CEM/PER Workshop Nouakchott, CFED Jeudi 14 Décembre Minutes Le jeudi 14 décembre s’est tenu à Nouakchott l’atelier de restitution du Rapport Economique Pays actualisé et de la Revue des Dépenses Publiques. L’atelier était coprésidé par le Ministre des Affaires Economiques et du Développement (MAED) et le Représentant Résident. Etaient également présents des représentants du gouvernement, des bailleurs de fonds, de la société civile, et du secteur privé. L’agenda et la liste des participants à l’atelier sont joints au présent compte rendu. L’objectif de l’atelier était de diffuser les conclusions des deux études, et de discuter des moyens de mise en œuvre des recommandations qui y sont faites. La séance a été ouverte par un mot du Représentant Résident et du MAED, qui se sont accordés sur la qualité des deux rapports et pour rappeler l’importance de ces études, à une période charnière pour la Mauritanie. Celles-ci permettent en effet à la Mauritanie de bénéficier de l’expérience d’autres pays riches en ressources naturelles. Les travaux de la journée se sont répartis en 4 parties : (i) les industries extractives, (ii) la gouvernance, (iii) l’utilisation des revenus des IE et (iv) l’appui de la Banque mondiale pour accompagner la Mauritanie à faire face aux défis de l’ère pétrolière. Des présentations et des discussions se sont alternées au cours de la journée. Partie 1 : Industries extractives : leçons tirées de l’expérience internationale et cas de la RIM Première présentation : Pétrole : Expériences internationales et cas de la Mauritanie (Nicola Pontara) La présentation a montré que l’accession à des ressources naturelles importantes est difficile à négocier, comme le démontrent plusieurs expériences dans le monde. Elle peut entraîner des déséquilibres économiques (syndrome hollandais) ou institutionnels (dus, par exemple, a l’existence d’une société nationale qui devient un Etat dans l’Etat), voire des conflits, économiques, sociaux ou armés. La Mauritanie bénéficie de conditions initiales fragiles, que ce soit d’un point de vue économique ou social, nécessitant une grande prudence dans la gestion des revenus des industries extractives. Les grandes recommandations sont donc d’améliorer la gouvernance en matière de gestion de ces ressources, de stabiliser l’équilibre macroéconomique en assurant une gestion prudente des revenus et une définition sage du rôle de la Société Mauritanienne des Hydrocarbures (SMH) et en diversifiant l’économie afin de déployer équitablement les revenus publics. Les participants ont souligné la pertinence de l’expérience internationale et ont indiqué l’importance de la prise en compte de la dimension sociale dans la gestion des ressources naturelles. Concernant l’appréciation de la monnaie locale et la situation sociopolitique, les participants partagent le diagnostic sur la fragilité de la situation initiale en 1 Mauritanie. Il a été rappelé que les autorités, conscientes de cette fragilité, ont déjà engagé des actions louables comme l’ouverture du Fonds National de Revenus don des Revenus des Hydrocarbures (FNRH) auprès d’une banque étrangère et l’adhésion à l’Initiative sur la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE) et se sont engagées à mettre en place des politiques publiques qui visent à renforcer la compétitivité de l’économie mauritanienne. La possibilité d’un conflit entre travailleurs et société exportatrice de pétrole à cause des sous-traitances des contrats est un sujet qui a été soulevé par l’un des participants syndicalistes comme méritant une attention particulière de la part des autorités. Seconde présentation : Mines en Mauritanie : réalisations et perspectives (Gotthard Walser) Le secteur minier est désormais bien implanté en Mauritanie. Les recommandations de bonne gouvernance et de prudence faites dans la présentation précédente sont également valables pour le secteur minier. Il reste à travailler les retombées des activités pétrolières sur les économies locales et régionales afin de réduire la dépendance des populations à l’exploitation minière. Pour renforcer ce dernier point, l’assistance a évoqué l’utilité d’examiner les possibles synergies avec les projets de développement exécutés sur financement de la Banque comme le PDRC, le PNLS et autres. Par ailleurs, il a été soulevé l’utilité de la coordination entre les secteurs miniers et pétroliers, afin de faire profiter le second des acquis du premier en matière de développement local et de gestion de l’environnement humain. Partie 2 : Gouvernance Troisième présentation : Rôle de l’ITIE et du FNRH (Eléodoro Mayorga-Alba) La présentation a apporté