Principes de la Théorie de la Restauration

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THEORIE DE LA RESTAURATION
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Principes de la Théorie de la Restauration
Introduction
Tout œuvre d’art passe par trois phases avant d’être reconnue par nous.
 La première phase est le temps passé dans la pensée de l’artiste, avant qu’il ne procède à son travail.
 La deuxième phase est le temps dont l’artiste a besoin pour achever son œuvre.
 La troisième phase est le temps mis par l’œuvre pour arriver à nous.
La matière de l’œuvre d’art
Dans la première phase, l’œuvre de l’artiste est encore sous forme de matière inconnue d’où toutes les choses
éternelles sont faites. C’est la matière de la pensée qui est en lui et en dehors de lui. C’est le monde sans forme,
sans temps et sans espace. C’est le monde où il y a l’harmonie, l’unité et l’équilibre. C’est le monde où tout
homme réalise en esprit tire ses concepts et ses critères. C’est le monde où l’artiste tire ses révélations et ses
inspirations.
Dans la deuxième phase, l’artiste emploie son imagination et toutes ses capacités artistiques et techniques pour
rejoindre sa pensée dans les formes, les couleurs et la matière. L’œuvre est la sienne. Il peut en faire tout ce qu’il
veut pour l’achever dans les meilleures conditions. Une fois achevée et délivrée au monde, elle n’est plus la
sienne. Elle sera la propriété de l’humanité.
Dans la troisième phase, l’œuvre entreprend un voyage, malgré elle, pour justifier sa présence, dans ce monde
et pour récupérer sa place dans un espace et dans un contexte bien déterminé. Sous l’influence du temps, elle subit
des changements de détérioration.
Après ces trois phases vient le moment le plus important. C’est le moment de notre prise de conscience des
valeurs figuratives et esthétiques qui nous invite à l’appeler “ œuvre d’art”.
L’œuvre d’art comme unité
Une œuvre d’art n’est pas, en tant que telle, composée de parties mais constitue, comme image, une totalité
douée d’une unité propre, qui se réalise dans la continuité de la forme. Unité, donc, essentiellement différente de
celle des choses représentées. Or toute discontinuité, toute interruption, vient forcement troubler la lecture de ce
rythme. Mais, puisque l’unité de la forme n’est pas divisible en parties, chaque fragment qui en subsiste continue à
participer de l’unité rompue, et donc à la suggérer dans la mesure ou il la contient encore en puissance. La
reconstitution, impossible en tant que reprise du processus créateur, reste donc concevable, et même pleinement
justifiée, si on la comprend comme un acte d’interprétation critique, destiné à rétablir une continuité formelle
interrompue, dans la mesure où, celle-ci reste latente dans l’œuvre mutilée, et où la reconstitution rend a la
structure esthétique la clarté de lecture qu’elle avait perdue.
Le problème des lacunes
Il est aujourd’hui évident, pour la compréhension moderne de l’art, que l’extériorisation par l’artiste de l’image
intérieure qui s’élabore en lui n’est pas la copie de cette image, mais une phase décisive de son élaboration : de
sorte qu’il n’y a pas, en peinture ou en sculpture, d’exécution qui ne soit en même temps formulation de l’image.
(B. Croce, Estetica, Bari 1950, C. Brandi, Carmine o della Pittura, Florence, 1947). Or, la démarche créatrice étant
par essence unique, irréproduisible – en toute rigueur, même par l’artiste lui-même qui, ou il se copierait, ou il
ferait une œuvre nouvelle -, toute reprise du processus est donc impossible en raison de sa nature même.
Il semblerait à première vue qu’il faille en conclure à l’impossibilité, et renoncer toute tentative de
reconstitution des parties manquantes d’une œuvre mutilée. Ce serait cependant éluder et résoudre le problème que
les lacunes continuent a poser, et qui exige une solution conforme à l’esthétique nouvelle.
