La Sémiosis dans les systèmes auto-poïétiques

publicité
(traduction de la page http://www.gypsymoth.ento.vt.edu/~sharov/biosem/txt/casys99.html)
La Sémiosis dans les systèmes auto-poïétiques
Alexei SHAROV
[email protected]
Département d'entomologie, Institut Polytechnique de l’Université de Virginie, Blacksburg
Résumé
La méthodologie cybernétique a atteint ses limites dans l'étude de la vie parce qu'elle
ignore la signification de l'information biologique. Ainsi devrait-elle être aidée par la
sémiotique, qui étudie la signification et la valeur des signes. Selon une définition
pragmatique, un signe est une adaptation biologique, c.-à-d. une fonction utile de façon
persistante. L'utilité d'une action peut être mesurée par sa contribution à la valeur
reproductrice d'un organisme dans une espèce particulière. Les valeurs reproductrices sont
égales aux composants du vecteur propre gauche du modèle linéarisé (à l’aide d’ une
matrice) de la dynamique du système. Chaque organisme est un signe, et son cycle de
vie est un processus continu d'auto-interprétation. Les organismes utilisent des
récepteurs (capteurs sensoriels) pour prévoir les changements de l’environnement. La
sélection naturelle est fonctionnellement équivalente à la perception au niveau des
lignées. La survie et la reproduction sélectives sont analogues à l'excitation sélective des
photorécepteurs dans l'oeil. Les lignées apprennent comment éviter la variation nocive en
employant des contraintes développementales, en les corrigeant, en utilisant la dominance
et d'autres mécanismes. Si l'intelligence est définie comme capacité d'apprentissage, alors
les lignées sont des systèmes intelligents que nous n'avons pas identifiés comme tels
simplement parce qu'ils sont trop lents.
Mots-clés : auto-reproduction, valeur, sémiosis, sélection, apprentissage.
INTRODUCTION
L'idée de la nature informationnelle de la vie est devenue largement admise après la
découverte du code génétique. La théorie cybernétique et la théorie de l'information sont
devenues des outils fondamentaux pour résoudre le mystère de la vie (1,2). Cependant,
après plusieurs décennies de travail dans cette direction, les limitations de la cybernétique
sont devenues claires. La cybernétique explique la vie par la notion de contrôle. Mais le
contrôle est seulement un outil et peut être affaibli dans quelques situations afin d'exécuter
quelques autres fonctions qui semblent plus importantes. Or un système vivant est
quelque chose de plus qu’un système de contrôle. La théorie de l'information n'a pas non
plus expliqué la vie parce qu'elle est plus appropriée à l'analyse des langues sans contexte
où n'importe quelle combinaison de symboles est signifiante. Mais les langages naturels
(par exemple, le code génétique ou le langage humain) sont dépendants du contexte.
Le triomphe de la physique newtonienne a été relié à l'idée que nous pouvons prévoir
des événements naturels sans considérer de buts ni de significations. Mais il s'avère que les
significations peuvent être importantes, particulièrement si nous considérons les systèmes
vivants. La première tentative de comprendre la nature de la signification a été faite par
Charles Peirce (24), qui a introduit la sémiotique, la théorie des signes. Il a considéré la
signification (signe) comme une relation entre un signifiant (véhicule de signe) et un objet par
l'intermédiaire d'un interprétant, qui est un changement de l'interprète causé par le signifiant,
qui le met au courant de l'objet. Uexküll (35) a développé sa théorie de la signification
indépendamment à partir de Peirce. Dans cette théorie il a proposé que chaque organisme
vivant développe sa propre interprétation subjective de son environnement, appelé
Umwelt (modèle du monde). Chaque composant de l'Umwelt a une signification spécifique
pour un organisme (par exemple, nourriture, ennemi, abri, etc...) et est associé à une ou
plusieurs fonctions qui soutiennent la survie et la reproduction de l'organisme. Uexküll était le
premier à noter la nature circulaire des fonctions biologiques (cercles fonctionnels). Un
organisme perçoit et modifie des objets externes aussi bien que des parties de son
corps.
Pattee (23) pense que la signification émerge dans l'évolution des systèmes
auto-référés (sémantiquement fermés). Il écrit : «l'auto-référence, qui a un potentiel
évolutionnaire ouvert, est une fermeture autonome entre la dynamique (lois physiques) des
aspects matériels et les contraintes ( règles syntaxiques) des aspects symboliques d'un
organisme physique». Selon Pattee, la fermeture sémantique exige des modèles
complémentaires des aspects matériels et symboliques de l'organisme. Un symbole est
une structure matérielle, dont la fonction ne peut pas être dérivée des lois physiques,
mais qui est choisie pour sa contribution à la survie d'un individu.
Des idées semblables ont été développées par Maturana et Varela (20), qui ont
estimé que l'autopoïèse était une caractéristique fondamentale de la vie et de l'esprit.