des éclaircissements sur la chaîne de valeurs des industries extractives, et a rappelé l’importance de la transparence dans la gestion des revenus, et les apports de l’ITIE en la matière. Elle a permis de noter que l’ITIE est une étape dans la chaîne qui nécessite d’être complétée par d’autres mesures pour une gestion optimale des revenus des IE. Elle a également permis de faire le point sur les avancées Mauritaniennes en matière de mise en œuvre de l’ITIE, et les défis encore à relever, dont les principaux sont la bonne gestion de la SMH, la surveillance du FNRH, l’amélioration du processus budgétaire, et un bon contrôle de la qualité des dépenses publiques. Les participants ont posé la question relative à la pertinence de la publication des contrats de partages. Leur publication semble capitale mais insuffisante, les actions de renforcement des capacités des organismes de contrôle et de vulgarisation semblant davantage répondre aux besoins de transparence. Eleodoro Mayorga-Alba a répondu que ces documents étaient techniques et peu compréhensibles par le grand public, et qu’il fallait plutôt tendre au renforcement des capacités des organismes de contrôle. La société civile a par ailleurs signalé en parallèle de l’ITIE l’existence d’un collectif « publiez ce 2 que vous payez », visant à faire pression sur les sociétés extractrices et sur le gouvernement afin d’obtenir de ceux-ci la publication de leurs contrats. Quatrième présentation : Circuit performant de gestion des ressources publiques (Mohyedine O/ Sidi Baba) Cette présentation s’est attachée à rappeler l’importance d’un circuit efficace de gestion des dépenses publiques, et à faire le point sur la mise en œuvre de l’assainissement du secteur en Mauritanien, en soulignant les faiblesses actuelles et les recommandations pour le renforcer. Les participants partagent le même diagnostic qui montre que des améliorations notables ont été réalisées au cours des derniers mois pour renforcer le circuit budgétaire, mais des efforts sont toujours nécessaires pour améliorer, notamment, la programmation budgétaire. En particulier, il est nécessaire d’assurer l’homogénéité des circuits, de mettre en place et suivre le calendrier budgétaire et d’institutionnaliser certaines actions – Cadre de Dépenses à Moyen Terme (CDMT), Tableaux d’Opérations Financières de l’Etat (TOFE) et Balance du Trésor – afin de les pérenniser. Cinquième présentation : Intervention de DC : Instruments du FMI : PSSF et FRPC (Jean Le Dem) Le programme du FMI et son alignement avec les principales recommandations du CEM ont été présentés. Un rappel des principales recommandations, à savoir bonne gouvernance, stabilité macro économique, diversification de l’économie, et renforcement du secteur privé, a été fait. Le programme du FMI est basé sur le maintien d’une croissance soutenue, avec une limitation de l’inflation. Le principal problème dans sa mise en œuvre est que la croissance est pour l’instant très largement soutenue par le secteur minier, et il est important de diversifier l’économie en renforçant d’autres secteurs de croissance. En définitive, la présentation a insisté sur l’importance de l’action publique à venir, afin d’améliorer la qualité et le choix des dépenses publiques, la passation de marchés, d’augmenter la concurrence, et de définir les politiques sectorielles. Les nombreux commentaires ont permis d’éclairer le dernier point cité plus haut, en mettant en avant l’importance de la redistribution des rentes pétrolières à l’ensemble de la population, et donc en diversifiant l’économie, mais ont également soulevé la difficulté des arbitrages dans le processus de préparation du budget, de la concertation entre le MF et les ministères sectoriels. L’opportunité de baser la programmation sur une approche « budget programme » plutôt que sur une approche « budget moyens » a été soulevée. Le CSLP et le CDMT pourraient servir de documents référence pour une approche basée sur les résultats des arbitrages. Cependant, le manque d’opérationnalité du CSLP, et l’approche trop budgétaire du CDMT rendent ce processus difficile. Une recommandation de la Banque et du FMI est de faire un bilan des CDMT sectoriels. 