Microbiologie et génie génétique D’après le cours de M. Le Rudulier I) Le monde microbien Es microbes sont les champignons unicellulaires, les algues unicellulaires, les bactéries, les virus et les protozoaires. Ce sont des protistes pouvant être procaryotes ou eucaryotes (certaines algues, champignons, protozoaires). Ils peuvent être uni ou multicellulaires. 1) La découverte du monde microbien Découvertes : - Van Leeuwenhoek (1680 premier microscope, grande diversité du monde microbien) - R. Hook - F. Redi (début de la controverse de la génération spontanée jusqu’alors admise) - L. Spallanzani (1750 découvre le spermatozoïde, contribue à la controverse) - L. Pasteur (1822-1895 fermentations, activité métabolique, agents infectieux) - J. Tyndall (stérilisation) - H. Buchner (1895, début de la biochimie) Rôle des microorganismes dans les maladies : - M. J. Barkeley (1845) - R. Koch (anthrax, spécificité d’un microorganisme pour une maladie) - L. Pasteur (création de l’institut en 1888) Microorganismes, agents géochimiques (intervenant dans la nature pour transformer de la matière comme c’est le cas pour les cycles du carbone, de l’azote…) : - S. Winogradsky (1856 – 1953 grands cycles biologiques) - M. W. Beyerinck (1851 – 1931 C H2) Explosion de la microbiologie en trios disciplines : - Biochimie (1920 – 1935) - Génétique Deadle et Tatum (1941 premiers mutants) Delbrück et Luria (1943) Avery, McLeod et McCarthy (1944, transformation bactérienne) - Biologie moléculaire Watson et Crick (1953 structure de l’ADN) 1975 génie génétique (« recombinaison in vitro de l’ADN » est un terme plus adéquat) Herbert Boyer, Stanley Cohen, Paul Berg (endonucléases) 2) Caractères généraux procaryotes / eucaryotes (cf poly p.1) Les eubactéries sont le groupe majeur des procaryotes. Le terme de « glycérol diester » désigne les phospholipides (cf lsv1), le terme cell wall n’est pas très adapté car il désigne généralement une paroi pectocellulosique, or la muréine ne contient ni pectine ni cellulose. Les procaryotes n’ont normalement pas d’introns, mais on a récemment découverte des structures semblables aux introns… 3) Critères de classification et notion d’évolution La classification est relativement arbitraire, mais on a pu la corriger grâce à la biologie moléculaire. Les classifications anciennes ne sont pas toujours très sensées. On emploie toujours le binôme genre espèce, et il y a des suffixes particuliers : suffixe Ex : Escherichia coli Tribus -eae Escherichieae Familles -acea Enterobacteriacea Ordres -ales Eubactériales Sous-ordres -inea a) critères Taxonomie classique : - critères morphologiques et structuraux - biochimiques - pathogénicité - immunologie - lysotypiques (pouvant ou non être lysé par un bactériophage) Taxonomie moléculaire : - composition en bases Coefficient de Chargaff (pourcentage de G/C par exemple, allant de 40 à 68% chez les bactéries) ayant déjà amené à modifier la taxonomie classique Hybridation (pourcentage d’homologie, permettant de mesurer le nombre de gènes en commun : certaines bactéries à même fonction biologique pouvaient n’avoir en fait que 3% d’homologie) Corrélations génétiques Immunochimie b) évolution et phyllogénie L’ancêtre commun est aussi appelé LUCA (last universal common ancestor). Pour évaluer la phylogénie, on se sert de l’ARN 16s des ribosomes. Elle a été choisie selon différents critères : - macromolécule présente dans toutes les espèces (procaryotes et eucaryotes) - séquençable rapidement (automatisme) - évolution (dans le temps) lente de la structure, avec des zones invariables ou presque et des zones à évolution rapide. Globalement la structure générale est très conservée. Il y a des appareils de mesure que l’on peut utiliser. L’arbre que nous avons vu est « raciné », mais on peut aussi représenter des arbres non racinés avec un point de départ central donnant naissance à trois phylums : archéobactéries, eubactéries, eucaryotes ne dérivant pas les uns des autres. Il existe des caractères communs entre archéobactéries et eubactéries, et entre archéobactéries et eucaryotes, arrivés indépendamment dans les différents phylums : l’évolution n’est pas linéaire. On peut ainsi subdiviser les groupes pour aller jusqu’aux genres. Certains groupes sont très divisés (protéobactéries par exemple). Une échelle de divergence peut être représentée (une distance en cm correspond à un % de divergence sur l’ARN16s). On a noté de nombreuses différences avec la classification ancienne. Par exemple Escherichia coli est très proche des bactéries photosynthétiques (alors qu’elle n’effectue pas de photosynthèse), et Rhodopseumonas (photosynthétique) est très proche de Agrobacterium (pathogène) sont très proches l’un de l’autre. 