Partie 1 – Les sociétés à risques illimités

publicité
Master 1
Droit notarial
Droit spécial des sociétés
Semestre 1
Droit spécial des sociétés
A l'examen (sans TD) : oral (Code civil, Code du commerce, Code des sociétés autorisés), question
de réflexion (exemple : comparaison entre différentes formes de sociétés)
INTRODUCTION
Éléments indispensables à la constitution d'une société :
- apports des associés
Trois types : apports en numéraire, apports en nature d'un bien corporel ou incorporel [immeuble,
fonds de commerce, brevet... qui peuvent être apports en propriété ou apports en jouissance, leur
évaluation pose problème, elle est réalisée par un commissaire aux apports], apports en industrie
[travail, connaissances... pb d'évaluation, et doivent parfois être actualisés, avantage : permet à une
personne qui n'a pas les moyens de faire un apport en numéraire de faire malgré tout partie de la
société]
- affectio societatis
Volonté de créer ensemble une œuvre commune (moins présent dans les sociétés de capitaux).
Notion un peu reléguée à l'arrière plan aujourd'hui.
- obligation de participer aux bénéfices et aux dettes
Les associés se sont engagés à participer aux bénéfices et aux pertes (nullité des clauses léonines
qui dispensent un associé de participer aux pertes).
Première classification de sociétés :
- sociétés de personnes (sociétés en nom collectif SNC, sociétés civiles, sociétés en commandite
simple SCS) c/ sociétés de capitaux (société anonyme SA, société par action simplifiée SAS).
Problème de cette classification : le caractère hybride de la SARL l'empêche d'entrer dans l'une ou
l'autre des catégories, car contrairement aux sociétés de personnes la responsabilité des associés
d'une SARL est limitée, de plus contrairement aux sociétés de capitaux l'intuitu personae est très
important (nombre limité d'associés) et les clauses d'agrément (souvent d'ordre public) d'une SARL
empêchent n'importe qui d'être associé. Également, différence concernant les modalités de vote :
dans les sociétés de capitaux le droit de vote est fonction des parts sociales, dans les sociétés de
personnes ce qui importe c'est la personne (répartition du vote en fonction du nombre d'associés),
dans les SARL le vote est fonction des parts sociales.
Terminologie :
associé : terme générique
actionnaire : utilisé uniquement dans les sociétés de capitaux (sociétés par actions) à
l'exception des SAS
Depuis la loi du 4 août 2008, la SARL n'est plus la seule société hybride. La SAS devient une société
qui se rapproche autant des sociétés de personnes que des sociétés de capitaux, elle aussi. La SAS
est une société à responsabilité limitée, mais on peut y prévoir des clauses d'agrément aussi fortes
que dans une SARL. De plus, rien n'oblige à voter en fonction du nombre d'actions, possibilité de
prévoir de voter par tête. La loi du 4 août 2008 dispense désormais les SAS d'un montant minimal de
capital social, et les apports en industrie sont envisageables (en principe interdit dans les sociétés de
capitaux). Ces deux nouvelles dispositions sont surprenantes.
Concernant la responsabilité des associés :
Dans une société à responsabilité limitée, les associés voient leur responsabilité financière limitée au
montant de leurs apports : tout ce qu'ils risquent de perdre est le montant de leurs apports
uniquement. A la dissolution d'une société, celle ci doit passer par une phase de liquidation (on
transforme en argent liquide les actifs de la société), et on se préoccupe de rembourser les
créanciers de la société en premier lieu, puis les apports des associés s'il reste de l'argent. S'il reste
un boni de liquidation après remboursement des créanciers et des associés au titre de leurs apports,
il sera partagé entre les associés. Si tous les créanciers ne sont pas payés car par assez d'argent, on
ne demandera pas aux associés de payer.
En revanche dans les sociétés à risques illimités, la phase de liquidation est la même sauf que si les
créanciers ne sont pas satisfaits par les seuls biens de la société, ils pourront s'adresser aux
associés. La société personne morale ne fait plus totalement écran, les associés sont exposés face
aux créanciers. L'autonomie patrimoniale de la société n'est plus tout à fait réelle. Ces sociétés sont
donc plus risquées pour les associés.
Dans une société à responsabilité limitée, les créanciers vont accorder plus d'importance au capital
social. On dit traditionnellement que le capital social des sociétés est le gage des créanciers. Le
capital social est constitué des apports des associés ainsi que des réserves faites année par année
par la société. Le capital social doit être intangible, concret. C'est pour cette raison que
traditionnellement on considérait que les apports en industrie n'avaient pas leur place dans des
sociétés de capitaux, et qu'il fallait un seuil minimal de capital. C'est pourquoi les nouvelles
dispositions de la loi du 4 août 2008 concernant les SAS sont surprenantes. Mais ce ne sont pas les
seules.
Dès 2001, et surtout 2003, on peut faire des apports en industrie dans la SARL, et on abolit son seuil
minimal du capital social. La SARL se rapproche donc des sociétés de personnes.
Le capital social est fixé librement par les statuts selon le législateur. Pour rassurer les créanciers il
est donc préférable de constituer un capital social raisonnable. De plus le dirigeant, les associés,
voire le conjoint du dirigeant, peuvent se porter caution.
Autre classification :
- distinguer les sociétés ayant la personnalité morale de celles ne l'ayant pas (société en participation
et société créée de fait).
L'immatriculation au RCS permet de donner la naissance juridique d'une société. Les associés
peuvent choisir volontairement de ne pas doter leur société de la personnalité morale. La société en
participation est sans doute la société dans laquelle l'affectio societatis est le plus pur. La société
créée de fait existe a posteriori, c'est un comportement, une situation de fait, qui va être qualifiée a
posteriori par le juge comme étant une société. On ne qualifie une société créée de fait que pour
mieux la faire disparaître.
Exemple : 2 concubins exploitant ensemble un fonds de commerce. En cas de divorce, celui
ou celle se retrouvant sans le fonds n'a jamais été déclaré comme ayant travaillé. La qualification de
société créée de fait permet alors de la dissoudre et d'attribuer à celui qui part un apport en industrie
par exemple. La dissolution et la liquidation de la société permet donc un partage entre les associés.
Inconvénient : il s'agit d'une société à risque illimité, la responsabilité des associés est solidaire.
La société de fait (différente de la société créée de fait) est une société qui a mal tourné (annulation,
déqualification) : on va appliquer les inconvénients du droit commercial (responsabilité, prescriptions,
solidarité entre associés, impôt sur les sociétés etc) sans en appliquer les avantages. Il s'agit d'une
qualification sanction.
PARTIE 1 – LES SOCIETES A RISQUES ILLIMITES
Chapitre 1 – Les sociétés commerciales à risques illimités
SNC : société en nom collectif ; SCS : société en commandite simple. Les SNC et SCS sont les
formes les plus anciennes de société en droit français (ordonnance de Colbert de 1673).
Section 1 – La SNC (société en nom collectif)
L 221-1 à L 221-17 du Ccom. C'est une société commerciale, donc la responsabilité des associés
sera non seulement illimitée mais aussi solidaire. Le risque est donc le plus lourd pour les associés.
On retrouve cette solidarité dans le GIE et dans la SCP. Les créanciers de la société peuvent
s'adresser à n'importe lequel des associés pour lui demander le remboursement intégral de la dette
sociale. L'engagement solidaire et illimité oblige à faire la distinction entre l'obligation à la dette
sociale et la contribution aux pertes sociales.
L'obligation aux dettes sociales a trait aux rapports entre les associés et les tiers (créanciers). C'est la
faculté pour les créanciers d'espérer être remboursés. Chaque associé est tenu solidairement et
indéfiniment de la dette sociale, il doit en répondre de son patrimoine personnel. Des clauses par
lesquelles un associé serait dispensé de rembourser une partie de la dette des créanciers seraient
nulles, inopposables aux tiers. L'obligation à la dette solidaire et illimitée est un principe d'ordre
public.
La contribution aux pertes a trait aux relations entre les associés. Elle se fait en fonction de la part
des associés dans le capital social, sauf clause contraire permettant de protéger un associé en
particulier (qui ne vaut pas pour l'obligation aux dettes, mais qui peut jouer concernant la contribution
aux pertes). D'où l'importance de la rédaction des clauses dans les statuts.
Cependant, il existe une étape préalable indispensable imposant aux créanciers de la société de
s'adresser d'abord à la société elle même (en raison de sa personnalité morale). Il faut d'abord faire
une mise en demeure à la société de payer (par voie d'huissier). Si cette mise en demeure est restée
vaine pendant 8 jours, alors les créanciers pourront s'adresser aux associés en particulier.
La SNC a la particularité que les associés doivent avoir la qualité de commerçant. Certaines
personnes ne peuvent donc pas faire partie d'une SNC (ex : les mineurs même émancipés).
La SNC fonctionne beaucoup sur le principe de l'unanimité : la plupart des décisions doivent être
prises à l'unanimité. Comme il s'agit d'une société de personnes, le principe est un associé = une
voix. Cette difficulté de fonctionnement s'illustre particulièrement en matière de cession de parts
sociales. En effet, le principe est d'ordre public : il faut l'unanimité pour une cession de parts sociales,
en raison de la responsabilité illimitée et solidaire de tous les associés. Si un seul associé fait
blocage, la vente de parts sociales ne peut pas avoir lieu. Cela aboutit à un certain paradoxe : le
risque pour un associé est de ne pas pouvoir quitter la société.
La SNC est une des rares sociétés qui n'organise pas le retrait de l'associé (en cas de retrait,
l'associé quitte la société et ne se fait pas nécessairement remplacer ; tandis que pour une cession,
l'associé cède ses parts sociales : il y aura toujours le même montant de capital social et le même
nombre de parts sociales en circulation).
Lorsque le retrait est organisé, 3 propositions peuvent être faites : soit l'associé retrayant cède ses
parts sociales à un tiers, soit il les cède à un autre associé, soit c'est la société elle même qui rachète
les parts sociales, ce qui se traduira automatiquement par une diminution du capital social (lorsque
les parts sociales sont rachetées par la société, elles sont annulées).
En matière de SNC, le retrait n'étant pas organisé, le problème ne se pose pas. Quand un associé se
voit refuser l'agrément à la cession de parts sociales, il ne peut pas se retirer. On ne peut pas
contraindre la société à racheter les parts sociales.
Aussi la pratique a mis en place une technique contractuelle appelée la convention de croupier. Il
s'agit d'un contrat extra-statutaire (non inscrit dans les statuts de la société) conclu entre un associé
et un tiers à la société, qui permet à l'associé de transmettre au tiers ses droits patrimoniaux sur la
société. Il transmet donc au tiers le droit de percevoir des dividendes, mais aussi le droit de supporter
les pertes de la société. La convention de croupier n'est pas une cession complète de parts sociales
car le tiers ne sera pas l'associé de la société (le véritable associé conserve ses droits extrapatrimoniaux tel que le droit de vote, il ne se décharge que de ses obligations financières).
Concernant les causes de dissolution de la SNC
La SNC obéit aux règles générales de dissolution des sociétés : la réalisation de l'objet social
(lorsque l'objet social est déterminé de façon très précise), la mésentente entre associés (à condition
qu'elle entraîne une paralysie des organes sociaux), l'arrivée du terme extinctif (si la prorogation n'est
pas votée en assemblée générale), le fait que toutes les parts sociales soient réunies dans les mains
d'un seul associé.
Mais comme l'intuitu personae est particulièrement fort dans la SNC en raison de la responsabilité
solidaire et illimitée des associés, il existe d'autres cas de dissolution : la perte pour un associé de sa
capacité à être commerçant, le décès d'un associé (s'il n'existe aucune clause dans les statuts
prévoyant en cas de décès d'un associé la continuité de la société), la révocation du gérant qui est à
la fois associé statutaire (sauf décision contraire, car ce n'est pas une cause de dissolution
automatique comme le décès). Concernant le gérant associé statutaire, on organise la possibilité
pour lui de se retirer (c'est le seul pour qui le retrait est autorisé).
L'intérêt de la SNC est son régime fiscal et son régime pénal. En effet, la SNC est dite fiscalement
transparente, elle n'est pas redevable de l'imposition, elle n'est pas soumise à l'impôt sur les sociétés.
Ce sont les associés qui, indirectement, subissent cette imposition sur les dividendes qu'ils
perçoivent. De plus, la SNC étant une société de personnes et non une société de capitaux, elle
relève des infractions pénales de droit commun, et non du droit pénal spécial (droit pénal des affaires
qui compte entre autre le délit d'abus de biens sociaux).
Section 2 – La SCS (société en commandite simple)
La SCS n'est plus beaucoup utilisée car elle est relativement complexe à faire fonctionner. En effet il
existe deux catégories d'associés : les associés commandités et les associés commanditaires, qui
n'ont pas la même responsabilité. Les associés commandités sont responsables de façon illimitée du
passif social, au contraire des commanditaires (responsables dans la limite de leurs apports).
Chapitre 2 - Les sociétés civiles à risques illimités
Les sociétés civiles ont cette particularité qu'elles ont un objet civil.
En matière de société commerciale, on a l'habitude d'avoir à faire à une activité économique. Mais en
matière de société civile, l'objectif va être aussi de structurer et de gérer un patrimoine, et en
permettre peut être la transmission au sein des différentes générations d'une même famille (sociétés
civiles immobilières par exemple). Cet aspect diffère des seules structures commerciales. Il existe
aussi en matière civile l'objectif d'organiser une profession relevant du droit civil (sociétés permettant
l'organisation de professions libérales [ex : SCP] ; sociétés civiles de type agricole également).
Il existe un régime général des sociétés civiles, lequel voit ses règles produites surtout par le Cciv.
Mais ce régime général obéit aussi aux règles générales du droit des sociétés. Enfin il existe aussi un
régime spécial pour les sociétés civiles de type particulier (ex : sociétés civiles agricoles). On doit
donc juxtaposer droit général et droit spécial.
(Nous verrons principalement les règles générales applicables aux sociétés civiles de droit commun.)
La difficulté parfois est de conserver une activité parfaitement civile pour des sociétés civiles qui ont
de temps en temps une activité commerciale. On permet à ces sociétés de réaliser quelques actes de
commerce à condition qu'ils restent accessoires (sinon il s'agit d'une société commerciale de fait). La
tolérance fiscale est approximativement de 10% d'activité commerciale (tant que cette barre de 10%
n'est pas dépassée, la société ne sera pas requalifiée en société commerciale de fait). En matière
immobilière, la gestion de biens immeubles est une activité civile ; le fait de les louer, lorsque ces
biens immobiliers sont vides, reste une activité civile. Mais la location de meublés est une activité
commerciale. La commercialité par accessoire s'applique donc si la location de meublés dépasse
10% de l'activité.
Section 1 – Les sociétés civiles de droit commun
§1 Les acteurs de la société civile
A- Les associés
Droits et obligations des associés en général : droits patrimoniaux (droit aux dividendes, droit aux
réserves, droit au boni de liquidation), droits extra-patrimoniaux (droit de vote, droit à l'information,
droit de demander un expert en gestion quand on possède un certain nombre de parts sociales, droit
de demander la réunion de l'assemblée générale, droit de ne pas être exclu de la société)...
Dans la société civile, les associés doivent obligatoirement être au nombre de 2 minimum : c'est une
société de personnes. Il n'existe pas de sociétés civiles uni-personnelles.
1° L'obligation des associés
La société civile est une société de personnes donc c'est une société à responsabilité illimitée. Mais
en tant que société civile, elle échappe à la solidarité spécifique au droit commercial. Par conséquent,
la responsabilité des associés ne sera pas solidaire. Elle sera simplement conjointe : chaque associé
pourra répondre de la dette sociale, mais uniquement à hauteur de sa part dans le capital social. Leur
obligation est donc proportionnelle à leur part dans le capital social, on évoque à ce propos le
bénéfice de division (le créancier de la société est obligé de diviser ses actions contre les
associés).Ce bénéfice de division est inscrit à l'article 1857 du Cciv.
Il existe une exception : les SCP ont pour objet social l'organisation d'une activité professionnelle
libérale. La responsabilité des associés est dans ce cas très lourde, elle est indéfinie mais aussi
solidaire.
Les mineurs peuvent être associés dans une société civile (à l'exception des SCP car il faut la
capacité d'exercer la profession). L'intérêt est de doter un nouveau né de parts sociales d'une société
civile, car au bout d'un certain temps, la cession des parts sociales est exonérée de la plus-value.
Cependant la Cour de cassation a rappelé que la société civile n'était pas sans risque sur le
patrimoine des associés (à cause de la responsabilité illimitée), et un banquier a vu sa responsabilité
engagée pour avoir laissé trop facilement un mineur devenir associé sans vérification de la protection
de son patrimoine (Cass Civ3 28 septembre 2005).
Les créanciers de la société doivent respecter certaines règles pour poursuivre les associés en
paiement de la dette. Les créanciers sociaux ne peuvent poursuivre les associés qu'après avoir fait
de vaines poursuites à l'encontre de la société. Il ne s'agit pas d'une vaine mise en demeure : la vaine
poursuite exige d'avantage qu'une simple mise en demeure d'huissier. Par exemple, Cass 7 octobre
1998 ou encore Cass Civ3 18 juillet 2001 : une créance certaine liquide exigible et irrécouvrable
devant la société ne constitue pas en soi de vaines poursuites, il faut un acte d'exécution contre la
société réalisé sans succès (entamer une procédure d'exécution contre la société).
Cass Com 27 septembre 2005, et Cass Civ1 17 janvier 2006 : le sort des associés de la société civile
n'est pas assimilable à un cautionnement (les dispositions du Code civil ayant trait à l'engagement de
cautions, notamment l'article 1415 Cciv, n'ont pas à s'appliquer pour un engagement d'associés d'une
société civile).
Cass Civ3 8 novembre 2000 : hypothèse d'un associé qui intentait une action en responsabilité civile
contre un créancier de la société, car le créancier s'était adressé aux associés pour obtenir
remboursement (la société ne pouvant pas payer) ; l'associé estimait que le créancier était
responsable de la mauvaise situation financière de la société. Le problème se posait de savoir sur
quel fondement de responsabilité on devait se placer. La société ayant la personnalité morale, elle a
contracté avec le créancier, l'associé n'est donc qu'un tiers par rapport au contrat conclu entre la
société et le créancier. Donc il s'agit de responsabilité délictuelle.
2° Le retrait de l'associé
Art 1869 Cciv : mise en place d'une façon générale du droit de retrait dans les sociétés civiles. Il
existe 3 possibilités de se retirer de la société civile : soit selon les dispositions prévues à cet effet
dans les statuts, soit en obtenant l'accord unanime des associés, soit sur autorisation du juge (retrait
judiciaire). Ce retrait judiciaire a été considéré comme appartenant à l'ordre public (impossibilité de
l'évincer par une clause statutaire particulière). Cela a eu des conséquences.
CA Nancy 30 janvier 1991 : il s'agissait d'une société civile de chasse. L'un des associés est muté en
Afrique donc il décide de demander son retrait. Les associés refusent. Il fait alors valoir son droit de
retrait judiciaire. La CA l'autorise à se retirer et considère qu'il y a eu abus de droit de la part des
autres associés dans le refus d'accorder le retrait.
Le retrait judiciaire se fait sur justes motifs, ce qui renvoie aux justes motifs de la dissolution judiciaire
(notamment mésentente des associés entraînant la paralysie des organes sociaux), sauf que les
justes motifs de retrait n'ont pas été appréciés de la même façon que les justes motifs de dissolution.
Pour la dissolution judiciaire on tient compte de l'intérêt de la société, et on ne fait pas prévaloir
l'intérêt particulier de l'associé qui demande la dissolution. En revanche pour le retrait judiciaire, les
juges n'hésitent pas à faire prévaloir l'intérêt personnel de l'associé retrayant sur l'intérêt de la
société. Dans ce cas là, si aucun tiers ou aucun associé ne veut racheter les parts de l'associé
retrayant, la société est obligée de le faire (il faut donc qu'elle ait les finances pour assumer un tel
rachat, ce qui peut conduire à la dissolution liquidation de la société).
Cependant une évolution apparaît. Cass Com 8 mars 2005 : le juge refuse le retrait considérant que
les justes motifs nécessaires à ce retrait judiciaire ne peuvent pas se réduire à de simples caprices de
la part de l'associé, et qu'il faut motiver davantage les raisons de ce retrait judiciaire. La Cour de
cassation évolue donc vers un durcissement de l'appréciation des justes motifs de retrait judiciaire.
Cass Com 20 mars 2007 : fait douter du caractère d'ordre public du retrait judiciaire. Il s'agissait d'une
femme qui voulait se retirer de la société, et souhaitait sauter les étapes en allant presque
directement à la case retrait judiciaire. Or il existait une disposition statutaire organisant ce retrait. Le
juge a donc rejeté la demande de retrait judiciaire en disant à l'associée qu'elle devait d'abord faire
application de la clause statutaire.
La Cour de cassation rappelle donc que les statuts doivent être respectés avant tout. Le juge met en
avant le contrat et l'obligation de le respecter. Il met en place une sorte de hiérarchie : application des
statuts en priorité. C'est pourquoi le caractère d'ordre public est remis en cause : que se passerait-il
en cas de clause statutaire qui interdirait le retrait judiciaire ? C'est l'évolution du moment.
Durant combien de temps un associé qui se retire de la société conserve la qualité d'associé ?
Beaucoup aimeraient que l'associé perde cette qualité le jour où l'AG constate ce retrait. Cette
solution n'a pas été retenue par l'arrêt de 2008 qui conclut en disant qu'un associé perd sa qualité à
partir du moment où il est remboursé de ses droits sociaux (2 arrêts ch com. 17 juin 2008). Le
problème vient du fait que ce remboursement des droits sociaux peut mettre du temps (il peut
s'écouler plusieurs années). En effet, il s'agit d'un contrat qui peut s'assimiler à un contrat de vente
(vente de parts sociales qui confèrent des droits sociaux), et il est indispensable pour qu'il soit valable
qu'il y ait accord sur la chose et le prix. L'accord sur le prix des droits sociaux est très souvent
discuté. Ce n'est pas simplement la valeur nominale des parts sociales (capital apporté à la société),
car il faut réactualiser ce montant en fonction de l'évolution de la société. Il faudrait évaluer l'actif de la
société (diminué du passif), le diviser en autant de parts sociales qu'il existe dans la société, pour
obtenir la valeur d'une part sociale. Le problème vient de ce que constitue l'actif et le passif : doit-on
tenir compte des dettes prochaines, des investissements réalisés depuis longtemps etc ? Le temps
qu'un expert détermine la valeur des parts sociales il peut donc s'écouler facilement un an, voire
deux. Pendant ce temps, l'associé a toujours la qualité d'associé et peut donc voter aux AG. De ce
fait, l'affectio societatis est diminué car l'associé participe tout en voulant quitter la société, donc il
peut prendre des décisions allant à l'encontre de l'intérêt de la société.
Pour les SCP, il y a des cas et un régime spécifiques permettant notamment à l'associé qui a perdu la
capacité à exercer la profession de se retirer dans des conditions particulières. Pour les notaires,
l'associé qui se retire n'a plus cette qualité d'associé à compter de l'arrêté faisant état de son retrait
de la société.
3° La cession de parts sociales
Tout associé a droit de céder ses parts sociales, cependant il existe certaines règles concernant les
sociétés civiles. Il faut envisager deux situations : la cession volontaire et la cession forcée (cas où
l'associé a apporté en garantie ses parts sociales à un créancier qu'il n'a pas pu rembourser, le
créancier pouvant alors saisir les parts sociales et procéder à une vente forcée de celles ci).
- La cession volontaire
Art 1861 Cciv. Il existe des similarités avec la cession de parts d'une SNC. En effet, la cession de
parts sociales d'une société civile relève de l'agrément de tous les associés. Cependant l'article
précise également qu'il est possible de faire application de clauses statutaires prévoyant une majorité
différente pour l'agrément. Le principe de l'unanimité n'est donc qu'une règle supplétive. Il est
également possible de réserver au seul gérant de la société le pouvoir d'agréer ou non les cessions
de parts sociales. C'est peut-être un risque d'accorder de trop grands pouvoirs au gérant qui pourrait
prendre ses décisions de façon arbitraire. Les statuts de la société peuvent dispenser d'agrément
toute cession, ou les cessions à des membres de la famille par exemple.
Il faut simplement ne pas perdre de vue qu'il s'agit d'une société civile (et non une SNC), dans
laquelle le retrait est organisé, donc si l'agrément est refusé à une cession de parts sociales, alors il
faudra obligatoirement organiser le retrait du cédant.
Procédure de cession de parts sociales : il faut notifier le projet de cession à la société et à chacun
des associés (sauf si l'associé a le pouvoir d'agréer seul). Les associés en place peuvent profiter de
l'opportunité de racheter les parts sociales vendues. La société dispose d'un délai de 6 mois pour
faire connaître sa réponse. Si la cession n'est pas agréée, il faut impérativement que la société
propose une alternative à l'associé cédant pour lui permettre de se retirer : soit la société désigne un
tiers pour le rachat des parts, soit des associés rachètent les parts, soit la société doit racheter ellemême les parts sociales en les annulant et en procédant alors à une diminution de son capital social.
Si aucune proposition n'est ainsi faite au cédant dans les 6 mois, l'agrément est réputé acquis (le
silence vaut acceptation). Cependant il existe une particularité : dans ce délai, les associés ont
l'ultime possibilité de dissoudre la société (expression ultime de l'intuitu personae). Alors on permet