Rosen (27,28) a également souligné la nature fermée de l'organisation biologique. Il pense
que les organismes sont qualitativement différents des machines, parce que dans les
machines, chaque fonction est régulée par une autre fonction (ce qui mène à une infinie
régression des fonctions). Mais dans les organismes, toutes les fonctions sont
réciproquement clôturées. Chaque partie ou fonction absente peut être réparée ou produite
par d'autres parties. Des mécanismes peuvent être agencés entre les parties, mais les
organismes peuvent reconstituer et réagencer les parties elles-mêmes. Ainsi, des
organismes ne peuvent-ils pas être construits à partir de leurs parties.
Kampis(17) a considéré la vie comme une semi-fermeture ; la fermeture est
imparfaite en raison de la liberté interne dans les organismes. Il a souligné la nature créatrice
de la vie, qui ne peut pas être décrite par des modèles déterministes. Les organismes
vivants peuvent inventer de nouvelles fonctions, tandis que les modèles déterministes ont
toutes les possibilités incorporées dès le départ; ainsi, ces modèles déterministes ne
peuvent-ils montrer aucune propriété émergente. Kampis (17) a employé des modèles de
«systèmes composants» qui sont faits de nombreuses petites particules de diverses sortes.
Mais Kauffman (18) a pensé que l'on pouvait observer le comportement émergent
même dans les modèles déterministes si le nombre de possibilités est très grand. Il a
modelé l’auto-organisation à l'aide des réseaux booléens et des automates cellulaires.
Il y a un consensus sur l'importance de la nature symbolique (sémiotique) de la
vie et de son organisation auto-référentielle (fermeture). Mais il n'y a aucun accord sur la
signification des termes «symbole», «signe», «auto-référence», «auto-reproduction»,
«autonomie», «fermeture», «action», «liberté», et d'autres. Cairn-Smith (3) a considéré que
n'importe quel système capable d’auto-maintenance ou d'auto-reproduction (par exemple,
cristallisation, autocatalyse) était un signe ou un «gène». Des signes peuvent être isolés ou
agrégés. La syntaxe n'est pas présente dans les signes isolés, mais peut apparaître dans les
systèmes de signes multiples. Rocha (25) pense que la syntaxe est la caratéristique
essentielle des signes, qui est nécessaire pour une évolution ouverte. A la suite de Von
Neumann (37), il a vu l'évolution d'une manière darwinienne traditionnelle en tant que
changements syntaxiques aléatoires suivis de la sélection naturelle. Ce mécanisme
d'évolution exige la présence d'un code qui représente un organisme. Joslyn (15) a présumé
que tous les organismes vivants peuvent être caractérisés par l'autonomie sémiotique,
ce qui signifie que les organismes maintiennent des relations cycliques de perception,
interprétation, décision, et action pour la accroître leurs chances de survie et d’autoreproduction. Les organismes peuvent avoir divers niveaux d'autonomie, et les niveaux
intermédiaires d'autonomie sont habituellement plus salutaires comparés aux niveaux
d’autonomie extrêmement bas ou élevés. D'autres auteurs insistent sur le fait que l'autoreproduction exige une autonomie élevée. Par exemple, Rose (26) a avancé le fait que les
virus ne peuvent pas s'auto-reproduire parce qu'ils exigent une cellule hôte vivante pour
interpréter leurs messages génétiques. En revanche, Dawkins (6) a pensé que l'autonomie
forte n'était pas nécessaire pour l'auto-reproduction. Ainsi, il a considéré que les différents
gènes et mèmes étaient des systèmes auto-réplicateurs.
La terminologie sémiotique a un contexte anthropomorphique fort. Ainsi, pour
appliquer des notions sémiotiques à d'autres organismes vivants, nous devons enlever
toutes les significations spécifiquement humaines. Ce n'est pas une tâche facile parce que
les mots comme «perception», «action» et «interprétation» se réfèrent la plupart du temps à
notre expérience cognitive interne. En outre, il y a un danger à étendre la signification des
notions sémiotiques trop loin. Par exemple, Deely (7) a pensé que même les systèmes
inertes pouvaient interpréter des signes. Il a considéré une formation en pierre qui prend la
forme d'un os de dinosaure comme un «interprète» de l'os. Dans ce cas, n'importe quelle
interaction physique peut être vue comme une interprétation, et la terminologie sémiotique
devient superflue.