4) Les protistes procaryotes a) Caractères généraux des archéobactéries - pas de peptidoglycanes : acide muramique (dérivé du N acétyl glucosamine) remplacé par l’acide talosaminuronique. - chaînes d’acides gras ramifiées - liaisons acide gras – glycérol de type éther oxyde (C – O – C) et non ester (CO – O – C) - ARN de transfert sans thymine, mais avec pseudo uridine (pouvant être méthylée) - lipides particuliers : archéol (diphytamylglycérol) et caldarchéol (dibiphytamylglycérol) très résistants aux fortes pressions (résistant à plusieurs tonnes/cm² : presses hydrauliques…) - ARN polymérase proche de celle des eucaryotes - trois grands groupes * Méthanigènes : produisent CH4, anaérobies, ne supportant pas la présence d’O2, noms de genre avec préfixe méthano-, suffixe -spirillus ou –coccus. * Thermoacidophiles : pH 2, température élevée (80 à 100°C), anaérobie. Elles ont besoin des températures élevées et ne poussent pas à 30°C. Elles ont un intérêt en biotechnologie : extraction de leurs protéines résistant aux hautes températures. Genres Acidianus, Thermoplasma, Sulfolobus * Halophiles extrêmes : nécessitent une grande quantité de sel (jusqu’à 220 à 250 g/l) et résistent donc à une pression osmotique élevée. Photosynthèse archaïque (grâce à la bacterio rhodopsine) sans fabriquer de CO2. Genre Halobacterium b) Ricketsies, Mycoplasmes, Chlamydies - Ricketsies (Gr -) : ce ne sont plus des acrhées, parasites obligatoires (pathogènes : maladies infectieuses touchant tout des arthropodes aux hommes). Genres Rochalimaea, Coxiella - Mycoplasmes : mollicutes, n’ayant qu’une membrane plasmique (pas deux), parasitant insectes, plantes et vertébrés. Genres Mycoplasma, Spiroplasma, Acholeplasma - Chlamydies (Gr -) : infections chez les vertébrés. Genre Chlamydia - Myxobactéries : mobiles sans flagelle, cellulolytiques (coupent la cellulose), cytophages. Genre Myxococcus - Spirochètes : structure hélicoïdale, filament axial. Spirochaetacea : Spirocheta, Treponematacea : Treponema, Bonelia c) Eubactéries (groupe de loin majoritaire) - cyanobactéries (Gr -) : unies en filaments photosynthétiques, parfois diazotiques. Produisent O2. Genres Anabaena, Nostoc, Oscillatoria, Plectonema, Gleocapsa - eubactéries photosynthétiques : assimilent le CO2 pour fabriquer leurs glucides (présence de la rubisco) sans dégager d’O2 : pas de photooxydation de l’eau mais utilisation de composés soufrés ou d’acides organiques. - eubactéries non photosynthétiques : Gr -, Gr +, aérobies (oxydation), anaérobies (réduction)… elles utilisent des sources d’énergie comme les sucres, grande majorité des bactéries. On les appellera aussi chimiosynthétiques. * eubactéries pédonculées (attachées à un substrat par une tige). Genres Caulobacter, Gallionella (cancers de l’estomac, forme adulte fixée et jeune libre). * eubactéries filamenteuses (5 à 10 fois plus petits que des champignons), Genre Sphastilus * eubactéries mycéliennes : actinomycètes (ce ne sont pas des champignons), hyphes ramifiées, producteurs d’antibiotiques. Genres Mycobacterium, Actinomyces, Streptomyces, Nocardia 5) Les protistes eucaryotes Ce sont globalement des microbes, mais on les traite rarement en microbiologie. On a 3 catégories : - microalgues : algues unicellulaires, très petites (même si parfois filamenteuses). Ce sotn des thallophytes photosynthétiques : Chlorophycées (Euglenia) et Chrysophycées (diatomées) - protozoaires : rhizopodes (amibes), flagellés (Trypanosoma), ciliés (paramécie), sporozoaire (plasmodium à l’origine du paludisme). - champignons microscopiques : unicellulaires généralement, les levures sont les plus connues et les plus utilisées (ascomycètes) pour la fermentation. II) Nutrition et croissance (plutôt bactériologie que microbiologie) 1) Nutrition a) Besoins élémentaires (énergétiques) La cellule doit fabriquer de l’ATP pour assurer sa nutrition. Les sources d’énergie sont : - lumière : photolitotrophes (vertes, ex : cyanobactérie) et photoorganotrophes (pourpres non soufrées) (litho = source minérale, organo = source organique) - réaction chimiosynthétique (bactérie chimiosynthétique) : chimiolithotrophe et chimioorganotrophe (ex : E. Coli). Il faut aussi une source de Carbone et une source d’Azote (N). Un