au cédant de sauver la société en revenant sur sa décision de cession (il peut exercer un droit de
repentir). Cet équilibre dans la cession de parts sociales est d'ordre public, on ne peut déroger à cette
procédure ni l'aménager qu'en modifiant le délai de 6 mois sans qu'il puisse être inférieur à 1 mois ou
supérieur à 1 an.
Cass Civ3, 6 décembre 2000 : rappelle que seuls les associés peuvent invoquer le non respect de la
procédure d'agrément dans une cession de parts sociales, le cédant lui même ne le pourrait pas.
Concernant l'évaluation des parts sociales, le contentieux peut porter sur le montant qui sera payé au
cédant. C'est un contentieux très important.
Art 1843-4 Cciv : les parties ont la possibilité de réserver la détermination du prix des parts sociales à
un expert. En matière de vente il existe une disposition comparable : l'évaluation aux dires des tiers
(art 1592 du Cciv : rappelle que le tiers doit être déterminé lui même, ou déterminable, et précise que
si le tiers ne peut pas ou ne veut pas déterminer le prix celui-ci devient indéterminé, la vente est nulle
; cela peut poser problème si le tiers refuse sans raison de déterminer le prix, ou qu'il devient
incapable, voire qu'il décède). Dans l'article 1843-3, on ne laisse pas le choix à l'expert de déterminer
ou non le prix de cession des parts sociales. S'il ne peut pas le faire, cela donne l'opportunité de
désigner quelqu'un d'autre pour sauver la cession de l'annulation pour indétermination du prix. Le
juge ne peut pas déterminer lui même le prix (sinon ingérence dans la force obligatoire des contrats),
mais il ne peut pas non plus déterminer d'emblée l'expert. Ce n'est que le président du TGI saisi en la
forme de référé qui aura la faculté de désigner en cas de défaut d'accord des parties un autre expert
(seul cas où un juge peut désigner un expert).
A partir du moment où l'expert a rempli sa mission, la cession est présumée parfaite. On considère en
effet que le prix déterminé par l'expert est un élément de la formation du contrat de cession (les
parties ne peuvent donc plus changer d'avis) : Cass com 22 mars 2002 (jurisprudence constante).
Le cédant de parts sociales, s'il quitte la société, est libéré de la société civile, mais reste tenu de
payer les dettes sociales échues jusqu'à la publication de la cession.
- La cession forcée
Elle arrive dans un contexte dans lequel un associé s'est servi de ses parts sociales comme garantie.
On parle de nantissement de parts sociales (institué par la loi de 1978, qui a permis la
patrimonialisation des parts sociales, la possibilité pour l'associé de faire de ses parts sociales un
moyen d'obtention de crédit). Si l'associé ne peut pas rembourser sa dette, le créancier peut saisir les
parts sociales et les faire vendre dans le cadre d'une cession forcée. Soit le créancier conserve pour
son propre compte les parts sociales nanties, soit il procède à une vente forcée et se désintéresse
sur le prix ainsi obtenu. On se heurte alors à la procédure d'agrément et à l'intuitu personae de la
société.
Le législateur a prévu un moyen pour éviter des difficultés : avant de procéder au nantissement de
ses parts sociales, l'associé peut proposer à ses associés un projet de nantissement (dans les
mêmes formes que pour une cession : il informe les associés et la société qu'il va procéder à un
nantissement de ses parts sociales). Les associés peuvent accepter ou non ce projet. S'ils
l'acceptent, cela vaudra agrément du cessionnaire en cas d'exécution forcée des parts sociales.
Cependant, le législateur a prévu aux articles 1867 et 1868 du Cciv un repentir des associés qui
peuvent encore dans les 5 jours à compter de la cession forcée se substituer au cessionnaire. Pour
autant il leur est impossible de procéder à une dissolution de la société dès lors qu'ils ont accepté le
projet de nantissement.
Il faut relativiser l'intérêt pour un créancier d'accepter des parts sociales comme garanties : s'il
accepte un nantissement des parts sociales, cela veut dire qu'il envisage de les garder pour lui ou de
les vendre à un tiers acquéreur dans le cas d'une exécution forcée. Or, il ne s'agit pas d'apporter en
garantie un bien meuble ou immeuble évident. Lorsque l'on est propriétaire de parts sociales, on est
propriétaire, mais on acquiert également un statut d'associé, donc une responsabilité conjointe et
illimitée. De ce fait le créancier doit réfléchir au fait qu'il peut devenir associé de la société. Il ne s'agit
pas forcément d'un bon placement.
B- Le gérant
Le terme dirigeant correspond à toute forme sociétaire, tandis que le terme de gérant ne peut
s'appliquer qu'aux sociétés civiles, aux SNC et aux SARL.
Concernant le gérant d'une société civile, on constate qu'on retrouve une certaine liberté
contractuelle. Le gérant de la société civile peut être associé ou non, il peut être statutaire ou désigné
dans un acte extra statutaire (moins formel), il peut être une personne physique ou une personne
morale, il peut être salarié ou parfaitement bénévole (intéressant car alors il pourra bénéficier du
statut de demandeur d'emploi : Cass Soc 10 novembre 1998).
La difficulté réside dans l'étendue des pouvoirs du gérant d'une société civile. Les pouvoirs du gérant
peuvent être organisés comme encadrés par l'article 1848 al 1er du Cciv. Cet article qui fait une
référence à l'intérêt social peut se heurter au principe de spécialité des sociétés civiles en vertu
duquel le gérant ne peut engager la société que pour les actes qui rentrent dans l'objet social de la
société. Les pouvoirs du gérant sont donc cantonnés par l'objet social. En définissant strictement
l'objet social de la société civile on limite ainsi les pouvoirs du gérant.
Ce qui prime dans la société civile est l'objet de la société. Depuis un certain temps, les juges n'ont
que faire de l'intérêt social dans ce domaine et refuseront de valider un acte pouvant se justifier par
l'intérêt social mais n'entrant pas dans l'objet social. L'intérêt social est l'intérêt de la société en
France, tandis que dans les pays anglo-saxons il s'agit de l'intérêt des associés.
Si le gérant ne respecte pas l'objet social, il engage sa responsabilité et pourra être révoqué.
Cependant un acte non conforme à la société pourra exceptionnellement être pris en compte. Ex :
l'un des associé décide de quitter la société. Le gérant par exemple décide de racheter les parts
sociales. Pour ce faire, il fait un emprunt et se fait cautionner par la société. Mais cette opération n'est
pas prévue dans l'objet social. La société pourrait donc ne pas honorer cet engagement (car le
mandat de cautionnement n'existe pas). Cependant cet acte pourrait être considéré comme
respectant l'intérêt social. Mais même dans cette hypothèse le juge tend à faire prévaloir le seul objet.
Néanmoins il sera possible au gérant de dépasser l'objet social, il lui suffit d'obtenir l'accord de tous
les associés pour un tel dépassement exceptionnel (Cass com 12 octobre 2004). Cela est plus facile
que de modifier l'objet social (modification des statuts) car il faut l'accord des associés, ainsi qu'une
publicité des statuts modifiés au greffe du Tribunal de commerce. De plus cela accorderait plus de
pouvoirs au gérant.
Une autre possibilité est offerte pour contrôler les pouvoirs du gérant. Il s'agit d'introduire dans les
statuts une clause limitative de pouvoirs du gérant. Notamment prévoir qu'il ne pourra faire certains
actes qu'avec l'accord de tous les associés (ex : vendre un bien immobilier de la société). Si le gérant
ne respecte pas une telle clause, c'est un motif légitime de révocation. Cependant ces clauses
statutaires restrictives de pouvoirs du gérant ne sont pas opposables aux tiers, que ces tiers soient de
bonne ou mauvaise foi (Cass Civ3, 24 janvier 2001). L'acte n'est donc pas nul. En revanche l'objet
social de la société est opposable aux tiers (les tiers sont réputés avoir connaissance de l'objet social
de la société). L'objet social apparaît notamment systématiquement dans l'extrait K-bis.
Dans les sociétés civiles, il y a eu une évolution qui a permis de tenir compte un peu plus de l'intérêt
social pour valider des actes qui n'entraient pourtant pas dans l'objet social de la société, pour
répondre à un contexte d'utilisation fréquente des sociétés civiles. Les SCI servent parfois à
transmettre un patrimoine immobilier entre générations (pour favoriser une répartition égalitaire entre
les enfants), mais également parfois à gérer l'immobilier qui va servir à une structure commerciale. Il
est alors très fréquent que l'on trouve annexée à une société commerciale une société civile
propriétaire des immeubles dans lesquelles l'activité commerciale est exercée.
Ex : une SARL ayant pour objet social l'exploitation d'un fonds de commerce, et une SCI qui sera
souvent composée des mêmes associés (pas forcément tous les associés de la SARL), et qui est
propriétaire des locaux dans lesquels est exploité le fonds de commerce. Les locaux sont donc loués
à la SARL à travers un bail commercial, et la SARL verse alors à la SCI des loyers (utile pour des
soucis fiscaux). L'avantage également consiste en ce que les locaux ne seront pas saisis en cas de
faillite de la SARL. Le risque d'une telle opération est que le créancier de la SARL mette en avant une
confusion des patrimoines entre les deux sociétés afin de pouvoir saisir les locaux commerciaux.
Cependant la confusion des patrimoines n'est pas qualifiée systématiquement, il faut en effet qu'il
existe des relations contractuelles anormales, des flux de trésorerie anormaux (par exemple dans le
cas présent, un loyer anormalement élevé ou bas, une comptabilité commune entre les deux
sociétés...).
L'évolution consiste en ce que les juges ont accepté de considérer que lorsque des actes sortant de
l'objet social de la société civile étaient faits pour répondre à une communauté d'intérêts sociaux, ils
pouvaient alors être validés. L'intérêt commun de deux sociétés permet de dépasser l'objet social.
Cass Civ1, 15 mars 1988, également CA Nîmes 28 janvier 2003 (jurisprudence constante).
Précision tirée de la théorie générale des sociétés : il apparaît de jurisprudence constante que
certains actes ne peuvent pas être faits par un gérant seul, ceci devant être connu de tous les tiers. Il
en est ainsi pour l'acte de dissolution de la société, pour les actes ayant trait aux modifications de
l'objet social ou des statuts. Par conséquent toute décision susceptible d'entraîner la dissolution de la
société par extinction de l'objet social ne peut pas relever du seul pouvoir du gérant.
Ex : Cass Civ3, 31 mars 1999.
La révocation du gérant : une grande liberté statutaire.
On peut prévoir dans les statuts que le gérant sera irrévocable de fait. Il suffit, si c'est un gérant
associé, de prévoir que le gérant sera révocable à l'unanimité. Néanmoins, le gérant d'une société
civile peut faire l'objet d'une révocation judiciaire pour justes motifs. Le gérant peut également
démissionner et sa démission ne peut être refusée par les associés.
S'il commet une faute il peut engager sa responsabilité, il doit alors réparer les préjudices
occasionnés à la société ou aux associés. Les juges ont du mal à reconnaître l'existence d'un
préjudice spécifique supporté par les associés, ils ont tendance à penser que le préjudice subi par les
associés est le même que celui subi par la société elle-même. Le préjudice par ricochet n'est pas
reconnu en droit des sociétés. Pour qu'un associé puisse recevoir réparation d'un préjudice, il faut
qu'il prouve que ce préjudice est vraiment distinct de celui supporté par la société (la perte de
dividendes n'est pas différente de la perte financière de la société).
Le gérant n'engagera pas sa responsabilité vis à vis de la société même s'il a réalisé un acte ruineux
pour la société dans la mesure où cet acte avait été préalablement autorisé par les associés (Cass
Civ3, 2 octobre 2001).
§2 Le déroulement de la vie sociale
A- L'information individuelle des associés
Pendant longtemps, l'information individuelle des associés d'une société civile a été très réduite. Il y
avait un effet de mode de création de sociétés civiles. Mais depuis peu, la jurisprudence tend à se
montrer beaucoup plus regardante des comptes de sociétés civiles et à demander plus de choses
aux gérants, notamment effectuer l'information des associés. On assiste à un formalisme de
l'information des associés.
En principe, une fois par an, les associés ont droit à communication des documents sociaux. Ils ont
également le droit de poser des questions écrites au gérant qui doit leur répondre dans le délai d'un
mois. Ils ont enfin le droit de prendre connaissance du rapport de gestion (fait par le gérant).
CA Paris a eu l'occasion de rappeler qu'il s'agissait d'une obligation du gérant que d'établir des
comptes permettant la bonne information des associés. L'absence de comptes suffisamment clairs
peut justifier une mesure d'instruction, la nomination d'un expert pour établir une certaine clarté. La
CA Paris insiste : cette obligation s'impose que les statuts l'aient prévue ou non. (CA Paris 12 février
2003). Cependant il ne serait tout de même pas nécessaire pour les gérants de société civile d'établir
une comptabilité en partie double, mais une comptabilité en partie simple suffirait. Cass Civ3, 24
septembre 2003 : le fait pour un gérant de ne pas avoir respecté les clauses statutaires de tenue des
comptes peut justifier sa révocation pour justes motifs.
B- La décision collective
Les sociétés civiles sont des sociétés de personnes, donc la répartition des votes se fait en fonction
des individus (un vote par tête). Mais ce principe n'est pas d'ordre public, il est possible de prévoir
dans les statuts d'autres modalités de répartition des droits de vote. On peut par exemple considérer
qu'à chaque part sociale correspond un droit de vote (comme dans une société de capitaux). Il
n'existe aucune restriction dans ce domaine, la liberté statutaire est très importante.
Concernant l'adoption des décisions : la liberté statutaire l'emporte. Le principe est l'unanimité mais
les statuts peuvent prévoir des majorités différentes pour certaines décisions.
La question est de savoir qui est détenteur de la qualité de voter. Les associés détiennent la qualité
de voter, mais parfois il est difficile de savoir qui est véritablement associé. Le problème s'est posé
particulièrement en matière de sociétés civiles. En effet on a rencontré des contextes de
démembrement de propriété sur des parts sociales. (ex : les parents conservant la nu propriété de
parts mais donnant l'usufruit à leurs enfants).
Art 1844 du Cciv : « tout associé a le droit de participer aux décisions collectives ». Le droit de vote
appartient au nu propriétaire, sauf pour les décisions concernant l'affectation des bénéfices où le droit
de vote revient à l'usufruitier. Mais le même article prévoit que les statuts peuvent déroger à ces
règles. Cet article ne précise pas qui a la qualité d'associé.
Cass Com 4 janvier 1994 : les parents avaient concédé l'usufruit de leurs parts sociales à leurs
enfants, et les enfants avaient fait insérer une clause dans les statuts selon laquelle le droit de vote
aux AG appartenaient aux usufruitiers. La Cour de cassation a reconnu qu'il était possible
d'aménager le droit de vote par une clause statutaire, mais elle a ajouté qu'une telle clause ne doit
pas conduire à priver le nu propriétaire de tout droit de participer à la décision collective. Le droit de
participer à la décision collective est donc un principe d'ordre public. On peut diminuer le droit de vote
mais on ne peut pas supprimer le droit de participer à la décision collective (droit d'être convoqué aux
AG, d'être informé, d'être présent aux AG).
Cass Com, 31 mars 2004 : les usufruitiers s'étaient vus privés de leur droit de vote sur les décisions
relatives à l'affectation des bénéfices. Cet arrêt considère qu'on ne peut pas priver l'usufruitier de la
totalité de son droit de vote sur l'affectation des bénéfices. Les dividendes sont considérés comme
des fruits civils. Si on prive un usufruitier du droit de voter sur l'affectation des bénéfices, cela pourrait
revenir à le priver du droit de percevoir les dividendes, donc à vider de leur substance les droits de
l'usufruitier. Il s'agit d'une solution assez extrême.
Cass Com, 22 février 2005 : revient à la solution de l'arrêt 1994. Cet arrêt suggère la primauté de
l'alinéa 1er de l'article 1844 du Cciv, au profit du nu propriétaire. On met en avant le droit de
participation à la décision collective au détriment du droit de vote. Le droit de vote ne sera plus la
prérogative exclusive d'un associé, c'est-à-dire qu'il n'y aura pas que les associés qui auront des
droits de vote dans les sociétés. Cela réduit l'importance de ce débat entre nu propriétaire et
usufruitier pour savoir qui a la qualité d'associé, qui a le droit de voter. On le voit par exemple avec la
loi de 2003 qui permet de louer des actions ou des parts sociales : c'est le loueur qui a la qualité
d'associé, mais c'est le locataire qui a le droit de voter.
Cass Civ3, 29 novembre 2006 : l'associé qui cède la nue propriété de ses parts perd sa qualité
d'associé. Pour certains cet arrêt dit explicitement que l'usufruitier n'a pas la qualité d'associé.
La décision collective peut être prise en AG. L'AG des associés n'est véritablement obligatoire qu'une
fois par an, lorsqu'il s'agit d'approuver les comptes et d'affecter les bénéfices. Il y a un risque à ne pas
tenir d'AG : c'est le fait que des créanciers personnels des associés qualifient cette société civile de
fictive (l'intérêt pour eux est d'obtenir des droits sur les meubles de la société).
La décision collective peut être prise par le biais d'une consultation écrite auprès de chaque associé,
ou bien dans un acte signé par tous les associés. S'il y a AG, les associés doivent être convoqués 15
jours avant minimum par lettre RAR. Les juges ont fait preuve d'une grande sévérité concernant ces
règles de convocation.
La Cour de cassation a finalement accepté de limiter ses exigences, et a considéré que ces
exigences présentes dans le décret du 3 juillet 1978 n'étaient pas requises par l'ordre public
sociétaire. Le non respect du mode de convocation des associés avant l'AG n'est pas susceptible
d'entraîner la nullité de l'AG (donc des décisions prises à cette occasion), Cass Civ3, 11 octobre
2000.
Les statuts peuvent prévoir quelles décisions sont des décisions collectives. Mais il est
incontournable que certaines décisions relèvent de cette collectivité (nomination du gérant, sa
révocation, les modifications de statuts, les modifications de capital social).
Il est possible d'insérer une clause selon laquelle un associé pourrait seul en cas de défaillance du
gérant convoquer l'AG. Sinon un associé seul n'a pas cette capacité.
Concernant la dissolution, la société civile obéit aux règles de droit commun de dissolution des
sociétés, et contrairement à la SNC, elle ne fera pas l'objet d'une dissolution à la suite du décès d'un
associé, car c'est un outil de transmission d'un patrimoine.
La société civile obéit au régime fiscal des sociétés de personnes, elle n'est pas soumise à l'IS, ce
sont les associés qui règlent l'imposition au travers de l'IR. Elle n'est pas obligée (comme les SA)
d'avoir un commissaire aux comptes pour attester la régularité et la sincérité de ses comptes. Mais ce
recours devient obligatoire lorsque deux des trois seuils suivants sont dépassés : 1 550 000 € de total
du bilan, 3 100 000 € HT du CA, 50 salariés.
Section 2 – Les sociétés civiles de types particuliers (cf petit poly)
PARTIE 2 – LES SOCIETES A RISQUES LIMITES
TITRE 1 – LA SARL ET L'EURL
La SARL est une société hybride. On ne sait pas où la classer entre les sociétés de capitaux et les
sociétés de personnes. Elle a surtout été institutionnalisée par la loi de 1966 sur les sociétés. En
1985 une loi crée l'EURL (on considère qu'une société peut être instituée par une seule personne).
La SARL est considérée comme la société des jeunes entreprises, toutes les aides sociales, toutes
les exonérations fiscales vont d'une façon privilégiée être attribuées aux SARL (ex : l'exonération de
cotisations sociales pour la création d'un premier emploi). A compter des années 2000, la SARL a
subi petit à petit une métamorphose. Diverses lois et ordonnances l'ont singulièrement modifiée (ex :
loi nouvelle régulation économique du 15 mai 2001, loi sur l'initiative d'économie du 1er août 2003,
ordonnance du 25 mars 2004 qui finit d'assouplir le régime des SARL). Pour autant on ne change pas
la problématique de fond : le caractère hybride de la SARL. La SARL reste toujours une société
hybride malgré ces modifications, mais les données de réponse à cette question ont changé.
Il existe approximativement 1 500 000 SARL en France aujourd'hui.
Chapitre 1 – La constitution de la SARL
La SARL doit obéir aux règles communes de constitution de société : apports, participation aux pertes
et bénéfices, affectio societatis. Pour avoir la personnalité morale, la société doit être immatriculée au
RCS. Mais la SARL obéit également à des règles spécifiques.
Section 1 - Les règles de constitution particulières aux associés
Il y a toujours eu un intuitu personae important dans la SARL, d'autant plus important car il est
presque volontairement créé par le législateur. Par exemple la SARL ne doit pas compter trop
d'associés, elle doit demeurer une société dans laquelle tous les associés se connaissent.
Jusqu'à l'ordonnance de 2004, la SARL ne devait pas compter plus de 50 associés. Avec cette
ordonnance, la SARL ne doit pas compter plus de 100 associés désormais.
En principe, à compter de plus de 100 associés, on présume que la société fait appel public à
l'épargne. En limitant à 100 le nombre d'associés d'une SARL, le législateur considère que la SARL
ne pourra jamais faire appel public à l'épargne.
Si en cours de vie sociale, la SARL dépasse le nombre de 100 associés (ex : décès d'un associé qui
laisse 4 héritiers en indivision), la société devra dans le délai d'un an se transformer en une autre
forme de société (avant le législateur imposait la transformation en SA, aujourd'hui l'ordonnance
apporte beaucoup plus de libertés aux SARL). Si la transformation n'est pas faite dans le délai, ce
sera une cause de dissolution de plein droit de la SARL.
Les associés peuvent être personnes physiques ou morales. Deux époux peuvent constituer entre
eux une SARL. Le statut d'associé d'une SARL ne nécessite pas la qualité de commerçant. Par
conséquent, un mineur peut devenir l'associé d'une SARL par l'intermédiaire de son représentant
légal (il peut même être l'associé unique d'une EURL, mais cependant il ne pourra pas être le gérant
de cette EURL : cela crée un paradoxe car l'entreprise uni personnelle à responsabilité limitée
comptera donc deux acteurs).
Section 2 - Les règles particulières aux apports et au capital
§1 Les apports
On peut faire des apports en numéraire, en nature (importants car ils constitueront l'apport du fonds
de commerce par exemple). La société étant à responsabilité limitée il faut assurer un minimum de
tangibilité de capital social pour rassurer les créanciers. Il faut donc mettre en place des règles
assurant une bonne évaluation des apports en nature.
Les statuts doivent contenir l'évaluation précise de chaque apport en nature, évaluation qui sera faite
par un commissaire aux apports, désigné à l'unanimité des futurs associés. Si aucun apport en nature
n'excède 7 500 €, et que la valeur totale des apports en nature n'excède pas la moitié du capital
social, les associés peuvent faire le choix de ne pas recourir à un commissaire aux apports.
Cependant dans ce cas, les associés seront responsables solidairement de la valeur des apports
pendant 5 ans. Lorsqu'il s'agit d'un apport d'un bien immobilier, il faudra que l'acte d'apport soit réalisé
devant notaire (car il doit faire l'objet d'une publicité foncière). Enfin seuls les apports en nature
doivent être intégralement libérés dès leur souscription (dès la promesse d'apport).
Les apports en industrie étaient interdits dans la SARL comme dans toute société en capitaux. Ils
n'étaient pas comptabilisés dans le capital social. Cependant depuis quelques temps, une tolérance
était apparue dans les SARL, dans le contexte où un commerçant / artisan faisait apport principal de
son fonds de commerce à une SARL, le conjoint était autorisé à y réaliser un apport en industrie (à
titre exceptionnel). Puis, avec la loi du 15 mai 2001, l'exception devient un principe. Les statuts
peuvent envisager le principe d'apport en industrie, à condition d'en déterminer précisément les
modalités (car les apports en industrie ne seront pas comptabilisés dans le capital social, mais ils
vont donner droit à des droits sociaux comme le droit de vote notamment, ou des droits sur les
dividendes, en revanche l'associé n'aura pas le droit de céder ou transmettre ses parts d'apporteur en
industrie).
Toutefois on considérait déjà en 2001 que le capital social était trop faible, on parlait de sous
capitalisation. L'ordonnance de 2004 prévoit une disposition intéressante (l'article L 223-8 du Ccom)
facilitant le retrait des apports par les associés pour le cas où la SARL ne ferait pas l'objet finalement
d'une immatriculation ou constitution définitive. Auparavant il fallait qu'un des apporteurs saisisse le
juge pour que celui ci ordonne au dépositaire (organisme détenteur du compte bloqué détenant les
fonds) le déblocage des fonds et la restitution des sommes aux apporteurs. Aujourd'hui il suffit qu'un
des apporteurs soit représenté par un mandataire pour que celui ci puisse s'adresser directement au
dépositaire pour obtenir le retrait des fonds.
§2 Le capital social
C'est le capital social qui a fait l'objet des bouleversements les plus importants. Pendant longtemps, il
fallait réunir 7 500 € pour constituer une SARL. La loi du 1er août 2003 règle définitivement le
problème, il n'est plus besoin désormais d'un montant minimal de capital social imposé par la loi. Les
statuts fixent librement le montant du capital social de la SARL.
Les apports en numéraire depuis la loi de 2001 n'ont plus besoin d'être libérés intégralement. Ils
peuvent n'être libérés que pour 1/5e de leur montant, le reste étant libéré dans les 5 ans (art L 223-7
du Ccom). C'est au gérant de la SARL qu'il appartiendra de vérifier la libération des apports (s'il ne le
fait pas, il entraîne sa responsabilité).
Cela rapproche la SARL des sociétés de personnes dans lesquelles le capital social importe peu.
Pourtant il existe une nouvelle opportunité qui aurait plutôt tendance à rapprocher la SARL de
sociétés de capitaux : c'est la possibilité d'émettre des obligations (L 245-11 du Ccom). La SARL émet
jusqu'ici des parts sociales (et non des actions), elles ne sont pas aussi facilement transmissibles que
les actions. Mais aujourd'hui, la SARL peut émettre des obligations, qui ne lui permettent pas de faire
appel public à l'épargne mais lui permettent d'émettre des moyens de financement extérieur qui se
rapprochent des valeurs mobilières. Une obligation est en fait une demande de prêt, de financement,
que la société va faire en cours de vie sociale ; ceux qui auront prêté de l'argent seront détenteurs
