ANIMAUX L'ÉVOLUTION DES ANIMAUX LA VIE AU PRÉCAMBRIEN La vie apparut sur la Terre pendant le Précambrien ou Archéozoïque, la très longue période qui s'étend de la formation de la croûte terrestre (il y a 4,6 milliards d'années) au grand développement des premiers organismes pluricellulaires complexes (il y a 600 millions d'années). La vie commença il y a environ 3,5 milliards d'années dans l'océan primordial, sous la forme de micro-organismes très simples : des Bactéries anaérobies qui consommaient les substances organiques dissoutes dans l'eau. Dans un premier temps, la vie évolua lentement, jusqu'à ce que, il y a plus de 2 milliards d'années, survienne un grand changement dans l'atmosphère terrestre : l'activité de certains micro-organismes autotrophes (appelés Cyanobactéries, ou Algues bleues) suscita l'accumulation d'oxygène et rendit ce gaz disponible pour d'autres micro-organismes plus actifs et plus efficaces, les Bactéries aérobies, qui peuplèrent bientôt tous les milieux de la Terre. En pratique, avec les Cyanobactéries commence la capacité de certains organismes à fabriquer de la substance organique en libérant de l'oxygène. L'histoire évolutive des êtres vivants reçut une autre impulsion importante grâce à l'apparition des premières cellules dotées d'organites internes et d'une membrane entourant le noyau, il y a environ 1 milliard et demi d'années et, surtout, avec l’apparition d'une méthode révolutionnaire de reproduction : la reproduction sexuée. Les Protozoaires, organismes formés d'une seule cellule extrêmement complexe, représentèrent, il y a environ 800 millions d'années, les premières formes de vie animale ayant existé sur la Terre. La plupart d'entre eux étaient des consommateurs qui, pour survivre, avaient donc besoin de se nourrir d'autres êtres vivants, et qui n'auraient pas pu exister indépendamment des organismes autotrophes. Le passage suivant fut la pluricellularité, c'est-à-dire le développement et la diffusion d'organismes formés de plusieurs cellules et ayant des tissus différenciés pour remplir les différentes fonctions. Les premiers animaux pluricellulaires (Métazoaires) vivaient dans la mer et étaient complètement différents de tous les animaux vivants aujourd'hui. Leur corps était mou, mais ils n'en ont pas moins laissé des empreintes fossiles dans une zone de l'Australie méridionale, fossiles qui constituent la célèbre faune d'Ediacara. De nombreux animaux trouvés à Ediacara avaient une symétrie radiale, mais les autres fossiles présentaient également des traces d'organismes à symétrie bilatérale déjà assez complexes, dotés de mobilité et de différents organes internes, dont un tube digestif complet, avec bouche antérieure et anus situés respectivement à l'extrémité antérieure et à l'extrémité postérieure du corps. La faune d'Ediacara La grande différenciation des organismes pluricellulaires au cours du Précambrien (voir paragraphe précédent) culmina avec la faune d'Ediacara et se termina avec l'extinction de 98 % des espèces qui avaient évolué jusqu'alors, au point que cette grande diversification est considérée par les paléontologistes comme un « faux 1 départ » de l'évolution animale. L'extinction eut lieu il y a environ 600 millions d'années et concerna des animaux complexes à corps mou, ancêtres des actuelles éponges (Spongiaires), des méduses et des coraux (Cnidaires), ainsi que des vers marins (Plathelminthes et Annélides), abstraction faite d'autres formes étranges difficiles à classer. Les fossiles de la faune d'Ediacara témoignent de la diversification et de la spécialisation atteintes par les premiers organismes pluricellulaires. Au cours de cette diversification, on eut un développement initial de tissus, de cellules reproductrices dotées de flagelles et d'organes. Les Spongiaires et les Cnidaires comme ceux d'Ediacara ont donné en évoluant les formes modernes d'éponges, de méduses, d'actinies (anémones de mer), de coraux, etc. Celles-ci se sont différenciées précocement et n'ont pas donné lieu à d'autres groupes systématiques (phylum) du règne animal. En revanche, les animaux primitifs à corps plat et symétrie bilatérale constituèrent le point de départ de l'énorme différenciation d'espèces qui suivit la disparition soudaine de la faune d'Ediacara et mena graduellement à la formation de la faune actuelle, c'est-à-dire de tous les phyla de Métazoaires à symétrie bilatérale (Annélides, Mollusques, Arthropodes, Cordés, etc.) qui peuplent les mers et les terres émergées. LA VIE AU PALÉOZOÏQUE Au cours du Paléozoïque ou Primaire, l'ère qui va de moins 600 millions d'années à moins 250 millions d'années, outre les Invertébrés (éponges, méduses, coraux et vers), apparurent également dans les mers les Vertébrés. Le Paléozoïque commença par l'explosion du Cambrien. Il y a 600 millions d'années, tous les principaux groupes d'Invertébrés encore représentés dans le règne animal firent leur apparition. Nombre d'entre eux possédaient déjà une cavité à l'intérieur du corps et quelques-uns présentaient également une segmentation. Un grand nombre d'espèces appartenant à ces groupes disparut il y a environ 500 millions d'années, laissant toutefois des descendants qui produisirent de nouvelles formes. La période suivante, l'Ordovicien (moins 500 à moins 430 millions d'années), se conclut elle aussi par la disparition de nombreux animaux. L'extinction de l'Ordovicien fut la première grande extinction de masse dans l'histoire de la vie sur Terre. Avant cet événement, il y en eut un autre très important : le début de l'évolution des Vertébrés. Les premières espèces de Poissons primitifs appelés Ostracodes, apparurent au cours de l'Ordovicien et connurent leur plus grande expansion pendant le Silurien, la période comprise entre moins 430 et moins 400 millions d'années. Au cours du Dévonien (de moins 400 à moins 360 millions d'années) apparurent les premiers Poissons à mâchoires, les Placodermes, apparentés aux formes (les Acanthodes) qui donnèrent naissance aux Poissons cartilagineux et aux Poissons osseux, dont la grande diversification eut lieu dans les ères suivantes (voir évolution des Poissons). Dans la même période, la vie animale commença à s'affirmer sur les terres émergées. C'est ainsi qu'apparurent les Arthropodes sur la terre ferme, entre moins 380 et moins 360 millions d'années, et qu'eut lieu l'évolution des Amphibiens, entre moins 370 et moins 360 millions d'années. L'évolution du Dévonien, qui se produisit il y a environ 370 millions d'années, intéressa surtout les animaux vivant dans les mers tropicales. C'est au Carbonifère (de moins 360 à moins 280 millions d'années), que remonte l'origine des Reptiles, les premiers véritables Vertébrés terrestres, et des Insectes ailés. 2 La période suivante, le Permien, qui commença vers moins 280 millions d'années, se termina par l'événement le plus dramatique de l'histoire de la vie sur la Terre : l'extinction du Permien, qui eut lieu il y a 240 millions d'années, et au cours de laquelle disparurent plus de 50 % des animaux qui vivaient dans le milieu marin. Les Amphibiens furent eux aussi gravement touchés (plus de 90 % des espèces animales et végétales qui vivaient sur Terre disparurent). L'explosion du Cambrien Il y a environ 600 millions d'années, il se produisit une diversification extraordinaire dans l'évolution des espèces animales, accompagnée de l'apparition de nouvelles organisations structurelles et de nouveaux modes de vie qui n'avaient pas de précédent. La plupart des types structurels présents aujourd'hui dans la documentation fossile firent leur apparition de manière inopinée. Spongiaires et Cnidaires tout à fait semblables aux formes actuellement vivantes, Mollusques (Bivalves Lamellibranches ou primitifs), Annélides, Arthropodes (en particulier les Trilobites) et Échinodermes habitaient, dans une variété d'espèces surprenante, les mers du Cambrien. Les coquilles et les squelettes externes se développèrent probablement en réponse à la prédation grandissante due à l’augmentation du nombre des espèces. Le changement de la composition chimique des océans rendit disponible une grande quantité de sels nutritifs qui pouvaient être utilisés pour la formation de squelettes protecteurs. La grande diversification des niches écologiques fournit les bases de la formation des premières biocénoses complexes et de chaînes alimentaires. Comment s'expliquer qu'en à peu près 60 millions d'années soient apparus les principaux types d'organisation corporelle présents aujourd'hui, tandis qu'aucune autre nouveauté ne s'est affirmée dans les 500 millions d'années suivantes ? L'explosion des formes de vie du Cambrien demeure encore un mystère, même si différentes hypothèses ont été avancées pour l'expliquer. Une des théories de l’évolution biologique invoque l’idée que l'introduction d'un nouveau niveau (qui peut, par exemple, être représenté par un prédateur) dans la chaîne alimentaire, favorise la diversification des espèces aux degrés les plus bas. Par conséquent, l'apparition d'hétérotrophes pluricellulaires aurait augmenté la diversité des producteurs, qui à son tour aurait permis la diversification plus poussée des prédateurs par un mécanisme de rétroaction. Une deuxième hypothèse se rattache à une théorie plus générale des modalités de l'évolution, dite théorie des équilibres ponctués, selon laquelle des phénomènes de changement rapide alternent avec de longues périodes de stagnation. Cette théorie est soutenue de nos jours par de nombreux paléontologistes et biologistes qui étudient l'évolution, et elle est souvent confortée par les fossiles que l’on découvre. La souplesse d'un génome assez simple comme celui des premiers organismes pluricellulaires, surtout au cours du développement embryonnaire, aurait déterminé une évolution rapide dont les résultats se seraient « cristallisés » dans les plans corporels présents dans la faune du Cambrien. La diversification des organismes aurait en outre été facilitée par la disponibilité de nouvelles niches écologiques. De plus, l'instauration de barrières géographiques par suite de changements dans la conformation des terres émergées aurait permis d'orienter dans des directions différentes le cours de l'évolution dans les différentes zones géographiques. L'évolution des Poissons 3 Aussi bien les Poissons osseux que les Poissons cartilagineux dérivent probablement de formes archaïques de Poissons ayant des liens de parenté avec les Placodermes : les Acanthodes, représentants d'une ligne évolutive qui s'était détachée précocement d'ancêtres communs avec les premiers. L'appareil mandibulaire des Placodermes était encore assez grossier, et la mâchoire s'articulait directement au crâne. L’étape suivante dans l'évolution du squelette qui entoure la bouche fut celui d'une transformation ultérieure des arcs branchiaux, de nature à permettre une plus grande mobilité de l'appareil mandibulaire (analogue à celle d'un requin qui attaque sa proie). Cette nécessité de rendre plus efficaces les structures impliquées dans la prise de la nourriture eut certainement deux raisons : l'appauvrissement de la faune des Poissons vers la fin du Paléozoïque et par conséquent la diversification du régime alimentaire. Les Poissons cartilagineux (Chondrichtyens) se détachèrent très précocement de la lignée qui mena aux Poissons osseux (Ostéichtyens), comme en témoignent certaines caractéristiques fondamentales de leur anatomie (squelette cartilagineux, absence d'opercule branchial, présence d'excroissances cutanées plutôt que d'écailles osseuses) et de leur physiologie (mécanisme de régulation de la concentration des liquides internes fondé sur la rétention de l'urée), et dès le Mésozoïque ils se spécialisèrent comme prédateurs. Les Poissons osseux apparurent dès le Dévonien, déjà représentés par deux classes distinctes : les Actinoptérigyens et les Sarcoptérygiens. Les caractéristiques du crâne et du squelette des nageoires des premiers Sarcoptérygiens, ainsi que la présence de choanes, rappellent celles des premiers Amphibiens, qui en sont issus. Des Actinoptérigyens dérivent également tous les Poissons osseux actuellement vivants. Initialement, il s'agissait de Poissons d'eau douce ; certains vivaient dans des eaux stagnantes pauvres en oxygène et soumises à des périodes de sécheresse. Ces conditions portèrent probablement au développement de « poches » pulmonaires (observables aujourd'hui chez les Dipneustes). Par la suite, dans les formes qui passèrent dans la mer, ces « poches » se seraient transformées, pour des exigences hydrostatiques, en vessie natatoire. La grande diversification des Poissons osseux n'eut lieu que quelques millions d'années plus tard, au début du Cénozoïque, et les a amenés à devenir aujourd'hui la classe des Vertébrés qui compte le plus grand nombre d'espèces. L'évolution des Amphibiens Entre moins 370 et moins 360 millions d'années, eut lieu l'une des plus extraordinaires transformations dans l'histoire des animaux. À partir d'un groupe particulier de Poissons caractérisés par des nageoires robustes au squelette articulé et des narines communiquant avec la cavité buccale - les Crossoptérygiens -, l'ancêtre des Vertébrés terrestres d'aujourd'hui conquit la terre ferme. Mais quelle nécessité avaient les Vertébrés d'abandonner les eaux pour s'aventurer dans un monde où la force de gravité et le danger de la déshydratation imposaient des transformations révolutionnaires dans tous les appareils du corps ? La poussée vers la colonisation des terres émergées fut stimulée par de multiples facteurs. Dans cette période géologique (vers la fin du Dévonien), le niveau de la mer s'était abaissé considérablement et l'assèchement partiel de différents bassins contribua sans doute à un certain nombre d'adaptations à la vie terrestre. En outre, la grande diversification de la vie marine créait des phénomènes de compétition, les prédateurs marins s'étaient spécialisés et les proies elles-mêmes étaient très mobiles. La terre ferme était riche en ressources alimentaires. Quelques dizaines 4 de millions d'années auparavant, en effet, les Arthropodes avaient colonisé les terres émergées, où désormais les Insectes dominaient les écosystèmes. Ces Invertébrés constituaient un aliment riche en protéines et, de plus, étaient lents et donc faciles à capturer. Non pas que les premiers Vertébrés de terre ferme fussent particulièrement rapides - disons même que leurs mouvements devaient être lents et gauches -, mais ils étaient plus grands (ils pesaient probablement plus de 10 kg). Les Vertébrés durent accomplir de nombreuses adaptations avant de s'affranchir du milieu aquatique. La force de gravité et le danger de déshydratation influèrent sur la posture et la locomotion à travers l'évolution des membres et d'un squelette de soutien. La respiration ne pouvait plus se faire à travers les branchies, sujettes à dessèchement, et c'est ainsi que se développèrent des cavités fermées dites poumons. Les cellules reproductrices produites par les organes génitaux ne pouvaient plus être dispersées dans le milieu, et c'est ainsi qu’apparurent la fécondation interne et les coquilles permettant de limiter la déshydratation des œufs. Les proies ne pouvaient plus être aspirées avec l'eau (les Poissons et les Amphibiens primitifs se nourissent de cette manière), mais elles devaient être saisies : l'évolution de la langue est étroitement associée à cette nécessité. Les yeux devaient être protégés de la déshydratation au moyen de paupières et de glandes lacrymales. La différence de densité entre l'air et le corps imposa la formation de structures (oreille moyenne) capables de transmettre les sons aux organes de l'ouïe. Ces adaptations mirent très longtemps à se perfectionner et elles ne sont toujours pas achevées chez les descendants directs des premiers Vertébrés terrestres, les Amphibiens actuels, qui dépendent encore largement de l'eau dans leurs cycles vitaux. Les extinctions du Permien Entre le Paléozoïque et le Mésozoïque (il y a environ 240 millions d'années) se produisit l'extinction de masse la plus importante qui ait jamais été enregistrée sur la Terre. 54 % des familles d'animaux marins et probablement 90 % des espèces ayant vécu au Permien supérieur disparurent. Cet événement concerna la vie marine et également une partie de la vie sur la terre ferme. C'est ainsi que disparurent tous les anciens coraux constructeurs de récifs, de nombreux Brachiopodes, la plupart des Ectoproctes et des Échinodermes Crinoïdes, les nummulites (Protozoaires géants munis de coquille, qui se classent parmi les Foraminifères, atteignant parfois jusqu'à 5 cm de longueur) et de nombreux Trilobites. Une partie seulement des Vertébrés terrestres subit cette évolution : les Amphibiens furent touchés dans une large mesure. L’analyse des roches établit qu'à la fin du Permien la température de la mer augmenta, tout comme l'aridité des terres émergées. Une fois de plus, les changements climatiques ont été invoqués pour expliquer les extinctions de masse. Mais comment expliquer cette augmentation de température ? Un détail important de l'histoire géologique peut nous aider à faire la lumière sur ces événements. À la fin du Paléozoïque, les continents se réunirent en un seul supercontinent appelé Pangée (voir passé des continents), diminuant considérablement l'extension des zones côtières. Si nous admettons que les zones ayant la faune la plus diversifiée étaient les zones côtières, et plus généralement celles de la plate-forme continentale, nous devons en déduire que, quand la Pangée se forma, ces communautés eurent alors un espace très réduit à leur disposition. L'espace est considéré par les écologistes comme un facteur limitant la diversité biologique. Moins d'espace, moins d'espèces. Cette forte limitation de l'espace pour la faune marine côtière, jointe aux probables 5 bouleversements climatiques dus aux mouvements des continents, pourrait expliquer la grande extinction des zoocénoses marines du Permien, tandis que les Amphibiens durent se mesurer avec l'assèchement des terres émergées. LA VIE AU MÉSOZOÏQUE Le Mésozoïque ou Secondaire, ère géologique ayant commencé il y a 230 millions d'années et s'étant terminée il y a 65 millions d'années, fut caractérisé par l'évolution des Reptiles, les premiers Vertébrés vraiment terrestres. Ces derniers conquirent la mer et l'air, produisant aussi bien des formes marines que des formes volantes. C'est pour cette raison que le Mésozoïque est appelé également l'« ère des Reptiles ». Les Dinosaures, les Reptiles les plus célèbres du Mésozoïque, avaient déjà fait leur apparition, et l'évolution des Mammifères avait déjà commencé (les premiers fossiles de Mammifères remontent à 220 millions d'années), quand, il y a environ 180 millions d'années, l'extinction du Trias causa la disparition de 35 % des familles animales vivant à cette époque-là. Les Dinosaures, et plus généralement les Reptiles, continuèrent non seulement à proliférer, mais engendrèrent aussi un nouveau groupe d’animaux qui eut un grand succès : les Oiseaux. La première espèce fossile dotée de plumes et d’ailes, mais qui gardait encore les dents, les vertèbres caudales et d’autres caractères des Reptiles, l’archéoptéryx, remonte à 140 millions d’années. Au début, l’évolution des Oiseaux fut très lente, 100 millions d’années durent s’écouler avant que leur grande diversification ne se produise. Cette diversification fut le résultat d’une efficacité accrue des mécanismes qui permettent de maintenir une température corporelle constante - condition indispensable pour le vol - et de la diversité croissante des Insectes et des Angiospermes, plantes à fleurs ayant fait leur apparition vers la fin du Mésozoïque. Les Insectes ailés, dont l’évolution continua en parallèle avec celle des Angiospermes, représentèrent pour les Oiseaux une nouvelle source abondante de nourriture. L’extinction du Crétacé, survenue il y a 65 millions d’années, mit fin à l’ère des Reptiles. Le Mésozoïque se termina par la disparition des Dinosaures et de tous les autres grands Reptiles terrestres, aquatiques et volants qui avaient dominé la vie sur la Terre pendant des centaines de millions d’années, mais avec eux disparurent aussi d’autres animaux dont nous ne connaissons que les fossiles conservés dans les roches, tels que les Ammonites et les Rudistes. L’évolution des Reptiles La grande diversification des Reptiles et le succès évolutif des Dinosaures commencèrent il y a environ 220 millions d’années, culminèrent au Jurassique et continuèrent jusqu’à la grande extinction du Crétacé. Les Reptiles donnèrent naissance aux Mammifères et aux Oiseaux qui, grâce à cette extinction, dominèrent par la suite la faune des Vertébrés terrestres, tandis que les Amphibiens restèrent liés aux milieux d’eau douce ou à des conditions de grande humidité. Les Reptiles s'affranchirent définitivement de l’eau sur une période d'environ 50 millions d’années, même si certains y retournèrent par la suite pour engendrer les grands Reptiles marins. Les œufs se couvrirent d’une coquille dure et poreuse et l’embryon put se développer dans un milieu liquide grâce à la formation de l’amnios. Le corps se souleva au-dessus du sol grâce à l’amélioration de l’articulation entre le bassin et la colonne vertébrale, et la peau se couvrit de robustes écailles cornées. Les 6 formes intermédiaires entre les Amphibiens et les Reptiles peuvent déjà être reconnues au Carbonifère (Seymouria). Au Trias, on observe aussi bien la présence des ancêtres des tortues actuelles (Cotylosaures) que de ceux des lézards et des serpents actuels (Éosuchiens), ainsi que des Rhynchocéphales (les sphénodons ont survécu jusqu’à nos jours). Mais les véritables protagonistes du Mésozoïque sont les Dinosaures, parents des crocodiles et des Oiseaux actuels, étant apparus au Trias et ayant disparu à la fin du Crétacé. Certains des Reptiles marins qui vécurent en même temps que les Dinosaures revenaient sur la terre ferme pour pondre leurs œufs (Plésiosaures) ; d'autres, ne pouvant pas le faire, étaient devenus vivipares (Ichtyosaures). Dans la même période, d’autres Reptiles (Ptérosauriens) avaient conquis directement le milieu aérien, se transformant en prédateurs ailés. Le développement des Reptiles primitifs d’une autre ligne évolutive (celle des Pélycosaures et des Thérapsidés), survenu entre la fin du Paléozoïque et le début du Mésozoïque, fut à l’origine des Mammifères. Les Dinosaures étaient les uns carnivores, comme par exemple les tyrannosaures, et les autres herbivores, comme les énormes brontosaures et les diplodocus. Ces derniers pouvaient atteindre une longueur de 25-26 mètres et leur tête était souvent disproportionnée par rapport à la masse de leur corps. La tête des prédateurs était énorme, celle des herbivores très petite. Comment ces colosses pouvaient-ils satisfaire à leurs besoins énergétiques en se nourrissant de végétaux ? Et surtout, de quelle manière parvinrent-ils à atteindre ces dimensions ? Pour répondre à la première question, il faut prendre en compte un mécanisme invoqué à maintes reprises pour expliquer certains événements de l’évolution animale. Il semble que les estomacs des Reptiles herbivores gigantesques du Mésozoïque fussent d’énormes chambres de fermentation peuplées de Bactéries symbiotes (symbiose) qui digéraient ce que leur hôte ne pouvait pas digérer en lui fournissant l’énergie suffisante à son métabolisme. Dans le cas des Dinosaures, soulignons l’importance évolutive de ces micro-organismes et des rapports de symbiose dans lesquels ils sont impliqués. Quant à la deuxième question, il faut tenir compte du fait que les grandes dimensions corporelles sont généralement liées à des situations climatiques instables. Le caractère saisonnier typique du climat mésozoïque peut donc expliquer les grandes dimensions des Dinosaures herbivores. En revanche, les grands prédateurs rapides avaient de plus grands besoins énergétiques car le rendement musculaire maximum ne peut être atteint qu’à des températures corporelles élevées. Il est très probable que les grands Reptiles prédateurs comme le tyrannosaure étaient homéothermes, une caractéristique qui permit aux Mammifères un grand succès évolutif après la disparition des Dinosaures. L’évolution des Mammifères Les Mammifères apparaissent pour la première fois dans la documentation fossile d’il y a 220 millions d’années, mais leur succès évolutif ne fut confirmé qu’au Cénozoïque, après l’extinction des grands Reptiles terrestres survenue à la fin du Crétacé. Les premiers Mammifères naquirent d’un groupe de Reptiles Thériodontes et avaient les dimensions d’une musaraigne. Le squelette des membres se modifia considérablement : le coude se déplaça en arrière, le genou en avant et les membres prirent une position plus verticale, qui rendait les mouvements plus aisés. L’ouïe et l’odorat étaient les sens les plus développés des Mammifères primitifs. Grâce à l’évolution du palais secondaire, ces animaux furent à même de respirer pendant la mastication ; seules quelques espèces de Reptiles pouvaient faire de même. Les Mammifères avaient d’imortants besoins respiratoires, en raison de la 7 caractéristique physiologique qui les distingue le plus de leurs ancêtres et qui leur permit sans doute de survivre à la grande extinction du Crétacé : le contrôle interne de la température corporelle (homéothermie). Les Mammifères primitifs développèrent très tôt des poils destinés à faciliter leur isolation thermique. Ils satisfirent à leurs besoins énergétiques nécessaires au maintien de leur température interne en se nourrissant d’Insectes et d’autres Arthropodes terrestres, nourriture ayant une valeur calorique élevée. Au point de vue morphologique, l’évolution d’une denture différenciée (hétérodontie) permit de varier l’alimentation, tandis que le développement des os de l’oreille moyenne rendit possible un affinement de l’ouïe. La stratégie reproductrice aussi fut profondément modifiée par l’évolution de la viviparité, du placenta et des glandes mammaires (mamelle) servant à allaiter les jeunes, en se dégageant de la nécessité de repérer des aliments riches en énergie. Prédation et compétition de la part des Reptiles du Mésozoïque déterminèrent la spécialisation des Mammifères en animaux nocturnes, en les transformant en protagonistes principaux des « nuits froides » du Mésozoïque supérieur. Les Mammifères, dont l’évolution est liée à l’adaptation aux basses températures, étaient nombreux à cette époque-là, si l’on considère leur biomasse dans les régions tempérées plutôt que dans les régions tropicales. Peutêtre fut-ce pour cette raison qu’il fallut attendre le Cénozoïque pour assister à leur grande diversification. Sur les masses continentales rapprochées du Mésozoïque (voir passé des continents), le climat était assez uniforme et ce n'est qu’au Cénozoïque, quand ces masses étaient déjà en train de s’éloigner, que le climat se diversifia. Le Tertiaire fut marqué par l'extension des bois et des prairies peuplés par les premiers Mammifères herbivores. Mais cela constitue un autre chapitre de l’histoire de la vie sur la Terre : les premiers Mammifères étaient Insectivores, tout comme l'étaient les Primates les plus anciens, les ancêtres de l’homme. L’évolution des Oiseaux Les Oiseaux, ainsi que les Mammifères, sont des animaux homéothermes dotés d’un revêtement apte à maintenir leur température corporelle à un niveau constant : le plumage. De même que les Mammifères, les Oiseaux durent attendre l’extinction des grands Reptiles du Mésozoïque pour réaliser leur grande expansion ; leur succès évolutif fut étroitement lié à celui des Insectes. Mais la voie évolutive qu’ils empruntèrent entraîna des adaptations complètement différentes de celles des Mammifères. L’évolution des Oiseaux commença à partir d’un groupe de Dinosaures du Mésozoïque (Archosauriens). Et si, aujourd’hui, nous pouvons étudier les caractéristiques morphologiques intermédiaires entre ces derniers et les Oiseaux, c’est justement grâce à la découverte d’une espèce fossile dont les caractéristiques semblent être à la fois empruntées aux Reptiles et aux Oiseaux : l'Archéoptérix (Archaeopteryx), dont l’origine remonte à 140 millions d’années. Cet étrange animal avait des dents, une queue et un sternum non caréné, des os creux, des clavicules unies en un os en forme de fourche et, surtout, des plumes, dérivées des écailles des Reptiles. La question qui peut se poser à ce stade concerne la capacité de voler de l'Archéoptéryx. Cet étrange animal était-il capable de voler ? Quel avantage avait-il par rapport aux autres Reptiles volants ? Et, enfin, pourquoi devons-nous attendre encore 100 millions d’années pour que se produise la grande diversification des Oiseaux ? Il est désormais établi que l'Archaeopteryx était un coureur et qu’il utilisait ses ailes pour faire des sauts plus longs. S’il les a employées pour voler, il n'était pas très doué pour le vol et il est difficile de comprendre l’avantage qu’il pouvait tirer de son plumage. On est donc parvenu à la 8 conclusion que les plumes de cet Oiseau primitif avaient la même fonction que les poils des Mammifères, à savoir le maintien à un niveau constant de la température corporelle. Ce n’est que lorsque les mécanismes de thermorégulation furent suffisamment développés que les Oiseaux purent développer leur aptitude au vol, la forme de locomotion la plus fatigante. Comme les Mammifères, ils devinrent donc homéothermes mais les conséquences de cette adaptation furent, chez eux, complètement différentes. Tandis que les Mammifères amélioraient leurs rapports avec les jeunes à travers la viviparité, les Oiseaux développaient un appareil respiratoire cinq fois plus efficace que celui des Mammifères et colonisaient le milieu aérien. Le vol était une activité impliquant une grosse dépense d’énergie. C’est pourquoi il faudra attendre encore 100 millions d’années pour voir leur grande diversification. En effet, ce ne fut qu’à cette époque-là, avec l’apparition des Angiospermes (plantes à fleurs), que les