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Thème 2 : Les dynamiques de la mondialisation: Les territoires dans la mondialisation
Pôles et espaces majeurs de la mondialisation
Comme nous l’avons vu, si la mondialisation affecte désormais toute la planète, son
intensité varie d’un territoire à l’autre. Elle est maximale dans les métropoles et
villes mondiales au sein desquelles des populations peuvent cependant être peu
mondialisées, et très faible dans certains territoires « en marge ». On peut remarquer
que la mondialisation est d’abord le fait des acteurs des territoires qui forment les trois
pôles majeurs de la Triade : Amérique du Nord, Europe Occidentale et Asie orientale.
Cette organisation évolue de plus en plus dans le sens de la multipolarité. Les pays
émergents s’insérant de plus en plus dans les circuits de la mondialisation. Mais celleci laisse de nombreux territoires en marge. Mais cette tension planétaire entre
intégration en marginalisation se fait ressentir à toutes les échelles : au sein des
Etats, et même des villes mondiales.
Les territoires intégrés à la mondialisation
a. Les mécanismes de l’intégration :
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L’intégration des territoires à la mondialisation est avant tout le fait des firmes
transnationales (FTN). Elles sont actuellement 80'000, détiennent 800'000
filiales dans le monde et produisent 30'000 milliards de dollar de chiffre d’affaire
par an, soit deux fois le PIB américain. Elles sont responsables de 2/3 des flux
commerciaux dans le monde.
Elles sont par ailleurs les émettrices des Investissements Direct à l’Etranger
(IDE), ce qui explique la puissance des effets induits par leurs activités.
Parmi les 500 firmes les plus puissantes, 80% sont issues de la Triade. Ainsi,
même si elles sont transnationales, en privilégiant les délocalisations de la
production vers le sud afin d’abaisser les coûts de production, elles conservent
un fort ancrage national pour leurs fonctions les plus stratégiques et les plus
rémunératrice (sièges sociaux, recherche et développement, hautes
technologies). La puissance des FTN explique pourquoi la Triade est à l’origine
de 70% des IDE émis. Son attractivité économique explique qu’elle capte
toujours 48% des IDE entrants.
Avant même d’envisager ces facteurs d’attraction, une condition est
indispensable pour s’intégrer à la mondialisation : l’accessibilité. La
mondialisation est le triomphe des interfaces. Les interfaces peuvent être des
façades maritimes (espaces maritimes d’échanges entre un avant-pays
maritime et un arrière-pays continental) ou des interfaces frontalières
(espaces où se font des échanges entre des acteurs venus de pays différents).
Avec l’ampleur prise par le trafic maritime, la population mondiale se concentre
de plus en plus sur les littoraux. Quelques façades jouent un rôle majeur : la
façade de l’Asie orientale de Tokyo a Singapour est la plus active, mais les
cotes Est et Ouest des Etats-Unis se démarquent également, ainsi que le Nord
de l’Europe. Les interfaces terrestres sont des espaces frontaliers qui tirent
bénéfice des différences de salaires ou de législation entre deux Etats pour
développer les échanges. La plus active de ces interfaces est celle qui coincide
avec la frontière entre les EU et le Mexique : plus de 3000 maquiladoras se
sont installées du côté mexicain (maquiladoras : usines qui bénéficient d’une
exonération des droits de douane pour pouvoir produire à moindre coût des
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marchandises à partir de composants importés, puis la majorité de ces
marchandises est exporté).
L’accessibilité est aussi déterminée par la capacité à se connecter, plus que
d’être proches. L’existence de réseaux à hautes performances est donc un
autre
facteur
d’intégration :
hubs
aéroportuaires,
plates-formes
multimodales (lieux où les marchandises changent de mode de transport
grâce aux conteneurs standardisés), réseaux d’information à haut débit, réseau
autoroutier ou ferroviaire etc.