d'obligations, les obligataires, et recevront en contrepartie de ces obligations des intérêts fixes, et
seront à terme remboursés des sommes qu'ils ont prêté, le terme devant être prévu précisément. Une
obligation est un placement moins risqué mais qui rapporte moins qu'un placement en actions. Les
obligataires peuvent être des tiers déjà en relation avec la société (car pas d'appel public à l'épargne)
ou des associés.
Cette possibilité d'émettre des obligations permet, en cours de vie de la société, de refinancer la
SARL. Cependant elle n'est permise qu'à certaines SARL, celles qui sont tenues d'avoir un
commissaire aux comptes (dans les mêmes conditions que pour les sociétés civiles : si elle dépasse
2 des 3 seuils) et dont les trois derniers exercices sociaux ont été approuvés. Comme les SARL ne
peuvent pas faire appel public à l'épargne, elles ne pourront pas faire une grande diffusion sur leur
recours à un emprunt obligataire, elles ne pourront pas faire de grande publicité pour leur émission
d'obligations.
Les obligations complexes sont les plus intéressantes, notamment les obligations qui sont
convertibles au bout d'un certain temps en actions. Ces obligations ne sont pas possibles en SARL,
on y trouvera uniquement des obligations simples.
Cass com, 23 nov 1999 : un gérant peut engager sa responsabilité pour avoir constitué une SARL
avec insuffisance de capital social (assimilé à une faute de gestion).
La SARL est une structure sociétaire qui peut (si les associés l'ont décidé et l'ont inscrit dans les
statuts) avoir un capital variable. On peut revenir à un capital fixe sans modifier les statuts.
Chapitre 2 – Le fonctionnement de la SARL
Section 1 – La structure de la SARL
§1 Les associés
Les associés n'ont pas à répondre sur leur patrimoine propre des dettes de la société, leur
responsabilité est limitée au montant de leurs apports. Cela est lié à l'autonomie patrimoniale de la
société. Il est possible de contourner ce principe en incitant le gérant, les associés, voire leur conjoint,
à se porter caution des dettes de la société.
Cass com, 3 juillet 2001 : SARL qui a fait l'objet d'une liquidation, tous les créanciers apparents ont
été remboursés et les apports également, de plus le boni de liquidation a été partagé ; mais un
créancier s'est manifesté tardivement et la société n'existait plus en tant que personne morale ; le
créancier demande alors à s'adresser aux anciens associés pour qu'ils le remboursent. La Cour de
cassation a donné raison au créancier, en énonçant que les associés étaient responsables
solidairement et indéfiniment vis à vis de cette dette sociale. Réponse surprenante, qui s'explique
sans doute exclusivement par le fait qu'il y avait eu un boni de liquidation distribué aux associés avant
la dissolution de la société.
CA Paris, 7 juin 2001 : a donné une réponse inverse.
A- Les droits individuels des associés
1° Le droit de céder et de transmettre ses parts sociales
Les parts sociales des SARL ne sont pas des actions librement négociables (Remarque : toutes les
actions ne sont pas nécessairement librement négociables, cela dépend des statuts des sociétés
concernées qui peuvent fermer considérablement la négociation des actions). Cela implique un
régime juridique particulier. Les parts sociales sont moins facilement cessibles et transmissibles que
des actions. Une cession de parts sociales doit être constatée par écrit et être portée officiellement à
la connaissance de la société (article L 221-14 du Ccom). Une cession de parts sociales sera
opposable à la société si l'on a respecté les formalités de l'article 1690 du Cciv. Ainsi la société doit
avoir accepté formellement la cession dans un acte authentique ou bien alors il faut que l'acte de
cession soit déposé au siège social. (Pour une cession normale d'actions ordinaires, ces formalités
ne sont pas nécessaires.)
Il faut de plus respecter une certaine publicité pour que la cession de parts sociales soit opposable
aux tiers (publicité au RCS). Il ne s'agit pas d'une mesure de validité de la cession, qui serait valable
entre les parties même sans publicité (jurisprudence constante, Cass com 26 mars 1996).
a- La cession entre associés et assimilés (personnes assimilées à un associé)
Article L 223-13 du Ccom. Dans le cas d'une cession entre associés dans une SARL, il n'y a pas
d'atteinte à l'intuitu personae. C'est pourquoi il ne sera pas nécessaire de recevoir un agrément des
autres associés pour une cession entre associés. Cependant la liberté statutaire permet de prévoir un
agrément pour le cas où une cession entre associés entraînerait un changement de majorité au sein
de la SARL. Si l'associé cédant se voit refuser l'agrément, on devra organiser son retrait.
Si la cession concerne un membre de la famille du cédant, l'article L 223-13 al 2 du Ccom tend à
considérer que l'atteinte à l'intuitu personae n'est pas très grave, aussi cet article prévoit que la
cession à un membre de la famille du cédant doit en principe être libre. Néanmoins les statuts
peuvent prévoir une disposition alignant le sort des membres de la famille du cédant sur le sort de
véritables tiers à la société. Dans ce cas, le législateur a diminué la liberté statutaire, les statuts
doivent se contenter d'un alignement de l'agrément à un membre de la famille à celui de tiers. Si
l'agrément est refusé, il faudra toujours organiser le retrait de l'associé.
En cas de décès d'un associé, la continuation de la SARL peut être organisée. On va tâcher de faire
de la SARL un outil efficace de transmission d'entreprise. On peut prévoir dès les statuts de la société
le remplaçant de l'associé défunt (on peut le désigner très précisément : un autre associé, un certain
membre de la famille du défunt, un tiers à la société qui n'est même pas un successible du défunt).
L'avantage est que le successeur ainsi désigné n'aura pas à subir les clauses d'agrément (article L
223-13 al 4 du Ccom).
b- La cession à des tiers
On considère que l'intuitu personae peut être affecté, le législateur impose alors un agrément lorsque
la cession se fait au profit d'un tiers à la société. La cession doit être autorisée par la majorité des
associés représentant au moins la moitié des parts sociales (avant 2004, il fallait la majorité des ¾
des parts sociales). Il faut donc une double majorité (cumulative). C'est une majorité qualifiée.
Depuis l'ordonnance de 2004, cette majorité n'est plus d'ordre public, les statuts pourraient donc
envisager un agrément plus fort, sans que l'on puisse réclamer toutefois l'unanimité.
Si la société ne se prononce pas dans un délai de 3 mois, le cessionnaire pressenti sera considéré
comme agréé. Si la cession n'est pas notifiée aux associés, elle est nulle (nullité absolue ne pouvant
pas être régularisée) : Cass com 9 mai 1990.
S'il n'y a pas d'agrément, l'associé cédant est autorisé à se retirer, selon une procédure proche de
celle des sociétés civiles (L 223-14 al 3 du Ccom). L'ordonnance de 2004 a légèrement modifié cette
procédure.
Pour pouvoir exiger que la société rachète les parts sociales du cédant à défaut d'autre solution, il
faut que le cédant retrayant soit associé depuis au moins 2 ans dans la SARL.
De plus l'ordonnance de 2004 accorde au cédant un droit de repentir, alors que la société essaye
d'organiser son retrait (article L 222-14 du Ccom). Le législateur laisse à penser que le cédant peut
exercer ce droit de repentir même après qu'un expert nommé à cet effet ait déterminé la valeur des
parts sociales du cédant. Cela remettrait en cause une jurisprudence constante (Cass com 13
octobre 1992 et Cass com 2 juillet 1996).
Enfin, concernant l'évaluation de parts sociales en cas de cession ou de retrait d'un associé d'une
SARL, l'ordonnance de 2004 ajoute que si les parties (la société elle même et le cédant) font le choix
d'avoir recours à un expert pour déterminer la valeur des parts sociales cédées, les frais de cette
expertise seront à la charge de la société. En général il est fait référence à l'article 1843-4 du Cciv, qui
était auparavant considéré comme d'ordre public (à défaut d'accord entre les parties sur la valeur des
parts sociales, il fallait obligatoirement avoir recours à un expert). L'ordonnance de 2004 a supprimé
le caractère d'ordre public de cet article. Mais dans l'article L 223-14 du Ccom qui a trait à l'évaluation
des parts sociales et à la possibilité d'avoir recours à un expert, on a oublié de supprimer le fait que
ce recours était d'ordre public. Du coup certains auteurs se demandent si l'article 1843-4 du Cciv a
perdu son caractère d'ordre public dans les cessions de parts sociales de SARL (la question se pose
de savoir si les statuts pourraient prévoir autrement l'évaluation des parts sociales).
Cass com, 4 février 2004 : l'expert avait sous évalué les parts sociales, il engage sa responsabilité
personnelle vis à vis du cédant.
A l'instar des sociétés civiles, les parts sociales de SARL peuvent faire l'objet d'un nantissement.
Droits individuels : les associés ont droit au partage des bénéfices, tout en sachant que ces bénéfices
peuvent avoir au moins 3 usages : distribués (transformation en dividendes), réinvestis dans le
fonctionnement de la société, mis en réserve (dans la SARL il y a obligation de constituer une
réserve, qui doit consister en un prélèvement de 1/20e du bénéfice par exercice ; ce prélèvement
obligatoire cesse quand la réserve atteint 1/10e du capital social). La réserve sert à rassurer les
créanciers, on met ainsi des fonds à la disposition de la société, et à la garantie des créanciers ces
réserves, qui ne pourront pas être distribuées aux associés et ne pourront pas servir au rachat ou
remboursement des droits sociaux des associés. Les montants précités sont un minimum, il est
possible de mettre en réserve un montant exceptionnel une année donnée.
La répartition entre associés des dividendes peut être inégalitaire dans les statuts. Il n'existe qu'une
seule réserve à respecter, c'est l'interdiction des clauses léonines (tout réserver à un associé et/ou
exclure un autre). Si rien n'est prévu dans les statuts, la répartition des dividendes se fera en fonction
de la part des associés dans le capital social.
Cass com 26 mai 2004 : pour changer la répartition des dividendes il faut passer par une AG.
2° Droit à l'information
Ce droit à l'information des associés a été prévu à l'origine par la loi de 1966 puis modifié. Les statuts
peuvent étendre ce droit à l'information, mais pas le diminuer.
L'associé peut consulter à tout moment au siège de la société les documents des 3 derniers
exercices sociaux. En revanche il ne peut pas demander à consulter de cette façon là les documents
de l'exercice social en cours. L'associé a également la possibilité de poser deux fois par an des
questions écrites au gérant de la société s'il estime que la situation de l'entreprise s'avère difficile
(article L 223-36 du Ccom). L'associé a le droit en se déplaçant sur place (au siège de la société) de
consulter l'inventaire des biens de la société. Les associés avant chaque AG doivent recevoir (15
jours au moins avant, par RAR) le texte des délibérations des résolutions qui seront soumises au vote
de l'AG, ainsi que le rapport du gérant, et les documents sociaux (les comptes sociaux) de l'exercice
qui vient de s'écouler. Les associés disposent d'un droit de question écrite sur ces documents au
gérant. Mais ce droit de question écrite n'apparaît comme effectivement recevable que devant les AG
ordinaires.
On peut ajouter à ce droit à l'information que les associés disposant d'au moins le dixième du capital
social peuvent demander la nomination d'un expert en gestion (article L 223-37 du Ccom). Cet expert
en gestion aura pour mission de rendre un rapport sur les aspects de la vie sociale qui sont
contestés.
Depuis la loi NRE du 15 mai 2001, les associés qui ne pourraient obtenir communication de certains
documents ont désormais un moyen plus rapide de forcer la main du gérant : l'injonction de faire
(article L 238-1 du Ccom). L'injonction de faire nécessite la saisie du président du tribunal de
commerce, statuant en référé.
B- La prise de décisions collectives
Le principe est contenu à l'article L 223-28 du Ccom, c'est un principe d'ordre public. A chaque part
sociale correspond une voix. La décision collective sera prise en AG, mais l'on peut procéder par
consultation écrite, ou dans un acte signé par tous lorsque les statuts ont prévu cette modalité
d'expression. Mais dans certaines hypothèses, l'AG sera incontournable et obligatoire, ce sera le cas
notamment lorsqu'il faudra approuver les comptes annuels et particulièrement dans l'hypothèse où
l'AG a été réclamée (car défaillance du gérant à le faire) par des associés détenant la moitié du
capital social ou bien par le quart du nombre des associés détenant le quart des parts sociales.
Distinction entre AG ordinaire et AG extraordinaire :
Les AG ordinaires ont pour objectif la prise des décisions ordinaires (décisions qui n'entraînent pas de
modifications des statuts, ex : approbation des comptes, approbation des conventions entre gérant
associé et la société elle même, autorisation donnée au gérant d'accomplir des actes hors statut,
nomination et remplacement des gérants et des commissaires aux comptes). Pour ces AG, les
modalités d'acceptation des décisions sont les suivantes (art L 223-29 du Ccom) : il suffit de l'accord
des associés représentant la majorité absolue du capital social. C'est une disposition d'ordre public
pour les décisions relevant de l'AG ordinaire. A défaut de majorité, il faudra convoquer une seconde
AG, au cours de laquelle la décision sera considérée adoptée à une majorité des votes (quelque soit
le nombre de votants). On met en place un quorum. Toutefois les statuts de la société peuvent
renoncer à cette exigence de quorum (et donc prendre en compte uniquement les associés présents
dès la première AG).
Les AG extraordinaires ont pour objectif la prise des décisions extraordinaires qui entraîneront une
modification des statuts (augmentation ou réduction du capital social, agrément de nouveaux
associés, transformations de la société, changements de nationalité, dissolution anticipée).
Cependant on n'a pas nécessairement une seule modalité d'adoption de ces mesures. En vertu de
l'article L 223-30 du Ccom, on applique le principe selon lequel les modifications apportées aux
statuts doivent être prises par les associés représentant les ¾ des parts sociales (majorité renforcée
par rapport aux AG ordinaires), ce principe n'étant plus d'ordre public (le législateur peut modifier les
règles d'adoption de certaines mesures, ex : dissolution anticipée de la société = unanimité ; art L
223-30 al 6 : pour augmenter les engagements individuels des associés, on exige l'unanimité). Le
blocage des comptes courants des associés (comptes courants ouverts aux associés au sein de la
société : ressources internes à la société) requiert des modalités particulières : convention de blocage
des comptes courants entre l'associé et la société (l'associé s'engage à ne pas retirer ces sommes du
compte courant, car la société en a besoin). Ces conventions de blocage de compte courant doivent
être adoptées par l'AG des associés. Ces conventions sont considérées comme un alourdissement
des engagements des associés, donc elles requièrent l'unanimité (Cass com, 24 juin 1997 ; JCP
entreprises 1997 pan. 951).
Seuls les associés peuvent invoquer la violation des dispositions relatives aux convocations aux AG.
Donc l'action réalisée par un gérant non associé est irrecevable (Cass com, 17 décembre 2002 ;
Revue droit des sociétés mars 2003, n°52 p 27).
§2 La gérance
Articles L 223-18 et suivants du Ccom.
A- Le statut du gérant
Le gérant de la SARL doit être une personne physique. Il peut être un associé ou un tiers à la société.
On peut tout à fait choisir d'avoir à faire à une cogérance (chacun des cogérants est susceptible
d'engager la société, quelque soient les clauses statutaires attribuant à chacun des pouvoirs
spécifiques). On préfère parfois une gérance alternée (permet de concilier les ego des associés tout
en ayant une certaine visibilité de l'extérieur).
La SARL a cette particularité qu'elle permet au gérant de cumuler cette fonction de gérant avec le
statut de salarié. Cela ne signifie pas que la fonction de gérant soit elle même salariée, cela signifie
que le gérant de SARL peut être salarié par ailleurs ou dans la propre société qu'il gère. Pour qu'il y
ait reconnaissance d'un statut de salarié, il faut évidemment que le contrat de travail soit effectif, qu'il
consiste en une tâche réellement distincte de celle du gérant, et qu'il existe un lien de subordination
entre le gérant et la société qui l'emploie. La difficulté se pose dans ce cas précis (pas de problème
quand le gérant est salarié ailleurs). On va alors distinguer entre un gérant majoritaire et un gérant
minoritaire. On déduit qu'un gérant majoritaire qui détient plus de la moitié du capital social ne peut
pas être en réelle subordination avec la société qu'il gère et qui l'emploie. Par conséquent dans
l'hypothèse d'un gérant majoritaire, le cumul entre la fonction de gérant et un contrat de travail au sein
de la société sera refusé. (A contrario : Cass soc, 14 mai 1998 ; JCP entreprises 1999 p 284 : ayant à
faire à une gérante non associée, celle ci peut parfaitement bénéficier du cumul, car elle était bien en
état de subordination avec les deux autres associés de la société).
Le législateur gomme les avantages mais il reste les avantages fiscaux et sociaux. Socialement et
fiscalement parlant, le gérant majoritaire est celui qui détient la majorité des parts sociales plus une.
Mais pour calculer si un gérant est majoritaire ou non, on comptabilise également les parts sociales
de son conjoint et de ses enfants mineurs (et non pas seulement les siennes propres).
Le gérant majoritaire voit son statut aligné à celui du gérant minoritaire sur le plan fiscal. Son statut
est aligné sur celui des salariés, il bénéficie d'une déduction forfaitaire de 10% pour frais.
Sur le plan de la protection sociale, des différences demeurent. Tandis que les gérants égalitaire et
minoritaire relèvent du régime des salariés, le gérant majoritaire est assimilé à un travailleur
indépendant. La protection sociale des travailleurs indépendants est plus coûteuse (cotisations
sociales plus élevées) pour une protection sociale moins importante que celle des salariés.
1° La désignation du gérant
Il pourra être désigné par un acte extra statutaire ou bien par les statuts. Sa nomination peut être
décidée par un ou plusieurs associés représentant plus de la moitié des parts sociales. L'ordonnance
de 2004 a introduit quelques assouplissements : si la majorité n'est pas réunie, il sera possible aussi
de procéder à une seconde convocation même en AG ordinaire (article L 223-18 du Ccom : organise
les modalités de ce quorum). Cette majorité de désignation de gérant peut être renforcée par les
statuts. Mais on peut signaler que selon de nombreux auteurs la généralisation de la mise en place
d'un quorum est considérée comme un affaiblissement de l'intuitu personae dans les SARL
(finalement à la seconde AG, la décision sera adoptée par ceux qui seront présents, même s'il y a
beaucoup d'absents).
Concernant sa rémunération, il n'existe pas de texte spécifique règlementant la rémunération du
gérant d'une SARL. Il appartient donc aux statuts de fixer les modalités de rémunération, et c'est à
l'AG qu'il appartiendra de déterminer cette rémunération. Un gérant ne peut pas seul fixer le montant
de sa rémunération. Il ne peut pas non plus, pour le cas où les associés ne s'accorderaient pas sur le
montant de sa rémunération, demander au seul juge de fixer celle ci (Cass com, 14 nov 2006 ; Revue
de jurisprudence de droit des affaires, fascicules 8 et 9 de l'année 2007, p 809). Les rémunérations
des dirigeants des sociétés de capitaux sont des charges déductibles de l'impôt sur les sociétés, mais
si l'administration fiscale estime que cette rémunération est excessive, elle pourra alors déclasser
cette rémunération pour qu'elle ne soit plus déductible (CAA Paris, 11 juin 1998 ; JCP entreprises
1999 p 87).
2° La révocation du gérant
Article L 223-25 du Ccom (stabilité du gérant, tout en permettant aux associés de se défaire d'un
gérant). Il existe une grande liberté statutaire en matière de terme aux fonctions du gérant. Si aucun
terme n'est prévu, on considère qu'implicitement les associés ont lié la durée du mandat du gérant à
la durée de la société.
Le gérant de la SARL peut démissionner et sur ce point la Cour de cassation a rappelé que la
démission est un acte juridique unilatéral qui produit ses effets dès qu'il est porté à la connaissance
de la société, il n'a pas besoin d'être accepté par l'autre partie pour produire ses effets (Cass com 22
février 2005).
En cas de décès du gérant, une nouvelle disposition (L 223-27 al 5 du Ccom) prévoit qu'un associé
ou le commissaire aux comptes (s'il y en a un) peut demander la convocation d'une AG afin de
procéder au remplacement du gérant défunt. C'est une des rares hypothèses où un associé tout seul
peut procéder à la convocation d'une AG.
Quant à la révocation du gérant, elle doit être décidée par décision des associés représentant plus de
la moitié des parts sociales. L'article L 223-25 du Ccom n'écarte pas la participation du gérant à ce
vote (donc s'il est majoritaire il sera rarement révoqué). Cependant, les textes récents précisent que
cette majorité n'est plus d'ordre public et que les statuts peuvent prévoir une majorité plus forte. En
combinaison avec l'alinéa 2 de l'article L 223-29 du Ccom, il faut éventuellement procéder à la
convocation d'une seconde AG si le quorum n'est pas réuni pour la première AG. Cette révocation
doit se faire avec de justes motifs. L'absence de justes motifs ouvre droit à des dommages intérêts en
faveur du gérant, mais la révocation sera néanmoins valable.
On a inscrit dans les dispositions relatives à la SARL la faculté de demander au juge de révoquer un
gérant pour cause légitime. La seule nuance avec la révocation pour justes motifs est que l'absence
de cause légitime permettrait le maintien en place du gérant.
Quelque soient les motifs, les causes de la révocation, le gérant a le droit de s'expliquer, le contraire
serait la violation du principe du contradictoire (CA Rouen, 16 décembre 2004 ; Bull Joly juin 2005,
paragraphe 160). Cass com 13 mars 2001 : révocation abusive par l'AG, la Cour de cassation retient
que l'associé qui peut se voir reprocher une faute dans le caractère abusif d'une révocation peut
engager sa responsabilité personnelle vis à vis du gérant révoqué.
Depuis l'ordonnance de 2004, le nom du gérant en cas de cessation de ses fonctions peut être
supprimé plus aisément des statuts, il suffira de se référer à la majorité absolue et non à une majorité
des ¾ (exigée préalablement) : art L 223-18 al 2 du Ccom.
B- Les pouvoirs du gérant
Les pouvoirs du gérant ont été augmentés de façon notable par l'ordonnance de 2004, notamment
dans la modification de l'article L 223-18 al 8 du Ccom. Le gérant peut désormais de sa seule
initiative déplacer le siège social de la société dans le même département ou dans un département
limitrophe. Il faudra quand même que cette modification fasse l'objet d'une ratification prise à la
majorité des ¾ des parts sociales.
Le gérant peut lui même faire en sorte que les statuts de la société soient en harmonie avec les
dispositions impératives émanant des lois et règlements (avec la même contrainte d'une ratification
ultérieure par l'AG). Cette disposition fait du gérant le gardien des statuts, le garant de la conformité
des statuts avec les lois et règlements.
La seule possibilité offerte aux associés est la non ratification des décisions prises par le gérant.
La difficulté de cette disposition apparaît en cas d'absence de connaissances juridiques du gérant.
Pouvoirs du gérant vis à vis de la société et des associés :
Le gérant a une grande liberté dans le respect de l'objet social. On peut prévoir des clauses
statutaires limitatives de pouvoirs du gérant, le gérant ne les respectant pas engagerait sa
responsabilité, ce pourrait être une cause de révocation. Une décision en AG extraordinaire pourrait
également diminuer les pouvoirs du gérant (lorsqu'au cours d'une AG ordinaire un cogérant est
nommé, cela se traduit ipso facto par une diminution des pouvoirs du gérant unique qui était alors en
place ; une telle décision doit alors être prise par une AG extraordinaire, donc la décision prise par
l'AG ordinaire doit être annulée).
Pouvoirs du gérant vis à vis des tiers :
La SARL est une société dans laquelle la responsabilité des associés est limitée, il s'agit donc de
rassurer les créanciers de la société (les tiers à la société). Les clauses statutaires limitatives de
pouvoirs du gérant seront inopposables aux tiers. L'article L 223-18 al 5 du Ccom prévoit que le
gérant tient de par la loi les pouvoirs d'engager la SARL même pour des actes qui sortent de l'objet
social. Ainsi la société sera engagée derrière le gérant envers le créancier. La société devra honorer
l'engagement et pourra se retourner contre le gérant.
Cass com 15 janvier 2002, Revue droit des sociétés mai 2002 n°97 p 26 : selon cet arrêt, l'acte de
cautionnement d'une SARL au profit d'une SCI n'engagerait pas la société si elle n'entre pas dans
l'objet social.
Il y a quelques garde-fou à la responsabilité de la société engagée par le gérant, appréciés parfois
largement par la jurisprudence. Tout d'abord on considère que les tiers à la SARL doivent savoir que
certaines décisions ne peuvent relever que de la seule collectivité des associés (ex : si l'acte est
susceptible d'entraîner la dissolution de la société pour disparition de l'objet social, le fait pour un
gérant de vendre seul l'unique fonds de commerce exploité par la SARL ; Cass com 18 octobre 1994,
Revue des sociétés 1995 p 284). De plus, si la société arrive à prouver que le tiers avait
connaissance du dépassement de pouvoirs du gérant, alors elle ne sera pas engagée (il apparaît que
les juges sont très souples vis à vis des tiers ; CA Paris 15 juin 1995, Bull Joly 1995 p 884, une
société d'informatique dont le gérant a décidé d'apprendre à piloter un avion et engage la société, la
société pour se désengager invoquait le fait que la société de pilotage aurait dû vérifier que l'acte
entrait ou non dans l'objet social, mais la CA a décidé que le tiers n'avait pas à vérifier si l'acte rentrait
bien dans l'objet social).
La difficulté se pose lorsque le gérant conclut un contrat avec la société qu'il dirige. Cette difficulté ne
concerne pas que le seul gérant, mais s'applique également aux associés personnes physiques qui
concluent une convention avec la société dont ils font partie. C'est la situation paradoxale où on
contracte avec soi même (signature en tant que représentant de la SARL et signature en tant que
cocontractant : les deux mêmes signatures quand il s'agit du gérant). Le législateur a encadré
étroitement ces conventions. Désormais il existe trois niveaux : conventions libres, conventions
réglementées et conventions interdites (articles L 223-19 à L 223-21 du Ccom).