Dans cet article, je passerai en revue des publications qui indiquent l'importance de la
valeur dans la sémiosis. Je crois que la notion de valeur aide à distinguer la sémiosis
d'autres processus. En outre, elle intègre la sémiotique avec la théorie évolutionniste parce
que la valeur représente les adaptations biologiques. La synthèse de la sémiotique avec la
théorie évolutionniste est connue sous le nom de biosémiotique.(13,30)
VALEURS ET AUTO-PRODUCTION
Les économistes mesurent la valeur actuelle d'un investissement comme une somme
de bénéfices (après correction de l’inflation) prévus dans l'avenir. Fisher (11) a noté que la
même méthode pourrait être employée pour mesurer la valeur reproductrice des organismes
dans une population. La valeur reproductrice d'un organisme d'un âge particulier est
égale à sa contribution à la croissance de la population entière. Le taux d'augmentation
de la population est analogue au taux d'inflation dans l'économie. Par exemple, les oeufs ont
une valeur reproductrice plus basse que les adultes se reproduisant, parce qu'un adulte peut
produire de nombreux oeufs dans peu de temps, tandis que cela prend un bon moment à un
oeuf pour atteindre l’âge adulte, et les oeufs ne survivront pas tous jusqu’à l'étape d'adulte.
Dans un modèle linéaire de croissance de la population, la valeur reproductrice des
organismes est égale au vecteur propre gauche de la matrice qui décrit la dynamique de la
population. Par exemple, dans le modèle de Leslie (19), l'état d'une population est
caractérisée par le vecteur de la distribution d'âge xt, qui montre le nombre d'organismes
dans chaque catégorie d'âge au temps t. La dynamique de population est décrite par
l’équation
xt +1 = A xt
(1)
où A est la matrice de Leslie (fig. 1), le vecteur des valeurs reproductrices, v est le vecteur
propre gauche de la matrice A. Les organismes nouveau-nés ont une valeur reproductrice =
1 (fig. 1). En allant vers la maturité, leur valeur reproductrice augmente à 2.97, puis
diminuent à 0.77 dans la catégorie d'âge la plus âgée. Le vecteur v satisfait l'équation
ATv = v
(2)
où AT est la matrice transposée A, et  est la plus grande valeur propre réelle, qui est le taux
d'augmentation de population ( = 1.293 pour la matrice dans fig. 1). Le calcul des valeurs
reproductrices dans les systèmes non linéaires est plus compliqué parce que ces systèmes
peuvent avoir des cycles-limite ou bien une dynamique chaotique *.
SCHÉMA 1. Une matrice A de Leslie et le vecteur des valeurs reproductrices v.
L'auto-production peut être définie comme n'importe quel processus par lequel un
système augmente sa valeur. Par exemple, le développement d'un organisme de l'oeuf à
l'adulte est une auto-production parce que la valeur reproductrice des adultes est plus haute
que celle des oeufs. Après avoir pondu un oeuf, la valeur reproductrice de la femelle adulte
diminue, mais la somme des valeurs de l’oeuf et de la femelle est plus grande que la valeur
de la femelle avant la ponte. Un oeuf est une partie du Soi de la femelle, et la production d'un
oeuf est un cas particulier d'auto-production. Des processus qui diminuent la valeur des
organismes sont habituellement considérés «externes», «involontaires», ou «aléatoires». Ils
incluent la mortalité due à divers facteurs (par exemple, les ennemis naturels, les fluctuations
climatiques), les mutations délétères, etc.
Les valeurs existent relativement pour une espèce particulière (10), qui se compose
d'un ou plusieurs composants avec des fréquences relatives stables. Smith (34) les appelle
des «espèces virtuelles». Chaque espèce a une valeur propre réelle spécifique  (équation
2). Si une espèce change dans l'évolution, ses valeurs reproductrices changent. Par
exemple, si un organisme développe une protection efficace contre ses ennemis naturels,
alors la valeur relative d’un œuf augmente parce que cet oeuf obtient de plus grandes
chances de survivre à l'étape d'adulte. À mesure que la valeur d'un oeuf augmente, il devient
salutaire que le parent investisse des ressources supplémentaires dans un oeuf simple.
Bien que les espèces soient discrètes, elles ne sont pas isolées des autres systèmes.
Je suis en désaccord avec Rose(26), qui ne considère pas les virus, les gènes, et les
mèmes comme des systèmes auto-reproducteurs parce qu'ils exigent une interprétation
externe. Rose n'a pas noté que la signification d'un génome viral est différente pour le virus
et pour la cellule hôte (ils appartiennent à des espèces différentes). Donc le virus n'emploie
pas une cellule comme un interprète externe. Disons plutôt qu’ il s'interprète en
employant des ressources des cellules. En fait, la cellule interprète mal le virus parce
qu'elle le considère comme une partie de son propre génome. (ce qu’ Hoffmeyer nomme une
«tromperie évolutionnaire»)
Une erreur commune de la théorie évolutionniste est de considérer la santé () (ou
l’aptitude, l’adaptabilité) comme une mesure objective (observateur-indépendante) de
l'adaptation. Des mesures peuvent être estimées pour n'importe quel modèle donné de
dynamique de système, donnant une illusion d’objectivité. Mais la subjectivité est cachée
dans l’étape initiale de la construction du modèle. Il peut se produire que dans quelques
situations, les animaux se comportent différemment de ce qu’a supposé le modèle. Si nous
modifions le modèle pour l’adapter à leur comportement, alors toutes les valeurs de la
matrice changeront (souvent considérablement). La mort peut sembler inévitable dans
quelques situations, selon nos connaissances actuelles. Mais dans un sens plus large, la
mort est facultative ; elle résulte de l'incapacité d'un organisme à résoudre ses problèmes
vitaux. Ainsi, l’adaptabilité montre à quel point un animal est doué en résolvant ses
problèmes. Elle est aussi subjective qu'une mesure de Q.I.. D'une manière générale, toute
la connaissance humaine est subjective parce qu'elle est exprimée dans un langage
qui représente l'histoire d'une expérience humaine. Nous sommes confiants dans notre
langage non pas parce qu'il est vrai mais parce qu'il a été utile dans le passé
(constructivisme pragmatique).
