La création monétaire La monnaie devient une question centrale de l’analyse économique au XX°. À la différence de Say (« la monnaie n’est qu’un voile »), la monnaie devient un instrument de la politique économique et de la régulation. La création monétaire est un instrument fondamental de la politique monétaire. 1. Définition La création monétaire vise à assurer les moyens de paiement nécessaires aux transactions des agents économiques. Elle est la contrepartie de l’activité économique. Elle n’intervient qu’à partir du moment où une institution financière injecte de la monnaie vers des agents non financiers. 2. Les mécanismes de la création monétaire La monnaie apparaît à partir de l’activité des institutions financières : Les banques de second rang : trois mécanismes de base Le crédit est une créance sur l’économie. Ex : crédit de 20 000 € accordé par la banque B à un ménage M Bilan de B Actif Créance sur l’économie : 20 000 € Passif Compte courant de M : 20 000 € Bilan de M Avoir (actif) Compte courant : 20 000 € Dettes (passif) Dette : 20 000 € Le déficit budgétaire Les créances ne sont plus sur les ménages, mais sur l’Etat. Les déficits colossaux des Etats depuis le début des années 80 expliquent le développement des marchés financiers. La conversion de devises : les créances sur l’extérieur La monnaie est un moyen de paiement en monnaie nationale détenu par un agent non financier résident. La banque doit monétiser la créance détenue sur l’étranger (=> problème des excédents commerciaux qui peuvent se traduire par une inflation monétaire quand ils sont convertis). Ces créances peuvent être à vue ou à court terme. Le Trésor public C’est l’agent qui assure la gestion quotidienne des recettes et dépenses de l’Etat. Sa fonction de création monétaire est aujourd’hui délaissée. Il crée de la monnaie scripturale quand il fait une dépense vers un agent non financier ou que les bons du Trésor arrivent à échéance. Il détruit de monnaie quand il prélève les impôts et émet des bons du Trésor. Le solde permet une étude de l’évolution de la création de masse monétaire par le Trésor public. Mais aujourd’hui le déficit budgétaire est financé par les marchés financiers, il n’y a donc plus de véritable création de monnaie comme quand le Trésor faisait fonctionner la planche à billets. La Banque centrale Elle crée de la monnaie fiduciaire fondée sur la confiance. Après les deux principales déroutes financières (Law sous la Régence, les assignats sous la Révolution), il devient nécessaire d’assurer la confiance. La banque centrale contrôle l’émission monétaire depuis 1848. Elle crée de la monnaie scripturale au travers du réescompte. On appelle escompte la pratique de taux d’intérêt sur une créance, et donc réescompte la pratique de taux d’intérêt sur ce taux d’intérêt , oui oui celui-là ! Il existe deux types de monnaie banque centrale : La monnaie non empruntée dépend : Du déficit public : en cas de déficit, la banque centrale est amenée à intervenir sur le marché financieret à acheter des bons du Trésor (opération d’open-market). En créant cette monnaie, elle crée de la liquidité bancaire. De l’excédent de la balance des paiements : les banques disposent de devises et si la Banque les rachète, il y a création de monnaie banque centrale. La création de monnaie empruntée est une opération qui s’effectue quand les banques de second rang ont besoin de trésorerie ou par le réescompte d’effets publics ou privés. On appelle base monétaire l’ensemble de la monnaie créée par la BC (fiduciaire et scripturale) La masse monétaire C’est la quantité de monnaie en circulation sur le territoire. On distingue 4 agrégats de masse monétaire : M1 : billets, dépôts à vue, monnaie métallique, monnaie divisionnaire M2 : M1 et les placements sur livret M3 : M2, les avoirs en devises, les placements à terme et les titres de marché monétaire émis par les établissements de crédit M4 : M3, l’épargne contractuelle et les titres de marché monétaire émis par des agents non financiers M3 est la masse monétaire au sens officiel. Depuis les Trente Glorieuses, M3 évolue plus vite que le rythme de la croissance car elle est nécessaire à la fluidité des échanges. Les phases de crise s’accompagnent d’une contraction de la masse monétaire (contraction de M3 dans la crise de l’immobilier de 93-94). Il peut être difficile de mesurer la masse monétaire en raison des glissements des placements d’un agrégat à un autre de plus en plus rapides (par Internet par exemple) qui résultent d’un arbitrage en temps réel par les agents économiques en fonction des opportunités. 3. Les limites à la création monétaire La création monétaire est a priori illimitée puisqu’il suffit d’accorder un crédit pour créer de la monnaie. Il existe cependant des limites : Les fuites hors du circuit : Les billets et virements sont des fuites pour chaque banque car s’ils sont trop importants elle devra se financer auprès de la banque centrale Règle de la proportionnalité : les fuites hors du circuit d’une banque sont compensées vers les fuites vers son circuit lorsque la part de la collecte de liquidités d’une banque est égale à sa part dans les crédits accordés. La faiblesse de la demande de crédit : C’est le facteur le plus important sur lequel la banque n’a pas d’influence, si ce n’est par les différences de contrats (taux à intérêt fixe, variable…) liées aux concurrences entre les banques pour attirer plus de clients. Les risques pris par la banque : Elle s’autolimite dans la délivrance du crédit en fonction des agents (selon qu’ils ont une « bonne » ou une « mauvaise » signature), voir la faillite du Crédit Lyonnais La politique monétaire : La Banque centrale peut intervenir sur la masse des liquidités bancaires par différents instruments : Modification de la définition des titres réescomptables Modulation du taux de réserves obligatoires Modulation du taux d’intérêt auquel elle prête sa monnaie banque centrale 4. Le multiplicateur de crédit Il détermine l’étendue potentielle de la masse monétaire. On a : m = Masse monétaire M3 / Base monétaire Rappel : la base monétaire est le passif de la banque centrale, c’est-à-dire les réserves à la banque et les billets en circulation. La monnaie banque centrale MBC = billets (B) + réserves obligatoires (RO) On appelle b la propension moyenne des agents non financiers à détenir de la monnaie fiduciaire, donc b = B/M Si r est le taux de réserves obligatoires, r = RO/D où D représente les dépôts à vue. M = B+rD On a donc m= 1/ (b+r-br) Et m désigne ce que les banques accordent comme crédit en fonction des réserves en MBC qu’elles détiennent. Le diviseur de crédit est d = b+r-br, c’est le montant de MBC que les banques doivent se procurer pour couvrir les crédits qu’elles ont accordés. Il conduit à considérer la banque comme une firme financière où les inputs sont les dépôts et les réserves et les outputs sont les crédits accordés. Pour maximiser son profit, la banque accorde des crédits nouveaux jusqu’à ce que leur rendement marginal soit égal au coût marginal d’obtention des réserves supplémentaires.