Conventions libres : conventions courantes faites à des conditions normales, c'est-à-dire des
conventions effectuées par la société de manière habituelle dans le cadre de son activité (elles
sont offertes à n'importe quel client de la société) ; elles ne sont soumises à aucune procédure,
elles sont libres.

Conventions réglementées : conventions qui ne sont pas courantes, et ne sont pas faites dans
des conditions normales, il faudra donc suivre une procédure (elles seront soumises à
l'autorisation préalable de l'AG, d'autant plus quand le gérant n'est pas associé et si la société n'a
pas de commissaire aux comptes). Si on n'en a pas le temps, le contrôle doit s'effectuer a

posteriori par l'intermédiaire d'un rapport fait sur la convention conclue par le gérant ou l'associé.
L'AG statue sur ce rapport. Le gérant ou l'associé concerné ne participe pas alors au vote. Si la
procédure d'autorisation préalable ou de ratification a posteriori n'a pas été respectée, la
convention n'est pas nulle pour autant. Elle produit tout de même ses effets. Mais l'associé
bénéficiaire doit seulement restituer les fonds à la société et il engage sa responsabilité (Cass
com, 10 décembre 1996 ; Bull Joly 1997 paragraphe 124).
Conventions interdites (L 223-21 du Ccom) : il est interdit au gérant et aux associés personnes
physiques y compris par personne interposée de contracter des emprunts auprès de la société et
de se faire cautionner par elle. Le gérant ne doit pas se mettre en position d'avoir un compte
courant débiteur au sein de la société (ce qui revient à dire que la société lui avance de l'argent).
C'est une disposition ancienne, mais contestée par les praticiens qui estiment que la SARL
pourrait très bien fournir du crédit aux associés (c'est possible dans d'autres pays). Mais en droit
français une telle convention serait frappée d'une nullité d'ordre public, nullité absolue pouvant
être invoquée par tous.
C- La responsabilité du gérant
Articles L 223-22 à L 223-24 du Ccom. Le gérant est susceptible d'entraîner sa responsabilité civile,
pénale mais aussi fiscale.
Concernant la responsabilité civile :
 Vis à vis des associés de la société : responsabilité engagée pour non respect des statuts, non
respect de la réglementation, dépassement de pouvoirs, faute de gestion (difficulté d'évaluer a
posteriori l'erreur de gestion ; il faut un préjudice et un lien de causalité). Les associés pourraient
également faire valoir un préjudice du fait d'une faute du gérant de la SARL, seulement le droit
des sociétés reçoit difficilement la notion de préjudice par ricochet et la Cour de cassation tend à
retenir que le préjudice subi par l'associé n'est pas différent du préjudice subi par la société elle
même (notamment lorsque seules des pertes financières sont invoquées : Cass com 15 janvier
2002, Bull Joly 2002, paragraphe 155). Le gérant peut pour une faute de gestion voir s'étendre à
son propre patrimoine l'action en comblement d'insuffisance d'actif de la société.