Nous pouvons mesurer l’adaptabilité et les valeurs reproductrices en utilisant notre
modèle du comportement et de la physiologie des animaux. Mais un animal a son propre
modèle de son comportement. Naturellement, les animaux ne sont pas assez futés pour
résoudre l'équation 2, ils n’ont qu’un système de valeurs qui est basé sur l'instinct ou
l'apprentissage. En d'autres termes, les animaux peuvent distinguer le bon du mauvais, et
ont même une échelle de qualité. Il s'avère que si cette échelle des valeurs est conforme à la
dynamique du système (les changements de valeur évoluent proportionnellement avec le
temps), alors l’échelle bon/mauvais de l'animal est égale aux valeurs reproductrices. Mais les
animaux ne sont pas aussi bons pour distinguer les situations comme le font les humains. Ils
mettent souvent de bonnes et mauvaises situations dans une catégorie et les évaluent
ensemble (par exemple, les oiseaux ne distinguent pas les mouches qui ressemblent à des
guêpes des guêpes).
Les humains aussi attribuent rarement des valeurs en utilisant l'équation 2. La plupart
du temps, nous employons notre instinct, notre intuition, et l’expérience précédente en
attribuant des valeurs. Mais chaque système de valeurs (s'il est conformé à la dynamique)
correspond à un espèce spécifique qui caractérise des buts de la vie. Les gens peuvent voir
la signification de leur existence dans la survie et la reproduction biologique, la croissance du
capital, la diffusion de leurs idées, etc... Les valeurs humaines correspondent à une espèce
que les gens choisissent.
L'auto-reproduction est un cas particulier d'auto-production. Sharov(29) a défini les
systèmes auto-reproductibles (SRS) en employant le formalisme des réseaux de Pétri. Un
réseau de Pétri a deux genres de composants : les places et les transitions. Une place est
interprétée comme une classe d’objets identiques ou comme état d'un objet. Les transitions
sont des processus qui soit changent l'état des objets, soit décrivent les interactions. Les
flèches relient les places et les transitions (fig. 2). Chaque place peut avoir plusieurs
marques. Une marque est interprétée comme objet dans un état particulier. Si un objet
change d’état, alors la marque est déplacée d'une place à l'autre. Si une transition est
exécutée, alors les marques sont prises de ces places à partir desquelles les flèches mènent
à cette transition, et elles sont ajoutées aux places d’où les flèches proviennent par la
transition. Le nombre total de marques peut augmenter ou diminuer après que la transition
soit exécutée. Sharov (29) a défini un potentiel SRS comme sous-ensemble de places pour
lesquelles il y a un ordre des transitions internes (une transition est interne si au moins une
flèche va vers le sous-ensemble d'objets et une flèche part de ce sous-ensemble) qui
augmente le nombre de marques de tous les endroits de ce sous-ensemble. Par exemple,
l'ensemble des places {x, y} dans la fig. 2 est un potentiel SRS parce que l'ordre des
augmentations des transitions 1, 2, 1, 1, et 2 augmente le nombre de marques des places X
et y. Sharov(29) a prouvé que n'importe quel potentiel SRS peut devenir un SRS réel dans
un certain environnement favorable (par exemple, avec les ressources suffisantes). Il a
également montré que chaque potentiel SRS inclut au moins un cycle de processus
composant-producteurs, un dispositif qui a été également mentionné par Csanyi(5).
SCHÉMA 2. Un réseau de Pétri qui représente un système simple d'auto-reproduction {x, y} ;
z est une ressource.
Des processus d'auto-production peuvent être trouvés dans des systèmes non
vivants. Par exemple, la flamme d'une bougie est un système d'auto-production parce qu'elle
fait fondre la cire. Sans cire fondue, la flamme partira ; ainsi, l'état avec de la cire plus fondue
a une valeur plus élevée pour la flamme que l'état avec moins de cire fondue. L'autoproduction d'une flamme de bougie normalement n'a pas comme conséquence la
reproduction. Cependant, dans certaines conditions spéciales comme un feu de forêt, les
flammes peuvent se reproduire. La cristallisation est un autre exemple d'un processus
d'auto-production dans un système inerte. Mais les flammes et les cristaux peuvent être
vus également comme la plupart des systèmes vivants primitifs, selon la façon dont nous
définissons la vie.
