Peudenier Stéphanie Froeliger Alizée 19/03/12 Cancérologie Pr Karine Tarte BASES BIOLOGIQUES DE L’IMMUNOTHERAPIE DES CANCERS Introduction : On étudie ici le rapport immunologie-cancérologie. Comment développer une immunothérapie pour booster la réponse immune (RI) anti-tumorale ? Expérience chez la souris : Des études montrent que si on prend une souris, qu’on lui implante une tumeur et que, par la suite, on lui injecte des Lymphocytes T (LT) spécifique de cette tumeur, alors ces derniers sont capables de se multiplier dans les ganglions drainants, proches de la tumeur, d’aller sur le site de celle-ci afin de la détruire. Expérience chez l’homme : D’autres travaux sur l’Homme, notamment dans le cadre du cancer colorectal prouvent que dans le cadre de l’immunité anti-tumorale, les marqueurs de bon pronostic (moins de rechutes et de métastases) sont : -la présence de nombreux LT CD8 cytotoxiques (via l’action du granzyme) -une forte réponse Th1 (qui booste l’immunité cellulaire contrairement à Th2) Donc si on a une réponse T cytotoxique efficace dans la tumeur, elle favorise l’éradication de la tumeur. On a bien la preuve que in vivo chez l’homme, la réponse immunologique a un rôle important à jouer en oncologie. On veut donc amplifier cette réponse immunologique. I. L’immunothérapie : Il en existe 3 types : l’immunothérapie passive l’immunothérapie adoptive l’immunothérapie active A. L’immunothérapie passive (anticorps) : Utilisation d’anticorps dirigés contre des antigènes exprimés à la surface de l’ensemble des cellules tumorales. Elle est majoritaire (médicaments utilisés aujourd’hui en dérivent). Dans l’idéal, les AC doivent être : stables : il ne doit pas y avoir de variation de l’expression au cours de la maladie. homogènes : toutes les cellules tumorales doivent exprimer l’antigène les plus spécifiques possible : pour qu’il n’y ait pas de destruction des cellules non cancéreuses. On utilise souvent des IgG1 car ce sont des AC capables d’induire efficacement une réponse antitumorale grâce à leur récepteur CD 16, 32, 64 qui médient la phagocytose et active l’ADCC (cytotoxicité à médiation cellulaire dépendante des anticorps) Pendant longtemps, on a travaillé avec des anticorps murins (de souris). Problème : l’homme s’immunise contre cet anticorps reconnu comme étranger, et lors de la deuxième injection, l’anticorps est totalement éliminé. Révolution de l’utilisation des anticorps : les anticorps chimères (60-70%humain) : seule la partie variable est murine, la partie constante est d’origine humaine. Donc moins d’immunisation et une meilleure interaction avec les effecteurs de l’immunité (récepteurs Fc des macrophages par exemple). La partie constante est d’origine humaine, elle est donc moins immunogène. Les anticorps humanisés (90-95% humain) : seules les régions hypervariables (CDR) sont d’origine murine, tout le reste est d’origine humaine. A peu près équivalent aux anticorps chimères. B. L’immunothérapie adoptive (effecteurs) : On utilise des cellules qui ciblent directement la tumeur. Les effecteurs sont cellulaires, et sont injectés au patient : LT conventionnels (a, b, cytotoxiques…) LT non conventionnels (NK) Leur but est de détruire directement la tumeur. C. L’immunothérapie active : Même principe que les vaccins. On veut faire émerger une RI in vivo. On injecte alors des AC sous forme immunogène, soit avec des adjuvants, soit directement sur des cellules dendritiques. Néanmoins cette méthode est trop couteuse II. L’immunothérapie passive : Les anticorps antitumeur : Ils sont utilisés dans beaucoup de cancers et marchent bien. Cependant, ils font partie des dix médicaments les plus chers sur le marché. Exemple : Anti-CD20 et Lymphomes : Les lymphomes touchent les LB exprimant CD20, les patients développent