Vis à vis des tiers : le gérant de SARL se verra peu souvent engagé personnellement vis à vis des
tiers. Les tiers ont le réflexe de rechercher d'abord la responsabilité de la personne morale de la
société lorsqu'ils ont subi un préjudice du fait de cette société. Mais cette personne morale
souhaitera parfois ne pas assumer entièrement la responsabilité du préjudice supporté par les
tiers. Elle fera donc rechercher la responsabilité de son gérant. Cass com, 20 mai 2003, Dalloz
2003 p 1502 : le gérant sera assimilé à un fonctionnaire (pas de responsabilité possible). La
responsabilité personnelle d'un dirigeant à l'égard des tiers ne peut être retenue que s'il a commis
une faute séparable de ses fonctions. Il en est ainsi lorsque le dirigeant commet
intentionnellement une faute d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal des
fonctions sociales. Certains considèrent de ce fait que le dirigeant est quasi irresponsable (Dalloz
affaires 1999 p 782). C'est une jurisprudence suffisamment étendue pour être appliquée à
d'autres formes sociétaires. En fait on retient la responsabilité personnelle des dirigeants lorsqu'il
y aura caractérisation d'une faute pénale (Cass Civ1, 6 octobre 1998, Revue de droit des affaires
n°12 de l'année 1998, n° 1362). Le risque est de multiplier les actions pénales pour obtenir sur le
plan civil la responsabilité personnelle du dirigeant. La Cour de cassation semble plus stricte que
les juges du fond qui peuvent avoir tendance à retenir plus facilement la faute séparable des
fonctions (leur décision étant parfois censurée par la Cour de cassation).
Un gérant d'une SARL peut également être amené à combler le passif social si sa société est
mise en redressement judiciaire. Sur ce point, pendant longtemps il y a eu des discussions pour
savoir lorsque la société était dans une situation de redressement judiciaire s'il fallait appliquer les
actions en responsabilité propres au mécanisme des procédures collectives ou si l'on pouvait y
appliquer la responsabilité du droit commun à l'encontre du dirigeant qui a amené sa société dans
cette situation de procédure collective. En effet en matière de procédures collectives, il existe une
mise en cause particulière de la responsabilité du dirigeant de la société (art L 651-2 du Ccom).
L'avantage de l'engagement de la responsabilité de droit commun est qu'elle permet une
réparation intégrale des victimes. De ce fait, les actions en application de l'article 1382 du Cciv
avaient tendance à se multiplier (Cass, 28 juin 1996 : affirme que l'on ne peut cumuler l'action en
responsabilité de droit commun et l'action en comblement de l'insuffisance d'actif social mise en
place par la loi sur les procédures collectives). Donc pas de cumul possible, et pas de choix non
plus : dès lors qu'il s'agit d'une procédure collective qu'on peut imputer au dirigeant, il faut mettre
en œuvre l'action en comblement de l'insuffisance d'actif social. Cependant, cette jurisprudence
n'est pas forcément définitive. Certaines juridictions continuent à permettre le recours à l'article
1382 du Cciv (CA Rouen, 11 janvier 2007 : l'action fondée sur l'article 1382 du Cciv peut être
exercée y compris pour des faits postérieurs au jugement d'ouverture).
Concernant la responsabilité pénale :
La SARL se rapproche des sociétés de capitaux, lesquelles bénéficient de qualifications délictuelles
particulières. Pour préserver le capital social, on a mis en place des infractions pénales particulières
aux sociétés de capitaux (droit pénal des affaires, ex : abus de biens sociaux, délit de publication de
comptes inexacts, distribution de dividendes fictifs...).
Concernant la responsabilité fiscale :
Si le dirigeant a contribué à la fraude fiscale commise par la société ou si, par son comportement, il a
contribué à retarder le paiement de l'impôt, il peut engager sa responsabilité fiscale, solidairement
avec la société.
La SARL n'est tenue d'avoir un commissaire aux comptes que si elle dépasse au moins 2 des 3
seuils habituels : bilan supérieur à 1 550 000 €, un CA HT supérieur à 3 100 000 €, et 50 salariés.
Section 2 – Modification de la structure
§1 Modification conjoncturelle
La SARL ne doit pas dépasser les 100 associés. Mais il est possible que par un contexte particulier
ce plafond soit dépassé. Il faut alors réagir immédiatement. Il faudra trouver une solution permettant
de redescendre à un niveau inférieur au seuil. La société dispose d'un an pour le faire : soit faire
partir certains associés, soit changer de forme sociétaire. Ne rien faire serait exposer la SARL à une
dissolution.
La plupart des modifications conjoncturelles affecteront le capital social. Le capital social dont le
montant est fixé par les statuts peut se trouver en état de devoir subir une augmentation ou une
diminution. Il existe un principe d'intangibilité du capital social, selon lequel ce dernier ne doit pas être
inférieur aux capitaux propres. C'est dans ce cas qu'on doit procéder aux mécanismes
d'augmentation : ce sont des modifications de statuts, qui ne peuvent être décidées que par AG
extraordinaire (décision prise par les associés représentant les ¾ du capital social).
L'augmentation peut se réaliser assez simplement par des apports nouveaux ou par une
incorporation des réserves de la société dans le capital social.
- Apports nouveaux
Les apports nouveaux correspondent à la solution la plus représentative d'une bonne santé de la
société (ça montre une société qui a besoin de plus de capital pour se développer, et le fait qu'il
s'agisse d'apports nouveaux montre que soit les associés font un nouvel effort et font donc confiance
à la société, soit on fait entrer de nouveaux associés dans la société). Dans le cas d'apports
nouveaux, ces derniers doivent intégralement et immédiatement être libérés. Il risque de se créer une
inégalité entre les anciens associés et les nouveaux associés. Si la société ne se porte pas si mal,
c'est peut-être parce que les fondateurs ont fait des sacrifices, renoncé à percevoir des dividendes, et
ils peuvent avoir l'impression que les nouveaux associés pourraient profiter de cette bonne santé de
la société pour obtenir plus tard un partage de dividendes plus intéressant pour eux. Par conséquent,
deux mécanismes peuvent être mis en place : les droits préférentiels de souscription et les primes
d'émission.
Les droits préférentiels de souscription correspondent à un droit de préférence accordé aux anciens
associés : ils sont sollicités en premier pour l'augmentation du capital social (pour savoir s'ils veulent
acheter des parts supplémentaires). Ce droit est détachable des parts sociales, il est monnayable de
façon distincte des parts sociales.
Les primes d'émission s'adressent aux seuls nouveaux associés. C'est une sorte de droit d'entrée
que les nouveaux associés vont devoir payer pour pouvoir profiter de l'augmentation du capital de la
société. Ils payeront donc la valeur de la part sociale au moment de l'augmentation du capital social
et également la prime d'émission, ce qui permet de compenser le fait que les anciens associés ont pu
ne pas percevoir de dividendes pendant des années pour faire des réserves.
- Incorporation des réserves
L'augmentation par incorporation des réserves signifie qu'on n'a pas réussi à motiver les associés ou
des partenaires pour investir. La société est donc obligée de puiser sur ses fonds propres pour
augmenter le capital.
Il existe des situations où le capital social sera tellement entamé que si on ne peut pas l'augmenter
(pas de nouveaux apports et plus de réserve), il faudra procéder à une diminution de capital social (L
223-42 du Ccom). Les capitaux propres ne devant pas être inférieurs à la moitié du capital social, si
l'on n'a pas d'autre solution, ce sera le capital social qui devra être réduit pour se retrouver à hauteur
des capitaux propres.
Actif
Passif
capital social
réserves
report à nouveau
résultat d'exercice en cours
capitaux propres
1 500 000 €
100 000 €
- 1 000 000 €
- 100 000 €
500 000 €
Dans cet exemple, le report à nouveau est bien trop important. Les capitaux propres sont inférieurs à
la moitié du capital social. On peut demander aux associés d'incorporer leur compte courant dans le
capital social (solution interne qui permet de revitaliser le capital social).
Cette diminution du capital social implique la diminution du nombre de parts sociales, ou alors la
réduction de la valeur nominale des parts sociales. Tous les associés doivent dans ce cas être traités
à égalité. C'est une manière pour eux de contribuer aux pertes de la société.
Si le gérant de la société ne permet pas aux associés d'être informés et de prendre les bonnes
décisions, il peut encourir des sanctions pénales. Il ne peut pas laisser une société dans cet état
comptable. Et si aucune solution ne peut être trouvée, il faudra que les associés se réunissent pour
prendre la décision soit de dissoudre la société soit de lui changer de forme (et opter pour une société
où les règles comptables ne sont pas aussi strictes : une société de personnes).
§2 Modification entraînant transformation de la société
Pendant longtemps on s'est contenté de dire que la SARL avait plutôt vocation à se transformer en
SA. Aujourd'hui la SA n'est utilisée que pour ceux qui pensent qu'ils auront besoin un jour de faire
appel public à l'épargne. La SAS s'est plus développée, et la SARL peut se transformer en SAS.
A- Transformation en SA
Il faut que la SARL soit prête à répondre à deux conditions nécessaires à la constitution d'une SA :
réunir un capital social de 37 000 €, et compter au moins 7 associés. Un seul exercice social sous
forme de SARL suffit pour permettre la transformation d'une SARL en SA.
Pour procéder à cette transformation il faudra nommer un commissaire à la transformation, qui aura
pour tâche de vérifier que les capitaux propres sont au moins égaux au montant du capital social. Il
n'est pas possible d'opérer une transformation de société quand les capitaux propres sont insuffisants
(si c'est le cas il faut procéder à une augmentation des capitaux ou une réduction du capital social).
L'engagement des associés n'est pas affecté par la transformation. C'est pourquoi la décision de
transformation d'une SARL en SA peut être prise à la majorité des associés représentant les ¾ des
parts sociales. Cette décision peut aussi être adoptée par les associés représentant la simple
majorité des parts sociales si les capitaux propres excèdent 750 000 €.
B- Transformation en SAS
Cette transformation est plus compliquée, car le législateur n'avait pas songé à une telle
transformation. C'est la jurisprudence qui est venue apporter sa solution : CA Paris 30 novembre
2001 (Revue droit des sociétés 2002 p 29 n°99). La CA considère qu'il est indispensable de nommer
un commissaire à la transformation avec un rapport du commissaire aux comptes mais surtout qu'il
est nécessaire d'obtenir l'unanimité des associés de la SARL pour transformer la société en SAS.
Cette solution a été reprise par une décision ministérielle du 28 mars 2002, et un décret du 3 mai
2002, en modifiant l'article L 227-3 du Ccom (disposition propre aux SAS) : toute transformation d'une
société en une SAS nécessite l'unanimité des associés et la nomination d'un commissaire à la
transformation. Il faut remarquer que l'article L 223-43 du Ccom qui concerne les transformations de
société en général ne mentionne pas la SAS. L'article L 227-3 permet donc de trouver une solution
ainsi que L 224-3 du Ccom.
L'exigence d'unanimité peut être surprenante, car on a à faire à des sociétés où les risques financiers
pour les associés ne sont pas tellement différents. Néanmoins on voit bien que la SAS est tellement
libertaire que les droits (et pas seulement les droits financiers) des associés peuvent être atteints par
les statuts, et que du coup la situation des associés peut être modifiée par la transformation en SAS.
Remarque : on a la même exigence lorsque la SARL veut se transformer en SNC (mais là cela se
comprend mieux car on passe à une société à responsabilité illimitée et solidaire). En revanche la
présence d'un commissaire à la transformation sera moins exigée.
Une SARL peut aussi se transformer en société civile. Il faudra l'unanimité et que l'objet de la société
soit un objet civil.
§3 Modification entraînant dissolution de la société
La dissolution est automatique lorsque le nombre d'associés dépasse le seuil (100) pendant plus d’un
an.
Quand il y a diminution ou perte de plus de la moitié du capital social, les associés doivent être
convoqués et opter soit pour une transformation (s'il n'y a pas eu de solution comptable apportée) soit
pour une dissolution anticipée.
Le décès, l'incapacité ou la faillite personnelle d'un associé n'entraînera pas la dissolution de la
SARL, sauf si les statuts l'ont prévu.
Chapitre 3 – L'EURL
L'EURL est une SARL avec un associé unique. C'est une notion qui a eu des difficultés à émerger.
Elle a été introduite en France par la loi du 11 juillet 1985. Une société ne se crée plus uniquement
par contrat, elle peut être instituée par une seule personne. La question de l'existence de l'affectio
societatis peut se poser, ainsi que celle de la participation aux dettes, ou encore concernant le
patrimoine de la société.
Malgré tous ces reproches, on sait que l'EURL est utile car elle a permis d'éviter beaucoup de
sociétés fictives (un associé ayant 99% des parts, et un autre 1%). L'EURL peut aussi être un stade
précoce de société (on commence par l'EURL et on passe ensuite à une société plus conséquente
après avoir vérifié que l'objet social tient la route).
L'avantage est lié au fait que l'associé unique doit tout de même rendre des comptes, cela oblige
donc l'entrepreneur à une certaine vigilance comptable, financière, juridique.
L'EURL peut également faciliter la transmission d'entreprises : un petit commerçant exploitant de
façon individuelle son commerce peut créer une EURL et y introduire petit à petit ses enfants.
Au départ l'idée de l'EURL était de profiter de l'autonomie patrimoniale de la personne morale. Mais
les établissements de crédit vont peser sur l'associé unique pour qu'il s'engage à cautionner les
dettes de la société. D'autre part, en cas de dissolution de l'EURL il n'y avait pas de liquidation du
patrimoine de la société (rectifié à présent). L'idée des législateurs est qu'il ne faudrait plus qu'on
choisisse une forme de société pour des raisons fiscales ou pour des raisons strictes d'autonomie du
patrimoine.
Concernant l'EURL, la déclaration d'insaisissabilité de la résidence principale de l'entrepreneur
(élargie en 2008 au terrain susceptible d'accueillir la résidence principale) permet de mettre à l'abri le
toit de la famille, ce qui peut être un élément décisif pour choisir une telle forme de société.
Section 1 – La constitution de l'EURL
L'associé unique peut être une personne physique ou une personne morale, mais il ne peut pas être
une autre EURL. Une seule personne physique peut désormais constituer plusieurs EURL (ce qui a
affecté la notion d'unité de patrimoine). Si la société est uni-personnelle dès le départ, c'est l'acte
unilatéral de l'unique associé qui vaudra constitution de la société. Le capital, comme pour la SARL,
est librement fixé par les statuts et il sera nécessaire de procéder à des apports pour le constituer, et
de réaliser une immatriculation de l'EURL comme pour toute société. Cependant dans la loi du 4 août
2008, on a voulu simplifier les formalités de publicité de l'EURL, en modifiant notamment l'article L
223-1 du Ccom : les formalités de publicité sont allégées quand l'associé personne physique est
également gérant (notamment des dispenses d'insertion dans le Bodacc : Bulletin officiel des
annonces civiles et commerciales). Cette loi prévoit également un modèle de statuts type d'EURL
lorsque l'associé unique est gérant (les modèles types ne sont pas obligatoires).
Il est possible de trouver une EURL avec 2 personnes, lorsque le gérant n'est pas l'associé unique.
Cass com 31 mai 2005 (Dalloz 2005 p 1700) : s'agissant de la reprise des engagements pris au nom
d'une EURL en formation, ces actes peuvent être repris par l'associé unique mais par un acte exprès
répertorié dans le registre prévu à cet effet (elle ne sera pas automatique) car on ne peut pas faire de
mandat avec soi même.
Section 2 – L'organisation de l'EURL
L'EURL fonctionne comme la SARL avec la réserve qu'il n'y a pas de collectivité d'associés. Il est
possible que le gérant ne soit pas l'associé, et on peut même nommer deux gérants distincts qui ne
soient pas associés. Si l'associé unique est une personne morale il lui faudra alors obligatoirement
nommer un gérant personne physique. Le gérant est révocable par l'associé, avec possibilité de
dommages intérêts si la révocation se fait sans juste motif.
L'associé unique qu'il soit gérant ou non doit voir l'intérêt social se substituer à son intérêt personnel.
Cela implique que l'associé ne pourra pas emprunter à la société et ne pourra pas se faire cautionner
par elle. On retrouve les conventions interdites dans la SARL. Et si c'est le gérant non associé qui
conclut des conventions avec la société, ces conventions devront avoir été approuvées
préalablement par l'associé unique ou faire l'objet d'un rapport a posteriori. S'agissant des
conventions faites avec la société par le gérant associé, cela est possible à condition qu'elles
obéissent aux règlementations et qu'elles soient inscrites dans un registre des délibérations (L 223-19
al 3 du Ccom). Sinon il encourt des amendes.
L'associé unique ne peut pas déléguer ses pouvoirs de vote, d'approbation, sous peine de nullité des
actes (nullité ouverte à n'importe quelle personne intéressée).
Depuis longtemps, le gérant doit déposer les comptes annuels de la société, mais depuis 2003 puis
2006, il peut tout de même être dispensé d'approbation stricte des comptes si ceux ci ont été
déposés au registre du commerce avec l'inventaire dûment signé dans un délai de 6 mois après la
clôture de l'exercice. Ce dépôt des comptes au greffe du tribunal de commerce vaut approbation.
Depuis 2008 l'associé unique n'a plus besoin de déposer au greffe du tribunal de commerce le
rapport de gestion. Il doit cependant être tenu à la disposition de toute personne qui en fait la
demande (modification de l'article L 232-22 du Ccom, et L 223-31 du Ccom).
L'associé unique dispose de la faculté de céder ses parts sociales, sans agrément nécessaire, mais il
faudra procéder à la publicité de la cession des parts.
Cass crim 14 juin 1993 (Bull Joly 1993, p 1139) confirmé par Cass crim 20 février 2002 (Revue des
sociétés 2002 p 546) : un associé gérant peut se voir reconnaître coupable d'abus de biens sociaux,
de publication de comptes inexacts, ou de délit de dividendes fictifs. Les infractions particulières des
sociétés de capitaux sont applicables à l'associé gérant de l'EURL.
Si l'associé unique décède, cela n'entraîne pas la dissolution de l'EURL. Au pire il s'agira d'une
transformation en SARL : ses héritiers deviennent associés.
Selon l'article ancien 1844-5 al 3 du Cciv : les sociétés ne contenant qu'un seul associé faisant l'objet
d'une dissolution étaient dispensées de la phase de liquidation du patrimoine de la société. Cet article
mettait en place une transmission universelle du patrimoine de l'EURL au patrimoine de l'associé
(donc l'actif et le passif étaient transmis au patrimoine de l'associé). Au début, les EURL se
transformaient très rapidement en SARL, donc il y avait peu de dissolutions, et cet article ne gênait
pas forcément. Mais dans les années 1990, on s'est retrouvé confronté à de multiples dissolutions
pour des difficultés financières d'EURL, et donc on a appliqué cet article qui a entraîné de graves
difficultés financières pour l'associé unique. C'est pourquoi le législateur est intervenu en 2001 (loi
Nouvelle régulation économique) qui a ajouté un alinéa à l'article 1844-5 du Cciv : « ces dispositions
ne sont pas applicables aux sociétés dont l'associé unique est une personne physique ». On a
préservé l'essentiel, mais on a protégé les entrepreneurs individuels. La jurisprudence considère
qu'en cas de procédure collective frappant l'EURL la règle de transmission universelle du patrimoine
ne s'applique pas (même aux personnes morales) : Cass com 12 juillet 2005 (Dalloz 2005, p 2002).
L'EURL relève de l'impôt sur le revenu des personnes physiques, elle est donc assimilée d'avantage
à une société de personnes, sauf à opter expressément pour l'IS. Quand l'associé est une personne
morale, l'EURL relèvera obligatoirement de l'IS.
TITRE 2 – LA SOCIETE PAR ACTIONS SIMPLIFIEE
C'est une société de capitaux nouvelle, mais qui a eu en réalité deux naissances.
Elle a été créée ab initio par la loi du 3 janvier 1994 sous l'impulsion du CNPF (Medef), car les
patrons d'entreprises françaises avaient besoin d'une société relativement souple leur permettant de
réaliser des accords d'entreprise avec des sociétés internationales. On a donc créé une société par
actions simplifiée qui était en fait une société de sociétés. Seules des personnes morales pouvaient
donc en être associées, la plupart du temps des SA capables de réunir 1 500 000 Frs de capital
social.
On a vu arriver une loi du 12 juillet 1999 sur tout ce qui avait trait aux logiciels à l'Internet, à
l'informatique en général, qui a créé une petite société appelée start-up (outil sociétaire
particulièrement souple, adapté à cette micro économie). La loi de 1999 a réduit à néant l'intérêt
d'une réforme du droit des sociétés. La SAS a complètement modernisé le droit des sociétés. L 227-1
à L 227-20 du Ccom : apports de la modernisation (réglementation de la SAS).
En 1999, plutôt que de créer de toute pièce une nouvelle forme sociétaire, le législateur s'est
contenté de modifier la SAS créée en 1994. On a élargi l'accès aux SAS, l'ouvrant désormais aux
personnes physiques, permettant même la constitution de SAS avec associé unique (SASU).
La loi du 4 août 2008 a assoupli davantage les modalités de constitution de la SAS en éliminant
l'exigence d'un montant minimal d'un capital social.
Section 1 – La constitution de la SAS
La SAS n'est plus réservée à certaines sociétés personnes morales, aujourd'hui une SAS peut être
instituée par une ou plusieurs personnes qui ne supportent les pertes qu'à concurrence de leurs
apports (personne physique comme personne morale). Il existe une seule restriction : il faut avoir la
personnalité juridique (donc une société en participation ou une société de fait ne pourra pas être
associée d'une SAS).
Une seule personne peut être associée unique d'une SAS : c'est le cas des SASU.
Le capital social de la SAS (depuis la loi du 4 août 2008) peut être fixé librement par les statuts. Avant
on exigeait un minimum de 37 000 €.
On voit que la SAS va faire concurrence à la SARL.
Une SAS ne pourra cependant pas faire appel public à l'épargne. Elle peut contenir comme
associées des sociétés qui peuvent (elles) faire appel public à l'épargne. Mais elle même ne le pourra
pas.
Pour désigner les membres de la société, le terme d'actionnaires serait opportun (puisqu'on a une
société par actions). Néanmoins on constate que le législateur n'utilise jamais ce terme, mais celui
d'associé.
Libéralisation du capital social des SAS : nouvel alinéa ajouté à l'article L 227-2 du Ccom. Cela
permettait de distinguer et de donner son intérêt à la SARL (pas besoin d'un capital énorme).
Maintenant même les petites entreprises pourront ouvrir une SAS. Ce n'est pas sans danger, dans la
mesure où si le capital social statutaire est faible, les fournisseurs de crédit exigeront des garanties
supplémentaires qu'ils iront chercher auprès des dirigeants de la société, voire des associés ou de
leurs conjoints. Plus que jamais l'autonomie patrimoniale de la personne morale risque d'être un
leurre, les associés seront plus nombreux à penser qu'ils sont à l'abri d'une société personne morale,
mais cette protection est illusoire s'ils sont caution.
Les dispositions renvoient à celles des SA (article L 223-3 du Ccom). Il n'est pas nécessaire que les
apports en numéraire soient intégralement libérés dès la souscription. On peut se contenter de libérer
la moitié de leur valeur nominale.
Il existe d'autres éléments de libéralisation, notamment la possibilité désormais de réaliser des
apports en industrie dans la SAS, alors que c'est une société de capitaux. On aura alors des actions
offertes en contrepartie d'un apport en industrie. Elles ne seront pas comptabilisées dans le capital
social. Ces actions en industrie ne sont pas transmissibles, mais elles confèrent néanmoins des droits
de vote et des droits sur les dividendes. Ce sera aux statuts de déterminer quel sera le nombre de
droits de vote auxquels pourront prétendre les détenteurs d'action. Un renvoi aux dispositions du Cciv
permet de conférer aux apporteurs en industrie les droits de vote, les droits sur les dividendes, du
plus petit apporteur de la société.
Le législateur prévoit dans la loi du 4 août 2008 que les statuts doivent déterminer quand et comment
seront évalués les actions ayant donné lieu aux apports en industrie, et comment elles seront
réévaluées en cours de vie de la société. Le législateur fait évaluer des actions en industrie, alors qu'il
faudrait évaluer les apports pour attribuer un certain nombre d'actions. De plus, il prévoit une
réévaluation en cours de vie sociale, car soit disant les apports en industrie sont susceptibles
d'évoluer, et pourtant il n'existe aucune réévaluation pour les apports en nature (autant susceptibles
d'évolution). L'évaluation des apports en industrie ne se fera donc pas simplement au moment de la
souscription, mais également après.
Pour les apports en nature, aucune nouveauté n'est apportée. Ils doivent comme dans les sociétés
de capitaux faire l'objet d'une évaluation par un commissaire aux apports. Ces apports en nature
pourront être fréquents, ils pourront être faits relativement à des brevets
Quant au capital variable des SAS (possible dans les SARL), il n'est simplement pas expressément
interdit.
Une autre nouveauté, depuis la loi du 4 août 2008, les SAS peuvent être dispensées de la nomination
d'un commissaire aux comptes (art L 227-9-1 du Ccom dans un nouvel alinéa : seront seulement
tenus de désigner un commissaire aux comptes les SAS qui dépasseront deux des trois seuils fixés
par décret. Mais ce décret n'est pas encore paru, ils ne seront pas exactement les mêmes que pour
les SNC, SARL). Il y a eu une pression importante de la profession d'experts comptables qui ont tenté
d'influer pour qu'il y ait moins de SAS dispensées de commissaires aux comptes que de SARL.
Le commissaire aux comptes sera obligatoire pour les SAS présentes dans des groupes de société.
Pour les SAS qui de fait se trouveront dispensées de commissaire aux comptes, la nomination de cet
expert pourra tout de même être demandée par un ou plusieurs associés représentant au moins
1/10e du capital social.
Si une SAS peut être constituée ab initio, elle peut aussi être issue d'une transformation d'une autre
forme sociétaire. Dans ce cas là, s'il s'agit d'une société qui n'était pas soumise à nomination d'un
commissaire aux comptes, il faudra nommer un commissaire à la transformation, et il faudra l'accord
unanime des associés.
La règle de l'unanimité a pu servir à expliquer d'autres solutions, notamment pour une opération de
fusion d'une SA absorbée par une SAS (les juges du fond saisis par les actionnaires minoritaires de
la SA ont eu une interprétation très littérale : CA Versailles 27 janvier 2005, une fusion n'est pas une
transformation de société car elle opère dissolution de la société absorbée, il n'y avait donc pas lieu
d'appliquer l'exigence d'unanimité des associés pour réaliser cette fusion). Solution critiquée car il
existe l'article L 236-5 du Ccom qui joue en matière de fusion : « si l'opération projetée a pour effet
d'augmenter les engagements des associés de l'une ou plusieurs sociétés en cause, elle ne peut être
décidée qu'à l'unanimité de ces associés ». L'arrêt de la CA a été cassé (Cass Com 17 décembre
2006) : considère qu'une telle opération d'absorption d'une SA par une SAS peut comporter des
risques pour l'engagement des associés, il faut donc l'unanimité des associés de la société absorbée.
Section 2 – Le fonctionnement de la SAS
Il faut rappeler que la SAS est susceptible de présenter des visages très variés car c'est une société
très libre. Il peut y avoir des SAS très ouvertes mais également des SAS très fermées (voire plus
fermées que des sociétés de personnes avec des clauses d'agrément très strictes), des SAS qui
jouent le jeu de la transparence et le jeu du contrôle par les actionnaires, des SAS très
concentrationnaires entre les mains d'un homme omnipotent (le président) et à côté des associés qui
auront des droits extrêmement amoindris... Tout dépend des statuts.
§1 Représentation et gestion de la SAS
Article L 227-5 du Ccom : les statuts fixent les conditions dans lesquelles la société est dirigée. La
liberté statutaire est presque totale, il n'y a qu'une exigence : un seul homme peut représenter la
société, c'est le président. Cette exigence est apparue très rigoureuse, car le président ne peut pas
tout gérer en même temps dès qu'une société atteint une certaine taille (il faut qu'il soit secondé par
des personnes pouvant elles-mêmes engager la société). Les pouvoirs publics ont donc corrigé cette
exigence trop lourde, mais il a fallu une décision de jurisprudence (Cass Com, 2 juillet 2002) qui
montre les problèmes posés par cette condition (le directeur général n'étant pas le président ne
pouvait pas engager la société). Loi du 1er août 2003 : L 227-6 modifié, désormais les statuts
peuvent prévoir les conditions dans lesquelles une ou plusieurs personnes dénommées directeurs
généraux ou directeurs généraux délégués pourront exercer les pouvoirs du président.
Le président de la SAS peut être une personne physique ou une personne morale. Il peut être
associé ou non. Il peut être déclaré éventuellement irrévocable par les statuts ou au contraire
révocable ad notum (révocation libre sans motif à avancer, sans préavis, sans indemnités). Tout peut
être réglé librement par les statuts (autonomie importante notamment par rapport à la SA : les
dirigeants de la SA peuvent pour certains d'entre eux être révocables ad notum). Pour la SAS rien
n'est imposé par le code, donc on peut tout faire. On retrouve tout de même certaines constantes.
Même si une révocation est possible sans juste motif, il faut appliquer des principes généraux de
protection des dirigeants de société, à savoir qu'il ne faut pas le révoquer d'une façon vexatoire et de
surcroît il faut respecter le principe du contradictoire (Cass com 23 octobre 2007,Joly 2008 p 197 §43,
CA Toulouse 22 janvier 2008, Joly 2008 p 480). Cet arrêt permet également au juge de contrôler un
tant soit peu l'indemnité versée au dirigeant. Elle ne peut pas être accordée sur le fondement de
l'article 1382 du Cciv (comme l'avait décidé la CA : arrêt cassé).
Il n'y a pas de disposition légale prévoyant une éventuelle révocation judiciaire du président de la
SAS. Donc à priori elle n'est pas possible (la Cour de cassation ne s'est pas encore prononcée). Or le
président de la SAS peut être tout puissant, n'ayant de comptes à rendre peut-être qu'à la seule AG
des associés. De plus, il peut être irrévocable de fait (s'il est majoritaire).
Au sein de la SAS, il peut y avoir une sorte de dirigeant complémentaire (ex : directeurs généraux qui
suppléent le président, conseil d'administration possible également). Si on prend une telle mesure, il
faut être très rigoureux dans la rédaction des statuts. En effet, dans la SA tout ou presque est
instrumentalisé par les dispositions du code des sociétés, donc les statuts ne sont pas compliqués à
rédiger, tandis que pour la SAS, si on prévoit un conseil d'administration, il faut tout prévoir
(nomination, rémunération, pouvoirs, révocations) sinon il ne sera pas encadré. Le juge risque d'être
saisi, mais ne pourra pas donner de réponse sans avoir les éléments nécessaires. C'est un aspect un
peu lacunaire de la SAS : c'est à la fois un atout et un inconvénient (grande liberté statutaire mais
risques dans l'application). De plus en plus de statuts types circulent.
Concernant les pouvoirs du président, il peut être omnipotent, n'ayant de comptes à rendre qu'aux
seuls associés. Si on veut le mettre sous tutelle (que certains de ses actes soient autorisés par un
organe, tel que conseil d'administration ou AG des associés), il faudra le prévoir expressément.
On retrouve ici aussi quelques constantes. Les restrictions statutaires de pouvoirs du président de la
SAS ne sont pas opposables aux tiers. De plus, le président pourra engager la société même lorsqu'il
sort de l'objet social (puisqu'il s'agit d'une société de capitaux).
En revanche, une disposition que l'on trouvait dans les SA n'a pas été reprise dans les SAS : en effet,
dans les SA, pour que le dirigeant de la société puisse engager la société comme caution, aval ou
garantie auprès des tiers, il faut l'autorisation préalable du conseil d'administration, à peine
d'inopposabilité de l'acte à la SA. Il existe donc un garde fou dans les SA pour ces actes lourds de
conséquences. Et donc cette disposition n'existe pas pour les SAS. Un président pourrait seul
engager par des cautionnements, avals et garanties la SAS. Il est possible de prévoir une clause
limitative de pouvoirs du président dans les statuts, mais le problème est que ces clauses ne seront
pas opposables aux tiers.
En revanche, comme dans les SA, on peut retrouver un mécanisme de conventions règlementées
libres ou interdites entre le dirigeant et la société ou entre les associés et la société. On a aligné le
régime de la SAS sur celui de la SA (L 227-11 du Ccom et L 227-10 du Ccom). Une complication
intervient, liée à la possible disparition des commissaires aux comptes dans les SAS. Dans la SA
(repris dans la SAS), les conventions courantes doivent être transmises au commissaire aux
comptes. Mais les conventions courantes qui ne sont significatives pour aucune des parties en raison
de leur objet ou de leur implication financière doivent seulement être communiquées à leur demande
aux associés.
Quant aux conventions règlementées, elles doivent faire l'objet d'un rapport fait par un commissaire
aux comptes et devant être approuvé par les associés (L 227-10 du Ccom, modifié par la loi du 4 août
2008 qui précise que c'est le commissaire aux comptes, ou s'il n'en a pas été désigné le président de
la société, qui établit le rapport sur les conventions règlementées). Quant aux conventions courantes
de l'article L 227-11 du Ccom, aucune modification n'est apportée par la loi de 2008, donc s'il n'y a
pas de commissaire aux comptes, on ne sait pas à qui transmettre ces conventions (sans doute à
l'AG). Il faut préciser dans les statuts qui peut participer au vote sur les conventions règlementées
(président, associé concerné par la convention).
On retrouve également des conventions interdites entre le président et la société ou entre un associé
et la société. Il est fait expressément renvoi à l'article L 225-43 du Ccom (disposition des SA) qui
interdit au président ou à un dirigeant de la société ou à un associé personne physique de se faire
