CEFOCOP – Promotion 2005-2007 – Fiche de lecture – Mai 2006 L’ESTIME DE SOI A L’ADOLESCENCE VALORISATION OU DEVALORISATION DE SOI EN MILIEU SCOLAIRE Françoise BARIAUD, Claude BOURCET INTRODUCTION Cette fiche de lecture porte sur deux articles écrits par F. Bariaud et C. Bourcet et extraits de la publication « L’Orientation Scolaire et Professionnelle » et sur un chapitre écrit par F. Bariaud dans l’ouvrage « Regards actuels sur l’adolescence ». Les références sont indiquées dans la bibliographie. Françoise BARIAUD est Chargée de recherches au C.N.R.S et maître de conférence au Laboratoire de Psychologie du Développement et de l’Education. Claude BOURCET a été successivement instituteur, conseiller d’orientation psychologue au CIO de Vierzon, maître de conférence en psychologie à l’Université de Tours et membre du Service de Recherches de l’INETOP. Il est l’auteur d’une thèse intitulée « Evaluation de soi, Climat familial et Adaptation Scolaire à l’Adolescence » (1994) et de plusieurs articles et chapitres consacrés au sentiment de la valeur de soi dans l’adolescence et aux manières de faire face aux difficultés scolaires (« coping »). LA PROBLEMATIQUE Aujourd’hui, la psychologie de l’orientation vise l’étude des conduites d’orientation, c'est-àdire l’approche de la construction de soi au travers de multiples expériences, notamment scolaires et professionnelles qui constituent le cours d’une vie. Elle cherche à expliquer les choix des individus et les processus mis en œuvre lors des prises de décision. Il s’agit ici, de considérer le concept de soi comme l’un des déterminants de l’orientation et d’étudier les liens qui existent entre l’estime de soi (dimension évaluative du concept de soi) et la construction d’un choix d’orientation. Si l’on conçoit l’orientation comme éducable et le résultat d’un processus continu d’élaboration sur plusieurs années, il faut bien reconnaître qu’au sein du système éducatif, l’orientation est une étape ponctuelle souvent décisive et parfois douloureuse. Elle se réalise pour l’élève au moment de l’adolescence, période où la question de l’estime de soi prend véritablement tout son sens, en particulier à la suite des changements identifiables dans les conceptions de soi au cours de cette période. Aujourd’hui, la pression sociale et parentale à la réussite notamment scolaire est forte face à la montée du chômage et de la précarité. Le système scolaire français, fait pour les meilleurs élèves et pour ceux qui réussissent à s’adapter, produit des inégalités. Certains adolescents font alors l’expérience douloureuse de la dévalorisation personnelle. Décevant leur entourage immédiat (parents, professeurs…) et se décevant eux-mêmes, les adolescents peuvent ne plus trouver de sens à ce qu’ils font et perdre le sentiment de valeur personnelle. Ils vont alors se déprécier, tomber dans des états dépressifs ou être agressifs, insolents envers les autres. Ces conduites mènent souvent à l’échec scolaire et à un parcours de formation en inadéquation aux intérêts et aux aspirations. L’institution scolaire se doit d’être à l’écoute de tous les élèves afin de les mettre en position de réussite scolaire et d’épanouissement personnel. Le conseiller d’orientation psychologue s’avère indispensable au sein de l’établissement scolaire. En tant que psychologue, il est l’interlocuteur privilégié de l’élève et de sa famille. En tant que conseiller technique du chef d’établissement et de l’équipe éducative, il propose un certain nombre d’actions (à destination des élèves mais aussi des professeurs et des parents) qui ont pour but notamment d’aider les élèves à se construire ou à se reconstruire une image positive d’eux-mêmes. 1 LES APPORTS DE LA RECHERCHE L’estime de soi a fait l’objet de milliers de recherches et d’un nombre considérable de publications (Rosenberg en dénombrait environ 7000 en 1982, la majorité ayant vu le jour à partir des années 70). Malgré cela, une grande confusion subsiste sur le plan théorique et méthodologique. Certains auteurs par exemple ne font pas la distinction entre concept de soi et estime de soi et créent des instruments de description de soi à partir desquels ils infèrent abusivement le niveau d’estime de soi des sujets. Beaucoup d’outils ont été créés pour mesurer le niveau d’estime de soi des individus. Certains mesurent l’estime de soi globale, d’autres mesurent