UE11 Parcours biologie, génétique, immunologie, microbiologie cours n°2 21/10/2015 RT : Al Bayatti Anaïs Amram Fanny RL : Zhang Amélie Jamila Faivre [email protected] Plasticité cellulaire et contrôle moléculaire de la prolifération / différenciation cellulaire Plan : I. Le cycle cellulaire A) Introduction B) La mitose i. Description de la mitose ii. Quel est le rôle du centrosome ? iii. Combien de centrosome possède normalement une cellule ? iv. Peut-on retrouver plusieurs centrosomes dans une cellule ? v. P53, une protéine anticancéreuse C) Le rôle de la protéine du rétinoblastome dans la progression du cycle cellulaire D) Le rôle de la protéine CDC6 dans la progression du cycle cellulaire E) Les complexes Cycline-CDK II. Le cas des cellules souches A) Généralités sur les cellules souches B) L’irréversibilité de la différenciation cellulaire : un dogme anéanti i. De nouvelles connaissances sur la différentiation cellulaire ii. La naissance de Dolly : une preuve du caractère totipotent des cellules somatiques C) Les cellules humaines : de la totipotence à l’unipotence D) Quelques expériences sur les cellules souches i. La reprogrammation de cellules somatiques en cellules souches. ii. Exemple : essai clinique sur une maladie rétinienne qui prive de la vue iii. La lèpre : infection bactérienne iv. Méthode d'étude des tumeurs Abréviations : CS = cellule souche I) Le cycle cellulaire A) Introduction Le cycle cellulaire : Est composé d'un cycle chromosomique (réplication de l'ADN) et d'un cycle de croissance (G1). Donne naissance à 2 cellules filles qui peuvent différer entre elles (= division asymétrique) comme dans le cas des cellules souches. Peut également donner naissance à deux cellules filles strictement identiques. La duplication de l'ADN est semi-conservative (brin néo-synthétisé + brin parental). La progression dans le cycle est contrôlée par un complexe enzymatique Cycline – CDK. Les kinases dépendantes des cyclines ne régulent pas que le cycle cellulaire : certaines régulent l'apoptose (CDK2, CDK5), la transcription (CDK7, CDK8, CDK 9), le développement des neurones... Le complexe Cycline - CDK phosphoryle les protéines cibles. B) La mitose i. Description d'une mitose : 4 étapes Lors de la prophase, sous-étape de la mitose, la chromatine des chromosomes se condense. Les enveloppes nucléaire et nucléolaire sont rompues. La formation du fuseau mitotique débute pendant la métaphase. Le centrosome s’est dupliqué et ainsi les deux se positionnent face à face et sont diamétralement opposés. Lors de la métaphase, les chromosomes sont alignés sur la plaque équatoriale. Les éléments du fuseau mitotique viennent fixer les kinétochores des chromosomes. Lors de l’anaphase, les chromosomes sont répartis équitablement entre les deux pôles de la cellule en mitose. Lors de la télophase, les membranes nucléaire et nucléolaire sont reformées. Vient ensuite la cytodiérèse qui correspond à la séparation physique des cellules filles. Elle s’effectue grâce à un anneau contractile d’actine. ii. Quel est le rôle du centrosome ? Il s’agit du centre organisateur des microtubules, formé de deux centrioles (de forme tubaire), à partir duquel vont donc polymériser les microtubules. Longtemps, les scientifiques ont pensé que le centrosome était constitué d’ADN mais il ne s’agit en fait que de protéines et de microtubules. iii. Combien de centrosomes a-t-on dans une cellule ? En phase, G1 le centrosome est unique. Cependant, au cours de la phase de réplication (phase S), il y a en même temps que la duplication de l’ADN une duplication du centrosome. On a donc à partir de la phase S, deux centrosomes qui vont servir pour la mitose et la ségrégation des chromosomes. iv. Peut-on retrouver plusieurs (> 2) centrosomes dans une cellule ? En effet, il existe des cas dans lesquels une cellule peut présenter deux voire bien plus de centrosomes. Cependant, il s’agit ici d’un cas de PATHOLOGIE ; en aucun cas, physiologiquement, la cellule ne présentera plus de deux centrosomes. La présence d’un nombre anormal de centrosomes génère ce qu’on appelle une instabilité génétique à l’origine d’une aneuploïdie (en effet, chaque centrosome va tirer les chromosomes aléatoirement pendant la mitose, ce qui génère une inégalité de répartition des chromosomes dans les cellules-filles). L’aneuploïdie (déf. Wiki) = caractérise une cellule qui ne possède pas le nombre normal de chromosomes. Toutes les cellules somatiques de notre organisme ne sont pas diploïdes (2n chromosomes). On peut citer plusieurs exemples de cellules somatiques polyploïdes : - Les cellules mégacaryocytaires (précurseurs des plaquettes) - Les cellules du placenta - Les