d’inhiber les
autres. On parle de « filtre attentionnel »).
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