l’estime de soi au travers de plusieurs dimensions. Les travaux les plus récents portent sur le développement du concept de soi de la naissance à l’âge adulte, sur sa structure cognitive, son fonctionnement, son rôle dans la détermination des conduites, ses rapports avec les émotions… Les acquis de la psychologie du développement permettent une nouvelle approche : la construction du sujet en tant que personne investie de valeur. L’estime de soi est alors considérée comme un processus dont il est possible d’étudier l’élaboration et l’évolution au cours des différents âges de la vie. A- La définition de l’estime de soi Cooley en 1902 est sans doute le premier auteur à rendre compte de la distinction entre concept de soi et estime de soi. Sa définition du « concept de soi » ou image de soi renvoie à la représentation que tout sujet se fait de lui-même en chaque situation et à tout moment alors que « l’estime de soi » correspond à la dimension évaluative du concept de soi c'est-à-dire au sentiment plus ou moins favorable que chacun éprouve à l’égard ce qu’il est, ou plus exactement de ce qu’il pense être. Il convient de distinguer les deux aspects dans l’estimation que le sujet fait de lui-même. Le premier renvoie au sentiment de ses propres compétences, qualités ou capacités dans des domaines spécifiques. Le second correspond à l’estime de soi globale, c'est-à-dire à « un jugement global plus ou moins positif à l’égard de soi-même, à une mesure de sa valeur en tant qu’individu qui sans doute incorpore les évaluations de ses compétences ou de ses qualités en des secteurs spécifiques … » (Bariaud et Bourcet 1994). Ces deux entités distinctes sont conçues comme hiérarchisées dans la structure du concept de soi, l’estime de soi se situant au niveau supérieur, couvrant l’ensemble des compétences spécifiques. Plusieurs auteurs supposent un lien entre les deux entités et souhaitent mesurer la force de ce lien pour connaître la nature de l’estime de soi. Les résultats de travaux réalisés par plusieurs auteurs Harter (1982), Lorr et Wunderlich (1986) indiquent qu’une part du sentiment de la valeur de soi peut être saisie dans l’estimation personnelle de compétences ou de qualités particulières. Mais ils prouvent aussi qu’il ne s’y réduit pas. De plus, rien n’indique le sens des déterminations : est-ce que le sentiment de compétences dans le domaine scolaire par exemple contribue à l’estime de soi globale ? Où est-ce que l’attitude globale plus ou moins favorable envers soi-même rejaillit sur les autoévaluations de ces compétences scolaires ? Ces deux réalités sont d’ordres différents mais ne sont pas totalement indépendantes. Elles requièrent des études sur leur fonctionnement, leurs déterminants, leur sensibilité aux situations et leur stabilité dans le temps. B- Le développement de l’estime de soi à l’adolescence Les nombreuses études sur le développement des conceptions de soi à l’adolescence ont contribué à édifier une théorie du soi. Par contre, elles ont peu abordé la question de 2 l’évolution de l’estime de soi au cours de cette période. Néanmoins, il semble admis que le développement de l’estime de soi se calque sur le développement du concept de soi du sujet. 1° Les changements dans le concept de soi à l’adolescence Rodriguez-Tomé (1991) propose de distinguer deux phases dans le développement de l’individu à l’adolescence, sensibles aux différences inter et intra-individuelles. La première s’étend en moyenne de 12 à 15 ans et est caractérisée par une maturation pubertaire rapide durant laquelle le corps va subir des transformations parfois spectaculaires et adopter peu à peu ses caractéristiques sexuelles définitives. La seconde se situe autour de 15 à 18 ans et va permettre à l’individu de s’affirmer progressivement en tant que personne à partir de tout ce qu’il a pu remanier dans la première phase. Au cours de l’adolescence, l’élaboration du concept de soi évolue et les progrès de la pensée se caractérisent par l’abstraction, la différenciation, l’intégration, et le développement du « soi psychologique » (Rodriguez-Tomé 1983). Alors que l’enfant se conçoit essentiellement en termes de caractéristiques et de réalisations concrètes et se présente en termes « d’agir, de faire », l’adolescent devient progressivement apte à manier une pensée de plus en plus abstraite, élabore des représentations de