Oiseaux trouvèrent une abondante source de nourriture constituée par les Insectes ailés en rapide évolution qui se nourrissaient justement du nectar et du pollen riches en protéines. À partir du Tertiaire on assiste donc au début de l’évolution rapide des Oiseaux. L’extinction du Crétacé Seule l'extinction du Permien dépasse en dimensions l’extinction de masse du Crétacé, survenue il y a environ 65 millions d’années. Après cette catastrophe, le monde ne fut plus le même. Les groupes d’animaux qui dominent aujourd’hui la mer et les terres émergées (Poissons Téléostéens, Insectes, Mammifères, Oiseaux) commencèrent à cette époque-là à se diversifier. L’extinction de masse du Crétacé, connue pour la disparition des Dinosaures, frappa plus de 50 % des espèces existant à l’époque. Il semble que sur la terre ferme n'aient survécu que des animaux ayant un poids inférieur à 10 kg, mais la vie marine et la vie végétale furent elles aussi touchées. Qu’est-ce qui provoqua une telle catastrophe ? Au cours des dernières années, de longues recherches, confortées par des preuves et des témoignages scientifiques, ont conduit à l’hypothèse suivante : Une météorite énorme ayant un diamètre d’environ 10 km, qui se serait enflammée au contact de l’atmosphère, se serait abattue sur la Terre, causant des incendies très étendus, soulevant une couche de poussière qui aurait littéralement obscurci le ciel pendant des années et aurait provoqué le refroidissement de la Terre. Les chercheurs continuent de découvrir dans des roches remontant à moins de 65 millions d’années les traces de cette collision. L’iridium, qui constitue un élément rare dans la croûte terrestre, mais qui est très abondant dans les météorites, présente une concentration anormale dans les couches géologiques de cette époque. Ces couches contiennent aussi des cristaux de quartz particuliers qui témoignent de la force de cet impact. D’autres chercheurs ont avancé l’hypothèse d’une grande éruption volcanique qui serait la cause principale de l’extinction du Crétacé. Qui a survécu à cet effondrement général ? Probablement certaines plantes capables de produire des graines résistantes (les Phanérogames), des animaux en mesure de se déplacer rapidement et, en général, tous les êtres vivants s’étant adaptés aux fluctuations de température (homéothermie des Oiseaux et des Mammifères). Ce n’est pas par hasard si les tortues et les crocodiles ont survécu. Il s’agit d’animaux liés à l’eau (surtout les seconds), où les conditions environnementales sont plus stables, et qui sont connues pour leur résistance au jeûne. En mer, les espèces les plus frappées furent certains Protozoaires pourvus de coquille (Foraminifères) et certaines Algues calcaires (Coccolithophoracées) qui constituaient sans doute la base de la chaîne alimentaire marine. On a calculé que 90 % des espèces faisant 9 partie du plancton ont disparu. Ces extinctions semblent avoir été plus graduelles que celles qui ont eu lieu dans les milieux terrestres. Mais la disparition de 80 % des espèces de Brachiopodes et surtout celle des Ammonites, Mollusques marins du Mésozoïque, qui avaient déjà été durement frappés par les extinctions précédentes, furent véritablement soudaines (même s’il est difficile d’employer le terme « soudain » à une échelle de millions d’années). Ces derniers événements peuvent être mis en relation avec la crise du plancton et ses conséquences sur la chaîne alimentaire marine. La détermination des causes des extinctions du passé représente toujours une tâche assez complexe ; quand l’hypothèse de la météorite commença à être confirmée par un nombre croissant de preuves, on pensa que des événements analogues auraient pu être considérés pour l’explication d’autres grands événements d’extinction de masse (Ordovicien, Dévonien, Permien, Trias). Certains ont même remarqué que ces hécatombes se produisaient de façon régulière et non fortuite. Et les astronomes ont fait remarquer que le Système Solaire traverse avec une certaine régularité un nuage cosmique ayant une densité élevée d’astéroïdes. Lors de ce passage, la probabilité que la Terre soit frappée est très élevée. Cette idée n’est certainement pas rassurante, mais elle n'en est pas moins vraisemblable. Heureusement, le Système Solaire ne traversera ce nuage que d’ici 14 millions d’années. LA VIE AU CÉNOZOÏQUE Le Cénozoïque ou Tertiaire, la période comprise entre il y a 65 et 2 millions d’années, est appelé aussi « Ère des Mammifères », du fait de leur importante, rapide et soudaine radiation d’adaptation qui a suivi la disparition des Reptiles. Cependant les Mammifères ne furent pas les seuls animaux à tirer profit de l’extinction des Dinosaures. Les Oiseaux aussi trouvèrent beaucoup de niches écologiques vides et, pendant que les Mammifères se spécialisaient dans une grande variété de formes étroitement liées à la vie terrestre, les Oiseaux conquéraient les espaces aériens avec une radiation d’adaptation parallèle. De cette façon, au cours du Cénozoïque, la biosphère, avec ses formes de vie, progressa graduellement vers le monde actuel. L’un des groupes animaux les plus récents apparus au cours du Cénozoïque est le groupe des Hominiens, dont les premiers restes fossiles remontent à il y a environ 14 millions d’années et desquels descend notre espèce. LA VIE AU NÉOZOÏQUE Le Néozoïque, ou Quaternaire, est l’ère à laquelle nous vivons aujourd’hui, caractérisée par l’évolution de l’homme et par sa diffusion sur toute la Terre, diffusion à laquelle nous devons la remarquable variabilité qui se rencontre chez les populations vivant dans des zones géographiques différentes. Le Néozoïque, commencé il y a 2 millions d’années, est divisé en deux époques, le Pléistocène et l’Holocène. Les glaciations constituent le phénomène le plus important du Pléistocène, qui a duré de moins 2 millions à moins 10 000 années quand, du fait de la stabilisation du climat qui a suivi la fin de la dernière glaciation, commença la période où nous vivons encore aujourd’hui : l’Holocène. En Europe, à cinq reprises, la baisse de la température a fait avancer les calottes glaciaires et a provoqué l’expansion des glaciers sur les massifs montagneux. Le Pléistocène fut une période au cours de laquelle des animaux typiques des climats froids, tels que le 10 rhinocéros laineux, l’ours des cavernes, le mammouth et le renne, se sont répandus vers le sud. Les périodes froides étaient entrecoupées de phases interglaciaires, caractérisées par un climat chaud et humide. Lors de ces phases, les plantes et les animaux typiques des zones tropicales, tels que les hippopotames et les éléphants, gagnaient les latitudes tempérées. Aux grandes variations climatiques sont liées les extinctions du Pléistocène, auxquelles a aussi contribué l’espèce humaine par son activité de chasse. Mais ce n’est que dans une période plus récente de l’histoire de la vie sur la Terre que l’homme devient la cause principale des extinctions, en devenant une menace pour l’équilibre de la biosphère tout entière. LES INVERTÉBRÉS CLASSIFICATION ÉVOLUTIVE Il n'est pas toujours aisé de décider de l'appartenance d'un être vivant au règne animal ou au règne végétal. C'est le cas de certains Protistes (organismes composés d'une seule cellule), qui sont divisés, généralement, en Protozoaires (affiliés aux animaux) et en Protophytes (affiliés aux végétaux). La distinction est difficile entre les Flagellés pourvus de chlorophylle (Phytoflagellés) et ceux qui n'en possèdent pas (Zooflagellés). Pour résoudre ce problème, certains auteurs font de l'ensemble des Protistes un règne particulier, indépendant des règnes animal et végétal. Mais, la classification du règne animal repose, le plus souvent, sur l'opposition entre la structure unicellulaire des Protozoaires et la structure pluricellulaire des Métazoaires. Les Métazoaires sont constitués d'un grand nombre de cellules groupées en tissus formant, eux-mêmes, des organes. Ils comprennent de nombreux embranchements, du plus simple au plus complexe, dont la classification repose sur des critères essentiellement embryologiques. Le développement de la cellule œuf conduit, par mitoses successives, à la formation d'un embryon présentant une cavité. Le premier critère de classification est le nombre (deux ou trois) des couches cellulaires, ou feuillets embryonnaires, qui bordent la cavité. Le second critère concerne le devenir, dans un embryon à trois feuillets, de la couche intermédiaire selon qu'elle se creuse ou non. Enfin, interviennent la position, ventrale ou dorsale, du système nerveux et le devenir du blastopore, ou « bouche » primitive embryonnaire, selon qu'il forme la bouche définitive ou l'anus. Mais il faut toujours avoir à l'esprit que la classification (ou systématique) des animaux actuels varie selon les spécialistes et qu'elle doit tenir compte des fossiles, qui relèvent de la paléontologie : en effet, des groupes zoologiques parfois fort importants ne sont connus qu'à l'état fossile, par exemple, les Nummulites parmi les Protozoaires rhizopodes, les Trilobites parmi les Arthropodes, les Ammonites parmi les Mollusques, les Dinosaures parmi les Reptiles, etc. LES PROTOZOAIRES Ils forment un sous-règne (ou phylum) réunissant des animaux microscopiques dont l'unique cellule constituante remplit toutes les fonctions nécessaires à leur vie ; en cela, elle est très différente d'une cellule de Métazoaire, car composée d'organites complexes : cils, vacuoles, flagelles, etc. L’ensemble des Protozaires contient plusieurs dizaines de milliers d'espèces, libres ou parasites, regroupées en plus de 11 dix phylums, qui font partie, avec les Unicellulaires photosynthétiques, d'un ensemble encore plus vaste, celui des Protistes. Les Protozoaires ne forment pas un groupe « naturel » (monophylétique), mais plutôt un assemblage de lignées évolutives distinctes que l'on regroupe pour des raisons de commodité. Tant les données paléontologiques que celles de la phylogénie moléculaire suggèrent que les Protistes ont une origine évolutive très ancienne. Les premières traces fossiles indubitables d'organismes eucaryotes remontent à au moins 1,5 milliard d'années : cellules de grande taille présentant une paroi ornée, dénommées acritarches, qui pourraient correspondre à des formes de résistance. Au cours de ce très long intervalle évolutif, les Protistes ont colonisé une extraordinaire diversité de milieux ; on les trouve dans tous les biotopes, y compris en tant que parasites des autres espèces biologiques. SPONGIAIRES, CNIDAIRES ET CTÉNAIRES L'embranchement des Spongiaires, c'est-à-dire les éponges, est parfois considéré comme un sous-règne à part, celui des Parazoaires. Presque toutes marines (quelques-unes vivent en eau douce), les éponges se fixent au fond des mers. Elles possèdent des cellules flagellées, provoquant un courant d'eau dans les canaux qui parcourent la paroi de leur corps, et n'ont pas d'organes, leurs cellules ne sont pas groupées en véritables tissus. Les Cnidaires présentent des cellules urticantes, les cnidoblastes ou nématoblastes, et des tentacules autour de leur bouche. Presque tous sont marins : méduses, corail rouge, madrépores, actinies (anémones de mer). Les Cténaires, qui forment un petit embranchement marin, sont caractérisés par un système locomoteur composé de huit rangées de palettes ciliées et par un système particulier de préhension de la nourriture comportant des cellules adhésives, les colloblastes. LES VERS L'embranchement des Plathelminthes (vers plats et mous) réunit la plupart des formes parasites des classes des Trématodes et des Cestodes (ténias, douves, etc.). Les formes libres de la classe des Turbellariés, plus connus sous le nom de Planaires, habitent tous les milieux mais surtout les eaux douces. Les Némertiens sont des vers marins très minces et très longs. Les Némathelminthes (appelés autrefois « vers ronds ») sont des vers aquatiques ou terrestres, dont la classe la plus représentative est celle des nématodes. Leur mode de vie est très divers : libre ou parasite externe, mais le plus souvent parasite interne (ascaris, oxyures, trichines, filaires). Cet embranchement compte cinq classes : les Rotifères (célèbres pour leur faculté de reviviscence, ils habitent les mousses ou les eaux douces et doivent leur nom à un appareil rotateur cilié), les Nématodes, les Gastérotriches, les Échinodères et les Nématomorphes. Les Annélides sont, par définition, des vers annelés dont le corps est composé de segments, ou métamères successifs, dans lesquels se trouvent les organes (cœlome, ganglions nerveux, organes excréteurs...) ; ils portent parfois une paire d'appendices locomoteurs. Ils se divisent en trois classes : les Polychètes, marins (les néréis ou les arénicoles) ; les Oligochètes, surtout terrestres (le lombric) ; les Achètes, qui peuplent les trois milieux sous des formes libres ou parasites (la sangsue d'eau douce). 12 LES LOPHOPHORIENS Les Lophophoriens se caractérisent par la possession, autour de la bouche, d'un lophophore (couronne de tentacules ciliées), vers lequel sont amenées les particules alimentaires. Cet embranchement comprend : les Brachiopodes, Invertébrés marins qui ressemblent par leur coquille bivalve aux Mollusques lamellibranches ; les Phoronidiens, vers marins vivant dans des tubes ; les Ectoproctes (presque tous marins) et les Endoproctes (marins), à l'aspect de mousses, jadis réunis sous le nom générique de Bryozoaires. Les Chétognathes font partie du zooplancton océanique ; ils n'ont pu être rapprochés d'autres grands embranchements et sont isolés dans la classification. LES MOLLUSQUES Les Mollusques, à la différence des Annélides, ne présentent pas de métamérisation du corps, mais une symétrie bilatérale aussi bien dans leur aspect extérieur que dans leur organisation interne. Ce n'est pas le cas des Gastéropodes, qui, au cours de l'évolution, ont gommé cette symétrie par torsion du corps et enroulement en spirale de la coquille (escargot, bigorneau) ; celle-ci prolonge souvent le corps des Mollusques, mais elle est quelquefois très réduite, voire absente (limace). Les Lamellibranches ont une coquille bivalve (huître, moule), tandis que les Céphalopodes sont remarquables par leurs tentacules (pieuvre, calmar). LES ARTHROPODES Les Arthropodes possèdent, comme les Annélides, un corps métamérisé sur lequel se trouvent des appendices. La différence réside dans l'articulation de ces appendices et dans la couche chitineuse qui recouvre leur corps d'une véritable cuirasse. Ils constituent, de très loin, l'embranchement le plus vaste du règne animal. Les Arthropodes se subdivisent en trois sous-embranchements : les Trilobitomorphes, dont tous les représentants sont fossiles ; les Chélicérates, parmi lesquels on classe les Arachnides, et les Mandibulates, ou Antennates, qui comprennent les classes des Crustacés, des Myriapodes et des Insectes. Les Arachnides Les Arachnides forment la plus importante des trois classes d'Arthropodes qui composent le sous-embranchement des Chélicérates. Ces animaux, essentiellement carnivores, sont dépourvus d'antennes et ont le corps divisé en deux parties : le prosome (céphalothorax) et l'opisthosome (abdomen). Leur nombre actuel, difficile à évaluer, est probablement de l'ordre de 75 000 à 80 000 espèces, dont plus de la moitié sont des Aranéides (ordre des araignées). De plus, de multiples espèces sont découvertes chaque année. La classe des Arachnides est divisée en onze ordres - nombre encore contesté par des spécialistes -, qui comprennent plusieurs familles. Les espèces de cette classe ont longtemps été considérées comme des Insectes : Linné, naturaliste du 13 XVIIIe siècle, pensait qu'ils constituaient une seule et même classe. C'est Lamarck qui, au début du XIXe s., a fait, le premier, la distinction entre les Insectes dépourvus d'ailes, dont la croissance s'effectue sans métamorphose, et les Insectes vrais. Dans nos régions, la majorité de ces animaux sont de très petite taille, mais ceux des zones tropicales, scorpions et mygales, ont un aspect spectaculaire et méritent d'être étudiés en détail. Les Crustacés Les Crustacés sont remarquables par leur système respiratoire, constitué de branchies. Ils sont surtout présents dans le milieu marin, des côtes à plus de 1 000 m de profondeur, mais aussi sur la terre ferme. Comme tous les Arthropodes, les Crustacés ont un corps formé de segments articulés, ou somites, sur lesquels s'insèrent des appendices, eux-mêmes divisés en articles plus ou moins nombreux. Il est impossible de donner une définition générale des Crustacés, car selon leur adaptation aux divers milieux, habitats et modes de vie, les formes actuelles sont profondément dissemblables ; il est même parfois difficile de discerner la moindre parenté. Pourtant, ils ont un point commun qui les différencie des autres Arthropodes : le passage, au cours du développement embryonnaire ou larvaire, par le stade nauplius (organisme au corps ovale portant trois paires d'appendices natatoires et un œil médian unique). Les Myriapodes Les Myriapodes sont sans aucun doute beaucoup plus voisins des Insectes que ne le sont les Arachnides : comme les Insectes, en effet, ils présentent une paire d'antennes et une paire de mandibules ; mais leur corps, à un examen superficiel, ne semble divisé qu'en 2 régions seulement : tête et tronc, ce dernier formé de nombreux segments presque tous pourvus de 1 ou 2 paires de pattes segmentées. La classe comprend 4 sous-classes : Pauropodes, Symphyles, Diplopodes et Chilopodes. Les Insectes Les Insectes sont des Invertébrés hautement organisés, proches des autres Arthropodes par la division de leur corps en segments regroupés la plupart du temps en tagmes. Ils s'en différencient par la présence de trois paires de pattes seulement - les crabes, par exemple, en ont cinq, et les araignées quatre -, et par l'absence d'appendices abdominaux. Leur respiration est trachéenne, et l'orifice génital est généralement situé sur les derniers segments abdominaux. Une des principales caractéristiques des Arthropodes, et des Insectes en particulier, est la présence d'un exosquelette rigide. Le corps d'un Insecte se compose de trois tagmes, dont le premier est la tête, capsule assez homogène, qui ne présente plus de limite nette entre les six segments originels comme chez les Insectes primitifs ; elle porte les yeux, composés de facettes (ommatidies), servant essentiellement à la vision, et des ocelles simples, organes de photoréception, mais aussi une paire d'antennes (deux paires chez les Crustacés) et les pièces buccales, dont les variantes morphologiques indiquent le régime alimentaire de l'espèce. Le 14 thorax est divisé en trois segments (pro-, méso- et métathorax), qui portent chacun une paire de pattes, les deux derniers portant généralement une paire d'ailes. L'abdomen, formé originellement d'une douzaine de segments, n'en comporte souvent qu'un nombre (visible) bien plus faible, cela par suite de soudures ou de modifications au cours de l'évolution ; il est le siège des fonctions digestives et reproductives, ainsi que de l'essentiel de l'appareil respiratoire. ÉCHINODERMES ET POGONOPHORES Exclusivement marins, les Échinodermes (oursins, étoiles de mer, etc.) sont remarquables par leur symétrie pentaradiée. Les Pogonophores, définis en 1944, regroupent les animaux marins vivants dans les abysses ; cet embranchement devrait s'agrandir grâce aux progrès techniques d'exploration sous-marine. Quant aux Stomocordés (autrefois nommés Hémicordés), marins eux aussi, ils constituent le trait d'union avec l'embranchement le plus évolué, celui des Cordés. Tous les embranchements de Métazoaires cités précédemment constituent ce que l'on appelle, dans le langage courant, les Invertébrés, les Vertébrés constituant, avec les Tuniciers et les Céphalocordés, le superembranchement des Cordés. LES CORDÉS La principale caractéristique des Cordés est de posséder, au moins à un état transitoire de leur développement, une corde dorsale (autrefois appelée chorde ou notochorde). C'est un axe squelettique qui s'étend dans le sens antéropostérieur, entre le système nerveux et le tube digestif, et joue un rôle de soutien plus ou moins élastique. Il est composé de cellules à vacuoles turgescentes (gonflées de liquide) et est entouré d'une gaine conjonctive. La corde n'est présente qu'à l'état embryonnaire ou larvaire chez quelques Cordés inférieurs, alors qu'elle sert d'ébauche à la colonne vertébrale chez les Vertébrés. Les autres caractères importants des Cordés sont la séparation des sexes et la possession (là encore souvent à titre transitoire) d'un tube neural dorsal et d'une cavité pharyngienne percée de fentes branchiales. LES TUNICIERS Les Tuniciers sont aussi nommés Urocordés selon que l'on prend en compte la possession d'un revêtement (la tunique) ou la position caudale de la corde dorsale. Ce sont des animaux marins, solitaires ou coloniaux, dont les représentants les plus nombreux sont les Ascidies (classe des Ascidiacés), fixées à l'état adulte ; les larves nageuses présentent une corde dorsale, un tube neural et une cavité pharyngienne qui seule persiste après les différents stades larvaires. Les Tuniciers sont répartis du littoral aux fonds abyssaux (classe des Thaliacés), sous des formes fixées ou libres (classe des Appendiculaires). LES CÉPHALOCORDÉS Chez les Céphalocordés, également marins, les trois structures persistent chez l'adulte. Ils ne comptent que deux genres : Branchiostoma (l'amphioxus, considéré 15 comme l'archétype des Vertébrés) et Asymmetron dans les fonds sableux littoraux et les fonds de graviers des côtes bretonnes. LES VERTÉBRÉS LES POISSONS On ne donne plus aujourd'hui au terme de « poisson » de valeur systématique, mais simplement une signification descriptive et conventionnelle. En effet, on entend par Poissons un groupe hétérogène de Vertébrés, qui se servent pour nager de leur queue et de leurs nageoires. Ils possèdent des mâchoires ainsi que des branchies qui leur servent à respirer dans l'eau, y compris au stade adulte. Il existe deux classes de Poissons : les Chondrichtyens, ou Poissons cartilagineux, et les Ostéichtyens, ou Poissons osseux. Au siècle dernier, les Chondrichtyens étaient considérés comme un stade évolutif antérieur à celui des Ostéichtyens. Les fossiles montrent en fait que ces deux classes de Poissons, dès leur première apparition, appartiennent à deux lignées distinctes. Les Chondrichtyens La classe des Chondrichtyens est constituée des requins, des raies et des chimères. Ce sont des Vertébrés, pour la plupart prédateurs, qui se caractérisent par leur squelette entièrement constitué de cartilage. Un grand nombre d'entre eux sont des nageurs actifs et se nourrissent essentiellement de Poissons. Les requins pèlerins (Cetorhinus maximus) et les requins baleines (Rhineodon typus), de très grande taille, se nourrissent de plancton, alors que les autres requins sont carnivores et que les raies préfèrent les Invertébrés (Mollusques, Crustacés, etc.). La plupart des Poissons cartilagineux vivent dans la mer, mais certains parviennent à vivre dans des eaux saumâtres ou douces. On connaît en tout environ 1 000 espèces de Poissons cartilagineux. LES CARACTÈRES. Les Poissons cartilagineux se reconnaissent par un ensemble de caractères spécifiques. Tout d'abord, leur squelette n'est pas ossifié, mais entièrement cartilagineux. Cet état représente la persistance, à la phase adulte, d’un caractère embryonnaire. Les Condrychtiens n'ont pas d'opercules, c'est la raison pour laquelle les fentes branchiales sont découvertes. Ils ont la peau recouverte de petites écailles avec une base de dentine et une dent externe recouverte d'émail. Au bord de la bouche, les dents cutanées servent de vraies dents et se disposent sur plusieurs rangées. À la différence des Poissons osseux (voir Les Ostéichtyens), les Poissons cartilagineux n'ont pas de vessie natatoire, ils sont donc incapables de réguler leur assiette hydrostatique. C’est pourquoi, afin de se maintenir à la profondeur voulue, ils doivent régler leur vitesse et leur direction de nage. La respiration se fait par les branchies, organes richement vascularisés, capables d'absorber l'oxygène dissous dans l'eau. Le système circulatoire s'organise selon un modèle commun aux Vertébrés aquatiques. Le cœur qui n'a qu'une oreillette et un ventricule assure une circulation simple. Le problème de l'équilibre osmotique (osmose) par rapport à l'eau de mer, chez les Poissons cartilagineux, a été résolu par une surcharge d'urée dans le sang. Les sens les plus 16 développés sont la réception chimique, l'odorat et le goût. La fécondation se fait presque toujours de manière interne. Chez les mâles, une partie spécialisée des nageoires pelviennes sert d'organe reproducteur. La plupart des Chondrichtyens sont ovovivipares, c'est-à-dire que les œufs se développent à l'intérieur de la mère qui accouche de petits identiques à l'adulte. Certains requins, diverses raies et les chimères sont ovipares : ils déposent chaque œuf dans une capsule fixée par des filaments à un substrat. Les jeunes sont identiques aux adultes dès l'éclosion de l'œuf. LES ADAPTATIONS. Les requins sont de bons nageurs, et leur corps a une forme hydrodynamique. Les raies et les torpilles, adaptées à la vie sur le fond marin ont un corps très aplati. La manta de mer est une raie géante, mais, avec le temps, elle s’est spécialisée ; elle vit dans des eaux ouvertes et se nourrit de plancton. Certains requins de fond ainsi que les poissons-scies, ont développé, indépendamment les uns des autres, un rostre allongé et plat au bord dentelé. Celui-ci leur sert à remuer le fond pour chercher de la nourriture, mais aussi à se défendre ou à attaquer. La conformation des dents reflète les habitudes alimentaires. Les requins ont des dents faites pour saisir, couper et déchiqueter leurs proies. Les raies, au contraire, ont de petites dents plates, faites pour broyer les coquilles des Mollusques et les Crustacés. Certaines espèces sont dotées d’organes électriques. Chez les torpilles, la musculature du pharynx s'est modifiée pour former d'importants organes électriques. Ces organes sont capables de provoquer des décharges à haute tension, qui leur servent aussi bien à étourdir leurs proies, qu'à se défendre de leurs prédateurs. D'autres espèces possèdent de petits organes électriques situés dans la queue : ils provoquent de légères décharges (plusieurs à la seconde) leur permettant de créer un champ électrique autour de l'animal. Certains récepteurs détectent la présence éventuelle d’un ennemi en captant les déformations du champ électrique qu’il induit. Les Ostéichtyens On recense à ce jour 20 000 espèces d’Ostéichtyens, ou Poissons osseux. Ils constituent donc le groupe le plus important des Vertébrés. Ils sont présents dans toutes les mers, des pôles à l'équateur, à toutes les profondeurs, depuis la surface jusqu'à plus de 9 000 m ainsi que dans les eaux douces et les eaux saumâtres. Ils vivent dans les eaux ouvertes, les fonds rocheux, sableux ou vaseux, dans les estuaires, dans les fleuves et dans les lacs, et jusque dans les eaux des cavernes. Ils sont pour la plupart prédateurs et se nourrissent de Poissons ou d'autres animaux aquatiques, mais il existe aussi des espèces herbivores ou filtreuses. LES CARACTÈRES. La différence fondamentale entre les Chondrichtyens et les Ostéichtyens tient, comme leur nom l'indique, à la structure de leur squelette, entièrement constitué de cartilage chez les premiers, plus ou moins ossifié chez les seconds. Un opercule recouvre les fentes branchiales chez les Poissons osseux, alors qu’il n’existe pas chez les Poissons cartilagineux. La peau présente de nombreuses glandes secrétant du mucus ; elle est recouverte d'écailles dermiques osseuses (derme) qui, à la différence de celles des Poissons cartilagineux, ont une croissance continue. On observe la présence de dents sur tous les os de la bouche et jusque sur la partie interne des branchies (dents pharyngées). Les Poissons osseux possèdent, en outre, une vessie natatoire, qui fonctionne comme organe 17 hydrostatique et qui permet au poisson de flotter dans l'eau sans avoir besoin de nager. La force des nageoires sert exclusivement à la nage et à la manœuvre. La vessie natatoire chez les Polyptères et chez les Dipneustes - Poissons archaïques très répandus au Paléozoïque et au Mésozoïque et dont ne survivent que peu d'espèces - fait office de poumons, alors que chez d'autres Poissons elle remplit la fonction d'organe de réception et d'émission des infrasons. Chez les Ostéichtyens, la respiration se fait par les branchies et la circulation est simple comme chez les Chondrichtyens. Chez les espèces d'eau douce, le taux de sel du corps est supérieur à celui du milieu. Pour maintenir leur équilibre interne, ils produisent une urine très diluée, dans laquelle est éliminé l'excédent d'eau ayant pénètré par osmose au travers des branchies et des muqueuses. Chez les espèces d'eau de mer, le problème est inverse : elles ont un taux de sel inférieur à celui de l'eau de mer. Elles doivent donc, pour maintenir leur équilibre interne, éliminer une urine très concentrée (elles retiennent l'eau, afin de garder une faible concentration saline). Ces mécanismes de régulation sont rendus possibles par des glandes spécialisées situées sur les branchies, qui servent à stocker ou à éliminer l'excédent de sel. Chez la plupart des Poissons osseux, les yeux sont adaptés à la lumière faible. De chaque côté du corps passe la ligne latérale, un sillon qui contient des récepteurs sensibles aux vibrations mécaniques (et non sonores) qui se propagent dans l'eau. Les Poissons osseux sont pour la plupart ovipares, même si on connaît de nombreux exemples de viviparité. La fécondation est normalement externe, à l'exception de certaines espèces qui possèdent des organes copulateurs et qui ont une fécondation interne. Chez certaines espèces, les œufs produisent des jeunes semblables aux adultes. Chez d’autres au contraire, les œufs donnent naissance