Hélène & Marion Simon et Matthieu Parasitologie Date : 18/03/08 Heure : 16h à 17h Nom du prof : Jacquiet Tiques et maladies transmissibles par les tiques 6 à 7 heures de cours vont être dédiées aux tiques, que l’on étudiera en tant que : - parasites à rôle pathologique direct (sans s’intéresser aux agents pathogènes qu’elles peuvent transmettre). On verra leur morphologie (Ixodina = tique dures ; Argasina = tiques molles), leur bioécologie (où les trouve-t-on, leur fonctionnement, leurs hôtes…), et également les moyens de lutte chimique, agronomique mis en œuvre selon les régions de France plus ou moins concernées. - vecteurs d’agents pathogènes. On s’intéressera notamment aux Babésioses (ou piroplasmoses) des chiens, chats, chevaux, bovins, aux Théilérioses, aux hépatozoonoses des chiens, puis aux Ehrlichioses (des chiens surtout), aux Anaplasmoses (des bovins principalement), et succinctement à la maladie de Lyme (Cf cours de bactério). I. Morphologie Le cycle des tiques comporte 4 stades évolutifs : OEUF LARVE NYMPHE ADULTE Formes hématophages, possédant un rostre avec hypostome Les tiques passent la majeure partie de leur vie hors de l’hôte, dans le milieu extérieur, soit plusieurs mois par cycle complet (oeuf-oeuf). Elles n’ont besoin de l’hôte que pour leur repas sanguin, soit environ 3 semaines à 1 mois par cycle, ce dernier durant en moyenne 2 à 5 ans. On rappelle les quelques différences entre les tiques dures et les tiques molles : - Ixodina : elles présentent un écusson dorsal chitineux qui leur confère leur dureté et explique leur dimorphisme sexuel marqué. Elles n’effectuent qu’un seul repas long (5-8 jours) à chaque stade (1 repas au stade larvaire, 1 au stade nymphal et 1 au stade adulte). Exemple (cf ppt): genre Dermacentor. Le scutum du mâle recouvre toute sa face dorsale ce qui le différencie de la femelle. L’écusson a un aspect émaillé très caractéristique du genre. - Argasina : elles n’ont pas d’écusson dorsal et effectuent plusieurs repas sanguins courts (10-15 min) successifs, 5 à 6 repas par stade, correspondant à chaque fois à une augmentation de taille. Parasitologie – Les tiques (1/ ) – page 1/7 Exemple (cf ppt) : Ornithodoros moubata. Ces tiques n’ont pas d’écusson mais un extérieur rugueux, on ne distingue pas leur rostre qui est trop court et caché face ventrale. Concernant l’extrémité antérieure de la tique, on a : - l’hypostome : c’est l’armature externe du canal salivaire. Il amène la salive le plus près possible de la poche de cytolyse où la tique prélève le sang. Cette salive a des propriétés particulières qui seront évoquées plus loin. On remarque également des sortes de « harpons » le long de l’hypostome qui participent à la fixation de la tique dans le tégument du chien. - les chélicères : ce sont les 2 petits crochets légèrement cachés par l’hypostome. Elles servent aussi à la fixation de la tique sur l’hôte. - les pédipalpes : sur la photo, le deuxième article est plus long que large. C’est caractéristique d’un longirostre. Ces pédipalpes ne participent pas à la fixation sur le tégument. Pour ce qui est de la partie interne de la tique, on a : - le tube digestif qui présente des diverticules latéraux capables d’accueillir une grande quantité de sang. Ce sont eux qui se dilatent quand la tique est gorgée de sang. - les ovaires (chez les femelles bien sûr !) qui s’ouvrent par le gonopore. Le sang ingurgité par la femelle est nécessaire à la formation des œufs : une femelle peut produire de 10 000 à 15 000 œufs. - les glandes salivaires : ce sont les petites boules blanches un peu partout dans le corps de la tique. C’est souvent dans ces glandes que se développent les agents pathogènes qui pourront être transmis lors d’un repas sanguin de la tique. Généralement, les 24-36 premières heures de fixation de la tique ne sont pas dangereuses car c’est le signal donné par l’arrivée d’une grosse quantité de sang dans les diverticules latéraux qui déclenche une multiplication importante de l’agent pathogène dans les glandes salivaires. II. Bioécologie Les facteurs influençant la bioécologie des tiques sont : - Intrinsèques = propres à chaque espèce. Il s’agit du nombre d’hôtes nécessaires à l’accomplissement d’un cycle, de la spécificité des hôtes et des points de fixation sur l’hôte. - Extrinsèques (environnementaux) : température, humidité… Ces facteurs influent sur les densités de populations, l’activité des tiques, leur développement, leur survie… Etablissons