8/12/2008 : Mr Tournade MALADIES ORGANIQUES MODALITES MENTALES. En psychanalyse on fait une différence extrêmement sérieuse entre l’organisme (le réel vivant, biologique physiologique, chimique) et le corps (la part mentale de l’organisme.). L’intersection entre organisme et psychisme concerne 2 domaines : - Le sujet humain à une image du corps, cette image n’est pas du tout naturelle (c’est une construction mentale), mais cette image s’appuie sur l’organisme réel, c’est une représentation mentale. - Une part de l’organisme est affectée par le langage (définition de l’affect : le fait que l’organisme soit touché, affecté par le langage.). Si on reçoit une bonne ou une mauvaise nouvelle, il va y avoir des réactions corporelles qui témoignent que le langage peut venir toucher le corps. En psychanalyse tous les affects ne sont pas équivalents, Freud va montrer qu’il y a un affect particulier qui domine tous les autres, l’angoisse, car toujours selon Freud les affects sont trompeurs. Lacan fera ce jeu de mots « senti » « ment ». Les affects peuvent se renverser dans leur contraire. Les affects sont trompeurs, sauf l’angoisse selon la psychanalyse, et pour une raison de logique car tous les affects ont toujours un motif. Chez l’enfant, l’angoisse se transforme en objet et se transforme en peur, ce qui est « rassurant ». L’angoisse n’est pas un phénomène organique, il y a des trajets biochimiques a l’angoisse mais ce n’est pas cela qui cause l’angoisse. Freud montrera également que l’angoisse est à l’origine d’un certain nombre de pathologies mentales et même à l’origine de certains disfonctionnements du vivant, cela a donné lieu après Freud à tout un tas de délires théoriques qui se sont mis à expliquer un certain nombre de pathologies organiques, comme relevant de la psychosomatique. I/- Le symptôme psychanalytique. La psychanalyse est née à partir de pathologies organiques non explicables par la médecine. Elle n’est pas née dans l’espoir de guérir les fous. Ces signes de maladies sont appelées symptômes. La médecine du 19ème siècle était embarrassée par tout un tas de symptômes qui affectaient le somatique mais dont la cause était énigmatique. Bizarrement ces symptômes particuliers concernaient la plupart du temps des jeunes femmes qui se retrouvaient avec des paralysies, des troubles respiratoires voire même dans certains cas des cécités. 2 théories explicatives se confrontaient : - La théorie neurologique (on découvre à cette époque le rôle du cerveau), qui a dans l’idée qu’on comprendra plus tard ces symptômes. - La seconde prend en compte le fait que ce ne soit que des jeunes femmes qui soient atteintes, on obtient alors un second groupe de médecins qui pensent que cela est de la fabulation, elles font du théâtre, ces symptômes ne sont pas réels, ils sont faux Freud lui prend une 3ème voie, notamment après son passage en France, il remarque que l’ont peut faire disparaître ces symptômes sous l’hypnose. Ce qui montre que ces symptômes étaient sensibles au langage mais pas dans un état de pleine conscience. Freud cherche une autre technique pour faire disparaitre les symptômes mais cette fois ci en état de conscience. Pour Freud ces symptômes sont réels, mais leur cause n’est pas biologique. On appelle ces symptômes « hystériques » (d’après les médecins de l’antiquité, vient de hystéron = l’utérus, l’utérus (la fonction de l’organe) migrait dans le corps et là où l’utérus allait cela donnaient des syndromes hystériques). Ces symptômes ont des caractéristiques : Pour parler de symptôme hystérique il faut que ce symptôme soit un trouble fonctionnel, autrement dit aucun phénomène organique n’est mis en jeu, seule la fonction de l’organe ou du membre est atteint. Freud montre aussi qu’il y a un processus à ces symptômes et ce processus il l’appellera la « conversion ». La conversion est un changement de langage, une mutation d’un domaine vers un autre. Ces symptômes hystériques résultent d’une conversion de l’angoisse en phénomènes corporels, sachant que l’angoisse se manifeste déjà par des phénomènes somatiques qui vont se localiser dans un endroit particulier. L’hystérique devient alors indifférente, elle a une indifférence affective et ce au contraire des hommes où l’angoisse devient de la culpabilité et reste donc dans le domaine de l’affectif et ne se transforme pas en syndrome corporel. Le problème c’est qu’après Freud, certains psychiatres et psychanalystes vont vouloir utiliser