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LIGUE INTERNATIONALE DU DROIT DE LA CONCURRENCE
INTERNATIONAL LIGUE OF COMPETITION LAW
INTERNATIONALE LIGA FÜR WETTBEWERBSRECHT
CONGRES DE VIENNE 2009
QUESTION B:
Quels sont les critères permettant de qualifier de déloyales les copies ?
Quelles sont les interdictions et les sanctions appropriées ?
Rapport national luxembourgeois préparé par :
Nicolas DECKER et Marianne DECKER
avocats à la Cour
Cabinet d’avocats DECKER, BRAUN & POOS
1. Le champ de la protection
1.1. Existe-t-il des protections accordées au producteur sur les produits et/ou les
services commercialisés en dehors de la protection au titre de la propriété
intellectuelle ?
La loi du 30 juillet 2002 réglementant certaines pratiques commerciales, sanctionnant la
concurrence déloyale et transposant la directive 97/55/CE du Parlement Européen et du
conseil modifiant la directive 84/450/CEE sur la publicité trompeuse afin d’y inclure la
publicité comparative (ci-après dénommée LCD) accorde une protection au producteur
pour ses produits et/ou services commercialisés en dehors de la protection au titre de la
propriété intellectuelle.
L’article 14 stipule que « Commet un acte de concurrence déloyale toute personne qui
exerce une activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale qui, par un acte
contraire soit aux usages honnêtes en matière commerciale, industrielle, artisanale ou
libérale, soit à un engagement contractuel, enlève ou tente d’enlever à ses concurrents ou
à l’un d’eux une partie de leur clientèle ou porte atteinte ou tente de porter atteinte à leur
capacité de concurrence. »
La copie d’un produit ou d’un service est sanctionnée par le biais de deux notions, la
confusion et le parasitisme.
1
En effet, celui qui crée ou tente de créer la confusion entre sa personne, son établissement,
ses produits ou ses services et la personne, l’établissement, les produits ou les services
d’un concurrent commet un acte de concurrence déloyale.1
Par ailleurs, d’après la jurisprudence, « Le parasitisme économique se matérialise par
l’imitation des idées ou du travail d’autrui sans rien dépenser. »2
Finalement, en matière de publicité, les articles 17 et 18 de la LCD accordent également
une certaine protection contre la copie.
L’article 17 (1) stipule : « … on entend par publicité trompeuse : toute publicité qui,
d’une manière quelconque, y compris sa présentation, induit en erreur ou est susceptible
d’induire en erreur les personnes auxquelles elle s’adresse ou qu’elle touche et qui, en
raison de son caractère trompeur est susceptible d’affecter leur comportement
économique ou qui, pour ces raisons, porte préjudice ou est susceptible de porter
préjudice à un concurrent. »
Concernant la publicité comparative, l’article 18(2) stipule : « …la publicité comparative
est licite dès lors que les conditions suivantes sont satisfaites :
d) elle n’engendre pas de confusion sur le marché entre l’annonceur et un concurrent ou
entre les marques, noms commerciaux, autres signes distinctifs, biens ou services de
l’annonceur et ceux d’un concurrent ; ».
La protection au titre de la concurrence déloyale peut-elle être utilisée :
a. en complément à une action en contrefaçon ?
b. en substitut à une action en contrefaçon ?
Il est de principe que si un acte n’est contraire aux usages honnêtes en matière
commerciale que parce qu’il constitue en même temps une contrefaçon ou parce que
l’action constitue un moyen de défendre indirectement un droit de propriété intellectuelle,
la demande se heurtera à l’incompétence du tribunal saisi.3
La protection au titre de la concurrence déloyale ne peut donc pas être accordée en
complément à une action en contrefaçon dès lors que le demandeur se base sur son droit
de propriété intellectuelle.
Par contre, si le demandeur, titulaire d’un droit de propriété intellectuelle, fonde son
action non pas sur la contrefaçon de son droit privatif mais sur la LCD sans invoquer son
droit de propriété intellectuelle, l’action en concurrence déloyale sera déclarée recevable.