consentir des emprunts, des découverts par la société, ou des avals et garanties pour leurs
engagements envers des tiers.
Le statut social du président : principe de liberté statutaire. Le président peut être rémunéré ou
bénévole, il peut être rémunéré comme les administrateurs de SA par des jetons de présence ou
recevoir une rémunération plus régulière. Dans tous les cas, si une rémunération du président est
prévue, elle sera considérée comme une rémunération purement contractuelle, qui par conséquent
relèvera de la procédure des conventions règlementées. Le président peut éventuellement cumuler
son mandat de représentant de la société avec un contrat de travail (comme dans la SARL) : on
applique les raisonnements habituels (question du lien de subordination).
Le président a socialement un statut de salarié (comme le dirigeant de SA, et comme le gérant
minoritaire de la SARL).
La responsabilité du président : responsabilité civile de droit commun et responsabilité pénale des
dirigeants de sociétés de capitaux (abus de biens sociaux, délit de distribution de dividendes fictifs,
abus de pouvoir ou de voix, défaut d'établissement des comptes sociaux, défaut de consultation des
associés en cas de perte de plus de la moitié du capital social). Les dirigeants désignés par les
statuts sont aussi susceptibles de voir leur responsabilité engagée.
§2 Les associés
On peut emprunter le terme d'actionnaires, ce qui fait apparaître l'aspect société de personnes que
l'on peut observer dans la SAS. En effet, on peut faire de la SAS une société très capitalistique, mais
aussi très fermée, voire plus fermée que certaines sociétés de personnes.
Il convient de rappeler que dans les SAS les associés ont une responsabilité limitée au montant de
leurs apports (cela peut apparaître en opposition avec le principe de liberté statutaire).
A- Le droit de participer à la vie collective
Aussi libre soit-elle, la SAS doit respecter les droits fondamentaux des associés, notamment le droit
de participation à la décision collective. Il appartiendra aux statuts de déterminer quelles décisions
doivent être prises par la collectivité des associés. Toutefois, certaines décisions relèveront de toute
façon obligatoirement de la décision des associés :
 l'augmentation ou de la diminution du capital social,
 des opérations de scission ou de fusion de la société,
 la nomination éventuelle du commissaire aux comptes,
 la transformation de la SAS en une autre forme sociétaire,
 la dissolution de la société,
 l'approbation des comptes,
 certaines modifications de clauses statutaires (clauses d'inaliénabilité et clauses d'agrément).
Le non respect du recours à la décision collective entraînera l'application d'une sanction pénale à
l'encontre du dirigeant (L 244-2 du Code des sociétés).
L'approbation des conventions règlementées est bien sûr également soumise à décision collective.
Toutefois décision collective ne signifie pas forcément réunion de l'AG. Elles peuvent être prises par
consultation écrite ou dans un acte signé par tous si les statuts le prévoient. La décision collective
des associés de la SAS peut s'exprimer de façon extrêmement réduite (les statuts peuvent s'en tenir
aux seules décisions où la décision collective est obligatoire, et de plus l'AG n'est pas obligatoire). Il
n'y a que pour l'approbation des comptes qu'il faudra toujours procéder à la réunion de l'AG.
C'est pourquoi on interdit l'appel public à l'épargne car on sait qu'on peut réduire considérablement
les droits des associés.
B- Le droit de vote
On applique toujours le principe de liberté statutaire. On peut attribuer à chaque associé un droit de
vote en fonction de sa personne et non en fonction de sa part dans le capital social. On peut donc
faire renaître l'aspect société de personnes. On peut aussi faire comme dans la SARL et dire qu'à
chaque action correspondra une voix. Ou encore, faire des actions à droit de vote multiple (le seul
équivalent est la société civile, où on peut également dépasser le droit de vote double).
On va trouver dans les SAS (comme dans les SA) des actions de préférence car elles apportent dans
la SA la souplesse que celle ci n'a pas. Ce sont des catégories d'actions particulières, conférant des
droits ou des obligations particuliers à leur titulaire, qu'on retrouve dans les SAS quand les statuts les
ont prévu. Certaines actions de préférence peuvent être dépourvues de droits de vote, cela est
précisé par la loi du 4 août 2008 : ces actions de préférence sans droit de vote sont privées de droits
préférentiels de souscription pour toute augmentation de capital social.
On peut trouver des dispositions particulières dans les statuts de la SAS concernant les droits de
vote. Certains associés peuvent en effet se voir attribuer des clauses de véto (qui permettront de
s'opposer formellement à une décision collective). Elles ne doivent pas être utilisées à titre général,
elles sont souvent orientées vers certains types d'opérations (ex : fusions). On peut aussi rencontrer
des clauses d'ajournement. Le titulaire d'une telle clause peut renvoyer alors la prise de décision à
une délibération ultérieure.
Certains associés peuvent donc avoir plus de pouvoirs que d'autres.
Il faut déterminer dans quelles conditions seront adoptées les décisions. Il y a certaines contraintes.
Certaines dispositions doivent obligatoirement être prises à l'unanimité des associés (L 227-19 du
Ccom), par exemple les décisions emportant modification de l'engagement des associés, les
décisions modifiant des clauses d'agrément, des clauses d'inaliénabilité ou des clauses d'exclusion.
Pour le reste, ce sont les statuts qui décident à quelle majorité peut être considérée comme adoptée
telle ou telle décision. La Cour de cassation a récemment considéré qu'on ne peut pas exclure de son
droit de vote un associé (il s'agissait pourtant pour lui de voter pour la décision de sa propre
exclusion) : Cass com, 23 octobre 2007 (Dalloz 2007, p 2726).
C- Le droit à l'information
Cela doit être prévu dans les statuts. Les dispositions relatives à l'information des actionnaires de la
SA ne s'imposent pas dans la SAS. Un risque peut apparaître si les statuts ne prévoient que le strict
minimum. Cela se résoudrait à la seule obligation sous peine de sanction pénale pour le président
d'établir des comptes sociaux et de les communiquer aux associés.
Quand un changement de contrôle frappe la SAS, ou concerne une société associée de la SAS, les
autres associés doivent être informés.
On comprend pourquoi une telle forme sociétaire ne peut pas faire appel public à l'épargne.
Mais l'inverse est possible : prévoir un droit à l'information large et important. On peut même prévoir
que des tiers à la société auront un certain droit à l'information (ces tiers sont ciblés précisément, ce
sont les partenaires privilégiés, des investisseurs...).
D- Le droit de cession d'actions
On retrouve l'ambivalence de la SAS. Les cessions peuvent être libres (société de capitaux), mais on
peut aussi rencontrer des SAS qui seront très fermées (comme de véritables sociétés de personnes).
On peut trouver des clauses d'agrément statutaires, qui peuvent être plus strictes que dans les
sociétés civiles par exemple. Ainsi, on peut trouver des clauses d'agrément concernant des membres
de la famille du cédant, ou un autre associé de la société alors que cela est interdit dans les SA. Cela
restreint donc l'achat d'action pour un membre de la famille du cédant voire même pour un membre
de la société. On peut prévoir des clauses d'agrément qui seront adoptées à une majorité simple,
qualifiée voire même unanimité.
On ne sait pas ce qu'il en serait du cédant qui se verrait refuser un agrément à la cession de ses
actions. Faut-il organiser son retrait ? Cela signifie qu'il faut prévoir l'organisation du retrait, ainsi que
les méthodes d'évaluation des actions.
Dans les SAS le législateur d'emblée a inscrit que le non respect des clauses d'agrément est
sanctionné par la nullité de la cession. On sait que dans des pactes extra statutaires dans lesquels on
a prévu un agrément pour une cession, cette nullité sera beaucoup plus difficile à obtenir. C'est la
démonstration que le législateur entend renforcer les dispositions statutaires de la SAS. Il est donc
préférable de faire des pactes statutaires que des pactes extra statutaires (opacité car non publiés).
Pour les clauses de préemption, les statuts peuvent prévoir ces clauses en faveur de certains
associés. Ces clauses de préemption pourront être complétées par des clauses de plafonnement, par
lesquelles les associés s'engageraient à ne pas acquérir directement ou indirectement au delà d'un
certain seuil déterminé d'actions. Il s'agit de maintenir l'équilibre de la société.
Pour une clause de préemption, les statuts peuvent prévoir la sanction en cas de non respect de ces
clauses (nullité, exclusion de l'associé non respectueux). Pour une clause extra statutaire non
respectée, il existe un réel problème pour sanctionner (en général on obtient juste des dommages
intérêts).
A l'origine, la SAS proposait déjà l'inclusion de certaines clauses concernant les associés. A sa
seconde naissance, le législateur a repris cette faculté d'introduire dans les statuts de la SAS des
clauses pouvant porter atteinte à certains droits fondamentaux des associés. Cela concerne les
clauses d'agrément mais aussi d'autres types de clauses : clauses d'inaliénabilité, clauses d'exclusion
d'un associé. On porte atteinte pour les unes au droit de céder les actions (droit patrimonial) et pour
les autres au droit de faire partie de la société.
Il faut cependant qu'elles soient légitimées par un intérêt sérieux et il faut qu'elles soient limitées dans
le temps : l'atteinte perpétuelle au droit de propriété et au droit de céder les actions est interdite. Les
clauses d'inaliénabilité ne doivent pas dépasser 10 ans d'après le législateur. Ces clauses sont
intéressantes pour maintenir le noyau dur des fondateurs de la société.
Concernant les clauses d'exclusion, c'est la première fois que le législateur permet officiellement de
prévoir de telles clauses dans les statuts. Encore faut-il que la clause soit bien rédigée. Une clause
d'exclusion ne doit pas être rédigée en termes trop généraux. Il faut prévoir des motifs particuliers
d'exclusion (ex : non respect des dispositions statutaires, non respect d'une clause d'agrément). Cela
peut comporter un certain intérêt, on peut lier l'exclusion à la conservation d'une certaine prérogative,
d'un poste, d'un travail (ex : un directeur général se trouve aussi être associé de la société, il commet
une faute quelconque qui justifie sa révocation, il n'est donc plus directeur général mais reste
associé, on peut alors lier au statut d'associé le fait de conserver le statut de dirigeant). On peut lier
aussi le statut d'associé à la conservation d'un contrat de travail au sein de la société.
Cass com, 23 octobre 2007 : un associé faisait l'objet d'une mesure d'exclusion, et en l'occurrence
l'exclusion elle même ne posait pas problème. Le problème qui s'est posé est qu'il était prévu que
l'associé concerné par l'exclusion ne pouvait pas participer au vote sur son exclusion. La Cour de
cassation sanctionne ce comportement, et énonce qu'on ne peut pas interdire à l'associé de voter sur
sa propre exclusion. Cet arrêt donne un coup de frein à la liberté statutaire dans les SAS. Il semble
redonner sa valeur d'origine au droit de vote des associés (et pas simplement au droit de participer à
la décision collective).
Dans les clauses d'exclusion il faut organiser les modalités de départ de l'associé exclu. Le problème
d'un associé est qu'il a une double personnalité (associé et propriétaire de ses actions). L'exclure de
la société ne permet pas de régler le rachat des droits sociaux (évaluation, modalité de versement,
etc). Ces points doivent être précisés dans les statuts.
Les clauses d'exclusion existaient avant mais surtout d'une façon extra statutaire. Du coup, cela
repose la question des pactes statutaires dans les SA. Jusqu'ici on ignorait leur efficacité auprès des
juges. A présent avec la SAS, deux raisonnements peuvent s'en déduire. Soit on dit que puisque c'est
permis pour les SAS, cela peut l'être pour les SA ; soit on dit l'inverse : c'est expressément permis
pour les SAS, ce n'est donc pas possible dans les SA. Dans les SA on ignore donc l'efficacité d'une
telle clause d'exclusion incluse dans les statuts des SA.
Concernant la SASU, son régime est celui de la SAS avec les aménagements dus au fait que
l'associé unique doit assumer le rôle rempli par la collectivité des associés dans les autres formes
sociétaires. Comme dans l'EURL il est possible d'avoir un associé unique ainsi qu'un dirigeant tiers.
Les mêmes mesures simplifiant le fonctionnement d'une société à associé unique (loi du 4 août 2008)
ont été étendues à la SASU.
Selon cette même loi, il est offert aux SAS ainsi qu'aux SA remplissant certaines conditions (taille,
CA) la possibilité d'opter pour le régime de transparence fiscale des sociétés de personnes (et
échapper ainsi à l'IS). Cette option ne peut servir que 5 ans cependant.
La SAS est la société la plus importante aujourd'hui dans le système sociétaire français.
TITRE 3 – LA SOCIETE ANONYME
C'est une société très institutionnalisée, très précise dans ses règles. Elle a perdu de l'importance par
rapport à la SAS (beaucoup plus simple). Mais elle ne disparaîtra jamais, notamment car elle peut
faire appel public à l'épargne.
Le reproche récurent de la SA est qu'elle est appelée à organiser aussi bien des petites et moyennes
entreprises familiales que de très grosses sociétés faisant l'objet d'une cotation sur un marché
spécifique. Les mêmes dispositions sont donc susceptibles de s'appliquer à toutes ces entreprises,
même si pour les entreprises faisant l'objet d'une cotation on aura de surcroît l'application des
mécanismes boursiers.
Chapitre 1 – L'existence de la SA
Section 1 – La constitution de la SA
L'appel public à l'épargne n'a pas été strictement défini pendant longtemps. La loi de 1966 ne faisait
pas apparaître cette distinction entre sociétés faisant APE et celles ne le faisant pas comme
essentielle. Ce sont des législations ultérieures qui ont accentué cette différenciation, particulièrement
avec l'institution de la commission des opérations de bourse. Pendant longtemps, cette commission
aux opérations de bourse s'est appuyée sur une présomption pour déterminer qu'une société faisait
APE (présomption lorsqu'une société était composée de plus de 300 associés [100 par la suite]). Une
loi du 2 juillet 1998 a pu apporter une définition plus précise de l'APE par l'article L 411-1 du CMF :
« l'APE est constitué par l'une des opérations suivantes :
 l'admission d'un instrument financier créé par la société sur un marché règlementé
 l'émission d'instruments financiers dans le public en ayant recours soit à la publicité soit au
démarchage soit à des établissements de crédit ou d'investissement »
Dès lors qu'il y a APE, la protection de l'épargne publique va susciter certaines mesures de
protection. Il faudra notamment que la SA sollicitant l'épargne du public ait elle-même une assise
financière assez large (capital social de 225 000 €). Pour renforcer la transparence des comptes de
ces SA, il faudra nommer deux commissaires aux comptes. Une note d'information devra être
réalisée qui recevra visa de l'AMF (cette note étant destinée à l'information du public).
L'APE se justifie lorsqu'on a des projets ambitieux qui ne pourront pas être financés par les seuls
actionnaires de départ. Cela peut également résulter de choix politiques ou sociaux.
Toutefois peu de sociétés se constituent d'emblée en faisant APE. Ce sont plutôt des SA classiques
qui en cours de vie sociale décident de faire un APE (il faut alors qu'elles remplissent les conditions).
§1 Les conditions de fond de constitution de la SA
A- Les conditions tenant aux actionnaires
Ce sont des conditions générales, on est moins exigeants pour la SA que pour certaines sociétés de
personnes (telles que les SNC). Par exemple, les associés (qu'on peut ici appeler actionnaires) n'ont
pas la qualité de commerçant. Des mineurs peuvent donc faire partie d'une SA.
Il n'y a pas de limitation en nombre maximal d'associés. En revanche il y a un plancher minimal de 7
associés (cette condition devant être réalisée le jour où est établi le certificat du dépositaire au
moment de la constitution de la société). Si la condition n'est pas remplie, la SA ne sera pas pour
autant nulle. Tout intéressé pourrait en exiger la régularisation. Si la diminution du nombre d'associés
intervient en cours de vie sociale, il peut s'agir d'un risque de dissolution, mais tempéré par des
possibilités de régularisation même assez tardives. Concernant les SELAFA (Société d'Exercice
Libéral A Forme Anonyme), qui empruntent la forme des SA, il suffit de 3 associés pour remplir les
exigences légales.
Le mode de calcul du nombre d'associés peut être important. Par exemple lorsque des époux
apportent des biens même communs à une SA, ils seront considérés comme deux actionnaires
différents. Lorsqu'un bien indivis est apporté à une SA, les indivisaires seront en principe
comptabilisés comme autant d'actionnaires différents. Pour les SA dont l'Etat détient la majorité du
capital social, il n'y a plus besoin depuis la loi de 1993 (loi de privatisation) de réunir 7 associés.
B- Les conditions tenant au capital
Pour les SA faisant APE, elles doivent réunir un capital social de 225 000 €. Pour les autres, il y a
toujours l'exigence d'un montant de 37 000 €. Dans certaines activités ce capital minimal sera
augmenté (pour les sociétés d'assurance : 450 000 €, pour les banques : on applique les exigences
des SA faisant APE donc 225 000 €).
Par ailleurs, les SA étant des sociétés où l'intangibilité du capital social doit être assurée, la variabilité
du capital social ne sera pas admis, sauf lorsqu'il s'agit de SA coopératives (régime spécifique
d'organisation) ou de sociétés d'investissement à capital variable (appelées également Sicav). Donc à
part dans ces exceptions, les clauses de variation du capital social sont interdites.
Le montant du capital social doit figurer sur tous les documents émanant de la SA. Il doit être
intégralement souscrit (réparti intégralement entre les actionnaires).
Les apports en numéraire seront les plus fréquents, et n'ont pas besoin d'être libérés immédiatement
(article L 225-3 al 2 du Ccom : la moitié de l'apport en numéraire doit être libérée immédiatement, le
reste pouvant être libéré en une ou plusieurs fois sur requête du conseil d'administration ou du
directeur général dans un délai qui ne pourra pas excéder 5 ans).
Les apports en nature sont possibles quand ils sont intégralement et immédiatement libérés, mais
pour assurer une réelle consistance du capital social il faudra procéder à une évaluation de ces
apports par un commissaire aux apports.
Les apports en industrie ne sont pas recevables dans une SA (différence avec la SAS).
La responsabilité de la SA est imputable aux associés fondateurs qui doivent réparer les préjudices
causés tant aux actionnaires qu'aux tiers qui avaient déjà contracté avec la société en formation. Il
s'agit d'une responsabilité solidaire.
§2 Les conditions de forme de constitution de la SA (voir annexes)
Section 2 – La disparition de la SA
§1 La disparition par dissolution
On retrouve les causes traditionnelles de dissolution des sociétés.
On peut rencontrer une dissolution pour cause de mésentente entre associés entraînant une
paralysie des organes sociaux. Dans le cadre d'une SA relativement importante, la mésentente entre
associés prendra surtout l'aspect d'un assentiment entre deux groupes d'associés.
On peut également rencontrer une dissolution anticipée de la société. Il faut dans ce cas tenir compte
de l'éventuel groupe d'obligataires existant au sein des SA (les SA peuvent émettre des obligations et
donc compter des obligataires constitués également en AG d'obligataires). Ces obligataires ne votent
pas dans les AG d'actionnaires. Ils n'auront pas leur mot à dire concernant une éventuelle dissolution
anticipée de la société, mais ils peuvent exiger d'être remboursés avant terme des sommes qu'ils ont
prêté à la société dans le cadre de l'emprunt obligataire.
Il ne peut pas y avoir de dissolution pour cause de décès d'un associé ou pour cause de faillite ou
pour cause de révocation d'un dirigeant. Toutefois, du fait du caractère institutionnel de la SA et de la
responsabilité limitée des associés, on rencontrera certaines causes de dissolutions particulières.
Par exemple, si le nombre d'associés descend en dessous de 7 pendant plus d'un an, c'est une
cause de dissolution.
En cas de réunion de toutes les actions en une seule main, une dissolution doit également intervenir
(il n'existe pas de SA à associé unique).
En cas de perte de la moitié du capital social (L 225-248 du Ccom), dissolution également (on réunit
d'abord une AG extraordinaire dans les 4 mois de la perte de capital, si l'AG n'est pas réunie les
dirigeants encourent des sanctions pénales ; l'AG est réunie pour prendre une décision : soit réaugmentation du capital social [reconstitution des capitaux propres], soit réduction du capital social
pour le mettre à hauteur des capitaux propres [ce qui ne résout pas le fond du problème], soit
dissolution de la société).
Quelle qu'elle soit, la résolution de l'AG doit être déposée au greffe du tribunal de commerce, inscrite
au RCS et publiée dans un journal d'annonces légales, sous peine de sanctions pénales.
A défaut de prise de décision dans un délai de 2 ans, tout intéressé pourra demander la dissolution
de la société.
Enfin il peut y avoir dissolution de la SA dans l'hypothèse d'une réduction du capital social au dessous
du seuil légal. Si une telle réduction intervient, tout intéressé peut demander la dissolution de la
société, sauf à ce que la société ne prenne la décision de changer de forme sociétaire. Néanmoins, il
existe une situation où on permet à la SA d'abaisser son capital social en dessous du seuil légal voire
le réduire à 0, à la condition suspensive d'une augmentation de capital corrélative destinée à relever
ce capital à son minimum. On appelle cela le « coup d'accordéon » (on descend le capital pour le
remonter presque aussitôt). C'est une opération légale qui permet en fait de renouveler les apports de
capital et les actionnaires de la SA. Les actionnaires minoritaires peuvent avoir l'impression d'être mis
à l'écart par ce type d'opération (Cass Com, 17 mai 1994, Revue droit des sociétés 1994, com n°142
; CA Besançon 2 décembre 1998, Revue droit des sociétés 1999 p 362 ; CA Versailles 20 mai 1999,
Joly 2000 p 186 ; Chronique Fauchon « La validité de l'accordéon encore renforcée » Joly 1999
n°224).
Le problème vient de ce qu'on va trouver des droits préférentiels de souscription (retrouvés en SARL
également) : droits prioritaires pour les associés déjà en place, pour bénéficier d'une augmentation de
capital. S'ils exercent ce droit, les associés nouvellement sollicités ne pourront pas entrer dans la SA.
En pratique, avant le coup d'accordéon, on fait adopter par l'AG des actionnaires une renonciation à
leurs droits préférentiels. Les associés fondateurs ne pourront plus être prioritaires sur l'augmentation
du capital social. On peut alors voter l'adoption du coup d'accordéon.
Les associés minoritaires ne peuvent pas s'opposer à ces décisions, même en invoquant un abus de
majorité (les juges ont considéré qu'il n'y avait pas abus de majorité car l'opération peut s'avérer
bénéfique dans l'intérêt de la société, et non pas seulement dans l'intérêt des associés majoritaires).
§2 La transformation
La transformation n'entraîne pas disparition de la personne morale, qui est maintenue pendant les
opérations de transformation. La transformation implique surtout une modification des statuts. Elle
prendra effet vis à vis des tiers lorsque les formalités de publicité seront terminées (dépôt au greffe du
PV de transformation et des statuts modifiés, modification au RCS, insertion au Bodacc). Toutefois la
décision de transformation met fin au pouvoir des organes sociaux (organes d'administration ou de
surveillance) sans que ceux-ci puissent alors invoquer une révocation sans juste motif.
A- Les règles générales
Pour pouvoir effectuer une transformation de SA, il faut au moins que 2 bilans, 2 exercices sociaux
aient été approuvés, ce délai étant éventuellement calculé à partir de l'immatriculation de la société.
L'AG prend la décision de transformation, elle statue en fonction d'un rapport remis par le
commissaire aux comptes, établissant que les capitaux propres sont équivalents au capital social. Le
rapport faisant état d'un niveau de capitaux propres suffisant est prépondérant (même si l'unanimité
des associés votait la transformation, elle ne pourrait avoir lieu sans ce rapport, sinon le commissaire
aux comptes engagerait sa responsabilité). Cela a été un des gros obstacles empêchant la
transformation des SA en SAS.
S'il existe une AG d'obligataires dans la SA, ils devront approuver cette transformation. S'ils refusent,
cela ne sera pas nécessairement un obstacle à l'opération (il ne s'agit que d'une consultation, ils n'ont
pas voix déterminante sur l'opération). En revanche, les obligataires qui le demandent devront être
remboursés (L 225-244 al 2 du Ccom, L 228-62 du Ccom).
B- Les règles spéciales
Lorsque qu'une SA veut se transformer en SNC, certaines exigences sont moins fortes, notamment
les exigences de forme. Il n'y a pas besoin d'attendre 2 exercices sociaux approuvés, ni d'un rapport
du commissaire aux comptes. Mais comme une telle transformation entraîne une aggravation de
l'engagement des associés, il faudra l'accord unanime de ceux-ci. Il faudra que les associés soient à
même d'avoir la qualité de commerçants.
Pour une transformation en société civile, on retrouvera les mêmes règles que pour la transformation
en SNC. Il faudra bien sûr que l'objet de la société soit civil. L'unanimité sera exigée.
On retrouve l'exigence d'unanimité pour une transformation en SAS (notamment car la très grande
liberté statutaire de la SAS peut générer des risques pour les droits des associés).
Quant à la transformation en SARL, l'unanimité ne sera pas nécessaire. La décision de
transformation doit être prise à la majorité des deux tiers du capital social. Il faut que la société
respecte les seuils concernant le nombre d'associés.
Chapitre 2 – L'organisation du pouvoir dans la SA
Section 1 – La répartition du pouvoir au sein de la SA
Sous-section 1 – Les dirigeants
Intervention de la loi NRE de 2001 qui a considérablement modifié l'organisation du pouvoir dans les
SA, au point que certains considèrent aujourd'hui qu'il y a en fait en France 3 modes d'organisation
de la SA : la SA moderne, et deux modes de SA classique (SA classique avec une direction bicéphale
avec un président du conseil d'administration et un directeur général ; et une SA classique avec une
direction moniste où le président du conseil d'administration serait en même temps directeur général).
Le gouvernement d'entreprise est un mécanisme qui vient des EU qui tend à instaurer plus de
transparence, plus de surveillance des organes de gestion, et qui tend à renforcer les pouvoirs des
actionnaires dans la direction des SA. La loi NRE est une loi qui démontre l'influence du lobbying des
fonds anglo-saxons d'investissement. Cela ne vise pour l'essentiel que les sociétés faisant APE
(faisant l'objet d'une cotation sur un marché règlementé).
Auparavant dans la SA classique, il existait une structure pyramidale où la hiérarchie était très forte
entre les différents organes (application de la loi de 1966).
Président du CA
Conseil d'administration
AG
Cass 4 juin 1946 : rappelle que les organes de gestion et de direction de la SA doivent respecter les
prérogatives et les compétences de chacun des autres organes.
Cet arrêt a été repris par la loi de 1966.
La toute puissance reconnue au président du CA inquiétait les investisseurs américains.
Ce président du CA pouvait se faire aider de directeurs généraux.
La loi NRE va bouleverser cette hiérarchie. Son but est de minimiser le pouvoir de ce seul président
du CA. Elle va faire obligation au conseil d'administration des SA de choisir entre deux modes de
fonctionnement, soit l'organisation bicéphale, soit l'organisation moniste.
Président
du CA
Directeurs
généraux
Président CA + DG
(PDG)
CA
CA
AG
AG
organisation bicéphale
organisation moniste
On retrouve l'ancienne appellation :
PDG à la tête de la hiérarchie
Les SA ont fait majoritairement le choix de l'organisation moniste. Mais les SA cotées en bourse ont
fait le choix de l'organisation bicéphale.
§1 Dans les SA classiques
A- Le conseil d'administration
1° Les administrateurs membres du CA
Les administrateurs sont en nombre encadré par le législateur : 3 au minimum, 18 au maximum, avec
la possibilité de dépasser ce plafond pendant un délai de 3 ans en cas de fusion de SA (24
administrateurs maximum).
Les administrateurs peuvent être des personnes physiques ou des personnes morales. Lorsqu'il s'agit
d'une personne morale, il faut obligatoirement nommer un représentant permanent (personne
physique) pour assurer concrètement la représentation.
Jusqu'à peu, les administrateurs devaient obligatoirement être actionnaires. Depuis la loi du 4 août
2008 NRE, cette obligation a été atténuée par une modification de l'article L 225-25 du Ccom : « les
administrateurs peuvent être des actionnaires si les statuts l'exigent ». Les statuts peuvent déterminer
combien d'actions sont nécessaires pour être administrateur.
La notion d'administrateur indépendant (notion des EU) n'existait pas en France quand les
administrateurs devaient être des actionnaires, maintenant cela pourrait exister.
L'administrateur n'a pas la qualité de commerçant. Mais l'exercice d'une fonction publique est
considérée comme incompatible avec la fonction d'administrateur (CE 15 décembre 2000, Droit des
affaires 2000, n° 1120 p 950 : retire à un fonctionnaire même non rémunéré comme administrateur ce
titre d'administrateur). Un mineur non émancipé ne pourra pas non plus être administrateur. Les
statuts peuvent de plus définir une condition d'âge. A défaut, il faut que les deux tiers des
administrateurs aient moins de 70 ans.
Les administrateurs ne se dispersent pas trop (disposition particulière de la loi NRE : limite les
possibilités de cumul de mandats). Les mandats d'administrateurs ne doivent pas s'élever à plus de
5. Cela peut poser problème lorsqu'on est en présence d'un petit groupe de sociétés, on peut arriver
très vite à ce seuil. C'est pourquoi les SA confrontées à ce problème ont opté pour une transformation
en SARL plutôt que de diminuer le nombre de mandats (pas de restriction de ce type dans les SARL).
Lorsqu'on a à faire à un président du conseil d'administration (donc administrateur) qui est en même
temps directeur général, une loi a décidé que cela ne valait que pour un mandat (chron. « Cumul des
mandats, la réforme de la loi NRE » Dalloz 2002 p 3066).
Les administrateurs sont élus par AG ordinaire, l'élection devant être inscrite à l'ordre du jour sous
peine de nullité. Cependant une exception : au conseil d'administration seront présents des
représentants des salariés qui sont en surnombre par rapport au nombre normal d'administrateurs, ils
sont élus par les salariés.
2° Le fonctionnement du conseil d'administration
C'est un organisme collégial qui n'a pas la personnalité morale. Le conseil d'administration peut se
réunir un nombre indéterminé de fois dans l’année : ce sont les statuts qui déterminent le nombre de
réunions du CA. Le CA est convoqué par le président du CA. Mais s'il n'y a pas eu de réunion depuis
plus de 2 mois, le tiers des membres du CA, ainsi que le directeur général si l'on a à faire à une
fonction dissociée (président différent du DG), peuvent demander la convocation du CA au président.
Le CA comptera deux membres du comité d'entreprise, l'un appartenant à la catégorie des cadres
techniques, l'autre à la catégorie des employés et ouvriers. Ces membres n'ont qu'une voix
consultative au CA (ils sont en surnombre). Mais si on oublie de les convoquer, des poursuites
pénales peuvent s'appliquer : délit d'entrave. L'absence de convocation des membres du CE était
susceptible d'entraîner la nullité des délibérations du CA, mais depuis un arrêt (Cass soc 26 mai
1998, Joly 1999 p 264) on se contente de retenir le délit d'entrave.
On compte au CA également le commissaire au compte (on ne fait plus de distinction selon la taille, le
chiffre d'affaires etc dans les SA : la présence d'un commissaire au compte est obligatoire, et dans la
société et à certaines réunions du CA). C'est le cas pour les réunions qui ont pour objet l'examen ou
l'arrêt des comptes annuels et des comptes intermédiaires.
Si la SA est à direction dissociée, le DG n'est pas obligatoirement convoqué aux réunions du CA.
Le CA ne pourra délibérer valablement que si la moitié au moins de ses membres est présente :
exigence de quorum de droit public (toute clause contraire serait réputée non écrite), pour le
décompte de ce quorum on ne tient pas compte des administrateurs représentés (uniquement ceux
qui sont vraiment présents).
Les administrateurs votent par tête, le président du CA n'ayant pas voix prépondérante, mais il pourra
tout de même départager parfois en cas d'égalité.
Les adoptions du CA sont adoptées à la majorité des membres présents ou représentés, mais les
statuts peuvent être plus exigeants et réclamer des majorités renforcées.
B- Le président du conseil d'administration et/ou la Direction Générale
La plupart des SA ont opté pour une organisation où le président du CA est également le DG.
1° Le statut du président du conseil d'administration
L 225-47 et L 225-51-1 du Ccom. Le président du CA est issu du CA, c'est un administrateur
personne physique. Il est élu par les administrateurs, et non pas désigné par les actionnaires. Il ne
doit pas avoir plus de 65 ans. Les statuts peuvent prévoir la durée de son mandat (à défaut, le
mandat est subordonné à celui d'administrateur, mais il est renouvelable indéfiniment). Les mêmes
règles de cumul que pour les administrateurs s'appliquent au président du CA. Mais une certaine
souplesse : les mandats réalisés dans une filiale ne sont pas comptabilisés aussi strictement (L 22521 al 2 du Ccom).
2° Le statut du directeur général
Position renforcée par la loi NRE. Le DG est nommé par le CA (et non les actionnaires). Il est le
dirigeant opérationnel de la société alors que le président du CA est davantage le dirigeant
stratégique. Il a perdu plusieurs prérogatives comparé au président du CA.
Il doit être une personne physique, mais il n'a pas besoin d'être administrateur (sauf si les statuts le
réclament). Il ne doit pas avoir plus de 65 ans.
Il ne peut y avoir qu'un seul DG aujourd'hui, mais il peut nommer des DG délégués (qui auront moins
de prérogatives que le DG principal).
Il est soumis à la règle de cumul des mandats (mise en place par la loi NRE) : pas plus d'un mandat
de DG par personne (L 225-54-1 et L 233-16 du Ccom).
C- L'attribution des pouvoirs
1° Les pouvoirs propres du CA
Ses pouvoirs ont été le plus renforcés. L'article L 225-35 du Ccom met à jour une certaine répartition
de compétences et fait apparaître 5 types de prérogatives pour le CA.