ce modèle de la conversion pour l’appliquer à des pathologies organiques, c'est-à-dire des maladies d’organe alors qu’il n’y a pas de trouble fonctionnel. Par exemple on peut citer l’ulcère, dont l’origine serait psychique, et serait provoqué par l’anxiété, le stress. Or l’ulcère n’est pas un trouble fonctionnel, c’est une liaison d’organe, ce n’est pas un trouble de la fonction digestive, on ne peut donc pas appliquer la théorie Freudienne. II/- Maladies organiques et défaillances mentales. Malgré les précautions de Freud, certaines théories vont toutefois essayer d’expliquer le processus de certaines pathologies dont la cause est énigmatique. La théorie de l’école de Paris (à laquelle il ne faut pas croire du tout), qui démarre dans les années 60 avec De Muzan et Marty, et qui est très en vogue aujourd’hui. Elle se résume en cette phrase, « le symptôme psychosomatique est bête ». Leur idée est que les maladies psychosomatiques auraient pour origine une difficulté, voire une carence, une défaillance, à mentaliser. Chez les malades psychosomatiques l’absence de verbalisation des affects crée la maladie psychosomatique. Il se rendent compte lors des entretiens avec les malades psychosomatiques, ils s’ennuie, l’échange est très pauvre et vont en faire le phénomène de la psychosomatique. Ils s’appuient sur plusieurs points cliniques. Les hystériques seraient donc des sujets qui ont une manière de parler particulière, ce serait des gens dont le discours serait quasi uniquement appuyé sur la réalité concrète matérielle. Lorsqu’on leur demande de décrire leur pathologie physique ils n’auraient aucun problème, mais lorsqu’il s’agirait de décrire leurs états d’âme ce serait autre chose. Ils sont englués dans la réalité. Ce serait aussi des sujet ayant peut de fantaisie et dont la préoccupation serait d’apparaitre normal auprès de l’autre. Lorsqu’on leur demande de décrire leurs émotions, la question leur semblerait incongrue, et lorsqu’ils s’y essayent ils montreraient une difficulté importante à trouver les mots pour les décrire. Si bien que dans les années 90, la psychiatrie va fonder un mot pour décrire ce phénomène, l’alexithymie (thymie= humeur, lexi= lecture, a= privatif → difficulté à décrypter les émotions). Ils disent également que ces sujets rêvent extrêmement rarement. Leur relation aux autres est elle aussi très particulière, ce seraient des sujets ayant très peu de relations, qui seraient très près de la solitude, et lorsqu’ils auraient des relations sociales ils seraient très voire trop dépendants de l’autre. Si bien que les théoriciens de cette école prennent le parti de dire que ces sujets seraient plutôt narcissiques (personnes extrêmement tournés vers eux-mêmes). Pour résumer tous ces points cliniques, l’école de Paris a pris le parti de dire que les maladies psychosomatiques seraient la conséquence d’un défaut de la pensée. La vraie maladie serait du côté de la pensée. Ils ont appelé ceci la pensée opératoire en référence à Piaget. Du côté de l’hystérie Freud à découvert un sens inconscient, et il se rend compte que la découverte par le sujet dans l’analyse de ce sens va faire disparaitre le symptôme. Cela veut donc bien dire que ce symptôme est sensible à la fonction de la parole puisqu’il peut être modifié par la parole elle-même. Dire que ce symptôme peut être interpréter veut dire que ce symptôme obéît aux lois du langage. Dans le psychosomatique l’idée de l’école de Paris c’est que l’affect n’arrive pas à passer par le langage, au lieu de donner des phénomènes de corps (troubles fonctionnels), il atteindrait directement l’organisme. C’est comme s’il y avait un cours circuit du langage. Comme l’affect ne passe pas par ce processus de conversion, il y aurait toujours un reste d’affect à l’état pur. L’école de Paris se rend compte que ces sujets psychosomatiques seraient des sujets extrêmement anxieux, ce sont des gens nerveux, irritables mais qui ne peuvent pas parler de leurs émotions. Cela est une preuve supplémentaire que quelque chose n’arrive pas à passer dans le langage. Contrairement à l’école de Paris, Lacan va refuser d’appliquer le terme de symptôme aux pathologies psychosomatiques. Il va parler à la place de PPS (Phénomènes Psychosomatiques). On constate que c’est là mais on ne connaît pas la cause ni le sens. III/- La maladie et sa fonction : exemple de l’asthme infantile. Une maladie organique, même si la cause est purement biologique, reste quand même