un petit catalogue des termes à connaître en bioécologie des tiques… L’humidité Hygrophiles : les tiques ayant besoin d’une humidité relative d’au moins 70%. Ces tiques se retrouveront dans les sous-bois quand le couvert végétal est suffisamment abondant pour maintenir ce taux d’humidité ou dans des paysages plus ouverts à condition qu’ils soient d’influence océanique (bocage vendéen…) Mésophiles : les autres tiques, voire xérophiles celles qui peuvent vivre dans des endroits très secs. On retrouvera ces tiques dans des paysages type maquis. Par exemple, Rhipicephalus sanguineus est adapté aux paysages méditerranéens. L’habitat Exophiles : ces tiques vivent loin des zones humanisées, en plein champ ou en forêt. (exemple : Ixodes ricinus). Parasitologie – Les tiques (1/ ) – page 2/7 Endophiles : ces tiques sont même appelées domestiques car elles se sont parfaitement bien adaptées aux zones humanisées. Exemple : Rhipicephalus sanguineus appelé « tique du chenil » et qui sévit dans les élevages canins, fourrières… On trouvera ces tiques dans les maisons, les jardins… Il a été rapporté des cas de tiques trouvées sur des chiens qui ne sortaient jamais de la maison de leurs maîtres. Pholéophiles : c’est un détail. Ces tiques sont adaptées à des milieux très réduits, comme par exemple les terriers de petits rongeurs (exemple : larve et nymphe de Dermacentor reticulatus). L’avantage pour ces tiques c’est qu’elles résistent à l’écobuage (pas comme tout le monde…). La spécificité d’hôte Monotropes : la larve, la nymphe et l’adulte parasitent le même type d’hôte. Exemple : Rhipicephalus sanguineus. Ditropes : on retrouve deux catégories d’hôtes dans leur cycle. Exemple : les Dermacentor. La larve et la nymphe parasitent des petits rongeurs mais l’adulte parasite des grands mammifères. Télotropes : la larve et la nymphe peuvent parasiter un large spectre d’hôtes, on les qualifie d’ubiquistes. Généralement l’adulte est un peu plus sélectif. Le nombre d’hôtes Triphasiques : 3 hôtes sont nécessaires. La larve se gorge d’abord sur H1 puis tombe au sol et devient une nymphe à jeun. La nymphe se gorge à son tour sur H2 puis tombe au sol et devient un adulte à jeun. Ce dernier se fixe enfin à H3. Les femelles tombent au sol et pondent leurs œufs. Ce nombre élevé d’hôtes multiplie les aléas au cours du cycle de la tique, trois conquêtes d’hôte sont nécessaires. C’est cependant le schéma que suivent les trois principales tiques en France (Cf plus loin). Diphasiques : la larve se gorge sur H1 mais reste accrochée pour devenir une nymphe, qui se gorgera sur le même hôte. La nymphe gorgée tombe ensuite au sol, devient un adulte à jeun qui se gorgera sur H2. Cette contraction du cycle diminue la probabilité d’aléas. C’est le schéma qui suit par exemple Rhipicephalus bursa. Monophasiques : la larve, la nymphe et l’adulte se gorgent sur le même hôte, seule la larve doit donc partir à la conquête d’un hôte. C’est le cas du genre Boophilus par exemple. Il faut savoir que durant la phase libre (hors de l’hôte), la tique est très résistante. Elle peut en effet survivre 12 à 18 mois sans faire aucun repas. Pendant la phase parasitaire, le pire scénario pour une tique est de subir le « grooming », c’est-àdire que l’hôte se retourne, arrache et avale la tique. En effet, dans ce cas le cycle est rompu. Certaines tiques se logent près de la tête pour éviter ce phénomène. En France, on compte environ 45 ou 46 espèces de tiques. Nous ne nous intéresserons qu’aux 3 principales. III. Etude des 3 principales espèces de tiques Il existe 45 ou 46 espèces de tiques en France donc on va se limiter aux 3 principales. 1) Ixodes ricinus C’est la tique la plus fréquente et cosmopolite de France. Bio-écologie Parasitologie – Les tiques (1/ ) – page 3/7 Sur le ppt… La photo à droite montre de gauche à droite la larve, l’adulte à jeun et l’adulte gorgé. On peut ainsi se rendre compte de leurs tailles respectives, l’adulte mesurant 3mm de long. Celle en bas à droite montre un sous-bois car cette espèce de tique est hygrophile : elle ne se trouve que dans certains endroits comme le sous-bois, les bocages, les bosquets, les forêts, les zones de fougères… Il faut donc faire attention aux animaux qui pâturent près de ces zones. Ixodes ricinus affectionne également les zones en altitude ; elle est présente jusqu’à 1200 m d’altitude dans les Alpes, et même 1600 m dans les Pyrénées. Attention donc à bien vérifier les animaux partis en