à des alevins ou à des larves, qui ne prendront que plus tard la forme adulte. LES ADAPTATIONS. À l'intérieur du vaste groupe des Poissons osseux, on trouve des formes corporelles très diverses qui témoignent de l'adaptation de chaque espèce au milieu dans lequel elle vit. Le corps des nageurs actifs est fuselé. Les espèces qui vivent sur le fond ont le corps aplati. Les Poissons tels que les anguilles ont, au contraire, le corps allongé. Il existe aussi un grand nombre de Poissons de forme globulaire, comme le poisson-globe, ou quadrangulaire, comme le poisson-coffre ainsi que des Poissons de forme très bizarre, comme par exemple l'hippocampe. Quelques espèces sont dotées d'organes électriques, comme les torpilles (voir Chondrichtyens). C’est là un très bon exemple de convergences adaptatives. Beaucoup de ces Poissons effectuent des migrations saisonnières. Certains, comme les saumons, migrent de l'eau salée vers l'eau douce pour y pondre, alors que d'autres, comme les anguilles, font le contraire. Beaucoup de Poissons ont une coloration qui leur permet de se confondre avec le milieu, tandis que d'autres, comme le poisson-aiguille, se cachent grâce à la forme de leurs corps. Certaines espèces abyssales possèdent des organes lumineux qui servent probablement de signal sexuel et de reconnaissance intraspécifique. D'autres utilisent ces mêmes signaux pour capturer leurs proies ou pour fuir leurs prédateurs. LES AMPHIBIENS Les Amphibiens (ou Batraciens) représentent la première étape vers la conquête des terres émergées par les Vertébrés (voir L'évolution des Amphibiens). Ils ont été les premiers à développer l'aptitude à passer une partie de leur vie hors de l'eau. 18 En effet, les Amphibiens, au double point de vue morphologique et physiologique, ont des caractères qui se situent entre ceux des Poissons et ceux des Reptiles. De nombreux caractères tels que les pattes, les poumons, les narines qui communiquent avec la cavité buccale et leurs organes sensoriels, qui fonctionnent aussi bien dans l'eau qu'à l'air libre, leur permettent de s'adapter à la vie terrestre. D'autres caractères en revanche, tels que leur phase larvaire aquatique et leur peau fine et richement vascularisée, les rendent au moins partiellement dépendants de l'eau. À quelques rares exceptions près, la présence des Amphibiens se limite aux milieux d'eau douce. Le nombre d'espèces est assez réduit (3 400 seulement) comparé à celui des autres groupes de Vertébrés. En ce qui concerne leur rôle trophique, les Amphibiens sont pour la plupart des prédateurs d'Insectes. Ils sont aussi la proie de nombreux autres Vertébrés, y compris de l'homme. Les Amphibiens se divisent en trois grands groupes systématiques : les Anoures (dépourvus de queue), qui comprennent les crapauds et les grenouilles ; les Urodèles (qui possèdent une queue) représentés par les tritons et les salamandres, et les Apodes (sans pattes), animaux vermiformes liés aux sols humides des milieux tropicaux. Les caractères Les Amphibiens présentent quelques caractéristiques qui les rendent facilement reconnaissables. Leur peau est humide et dépourvue d'écailles. Les quatre membres, quand ils sont présents, sont adaptés aussi bien à la nage qu'au déplacement terrestre. Les narines, externes, communiquent avec la cavité buccale. Elles sont pourvues de valves fondamentales pour la respiration, qui chez les adultes, se fait par aspiration d'air. Les yeux sont pourvus de paupières, et la bouche possède de petites dents et une langue souvent protractile (qui peut être étirée vers l’avant). En ce qui concerne la circulation, on assiste à un début de division entre la circulation veineuse et la circulation artérielle. La composition chimique des déchets du métabolisme est indicative d’une bonne adaptation à la vie terrestre. Le principal produit rejeté par les Amphibiens est l'urée, moins toxique que l'ammoniac que les Poissons éliminent. Les Amphibiens se partagent entre une existence aquatique et une existence terrestre. Le mode de vie aquatique est représenté par la phase larvaire et s’accompagne d’une respiration branchiale (appareil respiratoire). Le mode de vie terrestre correspond à la phase adulte. Les Amphibiens atteignent leur développement complet au terme d'une véritable métamorphose, caractéristique presque unique chez les Vertébrés. Durant leur cycle de vie, ils acquièrent tous les caractères nécessaires à l'adaptation à la vie terrestre, en passant par des stades de développement successifs durant lesquels les branchies sont résorbées et les membres se développent. Les œufs sont généralement pondus dans l'eau. La fécondation peut être externe (chez les Anoures) ou bien interne (chez les Urodèles et les Apodes). À partir de l'œuf fécondé se développent des larves aquatiques, un peu semblables aux Poissons. Ensuite, de profondes modifications, qui permettent à l'animal de s'adapter à la vie terrestre, se produisent au niveau des différents systèmes anatomiques et fonctionnels. Les adaptations 19 Chez les Amphibiens, le risque de déshydratation est particulièrement marqué, car leurs structures épidermiques ne sont pas adaptées au milieu terrestre. Cette vulnérabilité explique l'apparition de certaines particularités physiologiques et comportementales durant leur histoire évolutive. L'épiderme est pourvu d'un grand nombre de glandes muqueuses : le mucus secrété humecte la peau en permanence. Chez certains Amphibiens (Salamandridés ou Bufonidés), des glandes séreuses produisent un venin (bufalotoxine) contenant des alcaloïdes toxiques et constituant une protection contre les prédateurs. De nombreux Amphibiens, principalement ceux qui vivent dans des milieux chauds et secs, mènent une vie nocturne afin de profiter des heures fraîches et humides. Durant le jour, ils restent dans l'eau ou ensevelis dans la terre humide. Ce milieu leur est plus favorable, et leur permet de maintenir un degré d'humidité corporelle élevé. Certaines espèces ont développé des adaptations particulières qui permettent la reproduction et la survivance des larves hors de l'eau. C'est le cas de certaines rainettes-kangourous arboricoles appartenant au genre Gastrotheca, répandues dans les forêts pluviales d'Amérique Centrale et d'Amérique du Sud, qui couvent les œufs dans des replis de la peau de leur dos jusqu'à la naissance des jeunes. Les Anoures GÉNÉRALITÉS. L'ordre des Anoures comprend les grenouilles, les crapauds et les rainettes, animaux qui par la forme de leurs corps, représentent le prototype même des Amphibiens : un corps ramassé et dépourvu de queue, une grosse tête, des yeux proéminents et une large bouche. Leur corps ramassé et leurs membres postérieurs, plus longs et plus robustes que leurs membres antérieurs, servent au saut. La plupart des Anoures ont des paupières qui lubrifient et protégent leurs yeux, et chez beaucoup d'espèces, la langue peut être étirée hors de la cavité buccale afin de capturer les Insectes. Les adultes n'ont pas de branchies, mais des poumons. La fécondation est généralement externe et les œufs sont pondus dans l'eau. Le stade larvaire, dépourvu de membres, prend le nom de têtard. Il existe plus de 3 000 espèces d'Anoures, subdivisées en 17 familles réparties dans le monde entier, sauf dans l'Antarctique. Elles sont particulièrement nombreuses et diversifiées dans les zones au climat chaud et humide. LES ADAPTATIONS. Sur la terre ferme, les Anoures se déplacent par sauts. C'est un type de locomotion qui est certainement le fruit d’une évolution imposée par la nécessité de fuir rapidement les prédateurs terrestres en plongeant dans l'eau. Afin de développer cette aptitude au saut, le corps est devenu compact et les membres postérieurs se sont allongés, formant avec les os du tronc un système de levier très efficace, constitué de cinq articulations. Dans l'eau, les Anoures nagent en fléchissant et en étendant alternativement les pattes postérieures, munies de membranes interdigitales, exerçant ainsi une poussée sur l'eau. Les yeux des Anoures sont capables de voir simultanément dans presque toutes les directions, et leur vision est bonne aussi bien de jour que de nuit. Les tympans sont reliés à l'oreille interne par un os, la columelle, qui permet la transmission des sons. En effet, chez beaucoup d'Amphibiens, la voix est un important moyen de communication. Au stade larvaire (têtard), les Anoures sont d’abord végétariens puis carnivores, alors que les adultes sont essentiellement carnivores. L'organe destiné à la capture des proies, Insectes pour l'essentiel, est la langue, visqueuse, 20 qui peut être rapidement étirée car elle est reliée antérieurement au bas de la cavité buccale. Chez beaucoup d'espèces, le mâle adulte se différencie de la femelle par des caractères sexuels secondaires très affirmés. Les muscles des membres supérieurs sont plus robustes, les doigts internes sont plus courts et plus larges et présentent des « coussinets nuptiaux », parties épaisses et rugueuses qui servent à agripper la femelle durant l'accouplement. Ces différences sont déterminées par les hormones sexuelles. Chez les espèces répandues dans les zones tempérées, la reproduction commence à la fin de l'hiver, lorsque les mâles, après être entrés dans l'eau, coassent pour attirer les femelles. Chaque femelle qui a atteint l’eau à son tour est rejointe par un mâle qui s'accroche à son dos en lui tenant les flancs à l’aide de ses « coussinets nuptiaux ». Lorsque la femelle lâche les œufs, le mâle y répand ses spermatozoïdes pour les féconder. Les œufs sont déposés sous forme d'amas flottants ou bien adhèrent aux corps submergés grâce à leur revêtement gélatineux. Les œufs donnent naissance aux têtards, qui possèdent une queue munie de nageoires, un système de ligne latérale, trois paires de branchies, et sont dépourvus de membres. Au bout de quelques jours, les branchies externes sont remplacées par des branchies internes. Ensuite, les membres se développent, alors que la queue ne disparaît qu'à la fin de la métamorphose. Les Urodèles GÉNÉRALITÉS. L'ordre des Urodèles (du grec oura « queue » et dêlos « apparent ») doit son nom au fait que ces Amphibiens conservent durant toute leur vie une longue queue. Cet organe leur sert aussi bien de moyen de propulsion pour la nage que de moyen de poussée pour la locomotion terrestre. Les Urodèles, comme tous les Amphibiens, ont besoin du milieu aquatique pour se reproduire et pour garder un bon degré d'hydratation corporelle. La fécondation interne est une des caractéristiques des Urodèles. Celle-ci ne se fait pas à l’aide d'organes reproducteurs, mais au moyen d'un spermatophore, autrement dit d'une poche contenant des spermatozoïdes, que le mâle émet et que la femelle recueille en l'introduisant dans ses voies génitales. À éclosion, les œufs, qui sont cachés sous les feuilles de plantes aquatiques, donnent une larve carnivore dont l'aspect n'est pas très différent de celui de l'adulte, hormis la présence de branchies externes. On trouve les Urodèles essentiellement dans l'hémisphère Nord. Il en existe environ 300 espèces, divisées en 8 familles. LES ADAPTATIONS. Les Urodèles ont développé des rituels complexes de parade nuptiale, afin de faciliter le transfert du spermatophore (voir paragraphe précédent), au moyen duquel a lieu la fécondation interne. Chez les espèces essentiellement aquatiques comme le triton, ce transfert se fait dans l'eau. Chez les salamandres, qui représentent, dans ce groupe, le degré d'indépendance maximum par rapport à l'eau, le spermatophore est déposé sur un terrain humide et la femelle y est entraînée par le mâle. Chez certaines espèces de salamandres, la femelle conserve les embryons dans son corps , ils se nourrissent du jaune de l'œuf et elle accouche de jeunes déjà métamorphosés. Parfois, certains Urodèles ne finissent pas leur cycle de développement et restent à l'état de larve jusqu'à la saison suivante. D'autres, au contraire, comme les espèces appartenant aux familles des Protéidés et des Sirénidés, gardent leurs branchies durant toute leur vie. 21 Les Apodes GÉNÉRALITÉS. Les Apodes, ou Gymnophiones, constituent un ordre d'Amphibiens qui se caractérise par l'absence totale de membres. Une des autres caractéristiques de ce groupe est d'avoir le corps parcouru de sillons transversaux qui, à première vue, rappellent un peu ceux des vers de terre. Leur vie se déroule essentiellement dans un sol humide. Ils présentent donc une atrophie des yeux, que compense un bon développement de l'odorat. Les Apodes ont une fécondation interne. Chez les mâles, le cloaque (cavité dans laquelle débouchent aussi bien l'anus que les orifices génitaux) peut être projeté au dehors pour former un organe de copulation. Le développement des embryons se fait à l'intérieur du corps maternel. Les Apodes habitent les forêts tropicales, où ils vivent dans la terre et dans les troncs pourrissants. On en connaît plus de 160 espèces, réparties en 6 familles. LES ADAPTATIONS. Certains aspects des modalités de reproduction des Apodes reflètent l'adaptation à des conditions de vie particulières. Dans la famille des Ichthyophidés, par exemple, les adultes vivent sur la terre mais déposent les œufs à proximité de l'eau dans des terriers, où se développent les larves. Les Typhlonectidés, au contraire, vivent dans l'eau, même durant la phase adulte. Chez les Cécilies, les œufs sont pondus dans une cavité creusée dans la terre. Dans certains cas, il n'y a pas du tout de phase aquatique, et le nouveau-né, après avoir perdu ses branchies dans l'œuf, respire avec ses poumons lors de l'éclosion de l'œuf. LES REPTILES Les Reptiles sont les premiers Vertébrés à avoir définitivement conquis les milieux terrestres. Les espèces actuellement vivantes - 6 500 environ - sont réunies en quatre ordres : les Chéloniens, plus connus sous le nom de tortues, les Squamates dont font partie les Sauriens (lézards et autres) et les Ophidiens (tous les serpents), les Crocodiliens et les Rhynchocéphales, avec deux espèces vivantes seulement du genre Sphenodon. Deux caractéristiques principales ont permis aux Reptiles de s'affranchir de l'eau. D'une part, une épaisse couche cornée sur la peau, qui sauve l'adulte de la déshydratation et, surtout, la présence de l'amnios, une membrane qui enveloppe l'embryon et le protège en le gardant hydraté à l'intérieur de l'œuf. Les Reptiles sont donc capables de vivre dans des zones particulièrement arides ou désertiques, dans lesquelles dominent habituellement les Vertébrés diurnes. La plupart des Reptiles vivent dans les zones tropicales et subtropicales. Les serpents et les tortues sont plus nombreux dans les zones humides, et les Sauriens plus abondants dans les zones arides. Les serpents, par exemple, grâce à leur forme fuselée et à leurs récepteurs chimiques particulièrement développés, sont devenus les principaux Vertébrés prédateurs souterrains des milieux arides. La variété des habitats occupés par les Reptiles est très grande. Les grands serpents comme les pythons et les boas peuplent les forêts tropicales ; les crocodiles vivent dans les marécages, dans les fleuves et dans les mers côtières des tropiques ; les tortues marines sont des prédateurs océaniques, alors que les tortues géantes pâturent sur les îles océaniques ; les serpents marins (hydrophidés) nagent dans les mers tropicales. Les Reptiles sont pour la plupart des carnivores, mais parmi les 22 Chéloniens on trouve de nombreuses espèces qui se nourrissent de végétaux. Dans les régions tropicales, les Reptiles sont actifs toute l'année alors que dans les régions tempérées, ils ne sont actifs que durant les périodes les plus chaudes. L'œuf Les Reptiles survivent et se reproduisent même dans des lieux arides, grâce à leurs œufs qui, comme leur corps, sont imperméables et peuvent donc être pondus à terre, dans des trous ou parmi des détritus végétaux. L'œuf des Reptiles, protégé par une coquille robuste, fournit la nourriture de l'embryon (il est riche d'une grande quantité de jaune d'œuf) et forme des structures extra-embryonnaires qui enveloppent et protègent l'embryon : l'amnios, le chorion et l'allantoïde. L'amnios qui a donné le nom d'amniotes à tous les Vertébrés qui en sont pourvus - est une membrane qui enveloppe l'embryon. Elle est remplie d'un liquide séreux, le liquide amniotique, qui maintient l’humidité et protège des chocs. L'embryon trouve dans l'œuf un milieu aquatique identique à celui dans lequel se développent les Poissons et les Amphibiens. Le chorion, situé juste au-dessous de la coquille, est une membrane externe qui sert à la respiration. L'allantoïde est une membrane vascularisée qui se développe comme un diverticule de l'intestin. Elle se situe entre l'amnios et le chorion et sert à l'excrétion et à la respiration. La peau La résistance cutanée des Reptiles à la déshydratation est plus importante que celle des Amphibiens. La peau est épaisse et recouverte d'écailles cornées (c’est-àdire formées de kératine, une protéine fibreuse contenant du soufre) mais elle possède peu de glandes. La peau des Reptiles est constituée de plusieurs couches de cellules. Celles-ci se forment dans la couche la plus profonde et au fur et à mesure qu'elles migrent vers la surface, elles subissent la cornéification, c'est-à-dire qu'elles s'aplatissent en produisant une quantité croissante de filaments de kératine, et meurent en formant une couche externe rigide de la peau, imperméable et élastique. Chez les Squamates (lézards, geckos, iguanes, serpents, etc.), la peau se présente sous sa forme la plus simple, mais dans certains cas, par exemple chez les crocodiles et les tortues, elle peut être rendue plus robuste par des formations osseuses. Autres caractères En dehors de l'œuf et de la peau, les Reptiles disposent d’autres caractéristiques les rendant bien adaptés à la vie sur les terres émergées : 1) des ongles, qui protègent les doigts et assurent une bonne prise pour la locomotion ; 2) un organe de copulation (souvent bifide) qui assure le transfert du sperme lors de l'accouplement ; 3) une excrétion, qui répond à des mécanismes particuliers d'économie de l'eau ; 4) un rythme biologique spécifique qui garantit une phase active lors des heures les plus chaudes de la journée ; 5) une langue qui permet la diffusion de messages chimiques vers les organes des sens (fonction qui, chez les Amphibiens, est remplie par l'eau). En outre, chez les 23 Reptiles, la division entre la circulation sanguine veineuse et artérielle est plus perfectionnée que chez les Amphibiens. Les adaptations Les Reptiles, comme les Amphibiens et les Poissons, ne disposent pas de mécanismes thermorégulateurs comme ceux qui existent chez les Oiseaux et les Mammifères. Le maintien de la température corporelle à l'intérieur de certaines limites est cependant fondamental pour permettre le déroulement des activités normales, comme la recherche de nourriture et l'accouplement. Les techniques adoptées pour pallier ce problème varient selon les espèces : 1) la superficie corporelle exposée au soleil peut faire l'objet de variations ; 2) une grande quantité de chaleur peut être dissipée à travers l'air expiré ; 3) la chaleur peut être absorbée par dilatation des vaisseaux sanguins périphériques, ou bien retenue par constriction des vaisseaux ; 4) la fréquence des battements du cœur peut augmenter au cours du réchauffement, accélérant ainsi l'absorption de chaleur, et diminuer au cours du refroidissement, pour en limiter les pertes. Les Chéloniens GÉNÉRALITÉS. L'ordre des Chéloniens, auquel appartiennent les tortues marines et les tortues terrestres et d'eau douce, présente une caractéristique remarquable : la présence d'une cuirasse robuste formée de plaques osseuses cutanées et recouverte d'écailles cornées (voir peau des Reptiles) qui enveloppe le corps et qui est soudée à certaines parties du squelette (vertèbres et cage thoracique). Dans presque toutes les espèces, la tête, les membres et la queue sont rétractables dans la carapace afin d’assurer la défense contre les dangers. La tête peut rentrer de deux manières à l'intérieur de la carapace. Dans la plupart des espèces, le cou décrit une courbe en S sur un plan vertical, alors que dans les formes plus primitives, le cou accomplit ce mouvement sur un plan horizontal en se pliant latéralement. Une autre caractéristique des Chéloniens est la présence d’un bec corné qui remplace les dents. Les Chéloniens, dont on a décrit environ 210 espèces réparties en 12 familles, peuplent les mers, les eaux douces des fleuves, lacs et marécages et les milieux terrestres les plus variés, des déserts aux forêts tropicales humides. La ponte des œufs se fait toujours sur la terre ferme, même chez les espèces aquatiques. L'alimentation est très variable selon les espèces. Les tortues aquatiques sont pour la plupart carnivores alors que les tortues terrestres sont généralement végétariennes. LES ADAPTATIONS. C’est l’adaptation à la vie soit aquatique soit terrestre qui différencie le plus les Chéloniens entre eux. Chez les espèces terrestres, les pattes sont courtes, alors que chez les espèces marines, les membres sont transformés en battoirs adaptés la nage. En revanche, les pattes des tortues des marais et d'eau douce présentent des caractéristiques intermédiaires, qui permettent à l'animal de marcher et de nager aussi habilement. Les tortues aquatiques respirent en remontant de temps en temps à la surface. Certaines espèces, qui hivernent dans des plans d'eau gelée en surface, disposent 24 de poches reliées au cloaque et dotées de fines parois : elles servent de branchies lorsque l'animal est immergé. Les Squamates : Sauriens et Ophidiens GÉNÉRALITÉS. L'ordre des Squamates comprend les lézards, les iguanes, les caméléons, les geckos, etc., c’est-à-dire les Sauriens, et les serpents ou Ophidiens. Tous ont le corps complètement revêtu d'écailles cornées. Il se divise en deux sous-ordres : les Sauriens et les Ophidiens. On a longtemps considéré que la principale différence entre les deux groupes résidait dans la présence ou l'absence de pattes. Aujourd'hui, on considère plus importante la forme du crâne et celle des vertèbres. Chez certains Sauriens en effet, les membres sont réduits ou absents (par exemple chez l'orvet), alors que quelques Ophidiens présentent de minuscules rudiments de pattes (par exemple les pythons). Les Squamates sont les Reptiles les plus nombreux et les plus modernes. Ils comprennent la majorité des formes actuellement vivantes, avec plus de 5 700 espèces (3 000 Sauriens et 2 700 Ophidiens), distribuées en 30 familles. LES SAURIENS. Les Sauriens, qui comprennent des animaux assez communs tels que les lézards et les geckos, présentent des formes de corps diverses. De nombreuses espèces sont longilignes, certaines sont comprimées latéralement, d'autres sont aplaties au niveau du dos. Les membres peuvent être longs et robustes, ténus ou absents. La peau des Sauriens est flexible et possède des écailles imbriquées comme les tuiles d'un toit. Dans le derme, on trouve des cellules spécialisées qui permettent à la peau de changer de couleur. Les mâchoires sont pourvues de dents. Chez les Sauriens qui se déplacent rapidement, la queue sert de contrepoids ; elle est donc longue et fine. En revanche, chez les espèces qui se déplacent lentement, la queue est courte et ramassée. Chez beaucoup de Sauriens, il existe un mécanisme, l’autotomie, qui occasionne la rupture réflexe de la queue lorsque celle-ci est saisie. Il est rendu possible grâce à un « point de rupture » spécial, constitué de vertèbres non ossifiées, qui permet à l'animal de se sauver, en laissant seulement l’extrémité de la queue au prédateur. De nombreux Sauriens présentent des comportements très élaborés de défense territoriale ou de parade nuptiale ; ils sont rendus spectaculaires par les couleurs vives des mâles. Les rituels de cour sont différents selon les espèces. Ils permettent la reconnaissance des partenaires et facilitent la communication intraspécifique chez ces animaux pour la plupart dépourvus de voix. LES OPHIDIENS. L'absence de pattes est un caractère - le plus frappant - que les Ophidiens partagent, au sein des Vertébrés terrestres, avec des lézards et des Amphibiens dits « apodes ». Si la ceinture pectorale leur fait défaut, la ceinture pelvienne subsiste à l'état vestigial chez certaines espèces, et peut même être prolongée par des éperons ou des griffes, reliquats de membres postérieurs. Le crâne est adapté pour avaler des proies entières, parfois volumineuses: la boîte crânienne demeure souvent la seule partie solide, tandis que les maxillaires supérieurs et inférieurs ne sont plus réunis au crâne que par des ligaments élastiques. De plus, les deux moitiés de la mandibule sont légèrement mobiles l'une par rapport à l'autre. Les dents, coniques, sont plus ou moins pointues et recourbées vers l'arrière; fixées directement dans l'os, elles sont remplacées de 25 façon alternative, et ne servent qu'à la préhension des proies. Les « crochets » des espèces venimeuses sont le plus souvent parcourus par un canal ou par un sillon. Un important caractère de l'anatomie des Ophidiens est la complète disparition du poumon gauche - il subsiste à l'état réduit chez les Boïdés et les Xénopeltidés -, tandis que le poumon droit est extrêmement allongé et s'étend presque d'un bout à l'autre du corps du serpent. Les organes des sens des serpents sont inégalement développés. Les yeux sont recouverts en permanence par une paupière inférieure transparente et soudée à une paupière supérieure vestigiale, de sorte que les serpents sont incapables de « fermer » les yeux. Leur vision n'est pas très bonne au-delà d'une certaine distance, sauf pour détecter un mouvement. Le cristallin est sphérique, et la pupille est, selon les espèces, ronde ou étroite et verticale. Plusieurs familles d'Ophidiens comprennent des espèces aveugles, dont les yeux, rudimentaires, sont cachés sous les écailles de la peau. Il est classique de dire que les Ophidiens sont sourds et qu'ils sont, par exemple, insensibles à la musique des « charmeurs » de serpents. En fait, leur oreille moyenne est quasi inexistante, mais ils peuvent détecter les sons produits dans la terre, à défaut de percevoir ceux transmis par l'air, sauf, peut-être, si ces derniers sont de basses fréquences: il semble qu'ils les reçoivent alors par conduction osseuse ou par l'intermédiaire de terminaisons nerveuses situées dans la peau. Un organe primordial est celui dit de Jacobson, ou organe voméronasal; situé sous les fosses nasales, et communiquant avec la cavité buccale, c'est un récepteur chimique capable de détecter de minuscules particules. Une hypothèse tend à faire coïncider deux faits, la forme bifide de la langue et le développement de l'organe de Jacobson : la langue amènerait les particules adhérant à sa surface jusqu'à l'organe de Jacobson, dans lequel elle ferait pénétrer, en rentrant dans la bouche, ses deux extrémités; les particules chimiques seraient alors identifiées. Certains serpents sont dotés d'organes détecteurs de chaleur : chez beaucoup de Boïdés, ce sont des fossettes sensorielles placées le long de la lèvre supérieure ; chez les Crotalidés, ce sont de véritables fossettes faciales (dépressions composées de deux chambres, une interne et une externe), localisées entre la narine et l'œil. D'une très grande sensibilité aux variations de température, ces dernières servent à localiser les proies « à sang chaud » (animaux homéothermes). Le cœur des Ophidiens présente deux oreillettes et un seul ventricule, comme chez la plupart des Reptiles. L'imagerie populaire représente souvent les serpents ondulant verticalement. En réalité, comme les autres Reptiles, ils ondulent dans le sens latéral, et leurs grandes plaques ventrales leur permettent de s'ancrer au sol. Ils ondulent aussi latéralement quand ils nagent. En fait, l'animal contracte et relâche en alternance des muscles situés de chaque côté de son corps, ce qui donne l'impression de « vagues » le parcourant. Cependant, les Ophidiens ont aussi à leur disposition d'autres modes de locomotion. Ainsi, ils peuvent progresser en ancrant la partie antérieure de leur corps, puis en avançant le reste de celui-ci au prix de fortes ondulations, et ainsi de suite. Dans le mouvement rectilinéaire, qui s'observe chez les boas et les crotales notamment, le serpent progresse presque sans ondulations, grâce à un glissement aller et retour de la peau sur les muscles. Enfin, les serpents des déserts utilisent la locomotion latérale, au cours de laquelle l'animal recourbe son corps en S, ne touchant le sable qu'en deux endroits. Puis il fait progressivement « glisser » ces deux points de contact le long de son corps, vers l'arrière, en avançant vers l'avant : le déplacement est alors latéral par rapport à l'axe du corps. La vitesse des serpents peut atteindre 6 km/h, le record étant détenu par les mambas avec 11 km/h. Chez les espèces venimeuses, le venin possède une double fonction. D'une part, il permet d'immobiliser la proie et d'autre part, de commencer à la digérer avant 26 même que celle-ci ne soit avalée. Parmi les 2 700 espèces d'Ophidiens actuellement vivants, 800 seulement sont dangereuses pour l'homme. Les Crocodiliens GÉNÉRALITÉS. Les crocodiles sont les plus grands Reptiles vivants. Leur longueur peut atteindre 7 m, voire plus. Leur corps ressemble à celui d'un gros lézard. Il est recouvert de grandes plaques cornées renforcées par des formations osseuses (voir peau des Reptiles). La position de leurs narines et de leurs yeux est très caractéristique. Ces derniers sont situés en position dorsale et émergent à fleur d'eau lorsque l'animal est dans l'eau. Les crocodiles nagent rapidement grâce à la poussée de leur queue puissante. Sur la terre, au contraire, ils se déplacent lentement et maladroitement. Pour capturer leur proie, ils dépendent étroitement de l'eau. Ils vivent tous dans les grands lacs et fleuves tropicaux. On en compte 23 espèces réparties en trois familles. LES ADAPTATIONS. Les crocodiles passent une