1
Article 17 de la loi du 27 novembre 1986 sur la concurrence déloyale ; loi abrogée mais cf. Documents
parlementaires 4844, p.10, sub. 3)
2
Arrêts de la Cour d’appel des 21 mars et 14 novembre 2007, numéros 31955 et 32297 du rôle et références y
citées, non publiés.
3
Pasicrisie luxembourgeoise 29, pages jaunes, 76
2
Ainsi, la copie servile de plans et modèles peut être sanctionnée par une action en
concurrence déloyale si le demandeur ne fait pas valoir de droit privatif sur les dits plans
et modèles tel que le droit d’auteur, mais se borne à prouver que la copie constitue un acte
de concurrence déloyale.4
Par ailleurs, dans une affaire concernant la copie d’une étiquette d’un produit, protégée
par le biais d’une marque figurative, la Cour d’appel a décidé qu’ « il résulte en effet des
actes de procédure que » la requérante « a fondé son action sur le règlement grand-ducal
du 23 décembre 1974 (aujourd’hui la LCD) pour faire cesser immédiatement des actes
contraires aux bons usages commerciaux sans qu’il soit établi qu’elle ait voulu
poursuivre sous le couvert d’une action en cessation la protection de sa marque… ».5
Cependant, une atteinte à un droit de propriété intellectuelle ne constitue pas per se un
acte de concurrence déloyale. Il faut prouver que la copie constitue un acte déloyal
conformément à l’article 14 de la LCD.
Dans le même ordre d’idées, la copie d’un produit ou d’un service non protégé par un
droit de propriété intellectuelle peut uniquement être sanctionnée s’il s’agit d’un acte de
concurrence déloyale, le fait de copier n’étant pas illicite per se.
1.2. Quelles actions peuvent être déposées ?
-
Action en cessation devant le Président de la chambre commerciale du Tribunal
d’arrondissement (article 23 de la LCD) avec possibilité de publication du jugement.
Action en concurrence déloyale devant le juge du fond (Tribunal d’arrondissement)
avec possibilité de dommages et intérêts (Articles 1382 et 1383 du Code civil).
Plainte pénale lorsqu’un premier jugement obtenu sur base de l’article 23 de la LCD
coulé en force de chose jugée n’est pas respecté.
L’action la plus utilisée et la plus efficace est l’action en cessation prévue par l’article 23
de la LCD.
1.3. La liberté du commerce et de l’industrie n’est-elle pas une limite à l’appréciation
du caractère déloyal de la commercialisation de produits similaires ?
Le principe de la liberté du commerce et de l’industrie est inscrit à l’article 11(6) de la
Constitution luxembourgeoise du 17 octobre 1868.
Le fait d’imiter ou de copier un concurrent n’est pas illicite en soi mais fait partie du libre
jeu de la concurrence et de la liberté du commerce et de l’industrie.
Ordonnance du Président de la chambre commerciale du Tribunal d’arrondissement de Luxembourg du 11 avril
2008, n° 505/08, non publiée.
5
Cour d’appel de Luxembourg, 12 février 1982, n° 6048 du rôle
4
3
Ce n’est que lorsque la loi a octroyé un droit de propriété intellectuelle à quelqu’un ou
qu’un concurrent commet un acte de concurrence déloyale tel que défini par la LCD que
la liberté du commerce et de l’industrie, notamment la liberté de copier est restreinte.
En outre, la Cour d’appel de Luxembourg a précisé que : « Bien qu’en vertu de l’article
11 de la Constitution la liberté du commerce soit une matière réservée qui n’est pas
susceptible d’être réglementée par voie d’arrêté, des restrictions à cette garantie peuvent
toujours être établies par le pouvoir législatif. »6
A partir du moment où la commercialisation du produit similaire rentre dans le champ
d’application de la LCD et de ses conditions, la liberté du commerce et de l’industrie ne
constitue pas une limite à l’appréciation du caractère déloyal.