LA SEMIOSIS PRODUIT DES VALEURS
Peirce(24) a défini un signe selon sa fonction (correspondance entre un signifiant, un
objet et un interprétant). Mais il a également souligné le rôle pragmatique des signes, c.-àd., qu’ils sont des outils utiles qui augmentent les performances des systèmes vivants.
Il a considéré l'utilité comme un critère de vérité et une signification de l'existence. Ces idées
ont été encore développées par James(14) et Dewey(8), et sont devenues une base de la
philosophie pragmatique. Uexküll(35) a ajouté une interprétation biologique des signes
comme composants des cercles fonctionnels qui améliorent la survie et la reproduction des
systèmes vivants à diverses échelles, des cellules aux écosystèmes. Selon Uexküll, les
signes ne sont pas simplement une catégorie spécifique de choses utiles, mais tout ce qui
est utile est un signe ; en particulier, toutes les ressources sont des signes. Mais le mot
«utilité» est resté anthropomorphe, il s'est la plupart du temps référé à l'intuition humaine sur
ce qui est utile.
Sharov(30,33) pense que l'utilité d'un processus (activité) peut être mesurée par
l'augmentation en valeur reproductrice du résultat de ce processus. En d'autres termes,
l'utilité d'un processus est mesurée par sa contribution à la survie et à la reproduction du
système. Un signifiant peut être défini comme condition initiale pour des processus
utiles. Le corps d'un système auto-reproductible (organisme) est un signifiant qui est
interprété dans le processus de survie et de reproduction. Le schéma triadique de Peirce est
encore applicable ici : le corps est le signifiant, les caractères corporels transmis par
l’hérédité sont les interprétants, et le corps qui est produit (ou réparé) est l'objet .(32)
Cette définition de l'utilité change notre compréhension de ce qu’est un utilisateur. Si
un charpentier utilise un marteau, alors le charpentier est un utilisateur et le marteau est un
outil. Mais le charpentier utilise son bras pour tenir le marteau. Alors le bras est un outil,
aussi. En y regardant de plus près, un utilisateur est une collection de parties utiles
reliées par des relations utiles (fig. 3). Même le cerveau est un outil. Certains peuvent
insister sur le fait qu'il existerait une âme immatérielle qui emploie toutes les parties du
corps. Mais cette hypothèse de l’âme n'est pas nécessaire si nous acceptons l'idée
qu'un organisme est un «corps en essaim»(13).
SCHÉMA 3. Un utilisateur est une collection de parties utiles reliées par l'intermédiaire de
relations utiles.
Von Foerster(36) a noté que la mémoire n'est confinée dans aucun élément
particulier du cerveau ou du corps ; elle existe plutôt sous forme d'attracteurs
(eigenstates). La conscience humaine a une nature collective qui a été caractérisée par des
métaphores comme «la société de l'esprit»(21) et «l’intelligence en essaim»(13).
Évidemment, la valeur d'un organisme entier dépasse la somme des valeurs de ses parties
parce que des parties sont liées par l'intermédiaire des relations utiles qui contribuent à la
valeur de l'organisme.
L'interprétation des signes inclut toujours un certain degré d'arbitraire parce qu'elle
est contrainte plutôt que déterminée par les lois physiques(16). Au niveau hiérarchique le
plus élevé, le caractère arbitraire est représenté par le choix d'une espèce. À ce niveau,
l'action et l'agent ne sont pas séparés, c.-à-d. que pour choisir une autre action, l'agent doit
se changer lui-même en se convertissant en une autre espèce. Un système auto-producteur
transfère des informations au sujet de l’espèce d'une génération à l'autre. La transmission
signifie que l'état initial d'une progéniture appartient à la région de l'attracteur de son espèce
parentale, et qu’un saut à une autre espèce est une mutation. La sémiotique peut être
reformulée en substituant des interprètes aux espèces.
La présence de multiples espèces est suffisante pour une forme très primitive
d'évolution adaptative. Une ligne généalogique peut passer par un ordre d’espèce, chacune
des espèces étant un équilibre pour atteindre d'autres espèces. Sharov(31) a prouvé que le
jeu de la vie de Conway(12) avec des permutations et une règle de séparation, simule
l'apparition et l'évolution des systèmes auto-reproductibles (fig. 4-5). La règle de séparation
signifie que si la distance minimum entre deux configurations est >D, alors elles deviennent
entièrement séparées comme si elles avaient été éloignées l'une de l'autre (fig. 4). Si D =
4,5, alors l'apparition spontanée de la première espèce est suivie d'une mutation vers
d’autres espèces avec un taux plus élevé d’auto-reproduction. Ce modèle prouve que la
transmission et l'évolution adaptative sont possibles même sans mécanisme de
codage spécialisé (génome). Le codage peut se développer plus tard comme
protection de la partie fonctionnelle du système. Le principe du «métabolisme d'abord»
dans l'origine de la vie est soutenu par Cairns-Smith(3), Morowitz(22), et Kauffman(18).