Les autres facteurs d’attractivité sont variés et déterminent l’intégration et les
fonctions dans le système mondialisé : un marché de consommation puissant
avec une population à haut niveau de vie, un haut niveau de formation et de
qualification de la main-d’œuvre ou au contraire main-d’œuvre nombreuse et
peu coûteuse, présence d’activités de recherche de pointe, stabilité politique,
sécurité juridique, fiscalité stable et basse, présence de matières premières…
Outre ces facteurs d’intégration économiques et politiques, la capacité à
émettre de l’information (presse économique lue par les grands décideurs :
Wall Street Journal (NY), The Economist (Londres), journaux généralistes les
plus réputés : New York Times, Le Monde, groupes télévisés qui opèrent dans
le monde entier : CNN, BBC) et à avoir un rayonnement culturel (universités
prestigieuses qui attirent des étudiants étrangers et participent à la diffusion
d’une culture mondiale dominante).
b. Anciens et nouveaux centres d’impulsion et leurs périphéries
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Comme nous l’avons vu avec les IDE, le Nord (au sens des économies
développées) conserve encore sa suprématie. Les pôles de la Triade
demeurent les centres d’impulsion de la mondialisation. Ces régions
concentrent les lieux de pouvoir et de création de richesse : sièges des
FTN, des gouvernements des grands Etats et des institutions internationales,
centres financiers. Les pays de la Triade produisent entre 55 et 65% de la
richesse mondiale, alors qu’ils ne comptent qu’un peu moins de 15% de la
population (70 à 75% si l’on y inclut la Chine qui malgré sa puissance
économique est exclue de la Triade à cause de la faiblesse de son
PIB/habitant). Cette domination s’explique par l’antériorité du développement et
de l’industrialisation dans ces pays, mais aussi par l’adoption précoce d’une
économie libérale. Dès 1945, ils sont membres du GATT, puis de l’OMC, tandis
que dans les années 1980, ils initient une nouvelle vague de libéralisation, la
« révolution néo-libérale » (Reagan-Thatcher) qui favorisent les privatisations
et déréglementations, contribuant ainsi à l’envolée des IDE dans leurs
territoires. Accolées à ces pôles de la Triade, des périphéries (régions
dominées par des centres) sont plus ou moins intégrées : Mexique et
Caraïbes pour les Etats-Unis, Europe de l’Est pour l’UE, Chine littorale pour
l’Asie, qui parfois deviennent des pays émergents.
Les pays émergents suivent une trajectoire plus ou moins rapide de
convergence avec les pays développés. Leur croissance, souvent très rapide,
attire les investissements massifs, à la fois causes et conséquences de leur
intégration dans la mondialisation. En 2011, ces pays attirent 61% des flux
d’IDE, concurrençant de plus en plus les pays du Nord. Parmi ces pays, les
BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) tiennent une place
particulière en raison de leur poids démographique et économique. Ils
représenteraient aujourd’hui environ 30% du PIB mondial contre 20% dans les
années 1990. Malgré des PIB élevés, le revenu par habitant reste souvent
assez faible, même si d’importantes classes moyennes apparaissent dans ces
pays. Ces Etats partagent certains objectifs : rester indépendants des grandes
puissances et obtenir un poids plus lourd dans la gouvernance mondiale. Ils
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fondent des organisations économiques régionales : Mercosur, ASEAN
(Association des Nations de l’Asine du Sud-Est)…
Les pays émergents sont localisés en priorité en Asie (Chine, Inde, Indonésie,
Malaisie, Thaïlande, Pakistan), en Amérique Latine (Brésil, Argentine, Chili,
Mexique) mais aussi au Proche et au Moyen Orient et en Afrique (Egypte, Iran,
Arabie Saoudite, Turquie, Maroc, Tunisie, Afrique du Sud, Nigéria, Cote
d’Ivoire). Ces périphéries intègrent souvent à leur tour d’autres territoires
marginalisés : les FTN chinoises investissent en Asie du Sud ou en Afrique
pour avoir de la main-d’œuvre encore meilleur marché… Ainsi, depuis les
années 2000, des FTN des pays du Sud émergent : aujourd’hui les 5e, 6e et 7e
plus riches sont chinoises. Ainsi, il y a une double relation d’interdépendance
(les pays émergents dépendent des IDE du Nord) et de concurrence entre la
Triade et les émergents.