grande partie de leur temps dans l'eau, prêts à attraper des Poissons, des Amphibiens et des Reptiles. Les espèces les plus grosses sont spécialisées dans la chasse des Mammifères et des Oiseaux qui viennent s'abreuver. Ils peuvent avaler de grosses proies et rester longtemps sans manger. Grâce à la distribution particulière de l'air dans leurs poumons, ils peuvent nager ou flotter, le tronc incliné vers le bas et la tête à fleur d'eau, afin de limiter les risques d'être repérés. La durée de l'apnée dépend des dimensions de l'animal, mais elle peut aller jusqu'à une heure. L'oreille peut être fermée par une valve, à la différence de tous les autres Reptiles. Les œufs sont pondus dans des trous creusés dans la terre, sur les rives sableuses ou argileuses, et les femelles, dans certains cas, dispensent des soins parentaux à leur progéniture. Les crocodiles fréquentent parfois les estuaires des fleuves. Le crocodile marin (Crocodylus porosus) s'est adapté à la vie en mer. LES OISEAUX Les Oiseaux constituent une classe de Vertébrés que l'on peut définir ainsi : ce sont des tétrapodes (ils ont quatre membres) amniotes (leur embryon présente un amnios) sauropsidés (parents des Reptiles) bipèdes (ils marchent sur deux pattes) ovipares (ils pondent des œufs, qu'ils couvent) homéothermes (ils ont une température constante). Enfin, dans tout le règne animal ce sont les seuls à posséder des plumes. Les Oiseaux peuplent pratiquement tous les milieux naturels terrestres. En montagne, les chocards peuvent vivre au sommet du mont Everest, lequel est survolé par des oies lors de leur migration entre la Sibérie et l'Inde. Les déserts, y compris les zones les plus hostiles à la vie, hébergent des traquets, des gangas et bien d'autres espèces au plumage souvent couleur sable, ce qui facilite leur dissimulation. Les Oiseaux abondent sur les côtes, dans les marais, au bord des étangs, dans les forêts équatoriales... Ils ont su s'adapter aux milieux créés par l'homme : ainsi le bocage avec son quadrillage de haies leur est-il très favorable. Ils sont également fort nombreux dans les villes et les banlieues : en Europe, la densité des Oiseaux est nettement supérieure en milieu urbain qu'en forêt. Les Oiseaux actuels sont regroupés en 9 000 espèces environ, mais d'autres sont 27 découvertes assez régulièrement. Jadis, ils étaient classés en Coureurs, Échassiers, Palmipèdes, Gallinacés, Rapaces, Colombins et Passereaux. Ces termes, toujours utilisés dans le langage courant et par les ornithologistes, correspondent pour la plupart à des ensembles artificiels, dans lesquels certaines espèces (coucous, martinets, etc.) n'entrent pas. Aussi sont-ils abandonnés par les systématiciens qui élaborent la classification moderne ; de plus, celle-ci risque d'être bouleversée par les études génétiques qui auraient mis en évidence des liens de parenté entre, d'une part, les cigognes et les vautours américains et, d'autre part, les hérons et les cormorans. On classe les Oiseaux selon les ordres suivants : Ratites, Tinamiformes, Sphénisciformes, Gaviiformes, Podicipédiformes, Procellariiformes, Pélécaniformes, Ciconiiformes, Ansériformes, Falconiformes, Galliformes, Ralliformes, Charadriiformes, Columbiformes, Psittaciformes, Cuculiformes, Strigiformes, Caprimulgiformes, Apodiformes, Coraciadiformes, Piciformes, Passériformes. Les caractères Le bec, les ailes, les plumes et le port bipède sont les caractéristiques les plus frappantes chez les Oiseaux. Le bec est constitué par deux mandibules, revêtues d'une gaine cornée, très dure, la rhamphothèque, qui est sécrétée par l'épiderme ; il arrive, comme chez les pétrels, qu'elle soit formée de pièces distinctes juxtaposées. Dépourvu de dents excepté chez certains Oiseaux fossiles -, le bec présente une immense variété de formes : fin, conique, allongé, crochu, recourbé vers le bas ou vers le haut, en cuiller, etc. Les narines s'ouvrent à la base de la mandibule supérieure, à l'endroit où, chez les Rapaces diurnes, les pigeons et les perroquets, se trouve une peau épaisse, la cire. Comme la rhamphothèque, les écailles (ou scutelles), qui recouvrent les pattes, et les plumes sont produites par la peau. Une plume est typiquement constituée de trois parties : le calamus, tuyau transparent et creux fiché dans l'épiderme ; il se prolonge par une tige, le rachis, qui porte les barbes, sortes de lamelles accrochées entre elles par un système compliqué de barbules lisses ou à crochets. Le duvet, premier plumage des poussins, existe aussi chez les adultes sous forme de simples touffes de barbes dépourvues de rachis. Les plumes sont réparties en trois catégories principales : les rémiges, grandes plumes des ailes, dont le rôle est capital dans le vol ; les rectrices, plumes de la queue, dont la fonction au cours du vol est celle d'un gouvernail ; et les autres plumes, appelées tectrices, parmi lesquelles on place d'extraordinaires plumes ornementales caractéristiques de beaucoup d'espèces. Contrairement à ce qu'il semblerait, les plumes ne sont pas uniformément réparties à la surface du corps de l'oiseau : elles ne poussent que sur certaines zones de la peau, les ptérylies, et recouvrent ainsi les aptéries, surfaces où la peau est nue. Le nombre de plumes d'un oiseau varie énormément : 900 environ pour un colibri, 12 000 pour un canard. Elles doivent leur couleur aux pigments contenus dans les barbes - en excès, les pigments sont à l'origine du mélanisme, tandis que leur absence produit l'albinisme. Curieusement, le pigment bleu n'existe pas chez les Oiseaux, mais la couleur bleue apparaît grâce au phénomène de réfraction de la lumière sur les barbes des plumes. Lors de la mue, les plumes tombent et sont remplacées par d'autres. Aussi le plumage juvénile est-il souvent différent de celui de l'adulte. De plus, contrairement aux espèces dont le plumage est identique toute l'année, d'autres ont une livrée printanière, ou plumage « nuptial », plus colorée que l'automnale. Et nombreux sont les Oiseaux chez 28 lesquels mâle et femelle présentent des plumages différents. Le squelette des Oiseaux a des particularités importantes : des os creux, dits pneumatisés, qui contribuent à diminuer la densité de l'animal ; un nombre de vertèbres cervicales très variable ; deux clavicules soudées en une « fourchette » ; l'ulna de l'aile plus robuste que le radius ; une main à trois doigts seulement ; un sternum prolongé vers l'avant par un bréchet, sur lequel s'insèrent les muscles des ailes ; une cage thoracique très solide. Les membres postérieurs, autrement dit les pattes, se terminent par quatre doigts, dont trois sont dirigés vers l'avant, le quatrième, ou pouce, l'étant vers l'arrière. Toutefois, cette disposition n'est pas un caractère commun à toutes les espèces : chez les pics et les perroquets, par exemple, deux doigts sont orientés vers l'avant et deux vers l'arrière. Enfin, le tibia et la fibula sont soudés ; ces éléments, qui avec le tarso-métatarse (ou tarse) constituent la patte, montrent un allongement important chez les Oiseaux coureurs (autruche) et ceux vivant au bord des eaux (héron). L'extrémité postérieure de la colonne vertébrale a fusionné et forme le pygostyle (ou croupion). Le tube digestif comprend deux organes remarquables, un jabot et un gésier. Le premier est un réservoir à nourriture faisant partie de l'œsophage ; chez les pigeons, il sécrète une matière épaisse et crémeuse, le « lait », qui contient des suspensions jaunâtres de la grosseur d'un grain de riz et qui sert à nourrir les jeunes. Le gésier, qui joue le rôle d'une meule lors du broyage des graines avant leur digestion, est la partie musculaire de l'estomac. L'appareil respiratoire (trachée/bronches/poumons) n'est pas un système clos : il est prolongé jusque dans les os, creux, par des sacs aériens (abdominaux, cervicaux, huméraux, pré- et post-thoraciques), raccordés aux bronchioles. Mentionnons encore deux organes particuliers : les deux glandes uropygiennes et la bourse de Fabricius. Les premières, situées sur le croupion (ou bas du dos), produisent une substance graisseuse avec laquelle l'oiseau, qui auparavant s'en est enduit le bec, lisse son plumage. Quant à la bourse de Fabricius (comparable au thymus des Mammifères), c'est une sorte de vésicule, appendue au cloaque, et qui participerait à la formation des lymphocytes. Les sens ont, chez les Oiseaux, une importance inégale. L'odorat est extrêmement réduit, à l'exception de celui du kiwi. Cependant, des observations ont montré que certaines espèces étaient sensibles aux odeurs. L'ouïe est au contraire très subtile les Oiseaux, dépourvus d'oreilles externes, ont des orifices dissimulés par les plumes. L'acuité visuelle est excellente, mais, selon les espèces, inférieure ou supérieure à celle de l'homme. La disposition des yeux, de chaque côté de la tête (sauf pour les Rapaces nocturnes, chez lesquels la position antérieure des yeux leur confère une vision binoculaire), offre aux Oiseaux un champ visuel étendu, jusqu'à 270º dans certains cas. Très gros, les yeux ont en général une forme « en brioche », tandis que ceux des chouettes et des hiboux sont de forme tubulaire. L'œil contient un peigne, sorte de lame plissée située au niveau du nerf optique et dont la fonction est mal définie. La rétine comporte une, ou parfois deux, fovéas et des cônes en plus grand nombre que les bâtonnets - c'est l'inverse chez les Rapaces nocturnes. La buse, par exemple, qui possède, dans sa fovéa, environ 1 million de cônes par millimètre carré, aurait une acuité visuelle huit fois supérieure à la nôtre. La reproduction des Oiseaux s'entoure de rites nuptiaux très variés et implique l'édification de nids, habitations d'une diversité sans égale dans le règne animal. Les Oiseaux couvent leurs œufs en les couvrant de leur corps. Cette incubation peut être effectuée soit par la femelle seule, soit par les deux parents alternativement, ou encore, mais c'est plus rare, par le mâle seul. La peau du 29 ventre des couveurs se déplume et se modifie pour former des plaques incubatrices qui réchauffent les œufs. La durée de la couvaison est très approximativement proportionnelle à la taille de l'espèce : 13 jours chez le moineau, 18 chez la pie, 21 chez la poule, 30 chez la buse, 60 chez l'albatros. Peu avant l'éclosion, un « diamant » apparaît à l'extrémité du bec du poussin terme appliqué à tous les jeunes Oiseaux, et pas seulement à ceux de la poule domestique : c'est une saillie dure qu'il utilise pour briser la coquille de l'œuf. À la naissance certains poussins - ceux des passereaux, perroquets, pigeons, martinets, etc. - sont nus, ou presque, et aveugles. Ils sont nourris par les deux parents (ou, parfois, la femelle seule), qui apportent la becquée. Ces poussins sont dits nidicoles, comme ceux des Rapaces et des grands Échassiers, qui pourtant éclosent emplumés. Au contraire, les poussins des Gallinacés et de la plupart des Oiseaux d'eau sortent de l'œuf non seulement emplumés, mais capables de courir, et éventuellement de nager. Ces poussins sont dits nidifuges, ce qui ne les empêche pas de demeurer quelque temps sous la dépendance des adultes ; en effet, si les canetons qui suivent la cane - exemple bien connu - se nourrissent seuls, ce n'est pas le cas de nombreux poussins nidifuges. Les ailes et le vol Les Oiseaux sont conçus pour le vol : leur solide cage thoracique, la cohésion de leur colonne vertébrale (due à la soudure des vertèbres thoraciques), leurs ailes aux rémiges puissantes, leurs bons yeux, leurs pattes capables de supporter le choc d'un atterrissage sont autant d'atouts à cet égard. Ils illustrent fort bien le principe de corrélation énoncé par Cuvier. Les Oiseaux ont ainsi porté au plus haut point la capacité de voler. Il existe de nombreux types de vol selon les espèces, mais la même espèce peut voler de façon très différente selon les circonstances. En général, le vol battu s'oppose au vol plané. Dans le premier, les ailes effectuent régulièrement un mouvement vertical : plus exactement, l'aile tourne autour de l'articulation de l'épaule ; d'abord presque verticale, elle s'abaisse vers l'avant, pour repartir vers l'arrière. Des Oiseaux, comme les goélands ou les corbeaux, battent des ailes lentement, tandis que d'autres, comme les canards, le font rapidement. Chez les pics et les Fringillidés, le vol est onduleux, c'est-à-dire « en montagnes russes ». Certains Oiseaux sont capables de voler sur place, comme le faucon crécerelle ou encore les colibris, dont les ailes vibrent à une vitesse telle qu'elles deviennent invisibles à nos yeux. De nombreux Oiseaux, après avoir volé en battant des ailes, les immobilisent et continuent sur leur lancée : c'est le vol plané, spectaculaire chez les Rapaces diurnes et chez beaucoup d'Oiseaux de mer, qui évoluent parfois sans donner un coup d'aile durant des heures, voire des jours dans le cas des albatros. La buse, qui s'élève en décrivant des orbes au-dessus d'un champ, utilise un petit stratagème : elle profite de l'ascension de la « bulle » d'air chaud dans laquelle elle se trouve. Le vol des Oiseaux, qui a donné lieu à de nombreuses recherches, est à l'origine de l'aéronautique, du vol à voile, voire du cinéma si l'on se réfère aux travaux d'Étienne Marey. L'énergétique du vol a été beaucoup étudiée : l'oiseau obtient l'énergie nécessaire à son vol à partir de réactions qui combinent l'oxygène de l'air avec des protéines, des glucides et, surtout, des lipides. Ces réactions produisent de l'énergie, mais aussi du gaz carbonique, de l'eau et des déchets. La vitesse du vol et l'angle de celui-ci influent sur cette énergétique, 30 de sorte que l'oiseau, en réglant sa vitesse et son angle, peut voler de la façon la plus économique possible. Les graisses constituent le véritable carburant naturel des Oiseaux : les migrateurs qui effectuent une longue traversée au-dessus de l'océan accumulent auparavant la quantité de graisse nécessaire - à quelques grammes près - pour accomplir un tel trajet sans escale. Nombre d'Oiseaux sont capables de voler à grande altitude : ainsi certaines oies, au cours de leur migration, survolent-elles le mont Everest ; au-dessus des plaines, les grues volent parfois à 5000 ou 6000 m. Ce sont les sacs aériens qui, en jouant un rôle de soufflets, rendent possibles de telles prouesses : l'air, lorsque l'oiseau inspire, va des sacs postérieurs aux sacs antérieurs ; le sang, qui circule en sens inverse, rencontre un air de plus en plus oxygéné et peut ainsi se charger d'un oxygène très concentré. Cela donne à l'oiseau la capacité de voler dans les zones où l'atmosphère est raréfiée. Les ailes ont régressé chez de nombreux Oiseaux, qui sont alors dits aptères (sans ailes) bien que la plupart en possèdent mais réduites ; seul le kiwi est totalement dépourvu d'ailes, comme l'étaient les moas. Beaucoup d'Oiseaux non volants, qui vivaient sur des îles, ont disparu à l'époque historique : les æpyornis, les moas, les drontes, le grand pingouin, mais ce fut aussi le cas de nombreux râles et d'un passereau néo-zélandais, le xénique, qui fut le seul passereau aptère. De nos jours, les Oiseaux non volants sont les Ratites, les manchots, et quelques autres (cormoran des Galápagos, kakapo), sans oublier de nombreux Oiseaux domestiques. En cas de nécessité, la plupart des Oiseaux sont capables de nager. Cependant, seuls les Palmipèdes et quelques autres sont véritablement nageurs, grâce aux palmures qui réunissent ou garnissent leurs doigts. Certains de ces Oiseaux nageurs (nombreux canards, mouettes...) nagent seulement en surface, tandis que d'autres (canards plongeurs, grèbes, plongeons, pingouins...) s'immergent fréquemment en donnant un coup de tête ; ils se propulsent ensuite habilement sous l'eau. Selon les espèces, ce sont les pattes ou les ailes qui jouent le rôle principal durant la plongée. Chez les manchots, celle-ci a été assimilée à un véritable « vol sous l'eau ». C'est d'ailleurs le manchot royal qui détient le record de profondeur (350 m) atteinte par un oiseau. D'autres espèces (fous, sternes, martins-pêcheurs...) plongent à la volée, se laissant tomber dans l'eau, la tête la première, et parfois d'une grande hauteur. Dans tous ces cas, c'est pour attraper leur nourriture (en général des Poissons) que les Oiseaux plongent. Enfin, le cincle est capable, sans grande adaptation morphologique, de marcher au fond de l'eau, exploit unique chez les Oiseaux. Autres adaptations Beaucoup d'Oiseaux présentent un dimorphisme sexuel fort marqué : le mâle est plus coloré que la femelle chez les canards, chez de nombreux passereaux (merle, pinson, bouvreuil) et chez la plupart des Gallinacés (coq domestique, faisans, paons, tétras) ; à l'inverse, chez les phalaropes, la femelle est plus colorée que le mâle, qui par ailleurs assure seul, comme le mâle nandou, la couvaison et l'élevage des jeunes ; chez quelques Rapaces diurnes, la femelle est plus grande que son partenaire. Des cérémonies nuptiales plus ou moins compliquées précèdent souvent l'accouplement ; elles peuvent être collectives, comme chez le moineau domestique, chez le tétras-lyre, le chevalier combattant et les oiseaux-lyres. La parade nuptiale est spectaculaire chez les espèces au dimorphisme sexuel 31 accentué, le mâle mettant alors en valeur ce qu'il a de plus beau afin de mettre la femelle en condition pour l'accouplement : le moineau montre son plastron noir, le paon et le dindon font la roue, la frégate enfle le sac rouge qu'elle porte sous le bec, les paradisiers exposent leurs plumes ornementales. Un vol nuptial est effectué par diverses espèces (pigeon ramier, serin cini, etc.). Un autre phénomène est observé, celui de l'offrande, faite en général par le mâle à la femelle : les sternes mâles, par exemple, donnent un poisson (voir aussi Les mâles les plus recherchés). Les migrations Les migrations sont l'un des aspects les plus fascinants de la biologie des Oiseaux, chez lesquels s'observent tous les intermédiaires entre le sédentaire strict et le migrateur au long cours. La migration consiste en un voyage aller et retour entre le lieu de nidification et le site d'hivernage, mais, à partir de ce schéma, les variations sont très nombreuses. Chaque espèce suit des routes migratoires bien précises, en utilisant la position du Soleil pour s'orienter, celle de certaines constellations et le pôle magnétique terrestre (voir aussi Trouver son chemin). Les Oiseaux, en effet, peuvent percevoir la position du nord magnétique et mémoriser des détails géographiques des zones survolées. LES MAMMIFÈRES Étymologiquement, Mammifère signifie « qui porte des mamelles » : ce caractère, parmi d'autres, sépare cette classe du règne animal des autres Vertébrés. Si plus de 4 000 espèces de Mammifères existent actuellement, le nombre d'espèces fossiles est de loin plus important. Les premiers sont apparus il y a 220 millions d'années, ce qui semble donner à l'homme, Mammifère le plus évolué, entré en scène il y a 3 millions d'années, le rôle d'un tout nouveau figurant dans l'histoire de la biosphère. Dans l'ensemble du règne animal et dans l'embranchement des Vertébrés, les Mammifères constituent une classe : tous semblent en effet descendre d'un ancêtre commun ayant vécu au début du Mésozoïque, il y a environ 235 millions d'années. Mais des découvertes récentes montrent que les relations de parenté à l'intérieur de la classe des Mammifères ne sont pas encore définitivement établies ; par conséquent, la distinction des sous-classes, infraclasses et ordres demeure litigieuse. En ce qui concerne les Mammifères encore représentés de nos jours, on ne peut que les répartir dans les trois ensembles universellement reconnus - les Monotrèmes, les Marsupiaux et les Placentaires - sans préjuger du rang de ceux-ci dans la hiérarchie systématique qui définit des sous-classes, des infraclasses. Les Placentaires comprennent une vingtaine d'ordres, dont les principaux sont les Insectivores, les Chiroptères, les Primates, les Xénarthres, les Pholidotes, les Lagomorphes, les Rongeurs, les Cétacés, les Carnivores, les Proboscidiens, les Hyracoïdes, les Siréniens, les Périssodactyles et les Artiodactyles. Les caractères Les Mammifères sont des Vertébrés pourvus de quatre membres, au corps plus ou 32 moins densément couvert de poils, qui présentent des caractères particuliers du squelette, notamment concernant la mâchoire inférieure et son mode d'articulation avec le crâne. Leurs dents sont différenciées en incisives, canines, prémolaires et molaires, implantées sur le pourtour de la bouche. Leur température interne est constante quelles que soient les variations de celle du milieu extérieur. Ils ont des glandes sudoripares, des glandes sébacées associées aux poils et des glandes lactéales. Les poils qui recouvrent le corps des Mammifères peuvent chez certaines espèces, prendre l’aspect de soies, de crins qui constituent souvent d'importantes crinières, ou encore d’épines. Les Carnivores, les Rongeurs et d’autres Mammifères ont autour du nez ou des yeux, des poils appelés vibrisses. Ce sont des poils tactiles dotés d'une riche innervation sensorielle. L’activité de chasse des Mammifères impose le développement de sens tels que l'odorat, le toucher et l'ouïe. Il apparaît ainsi, que le nez des Mammifères, maintenu humide par des sécrétions glandulaires, est capable de déterminer la direction de provenance des stimuli olfactifs, dans la mesure où la superficie humide se refroidit lorsqu'elle est tournée contre le vent qui diffuse les substances odorantes. Les informations sur le milieu qui entoure les Mammifères et les mécanismes de communication intraspécifique sont en grande partie fondés sur l'odorat (voir Avec la vue et l'odorat). Le sens de l'ouïe est aussi très développé, grâce aux différentes structures de l'oreille interne, qui augmentent la sensibilité, et aux oreilles externes qui contribuent à la localisation du lieu d’émission des sons. Le cerveau, du fait de ces adaptations, possède des dimensions plus importantes que celui des autres Vertébrés. Le cerveau des Mammifères devient en effet le siège de fonctions neurologiques d'ordre supérieur, liées à une série d'activités complexes qui vont d'une meilleure coordination des mouvements à la capacité de mémoriser les informations acquises et d'établir des relations sociales élaborées. Le mode de vie très actif des Mammifères a entraîné d'importantes adaptations de l'appareil squelettique, qui a subi un allongement des membres et une augmentation de la flexibilité de la colonne vertébrale. Chez les Mammifères, la température interne du corps est maintenue constante, quelles que soient les conditions ambiantes : ce sont des animaux homéothermes, à l'inverse des Reptiles, dont la température varie avec celle du milieu extérieur. Cette différence primordiale tient à trois facteurs essentiels: les Mammifères sont en partie protégés par leur fourrure ; ils fabriquent eux-mêmes leur propre chaleur ; ils disposent de mécanismes de régulation qui freinent le réchauffement ou le refroidissement de leur corps selon que la température externe s'élève ou s'abaisse. Tandis que les Reptiles, ectothermes, puisent l'essentiel de leurs calories dans le milieu extérieur, les radiations solaires traversant facilement leurs téguments, les Mammifères, endothermes, trouvent les leurs dans une « activité métabolique » : les molécules complexes constituant les aliments sont dégradées, avant d'être intégrées à l'organisme, en molécules simples ; ces réactions chimiques, qui se réalisent en présence d'oxygène (capté par la respiration et véhiculé par le sang), s'accompagnent d'un dégagement de chaleur. La température interne des Mammifères est comprise, selon les espèces, entre 34 et 39,5 ºC ; leurs besoins en calories exigent donc une activité métabolique intense, soutenue par un apport alimentaire régulier et important. De fait, les Mammifères sont de gros consommateurs en comparaison des Reptiles : à poids égal, les premiers ont un métabolisme quatre fois plus élevé que les seconds. Les réactions à l'élévation de la température externe, déclenchées par les centres de régulation de l'hypothalamus, sont essentiellement la transpiration, le halètement 33 et le léchage. Le halètement, qui se traduit par l'accélération du rythme respiratoire, pratiqué, en cas de chaleur excessive, par le chien et par les Ongulés, a pour effet de provoquer une évaporation importante au niveau des muqueuses de la cavité buccale, de la trachée et des poumons, évaporation qui s'oppose à une élévation de température sous l'effet des conditions externes. Ce processus a l'avantage, contrairement à la transpiration, de ne pas s'accompagner d'une perte de sels. Le léchage est pratiqué par les chats et certains Rongeurs, qui humectent leur pelage de salive. Résister au froid est beaucoup plus difficile pour les petits Mammifères que pour les grands : la surface du corps, proportionnellement à son volume, est plus grande chez les espèces de petite taille ; il en résulte que leur déperdition de chaleur, dans un environnement froid, est plus importante. Sans une stratégie de défense particulière, la compensation de la perte des calories nécessiterait une activité métabolique accrue, donc une surconsommation impossible l'hiver quand la nourriture est rare. Les musaraignes, les taupes et la plupart des petits Rongeurs passent alors cette saison au fond d'un terrier profond, qui les isole du froid et dans lequel ils ont amassé de la nourriture. D'autres, comme les loirs, les lérots, les hamsters, les marmottes ou les chauves-souris ont recours à une stratégie : l'hibernation. Leur défense consiste à abaisser leur température interne presque au niveau de la température ambiante, de façon à limiter leurs dépenses énergétiques : leur cœur bat moins vite, leur respiration est ralentie, et ils tombent dans un état de torpeur ; ils puisent sur les réserves de graisse fabriquées à l'automne. Leur réveil à la fin de l'hiver dépend d'un mécanisme particulier : pour retrouver très rapidement une température interne normale, nécessaire à la reprise de leurs activités, ils utilisent une graisse spéciale, dite « brune », stockée au niveau des omoplates et qui n'entre dans le circuit des échanges métaboliques qu'au moment du réveil définitif. De l'œuf au placenta Les Mammifères se divisent en trois groupes principaux, selon leur mode de reproduction. La fécondation est toujours interne. Les Mammifères les moins évolués comme l'ornithorhynque (Ornithorhynchus anatinus) et l'échidné (genres : Tachyglossus et Zaglossus), sont ovipares et pondent des œufs identiques à ceux des Reptiles, pour ensuite les couver. Les Marsupiaux, comme les opossums et les kangourous, sont pseudovivipares. Leurs embryons se développent dans l'utérus durant une brève période, mais il n’y a pas de placenta individualisé qui permette les échanges mère-embryon, puis les fœtus se déplacent jusqu'à la poche placée sur le ventre (ou parfois sur le dos) de la femelle, où ils se nourrissent du lait maternel et y terminent leur développement. Les caractères de spécialisation acquis par les Placentaires indépendamment des Marsupiaux en font les plus évolués des Mammifères : absence de cloaque, orifice anal, urinaire et génital s'ouvrant séparément à l'extérieur; placenta formé d'une membrane richement vascularisée et adhérant à la paroi interne de l'utérus par un système de villosités réciproques ; durée de gestation prolongée grâce au développement d'un tissu embryonnaire spécial, appelé trophoblaste ; denture comptant au maximum par demi-mâchoire 4 prémolaires et 3 molaires, ces dernières étant les seules dents non remplacées. Les avantages des Placentaires sont essentiellement liés à leur mode de reproduction. Le système de villosités, qui fait défaut chez les Marsupiaux, augmente la surface de contact entre le placenta et l'utérus, ce qui a pour effet 34 d'augmenter les échanges entre la mère et l'embryon. Ces conditions accélèrent le développement de l'embryon, relativement à celui des Marsupiaux. Cette accélération, d'une part, se répercute sur le développement des centres cérébraux et, d'autre part, permet, par l'apport suffisant d'oxygène, de prolonger la vie intrautérine. D'ailleurs, l'allongement de la durée de gestation pose un problème que seuls les Placentaires ont résolu : un embryon, dont 50 % des caractères sont d'origine paternelle, représente un « corps étranger » pour la mère, qui le rejetterait rapidement s'il n'était protégé par un système de défense particulier. Le trophoblaste, mis en place par les Placentaires, joue ce rôle ; il s'agit d'un tissu embryonnaire, qui se développe au début de la division de l'œuf, et crée au niveau du placenta une barrière entre la mère et l'embryon, empêchant le rejet de celui-ci ; il sécrète en outre des hormones. Le progrès du processus de reproduction (accélération du développement embryonnaire, maturité sexuelle plus rapide...) est certainement le secret de la réussite des Placentaires, qui représentent 90 % des espèces fossiles et actuelles de Mammifères. Les adaptations Capables de vivre sous toutes les latitudes grâce à leurs mécanismes de régulation thermique, les Mammifères ont pu s'implanter dans tous les grands milieux naturels : milieux fermés tels que les forêts et les montagnes ; milieux ouverts comme les savanes et les steppes, les déserts chauds ou les étendues glacées, jusqu'aux océans et au milieu aérien, en y peuplant toutes les « niches écologiques » de ces milieux. Cette dispersion écologique a été corrélative de spécialisations en rapport avec les contraintes du milieu. Le facteur initial de la diversification des Mammifères a sans doute été l'exploitation des ressources alimentaires. À partir du moment où, devenus suffisamment nombreux, ils entrèrent en concurrence, ils passèrent de la consommation d'Insectes, de vermisseaux ou d'autres petites proies à celle de végétaux, graines et fruits, racines et tubercules, herbes et feuillages, et certains commencèrent à consommer leurs semblables. Cette recherche de la nourriture les mena de la vie terrestre à un mode de vie arboricole ; des espaces fermés, où il est plus facile d'échapper aux dangers, à la conquête des espaces ouverts ; des rivages littoraux aux océans, que les ancêtres de leurs ancêtres reptiliens avaient quittés des millions d'années auparavant; et des arbres enfin, ils prirent leur envol. La spécialisation des dents en fonction du régime alimentaire suffirait à distinguer les ordres de Mammifères : les Insectivores ont des dents petites et hérissées de cuspides (pointes) qui leur permettent de percer les téguments chitineux durs des Insectes et de les réduire en une bouillie digestible ; les Rongeurs possèdent des incisives capables d'attaquer les parties dures des végétaux pour en atteindre les parties molles nutritives ; les Carnivores sont dotés de dents carnassières, qui jouent le rôle de ciseaux à découper les chairs ; les chevaux ont des dents hautes, à la surface garnie de crêtes d'émail en forme de croissant, d'une efficacité totale pour mastiquer les herbes riches en cellulose ; en outre, la croissance prolongée des racines compense l'usure de la couronne et maintient la dent à son niveau fonctionnel. L'estomac à plusieurs compartiments des Ruminants, qui leur permet de conserver des aliments grossièrement mâchés, dans une poche spéciale de l'estomac, puis de les régurgiter, est pour eux un moyen d'accumuler au plus vite de la nourriture pour aller la mastiquer plus finement une seconde fois, à l'écart du danger. 