lui-même d’ordre psychologique et existentiel et se présente en termes « d’être, de ressenti ». Il fait davantage appel aux traits de personnalité, aux opinions, aux valeurs quand il s’agit de se définir (Qui suis-je ?) ou d’expliquer ses conduites. Il peut alors exprimer des descriptions opposées de lui-même en les identifiant comme de véritables contradictions. Ce n’est qu’à partir de la maîtrise de capacités cognitives indispensables, qu’il pourra intégrer des attributs de plus en plus différenciés de soi en une vue cohérente et unifiée de lui-même. Parallèlement, l’adolescent devient capable de se penser en tant que personne à part entière. Il distingue son point de vue personnel de celui qu’il attribue à son entourage et affirme ainsi sa propre individualité. Il est nécessaire de signaler comme l’écrivait Perron en 1972 que le sentiment de valeur personnelle « … se précise, se détaille, se construit et se nuance tout à la fois au cours de l’enfance… ». Un enfant peut construire ce sentiment de valeur en sentant ce qu’il signifie pour son entourage immédiat ou par l’expérience de ses réussites ou de ses échecs. En revanche, il ne pourra l’énoncer et se penser en tant que valeur abstraite qu’au cours de l’adolescence. 2° Les déterminants de l’estime de soi Plusieurs facteurs contribuent à façonner l’estime de soi de l’individu. Il s’agit notamment des expériences de réussites et d’échecs et de la comparaison sociale, de l’adéquation à des aspirations ou à des idéaux, de la considération des personnes significatives. 2-1 La considération des personnes significatives Des recherches se sont intéressées à l’influence d’autrui sur la représentation de soi du sujet et ont conduit à conforter la théorie de l’interactionnisme symbolique qui envisage la construction de soi à partir du regard d’autrui. Rodriguez-Tomé explicite l’expression « interactionnisme symbolique » comme suit : « … L’interaction humaine est avant tout caractérisée par l’usage de symboles, en ce sens que la réponse d’un individu ne se réfère pas directement aux actions des autres, mais à la signification qu’il leur attribue ; de sorte que le comportement reflète en priorité les interprétations que l’individu fait concernant les objets, les réactions d’autrui et la situation sociale comme un tout… ». 3 Mead, psychosociologue montrera aussi à travers l’étude du processus d’intégration au groupe, que l’individu est amené progressivement non seulement à intérioriser les idées et les attitudes du groupe auquel il aspire appartenir, mais également l’image le concernant que les membres du groupe ont de lui. Rogers (1951) remarque aussi que c’est dans l’interaction avec autrui que le sujet développe un sentiment de valorisation ou de dévalorisation de sa personne. Il signale que les parents sont, à l’évidence, parmi les personnes les plus significatives de l’environnement du sujet et ont, à ce titre, une influence considérable sur le développement de son sentiment d’identité personnelle. Les parents, leur attention, leur considération envers l’enfant contribuent au sentiment de valeur personnelle. Des recherches sur la période de l’adolescence le confirment : le soutien parental, l’affection, l’approbation sont liés positivement à l’estime de soi que se porte l’adolescent. Le désintérêt de la part des parents est significativement associé à une faible estime de soi de l’adolescent plus que ne l’est le conflit ouvert entre eux. D’autres études se sont attachées à cerner l’influence des styles éducatifs sur le développement de l’estime de soi (Kellerhals et al. 1992). Les recherches d’Harter (1989) mettent en évidence le lien positif entre le soutien des pairs et l’estime de soi des adolescents. L’adolescent accorde une grande importance à l’avis de ses camarades et il éprouve une grande souffrance quand il perçoit un jugement négatif de leur part, un rejet ou une exclusion du groupe. Ces évènements prennent pour lui une acuité toute particulière car l’adolescent, en quête d’identité, recherche intensément chez autrui la confirmation de sa valeur. Ces moments sont qualifiés assez souvent de « difficiles, angoissants, déprimants » (Bariaud, Oliveri, 1989). 