cellules du foie (les hépatocytes) La polyploïdie de ces cellules peut s’expliquer par le fait qu’elles appartiennent à des organes métaboliquement très actifs et par conséquent, ont besoin de beaucoup d’enzymes. D’où la polyploïdie qui apporte un grand bagage génétique. NB : Une polyploïdie de 64n impliquerait qu’un gène (quelconque) soit présent en 64 exemplaires dans la cellule. Lors d’un cancer les cellules peuvent avoir une amplification aberrante des centrosomes, et donne des cellules aneuploïdes (elles ne possèdent pas le bon nombre de chromosomes). Légende de l'image ci-dessous : (c) Tissu adjacent : Deux centrosomes, cellule normale. (d) Tissu tumoral : Mitose tripolaire (3 centrosomes) (e) Tissu tumoral : Mitose quadripolaire En considérant des coupes de colon humain par fluorescence, on s’aperçoit que les cellules tumorales se développent de façon anarchique et comportent un nombre anormalement élevé de centrosomes, au lieu d’un seul. v. P53, une protéine anti-cancéreuse P53 est une protéine facteur de transcription intervenant dans les mécanismes de l’apoptose notamment. La protéine p53 est exprimée à partir d’un gène suppresseur de tumeur. Elle intervient également dans le cycle cellulaire au niveau du point de contrôle en fin de phase G2, en cas de stress (cassure double brin…). Elle permet d’arrêter le cycle cellulaire un moment pour tenter une réparation de l’ADN endommagé ; si aucun mécanisme de réparation n’a réussi à le réparer, p53 active l’apoptose. C) Le rôle de la protéine du rétinoblastome dans la progression du cycle cellulaire Le gène du Rétinoblastome (RB) a été cloné à partir d'une tumeur de la rétine chez l'enfant. Ce dernier permet la traduction de la protéine du RB qui est un anti-oncogène ou suppresseur de tumeur qui bloque le cycle cellulaire en phase G1. On prend l’exemple de cette protéine qui est un substrat des complexes cyclines-CDK. Dans un cas normal, lors de la phase G0/G1, E2F (facteur de transcription de gènes impliqués dans la prolifération cellulaire), DP et la protéine du RB forment un complexe sur l'ADN conduisant à l’inactivation de E2F qui ne peut donc transactiver ses gènes cibles. Le complexe Cycline D/CDK 4-6 va ensuite hyperphosphoryler la protéine du RB. Cette phosphorylation implique une libération de E2F/DP. Finalement, E2F est transactivé avec DP ce qui permet l’expression de nombreuses protéines (CDK1, Cycline A...) grâce à l'ADN polymérase alpha. Le complexe Cycline A/CDK2 formé grâce à E2F phosphoryle E2F en rétrocontrôle ce qui détache E2F de l'ADN et bloque la traduction des protéines. On parle de boucle d’autorégulation. cellulaire D) Le rôle de la protéine CDC6 dans la progression du cycle La réplication de l'ADN est temporelle, c’est-à-dire que la réplication n’a pas lieu en même temps partout dans l’organisme. En effet, l'ADN comporte une origine de réplication précoce et une origine de réplication tardive. En phase G1, un complexe de protéine fixe physiquement l'ADN : il s’agit du complexe de préréplication. Viennent ensuite s’ajouter des protéines qui participe à la maturation du complexe qui devient alors le complexe de pré-initiation de la réplication. L'activation de CDK phosphoryle CDC6 et CDT1 ce qui provoque la translocation de ces 2 protéines dans le cytoplasme et ainsi la réplication de l'ADN. La protéine CDC6 est donc un acteur important du cycle cellulaire puisqu’il permet la réplication de l’ADN sans quoi le cycle cellulaire ne peut progresser. E) Les complexes Cycline-CDK Question : Quels sont les complexes cyclines-CDK spécifique à chaque phase du cycle ? - En phase G1 : Cycline D - CDK 4/6 (voir NB) En phase S : Cycline E - CDK 2 En phase G2 : Cycline A – CDK 2 Pendant la mitose : Cycline B – CDK 1 (aussi appelé MPF) NB : Les facteurs de croissance contenus dans la matrice extra-cellulaire vont lier le récepteur de surface. La protéine RAS MAP kinase est responsable de l'activation de l'expression de cycline D. Le signal d’entrée dans le cycle cellulaire provient donc de l'extérieur de la cellule. La qualité de l'information dépend de la qualité de la matrice extra cellulaire. II) Le cas des cellules souches A) Généralités sur les cellules souches Il existe 2 formes de cellules souches : - cellule souche embryonnaire (ES) - cellule souche adulte Ces cellules effectuent des mitoses asymétriques. La première cellule est strictement identique à la cellule mère, ce qui assure un auto-renouvellement. La deuxième cellule fille est différente de la cellule mère : elle acquiert des modifications supplémentaires qui l’engagent vers la différenciation. La deuxième cellule, à l’issue de sa propre mitose, aura une cellule