35 Chez les Ongulés, les griffes ont été remplacées par des sabots, qui résistent mieux à l'usure et donnent un meilleur appui au sol, quelle que soit la nature de celui-ci, ce qui représente un avantage certain pour ces animaux astreints à de longs déplacements à la recherche de nouveaux pâturages et dont la vitesse de fuite devant les prédateurs est un gage de longévité. Vivre dans les arbres, pouvoir grimper le long des troncs et en descendre, éventuellement la tête en bas, se déplacer le long des branches, sauter d'un arbre à l'autre, exigent des aptitudes tout à fait particulières à l'origine de spécialisations remarquables. La brachiation, qui implique un allongement spectaculaire des membres antérieurs, est un mode de locomotion pratiqué par certains Primates, comme le gibbon: suspendu aux branches par les mains, il progresse en les déplaçant l'une après l'autre. Les membranes des écureuils volants, par exemple, qui relient le corps aux membres antérieurs et postérieurs, leur permettent, quand elles sont tendues, d'effectuer des « vols planés » d'un arbre à un autre, sur des distances de plusieurs dizaines de mètres. Les ailes des chauves-souris, qui ne sont rien d'autre que des mains transformées et reliées au corps, constituent un instrument de vol incomparable, associé à des muscles pectoraux si importants, par rapport à la petite taille du bassin, que ces animaux ne peuvent se tenir debout: ils vivent la tête en bas, sauf au moment de la défécation et de la mise bas. Le retour à l'eau, réalisé par certains Mammifères, s'est accompagné d'une transformation des membres : tandis que les Pinnipèdes (phoques, otaries et morses) sont capables de se déplacer sur le sol - tout en nageant aussi bien que des Poissons -, les Cétacés (baleines et dauphins), eux, ont acquis de véritables nageoires qui les lient complètement au milieu marin ; ils s'y déplacent sans contrainte jusqu'à de grandes profondeurs, grâce à un ensemble de spécialisations de leurs organes. Les appendices crâniens, cornes et bois, de structures très diverses, sont à la fois des ornements exhibés lors de parades et des armes utilisées dans les affrontements entre mâles. LE COMPORTEMENT ANIMAL NAISSANCE Les différents types de comportement animal sont repérables dès la naissance. La variété des comportements est étroitement liée aux caractéristiques et aux exigences de chaque espèce. Toutefois, on peut affirmer que toutes les espèces ont en commun la nécessité d'assurer à leur descendance les possibilités de survie les plus élevées. Les manières dont ce but est atteint dépendent des caractéristiques physiologiques et comportementales des différents animaux (voir éthologie). Stratégies de reproduction Pour simplifier, on peut dire que dans le monde animal il existe deux stratégies de reproduction principales, adoptées par les géniteurs : donner naissance à un grand nombre de petits sans trop s'en occuper par la suite, ou bien accorder des soins parentaux attentifs à une descendance limitée. La première est dite « stratégie r » la constante r indiquant le taux intrinsèque d'accroissement d'une population animale -, la deuxième, « stratégie K » - la valeur K indiquant la capacité portante 36 du milieu. On retrouve le premier type de stratégie chez beaucoup d'animaux ayant une organisation structurelle relativement simple, par exemple chez les Invertébrés marins, tandis que le deuxième type de stratégie est plus caractéristique des Vertébrés supérieurs, qui consacrent des soins importants à leurs petits. Un animal peut donc naître avec beaucoup d'autres semblables et être tout de suite abandonné, ou bien être seul ou avec peu de frères et bien protégé dans une tanière ou un nid. Une survie due au hasard La première stratégie de reproduction est particulièrement coûteuse en termes de production biologique tant pour les mères que pour les pères, car elle requiert une grande quantité d'œufs et de spermatozoïdes. La femelle du crabe écarlate, une espèce vivant sur une île près de Java, peut pondre 100 000 œufs, alors que la femelle de la drosophile, une petite mouche, en pond environ 2 000 par saison. Dans les cas précédemment décrits, les ressources à la disposition des jeunes sont limitées et un nouveau-né a peu de chances de survivre. Chez le crabe écarlate, bien peu de jeunes parviennent à surmonter les dangers représentés par la force des marées et par l'appétit des Poissons et des Oiseaux. Quoi qu’il en soit, le nombre élevé de jeunes sur le point de naître garantit la survie de l'espèce. Le désintérêt des parents pour les jeunes peut être total ou partiel. Beaucoup d'espèces, même si elles ne prodiguent pas de soins parentaux, pondent près des ressources alimentaires qui seront nécessaires aux jeunes. Des soins attentifs pour les jeunes Tous les Invertébrés s’en remettent à la chance pour le destin de leurs jeunes (en général des larves). Les jeunes de la plupart des espèces bénéficient souvent, au début de leur vie, d’une alimentation appropriée. De nombreux Insectes, par exemple, pondent à l’intérieur du corps d'une chenille qu’ils paralysent. Cette victime restera en vie pendant tout le développement des larves parasites et elle constituera leur alimentation. Le jeune qui va naître se trouve donc dans des conditions optimales. Des soins plus attentifs pour un nombre limité d'œufs, c’est la stratégie adoptée pour garantir la survie des larves. L'œuf est un bien précieux pour les espèces ovipares. Certains Reptiles et les Oiseaux défendent activement leurs œufs (tout comme les Mammifères défendent leurs nouveau-nés) contre les prédateurs et les températures extrêmes, et ces activités très coûteuses du point de vue des dépenses énergétiques sont justifiées par l'emploi de la stratégie « peu de petits mais de bons petits ». Les œufs des Oiseaux Les œufs des Oiseaux sont généralement riches en substances nutritives, contenues dans le jaune et nécessaires à l'embryon. Le jaune permet aux poussins de bien se développer dans l’œuf. On a découvert qu'il existe une communication entre les poussins avant même que les œufs ne soient éclos. De cette façon, se crée une coordination entre les différents jeunes qui vont naître. Cependant, précisément parce qu'ils sont riches en aliments, les œufs sont un mets convoité par les prédateurs. C'est pourquoi les nids se trouvent dans des lieux inaccessibles, 37 comme chez certains Rapaces, ou bien les œufs sont cachés sous la terre, par exemple chez différentes espèces de serpents. Les soins consacrés à leurs œufs par les Oiseaux sont très attentifs. Dans les milieux où la température est très élevée, les œufs sont rafraîchis avec de l'eau, ou bien les parents se tiennent près d’eux, les ailes déployées pour les maintenir à l’ombre. Tout cela garantit le développement des embryons à l'intérieur de l'œuf. Les jeunes les plus favorisés Chez beaucoup d’animaux, le développement de l’embryon ne se fait pas dans un œuf mais à l'intérieur du corps de la mère. Cette condition constitue la règle chez les Mammifères, mais on la retrouve aussi chez beaucoup de Reptiles (comme les vipères), chez certains Poissons (par exemple l'hippocampe et le guppy) et divers autres animaux. La naissance peut être suivie d'une période de soins parentaux dont la durée varie chez les différentes espèces. Chez les Mammifères, il existe des différences entre les divers ordres. Chez les Marsupiaux, habitants du continent australien et du Nouveau Monde, les jeunes sont encore peu développés à la naissance. Chez certains Marsupiaux, les jeunes naissent un mois après leur conception et ils réussissent à s’attacher au mamelon de leur mère, où ils peuvent rester plusieurs semaines. Pendant le développement, les jeunes Marsupiaux se tiennent dans une poche ventrale proche des mamelons, le marsupium, qui leur permet d’être constamment protégés. Au bout de neuf mois, le marsupium est abandonné et les jeunes sont en mesure de se mouvoir de façon autonome auprès de leur mère. Chez les Mammifères placentaires, en revanche, une grande partie du développement se fait à l’intérieur du corps de la mère. De cette façon, le jeune est déjà plus ou moins formé à la naissance. L’œuf de ces animaux ne contient pas de substances nutritives, à la différence de celui des Oiseaux. La mère nourrit l’embryon au moyen d'un organe spécial, appelé placenta. Le placenta est imbriqué dans la paroi de l’utérus de la mère. Par le cordon ombilical, l’embryon extrait du sang de sa mère les substances nutritives nécessaires à son développement. On parle de « stratégie r », même si cela concerne des Mammifères. En effet, certaines espèces peuvent donner naissance à un nombre élevé de jeunes. Citons en particulier certains Rongeurs, les campagnols, qui peuvent mettre bas jusqu’à 17 fois en une saison et qui, à chaque mise bas, peuvent donner naissance à environ 8-9 jeunes. Chaque espèce animale adopte une stratégie comportementale spécifique, selon les caractéristiques de son milieu et les ressources alimentaires dont elle dispose. CROISSANCE ET APPRENTISSAGE Pour tout animal, la première période de vie est peut-être la plus dangereuse. En général, les jeunes sont faibles et sans défense et ils représentent une proie facile. En outre, ils n’ont pas l’expérience des adultes, qui savent se tirer des nombreuses difficultés de la vie en savane ou en forêt. Pour les parents également, c’est un moment particulier, car ils doivent défendre leurs jeunes et leur procurer en permanence de la nourriture. Le passage de la jeunesse à l’âge mûr est un processus d’une complexité extraordinaire, au cours duquel tant les phénomènes de croissance que les influences du milieu extérieur sont déterminants. 38 La croissance Croître signifie acquérir graduellement la forme, les fonctions et les comportements adultes des parents, donc subir un processus de transformation biologique. Cette transformation suit des rythmes différents selon les espèces. Par exemple, les jeunes du lion de mer, une espèce d’otarie, croissent très rapidement, grâce au lait de leur mère, extrêmement nourrissant. Pendant la première semaine, le poids du jeune augmente d’environ 9 kg. La raison de cette croissance accélérée, supérieure à celle d’autres Mammifères, réside dans le fait que la mère, durant la période d’allaitement, se trouve forcément sur la terre ferme, donc hors de son milieu le plus familier, l’eau. Elle a donc tout intérêt à limiter la période d’allaitement de son petit. En revanche, quand le milieu est plus sûr, les jeunes ont tout le temps de se développer graduellement, à l’abri d’une tanière, ou bien au sein d’un groupe social en mesure de les protéger des dangers. Le développement du comportement Durant la croissance, le jeune animal ne se développe pas seulement physiquement. Son comportement aussi se perfectionne. En effet, il est soumis à différentes influences provenant de l’environnement. Chez beaucoup d’espèces d’Oiseaux, le jeune a besoin d’écouter le chant des adultes pour chanter à son tour. Chez les animaux sociaux, pour qu'il y ait développement approprié du comportement, il est en général essentiel que le jeune grandisse avec d’autres individus. En effet, croître signifie également apprendre, et l’expérience des parents, ou des compagnons, est très importante pour acquérir les informations utiles pour se tirer des nombreux problèmes posés par le milieu. Un rapport étroit des jeunes avec leur mère est souvent nécessaire à leur survie. Les femelles de chimpanzés guident les mouvements de leurs jeunes, et leur apprennent à utiliser certaines pierres afin de rompre les coquilles des noix particulièrement dures. De même, les femelles des Félins enseignent la chasse à leurs jeunes. Imprégnation Le jeune apprend de sa mère où et comment chercher sa nourriture, comment éviter les prédateurs. Il apprend aussi les bases du comportement social. L’imprégnation est un mode de comportement fondamental. C’est Konrad Lorenz, l’un des fondateurs de l’éthologie, qui a découvert et étudié pour la première fois ce phénomène en l’observant chez différentes espèces d’Oiseaux. Lorenz a remarqué que les canetons ou les oisons, à peine sortis de l'œuf, suivent le premier objet mobile qui se présente à eux ; c'est-à-dire en principe leur mère, mais, pour des raisons expérimentales, cela peut être les bottes de l’éthologiste. L’imprégnation, ou empreinte, permet aux parents de guider et protéger les jeunes et à ceux-ci de distinguer les membres de son espèce. Ainsi, parvenus à l'âge adulte, les jeunes s’accoupleront avec l’« objet » ayant les mêmes caractéristiques que lui, et vers lequel le porte l’imprégnation. Celle-ci lui fournit donc automatiquement des informations précieuses pour sa vie future. Marraines et aides 39 Les soins parentaux peuvent aussi être partagés activement par d'autres membres de la famille. Chez plusieurs espèces de Mammifères, les femelles adultes protègent et soignent autant leurs jeunes que ceux des autres femelles. Ces femelles sont appelées marraines. On trouve des exemples de ce type chez les dauphins, les éléphants et chez différents Bovins. Chez le ouistiti, la mère met bas normalement deux petits. Le père et les frères les plus âgés s’occupent eux aussi des nouveau-nés, mais cette tâche revient parfois à des individus appelés aides, des sujets étrangers acceptés par la famille. Participer aux soins parentaux leur permet d’être accueillis à l’intérieur du groupe. Ce phénomène est également connu chez les Oiseaux qui nichent en colonies, par exemple chez les guêpiers. Il arrive qu’une femelle moineau donne la becquée à un jeune qui n’est pas le sien, tandis que, chez la poule d’eau, les jeunes de la première couvée participent au nourrissage de ceux de la seconde. Le jeu Au fur et à mesure que le jeune grandit, son répertoire comportemental s’enrichit et il lui faut apprendre à se comporter comme les adultes. Au cours de ce processus de développement, le jeu revêt un rôle très important. Dans le jeu des jeunes Félins, on observe certaines séquences du comportement qui constitueront, dans le futur, une part du comportement typique des prédateurs, le bond sur la proie par exemple. Il en est de même du jeu solitaire et instinctif du jeune chat domestique qui court après des objets en mouvement. Dans le jeu de groupe, la plupart des Mammifères sociaux apprennent, par des corps à corps ludiques, à mesurer leur force physique à celle d’autres individus. En outre, on peut retrouver dans ces jeux des éléments du comportement sexuel adulte. Le jeu constitue donc une sorte d’entraînement pour la vie future. LES CONSTRUCTIONS DES ANIMAUX Tous les animaux doivent affronter, à un certain moment de leur vie, une décision fondamentale : où vivre ? Chez certains Mammifères, la progéniture hérite de l’habitat des parents, mais la plupart du temps les animaux doivent se débrouiller et construire leur « habitation » à partir de zéro. La première chose à faire est de sélectionner le milieu adéquat, pas trop éloigné d’une source de nourriture par exemple. Aussi, puisqu’il est rare de trouver un milieu offrant déjà les caractéristiques architecturales nécessaires à un bon abri, beaucoup d’animaux se révèlent d'habiles constructeurs. La nécessité de garantir aux jeunes, pendant leurs premières années de vie, un développement à l’abri des risques du milieu, est l’une des raisons les plus importantes de la peine que prennent les adultes à édifier un nid, creuser un terrier, ou construire une hutte. Les constructions des divers animaux diffèrent beaucoup par les matériaux et les méthodes de fabrication. Toutefois, elles répondent toujours aux mêmes nécessités : trouver un refuge et une protection pour soi-même et surtout pour ses jeunes. Les terriers 40 Un certain nombre d'animaux modifient le milieu pour construire un abri. Parfois, il leur suffit d’occuper un trou existant dans un tronc, comme le font les chouettes et d’autres Oiseaux, ou bien de prendre possession d’une grotte, comme le font les ours et les chauves-souris. Toutefois, nombre d’animaux, tant terrestres qu’aquatiques, creusent des trous et des galeries : les Mollusques, les Annélides, les Arthropodes, les Sauriens, les serpents, les tortues et même certains Oiseaux : guêpiers, martins-pêcheurs, etc. Parmi les Mammifères également, il existe de petits et de grands fouisseurs, tels que les campagnols, les taupes, les renards, les mangoustes, les lapins, les marmottes et bien d’autres. Ainsi, les chiens de prairie, qui sont des Rongeurs d’Amérique du Nord, construisent de véritables citadelles où les membres de la population, à tour de rôle, remplissent différentes tâches. La taupe est l’un des fouisseurs les plus impressionnants du règne animal. Elle est capable de construire des systèmes étendus de galeries et de chambres, creusant la terre au moyen de ses pattes antérieures très bien adaptées à cette fonction, puis l'évacuant au moyen de ses pattes postérieures. Les taupes peuvent ainsi creuser sur des centaines de mètres, un travail qui leur demande un effort considérable. Les Mammifères qui vivent dans des systèmes de terriers équipent les chambres communes de doubles entrées, de façon à garantir une aération adéquate et à augmenter les possibilités de fuite, au cas où un prédateur pénétrerait dans le terrier. Les araignées et les Insectes constructeurs Le creusement d’un refuge, même s’il s’agit d’un refuge complexe, apparaît assez simple par comparaison aux efforts de certains animaux qui construisent leur habitat au moyen de matériaux qui doivent être choisis et assemblés minutieusement. Dans certains cas, ces matériaux sont produits par l’animal luimême. L’araignée, par exemple, sécrète par des glandes spécifiques un fil de soie qui est disposé de façon à constituer la toile (mais il s’agit là d’un exemple particulier, car celle-ci remplit aussi la fonction de piège et de garde-manger). Par des glandes placées sous leur abdomen, les abeilles, elles aussi, sont capables de sécréter une substance qui, une fois pétrie avec de la salive, deviendra la cire utilisée pour construire les innombrables alvéoles dont est formé le rayon de miel. Le rapport entre le nombre et la forme des alvéoles est un exemple admirable d’efficacité et d’économie architecturale. Les guêpes, quant à elles, construisent des rayons composés d'alvéoles, mais au moyen de bois arraché aux végétaux et pétri avec de la salive. Les guêpes se procurent donc une partie des matériaux de construction dans le milieu environnant. D’autres types de guêpes façonnent de la boue pour construire leurs nids, mais parmi les espèces d’Insectes qui utilisent ce matériau, les plus remarquables sont les termites. Les termitières peuvent atteindre 4 m de hauteur et elles sont organisées de manière très complexes avec de nombreuses subdivisions internes. Les barrages des castors Comme nous avons eu l'occasion de le dire, les Mammifères creusent des terriers plus qu’ils ne construisent de nids : ceux-ci existent néanmoins, par exemple ceux de l’écureuil ou du rat des moissons. Les castors, pour leur part, n’ont rien à envier aux ingénieurs les plus habiles. En effet, ils savent construire des barrages complexes et fonctionnels, qui entourent leur hutte faite de boue séchée. Les 41 castors font la preuve de leur admirable habileté en matière d’architecture et d’hydraulique : ils entassent des troncs de dimensions différentes dans des quantités variables afin de créer une série de plans d'eau de diverses profondeurs, destinés à des fonctions différenciées. Les nids des Oiseaux Autre classe d'animaux renommée pour leur talent de constructeurs, les Oiseaux. Les nids des Oiseaux peuvent être faits de matériaux différents, en général, des brindilles, de la mousse, des plumes, etc. Certaines espèces d’Oiseaux utilisent les matériaux les plus étranges, parfois même la mue des serpents. Si beaucoup de nids sont situés dans les arbres, d’autres sont posés sur le sol (ceux des Gallinacés, alouettes, oiseaux d’eau, etc.), d’autres sont fixés aux falaises ou aux rochers, d’autres encore sont construits sur des édifices (comme les nids de boue des hirondelles). Les tisserins africains sont des Oiseaux très habiles et leurs nids suspendus constituent des chefs-d’œuvre de fonctionnalité et de complexité. LA RECHERCHE DE LA NOURRITURE L’une des premières choses qu’un jeune animal doit apprendre est où et comment se procurer de la nourriture. L’imprégnation permet aux canetons de trouver une source de nourriture car, après éclosion des œufs, ils suivent instinctivement leur mère qui les y conduit. Le problème de la recherche de la nourriture est fondamental et concerne tous les animaux, à tout âge. Mais cette opération est souvent très risquée. Chercher et localiser un bon arbre fruitier pour y passer le plus clair de la journée (occupation principale de beaucoup de singes et d’Oiseaux) est une opération beaucoup plus simple que de capturer une gazelle dans la savane africaine, comme le fait le guépard. Mais il ne s’agit là que de deux exemples d’une série infinie de comportements qui se trouvent dans le règne animal, liés à la recherche et à la localisation de la nourriture. La variété extraordinaire de cet aspect particulier du comportement animal tient au fait que toute plante, tout animal ou tout résidu organique représente une ressource alimentaire pour un animal ou pour un autre. Comment localiser la nourriture Pour identifier, même à distance, des indices susceptibles de les conduire vers une source de nourriture, les animaux ont développé des capacités particulières. Certains scarabées, par exemple, sont extrêmement sensibles aux substances volatiles qui se dégagent des excréments. Ces Insectes savent repérer dans l’air des concentrations très réduites de ces substances, ce qui leur permet d’en localiser la source. Karl von Frisch, un éthologiste autrichien, a découvert que chez les abeilles, les exploratrices qui ont trouvé une source de nourriture reviennent à leur ruche et renseignent leurs congénères sur les coordonnées de cette source au moyen d’une danse très élaborée. Dans le cas des animaux qui se nourrissent de substances végétales, la recherche de la nourriture peut être favorisée par la nourriture elle-même. Les couleurs voyantes des fleurs en sont un exemple évident. Les Insectes et les Oiseaux sont attirés par ces couleurs. Parvenus sur les fleurs, 42 ils trouvent le nectar, s’enduisent de pollen et, passant d’une fleur à l’autre, favorisent la pollinisation. Se défendre des plantes Les herbivores n’ont pas toujours une vie aussi simple. En effet, les plantes aussi ont développé des mécanismes défensifs. Les feuilles d’un grand nombre d’espèces végétales des forêts habitées par les singes hurleurs d’Amérique du Sud sont vénéneuses. De plus, les feuilles de certains arbres des forêts tropicales ne sont comestibles que pendant un temps très bref ; en vieillissant, elles deviennent toxiques. Pour les singes hurleurs, la recherche de nourriture est donc une opération assez délicate. Ils flairent chaque feuille longtemps et la goûtent avant de la manger. Les jeunes singes, accrochés sur le dos de leur mère, assistent à cette opération, ce qui leur apprend à se comporter dans des situations identiques. Il est important que les petits prennent leur nourriture en la volant à leur mère ; cette expérience leur permettra d’éviter des aliments indigestes et dangereux. Une vue parfaite Les prédateurs rencontrent de grandes difficultés dans la recherche de leur nourriture car ils ont affaire à des proies mobiles. Les Insectes ont développé toute une série de « camouflages », grâce auxquels ils se confondent avec le milieu environnant. Il s’agit là d’une forme de mimétisme appelée « homochromie ». Il n’est pas rare de voir des papillons nocturnes dont les couleurs sont pratiquement semblables à celles du tronc d’arbre sur lequel ils se sont posés. Les phasmes, quant à eux, se confondent avec des brindilles. Mais les prédateurs ont trouvé une réponse adéquate à ces stratagèmes inventés par les proies potentielles. Le geai, par exemple, se montre expert dans la découverte des Insectes mimétiques. Le kleptoparasitisme Appartenir à un groupe peut également aider à trouver de la nourriture. En effet, on a observé que chez certains Oiseaux qui vivent en colonie, des individus attendent le retour de leurs congénères qui ont été particulièrement habiles à trouver des aliments ; par la suite, ils les suivent systématiquement lorsque ceux-ci sont à nouveau à la recherche de nourriture. Certaines espèces d’Oiseaux marins présentent des formes de parasitisme. Les mouettes s’emparent souvent des proies (ou de la nourriture) des autres espèces. Pour les stercoraires, le kleptoparasitisme est le seul moyen de se procurer de la nourriture : ils harcèlent les Oiseaux marins et s’emparent de la proie qu’ils sont obligés d’abandonner. LA PRÉDATION Dans le comportement animal, voler et chercher à ne pas être volé sont deux phénomènes étroitement liés. En effet, la sélection naturelle a perfectionné chez les prédateurs les capacités à trouver et à capturer leur proie, mais, réciproquement et avec la même efficacité, les proies ont développé des stratagèmes efficaces pour échapper aux prédateurs. De plus, de nombreux prédateurs peuvent être la proie 43 d’autres animaux ; leur comportement sera donc un compromis entre deux exigences opposées. L’acte de la prédation est caractérisé par quatre phases : repérer, attaquer, capturer et, finalement, consommer la proie. Pour chacune de ces phases, les proies ont élaboré une série de stratégies pour échapper à leur destinée. Pour cette raison, le résultat du rapport proie-prédateur est souvent un équilibre entre deux populations aux exigences diamétralement opposées. Trouver la proie Le premier objectif d’un prédateur est de repérer sa proie. Les chauves-souris sont capables de la trouver en volant en utilisant une espèce de sonar. Or, certains papillons, dont les chauves-souris sont friandes, ont développé une grande sensibilité aux impulsions sonores émises par les chauves-souris et savent donc éviter le danger. Certains Insectes utilisent le stratagème du mimétisme pour se dissimiler aux Oiseaux (voir aussi Une vue parfaite). La proie « imite » alors une plante, ou bien un autre animal, venimeux, non comestible ou simplement plus redoutable. De nombreuses mouches inoffensives qui butinent les fleurs présentent le même type de couleurs que certaines guêpes dangereuses. Les ailes de certains papillons présentent des dessins qui rappellent les yeux d’un hibou. Mais les prédateurs savent aussi se camoufler pour attirer leurs proies. Par exemple, les vipères qui vivent dans le désert s’enfouissent dans le sable mais laissent l’extrémité de leur queue à découvert. Puis, elles agitent la queue de manière régulière pour imiter le mouvement d’un brin d’herbe et les Oiseaux se laissent prendre à cette ruse. La chasse conjuguée Après avoir identifié une proie potentielle, l’animal l’attaque et la capture. Pour un herbivore, cela ne constitue pas un problème car l’herbe ne s’échappe pas ; pour un carnivore, en revanche, une proie mobile est très difficile à attraper. Cette difficulté pousse les individus d’une même espèce à collaborer pour s’assurer un repas. En effet, la chasse sociale est un phénomène qui existe chez de nombreux prédateurs, tant chez les Mammifères que chez les Oiseaux. En Amazonie, par exemple, les cormorans chassent les Poissons en groupes très nombreux, battant la surface de l’eau de leurs ailes et de leurs pattes. Les Poissons, affolés par ce vacarme, nagent vers la côte où ils deviennent une proie facile pour les cormorans. Mais les exemples les plus étonnants de la chasse conjuguée sont fournis par les carnivores des savanes africaines. Autrefois on pensait que les hyènes ne se nourrissaient que des repas consommés par d’autres carnivores ; en fait, on a récemment démontré qu’elles organisent des battues collectives. Les hyènes, tout comme les lions et d’autres Félins, parviennent à isoler au sein d’un groupe de gnous ou de zèbres les individus jeunes ou malades qui sont d’habitude les proies les plus faciles. Une bonne coordination à l’intérieur du groupe des hyènes est essentielle pour la réussite de la chasse, notamment pour éviter les attaques des adultes, qui cherchent à défendre leurs jeunes. Parmi d’autres chasseurs sociaux, citons les lions, les loups, les lycaons et les dholes ou chiens rouges d’Asie du SudEst. Les animaux peuvent aussi agir seuls, pour ne pas être dérangés, comme les renards et la