A une autre échelle, d’autres petits territoires se sont fortement intégrés à la
mondialisation : ce sont les paradis fiscaux et les zones franches. Les paradis
fiscaux sont souvent situés en périphérie des pays de la Triade ou au cœur de
celle-ci (Suisse, Luxembourg). Ce sont souvent de petits territoires, parfois
insulaires, qui misent sur une législation peu contraignante pour attirer les flux
financiers et constituer un relai pour ceux-ci (voir la petite vidéo :
http://sylvaintillon.com/2013/05/dessine-moi-leco-paradis-fiscal/). Les petites
îles Vierges britanniques, avec une population de 100'000 habitants et une
taxe de 0% sur les profits, ont reçu par exemple 54 milliards de dollars d’IDE en
2011, ce qui les place au 8e rang mondial ! 40% des compagnies mondiales y
seraient enregistrées… Les paradis fiscaux sont donc des petits rouages de la
mondialisation, mais des rouages avec un impact majeur sur la nonredistribution des richesses. Dans un autre domaine, les zones franches sont
des territoires où les entreprises étrangères peuvent importer et exporter sans
droits de douane avec une fiscalité réduite pour une durée donnée. Nous avons
déjà mentionné le cas des Zones Economiques Spéciales (ZES) chinoises,
comme celle de Shenzhen, qui ont permis le décollage économique
spectaculaire du pays. Simple village de pêcheur en 1979, il est aujourd’hui une
mégapole de 10 millions d’habitants. Les zones franches s’installent
principalement sur les façades maritimes ou à proximité des points de passage
stratégiques. La zone franche de Colon, à l’entrée du canal de Panama, créée
en 1948, a servi de modèle à la diffusion de ce type de zone.
c. Les processus multiscalaires et la métropolisation
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A la tête de la mondialisation, au sein de la Triade (mais pas seulement) se
trouvent les grandes métropoles mondiales. Celles-ci sont en premier lieu
des centres de décision concentrant comme nul part ailleurs les fonctions de
commandement (économique, politique, culturel). Les métropoles mondiales
sont les principaux émetteurs de flux notamment informationnels et financiers.
Elles concentrent les services de très haut niveau (nouvelles technologies de
l’informations et de la communications, innovations dans le domaine du génie
génétique…) Leurs hubs leur garantissent une accessibilité maximale : ce sont
les lieux les plus facilement accessibles de la Terre. Les quatre villes globales
principales sont New York, Londres, Tokyo et Paris.
Ces métropoles mondiales sont reliées entre elles, échangent des flux. Elles
ont un impact multiscalaire (c’est-à-dire sur plusieurs échelles). A l’échelle
régionale, elles se rassemblent en mégalopoles (une pour chaque pôle de la
Triade). A l’échelle mondiale, ces mégalopoles, reliées également à d’autres
métropoles mondiales (Shanghai, São Paulo, Singapour, Mumbai, Hong
Kong…), forment l’archipel mégalopolitain mondial (AMM), à l’origine des
principaux flux qui structurent le monde.
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A l’échelle locale, les métropoles mondiales témoignent de ces phénomènes de
concentration métropolitaine ou métropolisation : les centres-villes,
baptisés CBD (Central Business District) aux EU ou simplement quartiers
d’affaires (comme La Défense à Paris), concentrent les fonctions de
commandement. Lieux de pouvoir, ce sont des lieux qui manient les symboles,
comme les gratte-ciels et autres tours géantes, devenus des hauts lieux de la
mondialisation.
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