estive, les pathologies apparaissent souvent dans le mois qui suit leur arrivée en estive. En revanche, dans les milieux méditerranéens, en Beauce ou en zone découverte, il y a peu de risque de rencontrer notre tique. Le ppt du professeur mentionne les chevreuils. Pourquoi tant de haine ? Parce que la population des chevreuils en France est en train d’exploser, fournissant ainsi aux tiques un grand nombre d’hôtes nourriciers, ce qui participe au maintien des populations (en densité et en activité) d’Ixodes ricinus. Le cycle complet peut s’effectuer grâce aux chevreuils. Toujours sur le ppt, on aperçoit un charmant petit chemin champêtre qui donne très envie d’aller gambader. Mais ATTENTION ! Au mois d’avril-mai, après une petite pluie printanière, ce petit chemin si tentant se transforme en un véritable vivier d’Ixodes ricinus prêts à nous bondir dessus. Car, comme le dit le prof, « la tique chasse à l’affût, et c’est nous le gibier ! ». En témoigne la photo du ppt où l’on voit la tique les deux pattes avant en l’air, attendant notre arrivée. En effet, les tiques possèdent des organes chimiorécepteurs dits organes de Haller, qui repèrent les gradients de CO2. Cela associé à une paire d’yeux capables de distinguer des ombres, les tiques savent parfaitement que vous arrivez. Elles sautent alors et s’accrochent, avant d’analyser la peau de l’hôte pour déterminer s’il correspond à ses besoins, et de gagner les zones préférentielles (cou, dos…) pour s’y implanter. Le cycle d’Ixodes ricinus On part d’une femelle gorgée tombée au sol. Elle se cache sous une pierre ou un tronc pendant 1 à 2 semaines et pond plusieurs milliers d’œufs avant de mourir. Au bout d’un mois, les larves éclosent. Leur tégument durcit en 2 à 3 semaines et elles sont alors prêtes à partir à la conquête de H1 (petits rongeurs, lagomorphes, hérissons, oiseaux et parfois les humains). La larve se gorge, tombe au sol et mue en 4 à 8 semaines en une nymphe à jeun. Son spectre d’hôte est quasi-identique à celui de la larve + les carnivores domestiques et les renards. C’est le stade le plus anthropophile. Au bout de 4-5 jours la nymphe tombe au sol. 3 à 5 mois plus tard on obtient des mâles et femelles adultes à jeun. Seules les femelles se nourrissent, pas les mâles. On observe un changement d’hôte : ongulés, carnivores domestiques et parfois l’homme. Ce cycle dure donc 6-8 mois au minimum mais, en raison de l’incertitude pour trouver l’hôte, il faut en réalité 1 à 6 ans. On constate que ces évolutions sont saisonnières, surtout en ce qui concerne les adultes. Leur activité est bimodale avec des maximums en avril-mai et septembre-octobre. L’été est trop chaud et trop sec. Cette saisonnalité dans le cycle conditionne les périodes d’entrée des agents pathogènes. Le rôle verteur d’Ixodes ricinus - Babesia divergens : agent de la piroplasmose des bovins - Rickettsioses : Anaplasma marginale (Bovins) Anaplasma phagocytophilum (BV, CV, CN, moutons…) Parasitologie – Les tiques (1/ ) – page 4/7 - Borréliose de Lyme : CN, Homme, CV, BV… Arboviroses : encéphalites à tiques (Europe centrale et façade est de la France) 2) Dermacentor reticulatus Bio-écologie Elle vit dans un plus paysage ouvert, c’est une tique mésophile. Elle se retrouve dans la quasitotalité de la France mais avec une fréquence très inégale, même à quelques kilomètres de distance. Elle occupe surtout les zones collinéennes inférieures à 1 000m d’altitude ce qui correspond à une large gamme de biotopes ruraux mais aussi anthropisés (terrains vagues près des lotissements, jardins publics…). C’est une tique triphasique, ditrope et exophile. Cycle de Dermacentor reticulatus La femelle gorgée tombe au sol, pond ses œufs et meurt. Les larves éclosent après 3 à 4 semaines. Les larves et les nymphes sont pholéophiles, elles se nourrissent le plus souvent sur de petits rongeurs. Pour l’adulte les hôtes sont les carnivores domestiques, les ongulés domestiques et sauvages. Comme pour Ixodes ricinus on observe une diapose hivernale et estivale et deux pics de population au printemps et en automne. Le cycle met au moins 1 an et demi à s’effectuer. On se rend compte quand on observe ce cycle que la transmission de Babesia est nécessairement trans-ovarienne. Rôle vecteur de Dermacentor reticulatus - Babesia canis : c’est le principal vecteur de la piroplasmose canine, il est impliqué dans 90% des cas. - Babesia caballi (une des deux formes de piroplasmose du cheval) - Anaplasma