plupart des Félins. Quant à l’orque, elle se laisse déposer sur la plage par la mer, saisit un jeune lion de mer (une espèce d’otarie), puis retourne 44 tranquillement à l’eau, aidée par les vagues. Dans ces derniers cas, la sociabilité n’est pas un élément nécessaire pour garantir un bon repas. La proie se défend Les proies se défendent activement, c'est-à-dire qu’elles attaquent l’agresseur lorsqu’elles sont menacées de près. Mais elles ont aussi développé toute une série de stratégies qui leur évitent d’être capturées. La fuite est la première des réponses possibles. Beaucoup d’animaux cherchent à désorienter le prédateur en créant la confusion. C’est le cas de la gazelle de Thompson, une petite antilope africaine, proie, entre autres, du guépard. Quand elle voit son prédateur, cette antilope s’enfuit, changeant continuellement de direction et effectuant des bonds. Les guépards, étourdis par ces mouvements désordonnés, perdent la concentration nécessaire à l'attaque et abandonnent leur expédition. Celui qui mange le premier La consommation de la proie capturée est le dernier acte de la prédation. Chez les prédateurs sociaux, la consommation d’une seule proie concerne plusieurs individus. La position sociale et l’âge jouent un rôle déterminant dans le partage du butin. En général, chez les lions par exemple, les mâles adultes ont la priorité sur les femelles (qui pourtant participent la plupart du temps à la chasse) et sur les mâles les plus jeunes, et il n’est pas rare que les jeunes soient écartés du repas. La prédation est l’un des domaines les plus intéressants du comportement animal, mais parfois aussi l’un des plus cruels. LE COMPORTEMENT REPRODUCTEUR La reproduction sexuée peut être définie comme le mécanisme par lequel un mâle et une femelle transmettent à la génération suivante une partie de leur patrimoine génétique. Mais ce n’est pas une opération simple que de réussir à se reproduire. L’accouplement est rendu complexe par la nécessité d’une synchronisation parfaite des mouvements du mâle et de la femelle, alors que, généralement, le comportement reproducteur des deux sexes est radicalement différent. Il arrive parfois que le mâle fasse une cour active à la femelle et que la réponse de cette dernière soit un refus catégorique. En effet, les femelles sont souvent beaucoup plus « difficiles » dans le choix de leur partenaire que les mâles. Charles Darwin a consacré un ouvrage aux mécanismes de sélection qui donnent lieu à des comportements différents dans les deux sexes. Il a appelé ces mécanismes la « sélection sexuelle ». La sélection sexuelle La sélection sexuelle apparaît chaque fois qu’il existe une compétition entre individus du même sexe pour la conquête d'un partenaire, par exemple quand une femelle doit choisir entre différents mâles d’une même population. Mais pourquoi observe-t-on ces différences comportementales entre les deux sexes ? De nombreux éthologistes sont désormais convaincus qu’il faut chercher l’origine de ce 45 comportement dans la taille différente des gamètes masculins et féminins. Les mâles produisent les spermatozoïdes, tandis que les femelles produisent les cellules-œuf, ou ovocytes, et ces deux types de cellules sexuelles diffèrent considérablement quant à la quantité et aux dimensions. Chez les Oiseaux, par exemple, un ovocyte peut peser 20 % du poids du corps de la femelle. Ce poids chez les mâles représenterait des trillions de spermatozoïdes. La situation n’est pas très différente chez les Mammifères, dont les mâles produisent, au cours de leur vie, des milliards et des milliards de petits spermatozoïdes, tandis que les femelles ne forment que quelques centaines d’ovocytes. Cela signifie que les mâles peuvent se permettre de perdre quelques millions de spermatozoïdes en cherchant à féconder le plus grand nombre de femelles. Mais la réciprocité est fausse car les femelles ont beaucoup plus à perdre, en termes de cellules-œuf, si elles choisissent un partenaire non approprié. En outre, ce sont les femelles qui consacreront le plus de temps et d’énergie aux soins dispensés aux jeunes, aussi bien en nourrissant l’embryon qu'elles portent qu'en allaitant le petit après sa naissance, dans le cas des Mammifères. Cette période d’« investissement parental » est lourde et absorbante. On comprend aisément pourquoi les femelles veulent être certaines de choisir un bon père pour leurs jeunes. Chez beaucoup de Mammifères, la femelle choisit le mâle le plus grand ou celui qui sera capable de vaincre les autres prétendants. En effet, il est possible que des mâles très forts contribuent à produire des jeunes aussi forts. Quand il existe une sélection sexuelle de ce genre, les mâles sont plus grands que les femelles, comme c’est le cas chez la plupart des Mammifères. L’avantage est évident, tant chez les prédateurs (plus de succès dans la chasse) que chez les herbivores (plus de succès dans la défense du groupe familial). Les mâles les plus recherchés Le comportement reproducteur prend souvent l’allure d’une compétition entre des individus de la même espèce. Les mécanismes différents par lesquels cette compétition se manifeste sont modelés par la sélection sexuelle et leur but final est la transmission, à la génération suivante, d’un patrimoine génétique qui puisse les aider à affronter les difficultés de la vie. Chez le lion de mer, par exemple, les mâles répondent aux appels sexuels d’une femelle, qu’on peut entendre jusqu’à 7-8 km de distance. Une série de combats acharnés s’engage entre les prétendants pour le droit de s’accoupler avec la femelle. Celle-ci choisit en général le plus puissant de tous les mâles. Dans d’autres cas, en revanche, ce n’est pas la force physique d’un mâle qui prévaut. Chez beaucoup d’Oiseaux, le mâle, contrairement à la femelle, possède un plumage voyant et coloré, comme le faisan, l’oiseau-lyre ou le paon. C’est alors la beauté, et non pas la puissance qui est à l’origine de la sélection sexuelle. La brillance du plumage étant déterminée par les hormones sexuelles, on peut dire qu’il est directement proportionnel au degré de « virilité » d’un mâle et, donc, également à son degré d’agressivité et à ses capacités à défendre un territoire. Chez de nombreuses espèces, les mâles essayent d’attirer les femelles en les convaincant qu’ils ont quelque chose à leur offrir, et dans certains cas ils apportent effectivement de véritables cadeaux nuptiaux. Chez certaines mouches, la femelle choisit le mâle qui lui a fait don de l’aliment le plus savoureux. De plus, la durée de l’acte sexuel, déterminée par la femelle, augmente suivant la qualité et la taille du cadeau reçu. Chez beaucoup d’Oiseaux, le don nuptial est un territoire qui, notamment lorsque les ressources alimentaires sont limitées, peut être une offre assez alléchante. C'est ainsi que s'expliquent, par exemple, les danses territoriales 46 des mâles des tétras. Les femelles de grenouille-taureau choisissent le mâle qui détient la flaque d’eau dont la température est optimale pour le développement des œufs. Le mâle choisi est souvent aussi le plus grand. TERRITORIALITÉ ET COMPÉTITION Bien souvent, quand les animaux trouvent un lieu où vivre et se reproduire, ils dépensent leur temps et leur énergie à défendre ce territoire contre les intrus tant de leur espèce que d’autres espèces. On peut alors observer une série de comportements connus sous le nom de comportement territorial. Territoire et domaine vital Un territoire est une zone défendue par un individu ou par un groupe social et le comportement territorial se manifeste lorsqu’une concentration de ressources alimentaires ou un refuge contre les prédateurs rend particulièrement précieuse une zone déterminée. Le territoire est différent de ce qu’on appelle le domaine vital, qui constitue une surface plus vaste, fréquentée par un individu ou par un groupe social pour la recherche de sa nourriture, et qui n’est pas considérée comme « propriété privée ». En effet, les domaines vitaux de deux individus ou de groupes sociaux différents peuvent se superposer partiellement, alors que deux territoires différents ne peuvent être partagés. Il est important que l’énergie et le temps employés pour la défense du territoire ne représentent pas un coût supérieur au bénéfice obtenu par l’utilisation des ressources qui se trouvent à l’intérieur du territoire. Les animaux sont les protagonistes d’un bilan délicat entre les dépenses et les bénéfices liés à un choix comportemental. Le choix de défendre ou de ne pas défendre un territoire dépend beaucoup des circonstances, de la disponibilité et de la distribution des ressources nécessaires à la survie. Succès dans la reproduction D’habitude, les individus qui occupent un territoire ont un succès dans la reproduction supérieur à ceux qui restent en dehors. Un tel succès dérivant de la possession d’un territoire a été étudié chez des espèces différentes, tant chez les Invertébrés que chez les Vertébrés. Chez les Insectes, par exemple, une femelle de puceron du peuplier est capable de défendre des jours durant la feuille qu’elle a occupée la première, en chassant les autres femelles qui essayent de la partager avec elle. On a observé que la nourriture que cette femelle tire de sa feuille fournit plus d’énergie que celle qui a été utilisée pour chasser les intruses, ou que celle qui dériverait d’une feuille partagée avec une autre femelle. On peut faire le même raisonnement pour différentes espèces européennes d’Oiseaux, chez lesquelles un couple qui défend un territoire est capable d’accumuler et de défendre une quantité d’aliments suffisants pour nourrir les jeunes pendant la reproduction. Les individus qui ne possèdent pas de territoire ne se reproduisent pas et ils restent aux frontières des territoires occupés par les autres, en espérant qu’une place se libère pour eux. L’étendue du territoire 47 Défendre un territoire signifie aussi en contrôler constamment les limites. Pour cette raison, il ne convient pas de défendre une surface plus vaste que ce qui est nécessaire. La superficie du territoire dépend aussi des dimensions de l’animal. Le puceron du peuplier défend un territoire de quelques centimètres carrés, alors que des Oiseaux aquatiques défendent des portions de rivages pouvant s’étendre sur 600 m. La taille des zones défendues varie suivant la disponibilité des ressources. Par exemple, la largeur du territoire de certains Oiseaux australiens diminue au fur et à mesure que l’hiver avance car la disponibilité des fruits se réduit avec l’arrivée du froid. La défense du territoire La défense des territoires se fait de façon différente selon les espèces. Dans certains cas, les animaux doivent s’attaquer physiquement aux intrus, tandis que dans d’autres cas une série d’avertissements et de signaux suffisent pour affirmer la suprématie sur une zone ou sur une ressource. Chez certains Oiseaux, le répertoire vocal comprend une série d’appels ayant des significations précises : proclamation de la possession d’un arbre ; maintien à distance de possibles usurpateurs. Chez les lapins sauvages, tout comme chez beaucoup d’autres Mammifères, les limites du territoire sont clairement fixées par des messages odorants contenus dans les déjections et dans l’urine. Les femelles de lapin défendent leur terrier, qui leur sert de refuge contre les prédateurs, en déféquant à certains endroits - toujours les mêmes - de façon à en délimiter le périmètre. Les individus qui n’appartiennent pas à la famille qui occupe ce terrier, en détectant ces odeurs, comprennent qu’ils arrivent aux limites d’une « propriété privée » et s’éloignent, empêchant de la sorte les conflits qui pourraient avoir lieu et qui ne serait que perte de temps et d’énergie. Mais les disputes territoriales ne se résolvent pas toujours de façon indirecte. Chez des carnivores comme les hyènes, des groupes sociaux différents peuvent s’affronter aux frontières de leurs territoires et ces luttes peuvent être fatales à certains des participants. Au cours de périodes de sécheresse, lorsque l’emploi d’une ressource est accru, la lutte pour le territoire (une flaque d’eau, par exemple) peut devenir une question de vie ou de mort. Chez certains des singes également, on peut observer des combats fratricides lorsque des groupes différents doivent s’affrontent pour la possession d’une zone restreinte particulièrement riche en arbres fruitiers. VIVRE ENSEMBLE Dans le règne animal, il existe différents degrés de sociabilité. Cela va des animaux vivant en couples à des groupes d’individus plus ou moins nombreux qui interagissent. Mais les espèces qui vivent dans des sociétés complexes ne sont pas toujours les plus développées. Les humains, appartenant à une espèce particulièrement sociale, pensent qu’ils sont les animaux les plus réussis du point de vue de l’évolution. En fait, la naissance de la sociabilité est liée à l’apparition de conditions particulières qui impliquent que vivre avec ses semblables est plus avantageux que vivre tout seul. En effet, il existe des espèces qui ne sont sociales que dans certaines conditions, par exemple selon la disponibilité de la nourriture ou la présence de prédateurs. Nombre d’animaux ne sont pas génétiquement déterminés à être plus ou moins sociaux. Ils ont simplement répondu à des 48 sollicitations ambiantes suivant lesquelles certains comportements comme la sociabilité ont été sélectionnés avec plus de succès que d’autres. Nourriture et hiérarchie Il est souvent plus facile d’obtenir de la nourriture lorsqu'on vit dans un groupe que lorsqu’on est seul. Nous avons déjà montré les avantages de la chasse conjuguée. Certaines espèces, comme par exemple la mésange charbonnière et le pinson, deviennent grégaires (c'est-à-dire qu’elles vivent en groupe) surtout pendant l’hiver, lorsque la nourriture commence à manquer et qu’il est plus difficile d’en trouver en restant seuls. Il est aussi plus aisé de défendre une source de nourriture convoitée lorsqu’on est nombreux. Mais si la nourriture est en quantité limitée et qu’elle doit être consommée par un groupe d’individus, il est inévitable que cette ressource soit l’objet de compétition au sein de ce groupe. C’est pourquoi les animaux qui vivent dans des sociétés plus ou moins complexes obéissent à des règles de vie communautaire qui aident à résoudre les disputes d’une façon moins violente. En effet, les individus au sein d’un même groupe social sont organisés selon une échelle hiérarchique qui permet aux sujets de rang élevé d’être les premiers à avoir accès à la nourriture ou à un partenaire sexuel. Ce comportement a été observé pour la première fois chez les poules domestiques (raison pour laquelle on l’a appelé « hiérarchie du becquetage ») mais il existe chez d’autres espèces d’Oiseaux, comme les mésanges charbonnières, et chez beaucoup de Mammifères, comme les singes. Les dominants ont rarement besoin de lutter pour imposer leur place de chef. Les conflits avec les subordonnés sont symboliques et le sang ne coule que très rarement. Par exemple, le bâillement d’un mâle de babouin adulte, qui montre ses redoutables canines, est suffisant pour imposer sa supériorité sociale. Comportements altruistes Dans les sociétés animales, on ne rencontre pas que des comportements despotiques. En effet, les membres d’un groupe s’aident souvent entre eux. Parmi nombre d’exemples de comportements altruistes, citons les sentinelles des écureuils terrestres d’Amérique du Nord qui avertissent leurs congénères de l’arrivée d’un prédateur en émettant des sons particuliers. Ces signaux d’alarme rendent les sentinelles plus identifiables par le prédateur que leurs compagnons de tanière et, par conséquent, plus vulnérables. On trouve également des sentinelles chez les mangoustes striées africaines et les ouistitis. Ce qui incline les animaux à s’entraider reste une énigme pour les éthologistes, mais dans certains cas, il semble que ce soit le degré de parenté qui les motive et donc la nécessité de défendre des individus porteurs des mêmes gènes. La défense contre les prédateurs Le danger de la prédation pousse les animaux à se regrouper. Un groupe d’antilopes dans la savane africaine est beaucoup plus visible aux yeux d’un prédateur qu’une antilope isolée. Mais, ce groupe est plus à même de repérer un prédateur qu’un individu isolé. Un prédateur a besoin d’une certaine concentration pour effectuer une attaque avec succès. La fuite d’un zèbre qui a aperçu un 49 prédateur aux aguets dans l’herbe se transmet immédiatement à tous les zèbres du groupe, créant une confusion qui fait souvent renoncer le prédateur. LA COMMUNICATION Une grande partie du comportement animal consiste à émettre et recevoir des signaux. Pouvoir communiquer de façon rapide et efficace ses intentions, ou bien comprendre les intentions des autres permet de gagner du temps et de l’énergie. La communication peut être définie comme l’interaction entre animaux, c’est-à-dire que l’action d’un animal peut modifier le comportement de l’animal qui reçoit cette action. Distinguons la communication du signal. Le signal est émis par un individu, alors que la communication implique au moins deux individus. Un signal peut donc être émis, mais on ne peut dire qu’il y a eu communication si le destinataire ne le reçoit pas et qu’il ne modifie donc pas son comportement. La communication existe à tous les niveaux de l’échelle zoologique, des organismes unicellulaires jusqu’à l’homme, où elle a atteint un degré de complexité propre à notre espèce. Les modalités d’émission du signal dépendent de nombreux facteurs : la distance entre les individus qui communiquent, leur degré de familiarité, le type de milieu dans lequel a lieu la communication et le but du message. Signaux discrets Malgré leur variété, on peut essayer de classer les signaux des animaux en deux grandes catégories : les signaux discrets et les signaux graduels. Les signaux discrets sont les signaux du type « présent/absent » ou « oui/non ». La luminescence intermittente des vers luisants, par exemple, fait partie de cette catégorie. Chez ces Insectes, chaque espèce a une façon particulière, relativement variable, d’émettre de la lumière. Et puisque l’émission lumineuse fait partie de la parade nuptiale, il est peu probable que se produisent des accouplements entre des individus appartenant à des espèces différentes. La coloration vive des plumes de certains Oiseaux et de la peau de divers Poissons, comme l’épinoche, dont la couleur de l’abdomen annonce l’agressivité du mâle en phase de reproduction, sont autant de signaux discrets. En général, on peut dire que les signaux discrets aident les membres de la même espèce à s’identifier et à rester en contact. Signaux graduels Contrairement aux signaux discrets, les signaux graduels varient d’intensité et dépendent de la motivation de l’animal qui émet le signal. Plus l’animal est motivé, plus intense sera le signal. La danse de l’abeille qui annonce à ses compagnes la découverte d’une source de nourriture est un signal de type graduel, car la vivacité de la danse augmente suivant la qualité de la nourriture. Certaines fourmis émettent des substances d’alarme en quantité proportionnelle à l’intensité de la stimulation qu’elles reçoivent. Les signaux graduels sont utilisés par certains Mammifères pour communiquer une disposition agressive croissante, les positions et les sons variant graduellement. Chez les écureuils, par exemple, l’augmentation de l’agressivité s'accompagne d’un mouvement croissant de la queue, de lents balancements et de mouvements rapides et saccadés. Chez un macaque d’Asie méridionale, le rhésus, le premier niveau d’agressivité est signalé par un regard 50 fixe. Si l’interlocuteur refuse de se retirer, le macaque émet d’autres signaux comportementaux croissant en complexité et en intensité proportionnellement à l’intention agressive : cela va de la simple ouverture de la bouche, au balancement du corps, au battement du sol avec les pattes antérieures et à de petits bonds en avant. Quand tous ces signaux sont réunis, il est fort probable que le stade suivant soit l’attaque. Dans les sociétés de macaques, tout comme dans celles d’autres Mammifères dont la sociabilité est réglée par des hiérarchies de domination, le regard fixe ou une certaine position du corps sont suffisants pour réaffirmer le rang élevé, décourager tout défi et empêcher de la sorte les conflits directs. Les caractéristiques des signaux La stéréotypie et la spécificité sont des caractéristiques générales des systèmes de communication animale, tant chez les Invertébrés que chez les Vertébrés. Cela signifie qu’à l’intérieur d’une certaine espèce, les signaux émis et les réponses données sont constants et caractéristiques de cette espèce. Prenons pour exemple les mâles de certains papillons qui sont capables d’identifier ne serait-ce qu’une seule molécule de la sécrétion spécifique qui est émise par la femelle pour attirer ses partenaires potentiels. Ces mâles sont absolument insensibles à toute autre substance chimique diffusée dans l’air. Les appels territoriaux de multiples espèces d’Oiseaux et de nombreuses espèces de singes aussi sont très spécifiques. Astucieux et menteurs ? Des recherches éthologiques récentes, concernant principalement les grands singes, ont porté sur la question du « mensonge » animal. On a relevé certains cas, qui restent encore anecdotiques, de chimpanzés détournant l’attention de leurs compagnons de groupe pour pouvoir tirer avantage tout seuls d’une source de nourriture particulièrement appétissante. Ces descriptions demanderaient toutefois à être confirmées, ce qui n'est possible que dans des conditions contrôlées. TROUVER SON CHEMIN Pour tous les animaux, il est vital de savoir trouver son chemin. Il faut savoir où aller chercher la nourriture et comment retourner à son nid ou à sa tanière. Les animaux doivent apprendre à s’orienter. Pour cela, ils se servent de leurs différents sens. Certains animaux vivent dans un monde d’odeurs. D’autres sont principalement guidés par la vue. Avec la vue et l’odorat La plupart des Mammifères utilisent aussi bien des informations visuelles que des informations olfactives. Par exemple, un singe arboricole doit être en mesure, le matin, de quitter son arbre-nid pour aller sur les arbres fruitiers qui se trouvent dans son domaine vital ; et en fin de journée, il doit pouvoir revenir à son arbre-nid pour y passer la nuit. On pense que les individus reconnaissent une série de repères visuels, tels que des arbres ou des passages particuliers entre les branches, afin de pouvoir s’orienter à l’intérieur de leur milieu. De plus, pour marquer les arbres 51 considérés comme importants parce qu’ils sont riches en fruits ou utiles pour un refuge nocturne, les singes imprègnent leur écorce à l’aide de sécrétions odoriférantes produites par des glandes spécifiques. Ces signaux olfactifs ont plusieurs fonctions ; ils servent à écarter les intrus qui n’appartiennent pas au groupe social, mais ils servent aussi à ne pas se perdre, un peu comme les cailloux du Petit Poucet. La hyène et le maki (Lémurien de Madagascar) aspergent d’urine les arbustes et les plantes qui se trouvent sur leur territoire ; beaucoup de Mammifères de petite taille laissent une trace odorante tout au long de leur itinéraire grâce à des glandes spécialisées, situées sous leurs pattes. L’odorat des animaux qui emploient ce sens pour s’orienter est très développé. Les Poissons et les papillons, par exemple, savent localiser et reconnaître des concentrations extrêmement faibles de substances dissoutes dans l’eau ou dans l’air. Certains animaux, comme les fourmis, n’utilisent que des traces odorantes pour suivre et retrouver leur chemin. Avec l’ouïe La chauve-souris est l’exemple le plus impressionnant d’animal s’orientant grâce à l’ouïe. Ce Mammifère volant est caractérisé par un système de sonar extrêmement précis. Quand la chauve-souris est en vol, elle émet une série de vocalisations à haute fréquence, allant jusqu’à 200 impulsions par seconde, que l’oreille humaine ne peut percevoir. Le temps qui s’écoule entre l’émission de l’onde sonore et son retour - au moment où cette onde rencontre un obstacle - indique à la chauvesouris la localisation exacte de cet obstacle. Ce système lui permet de savoir à tout moment où elle se situe dans l’espace et de localiser en vol, même à grande distance, les papillons et les autres Insectes dont elle se nourrit. Les dauphins et certaines espèces de Poissons utilisent le même système dans le milieu aquatique, mais de manière moins efficace. Avec le champ magnétique Le champ magnétique terrestre peut, lui aussi, servir à l’orientation des animaux : le cas le plus étudié est celui du pigeon voyageur. Cet oiseau, s’il est emmené loin de son milieu, est capable d’y retourner même s’il doit traverser des lieux inconnus. Ce phénomène est appelé retour au gîte. On a démontré que cet animal n’utilise pour s’orienter ni le soleil, ni des repères visuels, puisque cette capacité persiste lorsque le ciel est couvert ou lorsqu’on limite le champ visuel du pigeon au moyen de verres de contact fumés. En revanche, si on applique de petits aimants sur la tête de l’oiseau, il n’est plus en mesure de retrouver le chemin du retour. On explique ces capacités exeptionnelles par la présence de magnétite (substance qui donne aux aimants leur propriété) dans le tissu nerveux des pigeons. Orientation et migrations Les spécialistes de l’orientation chez les animaux s’intéressent beaucoup aux migrations, c'est-à-dire aux déplacements saisonniers. Les migrations s’expliquent par les variations climatiques liées à la succession des saisons qui conditionnent la recherche de la nourriture. Un Mammifère des savanes africaines, le gnou, se déplace en groupes importants à chaque nouvelle saison à la recherche d’un bon 52 pâturage. Les déplacements sur de très grandes distances sont le fait de nombreux Oiseaux. Ce phénomène concerne principalement les Oiseaux qui nichent en Europe du Nord et qui se déplacent vers le sud à l’arrivée de l’hiver. Citons l’exemple le plus intéressant : la sterne arctique migre du Cercle Polaire Arctique pour atteindre la Patagonie, qui se trouve à 18 000 km environ de son point de départ. Les sternes volent sans relâche jusqu’à ce qu’elles arrivent à destination, se nourrissant des Poissons qu’elles réussissent à capturer en mer. Beaucoup d’Oiseaux utilisent des modalités différentes pour s’orienter au cours de leur migration. Certaines voyagent le jour s’orientant en fonction de la position du soleil ; d’autres voyagent la nuit, pour éviter les prédateurs et s’orientent selon la position des étoiles. En outre, on a observé que les Oiseaux peuvent se souvenir de la topographie des territoires qu’ils survolent. Les jeunes cygnes, par exemple, volant avec leurs parents et les adultes qui connaissent déjà la route, mémorisent les repères et apprennent à les utiliser pour leurs migrations futures. LES ANIMAUX DANS LE MONDE LES RÉGIONS ZOOGÉOGRAPHIQUES Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, notamment grâce aux observations d’Alfred R. Wallace recueillies et publiées dans les deux volumes de son ouvrage La Distribution géographique des Animaux, furent jetées les bases de la zoogéographie moderne, la science qui étudie la distribution des animaux dans le monde et les causes qui l’ont déterminée. Quelques années auparavant, Charles R. Darwin avait tenté de donner une explication des différences observables dans la distribution des animaux, en les rattachant aux observations sur les fossiles. Sur la base des idées de Darwin, Wallace conçut une subdivision du monde en régions (et sous-régions) zoogéographiques, qui par la suite furent rebaptisées et modifiées par différents auteurs. La classification la plus communément admise parmi celles qui ont été formulées récemment est la suivante : 1) Paléarctique : Europe, Asie au nord de l’Himalaya, Afrique au nord du Sahara et îles de l’Atlantique (Açores, Canaries et Madère) ; 2) Néarctique : Amérique du Nord, du Groenland au tropique du Cancer ; 3) Afrotropicale (ou Éthiopienne) : Afrique au sud du Sahara, y compris Madagascar (sous-région malgache) et partie méridionale de la péninsule arabique ; 4) Indomalaise (ou Orientale) : Asie méridionale (de l’Inde aux Moluques et aux Philippines) ; 5) Australopacifique (ou Australienne) : Australie, Nouvelle-Guinée, Tasmanie, Nouvelle-Zélande et toutes les îles de l’océan Pacifique ; 6) Néotropicale : Amérique du Sud (y compris l’isthme d’Amérique centrale au sud du désert de Sonora) et Antilles. Une modification importante du travail de Wallace fut apportée en 1882 par Heilprin, qui réunit les régions Paléarctique et Néarctique et proposa le terme de région Holarctique, sur la base des affinités existant entre la faune eurasiatique et la faune nord-américaine (à la différence de Wallace, qui mettait l’accent au contraire sur les relations entre la région Néarctique et la région Néotropicale). Heilprin identifia en outre dans la bande qui va de la région mexicaine de Sonora au 53 sud des États-Unis, la zone de transition entre les régions Néarctique et Néotropicale, régions qui avait été séparées entre la fin du Crétacé et le début du Tertiaire, périodes auxquelles remontait la faune de l’hémisphère boréal. D’autres zones de transition (chinoise, saharo-sindique, austromalaise) furent proposées par la suite par différents auteurs pour mettre en évidence le caractère graduel du passage entre une région et une autre. FINALITÉS ET PROBLÈMES DE LA ZOOGÉOGRAPHIE L’intention d’Alfred R. Wallace, puis d’autres savants par la suite, était de donner une explication des raisons pour lesquelles les espèces animales et végétales n’étaient pas distribuées de façon uniforme sur la planète, mais occupaient presque toujours des portions limitées des différentes régions du globe. L’explication pouvait être de type adaptatif. Chaque espèce vivante, en effet, évolue de telle façon que ses processus physiologiques et comportementaux ne puissent fonctionner que dans des