Réunion du Comité marseillais du Mouvement

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Allocution de Monsieur Georges SARRE
61è anniversaire de la Libération du XIè arrondissement
Dimanche 4 septembre 2005
Mesdames, Messieurs,
Vous le savez ;
Nous commémorons aujourd’hui le 61è anniversaire de la Libération du XIè
arrondissement, de Paris et de la France. Chaque année, nous nous retrouvons, autour de
celles et ceux qui ont participé à la Résistance ou qui veulent en conserver vivant le
souvenir. Je tiens à remercier Michel GOETHALS, conseiller délégué chargé du monde
combattant et de la mémoire, ainsi que Roger FICHTENBERG, président de l’Union des
associations d’anciens combattants du XIè, qui font beaucoup pour l’organisation de ces
commémorations. Je tiens également à rappeler le souvenir des patriotes qui ont été
acteurs de ces événements et qui sont morts cette année, en particulier Mr Simon
RAJMAN et Mme Maria DORIATH, décédés pendant l’été. Simon RAJMAN était le frère de
Marcel RAJMAN, le héros du groupe de l’Affiche Rouge. Lui-même avait aussi été un grand
résistant, membre des FTP-MOI. Il était chevalier de la Légion d’Honneur et vice-président
de l’AMILAR, l’Amicale de Liaison des anciens résistants juifs. Maria DORIATH, qui militait
pendant l’occupation dans les rangs de la résistance communiste et appartenait aux FTP,
fut, après la Libération et jusqu’aux années 60, conseillère générale de la Seine, élue de
cet arrondissement. Elle était aussi la mère de mon ancien adjoint Gérard DORIATH, qui
est décédé en mai dernier. Aux familles des deux disparus, je présente, au nom de la
municipalité, mes très sincères condoléances.
C’est une date phare de l’histoire nationale que nous commémorons aujourd’hui. Une sorte
de renaissance de la France et de la République. Une grande victoire de la liberté sur la
tyrannie. Et nous pouvons d’autant plus la célébrer que la Libération de Paris, est le fait du
peuple en armes, de l’armée de la France Libre avec l’appui des troupes alliées, des
combattants des FFI et des FTP, bref, du peuple de France qui, pendant quatre ans, a
enduré les terribles conditions de l’occupation allemande, a subi l’humiliation de la défaite,
les privations et la peur au quotidien, mais qui a trouvé, dans son glorieux passé et son
attachement viscéral aux valeurs républicaines, la force de se soulever et de se battre.
Avec la Libération, la France retrouve sa souveraineté et c’est une ère nouvelle qui
commence, après la parenthèse anti-républicaine de Vichy. Cette délivrance n’a été
possible que grâce au sacrifice des résistants et des combattants qui ont donné leur vie
pour la France : c’est leur souvenir que je souhaite perpétuer, en montrant combien leurs
motivations ont toujours du sens pour les citoyennes et les citoyens d’aujourd’hui.
L’occupation de la France par l’Allemagne nazie, en 1940, est le résultat d’une défaite,
certes militaire, mais aussi morale, dans laquelle l’insuffisante vigilance des républicains
face à la montée du totalitarisme nazi joue sa part. La vassalisation totale du pays au
Reich hitlérien n’a été possible que parce que certains esprits dévoyés ont préféré la paix à
tout prix à l’indépendance et à la démocratie. Et, ne l’oublions pas, Pétain et Vichy sont
une revanche de la réaction contre la République, insuffisamment consolidée,
insuffisamment comprise, insuffisamment défendue, aujourd’hui comme hier.
L’effondrement, toutefois, touche davantage les élites que le peuple. Dans l’histoire de
France, celui-ci n’a jamais supporté bien longtemps de porter le joug sans réagir. C’est
donc du tréfonds du pays qui viennent, dès 1940, les premières réactions contre
l’occupation, les premières manifestations patriotiques. La Résistance, c’est d’abord les
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marins de l’île de Sein, puis les étudiants et lycéens parisiens qui manifestèrent à l’Arc de
Triomphe le 11 novembre 1940, et les classes populaires qui ont gagné, combat après
combat, en deux siècles, leurs droits fondamentaux, dont certains très récemment alors,
avec le Front Populaire. Ce sont aussi les femmes, qui dans tous les soulèvements
populaires depuis 1789, marchent à côté des hommes. C’est aussi, heureusement, une
courageuse poignée de hauts fonctionnaires, à l’image du Préfet Jean Moulin, et des
hommes politiques restés vraiment patriotes et républicains, qui veulent continuer à se
battre, comme les parlementaires qui embarquent à bord du Massilia vers l’Afrique du
Nord, et qui sauvent l’honneur de classes dirigeantes largement acquises, déjà, aux
facilités de l’abandon.
