La rupture amiable pour motif économique

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Départs négociés
La rupture amiable pour motif économique
est irréversible
Les conditions de validité de la rupture amiable pour motif économique viennent d’être
clarifiées par la Cour de cassation. Désormais, un salarié qui a accepté une résiliation amiable
ne peut ultérieurement se prévaloir d’un licenciement économique et des indemnités
protectrices qui en découlent (Cass. Soc. 2 décembre 2003).
 Départ volontaire pour motif économique
Dans un contexte de difficultés économiques, un départ volontaire mis en oeuvre dans le cadre d'un plan
social ou proposé par le salarié n'est plus assimilé à un licenciement.
Deux affaires, deux contextes
• Départ volontaire dans le cadre d'un accord collectif
Une société a conclu avec des syndicats un accord social pour l'emploi prévoyant diverses mesures visant à réduire
l'effectif de l'entreprise sur la base d'un recours prioritaire au volontariat et contenant notamment des mesures destinées à
aider les salariés ayant pour projet de créer ou de reprendre une entreprise. Deux salariés ont demandé à bénéficier de ces
mesures de réorientation externe afin de créer leur entreprise commune. Leur demande ayant été acceptée par l'employeur,
leurs contrats de travail ont pris fin. Par la suite, les salariés ont demandé en justice le versement des indemnités pour
licenciement économique sans cause réelle et sérieuse
(cass. soc. 2 décembre 2003).
• Départ volontaire à l'initiative du salarié
Une société a informé le comité d'entreprise d'un projet de licenciement économique concernant trois salariés.
L'un d'entre eux, ayant eu confirmation de son engagement dans une autre société, a proposé à son employeur
un protocole d'accord de résiliation amiable de son contrat de travail. Signé par les deux parties, le salarié en a
ensuite demandé l'annulation ainsi que le paiement des sommes afférentes à un licenciement économique
(cass. soc. 2 décembre 2003).
La solution : rupture amiable ne vaut pas licenciement
•Ruptures autonomes
Ces ruptures doivent s'analyser non comme des licenciements, mais comme des ruptures amiables du contrat
de travail. La Cour de cassation énonce clairement que le contrat de travail peut prendre fin non seulement
par un licenciement ou une démission mais encore du commun accord des parties.
Il peut s'agir d'une offre de départ volontaire, proposée par l'employeur et acceptée par le salarié ou d'une
sollicitation du salarié acceptée par l'employeur. Le contexte économique n'a pas pour effet de transformer la
nature de la rupture du contrat qui conserve son régime propre.
• Une évolution déjà entamée
La Cour de cassation précise, dans ces deux arrêts, son approche au sujet des projets de réduction d'effectifs.
Elle avait déjà jugé que le départ volontaire à la retraite dans le cadre d'un plan social constituait une rupture
à l'initiative du salarié et n'était pas assimilable à un licenciement (cass. soc. 25 juin 2002).
Aujourd'hui, elle considère que, sauf vice du consentement ou fraude, la résiliation du contrat de travail peut
intervenir d'un commun accord par suite d'échanges de consentements réciproques et ce, même si l'initiative
de la rupture amiable relève de l'employeur.
 Maintien de garde-fous
Le recours à la résiliation amiable pour motif économique est désormais considéré comme une rupture autonome
et irréversible à condition toutefois que l'employeur ait respecté les prérogatives du comité d'entreprise.
Consultation du comité d’entreprise
Toute rupture du contrat de travail résultant d'une suppression ou d'une transformation d'emploi ou d'une
modification substantielle du contrat, consécutive notamment à des difficultés économiques ou à des
mutations technologiques, est soumise aux dispositions sur le licenciement économique (c. trav. art. L. 321-1).
En conséquence, les règles légales procédurales sont applicables à toutes les ruptures du contrat de travail, y
compris aux ruptures amiables et autres départs négociés, ayant à l'origine un motif économique.
Ainsi, l'employeur doit soumettre son projet à la consultation des représentants du personnel et, selon
l'ampleur du licenciement, mettre en place un plan de sauvegarde de l'emploi (c. trav. art. L. 321-2).
La consultation du comité d'entreprise devient la condition substantielle de licéité de la rupture amiable pour
motif économique.
La Cour de cassation ne précise pas, en revanche, les conséquences sur l'accord de rupture, en cas de défaut de consultation du comité
d'entreprise.
S'il existe un accord collectif organisant des départs volontaires
Plus généralement, tout accord collectif conclu à l'occasion de cette procédure et visant notamment à organiser
des départs volontaires doit être soumis à la consultation du comité d'entreprise (cass. soc. 2 décembre 2003).
 Responsabilité des salariés
La résiliation amiable pour motif économique ne produit pas les effets d'un licenciement économique.
La situation antérieure aux arrêts du 2 décembre 2003
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Jusqu'à présent, que ce soit à titre individuel ou dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi, les
ruptures amiables motivées par la situation économique de l'entreprise étaient licites dès lors qu'elles
s'accompagnaient du paiement des indemnités de rupture auxquelles les intéressés auraient eu droit en cas de
licenciement (cass. soc. 13 juillet 1993). Toutefois, ce principe avait été remis en cause à propos d'un départ
volontaire intervenant dans le cadre d'un plan social (cass. soc. 25 juin 2002).
La Cour de cassation avait jugé, en effet, que si la rupture pour motif économique est soumise pour sa mise en
oeuvre aux dispositions sur le licenciement économique, il n'en résulte pas que toute rupture d'un contrat de
travail procédant
d'un motif économique entraîne les effets d'un licenciement.
Elle en avait déduit que le départ volontaire à la retraite dans le cadre d'un plan social, constituant une
rupture à l'initiative du salarié, n'ouvrait pas droit à l'indemnité conventionnelle de licenciement.
Le revirement de jurisprudence et ses conséquences pratiques
Désormais, la Cour de cassation entend responsabiliser les salariés. En effet, le salarié qui a accepté une
rupture à l'amiable ne peut plus soutenir qu'il a été en fait licencié. Celui qui accepte un départ volontaire en
connaissance de cause ne peut revenir sur sa décision lorsque son projet ne donne pas les résultats espérés.
Par conséquent, le salarié qui entend contester la résiliation amiable ne peut prétendre aux avantages
inhérents au licenciement, c'est-à-dire ni aux indemnités de licenciement ni a fortiori aux prérogatives
accordées par l'employeur au salarié licencié pour motif économique (telle la priorité de réembauchage).
Reste la possibilité pour le salarié de négocier une résiliation amiable comportant des avantages pécuniaires
au moins équivalant à ceux auxquels il aurait pu prétendre en cas de licenciement.
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