conditions extérieures déterminées, si bien, par exemple, que les immenses oreilles de l’éléphant africain, qui lui servent à disperser la chaleur, seraient absolument antifonctionnelles sous le rude climat de l’Europe du Nord. Toutefois, les adaptations d’une espèce, même si elles constituent un facteur limitant de façon importante sa diffusion, ne peuvent pas expliquer entièrement sa distribution. En effet, dans des milieux très semblables, comme l’Amazonie et la forêt du Congo, il existe des faunes très différentes. La zoogéographie est précisément l’étude des causes de la distribution des espèces animales, et en tant que telle, elle doit être à même d’interpréter et de coordonner les données d’un nombre élevé de disciplines, tant biologiques que physiques et environnementales, qui vont de la systématique à la taxinomie, de la physiologie à l’écologie et à la biologie de l’évolution, de la paléontologie à la géologie, de la géophysique à la climatologie. Son objectif principal est de montrer que la distribution d’une espèce est le résultat de sa biologie et de son histoire évolutive. En général, une région zoogéographique est une portion du globe qui, par suite de son histoire géologique et de ses conditions climatologiques et physiques actuelles, se distingue des autres régions, avant tout en ce qui concerne la faune, témoignage vivant de millions d’années d’évolution biologique. À ce propos, plus que la simple liste des espèces, c'est la composition de la faune d’une région donnée qui est fondamentale, c'est-à-dire la présence simultanée de plusieurs espèces ou groupes d’espèces spécifiques d’une région, et qui la différencie de toutes les autres. Cela est possible même si les espèces ou les groupes ne sont pas du tout exclusifs de cette région. La découverte de nouvelles pièces paléontologiques et l’approfondissement des connaissances taxinomiques (systématique) de nombreux groupes d’animaux actuels mettent continuellement en question les critères de répartition géographique des faunes. Citons par exemple les Camélidés (la famille de chameaux) du Nouveau Monde. Ils ont longtemps été considérés comme typiquement néotropicaux, puis on a prouvé leur origine néarctique (voir Histoires de chameaux et de chevaux). Malgré l’objectivité relative de l'approche régionaliste de la zoogéographie, il est incontestable que cette méthode est riche d’enseignement pour les zoologistes, les paléontologues, les écologistes, les évolutionnistes et pour tous ceux qui essayent de décrire les modèles de distribution de la faune et d'établir leurs rapports avec les facteurs géographiques, écologiques et historiques qui les ont déterminés. Le but de la zoogéographie est donc de fournir des modèles pour la reconstruction de l’histoire évolutive des différents groupes d’animaux, dans le but d’interpréter la 54 distribution actuelle comme étant le résultat de facteurs biologiques (spéciation, radiation adaptative) et de facteurs physiques (événements climatiques et géologiques). LA RÉGION PALÉARCTIQUE Généralités La région Paléarctique est la plus étendue des régions zoogéographiques. Elle comprend l’Europe, l’Asie au nord de l’Himalaya, l’Afrique au nord du tropique du Cancer, la partie septentrionale de la péninsule arabique et, enfin, les îles de l’Atlantique (les Açores, les Canaries et Madère). Cette région est caractérisée par certaines des chaînes de montagnes les plus hautes du monde : les Pyrénées, les Alpes, le Caucase, l’Atlas et l’Himalaya, qui constituent de puissantes barrières physiques contre la dispersion des faunes. Le climat varie du régime arctique au régime méditerranéen, avec des hivers presque partout assez froids, si bien que beaucoup d’espèces de Vertébrés se sont adaptées aux basses températures, par des comportements tels que l’hibernation et la migration. Du nord au sud, cette région comprend au moins 5 biomes différents : la toundra, prairie constituée de rares espèces végétales spécialisées ; la taïga, vaste forêt de Conifères qui couvre presque entièrement la partie centrale du continent eurasiatique ; la forêt tempérée caducifoliée, la steppe et le désert. À la fin du Paléozoïque, il y a environ 250 millions d’années, l’Eurasie et l’Amérique du Nord formaient un seul ensemble continental, dit la Laurasie. Au cours du Crétacé (moins 70 millions d’années), la formation de l’Atlantique Nord provoqua la séparation de ces deux continents, qui fut définitivement accomplie au Tertiaire. Toutefois, pendant les glaciations du Quaternaire (qui ont eu lieu ces deux derniers millions d’années), l’Asie et l’Amérique du Nord entrèrent de nouveau à plusieurs reprises en contact par un pont continental correspondant à l’actuel détroit de Béring, entre la Sibérie et l’Alaska. C'est pourquoi, l’ours brun (Ursus arctos), le loup (Canis lupus), le renard rouge (Vulpes vulpes), le cerf noble (Cervus elaphus), le renne (Rangifer tarandus), l’élan (Alces alces) et beaucoup d’autres animaux habitent aujourd’hui tant l’Eurasie que l’Amérique du Nord. La faune La faune de la région Paléarctique est très pauvre en ce qui concerne le nombre d’espèces par rapport à la région Indomalaise et à la région Afrotropicale, dont elle est séparée respectivement par la chaîne de l’Himalaya et par le désert du Sahara, et présente un peuplement semblable à celui de la région Néarctique, surtout en ce qui concerne les Vertébrés. Parmi les Amphibiens, la distribution de la famille des Cryptobranchidés est très intéressante, car elle présente aussi bien des espèces asiatiques que des espèces nord-américaines. Parmi celles-ci, la salamandre géante du Japon (Megalobatrachus japonicus), avec ses 160 cm de longueur, est le plus grand Amphibien actuellement vivant. Le genre des tritons Hydromantes est encore plus surprenant ; il compte très peu d’espèces, présentes en Italie, dans le Sud-Est de la France et en Californie (région Néarctique). On pense que les espèces actuelles sont les survivances d’un groupe taxinomique ayant eu autrefois une aire vaste et continue, et qu'elles témoignent de l’ancienneté du groupe, qui est apparu avant 55 que la Laurasie ne se fragmente dans les continents eurasiatiques et nordaméricains actuels. Nombre de Reptiles de la région Paléarctique se retrouvent aussi bien dans la région Afrotropicale que dans la région Indomalaise. C'est le cas par exemple des cobras du genre Naja, répandus de l’Afrique du Nord à l’Extrême-Orient, et des Vipéridés, tels que le genre Vipera (les vipères) qui, en France, compte 4 espèces et qui est présent également dans les landes subarctiques. Dans la région sont également représentés les crocodiles, quoique avec deux espèces seulement, l’une dans l’aire nilotique, le crocodile du Nil (Crocodylus niloticus) et l’autre dans l’aire asiatique, l’alligator de Chine (Alligator sinensis). Ce dernier appartient à la famille des Alligatoridés, à la distribution amérasienne comme les Amphibiens Cryptobranchidés (voir ci-dessus). Les Oiseaux paléarctiques comptent pour la plupart des familles à distribution étendue, comprenant de nombreux groupes cosmopolites, tandis que les endémiques, c'est-à-dire les groupes exclusifs de cette zone géographique, sont très rares. Parmi les Mammifères, les seuls Périssodactyles de la région Paléarctique sont les Équidés, représentés par des endémiques de l’Asie centrale, parmi lesquels le cheval de Przewalski (Equus przewalskii), considéré comme proche de l’ancêtre de toutes les races équines domestiques. Parmi les Artiodactyles, citons les Camélidés, présents avec le genre Camelus en Asie (le chameau à deux bosses), ayant des liens de parenté avec les lamas sud-américains. Le panda doré (Ailurus fulgens) et le panda géant (Ailuropoda melanoleuca), à distribution asiatique extrêmement localisée, relégués dans quelques régions, Himalaya pour le premier, Chine pour le second, sont les représentants de deux familles différentes, celle des Procyonidés et celle des Ursidés. Les seuls représentants de l’ordre des Primates sont quelques macaques, en Chine et au Japon, ainsi que leur parent (Macaca sylvanus) de Gibraltar et de l’Atlas. L’histoire des chamois Il y a environ 12 000 ans, parallèlement à la dernière glaciation du Wurmien, l'aire du chamois pyrénéen ou isard Rupicapra pyrenaica était assez étendue et comprenait pratiquement tout le Sud de l’Europe, y compris l’Espagne, la France et la péninsule italienne. À la fin de la période glaciaire, le climat s’est progressivement réchauffé, poussant le chamois, animal de montagne, vers le nord et vers les sommets les plus élevés des massifs du Sud de l’Europe, tels que les Alpes, les Apennins et les Pyrénées. D’après une théorie récente, l'arrivée dans l'arc alpin d'une autre espèce de chamois (R. rupicapra) provenant du nord, aurait chassé la population locale appartenant à la première espèce, isolant pour toujours les chamois espagnols des chamois des Abruzzes. Le chamois des Abruzzes (R. pyrenaica ornata) appartiendrait en effet à une sous-espèce de l’isard (R. pyrenaica pyrenaica), tandis qu’il serait assez différent du chamois présent dans les Alpes. Le chamois des Abruzzes représenterait donc un exemple typique de faune glaciaire c'est-à-dire le représentant isolé d’une forme assez répandue aux périodes glaciaires - tels que ceux qu’on retrouve, tant chez les plantes que chez les animaux, dans l’Apennin central et méridional. LA RÉGION AFROTROPICALE 56 Généralités La région Afrotropicale (ou éthiopienne) comprend l’Afrique au sud du Sahara, le sud de la péninsule arabique et Madagascar ; elle inclut pour l'essentiel des biomes tropicaux. La végétation dominante est constituée de la savane, même s’il existe encore de grandes surfaces de forêt tropicale, aujourd’hui très réduites du fait de l’homme, s’étendant du golfe de la Guinée à la Rift Valley. La savane est caractérisée par des précipitations à caractère saisonnier. Elle est délimitée au nord par le Sahara et au sud par les déserts du Namib et du Kalahari. Le climat est presque partout tropical, à l’exception des reliefs de l’Afrique orientale et de l’Afrique du Sud, qui ont un climat tempéré. L’Arabie présente un climat désertique aride, plus tempéré le long de la côte. La Rift Valley, la plus grande faille de la surface terrestre, coupe la région à l’est, dans la direction nord-sud, et s’étend de la Palestine au Mozambique. Le long de son parcours, on trouve la plupart des grands lacs africains, tels que le lac Turkana (Rodolphe), le lac Albert, le lac Tanganyika et le lac Malawi (Nyassa). Les reliefs (les monts Kenya, Ruwenzori et Kilimandjaro), en raison de la latitude, sont caractérisés par un déphasage altimétrique des associations végétales par rapport aux montagnes des régions tempérées. La savane atteint en effet 1 500 m d’altitude, la forêt tropicale 2 400 m, la bande subalpine 4 800 m et la bande afro-alpine, composée d’associations de séneçon (famille des Composées) et de lobélie (famille des Lobéliacées), les sommets des montagnes, jusqu’aux 5 895 m du Kilimandjaro. La grande île de Madagascar, qui constitue la sous-région malgache, mérite, en raison de sa faune très particulière, un traitement à part (voir Madagascar). À la fin du Paléozoïque, le continent africain formait, avec l’Amérique du Sud, l’Inde, l’Australie et l’Antarctide, le supercontinent du Gondwana. Cent cinquante millions d’années plus tard, une fracture sépara l’Afrique de l’Amérique du Sud, formant l’Atlantique Sud, tandis que l’Antarctide et l’Australie se déplaçaient vers le sud et vers l’est. Plus tard, pendant l’Éocène, l’Inde entama son déplacement vers la masse continentale asiatique et l’Afrique ne resta en contact étroit qu’avec le continent européen et l’Asie par l’actuelle péninsule arabique. La faune La région Afrotropicale présente de fortes ressemblances avec la région Indomalaise. Le couloir constitué de la péninsule arabique et de la dépression de la mer Caspienne a été emprunté par un nombre élevé d’espèces, tel que le lion (Panthera leo) et la panthère (P. pardus), présents aujourd’hui dans les deux régions. La faune africaine est très riche et les espèces endémiques y sont nombreuses, à chaque niveau systématique. Parmi les Poissons d’eau douce figurent plusieurs exemples d’endémiques, tels que les Malaptéruridés et les Mormyridés (deux familles portant des organes électriques) ainsi que les anciens Polyptériformes (ordre endémique). Enfin, même s’il fait partie de la faune marine, citons le cœlacanthe (Latimeria chalumnae), un véritable fossile vivant découvert au XXe siècle au large des côtes de l’Afrique du Sud, dans le canal du Mozambique et aux Comores. Les Reptiles, très nombreux, comptent trois espèces de crocodiles (Osteolaemus tetraspis, Crocodylus niloticus et C. cataphractus) et, parmi les Ophidiens, certains des serpents les plus redoutables, tels que le mamba (Élapidé du genre Dendroaspis), les vipères géantes (Bitis) et les cobras (Élapidés appartenant à des genres différents). Les Oiseaux sont présents avec 20 ordres 57 divisés en 82 familles (la sous-région sud-africaine comprend à elle seule 914 espèces d’Oiseaux, plus de 1/10 de toutes les espèces présentes sur Terre). L’autruche (Struthio camelus) est le seul représentant d’une famille endémique dont les parents les plus proches habitent les régions Australopacifique et Néotropicale. Parmi les Mammifères, on trouve un seul ordre endémique : les Tubulidentés, avec une seule espèce, l’oryctérope (Orycteropus afer). On peut presque parler d'endémisme également dans le cas des Macroscélidés et des Hyracoïdes, qui s’étendent toutefois un peu dans la région Paléarctique, précisément en Afrique du Nord ou au Moyen-Orient. L’éléphant africain (Loxodonta africana) est le représentant africain des Proboscidiens, un groupe répandu aussi dans la région Indomalaise, et les Rhinocérotidés, présents en Afrique avec deux espèces, le rhinocéros blanc (Ceratotherium simum) et le rhinocéros noir (Diceros bicornis), se retrouvent aussi dans le Sud de l'Asie. Certaines familles, en revanche, sont exclusivement représentées dans la région Afrotropicale. C'est le cas des Hippopotamidés, avec l’hippopotame commun (Hippopotamus amphibius) et l’hippopotame nain (Choeropsis liberiensis), et des Giraffidés, avec la girafe (Giraffa camelopardalis) et l'okapi (Okapia johnstoni), survivance des forêts de l’Afrique centrale. Parmi les Bovidés, le buffle (Synceros caffer), les gnous (Connochaetes taurinus et C. gnou), l’impala (Aepyceros melampus), le kudu (genre Tragelaphus), la gazelle (genre Gazella) et de nombreuses autres espèces ne vivent que dans cette zone du monde. La faune de la région Afrotropicale comprend aussi un nombre élevé d’espèces de l’ordre des Primates. Parmi les singes typiques du Vieux Monde on trouve trois espèces d’Hominiens (en dehors de l’homme) : le gorille (Gorilla gorilla), avec deux sous-espèces, l’une typique des forêts de plaines (G. gorilla gorilla) et l’autre typique des montagnes (G. gorilla beringei), cette dernière menacée de disparition ; le chimpanzé (Pan troglodytes) et le chimpanzé nain, ou bonobo (P. paniscus), que certains savants considèrent comme l’animal le plus proche de l’espèce humaine. Parmi les Félidés, on trouve des genres également présents dans les régions Paléarctique et Indomalaise : Panthera (avec le lion et la panthère), Felis (avec différentes espèces) et Acinonyx (représenté par une seule espèce : le guépard). Pourquoi les ours ne vivent-ils pas en Afrique ? La famille des Ursidés est apparue en Europe au Miocène, à partir de formes semblables aux Canidés actuels, puis elle s’est répandue, au Pliocène et au Pléistocène, en Asie et, de là, aux Amériques. Toutefois, il semble que les ours ne sont jamais parvenus jusqu'à la région Afrotropicale, peut-être à cause de leur incapacité à franchir les grands déserts de ces régions. Des témoignages fossiles nous montrent que, autrefois, les ours étaient également présents dans les montagnes de l’Atlas, qu'ils les atteignirent sans doute par le détroit de Gibraltar, pendant l’une des périodes où la Méditerranée, perdant le contact avec l’Atlantique, baissa considérablement de niveau, devenant un grand lac salé. Depuis l’Atlas, ils ne se répandirent jamais vers le sud du fait de l’existence du Sahara qui, pour des animaux comme les ours, liés par excellence aux climats tempérés et humides, constituait un obstacle absolument insurmontable. L’espèce dont il est question est l’ours brun (Ursus arctos) qui persista dans le Maghreb jusqu’au début de notre siècle. LA RÉGION INDOMALAISE 58 Généralités La région Indomalaise, très riche en milieux et en formes de vie, s’étend au sud de l’Himalaya, et correspond à l’Asie tropicale et équatoriale. Elle comprend le souscontinent indien (qui va de la vallée de l’Indus à celle du Gange), le Sud de la Chine, l’Indochine, la péninsule malaise, l’archipel de la Sonde et celui des Philippines, les Maldives, les Moluques et bien d’autres îles mineures comprises entre 20° et 10° de latitude sud. La région Indomalaise est caractérisée par un climat chaud et humide, mais on y trouve aussi des zones limitées à régime tempéré ou aride. Les moussons, vents périodiques qui déterminent une forte pluviosité en été sur l’Inde et le Sud de la Chine, et l’hiver au niveau des îles de la Sonde et de la Nouvelle-Guinée, sont typiques de cette région. Les autres zones reçoivent des pluies plus régulières au cours de l’année, et elles sont pour la plupart couvertes de forêts tropicales. Les forêts sont souvent marécageuses et se transforment en mangroves le long des côtes et au niveau des deltas des fleuves. Les massifs montagneux sont peu nombreux et d’une altitude modeste. Les rares sommets dépassant 3 000 m d’altitude sont pour la plupart de nature volcanique et constituent rarement de véritables chaînes de montagne. Les grands fleuves sont nombreux, du Mékong à l’Indus en passant par le Brahmapoutre et le Gange, tandis que les lacs sont pour ainsi dire inexistants. En ce qui concerne les événements géologiques qui ont affecté l'Asie du Sud-Est, ils ne sont pas bien connus, à la différence de ceux de l’Inde qui, après s’être séparée du continent africain (voir région Afrotropicale), est entrée en contact avec le continent asiatique, provoquant le soulèvement de la chaîne de l’Himalaya. La ligne de Wallace Alors que les limites septentrionales de la région Indomalaise sont plus ou moins nettement définies par les grands massifs montagneux de l’Asie, dans sa partie méridionale cette région s’unit à la région Australopacifique par une vaste zone insulaire très intéressante du point de vue zoogéographique. Dans cette zone, appelée Wallacée, et dont font partie les Philippines, les Moluques et Célèbes ainsi que les îles orientales de la Sonde, on trouve un mélange bizarre d’éléments asiatiques et d’éléments d’origine australienne, si bien que son attribution à l’une ou à l’autre de ces régions a fait l’objet, des années durant, de débats animés entre les savants, depuis l’époque d'Alfred R. Wallace jusqu’à nos jours. La « ligne de Wallace » sépare ainsi Bornéo de Célèbes. La faune Du point de vue de la faune, la région Indomalaise est caractérisée par un nombre très réduit d’endémiques. Ce qui frappe dans cette région, c'est le nombre élevé d’éléments qu'elle partage avec les régions Paléarctique, Australopacifique et même Néotropicale, comme c’est le cas pour le genre Tapirus (famille des Tapiridés ou tapirs). Les crocodiles comptent 4 espèces, parmi lesquelles l’énorme crocodile marin (Crocodylus porosus), le plus grand des Reptiles vivants et le gavial du Gange (Gavialis gangeticus), la seule espèce d’une famille - les Gavialidés - qui constitue un endémique de la région. L’un des plus grands Sauriens vivant est le 59 dragon de Komodo, un varan endémique présent sur quelques îles méridionales de la ligne de Wallace, et qui mesure 3 m de longueur. Les Oiseaux sont nombreux, mais les groupes exclusifs de cette région sont rares. Parmi ces groupes, citons les martinets à huppe (famille des Hémiprocnidés), qui construisent un nid fait de petits morceaux d’écorce et de plumes, pas plus grand qu’une pièce de monnaie, auquel ils font adhérer un œuf unique. Beaucoup de Gallinacés, tels que le paon (Pavo cristatus) et le coq (Gallus gallus), ancêtre du coq domestique, sont originaires de cette région. Les Mammifères sont bien représentés. Seuls quelques ordres mineurs sont absents. Les Marsupiaux sont présents avec une seule famille, celle des Phalangéridés, répandue jusqu’à Célèbes avec les phalangers tachetés (genre Phalanger). L’ordre des Dermoptères est endémique. Appartiennent à cet ordre deux espèces de Galéopithèques (genre Cynocephalus), animaux ayant la forme d’un écureuil et dotés d’un patagium (membrane poilue présente entre la tête, les pattes et la base de la queue) qui leur permet d’effectuer des vols planés de plus de 130 m, grâce auxquels, la nuit, ils se déplacent d'un arbre à l'autre de la forêt. Parmi les Chiroptères, on trouve les chauves-souris frugivores de la famille des Ptéropidés - ou roussettes dites renards volants - avec le genre Pteropus, qui compte des espèces ayant une envergure de plus de 170 cm, répandues aussi en Afrique et en Australie. Parmi les Périssodactyles, en dehors du tapir chabraque ou tapir malais (Tapirus indicus), on rencontre trois espèces différentes de rhinocéros, des genres Rhinoceros et Dicerorhinus. L’aire afro-asiatique des Rhinocérotidés, autrefois continue, est aujourd’hui disjointe à cause de l’action de l’homme. Les Carnivores sont représentés par toutes les familles. Aux Ursidés appartient l’ours malais (Helarctos malayanus), le plus petit de la famille. Les Félidés sont présents avec 4 genres. Parmi eux, citons le genre Panthera, avec différentes sous-espèces de panthère (P. pardus), à grande distribution Paléarctique et afrotropicale, et un animal plutôt rare, la panthère nébuleuse (Neofelis nebulosa). Le lion (P. leo), dans une zone très limitée de l’Inde, et le tigre (P. tigris), avec de nombreuses races géographiques, y sont présents également. Les 4 espèces de Canidés sont représentées dans la région Paléarctique. Les Proboscidiens comptent une espèce comme l’éléphant d’Asie (Elephas maximus), parent de moindre taille de l’éléphant africain (Loxodonta africana). Les singes anthropomorphes sont nombreux, avec 11 espèces de gibbons (genre Hylobates), spécialisés dans la brachiation (locomotion qui leur permet de se mouvoir aisément entre les branches les plus élevées des arbres, auxquelles ils s’accrochent grâce à leurs bras très longs) et l’orang-outan (Pongo pygmaeus), un grand singe répandu à Bornéo et à Sumatra, menacé aujourd'hui de disparition à cause de la grave déforestation de ces régions. Les faunes mélangées La région Indomalaise, du fait de sa position géographique, présente de grandes lignes de transition avec les régions voisines, la région Paléarctique au nord et à l’ouest, et la région Australopacifique au sud-est. En particulier, la dépression de la mer Caspienne à l’ouest et les plaines de la Chine au nord-est constituent depuis toujours des couloirs naturels pour le déplacement de la faune, dans les deux sens, tandis que la mer de la Sonde et les îles qui s’échelonnent entre l’Asie et l’Australie constituent, semble-t-il, une barrière plus efficace. Il semble en outre que la région Indomalaise ait été en même temps l'aire d’origine de nombreux groupes d’animaux et l'aire d’immigration pour beaucoup d’autres, si bien que la faune actuelle est le résultat de mélanges anciens et récents. 60 LA RÉGION AUSTRALOPACIFIQUE Généralités L’Australie, la Nouvelle-Guinée, la Nouvelle-Zélande, la Tasmanie et les îles du Pacifique constituent la région Australopacifique. La seule zone importante de transition et de contact avec d’autres faunes, à savoir celle de la région Indomalaise, correspond aux lignes de Wallace et de Weber. Le continent australien constitue l'essentiel de cette région et il est divisé en trois secteurs du point de vue morphologique et climatique. Le secteur centre-ouest est caractérisé par un climat chaud et aride, plus accentué vers le centre, de plus en plus tempéré le long des côtes occidentales, et présentant un caractère typiquement tropical le long de la bande côtière septentrionale. Le relief est très modeste, concentré le long de la côte occidentale. La végétation, à l’exclusion de la bande de forêt tropicale du Nord, est de type semi-désertique, ou bien caractérisée par des savanes et des maquis d'eucalyptus. Le secteur du grand bassin Artésien, qui va du golfe de Carpentaria à l’Australie méridionale, est diversifié et caractérisé par des biomes différents, des déserts, maquis et savanes arides dominées par les eucalyptus et les acacias. Dans cette zone, il existe des dépressions occupées par des bassins lacustres salés, comme le lac d’Eyre. Le troisième secteur correspond à l’Australie orientale, entre la péninsule d’York et les Alpes australiennes, dont le sommet le plus élevé est le mont Kosciusko (2 230 m), et présente un climat tempéré, plus ou moins sec. Dans l’ensemble, le climat de l’Australie est aride, les fleuves sont généralement à débit intermittent et les lacs se présentent comme des étangs saumâtres. On observe des différences importantes entre le Nord et le Sud du continent, et entre la zone centrale, aride, et la zone côtière, tempérée. La Nouvelle-Guinée est séparée de l’Australie par quelques centaines de kilomètres de mer peu profonde. L’île est couverte au Nord d’énormes chaînes de montagne, dépassant 5 000 m d’altitude. De nombreux fleuves coulent vers le sud, constituant un grand réseau fluvial qui occupe des plaines étendues. Le climat est équatorial, à pluviosité élevée. Les forêts pluviales et les mangroves y dominent. À des altitudes plus élevées, on passe des forêts pluviales aux forêts tempérées, allant jusqu’aux hêtraies de Notophagus et aux biomes de montagne. La Nouvelle-Zélande est constituée d’un archipel situé à environ 1 500-2 000 km au sud-est de l’Australie. Les îles sont riches en volcans et en lacs, tant d’origine volcanique que d’origine glaciaire. Les sommets les plus élevés des Alpes néozélandaises atteignent 3 000 m d’altitude dans l’île du Nord. Le climat est tempéré océanique, et la végétation passe de la forêt tropicale de l’île du Nord aux hêtraies de Notophagus et aux biomes de montagne de l’île du Sud. La Tasmanie est un appendice de l’Australie, assimilable à la zone sud-est de ce continent du point de vue morphologique et climatique. L’Australie faisait partie du Gondwana, dont elle se sépara au Crétacé moyen en même temps que l’Antarctique, avec lequel elle resta en contact pendant 50 millions d’années encore, jusqu’à l’Éocène. Au cours des 50 derniers millions d’années, l’Australie a connu un isolement total, qui a abouti à la situation actuelle, très particulière, de sa faune. La faune 61 Parmi les Reptiles, l’ordre des Rhynchocéphales, relique endémique, comprend deux espèces seulement de tuataras ou sphénodons (Sphenodon) en NouvelleZélande. Elles sont considérées comme les seuls descendants d’un groupe de Lépidosauriens (Rhynchocéphales), qui eut sa période de splendeur maximum au Mésozoïque, de moins 70 à moins 200 millions d’années. Les Squamates comprennent un nombre élevé de varans (plus de la moitié des espèces vivantes) et beaucoup de serpents venimeux de la famille des Élapidés. Parmi les Oiseaux, les Casuariiformes et les Aptérygiformes sont des ordres endémiques. Les premiers comprennent l’émeu (Dromaius novaehollandiae) et trois espèces de casoar (genre Casuarius), grands Oiseaux incapables de voler ayant des liens de parenté avec l’autruche africaine et les nandous sud-américains ; les seconds comprennent trois espèces de kiwis (genre Apteryx) vivant dans les forêts de la Nouvelle-Zélande. Ce sont des Oiseaux dotés d’ailes minuscules et cachées par des plumes rêches, semblables à des soies. Ils ont des habitudes nocturnes, creusent des terriers où ils se réfugient pendant le jour et se nourrissent d’Invertébrés, qu’ils trouvent en sondant le sol au moyen de leur long bec muni de narines près de l'extrémité, fait unique chez les Oiseaux. Leurs parents les plus proches étaient, semble-t-il, les moas de la Nouvelle-Zélande, un groupe d’Oiseaux - mesurant jusqu'à 3 m de hauteur - qui comptait 24 espèces (réunies en 7 genres et 2 familles), qui ont disparu il y a plus de sept siècles du fait des chasseurs maoris. Le peuplement des Mammifères est unique et caractéristique. À l’exception d’environ 50 espèces de Rongeurs, de Chiroptères et du dingo (un chien introduit par l’homme et redevenu sauvage), la faune des Mammifères de cette région n’était constituée, avant la colonisation des Européens, que de Monotrèmes et de Marsupiaux. Ce n'est que plus tard que furent introduites de nombreuses espèces domestiques et sauvages provenant de l’Europe. Les Monotrèmes sont endémiques et divisés en deux familles. La famille des Tachyglossidés comprend 2 espèces d’échidnés (genres Tachyglossus et Zaglossus), et la famille des Ornithorhynchidés ne comprend que l'ornithorhynque (Ornithorhynchus anatinus). Il s’agit de Mammifères extrêmement primitifs, qui conservent en fait de nombreux caractères de Reptiles. Ils pondent car ils ne possèdent ni placenta ni mamelles à proprement parler, tandis que l’orifice génital est un cloaque comme chez les Reptiles. Les Marsupiaux, bien qu’ils ne soient pas du tout exclusifs de cette région (ils sont aussi présents dans les Amériques), en représentent le groupe le plus caractéristique. L’isolement prolongé de l’Australie et l'absence de compétiteurs ont déterminé une extraordinaire différenciation des formes de ces Mammifères, si bien qu’aujourd’hui les Marsupiaux jouent dans leur ensemble pratiquement tous les rôles écologiques (voir La chaîne alimentaire) que les Mammifères placentaires jouent dans le reste du monde. Parmi les espèces les plus remarquables, citons le diable de Tasmanie (Sarcophilus harrisi, famille des Dasyuridés) et le thylacine, ou loup marsupial (Thylacinus cynocephalus, famille des Thilacynidés) probablement éteint, le wombat commun (Vombatus ursinus, famille des Wombatidés), et les kangourous en général (famille des Macropodidés) auxquels appartiennent 57 espèces, parmi lesquelles les véritables kangourous, les wallabies, et les kangourous-rats. Aux Phascolarctidés appartient le koala (Phascolarctos cinereus), répandu dans les forêts d’eucalyptus. Un long isolement Les Marsupiaux sont apparus en Amérique du Nord, il y a plus de 100 millions d’années. De là, à l'époque où la plaque continentale européenne et la plaque 62 continentale nord-américaine étaient unies (voir mouvements de la croûte terrestre), ils sont parvenus en Europe, où on en a découvert des formes fossiles, et en Amérique du Sud, où ils ont subi une première différenciation importante. Ensuite, ils sont arrivés en Australie où, sans compétiteurs et pouvant exploiter une quantité élevée de niches écologiques libres, ils se sont diversifiés, donnant lieu aux formes actuelles. À la même époque ont eu lieu la diversification et la diffusion des Mammifères à placenta, qui n’ont toutefois jamais envahi en masse l’Australie, restée entre-temps isolée du reste du monde pendant 50 millions d’années. Ailleurs, comme en Europe et dans l’Antarctique, les Marsupiaux ont disparu à cause des variations du climat (l’Antarctique par exemple ne se trouvait pas aussi au sud qu'aujourd’hui et n’avait pas un climat aussi rigide) ou de la compétition avec les Mammifères placentaires. L’Amérique du Sud, qui constitue elle aussi un continent-île, étant restée longtemps isolée du reste du monde et n'ayant été colonisée que tardivement par les Mammifères placentaires provenant du nord, compte encore environ 70 espèces de Marsupiaux. L’une de ces espèces, l’opossum de Virginie (Didelphis virginiana) a récemment colonisé l’Amérique du Nord en passant par l'isthme de Panama. LA RÉGION NÉARCTIQUE Généralités La région Néarctique comprend toute l’Amérique au nord du tropique du Cancer, et le Groenland. Il s’agit d’une zone dominée par un climat tempéré froid, à cause de la vaste bande subpolaire qui la borde de l’ouest (îles Aléoutiennes) à l’est (Groenland), et au sud jusqu’au soixantième parallèle. Plus au sud, la région est entièrement couverte de forêts de Conifères (taïga). On trouve ensuite, le long de la côte Est des États-Unis, jusqu’en Floride et au golfe du Mexique, des forêts tempérées caducifoliées, des forêts subtropicales côtières et des formations de mangroves, tandis qu’à l’Ouest dominent les prairies qui, encore plus au Sud et dans les zones internes isolées par l’apport de vents océaniques, revêtent un caractère aride, laissant place aux déserts. Dans les Montagnes Rocheuses et le long des côtes du Pacifique se développent respectivement des forêts de grands Conifères et des formations méditerranéennes sempervirentes. Les montagnes sont concentrées à l'ouest du continent et, avec les déserts (Mojave, Sonora, vallée de la Mort), elles ont constitué un obstacle efficace contre la dispersion vers l’ouest de familles entières de Vertébrés. La région Néarctique présente donc tous les biomes des climats froids, tempérés et subtropicaux. La faune Les vicissitudes géologiques du continent nord-américain et les raisons des ressemblances existant entre la région Paléarctique et la région Néarctique sont traitées ailleurs (voir La région Paléarctique). En ce qui concerne les Vertébrés, ajoutons que la composante holarctique, c'est-à-dire l’ensemble des groupes zoologiques communs à l’Eurasie et à l’Amérique du Nord, est prédominante par rapport à la composante tropicale, d’origine sud-américaine. Parmi les Amphibiens, il existe une famille endémique d’Anoures (les Ascaphidés, dits « grenouilles à queue ») et une autre, présente aussi dans la région Néotropicale (les Rhinophrynidés), tandis que les autres sont pour la plupart à grande distribution. 