Le CA a un rôle de mise en place des organes sociaux : il nomme le président du CA et le DG, il
les révoque, il détermine leur rémunération. En cas de DG délégués, il les nomme. Il prend les
mesures nécessaires au bon fonctionnement des AG. Il convoque l'AG et fixe l'ordre du jour. Il
établit les comptes annuels et propose l'affectation des résultats.

Le CA a un rôle d'orientation stratégique (il « détermine les orientations de l'activité de la société
et veille à leur mise en œuvre »). Il ne se contente pas de suivre les directives du DG, il a aussi
une faculté d'initiative, ou au moins de proposition, de suggestion. On peut penser que le DG
devra rendre des comptes au CA quant aux orientations stratégiques souhaitées par le CA.

Le CA a un pouvoir d'intervention permanent dans les affaires de la société. Le CA peut
désormais se saisir « de toute question intéressant la bonne marche de la société et il peut régler
par ses délibérations les affaires qui la concernent ». Pour l'instant on mesure mal l'ampleur de ce
pouvoir reconnu au CA.
Tbnal Com Bordeaux 2 janvier 2003 (Revue des sociétés 2003 p 134) : audit qui devait être fait
sur la société, le CA avait désigné un cabinet d'audit particulier, le DG n'avait pas choisi
finalement ce cabinet d'audit, les juges considèrent qu'il s'agit d'une faute.
Comme avant la loi NRE, le CA doit avoir pour objectif la préservation de l'intérêt des actionnaires ou
la préservation de l'intérêt social.
Le CA exerce ses pouvoirs dans les limites de l'objet social, mais il est susceptible d'engager la
société même pour des actes qui sortent de l'objet social (puisqu'il s'agit d'une société à
responsabilité limitée).

Le CA a un pouvoir de contrôle, de vérification de la gestion du DG. Chaque administrateur va
recevoir les informations nécessaires à l'accomplissement de sa mission et il peut se faire
communiquer tout document qu'il juge utile. La loi NRE ne fait que reprendre un principe posé par
la jurisprudence mais qui n'avait jamais été légalisé : le droit à l'information des administrateurs,
posé par l'arrêt Cointreau (Cass 2 juillet 1985, JCP E 1985 n°14758 : SA de famille, dissension
entre deux groupes d'actionnaires, l'un des groupes demandaient la nullité d'une délibération du
CA au motif que les documents relatifs à l'ordre du jour n'avaient pas été transmis préalablement
aux administrateurs, annulation de la décision pour défaut d'information des administrateurs).
L'article L 225-35 reprend donc cette idée. Il reconnaît aux administrateurs une démarche
d'initiative puisqu'ils peuvent demander à se faire communiquer des documents. On voit
apparaître une prérogative individuelle d'un administrateur (on met au premier plan
l'administrateur lui même).

Le CA a un rôle d'approbation des conventions entre la société et ses dirigeants, il peut autoriser
les cautions, avals et garanties accordés par la société. La loi NRE a étendu le nombre de
personnes qui doivent requérir l'autorisation du CA pour conclure des conventions avec la SA.
Il existe 4 catégories de conventions qui peuvent être conclues entre des membres de la société
et la société elle même.
 Conventions règlementées : organisées par l'article L 225-38 du Ccom (« toute convention
intervenant entre la société et son DG ou l'un de ses DG délégués ou l'un de ses
administrateurs ou l'un de ses actionnaires disposant d'une fraction de droit de vote
supérieure à 10% ou s'il s'agit d'une société actionnaire la société la contrôlant au sens de
l'article L 233-3 »). Toutes ces conventions doivent être soumises à l'autorisation préalable
du CA. Le dirigeant concerné ne prendra pas part au vote. Si une convention n'est pas
approuvée, elle pourrait néanmoins produire ses effets vis à vis des tiers. Une convention
non autorisée ne pourrait faire l'objet d'une demande de nullité que si elle a eu des
conséquences dommageables pour la société (L 225-42 du Ccom). Cela n'empêche pas
de rechercher la responsabilité de celui qui a réalisé une convention règlementée sans
respecter la procédure. Cass soc 29 novembre 2006 (Joly avril 2007 §128 p 496).
 Conventions courantes conclues à des conditions normales : L 225-39 du Ccom
(modification du régime par les lois de 2001 et 2003 : auparavant ces conventions étaient
dites complètement libres). Elles doivent être communiquées par l'intéressé au président
du CA, lequel devra transmettre la liste des conventions courantes et leur objet aux
membres du CA puis au commissaire aux comptes. On ne sait pas ce que ces derniers
doivent faire de cette liste. La sanction du non respect de ce formalisme n'est pas prévue.
Le problème apparaît dans les groupes de société au sein desquelles ces conventions
courantes peuvent être nombreuses entre les sociétés d'un même groupe, et des
conventions impliquant des finances non négligeables (conventions de trésorerie).
Cass com 26 février 2008 (Joly juillet 2008 §124 p 581) : un associé demandait au juge
des référés à ce que lui soit communiquée la liste des conventions courantes conclues à
des conditions normales. Mais il apparaissait qu'a priori il n'y en avait pas eu (soit des
conventions, soit de liste). Le juge des référés déboute l'associé (il s'agissait d'une
question de fond pour qualifier les conventions de courantes).
 Conventions totalement libres : L 225-39 al 2 du Ccom, conventions courantes qui en
raison de leur objet ou de leur implication financière ne sont significatives pour aucune des
parties.
 Conventions interdites : L 225-43 du Ccom, concerne les emprunts, cautions, avals des
dirigeants et associés autres que les personnes morales, des conjoints, ascendants et
descendants des associés et dirigeants. Ces conventions sont frappées de nullité absolue.
En revanche pour les avals, cautions et garanties engageant la société auprès de tiers,
l'article L 225-35 du Ccom s'applique et le CA doit autoriser préalablement ce type
d'engagements. A défaut d'autorisation préalable, l'engagement serait inopposable à la
société. Nuance : si les cautions, avals ou garanties ont été donnés pour un montant
dépassant la limite globale fixée par le CA, ce dépassement sera opposable à la société
dès lors qu'ils ont été autorisés par le CA (même si le dépassement n'a pas été autorisé).
Les administrateurs peuvent être responsables envers la SA solidairement ou individuellement en cas
d'infraction aux lois et règlements, de violation de statut ou bien encore de faute de gestion. Ils sont
difficilement responsables vis à vis des tiers. La prescription est de 3 ans à compter du fait
dommageable.
2° Les pouvoirs propres du président du CA
Lorsque le président du CA est seulement président du CA (et non DG), il voit ses prérogatives
diminuer. L 225-36-1 du Ccom. Il préside le CA. Il convoque le CA, fixe l'ordre du jour, organise ses
travaux. La loi de 2001 avait même précisé que le président du CA représentait le CA. Mais ce
pouvoir de représentation a été supprimé. Le président du CA a un rôle d'interface entre la direction
générale et les membres du CA, et également entre l'AG et le CA. Il rend compte des travaux du CA
devant l'AG. C'est au président de veiller à l'information des administrateurs. On lui accorde de veiller
de manière générale au bon fonctionnement des organes de la société.
Le président du CA (lorsqu'il a seulement cette fonction) ne représente plus la société (rôle du DG).
3° Les pouvoirs propres du directeur général
Il dispose du pouvoir de représentation de la société vis à vis des tiers. Cela lui permet de réaliser
des actes au nom et pour le compte de la société et d'engager celle ci même lorsqu'il sort de l'objet
social. Ce pouvoir s'exerce individuellement contrairement au CA qui est une collégialité. C'est donc
le DG qui représentera la société en justice qui conclura pour elle les différents contrats de fourniture,
contrats de travail. Ces attributions sont considérées comme d'ordre public. Si certains actes
nécessitent l'autorisation préalable du CA de par la loi ou statutairement, on ne peut pas généraliser
l'autorisation du CA à tous les actes relevant du pouvoir décisionnel du DG.
D- Rémunération et autres primes des dirigeants

Administrateurs
L'administrateur peut être rémunéré pour ses fonctions. Mais les administrateurs n'ont pas le droit de
recevoir d'autre rémunération que des jetons de présence (rémunération annuelle, fixée par l'AG à
laquelle participe souvent les administrateurs en question). On répartit la somme globale fixée par
l'AG entre ses membres. La répartition n'a pas à être obligatoirement égalitaire. Les jetons de
présence sont déductibles de la base de l'IS sauf s'ils sont trop élevés et que le fisc refuse cette
déductibilité.
Les administrateurs peuvent percevoir en plus des rémunérations exceptionnelles pour des travaux
particuliers qui leur auront été confiés. On entre alors dans le cadre des conventions règlementées.
On peut ajouter le remboursement des frais et les avantages en nature.
Les administrateurs doivent être révocables librement, ce qui s'oppose a priori à l'existence d'un
contrat de travail de l'administrateur avec la société. Malgré cela, le législateur tolère le cumul entre le
mandat d'administrateur et un contrat de travail. Ce n'est qu'une tolérance. On vise le cas où on
propose au salarié d'une société de devenir administrateur, on ne veut pas qu'il soit obligé de
renoncer à son contrat de travail. Deux principes : un administrateur en fonction ne peut conclure
avec la société qu'il administre un contrat de travail. Mais celui qui est déjà employé par la société
pourrait cumuler les deux fonctions à condition que le contrat de travail soit vraiment une réalité et
que la rémunération soit bien distincte des jetons de présence de l'administrateur. Il existe une
contrainte supplémentaire : il ne faut pas que plus d'un tiers des administrateurs en fonction soient
des salariés de la société. Si les conditions exigées pour le cumul entre mandat d'administrateur et
contrat de travail ne sont pas réunies, c'est le mandat d'administrateur qui sera annulé, le contrat de
travail n'étant pas remis en cause.

Président du CA
Le président du CA reçoit une rémunération pour ses fonctions, fixée par le CA. Elle comporte
souvent une partie fixe et un intéressement sur le chiffre d'affaires ou sur les bénéfices réalisés par la
société. Mais le président du CA n'est pas considéré comme disposant d'un contrat de travail. Il ne
bénéficie donc pas de toute la protection accordée au titulaire d'un contrat de travail. Mais il peut
dans les mêmes conditions que les administrateurs demander à bénéficier d'un cumul entre un
contrat de travail véritable (avec lien de subordination) et son mandat de président du CA. Cela peut
lui permettre de bénéficier des stock options.
Sur les plans fiscal et social, le président du CA est assimilé à un salarié, mais pas en matière de
droit du travail (sauf s'il bénéficie d'un contrat de travail en plus de son mandat de président).
La rémunération du président du CA ne fait pas partie des conventions règlementées. En revanche,
les compléments de rémunérations qui pourraient lui être alloués (ex : cotisations retraites payées par
la société) relèvent des conventions règlementées.

DG
C'est le CA qui fixe sa rémunération (compétence exclusive même si la décision du CA est contraire à
l'avis d'un comité de rémunération). La rémunération elle même échappe à la procédure des
conventions règlementées, mais pas certains éléments de la rémunération depuis la loi du 2 août
2005. Le cumul avec un contrat de travail est possible et de façon plus aisée que pour le simple
administrateur. Même s'il était déjà tenu par le mandant de DG, il pourrait conclure un contrat de
travail avec la société. Depuis la loi NRE de 2001, le DG n'est plus révocable totalement ad notum : il
faut pour le révoquer de justes motifs (sinon allocation de dommages intérêts).

Généralités
La loi NRE a prévu que les rémunérations des dirigeants feraient l'objet d'un rapport avec
individualisation des rémunérations (le montant précis des rémunérations) et des avantages de toute
nature reçus par les mandataires sociaux (soucis de transparence). Ce rapport devait être annexé au
rapport de gestion de la société qui fait l'objet d'une publication au RCS.
L 225-115 al 4 du Ccom : les actionnaires de la société peuvent demander à connaître la somme
globale versée aux 10 personnes les mieux rémunérées de la société (disposition déjà insérée par la
loi de 1966). Donc la loi NRE est un net progrès par rapport à cette disposition. Mais elle s'est
heurtée à l'hostilité des dirigeants concernés. Le législateur est donc intervenu pour signifier un
nouvel alinéa (L 225-102-1) : les dispositions qui précèdent ne s'appliqueront pas aux sociétés qui ne
font pas l'objet d'une cotation sur un marché règlementé (donc pas d'application dans environ 2/3 des
SA françaises). En revanche, le rapport sur les rémunérations individualisées vaut toujours pour les
sociétés faisant l'objet d'une cotation.
Beaucoup des dispositions récentes en la matière ne s'appliquent qu'aux SA faisant l'objet d'une
cotation sur un marché spécialisé (ex : la loi du 2 août 2005 requiert que davantage d'éléments de
rémunération soient soumis au contrôle des conventions règlementées ; la loi TEPA du 21 août 2007
en faveur du travail de l'emploi et du pouvoir d'achat essaie d'accentuer le contrôle de rémunération
de départ). L'objectif particulier de la loi TEPA est d'interdire les éléments de rémunération,
indemnités et avantages dont le bénéfice n'est pas subordonné au respect des conditions liées aux
performances du bénéficiaire appréciées au regard de la performance de la société qu'il dirigeait (L
225-42-1 et L 225-90-1 du Ccom). Il convient de préciser que ces dispositions issues de la loi de
2005 et de la loi TEPA visent seulement les dirigeants au sens strict du terme (sociétés faisant l'objet
d'une cotation sur un marché) : ceux qui ont un pouvoir de direction au sens de la société (DG et DG
délégués, président du CA, membres du directoire dans les SA dotées d'un conseil de surveillance).
Ces dispositions ne concernent pas les administrateurs ni les membres du conseil de surveillance.
Stock options : mécanisme qui permet à des salariés ou à des dirigeants au sens large de souscrire
ou d'acheter à des conditions avantageuses des actions de la société qui les emploie (L 225-177 à L
225-186 du Ccom). Ce mécanisme confère à son titulaire une option donnant droit à la souscription
d'actions. Cette option doit être donnée dans un délai prévu qui ne doit pas dépasser 38 mois.
L'exercice de ces stock options implique la succession de trois étapes.
 D'abord, après autorisation de l'AG extraordinaire, le CA donne à des dirigeants ou à des salariés
de la société le droit d'acheter des actions qui existent déjà ou de souscrire à des actions qui vont
être créées. Ces actions données le sont à un prix déterminé par le CA, ce prix étant en général
favorable au bénéficiaire et inférieur au prix du marché. Cependant ce prix ne doit pas compter
plus de 5% de rabais par rapport au prix du marché, sinon ces stock options seraient imposés
comme complément de salaire.
 Ensuite les bénéficiaires disposent d'un délai pour lever l'option (qui ne doit pas dépasser 38
mois). Si dans ce délai le prix des actions sur le marché baisse, le bénéficiaire n'a pas intérêt à
lever l'option. En revanche si la valeur de marché de l'action augmente, le bénéficiaire retrouve
l'intérêt financier de lever l'option.
 Enfin, le bénéficiaire revend les actions acquises ou souscrites, et réalise alors une plus value.
Dans le mécanisme mis en place en France, cette possibilité de bénéficier des stock options
intéresse les dirigeants de la société mais seulement ceux qui disposent d'un pouvoir de direction de
la société et d'un mandat y afférent. Cela exclut les administrateurs et les membres du conseil de
surveillance. Cependant comme le législateur a également prévu d'attribuer des stock options dans
certaines circonstances à des salariés, rien n'interdit à un administrateur d'obtenir un contrat de
travail avec la SA et de pouvoir ainsi comme n'importe quel salarié bénéficier de stock options. D'où
l'intérêt pour les administrateurs de pouvoir bénéficier d'un contrat de travail.
Parachutes dorés (ou primes de départ) : ils se heurtent au principe de la révocation ad notum de
certains dirigeants de la SA. Normalement (L 225-18 al 2 du Ccom) l'administrateur est révocable
sans motif. Les juges en ont déduit une révocation ad notum, c'est-à-dire sans motif, sans préavis et
surtout sans indemnités. Ce principe a été considéré longtemps comme d'ordre public. Chaque fois
qu'une convention pouvait laisser comprendre qu'on organisait une certaine pérennité des dirigeants
des SA, ces conventions étaient annulées. On a même refusé d'appliquer des clauses permettant
d'aménager le futur d'un dirigeant révoqué par l'intermédiaire d'un tiers (ex : trouver un emploi au sein
d'une filiale après révocation dans la société), Cass com 4 juin 1996 (JCP E 1996, n°589, 14). Mais il
apparaît que concrètement la nullité des clauses contenant des parachutes dorés n'était prononcée
que si leur contenu était susceptible de réduire la réelle liberté des sociétés de les révoquer, donc si
les conséquences financières de ces parachutes dorés amenaient les sociétés à éviter les
révocations.
Le législateur a commencé à édulcorer ce mécanisme puisque par la loi NRE 2001 le DG n'est plus
révocable totalement ad notum, il faut des justes motifs pour le révoquer, sinon il aura droit à une
indemnité. En revanche en présence d'un PDG, il est toujours possible de le révoquer ad notum. Une
révocation motivée mais qui apparaît vexatoire, prise dans des conditions blessantes peut être
qualifiée d'abus de droit (donc possibilité de percevoir une indemnité). L'absence du respect du
contradictoire peut permettre au juge de contrôler les conditions de révocation.
On peut légitimement prévoir des motifs pour la révocation et des indemnités dans les SAS. La SAS
est beaucoup plus souple sur ce point.
Il n'est pas facile de légiférer en la matière, car on sait que les dirigeants et leur société n'auront
aucune peine à évincer une loi française il leur suffira simplement de se déclarer dans un pays qui
n'est pas soumis à cette législation.
§2 La structure moderne : la SA avec directoire
Cette structure moderne est inspirée d'un modèle allemand, l'objectif étant d'arriver à un certain
partage des pouvoirs de direction et assurer un contrôle plus strict de l'organe de direction par
l'organe de surveillance. C'est une structure souvent considérée par les praticiens comme trop lourde
et surtout pouvant être source de blocages lorsqu'il y a un antagonisme fort entre les deux. Elle est
utilisée par des grosses sociétés, particulièrement par celles faisant l'objet d'une cotation sur un
marché.
A- Le directoire
C'est un organe collégial qui peut comprendre de 2 à 5 directeurs. Les membres du directoire n'ont
pas besoin d'être actionnaires. Ils peuvent cumuler ce statut avec celui de salarié aux mêmes
conditions que celles habituellement requises. Il y a même une certaine tendance à opter pour les SA
avec directoire pour faciliter la participation des salariés à la direction de la société.
La loi NRE a affecté la SA avec directoire : un directeur ne peut pas appartenir à plus d'un directoire
de société ayant son siège sur le territoire français.
La durée du mandat est de 4 ans en principe, mais les statuts peuvent l'aménager entre 2 et 6 ans, le
mandat étant de toute façon renouvelable. Le directoire est renouvelable intégralement : lorsque l'on
change les directeurs, on les change tous en même temps (pas de rotation).
Les membres du directoire sont nommés par le conseil de surveillance, les directeurs désignant l'un
d'entre eux comme président du directoire qui aura pour rôle de représenter la société. C'est le seul
pouvoir supplémentaire qu'il ait par rapport aux autres directeurs.
C'est le directoire collégialement qui a la direction de la société mais ses pouvoirs sont moins vastes
que le CA dans les sociétés classiques car pour de nombreuses attributions il lui faudra l'aval
préalable du conseil de surveillance.
B- Le conseil de surveillance
Il est composé de 3 à 18 membres. Depuis la loi du 4 août 2008 les membres du conseil de
surveillance n'ont plus besoin d'être actionnaires de la société. Ils sont élus par l'AG ordinaire et
révoqués par elle.
Sa mission prépondérante est la surveillance, le contrôle de la gestion de la société faite par le
directoire. Ce contrôle doit être considéré comme permanent. A tout moment de l'année, le conseil de
surveillance peut réclamer à ce que lui soient communiqués des documents nécessaires à
l'accomplissement de sa mission. Il doit d'ailleurs recevoir du directoire un rapport trimestriel sur les
comptes. C'est le directoire qui arrête les comptes mais le conseil de surveillance peut alerter l'AG
pour qu'elle ne procède pas à l'approbation des comptes si le conseil de surveillance les trouve
discutables.
On établit une sorte de catalogue d'actes qui ne peuvent être faits par le directoire seul, nécessitant
une autorisation préalable du conseil de surveillance. Ce catalogue est inscrit dans les statuts de la
société, et même s'il est inopposable aux tiers, il lie considérablement les mains du directoire.
Sous-section 2 – Les actionnaires
Voir théorie générale des sociétés (cours de L3).
Section 2 – Le contrôle du pouvoir dans la SA (voir annexes)
PARTIE 3 – RESTRUCTURATION ET REGROUPEMENT DES ENTREPRISES
Le groupe est couramment analysé comme étant un ensemble de sociétés qui tout en étant
juridiquement distinctes se trouvent cependant liées les unes aux autres de telle sorte que l'une
d'entre elle qualifiée de société mère ou société dominante est en mesure d'imposer en fait et en droit
une unité de décision aux autres composantes du groupe qui se trouvent ainsi dans une situation de
sociétés dominées (définition de M. Chartier).
Autre définition (de M Guillon) : un groupe est un ensemble de sociétés juridiquement distinctes les
unes aux autres mais en fait soumises à une unité de décisions économiques.
Les sociétés d'un groupe sont donc juridiquement distinctes (ce sont des entités juridiques
différentes). Mais elles se retrouvent finalement dans une situation de dépendance économique.
Cette dépendance économique peut s'exprimer de différentes manières :
 structure pyramidale (société mère qui a des sociétés filiales ayant elles mêmes des sous filiales,
la société mère exerce un contrôle sur les sociétés sous filiales sans avoir besoin de détenir
beaucoup du capital social de ces sous filiales)
Société mère
Filiale
Filiale
Sous Filiale