Temps adéquat de l’intervention de la restauration
Le temps mis par l’œuvre d’art pour arriver à nous après son émanation de son créateur, est nécessaire pour sa
maturité, si on peut le dire. Nous avons besoin de cet espace, de cette distance qui nous sépare de l’œuvre pour
pouvoir juger clairement. Car l’œuvre contemporaine s’est amalgamée avec nos sentiments et avec notre
conscience objective. C’est dans la troisième phase de la vie de l’œuvre que notre intervention sera justifiée.
Problèmes de la restauration d’après l’instance historique
Tout oeuvre d’art du passé a son contexte historique d’où elle émane. Quand les documents historiques qui la
font remonter à une époque, à une région, à un peuple, à une personne, sont perdus, nous sommes en présence des
problèmes de l’instance historique. Le manque de cette documentation empêche toute intervention de restauration.
Jihad Y. Kahil
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THEORIE DE LA RESTAURATION
Problèmes de la restauration d’après l’instance esthétique
Pour pouvoir apprécier les valeurs figuratives et esthétiques basées sur la philologie et la tradition, un niveau
culturel doit être assuré par celui qui prend la charge de la restauration. Ce sont ces valeurs qui imprègnent l’œuvre
de ses qualités pittoresque et de beauté. L’instance esthétique comprend les normes de valorisation de l’œuvre
selon un standard élevé. La reconnaissance de ces valeurs est subjective et elle ne peut pas être généralisée.
La patine d’après l’instance historique-esthétique
Toute œuvre d’art présente, du point de vue de sa restauration, un double caractère historique. D’une part, elle
est historique en tant que création de l’homme réalisé à une époque déterminée. D’autre part, elle se présente à
nous à travers le laps de temps qui s’est écoule depuis cette création, et dont l’élimination est inconcevable. Or,
cette durée affecte la matière à laquelle a été confiée la transmission de l’image. Quand les modifications ne nous
apparaissent même pas comme des altérations, mais comme la simple marque du temps, c’est la patine. Aucune
restauration ne pourra donc jamais prétendre rétablir l’état original d’une peinture, par exemple. Elle ne pourra que
révéler l’état actuel des matières originales. Elle ne peut, en aucun cas abolir l’historicité seconde de l’œuvre, le
temps qu’elle a traversé pour se présenter à nous.
Cette constatation nous permet d’aborder le problème critique en reliant son aspect historico-esthétique aux
facteurs matériels dans lesquels il se concrétise. Et c’est ici que trouve sa place la notion de patine. La patine en
effet, est précisément cet effet « normal »du temps sur la matière. Ce n’est pas un concept physique ou chimique,
mais un concept critique. La patine n’est autre chose que l’ensemble de ces altérations « normales » en tant que
qu’elles affectent l’aspect de l’œuvre sans la défigurer.
L’espace de l’œuvre d’art
L’œuvre d’art s’identifie dans l’Imagination qui convient à l’Intuition et non à la Matière. Elle se meut dans des plans
culturels qui reconnaissent en elle une portée cosmique, un message cultuel et culturel pour l’humanité. L’espace de l’œuvre
d’art est reconnu par le support de l’œuvre, par le fond et l’emplacement.
La restauration préventive
Entre la Restauration et l’œuvre d’art il y a un rapport évident de base. Toute oeuvre qui a une valeur
historique et une autre esthétique garde une dignité artistique et mérite d’être restaurée.
La Restauration est alors la tentative de restituer l’œuvre d’art, de la remettre dans son premier état.
Deux principes de base pour la restauration sont indispensables :
1. On ne restaure pas l’Oeuvre d’art mais sa matière.
2. La Conservation des surfaces de l’Oeuvre d’art doit rétablir l’Unité existante de l’Image et non
l’Unité Définitive.
Principes de la Restauration Architectonique
Introduction
La Restauration est l’intervention qui vise à remettre au monument, une valeur culturelle.
Si nous considérons que l’édifice en question, a cette valeur, nous répondons à la première question indispensable
avant d’intervenir à définir le monument dans ses qualités intrinsèques.
Le second acte important, c’est de savoir à quel concept, à quel système philosophique peut-on remettre cette
valeur culturelle du monument pour pouvoir les adopter.
