Le terme de Renaissance suppose à la fois un réveil par rapport à l

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Fiche : la Renaissance et l'humanisme (XVIe siècle)
Le terme de Renaissance suppose à la fois un réveil par rapport à l’assoupissement médiéval et la résurrection d’une civilisation
antérieure, oubliée : celle de l’Antiquité.
I. Les causes de la Renaissance
1. L’exemple italien
La Renaissance italienne, le quattrocento, précède d’à peu près un siècle la Renaissance française. De nombreux érudits font
redécouvrir les ouvrages des grands penseurs de l’Antiquité. Leurs efforts se trouvent épaulés par l’arrivée des intellectuels
byzantins, chassés de Constantinople après l’invasion des Turcs en 1453. Frappés par les similitudes entre la philosophie de Platon
et le christianisme, ils en développent une synthèse originale, le néo-platonisme, qui marquera toute la littérature de la
Renaissance. A la suspicion que vouait le Moyen Âge pour les littératures non chrétiennes, succède, avec Pic de la Mirandole, la
conviction que toute pensée profonde annonce la pensée chrétienne et aide à mieux la comprendre. L’Antiquité païenne retrouve
ainsi de l’intérêt.
Au début du XVIe siècle, le roi François 1er et les seigneurs français découvrent, à l’occasion des guerres d’Italie, les splendeurs de
la Renaissance italienne et attirent en France nombre d’artistes.
2 . Les grandes découvertes maritimes
En 1492, Christophe Colomb, cherchant la route des Indes, découvre l’Amérique. Le premier tour du monde est réalisé par
Magellan en 1520. La découverte d’autres civilisations ouvre des horizons nouveaux à l’imagination et à la méditation des
intellectuels. Le Quart Livre de Rabelais (1548- 1552) raconte les aventures maritimes de Panurge traversant l’Atlantique en
cherchant à atteindre la Chine; et Montaigne consacre un chapitre de ses Essais (1580) aux « Cannibales » d’Amérique, dont il loue
la pureté qu’il oppose aux corruptions du monde moderne, donnant ainsi naissance au mythe du bon sauvage.
3. L’imprimerie
Le principal vecteur du développement européen au cours du XVIe siècle est certainement le livre. L’invention de l’imprimerie
avec Gutenberg à la fin du XVIe siècle entraîne une diminution considérable du prix des livres et leur diffusion à plus grande
échelle.
II. L’humanisme
1. L’enthousiasme
Au Moyen Âge, l’idée de progrès n’existe pas: les catégories de la philosophie d’Aristote et sa logique ont définitivement établi
l’ordre de l’univers. Or la découverte de nouveaux mondes et la redécouverte de la philosophie de Platon, moins figée que celle
d’Aristote, suggèrent que l’humanité est capable d’évoluer. Il s’ensuit une formidable soif de connaissances, à laquelle répond
l’accès désormais plus facile aux livres.
2. Une nouvelle idée de l’homme
L’humaniste hollandais Érasme explique qu’à la différence des animaux, l’homme ne naît point homme, il le devient. L’humanisme
cherche donc à définir quel est cet idéal humain qu’il faut atteindre. De nombreux ouvrages, comme Le Parfait Courtisan de
l’italien Castiglione, s’efforcent de définir quelles sont les qualités et les vertus de l’homme accompli.
3. La question de l’éducation
On ne devient humain qu’en se cultivant, et l’instruction devient une préoccupation majeure des humanistes. C’est la signification
même du Gargantua de Rabelais (1535) : le géant, symbole des lourdeurs et des superstitions médiévales, devient sous la férule
d’un maître humaniste un monarque intelligent et vertueux. Montaigne consacre dans ses Essais de nombreuses pages à la
question de l’éducation de la jeunesse.
III. La pléiade
1. Les objectifs de la Pléiade
En 1547, Pierre Ronsard rencontré Joachim du Bellay. Leur amitié donnera naissance à la Pléiade, groupe de sept poètes
partageant les mêmes idéaux. Défense et Illustration de la langue française, ouvrage écrit par du Bellay en 1549, en définit les
objectifs. Le français doit devenir une langue littéraire, comme le sont le latin ou l’italien. Pour ce faire, il faut pratiquer
l’innutrition, c’est-à-dire s’imprégner des idées et du style des auteurs anciens, s’en nourrir, puis créer des œuvres originales en
français après avoir assimilé les qualités des modèles. La Pléiade souligne également la nécessité d’enrichir le français, dont le
vocabulaire est trop pauvre, au moyen de mots oubliés, de régionalismes, de termes techniques ou de néologismes. La syntaxe,
très flottante au Moyen Âge, doit également se stabiliser.