fille strictement identique et, comme au stade précédent, une cellule fille différente. Au bout de nombreuses mitoses asymétriques, on aboutit aux cellules les plus différenciées. B) L’irréversibilité de la différentiation cellulaire : un dogme anéanti i. De nouvelles connaissances sur la différentiation cellulaire A bien retenir. Les cellules possèdent une très grande plasticité ce qui permet un retour en arrière une fois que la cellule a été différencié. C’est ce qu’on appelle la dédifférenciation. En effet, la cellule une fois créée a plusieurs devenirs : - Se différencier puis éventuellement se dédifférencier => REVERSIBLE - Entrer en quiescence (absence temporelle de division cellulaire) => REVERSIBLE - Entrer en sénescence (vieillissement de la cellule) => IRREVERSIBLE - Entrer en apoptose => IRREVERSIBLE NB : Il existe notamment ce qu’on appelle la trans-différentiation : Certaines cellules peuvent se transformer en un autre type cellulaire. Comment ? Après sa première différenciation, la cellule va passer de son stade différencié au stade de cellule souche. A la suite de quoi, elle va pouvoir se redifférencier en autre type de cellule. On retrouve ce mécanisme notamment dans les cancers. Mais certaines de nos cellules, indépendamment des cancers, peuvent se dédifférencier également. NB 2 : La sénescence des cellules est causée par le raccourcissement des télomères des chromosomes. Hors dans les cancers, on a une grande production de télomérases (à l’origine de la polymérisation des télomères) c’est pourquoi les cellules cancéreuses échappent à ce phénomène de sénescence. ii. La naissance de Dolly : une preuve du caractère totipotent des cellules somatiques On admettait que la réversibilité du destin cellulaire était impossible, avant que le clonage de la célèbre brebis Dolly ne remette en cause ce dogme. Le clonage a consisté à énucléer un ovule de brebis non fécondé puis à introduire le noyau d’une cellule de glande mammaire dans ce même ovule. Une fois la fusion faite, l’ensemble formé a été réimplanté dans une brebis préparée hormonalement pour être gestante. La réussite de ce clonage signifie qu’une cellule somatique adulte peut être reprogrammée par des facteurs ovocytaires en cellule souche totipotente. Dolly n’a pas vieilli plus vite que ses congénères, n’est pas stérile. Elle a eu une espérance de vie en accord avec les maladies fréquentes chez les animaux de laboratoire. Cette expérience a prouvé définitivement que les noyaux des cellules somatiques ont un caractère totipotent : tout un organisme peut naître à partir du matériel génétique d'une cellule somatique différenciée. Ce clonage a été reproduit sur plusieurs espèces. C) Les cellules humaines : de la totipotence à l’unipotence - - Le zygote et un blastomère au stade précoce sont totipotents. Ils peuvent donner naissance à la totalité d’un individu, tissus extra-embryonnaires inclus. Les cellules souches embryonnaires (cellules ES), issues de la masse interne du blastocyste, sont pluripotentes: elles peuvent donner différents types de cellules, donner des cellules des trois feuillets embryonnaires (ectoderme, endoderme et mésoderme). En résumé, elles peuvent former n’importe quelle cellule, sauf les tissus extra-embryonnaires. Donc pas un individu entier. Les cellules souches multipotentes peuvent donner plusieurs types cellulaires. Une cellule unipotente ou monopotente ne peut être à l’origine que d’un type cellulaire. Exemple: la cellule satellite qui borde une fibre musculaire. Elle ne peut qu’être à l’origine d’une fibre musculaire. D) Quelques expériences sur les cellules souches i. La reprogrammation de cellules somatiques en cellules souches. Aujourd’hui, on cherche à produire de nouvelles cellules souches par reprogrammation des cellules somatiques. La prouesse scientifique du chercheur Japonais, Shinya Yamanaka, récompensée par le prix Nobel de médecine 2012 consiste à prélever pratiquement n’importe quelle cellule chez un adulte et à la reprogrammer génétiquement pour la rendre pluripotente, c’est à dire capable de se multiplier à l’infini et de se différencier en types de cellules qui composent un organisme adulte, exactement comme une cellule souche embryonnaire. Ces cellules sont appelées IPS pour cellules souches pluripotentes induites ("induced pluripotent stem cells"). Il a été mis en évidence l’existence de 24 gènes/facteurs qui ont un impact fort dans l’autodifférenciation des cellules souches embryonnaires (ES). Expérience : Dans une cellule de peau de souris, il a introduit les plasmides contenant les 24 facteurs en question, puis un autre contenant les 23 derniers, puis 22 et ainsi de suite, jusqu’à