Avec les deux arguments, moral et testimonial, nous pouvons distinguer deux aspects de la Restauration.
L’historien doit définir les deux bases historique et culturelle de l’édifice en question.
Lexique
ITALIE
Restauro
USA
Préservation
Conservazione
-----------
--------------Restauratore
Curator
Conservator
Restorer
-----------
Archéologia
(Romaine)
Jihad Y. Kahil
FRANCE
Restauration
Préservation
Conservation
ESPAGNE
Restauracion
ANGLETERRE
Conservation
Conservacion
Conservateur
Restaurateur
------------Restaurador
Conservation
Restauration
Reconstruction
---------------------------
Archéologie
(Médiévale)
Archeology
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Anastylosi
----------Anastylose
Autentico
----------Authentique
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---------------------------
Anastylosis
Genuine,Autentic
Concepts de la Restauration
L’histoire du passé et le développement de la Restauration ne paraissent pas clairs. Il faut avoir une objectivité
de voir le passé. Commençons par l’histoire de la Restauration qui consiste dans l’étude des Concepts adoptés par
les architectes du passé.
Une conscience est née vers la deuxième moitié du XVIIIème Siècle, quand la pensée classique était élaborée
presque dans tous les domaines de l’art.
Et, c’est en 1794, deux ans après la République, que la “Convention Nationale Française“ proclamait le
principe de la Conservation des Monuments Historiques. Ceci dérive d’un motif historique et d’une façon
évoluée de voir l’histoire. C’est un acte réfléchi crée d’un processus créatif.
Entre le Passé et la Restauration, il y a un rapport philosophique et culturel, basé sur une cause morale pour le
bien de toute l’humanité. On avait besoin de présenter le Passé d’une façon créatrice. Il s’en déduit plusieurs
genres de restauration :
1. La Restauration Archéologique.
2. La Restauration Historique.
3. La Restauration Esthétique.
4. La Restauration Critique.
A Rome, la restauration de l’Arc de Titus a eu lieu en 1818, et celle de l’Arc de Constantin en 1821. La
première restauration était l’intervention pour la Préservation au lieu de laisser le Monument tomber en ruine. La
restauration de l’Église de St. Paul (San Paolo fuori le mura) était achevée en 1818, visant à ne jamais toucher aux
éléments antiques, ni à les changer, il fallait les rétablir comme ils existaient.
C’est en 1825 que la Restauration Stylistique a commencé en prenant forme comme étant une intégration
stylistique. Chaque Monument a sa personnalité et une manifestation d’un Style connu. Alors quelle est la
méthode du restaurateur stylistique ? Il reprend l’Etat et l’Unité Stylistique en considérant que chaque style a une
vie autonome. (Voir Mérimée, Viollet-Le-Duc,...) Le changement des matériaux et de la couleur ne gêne pas la
Restauration Stylistique qui est appelée à rétablir le Monument aux modes généraux du Style en ignorant les vraies
qualités formelles qui déterminent sa singularité. Voici quelques exemples :
Florence : l’Église Santa Croce; Milan : l’Église San Marco et l’Église Santa Croce vers 1850 ; Florence : Le
Palais Gondi fin 18eme siècle; Bologne : l’Église San Dominico fin 18eme siècle; Florence : Plais de l’Art, 19eme
siècle; Bologne : Palais du Rois Enzo : le coté liberé en style; Venise : Magasin des Turcs ; Pise : LA Place de
l’Horloge ; Ferrare : le Palais, innovation stylistique.
Ruskin, poète anglais romantique, plus raffiné que Viollet-Le-Duc, était le précurseur d’une approche spéciale
de la Restauration. D’après lui, il faut parler au Monument comme à une personne qui sent ou qui souffre en
passant par plusieurs phases dans sa vie. Il est immoral de toucher à un Monument, même s’il va s’écrouler. Il faut
reconnaître la vie ou la naissance et la mort du Monument.
