L’indemnisation des accidents médicaux L’accident médical est le dommage survenu à l’occasion : - d’un acte médical ou paramédical (soins, examens divers, opération…) - de la prise d’un médicament - de l’utilisation de tout autre produit de santé. La loi du 4 mars 2002 relative « aux droits des malades et à la qualité du système de santé » a mis en place un nouveau régime d’indemnisation des conséquences des risques sanitaires dits aléa thérapeutiques qui permet l’indemnisation de tous les accidents graves, avec ou sans faute, évitables ou inévitables, sur la base de l’assurance en cas de faute ou de la solidarité quand aucune faute n’est prouvée. 1. Historique : la situation avant la loi du 4 mars 2002 Jusqu’en 2002, les possibilités pour les victimes de se faire indemniser ont été admises mais sous des conditions précises : 1991 : la loi ouvre un droit à indemnisation des personnes contaminées par le VIH, à la suite d'une transfusion de produits sanguins ou d'une injection de produits dérivés du sang, quelle que soit la date de la contamination. Décision Blanchi 1993 : une décision du CE ouvre des possibilités d'indemnisation pour les victimes d'accidents thérapeutiques d'une "extrême gravité". La responsabilité est « pour risque » 16 juin 1996 : Le rapport Claude Evin sur les droits de la personne malade préconise un mécanisme assurant l'indemnisation de l'aléa thérapeutique. Jusqu’en 2002, pour obtenir une indemnisation, il fallait obligatoirement introduire un recours devant la justice pour prouver une faute médicale (exception pour les cas d’une extrême gravité type Bianchi). Outre la longueur que supposait cette procédure – encore possible-, l’indemnisation des accidents médicaux n’était pas prise en charge par la solidarité nationale. 2. Le nouveau système d’indemnisation créé par la loi du 4 mars 2002 Désormais, les accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales, en l'absence de responsabilité des professionnels, donnent droit à réparation au titre de la solidarité nationale. Les commissions régionales de conciliation et d’indemnisation CRCI Le système repose sur les commission régionales de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CRCI), qui ont pour rôle de faciliter le règlement amiable des litiges relatifs aux accidents médicaux entre usagers et professionnels ou établissements ainsi que les litiges liés aux actes. Saisies par les patients sur simple recommandé, les commissions rendent leur avis sur les circonstances, les causes, la nature et l'étendue des dommages, ainsi que sur le régime d'indemnisation applicable à la victime. Lorsque la responsabilité des professionnels est engagée, la commission fait office de médiateur entre les parties : victimes, établissements et assureurs. Ces procédures ne devraient mettre plus qu’un an au lieu de 4 pour aboutir Lorsqu’elle est saisie par une victime, cette commission doit rendre un avis, dans les six mois : -Soit elle retient l'aléa, et c'est à l'Office national d'indemnisation de faire une offre d'indemnisation à la victime. -Soit elle retient une faute, et c'est à l'assureur du professionnel ou de l'établissement de santé de procéder à cette indemnisation. L’ONIAM La loi du 4 mars 2002 créée un Office national d’indemnisation des accidents médicaux et des affections iatrogènes (ONIAM), établissement public chargé d'indemniser les accidents médicaux qui n'engagent aucune responsabilité. Le dommage doit être directement imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins, avoir un caractère anormal au regard de l'état de santé du patient et de l'évolution prévisible de celuici, et remplir des conditions de gravité (plus de 24% d’incapacité physique permanente) ; Procédure : lorsque la responsabilité des professionnels n'est pas en cause, la commission régionale adresse son avis à l'Oniam qui prend alors en charge l'indemnisation. L'office est doté d'un fonds de fonctionnement de 70 millions d'euros par an pour 2002 et pour 2003, qui entre dans le budget de la Sécurité sociale. Cœur du nouveau dispositif d'indemnisation, l'Oniam prend en charge non seulement les indemnités aux victimes, mais aussi les frais de gestion et d'expertise des commissions. Une Commission nationale des accidents médicaux établit chaque année un rapport sur les accidents et aléas thérapeutiques en France. L’assurance Les professionnels de santé et les établissements de santé ne sont responsables qu'en cas de faute. L'obligation d'assurance responsabilité civile, couvrant les dommages qui peuvent être causés par leur activité, s'impose à tous les professionnels de santé exerçant à titre libéral, aux établissements et services de santé et à tout autre organisme exerçant des activités de prévention, de diagnostic ou de soin, ainsi qu'aux producteurs exploitants et fournisseurs de produits de santé. 