2. Ronsard
Ronsard devient le poète officiel des rois. Ses amours successives et malheureuses lui permettent d’adapter son lyrisme à ses
destinatrices : les Amours de Cassandre (1552), dédiées à une riche Italienne, sont très influencées par le poète italien Pétrarque,
dont les subtilités dans le langage amoureux se retrouvent, sous le nom de pétrarquisme, chez la plupart des poètes de la
Renaissance; lorsqu’il s’adresse à une simple paysanne, Marie Dupin, dans la Continuation des Amours(1555), son inspiration
devient beaucoup plus simple et tendre; enfin, ses Sonnets pour Hélène (1578), fille d’honneur de Catherine de Médicis,
retrouvent un pétrarquisme rendu plus mélancolique par l’âge et la maladie.
Introduction
Amorce : Le mot « humanisme » connaît de nos jours un regain de popularité, mais il s'est usé car trop souvent repris par les
médias pour célébrer telle ou telle personnalité des arts, de la politique ou de la science, lors de sa disparition. Pour redonner du
sens à ce mot, l'Éducation nationale a choisi de faire étudier aux élèves de première l'humanisme de la Renaissance. Comment
expliquer ce choix ?
Problématique : En quoi un mouvement remontant à plus de cinq siècles peut-il intéresser l'homme moderne ?
Annonce du plan : N'est-ce pas parce que notre époque se reconnaît dans le XVIe siècle, tant du point de vue du contexte
historique et culturel que de l'état d'esprit qui l'animait, et de celui de la conception moderne de l'homme ? N'est-ce pas aussi que
nous repérons dans l'humanisme de la Renaissance nos racines et que nous y rencontrons des figures fortes d'artistes, de
penseurs et des démarches intellectuelles encore susceptibles de nous inspirer ?
I. Un état d'esprit : enthousiasme et lucidité
Le contexte du XVIe siècle et celui des XXe et XXIe siècles, même s'ils sont très éloignés, présentent des similitudes qui entraînent
des ressemblances dans les mentalités de l'humaniste et de l'homme moderne, tous deux partagés entre optimisme et lucidité
raisonnée.
1. Sciences et techniques : siècles d'explosion et d'invention
« Maintenant toutes disciplines sont restituées », « Tout le monde est plein de savants »... Ces affirmations enthousiastes de
Rabelais dans Pantagruel pourraient tout aussi bien être celles de l'homme contemporain.
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Le XVIe et le XXe siècle sont marqués par des progrès fondamentaux en médecine qui, loin d'être uniquement des
découvertes scientifiques, amènent un bouleversement intellectuel et un questionnement de fond : la pratique de la
dissection, dont Rabelais, médecin, se fait l'écho dans Pantagruel (par exemple quand Panurge ramène à la vie Épistémon
qui a eu la « coupe têtée »), implique à l'époque une réflexion religieuse sur le droit de l'homme à intervenir sur la
création divine. De même, le clonage et les manipulations génétiques contemporaines posent des questions d'ordre
moral et éthique, car ces avancées ouvrent de grands espoirs mais aussi des inquiétudes. « Science sans conscience n'est
que ruine de l'âme », dit Gargantua. Le philosophe Michel Serres lui fait écho : « La philosophie des sciences ne peut pas
faire l'économie de l'éthique des sciences. »
Le XVIe siècle et le monde moderne sont marqués par un même bouleversement dans l'accès à l'information et dans la
diffusion du savoir : au XVIe siècle, l'imprimerie permet aux textes et aux idées de voyager dans toute l'Europe ;
aujourd'hui, radio, télévision, informatique et Internet mondialisent l'information et la culture, et les adaptations
d'œuvres littéraires au cinéma mettent à la portée de tous une culture jusqu'alors réservée aux seuls intellectuels.
2. Un monde qui s'ouvre et donne le vertige
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Avec les Grandes Découvertes, le monde connu change brutalement de dimension. Les récits de voyages (Le Nouveau
Monde découvert par Cristobal Colon de Lope de Vega, par exemple) suscitent l'émerveillement et ouvrent des
perspectives sur le monde. Les premiers pas sur la Lune (1969), les progrès et les découvertes en astronomie élargissent
nos perspectives à d'autres galaxies, à l'Univers.
Ces bouleversements entraînent l'engouement pour les voyages, les explorations et leurs bienfaits (connaissance d'autres
cultures). Le jeune humaniste va se former en Italie et parcourt l'Europe, les jeunes d'aujourd'hui poursuivent leurs
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études dans différents pays. Ce que disait Montaigne : « Le voyage me semble un exercice profitable. L'âme y a une
continuelle exercitation à remarquer les choses inconnues et nouvelles », est toujours valable de nos jours.