La délicatesse du poète montre un sentiment d’adoration. Il considère le Monument dans son état actuel comme
contenant toutes les richesses historiques et esthétiques. Alors on en déduit, non pas une Restauration mais une
méditation contemplative d’amour passion et morbide pour le Monument Historique.
La Restauration Architectonique est une conception typiquement moderne. Elle se meut d’une mode neuve et
diverse de considérer les Monuments du passé et d’intervenir sur eux en modifiant leur forme visible et leur
organisme statique et structural.
Le principe fondamental de la Restauration, reste constamment à la base des doctrines qui se sont succédées
au cours du XIXeme Siècle. Il est de restituer ou remettre l’œuvre Architectonique dans son monde historiquement
déterminé, en le plaçant idéalement dans l’ambiance d’où il est sorti et en considérant les rapports avec la culture
et le goût de son temps. Et en même temps, c’est opérer sur les Monuments pour les rendre de nouveau vivants et
actuels, lesquels sont une partie vigoureuse et intégrale du monde moderne.
Cette position émane d’une évaluation de caractère critique et elle naît en cohérence avec sa propre époque. La
culture artistique s’explique dans la conscience historique qui fait la distinction entre le Passé et le Présent. Elle
permet de définir l’Antique en le reportant dans sa dimension réelle et historique. Elle s’est passée dans les
derniers vingt ans du XVIIIeme Siècle.
Le développement du rationalisme architectonique dans l’art français et dans la littérature italienne qui se
base sur l’argument et spécialement sur la priorité d’une vision historique philosophique et historique critique,
Jihad Y. Kahil
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menait à un bouleversement radical, qui se manifeste dans la considération de l’Architecture, pour moitié, comme
un acte réfléchi, distinct et autonome respectant le processus créatif.
Le passé et le présent, jusque-là, sont unis dans la continuité du développement d’un même goût et d’un même
langage. Ceci rendait inactuelle une perspective historique et une distinction critique d’agir concrètement. Ils
deviennent deux mondes différents et opposés dans une conception où le présent retrouve et comprend le passé.
Avec un tel jugement et de cette valorisation se meut l’exigence du respect et de la conservation du Monument
dans sa valeur formelle et historique d’actualité permanente.
Si la Restauration est donc une opération consciente de critique et d’intervention, il est impropre de parler
des restaurations, à propos des opérations faites sur les monuments exécutés avec des critères et des buts de toute
sorte, avant la fin du XVIIIeme Siècle.
C’est pourquoi, la Restauration Architectonique, dans le sens que la culture moderne lui a donné, peut être
caractérisée et étudiée seule à partir du décret connu de 1794, avec lequel la Convention Nationale Française
proclamait le principe de la conservation des Monuments.
De cette position culturelle jaillit une profonde expérience qui fait vivre le monument dans sa forme et sa
valeur significative. Plusieurs modes se sont développés pour exercer le respect de l’œuvre architecturale,
théoriquement distincts et historiquement déterminés selon la conception de l’architecture propre à la pensée de
chaque moment culturel.
Chronologiquement, la première conception de la restauration se base sur le principe d’obtenir la recomposition
de l’édifice moyennant l’emploi des parties originales ou leur reproduction. Avec un tel critère, dans les trente
premières années du XIXeme Siècle, étaient exécutées des restaurations sur des monuments de l’Antiquité
Classique, spécialement à Rome, inspirées dans le but de retrouver dans ces opérations la beauté exemplaire et
normative affirmée de la culture néoclassique.
Après les années 1830 et 1870, la culture française parvient à une propre et originale formation se rapportant
au concept de “Style,” entendu comme une réalité historique et formelle, unitaire et cohérente, limitée dans
le temps et bien définie dans ses modes figuratives et protagonistes de l’histoire artistique.
Il s’ensuit que chaque monument, dans sa forme originaire, constitue une « unité stylistique », qui absorbe et
annule l’individualité de l’œuvre, unité stylistique que la restauration est appelée à restituer, se reportant aux
modes généraux du style et ignorant les vraies qualités formelles que détermine la singularité.