2-2 L’adéquation à des aspirations ou à des idéaux Les réussites et les échecs vécus dans des domaines jugés importants pour la réalisation de soi interviennent dans la formation du sentiment de valeur personnelle. James en 1890 suggérait d’appréhender l’estime de soi au travers du quotient des « réussites » sur « les aspirations » : si les réussites se situent à un niveau égal ou supérieur aux aspirations, alors l’estime de soi est élevée ; si les aspirations excèdent largement les réussites, l’estime de soi est faible. Harter (1986) opérationnalise le modèle de James en traduisant « réussites » par « compétences perçues » et « aspirations » par « importance accordée aux domaines en question ». Ses études auprès d’enfants et d’adolescents montrent que le degré de concordance entre les deux est effectivement lié au sentiment de valeur de soi : ne pas se sentir à la hauteur dans un secteur qu’on valorise va de pair avec une faible estime de soi globale et inversement. La formule de James peut également s’écrire en termes de distance entre « soi perçu » et « soi idéal ». Les recherches pourraient alors étudier l’écart que l’adolescent mesure d’ailleurs, entre ce qu’il se croit capable de faire et ce qu’il vise comme réussites et plus encore entre ce qu’il pense être et ce qu’il voudrait être en tant que personne. 2-3 Les expériences de réussites et d’échecs et la comparaison sociale Les travaux de Festinger (1954) ont contribué à comprendre le fait que chacun compare ses performances et ses opinions à celles de son entourage immédiat. Le processus de comparaison sociale participe à la détermination des évaluations de soi, du moins du sentiment de compétences et de qualités spécifiques qui interviennent pour une part dans l’estime de soi. Ce n’est que vers 7 ou 8 ans que l’individu devient capable de comparer ses caractéristiques personnelles à celles des autres, afin d’en identifier les similarités et les différences. Certaines de ces comparaisons sont imposées et donnent de soi une image peu flatteuse. Ce sont les classements scolaires qui étiquettent certains enfants en échec dès 4 l’école primaire. Ces comparaisons sont d’autant plus défavorables que la pression à la réussite scolaire avec le chômage est intense. D’autres comparaisons sont plus libres et rendent possibles des arrangements non conscients avec soi-même. Une fonction de préservation de l’estime de soi voire d’amélioration peut alors être attribuée à la comparaison sociale. En effet, selon la loi énoncée par Festinger (1954), « la tendance à se comparer avec autrui décroît à mesure qu’augmente la différence entre soi et autrui ». 3° Le niveau d’estime de soi : différences en fonction du sexe et variation avec l’âge Les recherches les plus récentes (portant sur plusieurs échantillons d’adolescents français de collège et de lycée) sur le niveau d’estime de soi globale des filles et des garçons font état de scores en moyenne plus élevés pour les garçons et ce aux différents moments de l’adolescence. La valorisation culturelle de la masculinité à travers la socialisation expliquerait cette différence. Sur le plan du sentiment de compétence dans des domaines particuliers, cette supériorité des garçons n’existe pas toujours. Par exemple, elle n’apparaît pas dans le domaine des compétences sociales et dans celui des compétences cognitives, les scores ne vont pas tous dans le même sens. Les études s’attachent à savoir aussi si le niveau d’estime de soi varie au cours des phases de l’adolescence. Cela permettrait de repérer au cours de l’adolescence, les périodes de plus grande vulnérabilité ou d’épanouissement associées à des changements caractéristiques (période pubertaire, transition scolaire…). Les résultats d’études longitudinales montrent que dans la deuxième partie de l’adolescence (environ de 15 à 18 ans) et dans les années qui marquent l’entrée dans l’âge adulte, le niveau d’estime de soi s’accroît avec un gain d’environ 10% à 12% d’écart type par an. Le passage à l’âge adulte et en particulier, les nouveaux rôles et les nouvelles responsabilités qui y sont associés, expliquerait cette hausse moyenne du niveau d’estime de soi. Block et Robin (1993) révèlent des différences entre sexe. Le niveau d’estime de soi des garçons tend à augmenter en moyenne entre 14 et 23 ans et celui des filles tend à diminuer surtout entre 18 et 23 ans. La prise de conscience par les filles des difficultés sociales d’accomplissement de soi pourrait être un des facteurs explicatifs de ce déclin. Par ailleurs, les études ont porté sur la