Ces échanges modifient l'attitude face à la langue et aux mœurs : la Pléiade et les humanistes empruntent des mots aux
autres nations pour « illustrer » et enrichir la langue française, tout comme le français moderne accueille les mots
étrangers. Montaigne, amateur des « tables les plus épaisses d'étrangers », se plaît, comme l'homme moderne, à ne pas «
être servi à la française ».
Cependant, parallèlement, ces bouleversements déstabilisent l'homme et sont générateurs de doutes face à des limites
qui reculent sans cesse et posent des interrogations angoissantes.
3. Des siècles troublés : vers un réalisme lucide
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Historiquement, le XVIe siècle et le XXe siècle sont des périodes tourmentées : la Renaissance européenne, précédée de la
guerre de Cent Ans, débute par les guerres d'Italie et se termine par les guerres de Religion. Le XXe siècle est marqué par
deux guerres mondiales, les guerres de décolonisation, les conflits en Europe centrale, au Proche et au Moyen-Orient.
Ces violences, qui mettent en jeu les certitudes les plus profondes, viennent tempérer la confiance en l'homme et
conduisent à la méfiance (la barbarie est toujours prête à renaître).
La littérature et les arts se font l'écho de cette évolution : Rabelais fait preuve de bonne humeur et de foi dans le progrès
et dans la vie, comme les artistes de l'Art nouveau au début du XXe siècle (Apollinaire, Delaunay...), qui s'enthousiasment
pour la modernité ; Montaigne, plus sombre, « aime la vie », mais avec une lucidité et un scepticisme qui annoncent les
philosophes modernes. Le ton est mêlé : l'humaniste et l'homme moderne prennent souvent le parti d'en rire (comme
Érasme dans l'Éloge de la folie, ou Orwell dans La Ferme des animaux), mais la tentation du scepticisme est sensible.
Transition : Ces contextes et l'état d'esprit qui en découle amènent à une redéfinition de la place de l'homme et de ses valeurs
fondamentales.
II. La conception de l'homme et des valeurs qui le fondent
La conception de l'homme au XVIe siècle et de nos jours ne diffère pas fondamentalement.
1. L'idéal humaniste : la primauté de l'homme
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L'humaniste fait sienne l'affirmation du dramaturge latin Térence : « Je suis homme et rien de ce qui est humain ne m'est
étranger » : il place l'homme - et non plus Dieu - au centre de ses préoccupations. L'homme moderne revendique aussi la
primauté de l'homme, l'importance de l'individu et sa liberté de penser, de croire et d'agir. Ainsi, logiquement et tout
naturellement, Montaigne affirme : « Je suis moi-même la matière de mon livre » ; les autobiographies qui se multiplient
au XXe siècle procèdent du même esprit.
L'humaniste entend former un homme complet, entraîné à tous les sports, à toutes les disciplines intellectuelles ou
morales, comme en témoignent les programmes d'éducation de Rabelais et de Montaigne, très modernes dans leur souci
de pas privilégier la formation intellectuelle au détriment du corps.
2. La recherche d'un certain bonheur et la relation à l'autre
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Cette vision de l'homme amène à la recherche d'un bonheur humain, comme le conseille Ronsard à l'image d'Horace : «
Cueillez dès aujourd'hui les roses de la vie ». Le retour à un épicurisme profitant des plaisirs simples de la vie trouve
aujourd'hui son expression dans les variations de Philippe Delerm sur La Première Gorgée de bière et autres plaisirs
minuscules.
En même temps, l'humaniste et l'homme moderne ne conçoivent pas de véritable accomplissement de l'être humain hors
d'une solidarité qui l'unit à ses semblables et ils refusent tout ce qui porte atteinte à l'intégrité de l'autre. Certes,
Gargantua fait la guerre, mais dans la lutte il n'oublie pas ses principes : pas de mépris pour l'ennemi fait prisonnier, en
qui il respecte l'homme, envers qui il fait preuve de clémence. Il fait la guerre pour la paix, comme... les casques bleus de
l'Onu.
Ainsi l'humaniste tend vers un dépassement et un accomplissement de soi dans une société future solidaire : c'est l'idéal
même d'un Malraux (dans L'Espoir ou La Condition humaine) ou d'un Saint-Exupéry dans Terre des Hommes. Le XXe siècle
a vu la multiplication des actions humanitaires, des ONG (Amnesty International, Médecins sans frontières...) quand
n'existait au début du siècle que la Croix-Rouge.
3. Respect du passé, remise en cause, recherche de nouveauté
Ces idéaux déterminent une attitude face à la culture.