63 Chez les Urodèles, on trouve de nombreuses familles très importantes du point de vue zoogéographique, tels que les Cryptobranchidés (ou salamandres géantes) également présents en Asie, les Protéidés qui présentent un genre relique en Europe et les Pléthodontidés. En plus, il y a deux familles endémiques aux membres réduits, les Amphiumidés (capables de mordre comme les serpents) et les Sirénidés, qui gardent leurs branchies et leur mode de vie aquatique même quand ils sont adultes. Parmi les Reptiles, citons une famille de tortues typique du Nouveau Monde, les Chélydridés, à laquelle appartient la tortue alligator (Macrochelys temmincki). Les crocodiles sont surtout représentés par la famille des Alligatoridés, que l’on retrouve en Chine. Parmi les serpents, il ne faut pas oublier les Crotalidés, qui comprennent les serpents à sonnettes, comparables aux Vipéridés et assez venimeux. En ce qui concerne les Oiseaux, citons les vautours du Nouveau Monde (famille des Cathartidés), parmi lesquels le, très rare, condor de Californie (Gymnogyps californianus), l’un des plus grands Oiseaux qui volent. Les Mammifères comptent pour la plupart des familles à distribution holarctique. On remarque la présence d’une espèce de Marsupiaux, l’opossum de Virginie (Didelphis virginiana), à la répartition en forte expansion. Tout comme l’opossum, le tatou à neuf bandes (Dasypus novemcinctus) et le raton laveur (Procyon lotor) ont envahi la région à partir du sud, par le détroit de Panama. Parmi les Artiodactyles, sont présents l’élan (Alces alces) et le caribou (Rangifer tarandus caribou), une forme Néarctique du renne européen (R. tarandus tarandus). La famille des Antilocapridés est en revanche une famille exclusive à laquelle n’appartient qu’une espèce, l’antilocapre (Antilocapra americana), le seul animal survivant d’un groupe d’Artiodactyles dont la structure des cornes était un intermédiaire entre la structure ramifiée et caduque (ou bois) des Cervidés et la structure entourée d’une enveloppe cornée et à croissance progressive des Bovidés. Histoires de chameaux et de chevaux Les Camélidés sont une famille à distribution disjointe, Néotropicale et Paléarctique. Ils naquirent en Amérique du Nord il y a plus de 50 millions d’années, dans l’Éocène, et à partir de là, ils se diffusèrent en Eurasie (grâce à des périodes de continuité territoriale entre les continents), puis en Amérique du Sud, se diversifiant dans les genres asiatiques (Camelus) et sud-américains (Lama et Vicugna) actuels. Leur disparition dans leur région d’origine explique l’actuelle distribution disjointe de la famille, et leur absence actuelle en Amérique du Nord. Le chameau à deux bosses vit en Asie centrale, et le dromadaire en Afrique et au Proche-Orient ; le lama, l’alpaca, le guanaco et la vigogne habitent les Andes. Les Équidés eurent une destinée identique et aujourd’hui ils ne sont présents que dans la région Afrotropicale (avec les zèbres) et dans la région Paléarctique (avec les ânes, les hémiones et le cheval de Przewalski), mais ils sont d’origine nordaméricaine. Le cheval domestique fut introduit en Amérique du Nord par l’homme, à une époque récente, quelques millions d’années après la disparition de ses ancêtres dans ce continent. LA RÉGION NÉOTROPICALE Généralités 64 La région Néotropicale comprend toute l'Amérique du Sud, l'Amérique Centrale au sud de la zone de transition sonorienne (voir Les régions zoogéographiques), les Antilles, l'île de la Trinité et les Galápagos. Le continent sud-américain est bordé sur toute sa longueur côté ouest par la cordillère des Andes, à l'est de laquelle s'étend sans solution de continuité la forêt tropicale de la sous-région brésilienne, sillonnée par un réseau fluvial imposant. Le bassin hydrographique de l'Amazone présente une extension d'environ 7 millions de kilomètres carrés, 14 fois la superficie de la France, et plusieurs autres rivières, comme l'Orinoco, le Paranà et le Madeira, mesurent plus de 3 000 km de long. L'énorme richesse en eau, la pente minimale du réseau hydrographique et la constance des précipitations créent des conditions de grande stabilité, qui se reflètent sur les communautés animales et végétales, ce qui favorise une biodiversité élevée. Si on se déplace vers le sud et vers l'ouest, dans la sous-région chilienne, la latitude et l'altitude modifient les conditions climatiques et, par conséquent, la distribution des animaux et des plantes. Sur les Andes, qui atteignent avec l'Aconcagua 6 960 m d'altitude, 4 phases climatiques différentes se succèdent, avec une diminution progressive de la diversité biologique. La cordillère des Andes constitue en outre une barrière infranchissable pour les faunes, et sépare deux situations-limites en termes d'environnement : la côte du Pacifique, aride et peu peuplée, qui culmine dans le désert d'Atacama ; et la région amazonienne, où la pluviosité peut être 400 fois plus élevée que sur le versant opposé, et qui présente une forêt pluviale d'une richesse biologique immense. Plus on va vers le sud, plus l'aridité augmente, et plus la température diminue. Aussi bien sur le versant atlantique que sur le versant pacifique prédominent d'abord le chaco, une plaine alluvionnaire couverte de forêts tempérées de caducifoliés et comprenant des zones marécageuses, puis des prairies et des steppes (les pampas argentines), et enfin un paysage semblable à la toundra, en Patagonie et dans la Terre de Feu. La faune La faune de la région Néotropicale est caractérisée par un nombre élevé d'endémiques et de groupes reliques. Cela est dû essentiellement à trois facteurs. L'action anthropique a été longtemps très limitée, ce qui a favorisé le maintien de la diversité biologique dans les écosystèmes. Les communautés tropicales sont en elles-mêmes plus stables que celles des régions tempérées (et cette stabilité, favorisée par un habitat presque optimal, augmente et maintient la diversité des espèces), et, enfin, le lien entre l'Amérique du Sud et le reste des terres émergées a toujours été très limité (si bien que l'Amérique du Sud a représenté une sorte de continent-île où les échanges de faune par voie de terre ont eu lieu exclusivement par l'étroit corridor de Panama). Parmi les Poissons, nous trouvons les piranhas (genre Serrasalmus), appartenant à une famille, celle des Characidés, qui compte dans cette région environ 600 espèces, l'arapaima (Arapaima gigas, famille des Ostéoglossidés), qui, avec son quintal et ses 4,5 m de longueur, est l'un des plus grands Poissons d'eau douce existant sur Terre, et la gymnote, ou anguille électrique (Electrophorus electricus, famille des Gymnotidés), pouvant atteindre 2,3 m de longueur, et capable de produire des décharges électriques de 650 volts, avec lesquelles il tue ses proies. Les Amphibiens comprennent un nombre élevé d’endémiques. Sur 10 familles d'anoures, 4 sont endémiques. Parmi les plus intéressants, citons les Pipidés, que l’on rencontre aussi dans la région Afrotropicale. Les dendrobates (famille des Ranidés) sont de petites grenouilles arboricoles qui produisent des venins cutanés utilisés par les Indiens d’Amazonie 65 pour envenimer la pointe de leurs flèches. Les Reptiles sont divisés en 20 familles. Parmi les Chéloniens citons la mata mata (Chelus fimbriatus), un étrange prédateur des rivières au cou très long, et la tortue d’Arrau (Podocnemis expansa), la plus grande des tortues d’eau douce. Les crocodiles appartiennent à deux familles, celle des Crocodilidés et celle des Alligatoridés. Aux Iguanidés appartiennent l’iguane marin (Amblyrhynchus cristatus) des îles Galápagos, le seul Saurien du monde strictement marin, et les étranges basilics (genre Basiliscus), capables de courir plusieurs mètres sur la surface de l’eau. L'anaconda (Eunectes murinus), un Boïdé endémique, est l’un des serpents les plus grands au monde, tandis que les serpents corail (Micrurus et Leptomicrurus, famille des Élapidés) sont parmi les plus venimeux. Les Oiseaux constituent la composante la plus riche et la plus diversifiée des Vertébrés néotropicaux. Deux ordres endémiques importants y sont présents : les Rhéiformes et les Tinamiformes. Les premiers sont de grands Oiseaux incapables de voler, représentés par deux espèces de nandous (genres Rhea et Pterocnemia) ; les seconds comprennent 46 espèces de tinamous, des Oiseaux semblables aux Gallinacés, mais ayant une structure du crâne semblable à celle des Ratites, auxquels ils sont proches du point de vue phylogénétique (phylogenèse). Les manchots sont également présents (ordre des Sphénisciformes), de la Terre de Feu aux îles Galápagos. Parmi les Falconiformes, citons le condor des Andes (Vultur gryphus) et le vautour pape (Sarcorhamphus papa). Chez les Cuculiformes, citons l’étrange hoazin (Opisthocomus hoazin) : il s’agit d’un Oiseau caractérisé par la présence, chez les jeunes, de serres tridactyles sur les ailes, qui sont utilisées pour s’agripper aux branches. Plus que toutes les autres espèces vivantes, cet Oiseau, le seul représentant de la famille des Opisthocomidés, endémique de l’Amazonie, présente de fortes ressemblances avec l’Archaeopteryx disparu (voir évolution des Oiseaux). Les Psittaciformes sont nombreux, et comprennent beaucoup de genres et d’espèces endémiques de perroquets. Parmi ceux-ci, figurent les grands Ara macao et A. ararauna. Les Trochilidés (colibris) sont presque tous endémiques de cette région, et comprennent des centaines d’espèces très petites et fort colorées, dont les dimensions varient de 6 à 20 cm, capables de battre leurs ailes 70 fois par seconde, pendant qu’ils explorent les fleurs à la recherche du nectar dont ils se nourrissent. Parmi les Piciformes, la famille des Ramphastidés, à laquelle appartiennent les toucans avec 37 espèces, est endémique. Parmi les Passériformes, les pinsons de Darwin (Embérizidés, sous-famille des Geospizinés), sont présents sur les îles Galápagos avec 13 espèces. Chez les Mammifères, enfin, sont caractéristiques de la région Néotropicale, les 73 espèces de Marsupiaux dérivés d’ancêtres provenant de l’Amérique du Nord (voir Un long isolement), l’ordre endémique des Xénarthres - auquel appartiennent le tamanoir (Myrmecophaga tridactyla) et les paresseux (genres Bradypus et Choloepus) -, et les grands Félidés, tels que le puma (Felis concolor) et le jaguar (Panthera onca) - présents tous les deux également dans la région Néarctique. Les Camélidés (ordre des Artiodactyles) et les Tapiridés (ordre des Périssodactyles) sont également importants, de par leur extension géographique. Les premiers sont représentés notamment par le lama (Lama guanicoe) et par la vigogne (L. vicugna) et appartiennent à une famille à aire disjointe néotropicale et paléarctique, ayant une origine néarctique (voir Histoires de chameaux et de chevaux). Les seconds, avec trois espèces du genre Tapirus (tapirs), ont, eux, une aire disjointe néotropicale et indomalaise, due au mélange des faunes qui s’est produit pendant le Cénozoïque entre les plaques continentales correspondant aux actuels continents asiatique, nord-américain et sud-américain. 66 Des Oiseaux inaptes au vol Les nandous, dits aussi autruches américaines, sont de grands Oiseaux sans sternum caréné, donc inaptes au vol, tout comme les autruches africaines, les émeus et les casoars australiens. Les ancêtres de ces Oiseaux naquirent lorsque le supercontinent du Gondwana ne s’était pas encore fragmenté, ce qui se produisit à partir du Crétacé, c'est-à-dire il y a environ 150 millions d’années, quand l’Amérique du Sud, puis le bloc Australie-Antarctique se détachèrent de l’Afrique. Dans chacun de ces trois blocs, les formes qui donneraient lieu ensuite, après plus de 100 millions d’années d’évolution indépendante, aux Struthioniformes africains, aux Casuariiformes australiens et aux Rhéiformes sud-américains restèrent isolées. Les Ratites modernes, de véritables reliques du Gondwana, tout en étant des animaux différents les uns des autres, ont pourtant une origine commune, qui date de la période précédant la fracture du Gondwana. ZOOGÉOGRAPHIE DES îLES Aperçu historique En 1880, Alfred R. Wallace jeta les bases de la zoogéographie insulaire dans son ouvrage Island Life. Dès lors, les études sur le peuplement animal des îles se multiplièrent. Des questions intéressantes furent abordées concernant les mécanismes de dispersion et de colonisation des îles par la faune ainsi que les effets subis par celle-ci après qu’elle ait atteint ces îles. Du point de vue de leur formation, les îles se distinguent en : îles continentales, qui se sont formées par suite de phénomènes de fracture ou de soulèvement de fragments de la plaque continentale ; et en îles océaniques, nées de l’action constructrice de madrépores, des coraux ou des volcans. Du point de vue zoogéographique, la distinction entre îles continentales et îles océaniques est importante, car les premières ont eu des liens directs avec le continent, tandis que les autres, éloignées parfois de milliers de kilomètres des continents, privées de vie à l'origine, ont été lentement colonisées par des organismes variés. Les îles continentales Si l’on compare la faune de ces îles à la faune du continent dont elles dérivent, on peut remarquer des caractéristiques assez constantes. Le nombre total d’espèces présentes est réduit et la plupart des espèces sont rares, c’est-à-dire constituées d’un nombre relativement limité d’individus. Tout d’abord, la faune insulaire, de même que la flore, est plus pauvre en espèces que la faune continentale. L’île en effet, de part sa surface généralement limitée, ne peut pas maintenir des écosystèmes complexes, mais seulement des écosystèmes simples, ayant un nombre limité de ressources trophiques. Par exemple, un îlot de la Méditerranée pourra être colonisé par des algues et des lichens qui, à leur tour, permettront l’enracinement d’autres plantes. Mais la précarité de l’environnement, sensible aux variations climatiques ou à des facteurs occasionnels tels que l’extinction de l’espèce, empêchera la formation d’une forêt et du peuplement faunique qui en dérive. 67 En second lieu, le nombre d’espèces rares est plus élevé que le nombre d’espèces communes (en moyenne les espèces rares représentent 80 % du total). Le peu d’affinité entre faune insulaire et faune continentale est liée à un mélange de hasard et de nécessité. Au début, quand une île se sépare du continent, la faune insulaire est représentative de la faune continentale. Ensuite, les deux faunes doivent faire face à une diversification indépendante. La faune continentale reste soumise à des conditions semblables à celles qui ont précédé le détachement, la faune insulaire est exposée à des risques d’extinction, aux effets de l’isolement, aux conséquences de la surface réduite de l’île, etc. Ces facteurs expliquent l’appauvrissement global de la faune des îles continentales, par comparaison à celle des zones d’origine. Toutefois, on observe un phénomène contraire sous certains aspects. Une espèce persiste sur une île et s’éteint sur le continent. Sur l’île, en effet, à la différence du continent, il peut ne pas y avoir de prédateurs ou de nouveaux compétiteurs, ce qui favorisera la survie de la population insulaire. Dans ces cas-là, du fait de l’extinction de l’espèce sur le continent, la population de l’île constitue une relique insulaire. Les îles océaniques La faune d’une île océanique est exclusivement le résultat de la colonisation de la part d’individus immigrés du continent ou d’autres îles. Les organismes atteignent l’île grâce à des systèmes de dispersion active ou passive. Le peuplement insulaire océanique est donc lent et progressif ; il est le résultat d’une série de colonisations, qui peuvent réussir ou bien échouer. En fait, du moment que la plupart des phénomènes de colonisation sont fortuits et dépendent d’événements de dispersion passive, il est évident qu’une bonne partie de ces épisodes sont destinés à échouer. En effet, la probabilité que les colonisateurs ne trouvent pas les conditions environnementales propres à permettre leur survie et qu’ils soient destinés à succomber sans se reproduire est très élevée. De plus, contrairement aux îles continentales, l'extinction d’une espèce pourra difficilement être compensée par l’arrivée d’une deuxième espèce capable de remplir des fonctions analogues à celles de l’espèce disparue. L’histoire de la faune d’une île océanique est donc une succession de migrations et d’extinctions. Facteurs déterminant le peuplement d’une île Plusieurs facteurs contribuent à déterminer le peuplement d’une île : 1) La superficie. On peut généralement remarquer un rapport constant entre la superficie de l’île et le nombre d’espèces dont elle est peuplée. Les chercheurs ont essayé de fournir des modèles mathématiques propres à expliquer ce rapport. D’après l’un de ces modèles, en divisant la superficie de l’île par un facteur 10, le nombre d’espèce se réduit de moitié. Un autre modèle permet de calculer le nombre d’espèces présentes en appliquant la formule suivante: S = C x AZ où S est le nombre d’espèces d’un certain groupe d’animaux (par exemple les Oiseaux passériformes) présent sur l’île et qu'on se propose de calculer, A est la superficie de l’île, C et Z sont des constantes qui dépendent du groupe animal en question. 68 2) Distance au continent. Des îles ayant la même superficie peuvent accueillir un nombre d’espèces inversement proportionnel à leur distance au continent. Cela est fonction des possibilités pour un colonisateur donné d’arriver sur une île plus ou moins éloignée, possibilités qui se réduisent quand la distance augmente. 3) Angle de capture et hauteur de l’île. Par angle de capture on entend l’angle sous lequel l’île est vue du continent. La probabilité qu’un immigrant arrive sur l’île augmente proportionnellement à l’angle de capture et à la hauteur de l’île. L’incidence de l’angle de capture sur la probabilité de migration augmente au fur et à mesure qu’augmente la distance de l’île au continent. La hauteur de l’île est un facteur lié à la diversification des habitats et donc à l’abondance des milieux. Les îles qui se développent aussi en hauteur offrent en effet un nombre de niches écologiques potentielles plus élevé par rapport aux îles plates, car il se forme une disposition sous forme de zones verticales de végétation. Les effets de la surface, de la distance au continent, de l’angle de capture et de la hauteur de l’île s’additionnent et s’intègrent, offrant de la sorte des modèles « sur mesure » qui, dans de nombreux cas, permettent de décrire les différentes situations insulaires. Madagascar Cette grande île constitue, avec les îles Comores, Seychelles et Mascareignes, la sous-région malgache de la région Afrotropicale. De par son étendue, elle constitue la quatrième île du monde, ayant une surface équivalente à celle de la péninsule ibérique ; elle s’étend sur environ 1 600 km du nord au sud. La partie septentrionale de l’île est caractérisée par un climat tropical humide, tandis que vers le sud, le climat est de plus en plus tempéré et sec. Toute l’île est traversée par une chaîne montagneuse imposante, qui atteint 2 886 m d’altitude avec le Tsaratanana au nord de l’île. À l’est de cette chaîne, les pluies fréquentes donnent lieu à une végétation luxuriante, avec des forêts tropicales et des mangroves alternant avec des lagunes et à des marécages. À l’ouest, au contraire, les précipitations sont peu abondantes et la forêt tropicale cède sa place à une forêt ouverte de plantes à feuillage caduc qui de nos jours est très réduite à cause de l’intervention de l’homme et en voie de désertification. À l’extrême sud, les euphorbes et les baobabs sont prédominants ; ils confèrent au paysage un aspect typiquement semi-désertique, unique au monde. Madagascar est séparée de l’Afrique par le canal du Mozambique, ne dépassant pas 400 km de largeur et assez profond. L’île commença à se séparer du continent africain au cours du Jurassique, il y a environ 150 millions d’années, avec l’Inde, de laquelle elle resta rapprochée pendant 80 millions d’années encore. Au cours des 70 millions d’années environ d’isolement, Madagascar, grande île continentale, a connu des phénomènes d’évolution et d’adaptation semblables à ceux qui se manifestent dans les îles océaniques. Seules quelques familles de Poissons africains sont représentées à Madagascar. Il s’agit exclusivement d’espèces marines, qui se sont adaptées de façon secondaire à la vie dans les eaux douces ou peu salines. Les Amphibiens sont représentés par 155 espèces, avec un taux élevé d’endémismes. Le genre d’Anoures Racophorus a subi à Madagascar une véritable explosion dans son adaptation, au point qu’aujourd’hui au moins 44 espèces endémiques peuplent l’île. Parmi les Reptiles, qui sont très abondants, la présence des Iguanidés (famille presque exclusivement américaine) représente une énigme zoogéographique. Des iguanes fossiles vieux de 50 millions d’années ont été découverts même en Europe ; ils témoignent donc de l’ampleur passée de la zone de distribution du groupe. À cette époque-là cependant, l’Afrique 69 et Madagascar s’étaient déjà séparées depuis 100 millions d’années. D’où viennent alors les iguanes de Madagascar ? Les Caméléonidés et les Geckonidés, familles à vaste distribution, sont ici représentés par un nombre élevé d’espèces, dont beaucoup sont endémiques. Une grande proportion des 220 espèces d’Oiseaux présente des affinités avec les espèces africaines, mais il y a aussi des éléments asiatiques et d’autres qui ont choisi Madagascar comme zone d’hivernage, comme le faucon d’Éléonore (Falco eleonorae), qui arrive des zones de nidification de la Méditerranée en survolant la mer Rouge et l’océan Indien. En tout cas, quatre familles sont endémiques ; parmi ces dernières, on trouve la famille éteinte des Aepyornithidés, qui comprenait le gigantesque oiseau-éléphant (aepyornis), disparu probablement après l’arrivée de l’homme, et celle des Vangidés, comparables aux pies-grièches (famille des Laniidés), qui ont subi à Madagascar une diversification aussi surprenante et explosive que celle des pinsons de Darwin aux Galápagos. Le nombre d’espèces de Mammifères est relativement réduit, car sont absents par exemple tous les grands Mammifères africains. La faune ne compte qu’un seul Ongulé : le potamochère (Potamochoerus porcus). Parmi les Carnivores, nous trouvons le fossa (Cryptoprocta ferox), qui pourrait même être considéré comme un fossile vivant, semblable aux ancêtres de tous les représentants actuels de cet ordre. Les Primates sont nombreux et comprennent 4 familles endémiques de Lémuriens (Cheirogaléidés, Lémuridés, Indriidés et Daubentonidés). Des groupes différents de Lémuriens de l’Afrique arrivèrent à Madagascar à des époques diverses, de moins 50 à moins 30 millions d’années, lorsque l’île, tout en étant déjà séparée du continent africain, en était beaucoup plus proche qu'aujourd'hui. Là, isolés des singes plus évolués et en présence de peu de compétiteurs, ils se différencièrent considérablement. Parmi tous les Lémuriens, le très rare aye-aye (Daubentonia madagascariensis), seul représentant de la famille des Daubentoniidés présente les spécialisations les plus singulières. Seulement découvert en 1780, cet animal de la taille d’un gros écureuil, aux habitudes nocturnes, est pourvu de doigts de forme particulière. Grâce au pouce aplati comme une cuillère et peu opposable, fait unique chez les Primates, il réussit à boire, tandis que le troisième doigt, très long et mince, lui sert à extraire des larves de Coléoptères du bois en putréfaction, ou bien à « se coiffer » et à nettoyer sa fourrure. Ses incisives, en outre, présentent une croissance continue, comme celles des Rongeurs. C’est pourquoi cet animal fut dans un premier temps considéré comme une espèce d’écureuil. Pour conclure, parmi les Insectivores, on trouve la famille endémique des Tenrecidés, comprenant les tenrecs (de petits animaux dont l’aspect rappelle celui des hérissons européens), dont 30 espèces sont présentes sur l’île. Les pinsons des Galápagos Les Galápagos constituent un archipel de 13 îles volcaniques, situées à environ 1 000 km de distance des côtes de l’Équateur, les plus proches du continent américain. Des 28 espèces d’Oiseaux qui se reproduisent sur l’île, 22 sont endémiques. Les pinsons de Darwin (13 espèces appartenant à 5 genres différents) dérivent tous d’une seule espèce fondatrice. Lorsque, par hasard, un groupe d’individus de cette espèce arriva sur l’une des îles, probablement par suite d'une tempête, les colonisateurs s’adaptèrent au nouveau milieu et purent se reproduire, puis augmentèrent en nombre et se répandirent sur les autres îles. Les Galápagos sont très variées en ce qui concerne la présence d’eau, le type de végétation, de nourriture, etc., de sorte que leur conquête a rendu nécessaires des 70 adaptations continues à des milieux différents. De cette façon, chaque passage d’une île à l’autre a entraîné une modification de l’écologie et, par conséquent, de la morphologie des différents groupes de colonisateurs. Le résultat de ce processus a été la diversification progressive des pinsons par rapport à la souche d’origine, puis entre les populations des différentes îles. La forme du bec est sans aucun doute le caractère qui a subi les transformations les plus visibles. Les modifications anatomiques vont de pair avec les modifications génétiques. Aussi, quand les différentes populations furent de nouveau en contact, elles étaient devenues si différentes qu’elles n’étaient plus interfécondes. Un phénomène de spéciation, c’est-à-dire de formation d’espèces nouvelles à partir d’une seule souche originaire, avait débuté. Aujourd’hui les Galápagos sont peuplées de pinsons granivores, pourvus d’un bec long et robuste, d’autres Insectivores, au bec fin et pointu, d’autres pinsons qui sont à même d’extraire les larves des Insectes des troncs des arbres en se servant d’épines et de brindilles, d’autres encore pourvus d’un bec fort et pointu comme celui du pic, capables de se nourrir de feuilles de cactus. 71