2. Nature de l’action
2.1. L’action visant à s’opposer à la commercialisation de copies est-elle une action
civile, pénale ou administrative ?
L’action en cessation est de nature civile.
Elle est introduite devant le Président de la chambre commerciale du Tribunal
d’arrondissement, même en l’absence de preuve d’une perte ou d’un préjudice réel ou
d’une intention ou d’une négligence de la part de l’annonceur, selon les formes du référé
conformément aux articles 932 à 940 du Nouveau Code de procédure civile. (article 23 de
la LCD)
Même si l’action est introduite et jugée selon les formes du référé, la décision rendue par
le Président de la chambre commerciale du Tribunal d’arrondissement est considérée
comme une décision au fond.
Cette action est rapide et permet d’obtenir une interdiction endéans les deux à trois
semaines.
Le Président de la chambre commerciale du Tribunal d’arrondissement peut également
ordonner l’affichage et la publication de sa décision mais il ne peut pas condamner le
défendeur au paiement de dommages et intérêts.
Ceux-ci peuvent uniquement être obtenus dans le cadre d’une procédure au fond,
procédure qui n’est quasiment jamais intentée au Luxembourg.
2.2. S’agit-il d’une action effective ? Donne-t-elle lieu à un nombre significatif de
décisions dans votre pays ?
L’action en cessation est très effective alors qu’elle permet d’obtenir une décision au fond,
c'est-à-dire une interdiction de l’acte de concurrence déloyale endéans deux à trois
semaines, décision qui est exécutoire nonobstant appel.
6
Cour d’appel de Luxembourg, 26 octobre 1955, Pasicrisie luxembourgeoise 16, p.397
4
Compte tenu de la taille et de la population du pays, un nombre significatif de décisions
sont rendues en la matière au Luxembourg chaque année.
3. Modalités de l’action
3.1. Qui est titulaire de l’action : les fabricants, les distributeurs et/ ou les
consommateurs ?
D’après l’article 23 de la LCD, l’action en cessation peut être introduite à la requête de
toute personne, d’un groupement professionnel ou d’une association de consommateurs
représentée à la commission des prix.7
Cependant, il est important de souligner que la jurisprudence luxembourgeoise est, pour
l’instant encore très stricte dans l’interprétation de la notion de « concurrent » de l’article
14 de la LCD.
En effet, la jurisprudence définit la relation de concurrence comme « un état de fait qui se
présente seulement lorsque deux commerçants, industriels ou artisans, présentent
directement à tout ou partie d’une même clientèle, pour la satisfaction des mêmes besoins
de celle-ci, des services ou des produits comparables entre eux ».8
Le fabricant/distributeur peut en principe agir contre un autre fabricant/distributeur.
Cependant, le fabricant/producteur d’un produit ne peut pas agir en concurrence déloyale
contre un commerçant détaillant alors que les deux commerçants ne se meuvent pas sur le
même niveau de la vie économique et ne s’adressent pas à une clientèle identique.9
Pour la même raison, l’action en cessation n’est pas ouverte au consommateur individuel.
Une dérogation a cependant été faite pour les groupements professionnels et les
associations de consommateurs.