Il arrive, comme ça, à légitimer et imposer les reconstructions et encore les adjonctions, basées seulement sur
les analogies typologiques et stylistiques avec d’autres monuments, altérant la structure et la forme de l’œuvre au
nom d’une abstraite cohérence de style.
Ce type de Restauration, dit « Stylistique » et qui est encore camouflé, a pris aussi le nom de Viollet-LeDuc(1814-1879), historien et théoricien de l’architecture et de la restauration, et restaurateur un grand nombre de
monuments du Moyen Age, notamment l’Abbatiale de Vézelay, Notre-Dame de Paris et d’autres Cathédrales, le
Château de Pierrefonds, la Cité de Carcassonne. Il est l’auteur, entre autres ouvrages, du monumental Dictionnaire
raisonné de l’architecture française du XI au XVIe siècle et des Entretiens sur l’architecture, qui ont défini les
bases d’un nouveau rationalisme, fondé sur l’emploi du métal. Il est le plus éminent et représentatif amateur du
Moyen-Age, dont ses énonciations sont depuis son temps, citées comme normatives : “Restaurer un édifice
signifie le rétablir en un état d’intégralité qui peut ne jamais avoir existé ”.
Le jugement très sévère basé spécialement sur les théories de la restauration philologique, sur les principes et
les méthodes de la restauration stylistique, doit aujourd’hui être justifié vis à vis du contraste des résultats des
opérations exécutées sur les monuments.
La culture française a reconnu, avec l’affirmation de Didéron, de Mérimée, de Dali et même de Viollet-LeDuc, la nécessité de maintenir l’intégrité des édifices antiques.
Près de la moitie du XIXeme Siècle, la “restauration stylistique” se place à côté de “la restauration
romantique » grâce au mouvement anglais qui veut substituer l’intervention large avec l’absolu respect religieux
du monument dans la forme d’où il est parvenu. Cette conception étant le résultat de l’attitude littéraire qui
confère au passé et à ses œuvres, une valeur exclusive de respect, engendre un pur désir passionné de sincérité, un
amour passion presque morbide pour le monument et la conséquente répulsion pour l’intervention de l’homme,
considérée comme brutale et sacrilège.
Par conséquent, et devant la nécessité réelle d’assurer la conservation, la restauration romantique répond avec
le renoncement fataliste : le monument doit rester ainsi, comme il est, et il ne doit pas être touché mais il doit
être laissé s’abîmer et puis tomber en ruine.
Jihad Y. Kahil
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Pour Ruskin, qui est le vrai partisan de cette position, la restauration visant comme conservation, est un
mensonge puisque, substituant les anciennes pierres, elle détruit le monument et obtient seulement un modèle de
l’ancien édifice. Et, à la demande de prolonger la vie de l’œuvre architecturale, Ruskin insiste pour que la
restauration soit l’abandon équivalent à la destruction : “ Regardez la nécessité en face et en acceptez toutes les
conséquences. La destruction s’impose. Acceptez-la, détruisez le monument, jetez ses pierres dans les angles
éloignés, en faites des choses inutiles, mais faites-le honnêtement, ne le substituez pas avec le mensonge”.
Après cinquante ans de suprématie de la méthode stylistique, deux neuves positions s’imposent presque en
même temps, dans les dix ans, de 1880 à 1890.
L’une dite de la “Restauration Historique “, réservée et appliquée par Luca Beltrami et qui représente une
révision encore liée au critère de l’intervention ample et innovatrice. Elle prend sa fondation dans les conquêtes de
la Philologie (recherche de la vérité objective dans les faits divers) et la conviction que chaque monument est un
fait distinct et conclu, pour justifier l’abandon du critère de déduire par analogie des éléments et formes des autres
monuments, et pour considérer arbitraire et falsificatrice chaque prétention d’invention personnelle.
Au restaurateur défini comme un “ artiste re-créateur “ qui cherchait à s’identifier au premier architecte, se
substitue l’« historien-archiviste », lequel fonde la propre action exclusivement sur les témoignages certains des
documents de l’archive aux peintures, des analyses approfondies du monument aux textes littéraires du temps.