3 Sixième présentation : Intervention de DC : Rôle des sociétés nationales pétrolières (Silvana Tordo) La présentation s’est attachée à décrire le fonctionnement des sociétés nationales d’hydrocarbures (SNH), et à présenter les montages institutionnels ayant a priori fait leurs preuves dans d’autres pays. L’objectif était de montrer comment il est possible de rendre les SNH transparentes, éviter qu’elles deviennent des ‘Etat dans un Etat’, assurer un contrôle et une supervision rapprochés. Les participants ont soulevé la question relative à l’arbitrage entre la SMH, le ministère des finances, et le ministère du pétrole qui en général ont des objectifs divergents. L’expert a concédé que c’est un arbitrage difficile mais a affirmé que le meilleur moyen de choisir l’approche la plus appropriée au pays est d’adopter une gestion coordonnée avec les différents acteurs. En réaction aux questions sur la possible gestion privée ou semi privée d’une SNH, l’intervenante a évoqué le cas de la Norvège afin d’illustrer l’augmentation progressive des attributions des SNH dans le secteur pétrolier au fur et à mesure de l’acquisition de compétences en matières de gestion du pétrole. Partie 3 : Utilisation des revenus des IE Septième présentation : Diversification de l’économie (Hawa Wagué-Cissé) Les possibles secteurs de croissance en Mauritanie, à savoir le secteur rural (agropastoral), le secteur des pêches, l’industrialisation et le tourisme, ont été présentés comme des secteurs potentiels de croissance sous l’impulsion d’un secteur privé dynamique et compétitif. Des recommandations pour développer ces secteurs ont ainsi été formulées dont notamment une mise en place des infrastructures telles que les routes, l’électricité et l’amélioration du climat des affaires. Les participants ont partagé le diagnostic et les recommandations et ont souligné l’importance de diversifier l’économie mauritanienne. Ils ont par ailleurs rappelé les actions mises en œuvre par le gouvernement de transition dans le secteur des pêches. Huitième présentation : Fonds permanent (Couro Kane-Janus/Stéphane Piot) Les revenus pétroliers sont de courte durée. Il est possible de les rendre permanent par la mise en place d’un Fonds de revenus pour les générations futures, chargé de placer les revenus. Un tel fonds pourrait à terme assurer une rente à la Mauritanie d’environ 100 millions de dollars par an, suivant le type d’investissement et par conséquent le risque. Un modèle pour l’évaluation des revenus d’un tel fonds a été développé par le trésor de la Banque, et mis à disposition de la Mauritanie. Cependant, trois problèmes se posent pour la mise en place d’un tel fonds : tout d’abord, cela nécessite transparence et bonne gouvernance, ensuite, cela nécessite des choix politiques difficiles, en particulier en matière d’arbitrage entre les investissements et les placements, et enfin, il est nécessaire d’avoir un volume de revenus pétrolier considérable. 4 Les réactions ont été nombreuses. Elles ont porté principalement sur les préoccupations de la population Mauritanienne en ce qui concerne l’établissement d’un tel fonds. Les avis divergent encore sur l’opportunité de ce fonds. La capacité d’absorption de la Mauritanie est plus grande que les revenus pétroliers tels qu’ils sont estimés aujourd’hui. Par ailleurs, la communication autour du risque semble difficile. L’intervenant a précisé que des instruments existaient pour limiter le risque. Le manque de bonne gouvernance et de transparence a également été évoqué comme un obstacle à la mise en place d’un Fonds de revenus pour les générations futures. Le MAED a clos le débat en précisant que la Mauritanie avait à priori la souplesse nécessaire pour mettre en place un tel fonds, et a coupé court aux interrogations sur la bonne gouvernance de la BCM en soulignant que la prise de décision en ce qui concernaient l’utilisation des revenus du pétrole était du ressort du gouvernement. Partie 4 : Appui de la Banque Neuvième présentation : CAS : instrument d’accompagnement pour la mise en œuvre de la stratégie de développement (François Rantrua) Cette présentation, qui est en fait l’externalisation d’un processus interne à la Banque, a permis de présenter tout d’abord le processus de sélectivité mis en place en Mauritanie, et de vérifier ensuite que les conclusions de ce processus, explicitées dans le document d’assistance pays de la Banque, (CAS) sont en ligne avec les recommandations des deux documents et avec la stratégie nationale. François Rantrua a conclu en soulignant l’importance d’une volonté politique forte afin de mener à bien les défis qui se présentent. Conclusion Le MAED et le Représentant Résident de la BM ont conclu que cette journée de diffusion des résultats de ces études montre que le besoin de communication est pressant et qu’une dynamique de discussion sur ces questions importantes devrait se mettre en place. C’est une première action qui mérite d’être renouvelée pour donner l’occasion aux différents acteurs de prendre part au dialogue sur le développement économique et social du pays. 5