Qu’arrive-t-il lorsqu’on perd de vue les fondamentaux de la République ? Le totalitarisme,
le racisme, l’antisémitisme, l’emportent. C’est comme cela que la France connut la
répression la plus féroce qui s’abattit sur elle, que la prison, la torture et la mort devinrent
le sort des résistants, que la déportation des juifs, des opposants et des résistants fut mise
en oeuvre. Rétroactivité des lois, juridictions spéciales, abolition de l’état de droit, remise
en cause de la laïcité : Vichy, en tous points, chercha à abolir la République. Et Vichy
trouva des appuis, parmi ceux qui voulaient revenir à l’ordre social ancien, parmi les
cléricaux, parmi ceux qui n’avaient jamais, au fond, accepté 1789, la défaite des Ligues et
la réhabilitation du capitaine Dreyfus. Comme quoi, la permanence de la République n’est
jamais acquise.
Sans doute la lutte des fractions et des clans, la perpétuelle mise en avant des intérêts
personnels et partisans, l’instabilité politique chronique qui en découlait, avaient elles
porté des coups fatals à la IIIè République. Heureusement, et nous devons méditer cela,
le rassemblement a su prévaloir devant le danger de la disparition de la Nation. Nous
devons cela à un acte fondateur : l’appel du 18 juin 1940 ; et à l’homme qui l’a lancé, le
général de Gaulle. Sans lui, rien n’aurait été pareil. Il a su réveiller l’espoir, et si toute la
Résistance, loin s’en faut, ne fut pas gaulliste, c’est grâce à sa stature d’homme d’Etat
qu’elle fut organisée, unifiée, dotée d’un programme. La réalité de la Résistance, ce n’est
pas, évidemment, l’unanimité sur tout: c’est l’histoire de tensions idéologiques et
personnelles intenses, résultant à la fois des antagonismes politiques du passé et des
divergences de vue sur ce que devait être la France libérée. Dans la Résistance, il y avait
des communistes, des gaullistes, des socialistes et des démocrates-chrétiens, des hommes
de droite et même des maurrassiens. Mais leur grandeur à tous, fut d’avoir su surmonter
leurs divergences politiques pour mettre au-dessus d’elles l’avenir de la Nation, et de
synthétiser, même difficilement et tardivement, le 15 mars 1944, leurs aspirations en un
programme du Conseil National de la Résistance, qui a durablement façonné la France
d’après-guerre et dont les orientations demeurent d’une totale actualité, parce que c’est
un programme de progrès social et de développement économique, qu’il a permis à la
France de devenir une grande Nation industrielle et qu’il est donc, en tous points, ce que
les françaises et les français dans leur majorité, veulent aujourd’hui voir mis en œuvre,
pour stopper la régression sociale immense que nous connaissons.
Dernière leçon de la Libération : la France est un grand pays, qui sait mobiliser ses
ressources, qui a une place importante dans le concert des Nations. C’est le pays d’Europe
occidentale à s’être libéré à peu près seul. Le seul à avoir réussi à lever, derrière de
GAULLE, avec les maréchaux LECLERC ; de LATTRE et JUIN, une véritable armée qui
s’appuya sur l’Empire et termina sa mission en libérant Strasbourg, permettant ainsi à la
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France de s’asseoir à la table des vainqueurs, le 8 mai 1945, lorsque fut signée la
capitulation du Reich, à Berlin. Déjà à l’époque, certains s’accommodaient bien qu’elle
devienne, comme ROOSEVELT et même CHURCHILL l’envisageaient, une Nation de
second rang, une sorte de protectorat. Les résistants, eux, voulaient un pays indépendant.
Ils aimaient la France, ils ne la dénigraient pas, et, en républicains sincères, ils savaient
que la souveraineté populaire ne peut s’exercer pleinement que dans le cadre de l’EtatNation. Cela était vrai alors, et le reste à ce jour.
Mesdames et Messieurs, les Résistants qui ont libéré le XIè, Paris et la France nous ont
légué un message : la confiance en l’éternité de la France et en sa mission universelle et
en ses valeurs fondatrices de liberté dans l’indépendance, d’égalité et de fraternité. Je
veux pour conclure dire à celles et à ceux qui sont présents ici et qui ont participé à la
Résistance, que la collectivité nationale leur doit respect et admiration. Ils sont un exemple
pour les générations actuelles et à venir. C’est grâce à eux, à ce qu’ils ont fait dans la
tradition française, que je suis confiant dans notre avenir commun.
Je vous remercie.
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