Sous Filiale
Sous Filiale
Sous Filiale
structure rayonnante (société mère au milieu et autour, indépendantes les unes des autres, les
filiales, la société mère contrôle directement les filiales)
Filiale
Société mère
Filiale
Filiale

structure circulaire (beaucoup plus fermée)
Société mère
Filiale
Filiale
Filiale
Le groupe de société lui même n'a pas la personnalité morale.
Il existe des procédés et un résultat.
Le résultat est le groupe, c'est la constitution du groupe. Pour arriver à ce résultat il y a différents
procédés (fusion, scission, apport partiel d'actif, prise de participation).
Section 1 – Les techniques juridiques de regroupement
§1 La fusion
L 236-1 du Code des sociétés : c'est l'opération par laquelle une société en annexe une autre pour
qu'il ne subsiste en fin de compte qu'une seule société, la société absorbée disparaissant du marché.
Les associés de la société absorbée sont appelés à rejoindre les associés de la société absorbante.
L'opération de fusion opère par transmission universelle de patrimoine : le patrimoine de la société
absorbée est versé directement dans le patrimoine de la société absorbante (élément d'actif comme
de passif).
A- La réalisation de la fusion
Une telle absorption d'une société par une autre réclame un certain temps. La fusion, même si elle
apparaît agressive, reste quand même une opération acceptée de part et d'autre. Les sociétés
concernées sont consentantes. Pour aboutir à cet accord, il faut que l'opération présente des attraits
pour les deux sociétés en présence.
Il y aura une phase d'approche importante qui permettra de présenter l'opération de fusion de la
façon la plus bénéfique possible pour les deux sociétés. Il ne s'agit pas non plus d'en faire trop pour
la société absorbée sinon l'opération deviendra trop coûteuse pour la société absorbante. Il faut un
accord équilibré, étant entendu que les sociétés sont des structures d'accueil d'entreprise : il n'y a pas
que des associés mais aussi des salariés, qu'il faudra rassurer quant à l'opération envisagée, ainsi
que les créanciers des sociétés. Il faudra donc rédiger un protocole de fusion (non obligatoire mais
permettant d'arrêter et de formaliser les pourparlers de fusion). Ce sont de simples pourparlers, il ne
contraindra pas les parties à adhérer à la fusion. Les pourparlers peuvent se rompre librement mais il
est possible d'invoquer un abus de droit notamment si le protocole de fusion est bien avancé
(versement de dommages intérêts si la rupture s'est faite dans des conditions brutales, choquantes,
inattendues).
En revanche le projet de fusion qui fait suite au protocole est imposé par l'article L 236-6 du Code des
sociétés. Il est indispensable pour permettre aux associés des sociétés concernées de prendre leur
décision en toute connaissance de cause. Ce projet de fusion sera établi par le CA (SA classiques), le
conseil de surveillance (SA modernes) ou les présidents (SAS) ou gérants (autres sociétés) des
sociétés concernées. Le projet doit contenir les motifs et buts de la fusion, la date à laquelle seront
arrêtés les comptes de la société, l'évaluation du patrimoine des sociétés et surtout la parité
d'échanges et le montant de la prime de fusion.
La parité d'échanges sera l'une des préoccupations premières des associés de la société absorbée :
les actions de la société absorbée vont disparaître au profit d'actions de la société absorbante. Les
associés de la société absorbée vont échanger leurs actions suivant les conditions mises en place
par la parité d'échanges. Il faut faire une comparaison économique de chacune des sociétés. Pour
établir la valeur économique de chaque société on ne se contente pas uniquement des chiffres du
bilan, on apprécie également le potentiel de chacune des sociétés, le passif de chacune des sociétés
(mais lequel ?). L'appréciation est donc très difficile à faire. Une fois la valeur économique évaluée, il
faut établir un rapport au niveau des actions de chacune des sociétés. En général ce rapport est
favorable à la société absorbante. Ce rapport généralement s'établit de 3 à 2 ce qui signifie que pour
3 actions de la société absorbée, l'associé obtiendra 2 actions de la société absorbante. Mais ce
rapport n'est pas systématique. Le décompte sera parfois délicat car le nombre d'actions détenues
par les associés ne tombera pas toujours juste, il arrivera parfois des rompus (actions isolées qui à
elles seules ne permettent pas d'obtenir des actions de la société absorbante). Ces actions isolées
peuvent cependant être regroupées pour permettre à des actionnaires de la société absorbée
d'obtenir des actions de la société absorbante.
Il faut déterminer le nombre d'actions qui contribueront à augmenter le capital social de la société
absorbante. Cela permettra aussi de calculer la prime de fusion (appelé aussi compte de fusion).
C'est comparable à la prime d'émission en cas d'augmentation du capital social (différence de valeur
entre la valeur réelle des actions et la valeur nominale). Ce compte de fusion apparaîtra au passif du
bilan de la société absorbante. Cet élément comptable pourra avoir une fonction particulière
déterminée par les dirigeants de la société absorbante. Soit ce compte de fusion sera affecté aux
frais de fusion, soit à la dotation de la réserve légale ou à la constitution de provision spéciale. Pas
d'affectation obligatoire.
Il faut déterminer le projet de fusion. Il faudra désigner un commissaire à la fusion et un commissaire
aux apports éventuellement, désignés par le président du tribunal de commerce, ces commissaires
ayant pour mission d'établir un rapport sur les comptes des sociétés concernées et sur l'évaluation
des apports en nature ou avantages particuliers. Depuis la loi du 3 juillet 2008 portant adaptation du
droit des sociétés : L 236-10 1° du Code des sociétés, par un accord unanime des associés des deux
sociétés concernées il peut être renoncé à la nomination d'un commissaire à la fusion. Cependant
lorsque la fusion comprend des apports en nature ou des avantages particuliers et qu'aucun
commissaire à la fusion n'a été désigné, il faudra tout de même désigner un commissaire aux apports
(L 236-10 3°, nouvelle rédaction issue de la loi du 4 août 2008).
Les commissaires aux comptes des sociétés concernées devront être informés officiellement du
projet de fusion, ainsi que tous les actionnaires et les comités d'entreprise des deux sociétés. L 432-1
du Code du travail impose cette information aux comités d'entreprise, ainsi qu'un droit de
consultation. Il faut opérer certaines mesures de publicité lorsque la fusion a été adoptée (publicité au
greffe du tribunal de commerce ainsi qu'au journal d'annonces légales et au Bodacc). En vertu de
Cass com (Joly 2007 §157) : en cas de fusion, la dissolution de la société absorbée n'est opposable
aux tiers que par la mention au RCS. La publication n'est pas suffisante.
La décision de fusion prendra la forme de la résolution adoptée par l'AG des sociétés. Elle pourra par
exemple être adoptée à la majorité des 2/3 pour les SA, ou du ¾ du capital social pour les SARL
(modalités d'adoption pour les décisions lors des AG extraordinaires). Les obligataires, s'ils existent,
doivent être consultés et peuvent éventuellement sinon s'opposer à la fusion du moins exiger d'être
remboursés immédiatement de leurs obligations.
B- Les effets de la fusion
Les sociétés doivent s'entendre sur la date précise du début de la fusion. Pour les associés des deux
sociétés, la date de l'effectivité de la fusion sera la date de la dernière AG ayant approuvé la fusion.
Mais cette disposition n'est pas d'ordre public, le traité de fusion peut faire valoir une autre date à
laquelle les parties ont choisi de faire partir l'effectivité de la fusion (date ultérieure ou même date
antérieure par une clause de rétroactivité). Pour les tiers, la date de la fusion sera celle des
inscriptions modificatives au RCS des statuts des deux sociétés.
Du fait de la transmission universelle du patrimoine, le transfert des associés se fait naturellement. Il
n'y a pas lieu de faire application des clauses d'agrément prévues éventuellement dans les statuts de
la société absorbante. Cass com 19 avril 1972 (Dalloz 1972 p 539). Cela est contesté par certains qui
estiment que la fusion serait une façon trop facile de détourner les clauses d'agrément dans les
sociétés. Néanmoins dans une situation où une société filiale est absorbée par une société tiers
absorbante, la société mère peut-elle faire appliquer les clauses d'agrément ? Car elle retrouve par la
voie de la fusion une société nouvelle en son sein (Chronique Revue Droit et patrimoine avril 2003 p
33). Cette chronique a peut être influencé la Cour de cassation (Cass com 6 mai 2003, Dalloz 2003 p
1438) : les juges énoncent qu'il faut respecter la clause d'agrément dans cette situation, il est donc
possible de faire obstacle à l'entrée d'un associé dans une société par le jeu de la fusion.
Cass com 15 mai 2007 (Joly 2007 §294) : déclare que rien n'interdit l'application d'une clause
d'agrément spécialement rédigée pour les hypothèses de fusion.
La fusion aura également des effets sur les tiers et particulièrement les créanciers des sociétés. Les
créanciers de la société absorbée vont voir leur débiteur disparaître, tandis que les créanciers de la
société absorbante voient le passif de leur débiteur augmenter du fait de la fusion, et risquent d'être
mis en concurrence avec les créanciers de la société absorbée.
Globalement il faut retenir que le mécanisme de la transmission universelle de patrimoine permet de
passer au delà de certaines règles au détriment parfois des droits des tiers. Ex : dans le cas d'une
cession de fonds de commerce, le bailleur doit être informé et généralement donner son
consentement, tandis que dans le cas d'une fusion il n'est plus besoin de demander l'autorisation du
bailleur.
C'est valable pour tous les contrats liant la société absorbée à divers cocontractants, notamment
lorsqu'il s'agit de cautions : le contentieux est très évolutif en la matière. Lorsque le créancier dans un
contrat de cautionnement est une société qui fait l'objet d'une absorption, la disparition de ce
créancier aura des conséquences ou non sur le maintien de la caution. Il faut faire une distinction
entre les dettes nées et les dettes à naître.
 dettes nées : la caution sera toujours tenue en dépit de la fusion
 dettes futures : la jurisprudence considère que la fusion anéantit l'engagement de la
caution, sauf engagement exprès de la caution à continuer à s'engager auprès de la
société absorbante. Cette solution jurisprudentielle est très critiquée par la doctrine qui voit
là une remise en cause de la transmission universelle du patrimoine (Cass com 21 janvier
2003, Revue droit des affaires fascicule 6 de l'année 2003 n°593 ; Cass Civ1 28
septembre 2004, Revue Droit et patrimoine mars 2005 p 96). On a cru à un revirement
dans deux arrêts : Cass com 8 novembre 2005 (Joly 2006 p 334), le raisonnement des
juges renversent le raisonnement précédent, en cas d'absorption de la société créancière
la transmission du cautionnement se fait de plein droit sauf clause contraire. Cette solution
fait valoir le caractère de contrat à exécution continue pour le contrat à l'origine du contrat
de cautionnement. Mais il ne s'agit pas d'un revirement : Cass com 14 mai 2008 (Revue
droit des sociétés juillet 2008 p 24 n°155) semble reprendre les solutions de 2003.
Dans l'hypothèse d'une garantie de passif, en l'absence de disposition contractuelle contraire, la
société absorbante peut se prévaloir de la clause de garantie de passif stipulée (Cass Com 10 juillet
2007 Joly novembre 2007 §321).
Les obligataires s'il y en a, et particulièrement ceux de la société absorbée, peuvent s'opposer au
projet de fusion. La fusion pourra avoir lieu mais il faudra alors les rembourser.
Quant aux salariés, quelque soient les précautions prises, une fusion aura nécessairement des
conséquences sociales sur les salariés de la société absorbée mais éventuellement aussi sur les
salariés de la société absorbante. Les conséquences seront surtout sur le plan collectif.
Individuellement il n'y a pas en principe de conséquences, le contrat de travail n'étant pas affecté par
l'opération de fusion et continuant avec la société absorbante comme nouvel employeur. Si des
licenciements s'avèrent inévitables, c'est en principe la société absorbante qui en assumera la charge
financière.
Il va parfois être nécessaire de réaliser un changement de convention collective. En principe, si la
convention collective de la société absorbante est plus favorable aux salariés, elle s'appliquera à
tous. A l'inverse, les salariés pourront continuer à bénéficier de la convention collective de la société
absorbée pendant un an, en ce qui concerne les avantages collectifs.
Il est nécessaire avant de procéder à l'opération de fusion de consulter le comité d'entreprise
européen (cette consultation doit se faire avant la tenue du CA devant arrêter le projet de fusion). Si
on a deux sociétés jusqu'ici dépourvues de CE, l'opération de fusion peut par le cumul des salariés
amener à la création d'un CE.
Si une société absorbante reprend une société ayant dans son patrimoine des terrains ayant été
pollués du fait de l'activité de la société, c'est la société absorbante qui devra reprendre à son compte
l'obligation de remettre en état le site (CE 10 janvier 2005).
§2 La scission
Une société va transmettre son patrimoine à deux autres sociétés avant de disparaître. Les
actionnaires de la société originaire doivent donc être consultés : ils doivent voter la scission sur la
base d'un projet de scission avec rapport d'un commissaire à la scission.
Si les sociétés existaient déjà, leurs associés devront approuver la scission (approuver le fait de
recevoir dans leur patrimoine une partie du patrimoine de la société qui va disparaître).
Comme pour la fusion, l'opération s'opère par transmission universelle du patrimoine.
§3 L'apport partiel d'actif
Il s'agit d'un apport en nature d'une branche autonome d'activité d'une société (société apporteuse) à
une autre société (société bénéficiaire). Cette dernière devra réaliser une augmentation de son
capital pour recevoir l'apport.
L'objectif est de répondre à un besoin de création de filiale.
Il n'y a pas à proprement parler de fusion puisque la société apporteuse subsiste. Mais au lieu et
place de la branche autonome d'activité, la société va recevoir des actions de la société bénéficiaire.
Cela ne change rien pour les associés de la société apporteuse.
Il va être possible d'opter pour le régime juridique et le régime fiscal des fusions scissions. La société
bénéficiaire reprend alors dans tous ses droits et obligations la branche autonome d'activité (Cass
Com 12 décembre 2006 Joly 2007 §127). La transmission de patrimoine se fait donc universellement.
La procédure est alors empruntée aux fusions scissions mais est un peu plus complexe : il faudra
proposer un avant projet de scission réalisée par apport partiel d'actif, un commissaire aux apports
devra être nommé pour apprécier la valeur de cet apport en nature particulier, il faudra une
autorisation (et donc une réunion de l'AG extraordinaire) de la société apporteuse ainsi que de la
société bénéficiaire.
En revanche si on n'opte pas pour le régime juridique de la fusion scission, seule la réunion de l'AG
extraordinaire de la société bénéficiaire est indispensable. Toutefois, même en n'optant pas pour le
régime juridique de la fusion scission il est possible de choisir d'opter pour le régime fiscal, qui se
traduit pour l'essentiel par un sursis d'imposition sur les plus values réalisées par la société
apporteuse. La société apporteuse doit prendre l'engagement de conserver au moins pendant 3 ans
les actions reçues en échange.
§4 Les prises de participation
On parle de participation chaque fois qu'une société acquiert une partie du capital d'une autre société
par achat de droits sociaux de cette dernière. La définition légale de la prise de participation est la
suivante : « lorsqu'une société possède dans une autre société une fraction du capital comprise entre
10 et 50% sans que l'on tienne compte pour ce calcul des actions dépourvues de droit de vote ».
A- Les prises de participation amicales
Elles peuvent se réaliser de deux façons différentes, dont l'une seulement concrétise ce qu'on appelle
une prise de contrôle, c'est-à-dire la prise de participation par achat d'action.
1° Par achat d'actions (prises de contrôle)
La prise de contrôle peut répondre à divers objectifs. Elle peut avoir des effets positifs projetés par la
société cible (celle qui fera l'objet de la prise de contrôle). La prise de contrôle est en effet un moyen
souvent utilisé pour régler une difficulté liée au départ du fondateur de la société cible (départ à la
retraite, démission, décès) sans qu'un successeur ait été prévu.
La prise de contrôle peut également être un moyen de régler un conflit d'actionnaires au sein de la
société. Il faut se dire parfois que la seule solution pour régler des difficultés internes est l'intervention
d'un tiers dans la société, ce tiers étant une société qui va alors racheter les droits sociaux des
associés qui créent ces difficultés.
Selon l'article L 233-3 du Code des sociétés, il existe différents degrés dans la reconnaissance d'une
prise de contrôle. On peut en réalité en compter 5 :
 Lorsqu'une société détient directement ou indirectement une fraction de capital d'une autre
société lui conférant la majorité des droits de vote.
 Lorsqu'une société détient seule la majorité des droits de vote en vertu d'un accord conclu avec
les associés. Par cette disposition le législateur reconnaît la validité et l'efficacité des conventions
de vote entre des associés, des conventions de vote pouvant même entraîner une prise de
contrôle.
 Il y aura contrôle présumé quand une société dispose directement ou indirectement de plus de
40% des droits de vote alors qu'aucun autre associé ne détient directement ou indirectement une
quotité équivalente ou supérieure (présomption simple).
 Lorsqu'une société, sans pour autant détenir une majorité dans le capital d'une autre, peut
remporter la prise de décision dans les AG du fait d'une grande dilution des porteurs d'action. On
parle alors de contrôle de fait.
 Depuis 2001 (loi NRE), deux ou plusieurs personnes agissant de concert sont considérées
comme en contrôlant conjointement une autre lorsqu'elles influencent ensemble la prise de
décision dans les AG.
Pour des raisons souvent financières, il sera parfois conseillé de constituer une société holding pour
réaliser la prise de contrôle. On parlera alors dans ce cas là d'un groupe financier. Cette expression
de groupe financier s'oppose à la notion de groupe industriel dans lequel on va voir des sociétés
filiales se développer autour d'une société mère, les filiales ayant des activités proches ou
complémentaires, la société mère conservant une activité industrielle. Un groupe industriel se
constitue souvent par des apports partiels d'actifs. Le groupe financier lui aura pour objet social la
détention et la gestion des droits sociaux de la société qu'elle contrôle. La validité de ces sociétés
holding n'a pas toujours été reconnue. On leur a longtemps reproché de ne pas avoir de véritable
objet social, de mettre à mal la répartition pyramidale des pouvoirs au sein de la SA. Petit à petit on a
toutefois admis qu'il existait un intérêt économique.
Mais depuis un arrêt Lustucru du 2 juillet 1985 (Joly 1986, p 229 et p 374), la chambre commerciale
pour la première fois considère que la société holding ne constitue pas d'atteinte au droit de vote et
qu'elle n'est pas fictive du seul fait d'avoir été constituée pour gérer les droits sociaux du groupe
financier ainsi créé.
La société holding va emprunter pour pouvoir acheter les parts sociales de la société cible. Elle
devient associé de la société cible. Elle a de ce fait droit à des dividendes, lesquels serviront à
rembourser l'emprunt.
2° Par augmentation de capital
Il s'agit d'un mécanisme d'autant plus utilisé dans le contexte d'un coup d'accordéon. Mais ce coup
d'accordéon ne peut être réellement efficace que s'il est précédé d'un renoncement des associés à
leur droit préférentiel de souscription.
Même si l'augmentation de capital n'est pas absolument offensive, on a quand même la volonté de
faire partir certains associés (on va vers une prise de participation agressive).
B- Les prises de participation agressives
Ces prises de participation visent directement les prises de contrôle d'une société sans l'accord des
dirigeants de cette société. On aura recours aux OPA et OPE (offres publiques d'achat, offres
publiques d'échanges) qui ne concernent que les sociétés faisant l'objet d'une cotation, ces procédés
étant extrêmement règlementés.
Dans un premier temps, celui qui veut prendre le contrôle d'une société cotée peut se contenter de
réaliser un ramassage : rachat sur le marché du plus possible d'actions. Très rapidement ce
ramassage peut provoquer une hausse des cours de la société. De plus cette opération ne peut pas
se réaliser totalement dans le secret, car très rapidement en vertu de l'article L 233-7 du Code des
sociétés, toute personne physique ou morale qui viendrait à détenir différents pourcentages du capital
d'une société doit informer cette société dans un délai de 5 jours, ainsi que l'AMF. Celui qui est à
l'origine de cette prise de contrôle (l'initiateur) devra déposer un projet d'offre publique d'achat ou
d'offre publique d'échange. C'est une procédure qui permet à une personne physique ou morale
d'informer publiquement de son intention d'acquérir des actions d'une société cotée. Ces OPE et OPA
permettent la réalisation rapide de rapprochement ou de restructurations d'entreprises, tout en
assurant une égalité entre actionnaires, qui seront tous traités de la même manière. Les actions
seront toutes rachetées au même prix. Il faut que l'OPA soit avalisée par l'AMF, et pour cela un
dossier doit lui être présenté : un dossier financier où l'initiateur dévoile ses intentions pour l'année à
venir quant à la politique industrielle, financière, sociale des sociétés concernées. Le rôle de l'AMF
est donc très important (il n'a pas seulement une approche financière, mais également économique et
sociale). Il faut souvent respecter une très grande confidentialité afin d'assurer l'égalité des
actionnaires devant l'information.
Section 2 – Le fonctionnement des groupes de sociétés
Dépourvu de personnalité morale, le groupe de sociétés (qu'il soit financier ou industriel) n'a pas un
régime juridique propre. Il n'y a donc pas de règles spécifiques aux groupes de sociétés. En
revanche, il existe quelques dispositions un peu éparpillées dans diverses disciplines juridiques, qui
s'appliquent spécifiquement aux groupes de sociétés.
§1 Absence d'un régime juridique général de groupe
Le groupe de sociétés n'ayant pas la personnalité morale n'est pas un être juridique en tant que tel.
Mais les relations particulières que la société mère peut entretenir avec les sociétés filiales vont
justifier certaines solutions jurisprudentielles.
On en trouvera ainsi à propos de l'abus de biens sociaux. On pouvait en effet craindre qu'une société
mère ne brade les actifs d'une filiale pour se sauver ou pour sauver une autre filiale. Un tel
comportement se heurte à l'intérêt social de la filiale pour l'intérêt personnel direct ou indirect d'un
dirigeant de fait, il aurait pu être qualifié d'abus de biens sociaux. Mais sur ce point la jurisprudence a
su reconnaître la spécificité de l'intérêt social à l'intérieur d'un groupe de sociétés : Cass Crim 4
février 1985, JCP E 1985 II n°14614 (arrêt de principe Rosenblum). La Cour de cassation considère :
« pour échapper à la qualification d'abus de biens sociaux, le concours financier apporté par les
dirigeants de fait ou de droit d'une société à une autre entreprise d'un même groupe doit être dicté
par l'intérêt économique, social ou financier commun apprécié au regard d'une politique élaborée
pour l'ensemble de ce groupe ; il ne doit ni être démuni de contrepartie, ou rompre l'équilibre entre les
sociétés, ni excéder les possibilités financières de celle qui en supporte la charge ». Le fait d'utiliser la
trésorerie d'une société filiale ne sera pas systématiquement qualifié d'abus de biens sociaux, à
condition qu'il y ait des contreparties et que cela ne soit pas trop insupportable financièrement
parlant.
En matière de responsabilité, on fait comme si le groupe n'existe pas. Le principe est donc celui de
l'auto-responsabilité. La société mère sera responsable d'elle même, et les filiales idem. Chacun est
responsable pour soi. Il n'existe pas de responsabilité générale du groupe. La société mère ne peut
pas pour l'instant être responsable du fait de ses filiales. Certains tempéraments viennent à
s'appliquer : emploi particulier de certains mécanismes ou de contrats conclus entre la société mère
et les sociétés filiales.
Exemples :
 le mécanisme de l'apparence permettra d'engager la société mère vis à vis des tiers qui ont
contracté avec les filiales, lorsque la société mère a laissé entendre qu'elle garantissait la filiale ;
 le mécanisme des lettres d'intention, des lettres de confort, qui vient de se traduire par une
réforme législative sur le plan des sûretés du 23 mars 2006 : il s'agit d'accords, d'engagements
non formalisés mais qui laissent entendre que la société mère va s'engager auprès de la société
filiale pour que cette dernière honore ses différentes obligations vis à vis des tiers, ces lettres
peuvent laisser entendre que la société mère va s'engager à l'instar d'une caution vis à vis de la
société filiale, mais lorsque le tiers veut faire valoir ce qu'il prenait pour un engagement de
caution, la société mère peut alors se rétracter Il y a eu tellement d'abus que les juges ont
commencé à sévir en considérant que ces lettres d'intention ou ces lettres de confort pouvaient
contenir de véritables obligations de résultat (Cass Com 19 avril 2005, Revue droit des sociétés
2005 n°152).
Le législateur est intervenu (article 2322 du Cciv) pour définir la lettre d'intention : c'est
l'engagement de faire ou de ne pas faire ayant pour objet le soutien apporté à un débiteur dans
l'exécution de son obligation envers ses créanciers. La lettre d'intention est insérée dans le Cciv,
ce qui est surprenant car il s'agit principalement d'une pratique commerciale. Cela a pour objet de
renforcer le fait que les lettres d'intention doivent désormais être comprises comme des sûretés.
On peut expliquer l'engagement des sociétés mères envers les sociétés filiales par les engagements
contractuels créés entre elles. Quand la société mère est également le concédant ou le franchiseur
de la société filiale, ce sont les responsabilités mises en place par ces contrats de concession ou ces
contrats de franchise qui permettront d'engager la responsabilité des sociétés mères vis à vis des
sociétés filiales ou vis à vis des tiers (responsabilité délictuelle le plus souvent).
On arrive donc à trouver des moyens d'engager la responsabilité des sociétés mères vis à vis des
sociétés filiales malgré l'absence de règles spécifiques.
§2 Régimes particuliers aux groupes de sociétés
En droit fiscal, il y a des mesures qui ressemblent à un régime organisé qui s'appliquerait aux seuls
groupes de sociétés. Il y a notamment deux mécanismes fiscaux très favorables à la constitution de
groupes de sociétés : la remontée des dividendes et la remontée des pertes.

La remontée des dividendes
L'imposition normale des bénéfices et des dividendes n'est guère favorable aux groupes de sociétés,
particulièrement pour les sociétés soumises à l'IS. Chaque filiale subit en effet l'imposition de ces
dividendes jusqu'à la société mère. Ce procédé normal ne serait pas rentable chaque fois qu'une
société filiale verserait des dividendes à la société qui la contrôle. Aussi le régime fiscal français
prévoit une exonération totale des dividendes versés par les filiales. Seule la société filiale de base
verra ses bénéfices imposés, les dividendes versés à chaque autre filiale seront totalement exonérés.
Cette exonération fiscale est d'autant plus avantageuse que pour en bénéficier il suffit d'une
participation dans le capital social d'une filiale égale ou supérieure à 10%.

La remontée des pertes
Le régime est comparable. En principe, il est pourtant interdit dans un groupe de sociétés de tenir
compte des bénéfices de certaines filiales pour compenser les pertes d'autres sociétés du même
groupe. Mais depuis 1988 on permet aux sociétés mères détenant 95% du capital social des sociétés
filles d'opter pour le régime de l'intégration fiscale. Ce mécanisme d'intégration fiscale va permettre à
la société mère de faire une déclaration de l'ensemble des résultats du groupe (on parlera de compte
consolidé), comme si le groupe avait une personnalité fiscale autonome, où les bénéfices des unes
compenseront les pertes des autres. De ce fait, l'impôt acquitté par les sociétés mères sera calculé
en fonction du seul résultat net obtenu. La contrainte est la limite de détention de 95% du capital
social. Mais cette exigence est relativisée par le fait qu'un groupe constitué par seulement deux
sociétés pourrait opter pour ce régime d'intégration fiscale.
Il existe des dispositions pour les groupes de sociétés dans :
 le code du travail (création de comités d'entreprise pour les groupes)
 le droit de la concurrence (la création d'un groupe n'est pas susceptible de constituer une entente
ou une position dominante ou de dépendance économique), chron. Brun Revue droit des sociétés
juin 2006 p 8
 le droit des procédures collectives (responsabilité des sociétés mères en cas de défaillance d'une
société filiale, risque de qualification de confusion des patrimoines et de l'action en comblement
de passif de la société filiale par la société mère) Cass Com 19 avril 2005 Joly 2005 p 681 et 690.
EXAMEN
Oral Une question au hasard.
Il faut un plan en deux parties, et quelques éléments d'introduction (définition des termes du sujet).
Tous codes autorisés.
Téléchargement