Par contre, la toute nouvelle loi du 29 avril 2009 relative aux pratiques commerciales
déloyales (…), ouvre une action en cessation très similaire à celle de la LCD aux
consommateurs victimes d’une pratique commerciale qui a notamment créé chez eux une
confusion.10
En effet, l’article 4(2) dispose que : « Est également réputée trompeuse la pratique
commerciale si (…) elle implique :
a) toute activité de marketing concernant un produit, y compris la publicité comparative,
créant une confusion avec un autre produit, marque, nom commercial ou un autre
signe distinctif d’un concurrent ; (…) »
Commission créée par le Règlement du 20 décembre 1999 concernant l’établissement de l’indice des prix à la
consommation, publié au Mémorial A N° 151, du 29 décembre 1999
8
Pasicrisie luxembourgeoise 28, pages jaunes, 73
9
Pasicrisie luxembourgeoise 28, pages jaunes, 74 et 75
10
Publiée au Mémorial A N° 88 du 30 avril 2009
7
5
En outre, l’article 6 stipule que : « Les pratiques commerciales trompeuses ci-après sont
réputées déloyales en toutes circonstances :
13) Promouvoir un produit similaire à celui d’un fabricant particulier de manière à
inciter délibérément le consommateur à penser que le produit provient de ce même
fabricant alors que tel n’est pas le cas. (…) »
Il est à noter que le champ d’application de la loi est limité aux relations entre
professionnels et consommateurs.11
3.2. Qui est le défendeur à l’action : le fabricant, le distributeur, le grossiste ou le
revendeur au détail ?
Le fabricant, le distributeur, le grossiste ou le revendeur au détail peuvent tous être
défendeurs dans une action à condition qu’ils soient les concurrents directs du demandeur
tel que défini ci-dessus au point 3.1.
Dans la majorité des cas, s’agissant de copies ou d’imitations, le défendeur à l’action sera
le fabricant/distributeur.
3.3. Y a-t-il des délais pour déposer l’action ?
Il n’y a pas de délai pour intenter une action en cessation et l’action reste recevable même
après l’écoulement d’un délai prolongé.
Seule la prescription décennale joue en la matière.
Par contre, lorsque l’acte incriminé a cessé, l’action devient en principe irrecevable, sauf
lorsque le renouvellement de cet acte est à craindre.12
4. Modalités d’appréciation du caractère déloyal d’une copie
Quels sont les éléments d’appréciation permettant de considérer qu’une copie est
déloyale ?
Une copie est considérée comme déloyale si elle crée la confusion dans l’esprit de la
clientèle à laquelle elle s’adresse ou si elle constitue un acte de parasitisme économique.
11
12
Article 1er de la nouvelle loi et Documents parlementaires N° 5881B, Avis du Conseil d’Etat
Pasicrisie luxembourgeoise 28, pages jaunes, 79
6
Quels éléments doivent être établis ?
Le parasitisme économique
La Cour d’appel de Luxembourg définit « comme parasitisme économique l’ensemble des
comportements par lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre
afin de tirer profit, sans rien dépenser, de son savoir-faire, fruit d’un effort intellectuel et
d’investissements.
Le critère déterminant du parasitisme économique est une reprise plagiaire se nourrissant
de la substance et de la forme de l’œuvre de la victime, ce qui revient à s’immiscer dans
son sillage.
Le parasitisme économique se matérialise par l’imitation des idées ou du travail d’autrui
sans rien dépenser.
De tels agissements permettent à l’entreprise parasite de faire l’économie de frais
financiers et intellectuels pour la commercialisation de ses produits. »13
Il y a parasitisme du moment que transparaît clairement chez celui qui copie l’origine de
l’œuvre parasitée. Le parasitisme peut donc s’opérer non seulement par copiage servil
mais aussi par simple copiage, par imitation, par plagiat, par reprise, comme par exemple
des données essentielles.
Le juge vérifie donc principalement s’il y a :
-
copie d’un produit ou service,
ayant nécessité un savoir-faire, un effort intellectuel ou des investissements,
permettant de faire l’économie des frais de conception ou de profiter de la renommée
du concurrent.
Par exemple, il a été décidé que la copie servile d’un plan relatif à la construction d’une
machine utilisée dans les hauts fourneaux constitue un acte de parasitisme économique et
donc de concurrence déloyale.14
A noter que le parasitisme peut exister indépendamment de tout risque de confusion dans
l’esprit des différents acteurs économiques entre l’œuvre de la victime et celle du parasite.
La mise en cause du parasite est également indépendante de l’originalité du bien
parasité.15
Arrêts de la Cour d’appel des 21 mars et 14 novembre 2007, numéros 31955 et 32297 du rôle et références y
citées, non publiés.