Le code rend la vie programmable, ce qui augmente l'efficacité de l'évolution
ultérieure.(15)
SCHÉMA 4. Un système d'auto-reproduction dans le jeu de la vie avec une règle de
séparation, D = 4,5. À t = 14, deux systèmes de progéniture deviennent séparés (de 31,
IEEE 1998).
SCHÉMA 5. Croissance d'une population de configurations dans le jeu de la vie avec une
règle de séparation (D = 4.5) et avec du bruit aléatoire. Les flèches montrent le moment où
les première (a) et deuxième (b) espèces auto-reproductibles apparaissent.
LA SELECTION NATURELLE COMME PERCEPTION DANS LES LIGNÉES
La théorie de la sélection naturelle est souvent considérée comme une preuve que
l'évolution adaptative est un processus mécaniste qui n'exige aucun facteur subjectif ou
créateur(6). On suppose que la nature est un tamis mécanique qui sélectionne les
organismes qui survivent. Cette interprétation est fallacieuse parce que la sélection implique
l'intentionnalité, mais la nature n'a aucun intérêt pour elle-même à aider ou empêcher la
survie ou la reproduction d’organismes. Hoffmeyer(13) a suggéré une autre interprétation de
la sélection: un processus intentionnel au niveau des lignées. Une lignée sonde
l'environnement et essai de nouvelles adaptations en produisant une variété
d'organismes et en copiant les organismes qui ont survécu. Dans cette interprétation,
la sélection est analogue à la perception. Des idées semblables ont été suggérées plus
tôt par Kauffman (18, p. 154), qui a écrit : «nous pouvons concevoir la population comme si
elle émettait des "palpeurs" en produisant, au hasard, diverses mutations. Si la mutation
occupe une position plus haute sur le terrain, elle est plus adaptée, et la population est tirée
vers la nouvelle position». La survie et la reproduction sélectives des organismes joue
le même rôle pour une lignée que la vision (c.-à-d., excitation sélective des
photorécepteurs) pour un organisme.(32)
La perception nécessite le transfert d'information. Un photorécepteur envoie une
impulsion électrique au cerveau. Il est important que le cerveau identifie des impulsions de
différents récepteurs. Si les fibres des nerfs s’empêtraient, le cerveau ne pourrait pas
associer une impulsion entrante à un récepteur spécifique, et l'information serait perdue.
L'hérédité est le mécanisme de transfert de l'information au niveau des lignées grâce auquel
les organismes survivants transfèrent leur information génétique sur la génération suivante.
Si l'hérédité n'était pas assez précise, alors l'information serait perdue comme dans le cas de
fibres nerveuses empêtrées.
Un argument possible contre l'analogie entre la perception et la sélection est que les
organismes peuvent percevoir l'information négative tandis que les lignées n’en sont pas
capables. L'absence d'un signal peut être un signal pour un organisme. Le Darwinisme
suppose que les lignées n'ont aucun opérateur de négation parce que les organismes qui
meurent ne donnent aucune information aux organismes survivants. Cette idée est incluse
dans la métaphore de la «variation aveugle». Bien que beaucoup d'organismes soient morts
en raison d'une certaine mutation mortelle, la lignée continuera de produire cette mutation à
l'avenir ; elle n'apprendra pas de ses erreurs.
Sharov(33) pense que les lignées peuvent employer l'information négative. Elles
apprennent comment éviter des erreurs en créant des mécanismes correcteurs, la
dominance, les contraintes développementales, et d'autres outils épigénétiques. La
reconstruction de l'information négative est différente dans la perception visuelle et dans la
survie/reproduction sélective. La reconstruction visuelle est la plupart du temps parallèle, c.à-d. qu’elle est basée sur une généralisation des signaux arrivant simultanément de multiple
récepteurs. Or les lignées généralisent surtout l'information séquentielle (traitement en
série) (mais la reproduction sexuelle ajoute quelques signaux parallèles). La persistance
d'une lignée signifie qu'elle a réussi à éviter les erreurs des générations passées. Ses
contraintes génétiques et développementales représentent les règles par lesquelles
des erreurs peuvent être évitées.