stabilité, au cours de l’adolescence des différences interindividuelles dans le niveau d’estime de soi. Les résultats font état, quel que soit l’âge donné, d’une certaine stabilité du niveau d’estime de soi des adolescents et de changements non négligeables dans le positionnement des individus. Block et Robin (1993) constatent que sur la période d’âge de 14 à 23 ans, les différences interindividuelles sont plus stables chez les filles comme si le niveau d’estime de soi était chez elles, au cours de la deuxième partie de l’adolescence, plus fermement établi que chez les garçons. Ils constatent aussi que les évolutions du niveau d’estime de soi au cours de l’adolescence et de son maintien constant à un niveau élevé sont positives ; les garçons sont toutefois plus nombreux que les filles à maintenir un niveau constant d’estime de soi élevé (30% contre 17%). Par contre, les filles sont plus nombreuses que les garçons à connaître une détérioration de l’image qu’elles se font d’elles-mêmes (14% contre 7%). Ils révèlent également que les caractéristiques positives de personnalité qui, à 14 ans, prédisent une augmentation ultérieure de l’estime de soi sont de type relationnel chez les filles (la sociabilité par exemple) et de type individualiste chez les garçons (contrôle de l’anxiété sociale), conformément aux rôles de sexe que définit la culture. LA PRATIQUE PROFESSIONNELLE DU COP Les conceptions de l’orientation ont évolué au cours du temps en écho aux transformations profondes qu’a connues la société dans son ensemble. Les pratiques d’orientation semblent 5 avoir été étroitement déterminées par les représentations de la qualification professionnelle et par les évolutions du système éducatif. En un siècle, l’orientation est passée d’une conception mécaniste et utilitariste à une conception éducative. Cette évolution de la « valeur » orientation pose la question des finalités de l’orientation. Par ailleurs, elle révèle l’importance que la société et l’Ecole ont accordée à l’individu dans la construction de son parcours scolaire et professionnel. Si l’on considère les choix d’orientation comme des tentatives de réalisation d’une certaine image de soi, l’on peut penser que le « soi » joue un rôle fondamental dans le processus d’élaboration et de réalisation des intentions d’avenir. Il convient alors de mettre en œuvre des actions qui permettent la réflexion sur soi et l’épanouissement personnel Le conseiller d’orientation psychologue est conseiller technique du chef d’établissement et de l’équipe éducative. Il propose des interventions collectives qui requièrent la participation des professeurs dans leur conception et leur mise en œuvre et assure les entretiens individuels. Par ces interventions, il contribue à l’épanouissement et à la réussite des élèves. Il peut se donner comme objectif d’agir sur les principaux déterminants de l’estime de soi afin de la faire évoluer positivement au cours de l’adolescence. Il sait que les choix d’orientation se font à une période où la question de l’estime de soi prend véritablement tout son sens, en particulier à la suite des changements identifiables dans les conceptions de soi au cours de cette période. D’autre part, il conçoit l’estime de soi comme un indicateur de bien être psychologique et postule qu’elle influence les conduites. Quand celle-ci est mise à mal, elle peut conduire l’élève à des états dépressifs, à une dépréciation de soi, à de l’agressivité, à une démotivation, à une rupture scolaire … Les actions du COP se feront dans le cadre de l’éducation à l’orientation et permettront à l’élève de développer des compétences dans trois domaines : la connaissance de soi, la connaissance des métiers et la connaissance des formations. Au travers de l’acquisition de compétences, il convient de faire en sorte que l’élève puisse identifier et mettre en valeur ses caractéristiques personnelles. Il est nécessaire de partir de ses connaissances et de son expérience personnelle afin d’obtenir sa participation. Les actions proposées aux différents niveaux du collège et du lycée tiendront compte du développement cognitif et psychologique de l’adolescent. Sur le plan individuel, le COP assure des entretiens d’aide et de conseil. Son statut de psychologue fait de lui l’interlocuteur privilégié des élèves et des familles au sein de l’établissement scolaire. Il a une approche