Accélération des rayons cosmiques par les ondes de choc des restes de supernovae dans les superbulles galactiques Gilles FERRAND sous la direction d’Alexandre MARCOWITH avec la collaboration de Turlough DOWNES Centre d’Etudes Spatiales des Rayonnements (C.E.S.R.) 9 avenue du Colonel Roche 31028 Toulouse Cedex 4 [email protected] Ce projet vise à étudier l'accélération non linéaire des rayons cosmiques par les ondes de choc des restes de supernovae se propageant dans les superbulles galactiques, à l'aide de simulations numériques couplant hydrodynamique et théorie cinétique. I) Contexte et problèmes Les rayons cosmiques sont des particules fortement accélérées, essentiellement des noyaux d'atomes avec environ 1% d'électrons ainsi que d'autres particules élémentaires. Les rayons cosmiques galactiques (jusqu'à des énergies de l'ordre de 1018 eV) sont supposés êtres accélérés par les ondes de choc des restes de supernovae, par le mécanisme de Fermi du 1er ordre. Si ce modèle standard offre aujourd'hui un cadre cohérent pour l'exploration de ce phénomène (bilan énergétique correct, production naturelle de lois de puissance universelles), il souffre néanmoins d'un certain nombre d'insuffisances (notamment concernant l'énergie maximale accessible et la cassure du "genou" vers 3.1015 eV dans le spectre observé). Ce projet s'inscrit dans une tentative de dépasser ce modèle standard par la considération d'effets collectifs de chocs de supernovae à l'intérieur des superbulles galactiques. Les superbulles galactiques sont des structures complexes formées par l'évolution d'amas d'étoiles massives (de type OB) : elles résultent de la fusion des bulles creusées dans le milieu interstellaire par le vent de chaque étoile. Elles ont une taille caractéristique de quelques centaines de parsecs, leur intérieur est composé d'un gaz chaud (T ~ 106 K) et peu dense (n ~ 10-² cm-³) balayé par les vents des étoiles et les ondes de chocs des supernovae successives. Leur interface avec le milieu interstellaire (la coquille) est un milieu froid et plus dense en expansion, souvent en contact avec le nuage moléculaire parent des étoiles massives. Les ondes de chocs de supernovae qui se propagent successivement dans ce milieu rencontrent des conditions très différentes de celles du milieu interstellaire standard. La présence en amont d’une forte turbulence et de rayons cosmiques déjà accélérés modifie la propagation des chocs et met en question le modèle standard de l'accélération des rayons cosmiques [1,2]. II) Contenu et méthodes Pour mener ce travail nous avons développé un code en C couplant les équations hydrodynamiques du choc et les équations cinétiques du transport des particules relativistes, permettant un calcul non-linéaire auto-consistent de la forme de la fonction de distribution en énergie des particules et de la structure spatiale du choc (les rayons cosmiques sont "injectés" et accélérés par le choc et rétroagissent sur la structure de celui-ci) [3,4]. La partie hydrodynamique résout les équations d'Euler (une dimension spatiale effective, en 1D cartésien ou en 3D à symétrie sphérique) avec un schéma volumes finis utilisant une méthode de Godunov du second ordre en temps ("leap-frog") et en espace (limiteur de pentes). La partie cinétique résout l'équation de transport de la fonction de distribution des rayons cosmiques (une dimension spatiale, une dimension d'énergie) avec pour la diffusion spatiale un schéma implicite, explicite (éventuellement accéléré par "super-time-stepping") ou mixte (Crank-Nicholson). Le couplage des particules et du fluide est un problème numériquement très exigeant car il est nécessaire de bien représenter une très large gamme d'échelles spatiales et temporelles (induites par la diffusion des rayons cosmiques, qui dépend de leur énergie). Cela a conduit à l’implémentation d'un algorithme de raffinement adaptatif du maillage spatial (AMR) de type grilles emboîtées. Pour gagner encore davantage en temps de calcul le code a été parallélisé, selon la dimension d'espace (où l'AMR induit un trop fort déséquilibre de charges) puis selon la dimension d'énergie (où de bons "scalings" peuvent être obtenus). III) Avancement et perspectives Le code est aujourd'hui fonctionnel et validé. Il va faire l'objet d'une publication dédiée dans une revue à comité de lecture. L'exploitation scientifique du code a débuté avec l'étude des effets de chocs multiples (subissant l'effet des particules précédemment accélérées). Nous souhaitons également étudier différents types de modèles de transport des rayons cosmiques et étudier la question centrale des énergies maximales accessibles par les rayons cosmiques. Par la suite nous envisageons un traitement plus détaillé du champ magnétique (inclusion auto-consistante des ondes assurant le transport des rayons cosmiques) et le calcul de l'émission haute énergie des particules (hadronique et leptonique). REFERENCES [1] Parizot, Marcowith, van der Swaluw, Bykov, Tatischeff, 2004 : Superbubbles and energetic particles in the Galaxy. I. Collective effects of particle acceleration, A&A, 424, 747 [2] Marcowith, Parizot, van der Swaluw, Bykov, Tatischeff, Ferrand, 2005, Superbubbles : a laboratory for high energy astrophysics and cosmic-ray physics, AIP Conference Proceedings, 745, 287-292 [3] Falle & Giddings, 1987, Time-dependent cosmic ray modified shocks, MNRAS, 225, 399 [4] Kang, Jones, Gieseler, 2002, Numerical Studies of Cosmic-Ray Injection and Acceleration, ApJ, 579, 337