Ainsi, les lignées possèdent-elles quelque chose comme de l'intelligence, mais parce
que elle-ci s’exprime trop lentement, nous ne l'identifions pas. Des milliers de générations
passent avant qu'une lignée apprenne comment éviter une erreur développementale
simple. La reproduction sexuelle accélère ce processus parce qu'un organisme obtient
l'accès à l'expérience génétiquement enregistrée de beaucoup plus d'individus (la
reproduction végétative ne donne qu’un traitement sériel de l’information, la reproduction
sexuelle permet un traitement en parallèle). Puisque la sélection est une perception à une
plus grande échelle, il n'y a aucune différence qualitative entre l'évolution et
l'apprentissage. Tous les deux sont des processus sémiotiques qui augmentent le
taux relatif d'auto-production (adaptation) des systèmes. La capacité d’adaptation
(fitness) W est égale au taux d'augmentation relatif de la valeur v de tous les produits du
système
et l'intelligence (ou le taux d'apprentissage) peut être mesurée par le taux d'augmentation de
la capacité d’adaptation:
Selon cette définition, l'intelligence n'est pas le pouvoir adaptatif (c.-à-d., la capacité
de résoudre un problème donné). L'intelligence est plutôt la capacité d'augmenter le
pouvoir adaptatif en découvrant de nouvelles solutions à d’anciens aussi bien que de
nouveaux problèmes. (l’intelligence est une méta-capacité: une capacité d’augmenter la
capacité d’adaptation)
La survie et la reproduction sélectives représentent la seule manière concevable par
laquelle l'évolution adaptative pourrait commencer. Cependant, sur les étapes ultérieures de
l'évolution, la reproduction réelle peut être remplacée partiellement par la reproduction
idéale, je veux dire celle qui utilise des modèles et des simulations pour examiner l'exécution
d'un système au lieu de mettre le vrai système en danger. Campbell (4) l'a appelée
«sélection indirecte (déléguée)» parce qu'elle remplace la sélection naturelle. La sélection
indirecte est efficace seulement à condition que la stratégie modélisatrice soit bonne. Si le
modèle échoue, alors le système meurt ou souffre de grandes pertes en valeur. Dans ce
cas, la sélection naturelle fonctionnera jusqu'à ce que le modèle soit amélioré. Ainsi, la
sélection naturelle n’est-elle jamais complètement remplacée par la sélection
indirecte, mais la proportion du rôle de la sélection naturelle diminue progressivement
dans l'évolution. La sélection indirecte est présente dans toutes les fonctions d'un
organisme qui impliquent des interactions sélectives entre les parties ou avec
l'environnement : catalyse, activation sélective des récepteurs, transcription et traduction de
l'information génétique, apoptose, réaction immunitaire, interaction des neurones, et
d'autres. Pendant que la sélection naturelle est remplacée par la sélection indirecte, le
caractère arbitraire dans l'interprétation des signes se déplace des niveaux
supérieurs de la hiérarchie à des niveaux plus bas. En conséquence, un système peut
changer ses actions sans aucun changement apparent dans sa structure de plus haut
niveau. Ainsi, il devient possible de séparer le génotype du phénotype et l'esprit du
corps.
CONCLUSIONS
Il y a une similitude profonde entre les processus évolutionnaires, cognitifs, et
économiques, qui nous permettent de parler de la sémiosis et de la valeur dans n'importe
quel système autopoïétique. La valeur de toute activité peut être mesurée par sa contribution
au taux d’auto-reproduction dans la population. Un organisme est un signe, c.-à-d. un
message destiné à ses générations futures, qui contient des recettes pour la survie et
la reproduction. Mais une lignée (population) est plus qu'une voie de transmission d'une
génération à l'autre. Elle peut obtenir de nouvelles informations sur son environnement au
cours de l'évolution de la survie/reproduction sélective de ses membres. Ainsi, la sélection
naturelle est-elle l’équivalent de la perception au niveau des lignées. Les systèmes
évolutionnaires peuvent être considérés comme intelligents ; ils emploient une
logique et des modèles pour atteindre comme buts la stabilité et l'auto-propagation.
Cependant, l'intelligence humaine est supérieure parce qu'elle est beaucoup plus rapide que
l'évolution biologique. L'intelligence n'est pas une capacité à résoudre un ensemble donné
de problèmes, mais plutôt une capacité à produire de nouvelles solutions autant que de
nouveaux problèmes. L'augmentation de la capacité adaptative peut être employée
comme indicateur simple de l'intelligence.
REFERENCES
1. Ashby, W. R. (1956). Introduction to Cybernetics. Chapman & Hall.
2. Bertalanffy, L. von (1969). General System Theory: Foundations, Development, Applications.
G. Braziller.
3. Cairns-Smith, A. G. (1982). Genetic Takeover and the Mineral Origins of Life. Cambridge
University Press.
4. Campbell, D. T. (1988). Methodology and Epistemology for Social Science: Selected Papers.
Edited by E. S. Overman, University of Chicago Press.
5. Csanyi, V. (1998). Evolution: model or metaphor? Pp. 1-12 in: Van de Vijver, G., Salthe, S.,
and Delpos, M. (eds.), Evolutionary Systems. Kluwer Acad. Publishers.