des anticorps antiCD20. CD20 : expression stable sur tous les LB, normaux ou tumoraux absent des plasmocytes (heureusement car sinon on tuerait toutes les cellules productrices d’anticorps) et des cellules souches hématopoïétiques (CD34) : donc, on garde la mémoire immunologique des plasmocytes long survivants de la moelle, et de plus il y a préservation de l’hématopoïèse, ainsi qu’une immunité de base par les plasmocytes. Anticorps anti-CD20 : Rituximab (MabThera®), le plus fréquent, a été utilisé au moins une fois chez tous les patients ayant un lymphome. Zevalin (couplé avec un radioélément : Yttrium 90) . Mécanisme d’action : lyse par les cellules NK : les NK fixent le Rituximab par CD16 et lysent la cellule tumorale. Néanmoins, chez quelques patients, l’efficacité est faible : en effet 20% des personnes ont un polymorphisme pour CD16, et CD16 peut être moins affin pour les IgG, donc la réponse au traitement est moins bonne. c’est une IgG donc elle active aussi le complément : lyse par le complément. cytotoxicité directe faible (elle active directement la mort de la cellule). possibilité de synergie avec la chimiothérapie. L’efficacité est liée à la densité de CD20 : plus il y a de CD20 et meilleure est l’efficacité du traitement. . Ce traitement est beaucoup utilisé dans les lymphomes. III. L’immunothérapie adoptive : A. Les TIL : Lymphocytes Infiltrant la Tumeur : Histoire ancienne : En 1985, premiers essais d’injection d’IL-2 chez des patients atteints de cancer : mais la molécule est toxique et mal tolérée, pas de guérison. En 1988, premiers essais TIL (mélanomes et cancers du rein). Problème : peu efficace. Actualité : regain d’intérêt On sait que le traitement marche dans certains cas : Faible masse tumorale (exemple : après chirurgie) . Capacité d’expansion in vivo : quand on injecte des LT, il faut qu’ils puissent se multiplier donc on fait une lymphodéplétion au préalable avec une drogue de chimiothérapie afin de détruire les LT du patient pour que ces LT (TIL) aient la place de se multiplier in vivo en utilisant les cytokines et les facteurs de croissance du patient. Coinjection TCD4 et TCD8, car si on injecte seulement des T cytotoxiques, on n’a pas de mémoire immunologique, donc il faut aussi des TCD4. Ces protocoles peuvent marcher car il y a des épitopes spreading : en effet, les LT détruisent la tumeur qui libère alors des antigènes, ceux-ci génèrent alors une seconde réponse immunitaire et ainsi de suite… C’est une dissémination antigénique, et la réponse immunitaire est dirigée contre d’autres antigènes que ceux que l’on a injecté au départ. plusieurs protocoles en cours (Nantes, USA) B. Les T redirigés On cible des LT qui vont détruire la tumeur. Notamment utilisés chez les enfants atteints de Leucémies aïgues. On prélève les cellules du donneur → amplification in vitro avec de l’IL-2 et des LB infectés par l’EBV (Ebstein-Barr Virus) → transfert dans les LT des molécules ciblant les Ag tumoraux (ici des anti-CD 19) → injection post-greffe des LT ciblant les blastes LAL CD19+. De plus, on a une persistance de l’effet anti-tumoral des LT redirigés via la stimulation par l’EBV. C’est à-dire que chez le patient, les LT porteurs d’un antiEBV peuvent se multiplier grâce à la présence de LB résiduels porteurs de l’EBV qui sont immortels. Leur contact va induire la stimulation des LT. C. Les Tγδ : Cellules présentes en très faible proportion dans le sang (0,5%). Elles sont peu variables et reconnaissent les phosphoantigènes. Il existe deux grands types de stratégies : Soit on prend les cellules sanguines du malade avec T.d. On les cultive in vitro avec BrHPP qui est un analogue de l’IPP et des IL2. Les T.d s’amplifient et on les réinjecte chez le patient. La deuxième technique est encore plus simple. On injecte