14
Ordonnance du Président de la chambre commerciale du Tribunal d’arrondissement de Luxembourg du 11
avril 2008, n° 505/08, non publiée.
15
Cour d’appel de Luxembourg, 21 mars 2007, n° 31955 du rôle, non publié.
13
7
La confusion
En copiant le produit ou le service d’un concurrent, le commerçant crée ou tente de créer
la confusion de la clientèle concernée quant à l’origine des produits ou services ou quant
aux établissements eux-mêmes.
Cf. point 4.2 ci-dessous pour le surplus.
A qui incombe la charge de la preuve ?
La charge de la preuve incombe au demandeur.
Existe-t-il des présomptions légales/ juridictionnelles/ autres (réfutables) ?
Non.
4.1. Copie servile
4.1.1. Est-il suffisant de démontrer la similitude des produits pour caractériser une
déloyauté ou est-ce que d’autres éléments sont nécessaires (un certain degré
d’individualité du produit original, marché d’introduction du produit
original, exploitation de la réputation du produit original, économies des
coûts de développement, copie intentionnelle) ?
En principe, il n’est pas suffisant de démontrer la similitude de deux produits ou services
pour caractériser une déloyauté.
En effet, il faut que le produit ou service copié soit le fruit d’un investissement financier
ou intellectuel ou qu’il y ait un risque de confusion.
4.1.2. Le fait que le produit copié dépende exclusivement d’éléments techniques ou
fonctionnels (concrètement, le design d’un produit) est-il pertinent pour
décider si la reproduction est déloyale ?
Oui. Si le produit copié dépend exclusivement d’éléments techniques ou fonctionnels, la
reproduction ne peut pas être déloyale.
8
4.2. Risque de confusion
4.2.1. Le risque de confusion est-il un élément pris en compte, et dans quelle
mesure ?
Le risque de confusion peut être pris en compte mais n’est pas une condition nécessaire
pour conférer à un acte un caractère déloyal.
Le risque de confusion est cependant expressément exigé pour l’application de l’article
18(2) d) de la LCD en matière de publicité comparative et implicitement pour
l’application de l’article 17(1) de la LCD en matière de publicité trompeuse.
Cf. point 1.1 ci-dessus
4.2.2. Comment s’apprécie la confusion (approche globale d’ensemble, en fonction
des différences/ressemblances) ?
La confusion doit être appréciée de manière synthétique, en tenant compte de l’impression
globale que le client moyen normalement prudent et diligent a des produits ou services
concernés.
Il faut se demander si cette impression globale présente de tels points de similitude avec
l’impression globale que le client moyen a gardée des produits ou services dont la
protection est demandée qu’il y a donc dans son esprit une confusion .16
4.2.3. L’appréciation est-elle liée à la perception d’un consommateur moyen, d’un
professionnel ou d’un professionnel averti ?
L’appréciation est liée à la perception de la clientèle concernée par les biens et services en
question.
Il s’agira ou du consommateur ou du professionnel moyen normalement prudent et
diligent.17
4.2.4. Comment peut être rapporté la preuve du risque de confusion (attestations,
sondages, autres) ? (Est-ce suffisant de démontrer le risque de confusion par
rapport à une seule personne ?)
Il n’existe pas de règle générale concernant la preuve du risque de confusion.
Le risque de confusion est en principe apprécié au cas par cas par le juge ; des attestations
testimoniales et des sondages pourront être pris en compte.
16
17
Cour d’appel de Luxembourg, 20 mars 2002, n° 16622 du rôle, non publié
Cf. note de bas de page 14 ci-dessus
9
4.3. Dévalorisation
Une qualité inférieure ou des prix plus bas peuvent-ils constituer un critère de
déloyauté ?
Une qualité inférieure ou des prix plus bas ne constituent pas un critère de déloyauté en
soi.
Par contre, dans certains cas, une qualité inférieure ou des prix plus bas peuvent constituer
un élément parmi d’autres permettant de qualifier un acte de déloyal.