6. Dawkins, R. (1986). The Blind Watchmaker. Longman Scientific & Technical.
7. Deely, J. N. (1992). Semiotics and biosemiotics: are sign-science and life-science
coextensive? Pp. 47-75 in T. A. Sebeok and J. Umiker-Sebeok (eds.), Biosemiotics: The
Semiotic Web 1991, Mouton de Gruyter.
8. Dewey, J. (1998). The development of American pragmatism. In: L. A. Hickman and T.M.
Alexander. (eds.). The essential Dewey. Vol. 1. Indiana Univ. Press.
9. Dubois, D. M. (1998). Emergence of chaos in evolving Volterra ecosystems. Pp. 179-214 in:
Van de Vijver, G., Salthe, S., and Delpos, M. (eds.), Evolutionary Systems. Kluwer Acad.
Publishers.
10. Eigen, M., and P. Schuster. (1979). The Hypercycle. A Principle of Natural Self-Organization.
Springer.
11. Fisher, R. A. (1930). The Genetical Theory of Natural Selection. Clarendon Press.
12. Gardner, M. (1983). Wheels, Life, and Other Mathematical Amusements. W.H. Freeman.
13. Hoffmeyer, J. (1996). Signs of Meaning in the Universe. Indiana University Press.
14. James, W. (1954). Essays in Pragmatism. Hafner Pub. Co.
15. Joslyn, C. (1998). Are life and meaning coextensive? Pp. 413-422 in: Van de Vijver, G.,
Salthe, S., and Delpos, M. (eds.), Evolutionary Systems. Kluwer Acad. Publishers.
16. Juarrero, A. 1998. Causality as constraint. Pp. 233-242. Ibid.
17. Kampis, G. (1991). Self-modifying Systems in Biology and Cognitive Science: A New
Framework for Dynamics, Information, and Complexity. Pergamon Press.
18. Kauffman, S.A. (1993). The Origins of Order: Self-organization and Selection in Evolution.
Oxford Univ. Press.
19. Leslie, P. H. (1945). On the use of matrices in certain population mathematics. Biometrika, 33:
183-212.
20. Maturana, H. R., and F. G. Varela (1980). Autopoiesis and Cognition: The Realization of the
Living. D. Reidel Pub. Co.
21. Minsky, M. L. (1986). The Society of Mind. Simon and Schuster.
22. Morowitz, H. J. (1992). Beginnings of Cellular Life: Metabolism Recapitulates Biogenesis. Yale
University Press.
23. Pattee, H. H. (1995). Evolving self-reference: matter, symbols, and semantic closure.
Communication and Cognition - Artificial Intelligence, 12: 9-28.
24. Peirce, C. S. (1955). Philosophical Writings of Peirce. Edited by J. Buchler. New York: Dover
Publications.
25. Rocha L.M. (1998). Selected self-organization and the semiotics of evolutionary systems. pp.
341-358. in: Van de Vijver, G., Salthe, S., and Delpos, M. (eds.), Evolutionary Systems.
Kluwer Acad. Publishers.
26. Rose, S. (1998). Lifelines: Biology Beyond Determinism. Oxford Univ. Press.
27. Rosen, R. (1985).Anticipatory Systems: Philosophical, Mathematical and Methodological
Foundations. Pergamon Press.
28. Rosen, R. (1991).Life Itself: A Comprehensive Inquiry into the Nature, Origin, and Fabrication
of Life. Columbia University Press.
29. Sharov, A. A. (1991). Self-reproducing systems: structure, niche relations and evolution.
BioSystems, vol. 25, pp. 237-249.
30. Sharov, A. A. (1992). Biosemiotics: a functional-evolutionary approach to the analysis of the
sense of information. Pp. 345-373 in: T. A. Sebeok and J. Umiker-Sebeok (eds.),
Biosemiotics: The Semiotic Web 1991. Mouton de Gruyter.
31. Sharov, A. A. (1998). Signs and Values. Pp. 677-682. Proceedings of the 1998 IEEE
ISIC/CIRA/ISAS Joint Conference. Gaithersburg, MD. September 14-17. IEEE.
32. Sharov, A. A. (1998). From cybernetics to semiotics in biology. Semiotica 120 (3/4), 403-419.
33. Sharov, A. A. (1999). Umwelt-theory and pragmatism. Semiotica (in press).
34. Smith J. H. (1998). Canonical ensembles. Pp. 141-153 in: Van de Vijver, G., Salthe, S., and
Delpos, M. (eds.) Evolutionary Systems. Kluwer Acad. Publishers.
35. Uexküll, J. von (1982). The Theory of Meaning. Semiotica 42(1), 25-82.
36. von Foerster, H. (1969). What is memory that it may have hindsight and foresight as well? Pp.
19-65 in S. Bogoch (ed.), The Future of the Brain Sciences. New York: Plenum Press.
37. von Neumann, J. (1966). Theory of Self-Reproducing Automata. Edited and completed by A.
W. Burks. University of Illinois Press.
Téléchargement