autotrophe vis-à-vis du carbone est capable d’utiliser du CO2 pour fabriquer ses glucides (il possède la Rubisco). Un autotrophe (diazotrophe) vis-à-vis de l’azote possède la nitrogénase (exclusive des procaryotes) qui permet la réaction N2 (air) NH4+ acides aminés… Un hétérotrophe vis-à-vis de l’azote doit prélever NO3-, NO2-, NH4+, R-NH2… Il faut aussi des microéléments (Cu, Fe… pour les cytochromes, la nitrogénase contient du molybdène Mo), S (cystéine), P (acides nucléiques). Dans de nombreux cas, bien que les conditions élémentaires soient satisfaites, la bactérie ne pousse pas. b) Besoins spécifiques (facteurs de croissance) Il faut des doses de l’ordre du mg/l. Les prototrophes sont de type sauvage, non modifiés, poussant à l’aide des besoins élémentaires uniquement. Les auxotrophes ont des besoins spécifiques de facteurs de croissance car ce sont des mutants ayant perdu une capacité de synthèse. Les éléments d’auxotrophie ont une spécificité étroite (on ne peut pas mettre de l’Isoleucine s’il faut de la Leucine). Il existe des polyauxotrophes. Généralement les mutants sont Leu-, Ade-, VitB1-… Les besoins sont de 25 mg/l pour les acides aminés, 10 mg/l pour les bases puriques et pyrimidiques, 1 à 20 µg/l pour les vitamines. c) Paramètres de l’environnement (T°C, pression osmotique…) poly p.7 -Température : Mésophiles (20-40°C), Psychrophiles (10°C), Thermophiles (45-65°C) E. Coli croît de manière optimale à 37°C. A 42°C la croissance est moindre et les plasmides ne se divisent plus : phénotypes différents. - pH : neutrophiles, basidophiles (Vibrio), acidophiles (Thobacilles, Thiooxydans). Les acidophiles sont assez particuliers : ils peuvent avoir une pompe à protons qui rejette les H+ à l’extérieur de la cellule, maintenant un pH 7 dans la cellule. - exigences gazeuses : (p.8) aérobies ou anaérobies strictes, anaérobies facultatives ou aérotolérantes, microaérophiles (aimant une pression d’oxygène plus faible que celle atmosphérique, par exemple 5% au lieu de 21%). La structure de la chaîne respiratoire (transporteurs d’électrons) est différente entre anaérobies facultatives et aérotolérantes. - pression osmotique : non halophiles, halophiles modérés (20 g/l), extrêmes (360g/l). E. Coli poussera moins bien si on ajoute du sel. Il existe une osmorégulation : le sel extérieur tire l’eau s’il est hypertonique (forte concentration en sel), certaines bactéries ont sur la membrane plasmique des systèmes assurant le transport de certains solutés de l’extérieur vers l’intérieur : acides aminés (Proline surtout), ions K+, bétaines, créant des gradients (proline 1µM à l’extérieur et 1 mM à l’intérieur) permettant de résister à la pression osmotique. Plus le milieu contient de Na+, plus les cellules accumulent de K+ (tableau p.8). Dans certaines zones tropicales, les fortes concentrations salines du sol rendent toute culture impossible, et des OGM résistants au sel permettent de parer à ce problème. 2) Croissance a) Mesures On peut mesurer le volume de bactéries par exemple. La méthode de dilutions en série avec des CFU est très répandue. On étale les cellules sur une boîte de Pétri et chacune formera une colonie. Après une série de dilutions (p.7) de facteur 10, on peut compter les colonies assez facilement. Le pipetage et l’étalement doivent être précis, et chaque cellule doit être viable. La solution doit être homogène. Méthode optique : spectrophotomètre, néphélomètre. Plus la densité bactérienne est élevée, plus la densité optique est élevée (elle varie de 0,1 à 1 ou 2). Le néphélomètre permet de mesurer la lumière réfléchie et est peu utilisé aujourd’hui. Attention, la relation masse / absorbance n’est plus linéaire si le nombre de bactéries est trop élevé, il faut alors diluer. Log(D.O.) est fonction du temps, et on se sert de papier semi-log (cf TD) pour tracer la droite. Le temps de génération g = t / n (temps de culture / nombre de divisions) se lit graphiquement (temps qu’il faut pour que le log(D.O.) soit doublé). Le taux de croissance µ = n / t. Si g = 1, µ = 1. S’il y a X0 bactéries au temps t0, Après une génération, t1 : X1 = X0 x 21 Après deux générations, t2 : X2 = X0 x 22 Après trois générations, t3 : X3 = X0 x 23 Après n générations, tn : Xn = X0 x 2n Ainsi si g = 1 heure, on aura 2,81.1014 cellules après 48 heures. On peut mesurer la quantité de bactéries en fonction de la quantité en substrat qu’elles utilisent. Au Japon de grands condensateurs (500 m3) contiennent des bactéries