directement au malade BrHPP et Il2 donc l’amplification se fait in vivo. Cette technique présente beaucoup d’intérêt car les tumeurs sont très sensibles à l’activité des LTɣδ. De plus les LTɣδ expriment le CD19, il y a donc possibilité de synergie avec les AC monoclonaux. Ces deux stratégies sont utilisées dans des cancers hématologiques. L’objectif est la destruction des cellules tumorales. D. Les NK allogéniques, application à la LAM (leucémie aigue myéloïde) : Ces cellules sont très difficiles à expandre in vitro ce qui diminue leur possibilité d’utilisation. Néanmoins, elles restent les cellules majeures responsables de l’ADCC. innovation- transfert CD16 dans LT anti-EBV -ADCC efficace+ réactivation possible par l’EBV Dans le cadre des LAM, on prélève des LT, LB et NK du donneur → déplétion en CD3 (si on n’enlève pas préalablement les LT et qu’on ajoute de l’IL-2 ce sont les LT qui vont se multiplier et non les NK) puis ajout d’il-2 → amplification des NK → réinjection de cellules NK au patient + chimiothérapie. Mais on note un effet secondaire majeur, 1/20 des patients a fait un syndrome lymphoprolifératif EBV à partir des LB contaminants et est décédé. Il a fallu modifier le protocole. Pour que les cellules NK fonctionnent, elles doivent s’amplifier chez le patient, d’où une immunodéplétion préalable. De plus, il ne faut pas que les NK réinjectées possèdent des récepteurs KIR au HLA classe 1de la tumeur car cela induit une inhibition dans la cellule NK. Nécessité d’un KIR mismatch. On purifie donc les cellules NK→ amplification par IL-2→ réinjection au patient + chimiothérapie. Les NK sont difficiles à faire proliférer, il ne suffit pas de mettre de l'IL2 pour les faire proliférer. On enlève les TCD3, on met de l'IL2, cela donne une prolifération des NK que l'on va injecter au patient. La deuxième possibilité est que l'on enlève les TCD3, on purifie les NK puis on les fait proliférer, cette méthode est en cours d'étude donc on ne connait pas les résultats encore. E. Immunothérapie adoptive+Ac, l'ADCC redirigée: Leur multiplication in vitro est difficile. Intérêt théorique : associer les NK avec un anticorps anti-tumeur pour avoir une ADCC. Il faut donc une cellule capable d’ADCC. On prélève des LT anti-EBV → amplification et rajout de CD16 et Rc au fragment constant des IgG → réinjection et obtention d’une lyse tumorale. Ainsi les AC détruisent la tumeur via les interactions avec les effecteurs IV. L’immunothérapie active, antigènes tumoraux : L’antigène tumoral idéal : (4 à 5 pour en trouver) est un antigène partagé c’est-à-dire présent chez plusieurs patients (en effet il faut 10 ans pour identifier un antigène tumoral) il faut qu’il ne soit exprimé que par la tumeur : expression tumeur-spécifique, pour éviter la destruction des tissus sains il faut qu’il soit présent dès le début de la maladie : induit précocément il faut qu’il joue un rôle dans la cancérogénèse, en effet si l’antigène correspond à une protéine indispensable au processus cancéreux, il n’y aura pas de perte de cet antigène (si on lutte contre un antigène n’ayant pas de fonction dans la cancérogénèse, la tumeur va sélectionner des mutants résistants). Antigènes peptidiques : Injection de plusieurs peptides (plusieurs antigènes) pour minimiser l’échappement tumoral et éviter la sélection de mutants résistants. Des antigènes qui sont reconnus par les TCD4 et qui activent les TCD4 : antigènes TCD4 indispensables . Modification des peptides pour qu’ils soient plus affins pour le HLA. Le choix de l’adjuvant est important : - L’Adjuvant de Freund (IFA) : dans tous les vaccins . - l’induction d’une réponse immunitaire . - Les ligands des TLR qui activent les DC, et donc la prise en charge de l’antigène. Problème : il faut connaître l’antigène et deplus