globale de l’élève : il approfondit la demande en faisant référence à tous les éléments concernant l’élève tant sur le plan scolaire que sur le plan personnel. Ces informations sont essentielles et expliquent parfois une scolarité ou un vécu personnel difficiles. Sur le plan collectif, il se charge de mettre en œuvre et d’animer des séances sur la découverte des intérêts, des traits de personnalité, des valeurs, des savoir-faire et des savoir-être. Il utilise les méthodes d’éducation à l’orientation (ADVP par exemple) et divers outils faisant référence à des modèles théoriques différents. Il peut s’appuyer notamment sur des questionnaires d’intérêts, de motivation (Typologie de Holland, QMF de Forner…) sur des techniques comme le photolangage ou l’entretien 2 à 2, sur des simulations d’entretien employeur/employé en LP par exemple qui permettent de préparer les élèves à identifier et à mettre en valeur leurs compétences et leurs connaissances acquises durant la scolarité, les stages, les activités associatives, les emplois éventuels. Un travail sur la valeur scolaire des élèves et sur leur sentiment de réussite et d’échec peut être mené en classe sur des supports divers comme les bulletins scolaires ou avec des outils permettant d’analyser le locus de contrôle. Des recherches ont montré l’influence du niveau d’estime de soi dans l’attribution des réussites et des échecs. Les individus ayant une faible 6 estime d’eux-mêmes endossent autant la responsabilité de leur échec que de leur succès. De plus, confrontés à une situation d’échec dans un domaine donné, ils ont tendance à généraliser cet échec à l’ensemble du concept de soi. Face à des situations difficiles, ils ne surestiment pas leurs capacités, ils parient plutôt sur l’échec et utilisent plus fréquemment des stratégies d’évitement sans tenir compte du fait que les situations sont contrôlables. Il est également important de faire comprendre aux professeurs que les appréciations sur le bulletin scolaire ne doivent en aucun cas porter atteinte à l’image de soi. Le conseiller d’orientation psychologue impulse et promeut toutes les alternatives pédagogiques qui permettent à l’élève de valoriser ses compétences, ses connaissances, ses qualités… à travers des activités « moins scolaires ». Elles peuvent prendre la forme de club comme le théâtre ou la presse avec la réalisation mensuelle d’une page d’informations sur le collège. Plus officiellement, la mise en place des itinéraires de découverte en collège, des travaux personnels encadrés en lycée et des projets pluridisciplinaires à caractère professionnel en lycée professionnel contribue à valoriser les élèves en les faisant travailler sur des thèmes variés comme le traitement des déchets en LP, le tabac, l’imprimerie et ses métiers, les violences faites aux femmes… qui font appel à une pluralité de disciplines. Ces travaux réalisés en groupe sont généralement bien appréciés des élèves. Ceux-ci s’investissent fortement. Les élèves les plus en difficulté scolairement se révèlent parfois comme élément moteur et démontrent des compétences non perçues en classe par les professeurs. Au niveau de l’évaluation, le travail en groupe permet d’éviter les comparaisons de performances entre élèves puisque c’est le travail du groupe qui est noté. CONCLUSION Il y aurait bien d’autres activités ou pistes de réflexion à suggérer pour aider les élèves à découvrir et à mettre en valeur leurs caractéristiques personnelles. Cet objectif est d’autant plus important que c’est au cours de l’adolescence que le sujet élabore la capacité à se penser comme investi de plus ou moins de valeur en tant que personne et que l’école demande à l’élève de construire un projet d’orientation. 7 BIBLIOGRAPHIE BARIAUD, F., (1997). Le développement des conceptions de soi, in H. Rodriguez-Tomé, S. Jackson, F. Bariaud (éds.), Regards actuels sur l’adolescence, Paris, PUF, 49-78. BARIAUD, F., et BOURCET, C., (1994) Le sentiment de la valeur de soi, L’Orientation Scolaire et Professionnelle, 23, n°3, 271-290. BOURCET, C. (1994). Evaluation de soi, climat familial et adaptation scolaire à l’adolescence, chapitre 3, 57-112. BOURCET, C. (1997). Valorisation et dévalorisation de soi en milieu scolaire : pour une approche psychopédagogique humaniste, 26, n°3, 315-333. GUICHARD, J., et HUTEAU, M. (2001). Psychologie de l’orientation, Paris, Dunod. 8