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L'humaniste se tourne vers le passé - et surtout vers l'Antiquité -, non par nostalgie d'une époque révolue qu'on ne
saurait dépasser, mais comme source d'expérience humaine sur laquelle se bâtit le présent : il n'imite pas le passé, il s'en
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nourrit. Ainsi la Pléiade reprend certaines formes poétiques antiques, mais pour les revivifier. De même, les poètes
modernes (Aragon, Éluard, Jaccottet) reviennent à la poésie en vers, au sonnet, tout en innovant. En peinture, Le
Printemps de Botticelli a les traits de Vénus, mais elle ressemble fort à une jeune femme de la Renaissance. Des peintres
modernes (Fernand Léger, Braque, Modigliani, Andy Warhol...) ont imité La Joconde, mais comme point de départ d'une
expérience picturale nouvelle.
Ce respect du passé s'accompagne d'une remise en question dans tous les domaines. Ainsi, en politique, les utopies
(celles d'Érasme, de Thomas More, de Rabelais) traduisent l'esprit critique des humanistes et leur vision d'une société
idéale. Le XXe siècle, lui, a plutôt proposé des contre-utopies (1984 d'Orwell), mais celles-ci procèdent du même esprit
critique de remise en question de la société.
Ce cheminement amène à la recherche de la « nouvelleté », selon le mot de Montaigne : la Pléiade adopte des formes
poétiques récentes (le sonnet). Apollinaire écrit des calligrammes, forme poétique innovante [+ autres exemples
personnels].
III. Nos racines et une raison de croire en l'homme
Serait-ce donc parce que nous nous retrouvons dans l'humanisme renaissant qu'il mérite d'être étudié ?
1. Retrouver ses racines
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Le XXe siècle n'est évidemment pas le XVIe siècle et la comparaison ne saurait être trop poussée : en effet, les deux
guerres mondiales ont changé les perspectives, et les échanges et les économies ont une dimension internationale autre
qu'au XVIe siècle.
L'humanisme marque le début des temps modernes, il est à la source de la culture européenne et sa connaissance
permet de découvrir les racines communes des valeurs qui transcendent la diversité des langues et des États. Il ouvre la
voie au siècle des Lumières.
2. Un remède dans les moments de doute ?
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Tout autant que de socle ou de racines, l'humanisme pourrait nous servir d'antidote, de phare pour éclairer notre
devenir. Après l'horreur des deux guerres mondiales et des totalitarismes, après les moments de doute qui ont fait croire
à l'absurdité de la condition humaine, après le désir de tout renier (lois et valeurs morales, traditions artistiques et
littéraires - avec le surréalisme, par exemple), après la perte de la foi, les XXe et XXIe siècles ressentent toujours le besoin
de retrouver des raisons de croire en l'homme.
Tenté de crier « Reviens, Montaigne, ils sont devenus fous... », l'homme moderne trouve, dans l'humanisme de la
Renaissance, un modèle, des références morales, intellectuelles et philosophiques.
3. Créer un nouvel humanisme
Ainsi, étudier l'humanisme renaissant pourrait être constructif et aider à définir un nouvel humanisme. Comment pourrait-on
définir un humaniste moderne ?
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Sans doute comme quelqu'un vivant dans son siècle, ayant une culture aussi bien littéraire que scientifique, et soucieux
d'établir des liens entre passé et présent. Tout en s'intéressant à la science et à ses progrès, il veillerait à préserver
l'homme de leurs conséquences néfastes, il garderait son indépendance d'esprit face à tous les systèmes et dogmatismes,
et exercerait son esprit critique sur soi et sur les autres.
Il mettrait tout en œuvre pour faire obstacle aux phénomènes et doctrines qui nient l'individu et menacent sa valeur
d'homme (totalitarisme, massacres...). Il se réaliserait en tant qu'homme par l'action, l'engagement et la solidarité, mais
aussi par l'art.
On pourrait citer parmi les humanistes modernes des scientifiques comme Jean Rostand, Jacques Monod, Michel Serres,
Hubert Reeves, mais aussi des écrivains et des intellectuels, comme Camus (son modèle humain, Rieux, le héros de La
Peste, est médecin, comme Rabelais) ou Malraux, homme d'action engagé, politicien, penseur, artiste, persuadé que «
l'art est un antidestin ».
Conclusion
Notre siècle est sans doute plus proche de l'humanisme renaissant que de la fin du XIXe siècle où la croyance aveugle du
positivisme en la science, le désir d'enrichissement à tout prix écrasaient la diversité de l'homme, sa nature complexe. C'est en
cela que les jeunes gens d'aujourd'hui gagnent à l'étudier, le plus bel hommage rendu à la Renaissance étant le nom d'Erasmus
donné au programme de mobilité étudiante.
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