Mais déjà en 1883, Camillo Boito avait énoncé les principes fondamentaux de la restauration tendant à un sens
moderne, dépassant la partialité et l’exclusivisme des points de vue stylistique, romantique, et historique, en une
conception plus mure et complexe, mise à jour, respectant le développement des sciences historiques, et qui peut
être résumé dans les points suivants :
1. Les monuments se valorisent, non seulement d’après l’étude de leur architecture, mais également ils sont
un document de l’histoire des peuples et, par conséquent, ils doivent être respectés, puisque leur altération
nous induit en erreur et conduit à des déductions fausses.
2. Ils doivent être plutôt consolidés que réparés, plutôt réparés que restaurés, évitant les adjonctions et les
renouvellements.
3. Au cas ou les adjonctions soient indispensables, pour des raisons statiques ou pour d’autres motifs d’une
nécessité absolue, ils doivent être exécutés sur les dates absolument certaines et avec des caractères et
matériels divers mais tout en conservant à l’édifice son aspect actuel et sa forme architecturale, artistique
ou pittoresque.
4. Les adjonctions opérées aux temps divers doivent être considérées comme des parties du monument et
maintenues, sauf dans le cas qui a causé des déguisements et des altérations (ordre du jour voté au
Congrès des Ingénieurs et Architectes Italiens à Rome en 1883 ).
Cette doctrine s’impose et s’étend très lentement et seulement en 1931, la Conférence Internationale
d’Athènes pour la Restauration, en reçoit les principes en recommandant une constante opération de
manutention et de consolidation des monuments et admettant l’emploi des moyens techniques et des systèmes
constructifs les plus modernes.
En 1932, Gustavo Giovannoni en fournit une nouvelle élaboration mise à jour et étendue, mais encore plus
systématique et rigide car elle soulève à conférer une majeure importance aux éléments documentaires respectant
les valeurs formelles. Elle assume, en Italie, un caractère et une validité de norme avec le nom de « Carta del
Restauro »
Dans la théorie renouvelée, improprement dite “Restauration Scientifique”, le trait saillant est celui de la
conservation : “ tous les éléments ayant des caractères d’art ou de souvenir historique, appartenant à
n’importe quel temps, doivent être conservés sans que le désir de l’unité stylistique et du retour à la forme
primitive intervienne à exclure quelques uns au détriment des autres”.
Mais l’intérêt majeur réside dans les préambules apportés pour justifier une telle norme : « Dans l’œuvre de la
restauration doivent s’unir, mais non s’annuler, des critères variés de divers ordres :
 Les raisons historiques qui ne peuvent effacer aucune des phases à travers ce qui a composé le monument,
ni déformer sa connaissance avec des adjonctions, ni égarer les recherches analytiques.
 Le concept architectural qui entend reporter le monument à une fonction d’art et à une unité de ligne ;
 Le critère qui dérive du sentiment des citadins, de l’esprit de la ville, avec leurs souvenirs et leurs
nostalgies, et celui des nécessités administratives relatives aux moyens nécessaires et à l’utilisation
pratique « .
Jihad Y. Kahil
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C’est pourquoi, ce type de restauration assimile l’œuvre architecturale comme un document, et la considère en
tant que témoignage à sauvegarder, car elle constitue la preuve de la présence d’un certain type de bâtiment ou
forme stylistique en ce moment et lieu déterminés et de leur « cause » et « dérivations » .
La restauration scientifique, qui devrait, au contraire, s’appeler philologique, révèle la propre inadéquation
en 1943-1945, lorsque se doivent affronter les conséquences des destructions dues à la guerre; l’importance des
dommages rend inapplicable la méthode et fait naître une réflexion des motifs spirituels et des courants culturels
relatifs au complexité des opérations rendues nécessaires.