Par exemple, dans des cas de concurrence parasitaire où le parasite, en copiant le travail
d’un concurrent, économise des frais et peut de ce fait travailler à moindre prix, ce qui
accentue la dérive de la clientèle et la déloyauté de l’acte.18
5. Modalités de réparation
5.1. La cessation et le retrait des produits au stade de la distribution sont-ils
possibles ? Y compris en procédure d’urgence provisoire ?
L’action en cessation prévue par l’article 23 de la LCD permet au Président de la chambre
commerciale du Tribunal d’arrondissement d’ordonner la cessation des actes contraires
aux dispositions des articles 1 à 22 de la LCD, ceci même en absence de preuve d’une
perte ou d’un préjudice réel ou d’une intention ou d’une négligence.
La cessation peut être ordonnée au stade de la distribution.
Le retrait des produits n’est par contre pas prévu par la LCD et ne peut partant pas être
ordonné par le juge.
5.2. Comment s’apprécie la réparation financière (la victime doit-elle prouver une
baisse de chiffre d’affaires, une atteinte à son image de marque, ou un
préjudice commercial plus général) ?
La réparation financière ne peut être obtenue que dans le cadre d’une action au fond,
basée sur les articles 1382 et 1383 du Code civil.
Il doit d’emblée être relevé que la plupart des « victimes » d’un acte de concurrence
déloyale se bornent à demander la cessation de l’acte incriminé sous peine d’astreinte sur
base de l’article 23 de la LCD ainsi qu’une indemnité de procédure19 permettant de
couvrir une partie des frais d’avocat.
Ordonnance du Président de la chambre commerciale du Tribunal d’arrondissement de Luxembourg du 11
avril 2008, n° 505/08, non publiée.
18
Demande basée sur l’article 240 du Nouveau Code de procédure civile qui dispose : « Lorsqu’il paraît
inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le
juge peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine. »
19
10
La procédure au fond, beaucoup moins rapide et plus coûteuse, n’est pratiquement jamais
utilisée.
En tout état de cause, pour obtenir réparation, le demandeur devra prouver une faute ou
négligence du défendeur, son dommage ainsi qu’un lien de causalité entre la faute ou
négligence et son dommage.
Il est en outre très difficile de prouver avec précision le dommage subi (perte de clientèle,
manque à gagner, atteinte à la renommée).
Le dommage est de ce fait souvent évalué ex aequo et bono par les juges.
La réparation du préjudice prend-elle en compte les bénéfices réalisés par le
concurrent déloyal ?
La réparation du préjudice ne prend pas en compte les bénéfices réalisés par le concurrent
déloyal.
5.3. La publication judiciaire est-elle un moyen principal ou complémentaire de
réparation ? Est-elle possible en procédure d’urgence provisoire ?
La publication constitue un moyen complémentaire de réparation.
Elle peut être ordonnée dans le cadre de l’action en cessation en vertu de l’article 24 de la
LCD qui dispose : « L’affichage de la décision peut être ordonné à l’extérieur des
installations de vente du contrevenant et aux frais de celui-ci. La décision précise la durée
de l’affichage. Elle peut également ordonner la publication, en totalité ou par extrait aux
frais du contrevenant, par la voie des journaux ou de toute autre manière. »
Il ne peut être procédé à l’affichage et à la publication qu’en vertu d’une décision
judiciaire coulée en force de chose jugée.
6. Evolution souhaitable
Etes-vous favorable à une évolution législative, réglementaire ou jurisprudentielle
afin de renforcer les protections accordées dans votre système juridique ?
Si oui, dans quels cas et sur quels points ?
La notion de « relation concurrentielle » est interprétée de manière assez restrictive au
Luxembourg (cf. point 3.1. ci-dessus).
Il serait souhaitable que cette notion soit assouplie, en permettant également les actions de
concurrence déloyale dans les relations de commerce verticales.
Luxembourg
4 mai 2009
11
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