3. Répartition de l’indemnisation : 3.1 Distinction entre les causes : 1/ les infections nosocomiales sans cause étrangère prouvée : les dommages relèvent alors de la responsabilité civile de l'établissement de santé; 2/ les infections nosocomiales résultant d'une cause étrangère et générant des dommages suffisamment graves (le seuil d'incapacité permanente doit être supérieur à 24 %) : l'indemnisation est prise en charge par l’ONIAM au titre de la solidarité nationale; 3/ les infections nosocomiales résultant d'une cause étrangère n'atteignant pas le seuil de gravité suffisant : les dommages ne pourront alors être indemnisés que grâce à une assurance personnelle prise par la victime. 3.2 Distinction entre indemnisation à titre principal et secondaire pris en charge par l’ONIAM L’indemnisation à titre principal : L’Oniam n’indemnise à titre principal que les dommages « graves » dus aux risques accidentels de l’acte médical ou à l’infection nosocomiale entraînant une incapacité physique permanente de 24% et plus non imputable à un responsable médical. L’ONIAM n’aura un recours subrogatoire contre un établissement de santé que si une faute de cet établissement est établie. L’indemnisation à titre complémentaire ou supplétif : l’Oniam indemnise à titre complémentaire ou supplétif tous les dommages, sans considération du taux d’incapacité, par substitution à l’assurance obligatoire de responsabilité dans les cas d’absence d’assurance, de garanties épuisées ou inopérantes du contrat d’assurance, ou de silence ou refus explicite de l’assurance. L’Oniam aura un recours subrogatoire contre le responsable non assuré ou insuffisamment assuré, ou contre l’assurance du responsable si refus d’offre. 4. Les limites du système d’indemnisation : -Les compétences limitées des CRCI Le bénéfice des procédures de règlement amiable est fermé à un grand nombre de demandeurs, la CRCI n’étant compétente que si le seuil d’incapacité permanente (IPP) est de 24% et plus. De fait, 97% des victimes sont exclues du système et doivent toujours saisir la justice sur le fondement de l’obligation de sécurité de résultat ou se tourner vers leur assureur. -Des plafonds de garantie trop bas pour les professionnels de santé : la loi autorise la stipulation de plafonds de garantie dans les contrats d’assurance de responsabilité et une détermination réglementaire de ce plafond est prévue pour les seuls praticiens libéraux. Pour les autres professionnels de la santé, c’est la libre détermination par les parties, ce qui comporte le risque de conclusion d’assurance de responsabilité avec des plafonds de garantie insuffisants pour couvrir le risque, entraînant un alourdissement de la charge d’indemnisation par l’ONIAM. Schéma du dispositif d’indemnisation Voir www.sante.gouv.fr rubrique Oniam VICTIMES IPP>24% ou ITT>6 mois Ou inaptitude définitive à exercer un emploi ou troubles dans les conditions d’existence ↓ Commission régionale de conciliation Et d’indemnisation ↓ Avis (6 mois) FAUTE NON FAUTE Transaction assureur* Office national d’indemnisation Si refus JUGE 4 mois offre Offre si refus JUGE 1 mois Indemnisation*** Indemnisation** L’acceptation de l’offre éteint les possibilités de contentieux administratif et civil *En cas de refus de transaction de la part de l’assureur, la victime peut se retourner contre l’office qui l’indemnisera et se retournera contre l’assureur **L’assureur peut se retourner contre l’Oniam devant le juge, s’il estime que le préjudice n’est pas dû à une faute ***L’Oniam peut se substituer à la victime, après l’avoir indemnisée et se retourner contre l’assureur si elle estime qu’il y a faute La victime peut choisir la voie judiciaire à n’importe quel moment du processus (jusqu’à l’acceptation de l’offre) à la seule condition d’en informer la Commission