La position philologique qui veut considérer le mouvement comme témoignage historique, mais en ignore, au
contraire, la valeur artistique est déclarée inacceptable. Une œuvre architecturale n’est pas seulement un document,
mais elle est surtout un acte qui, dans sa forme, exprime totalement un monde spirituel et que, essentiellement
pour cela, assume importance et valeur. Elle représente pour notre culture, le degré le plus haut pour sa valeur
artistique et justement, de cette fondamentale considération, jaillit le nouveau principe informateur de la
restauration : « attribuer à la valeur artistique la priorité absolue par rapport aux autres aspects et
caractères de l’œuvre, lesquels doivent être considérés seulement en dépendance et en fonction de cette
unique valeur. »
La nouvelle théorie actuelle part d’un procédé logique qui applique au thème l’esthétique spiritualiste : si
l’architecture est art et, par conséquent, l’œuvre architecturale est œuvre d’art :
 Le premier devoir du restaurateur devra être celui de caractériser la valeur du monument et au plutôt,
reconnaître en lui, au moins la présence de la qualité artistique. Mais cette reconnaissance est un acte
critique, un jugement fondé sur le critère qui identifie, dans la valeur artistique et par conséquent dans
les aspects figuratifs, le degré d’importance et la valeur même de l’œuvre.
 Le second devoir, basé sur le premier, est de récupérer en restituant et libérant l’œuvre d’art : ç’est à
dire l’entier complexe des éléments figuratifs qui constitue l’image et à travers lesquels il réalise et
exprime la propre individualité et spiritualité de l’œuvre d’art.
Chaque opération devra être subordonnée, au but de re-intégrer et conserver la valeur expressive de l’œuvre,
puisque l’important est de rejoindre la libération de sa vraie forme.
Au contraire, quand les destructions sont graves, ayant grandement mutilé ou détruit l’image, il n’est pas
absolument possible de retrouver le monument comme avant car l’acte créateur de l’artiste est unique et
impossible à le répéter.
De cette composition dérive les critères à adopter et qui constituent une radicale transformation et un
renversement de la méthode philologique:
1. La nécessité d’éliminer ces superpositions et adjonctions importantes et de valeur linguistique et
testimoniale qui peuvent abîmer l’intégrité architectonique et figurative.
2. La défense de reconstruire les destructions qui ont causé la perte de l’unité figurative.
3. La légitimité des reconstructions, pourvues qu’elles soient à l’abri de tout danger, complétant les parties
manquantes, en mode de redonner la vue authentique plutôt que designer, à vue d’œil, les adjonctions.
La rigueur de l’application de ces normes pouvait être atteinte proportionnellement à l’imparfaite qualité
formelle, lorsque le moment n’atteint pas la plénitude expressive. Elle est de définir, comme manifestation de
langage, que la priorité doit être toujours donnée aux valeurs figuratives.
Définie de cette façon, la restauration coïncide avec l’action critique donnée tant que la durée de l’opération
la précise. La conscience de l’acte qui s’achève et le complet contrôle de ses résultats, doivent s’accompagner.
Mais, quand le parcours de l’image conduit sur la forme figurée aboutit à des interruptions par la destruction ou
l’encombrement visuel, le processus critique est appelé à se servir de la fantaisie pour recomposer les parties
manquantes ou reproduire celles cachées et retrouver enfin l’accomplie unité de l’œuvre, anticipant et avançant la
vision du monument restauré.
Dans de tel cas, la fantaisie d’évoquer devient productrice et le premier pas s’achève pour intégrer le procédé
critique avec la création artistique. Celle-la intervient directement après, dans le cas ou les éléments restés, ne sont
pas suffisants pour fournir la trace pour restituer une ou plus des parties manquantes de l’édifice, de sorte que le
restaurateur se trouve être obligé de les substituer avec des éléments nouveaux pour redonner à l’œuvre une propre
unité et continuité formelle, profitant d’un libre choix créateur.
La restauration comme procédé critique et la restauration comme acte créatif sont donc liées d’un rapport
dialectique dans lequel le premier définit les conditions que l’autre doit adopter comme propre intime préambules
et ou l’action critique réalise la compréhension de l’œuvre architecturale que l’action créatrice est appelée à
poursuivre et à intégrer.
Jihad Y. Kahil
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