marginale : rickettsie des bovins 3) Rhipicephalus sanguineus Bio-écologie Cette tique présente un rostre court, hexagonal, avec des petites expansions sur la base du capitulum. Photo : larves et nymphes sur un mur. Rhipicephalus sanguineus a un caractère endophile net. A la base c’était une tique xérophile des paysages méditerranéens mais certaines tiques de l’espèce se sont adaptées au chien, c’est ce caractère endophile qui explique son succès planétaire. C’est une tique triphasique, monotrope. Cycle de Rhipicephalus sanguineus La femelle gorgée pond ses œufs. Chaque stade évolutif du cycle biologique va conquérir un chien comme hôte. Parfois les larves et les nymphes peuvent se fixer sur des insectivores ou des petits rongeurs. L’activité des adultes est maximale au printemps et à l’automne sauf dans le cas de bâtiments chauffés car les tiques ne sont plus soumises aux aléas climatiques du milieu extérieur comme les autres tiques. Rôle vecteur de Rhipicephalus sanguineus - Babesia canis : petit rôle Parasitologie – Les tiques (1/ ) – page 5/7 - Hepatozoon canis Rickettsioses : Ehrlichia canis et Rickettsia conori (fièvre boutonneuse) Il existe une autre espèce, Rhipicephalus bursa, qui a simplifié son cycle ; la larve et la nymphe sont sur H1. C’est un bon vecteur pour Theileria equi, qui cause la piroplasmose du Cheval. Mathieu et Thibault Bep et Gaston et un peu Simon et Matthieu PARASITO 18/03/08 17h à 18h Le curé Interactions entre Ixodina et son hôte : Il s’agit d’une tique dure. La fixation à l’hôte est permise par l’hypostome et les chélicères. Les pédipalpes ne participent pas à la fixation. A tous les stades (larve, nymphe et adulte), la première action entreprise est la fabrication de cément pendant 24 à 36 heures, afin de créer une bonne fixation au tégument en plus des dents et des chélicères. Sans la fabrication de ce cément, la tique ne pourrait pas tenir (elle peut multiplier son poids par 120 au cours de ses différents repas). Le cément agit comme une colle. Une fois la fixation effectuée, commence la nutrition. Les glandes salivaires produisent des hémolysines, des protéases et autres, qui créent des « poches de lyse » dans les tissus. Ces poches s’étendent progressivement jusqu’aux vaisseaux sanguins, et la tique aspire alors le sang libéré. Selon les espèces de tique, le rostre est plus ou moins court, et le cément est injecté plus ou moins profondément pour assurer la fixation. Cela conditionne la facilité pour arracher la tique, ce qu’il faut toujours faire selon son axe de fixation (environ 45° à la peau). Les repas des premiers jours sont peu importants, puis ils augmentent de manière exponentielle les 2 à 3 derniers jours. La tique avale d’abord du sang puis sépare les cellules du plasma qui est éliminé. Cette concentration des repas est de plus en plus efficace, jusqu’à atteindre 3 fois la concentration normale du sang en cellules. Ainsi, la quantité de sang ingéré au final représente 3 fois le poids d’une tique gorgée qui se détache. La spoliation sanguine est ainsi aggravée. De plus, la salive des tiques est immuno-modulatrice, et facilite donc la transmission de virus, de la maladie de Lyme (Ixodes ricinus) ou encore de babésioses. Il y a en fait réduction de l’effet des cytokines Th1. La réponse dermique locale est alors quasi inexistante. Remarque : Lorsqu’on inocule les mêmes pathogènes que ceux transmis par les tiques à la seringue, ça marche moins bien car il manque les éléments immuno-modulateurs présents dans la salive des tiques. Rôles pathogènes des Ixodina Les effets pathogènes directs sont une spoliation sanguine (manque de sang), une irritation, l’introduction de staphylocoques ou des myiases (dermatoses parasitaires larvaires). De plus, on peut avoir des « paralysies à tiques » : les femelles gorgées excrètent des toxines neurotropes qui entraînent une paralysie. Il suffit d’enlever la tique pour supprimer cet effet assez rapidement, sans faire d’autres examens onéreux recherchant la cause de la paralysie ailleurs. Les effets pathogènes indirects sont des protozooses, des viroses, des borrélioses (Borréliose de Lyme), et surtout des rickettsioses. Parasitologie – Les tiques (1/ ) – page 6/7 Les correcteurs tiennent à s’excuser pour la version qui vous est présentée ici, tirée de la ronéo des A3 ; étant dans l’impossibilité de récupérer la version de cette année, il a fallu se résoudre à procéder ainsi. Parasitologie – Les tiques (1/ ) – page 7/7