il y a la restriction HLA : hétérogénéité de l’HLA. Chez les Caucasiens, HLA-A2 est majoritaire, donc les protocoles sont faits pour les HLA-A2 (problème pour les personnes qui ne sont pas HLA-A2). Pour palier à cela : Antigènes sous forme d'acides nucléiques: DNA vaccine ou virus recombinants Plus facile et plus rapide à produire que les protéines Pas de restriction HLA Problème : immunodominance d’Ag viraux et Ac anti-virus : en effet, la réponse antivirale dominante peut gêner l’efficacité thérapeutique V. Les DC (cellules dendritiques) : Ce sont des cellules rares, hétérogènes. 1ers essais avec DC purifiées En 1994, on découvre que l'on peut obtenir des DC à partir de monocytes ou de CD 34. Avantages théoriques : activation de LT naïfs activation de TCD4, TCD8 (mémoire) et de NK capables d’inhiber les T régulateurs grande variété de protocoles possibles Inconvénients potentiels : DC peuvent être tolérogènes, Besoin de modifier leur production. Rappels : fonctionnement : Les DC immatures en périphérie possèdent plein de récepteurs aux antigènes : elles fixent l’antigène et reçoivent le signal de danger. Elles migrent vers les ganglions car elles possèdent CCR7. Elles ont toutes des molécules de costimulation et le CMH pour activer les LT. On peut donc faire des essais thérapeutiques. Prélèvement d’une cytaphérèse au patient : c’est un prélèvement sanguin qui passe dans une centrifugeuse : on récupère les Globules Blancs et on réinjecte le plasma et les Globules Rouges au patient. Ensuite, on récupère les monocytes (cellules assez fréquentes dans le sang) : différenciation en DC immatures puis ajout des antigènes. Maturation des DC : on rajoute cytokines inflammatoires, ligands de TLR… La DC mature est réinjectée au patient et migre dans le ganglion. Vaccination dendritique : importance de la maturation Les DC immatures sont inefficaces et peuvent même être tolérogènes. Seules les DC matures vont dans les ganglions et sont capables d’activer les T naïfs. Les DC immatures peuvent être tolérogènes : Inhibition des réponses T in vivo Activation de T régulateurs Sensibles à l’action de produits tolérogènes synthétisés par les tumeurs Etape de charge par l’antigène : Soit on ajoute un peptide Soit, si on ne connait pas l’antigène, on ajoute un lysat cellulaire ou des corps apoptotiques de cellules tumorales (c’est le plus souvent le cas) Ag tumoral connu: Peptides CMH –restreints (plusieurs classe I et ajout peptides classe II) Peptides modifiés, peptides xénogéniques Protéines/Longs peptides ADNc (adénovirus, lentivirus) Ag tumoral inconnu: Elution de peptides tumoraux Lysats cellulaires Cellules apoptotiques ou nécrotiques ARN AUTOLOGUE ou ALLOGENIQUE Soit on fusionne une cellule dendritique avec une cellule tumorale. Soit on induit la différenciation d’une cellule tumorale en une cellule dendritique. Contrôle de la migration in vivo : On réalise un marquage des DC à l’111In-oxine (stable) : on peut visualiser la migration des DC à travers les vaisseaux lymphatiques et leur fixation dans les ganglions. Si on injecte en intra dermique ou en sous cutané, la réponse est beaucoup moins importante. Avantages théoriques des Ac d’immunomodulation : Anticorps Activité « pantumorale » (un meme Ac Ciblant la tumeur Non Immunomodulation Oui Non Oui Rép. Immunitaire contre plusieurs épitopes Non Oui Risques de mutation de la cible Oui Non Nécessité d’identifier des Ag tumoraux Oui Non Nécessité d’un accès direct aux Ag Tumoraux (expression, accessibilité, Ag Oui Non Oui Non pour différents cancers) Induction d’une immunité active (ie prolongée et mémoire) (échappement par mutation) intracellulaires) Risques de réactions croisées avec des AC normaux Pour conclure, on peut noter la grande importance de la thérapeutique combinatoire :