insérer un plasmide avec 1 seul facteur. Ce dispositif a permis de déterminer les 4 facteurs les plus importants et suffisants parmi les 24 testés : Nanog, Oct-3, C-myc et KLF4. C-myc ne fait cependant plus parti de cette liste maintenant, car il s’agit d’un proto-oncogène. Les 3 autres facteurs ont un rôle dans la transduction du signal. Bilan : En analysant les colonies de cellules obtenus, il a réussis à trouver certaines en forme de boule (organoïde) qui est la forme significative d’une cellule souche. La cellule souche qu’il a généré est une cellule pluripotente (capable de donner plusieurs types cellulaires) et non TOTIpotente (capable de donner naissance à un organisme entier, tout type cellulaire). Ainsi donc, en introduisant ces 4 facteurs on peut reprogrammer une cellule. ii. Exemple : essai clinique sur une maladie rétinienne qui prive de la vue Au Japon, des scientifiques ont pris des cellules de la peau d’un patient atteint d’une maladie touchant la rétine qu’ils ont ensuite reprogrammé en cellules de la rétine. Ces dernières ont après été réinjecté en autologue localement (au niveau de la rétine) chez le patient. Pourquoi en autologue ? On cherche à injecter au patient des cellules le plus HLA compatible pour éviter les risques de rejet. Mais certains se demandent si ce genre de dispositif ne pourrait pas entraîner des cancers par la suite… iii. La lèpre : infection bactérienne La cellule de Schwann qui a intégré la bactérie de la lèpre se dédifférencie et n’a plus de propriétés nerveuses ce qui a pour conséquence de booster la prolifération bactérienne. L’infection s’amplifie donc et les bactéries vont migrer vers un nouvel endroit pour se redifférencier en cellule de Schwann. iv. Méthode d'étude des tumeurs En oncologie, on peut après extraction de la tumeur, la broyer, extraire les ARNs puis effectuer une technique qui consiste à quantifier le niveau d'expression des gènes. Rouge : up régulation Vert : down régulation On peut donc classer les tumeurs en fonction de la carte d'identité de la tumeur et donc adapter le traitement. FICHE RECAPITULATIVE Le cycle cellulaire : Le cycle cellulaire est composé d'un cycle chromosomique (réplication de l'ADN) et d'un cycle de croissance (phase G1). Il donne naissance à deux cellules-filles qui peuvent être soit identiques soit différentes (cas des cellules souches). Un signal exogène d'entrée dans le cycle cellulaire active l'expression de la cycline D, d'où la dépendance du bon fonctionnement du cycle au milieu extérieur. Attention : la réplication de l'ADN est semi-conservative. Le centrosome est le centre organisateur des microtubules. Physiologiquement, en phase G1, il y en a un par cellule, et, après sa duplication en phase S, deux par cellule. Si son nombre est supérieur à 2, alors c'est un cas pathologique : la présence d'un nombre anormal de centrosomes est à l'origine d'une aneuploïdie (= nombre anormal de chromosomes). On observe ce cas notamment dans les cancers. Les protéines du cycle cellulaire : - p53 est une protéine facteur de transcription qui a un rôle anti-oncogène : elle intervient notamment dans les mécanismes d'apoptose. Elle possède également un rôle dans le cycle cellulaire au niveau du point de contrôle G2/S afin de vérifier l'intégrité de l'ADN répliqué. - La protéine CDC6 joue un rôle important dans l'initiation de la réplication de l'ADN. - Les complexes cycline/CDK qui contrôlent la progression du cycle cellulaire : - G1 : Cycline D/CDK 4,6 - S : Cycline E/CDK 2 - G2 : Cycline A/CDK 2 - Mitose : Cycline B/CDK 1 Les cellules souches : Les cellules souches existent sous deux formes : cellules souches embryonnaires (ES) et cellules souches adultes. Elles se divisent asymétriquement afin de permettre leur autorenouvellement et leur différenciation. Important ! La plasticité cellulaire : certains phénomènes sont réversibles comme la différenciation (la cellule peut se dédifférencier) et la quiescence. D'autres sont irréversibles comme la sénescence et l'apoptose. Grâce au clonage de la brebis Dolly, on a pu mettre en évidence qu'une cellule somatique adulte peut être reprogrammée par des facteurs ovocytaires en cellule souche totipotente. Sur des cellules somatiques humaines, on a pu reprogrammer le matériel génétique des cellules et les faire devenir pluripotentes (qui peuvent se différencier en plusieurs types cellulaires ≠ totipotence = capacité à donner naissance à un organisme entier). Il est ainsi possible de traiter certaines maladies en « reprogrammant » les cellules défaillantes. En oncologie, on peut identifier le profil d'expression génique des cellules cancéreuses afin d'adapter le traitement.