une maladie vécue par un sujet, c'est-à-dire que la maladie, le sujet va s’en servir pour quelque chose. Il va lui donner une fonction, se débrouiller pour qu’elle lui serve à quelque chose. On emploi alors le terme de « bénéfice secondaire », on subit la maladie mais on essaye d’en retirer un profit. Dans le cas de l’asthme, une composante psychologique a été reconnue depuis fort longtemps, puisque la crise d’asthme peut être déclenchée par des circonstances particulières (elle peut se calmer par l’apaisement de l’angoisse). Les pédiatres ont noté très tôt chez l’enfant asthmatique une relation mère-enfant particulière. Classiquement, la relation parent enfant est extrêmement ambivalente, de sentiments opposés et mélangés. Il y aurait particulièrement entre la mère et l’enfant une difficulté à se séparer à la fois chez la mère et chez l’enfant. Le problème est que cette relation particulière est vite mise en cause de l’asthme par les auteurs. Franchir ce cap là au niveau théorique est un peu rapide car rien ne permet d’affirmer que cette relation soit cause ou conséquence. Autre chose énigmatique, il n’est pas rare de noter que l’enfant asthmatique a été un nourrisson eczémateux. La relation mère enfant était déjà très particulière dès la naissance, ce serait des mères extrêmement angoissées, et comme le nourrisson n’à pas encore accès au langage l’angoisse de sa mère provoquerait une insécurité très forte chez lui, et s’exprimerais directement dans l’eczéma. Aujourd’hui on est un petit peut moins affirmatif sur la question. L’asthme est plutôt conçu comme le résultat entre l’interaction entre 3 facteurs : - Psychiques du côté de l’enfant - Relationnels - Organiques En médecine, quand on à découvert les substances allergènes cela à changé notre conception de l’asthme. Il n’en reste que la crise d’asthme peut être déclenchée aussi bien en présence ou en absence de substance allergène et inversement. La seule conclusion scientifique que l’on peut en tirer est que le déclenchement de la crise d’asthme n’est pas univoque. Néanmoins on fait le constat suivant, le premier déclenchement de l’asthme n’est pas sans lien avec une situation traumatique (séparation entre la mère et l’enfant). Deuxième constat, les crises ultérieures semblent se produire dans un certain type de contexte (dès l’absence de la mère, ou dans un même lieu). Troisième constat, l’apparition et la disparition de l’asthme semble connectée à des moments de la vie particuliers. Souvent l’asthme apparait vers la 3ème année, moment où l’enfant est scolarisé. Dans la plupart des cas, l’asthme disparait à la puberté, moment de la vie du sujet où il est appelé à remanier, retravailler sa relation à « l’autre » parental. Avant de partir dans la causalité psychosomatique pure, il vaut mieux dans la relation avec les patients renverser le psychosomatique et en faire du somatopsychique. C'est-à-dire que l’on a un phénomène du côté de l’organisme et on voit la fonction que il va avoir sur le sujet. Cela donnerait une autre vision de l’asthme. Le sujet peut tout à fait se servir de sa crise d’asthme pour montrer sa difficulté à se passer de l’autre (cela ne veut pas dire que c’est la cause). A l’inverse, il peut s’en servir pour la raison exactement inverse, c'est-à-dire pour montrer un trop de présence de l’autre. Du coup la crise d’asthme devient une barrière, une défense dans la relation à l’autre. Cela peut être une manière pour l’enfant de témoigner à sa mère qu’elle est étouffante. Dans les soins infirmiers, et pas uniquement pour l’asthme, la question de ce bénéfice, ce profit de la fonction que le sujet donne à sa pathologie, fait partie intégrante du soin infirmier dans le sens où cela parfois explique pourquoi un sujet malgré toute sa bonne volonté est réticent au soin. Le profit qu’il tire de sa maladie est parfois trop important pour vouloir s’en débarrasser. Dans ce lien entre maladie organique et fonctionnement psychique on pourrait classer 3 types de phénomènes : - Le psychosomatique, la maladie du réel qui touche l’organisme - La conversion hystérique (conversion de l’angoisse), maladie du symbolique dans le sens qu’elle a à voir avec tout ce qui touche au langage. L’hystérique est malade d’une parole inconsciente. - L’hypochondrie, personnes persuadées (certitude) d’être atteintes de pathologies organiques alors qu’il n’y en a pas du tout mais rien ne fait vaciller leurs certitudes qui sont alors inébranlables.