fabriquant du glutamate en grandes quantités. Pour réduire les coûts, il faut réduire la quantité de glucose introduit : la disparition du substrat (glucose) est assez lente dans les premières heures (poly p.8 milieu droite), et il est inutile de produire après 8 heures car on consomme trop de glucides. Enfin par calorimétrie (régulation de la température) on peut aussi mesurer la quantité de bactéries. Des cell sorters (très cher) permettent de compter avec des faisceaux lasers, mais aussi d’analyser la taille, le volume, voire même l’ADN. Ces cell sorters peuvent être paramétrés (capables de faire des tris entre cellules cancéreuses et saines…). b) Milieux que l’on peut utiliser - Milieu minimal (liquide ou gélosé) : source unique de carbone, source unique d’azote, microéléments, sels… Il faudra ajouter le facteur de croissance s’il s’agit de mutants. On aura une croissance assez modeste, mais comme tout est connu dans le milieu on pourra réaliser des études physiologiques fines. - Milieu riche Luria Broth ou complexe MSY (Mannitol, Salt, Yeast) contenant des levures de bière séchées. On ne maîtrise pas tous les paramètres (acides aminés, vitamines, concentrations, microéléments) mais les bactéries poussent assez vite (« overlight » : on ensemence le soir et on récupère le matin). Généralement on fait une pré culture en milieu L.B. puis on récupère les bactéries et on les étudie en milieu minimum. - Milieu de sélection ou d’enrichissement ou différentiel : permet de sélectionner les bactéries capables de pousser dans tel ou tel milieu (ex : utilisant le glutamate, résistant aux antibiotiques…) - Milieu de conservation (maintien des cultures) : -80°C, avec des précautions pour ne pas détruire les cellules comme l’introduction de glycérol, empêchant les cellules d’exploser. - Milieu industriel (ex : glutamate produit par les Corynebacterium glutamium) : on leur donne des résidus de l’industrie agro alimentaire comme la mélasse de betterave. III) Les grandes voies métaboliques bactériennes 1) Réactions de classe I : dégradation De telles réactions sont exergoniques (p.9). Le glucose fournit de l’énergie. Il doit rentrer dans la cellule par un phénomène actif (transporteur). Il doit être phosphorylé pour rentrer (glucose 6 phosphate). Ce glucose sera dégradé soit par glycolyse (donnant l’acide pyruvique) soit par la voie des pentoses phosphate. Certaines bactéries sont capables d’effectuer ces deux dégradations, d’autres ne peuvent en effectuer qu’une seule. Seuls 2 ATPs sont formés lors de la dégradation en pyruvate, mais celui-ci rentre dans le cycle de Krebs et fournit énormément d’énergie sous forme de composés réduits (FAD, NAD). Les 6 carbones du glucose forment 6 CO2. La chaîne respiratoire consiste en un transfert d’électrons de coenzymes à un accepteur final O2, faisant intervenir des déshydrogénases, des quinones, des cytochromes. L’oxygène est réduit en eau, et l’énergie provient des protons (gradient de protons = force protomotrice) qui tendent à revenir à l’intérieur du cytoplasme à travers l’ATP synthétase permettant de produire de l’ATP. La chaîne respiratoire bactérienne possède une certaine spécificité : il n’y a pas qu’un seul modèle, alors que les mitochondries sont identiques chez les plantes et les animaux. Il y en a plusieurs chez E. Coli selon les conditions (paramètres de l’environnement modifiant la structure de la chaîne respiratoire, p.8). 2) Réactions de classe II : synthèse (petites molécules) Le glucose renter dans la cellule en quelques millisecondes et est dégradé en quelques secondes. Les réactions de classe II vont avoir lieu presque simultanément a) acides aminés Il faut prélever de l’azote du milieu pour les aminations : - amination : pyruvate + NH3 alanine α-cétoglutarate + NH3 glutamate fumarate + NH3 aspartate - transamination : glutamate + pyruvate alanine + α-cétoglutarate glutamate + oxaloacétate aspartate + α-cétoglutarate glutamate + phénylpyruvate phénylalanine + α-cétoglutarate Pyruvate, phénylpyruvate et oxaloacétate sont des acides α cétoniques. En fait on peut écrire : Acide aminé 1 + α-céto acide A Acide aminé 2 + α-céto acide B - hexosamines glutamine + glucose glucosamine + glutamate Le glucosamine permet la formation de peptidoglycanes b) nucléotides 3) Réactions de classe III : synthèse (macromolécules) - homopolymères A-A-A-A (par exemple de glucose : le glycogène) - hétéropolymère A-B-C-D Ces réactions se déroulent après dégradation (après 2 minutes).