Discours de M. Hervé Novelli, secrétaire d`Etat chargé du

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Intervention de Hervé NOVELLI, secrétaire d’Etat chargé du
Commerce, de l’Artisanat, des Petites et moyennes
entreprises, du Tourisme et des Services
Thème d’intervention : promouvoir l’attractivité du marché du
travail dans le secteur du tourisme à travers la formation et le
développement des compétences
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Madame la Présidente du Comité du tourisme,
Mesdames et Messieurs,
Je voulais tout d’abord vous dire combien je me réjouissais d’être
parmi vous dans cette belle ville de Riva del Garda pour participer
à la 1ère réunion à Haut niveau organisée par le Comité du
tourisme de l’OCDE sur le thème « L’économie du tourisme et la
mondialisation : un moteur pour l’innovation, la croissance et
l’emploi ».
Mais il m’est difficile d’aborder le thème sans dire quelques mots
sur la crise financière qui nous touche tous et le ralentissement
économique qui en découlera, pour l’année 2009 au moins, on
peut le craindre. Les dernières prévisions du FMI pour l’année
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2009 traduisent déjà ce ralentissement brutal, tant en France
qu’en Europe comme dans les autres pays membres de l’OCDE :
entre 0 et 0,5%.
Mais il est difficile d’imaginer à ce stade les conséquences sur la
fréquentation. Je pense qu’il faut en tout cas exclure toutes
visions catastrophistes, ne pas penser que les évènements et
leurs conséquences vont entraîner des réductions drastiques
d’activité. Car la consommation touristique est avant tout, avant
d’être un acte économique, un acte individuel, sociologique,
culturel. Dans tous les pays il y a un tourisme intérieur important,
une
consommation
touristique
automatique
pas
ou
peu
conditionnée par la crise.
A ce propos, permettez-moi de vous exposer le cas français. La
France était en ce début d’année 2008 gagnée par un certain
pessimisme, alimenté par la question du pouvoir d’achat en
baisse. Les prévisionnels de l’activité au début de l’été n’étaient
pas brillants, beaucoup craignant des arbitrages sévères sur les
vacances, certains évoquant même une chute du taux de départ
en vacances. Et finalement que s’est-il passé ? Et bien nous
avons eu une saison d’été 2008 relativement équivalente à celle
de 2007, qui n’était certes pas exceptionnelle, mais pas mauvaise
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non plus : une baisse de seulement 1% (dans l’hôtellerie) sur nos
deux mois forts de l’été juillet et août.
Dans les faits, on a néanmoins constaté :
 des arbitrages sur les dépenses au quotidien avant de partir,
pour maintenir le budget vacances ;
 des arbitrages au moment de l’organisation des vacances avec
le développement de nouvelles pratiques (départs en hors
saison, réservation très longtemps à l’avance, adoption des
formules « tout compris », raccourcissement de la durée des
séjours, utilisation des vols low-cost, achat de dernière minute
de produits dégriffés, etc.) ;
 mais aussi des arbitrages durant les vacances portant sur le
choix de modes d’hébergement différents, la multiplication des
séjours
chez
les
amis,
la
réduction
de
certaines
consommations (loisirs payants, restaurants, etc.).
Ceci pour vous dire qu’il y a un fort attachement aux vacances, le
moment où se reconstruisent non seulement la force de travail
comme dirait les économistes, mais aussi les liens familiaux,
amicaux, le lien social.
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Il est donc dangereux, tout au moins je l’espère, de parler de
catastrophe, car les gens continuent et continueront de partir en
vacances. De plus n’oublions pas que la crise économique sera
largement atténuée dans notre secteur par :
 le poids des habitudes ;
 la baisse continue du coût de l’énergie, - 30% en 3 mois ;
 le rééquilibrage de la zone dollar, qui redonne accès à nos
destinations
touristiques,
au
plus
gros
volume
de
consommateurs au monde.
Voici donc en quelques mots, mon analyse sur le comportement
des consommateurs touristiques en période de crise, dont je
souhaitais vous parler en introduction.
Mais avant d’aborder notre sujet, et puisque nous venons de voir
que
l’activité
touristique
s’intègre
bien
dans
les
cycles
économiques, je souhaite insister sur l’importance que la France
attache à ce que l’OCDE traite des questions du tourisme à
travers son Comité du tourisme. Il est important que son budget
soit maintenu à son niveau actuel car ce dernier d’être diminué
durant ces dernières années. Nous devons tous ensemble faire
nos meilleurs efforts pour le maintenir. Et ce Comité du tourisme,
c’est le signe fort que ce secteur d’activité appartient bien à la
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sphère des politiques économiques comme le souhaite d’ailleurs
la France et comme le montre le rattachement récent - voulu par
le Président de la République française - du tourisme au Ministère
de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi. C’est la juste
reconnaissance de l’importance de cette activité, première secteur
de l’économie française avec 6,5% du PIB, première contribution
à l’excédent de la balance des paiements, plus que l’agriculture,
l’agrotourisme et l’automobile réunis, secteurs où la France
affiche pourtant des positions importantes.
Malgré les chocs de diverses natures que le secteur du tourisme
a subies depuis 2001, le tourisme mondial continue de progresser
à un rythme soutenu. Sa croissance s’est accélérée en 2007 à
6,1 % après 5,4 % l’année précédente pour atteindre les 898
millions d’arrivées internationales. Même s’il est vraisemblable
que du fait de l’environnement économique général, le rythme se
ralentisse, ces arrivées, conformément aux prévisions de
l’Organisation Mondiale du Tourisme, devraient continuer de
croître à moyen et long terme, et se situer au niveau de
1,1 milliard en 2010 et de 1,6 milliard en 2020. La barre des
800 millions avait été franchie en 2005 ; c’est plus qu’un
doublement en flux physiques en l’espace d’une génération, et la
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croissance en termes monétaires est plus impressionnante
encore.
Venons-en au thème de ce matin. Pour ma part, j’ai toujours voulu
souligner le lien indissociable qui existe entre l’emploi, la
formation et le tourisme.
La formation et le développement des compétences, Mesdames
et Messieurs, sont un enjeu tout à fait stratégique.
L’enjeu humain est, en effet, considérable pour le tourisme, c’est
la ressource principale du secteur qui se caractérise par son fort
taux de main d’œuvre, comme dans les principaux métiers des
services.
Le secteur du tourisme cherche à recruter un personnel de plus
en plus qualifié afin d’améliorer les services qu’il est amené à
offrir à une clientèle de plus en plus exigeante.
Or, paradoxalement, alors qu’il recrute énormément, ce secteur
se caractérise par une rotation du personnel très importante. On
considère qu’un tiers des jeunes salariés quittent la profession
chaque année.
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Parallèlement, il est reconnu que les emplois de la profession ne
jouissent pas d’une image favorable dans l’opinion publique. Ils
sont considérés comme insuffisamment rémunérés et dotés
d’horaires lourds et décalés par rapport aux exigences de la vie
familiale.
Plus grave, ils ne sont pas considérés comme de véritables
métiers justifiant une qualification et donc une formation adaptée.
C’est la raison pour laquelle j’ai reçu un rapport sur cette question,
et que je fais mien En ce qui concerne la France, le diagnostic
réalisé par Jean Jacques Descamps, un ancien ministre du
tourisme., dans le rapport qu’il m’a remis récemment sur les
insuffisances de notre système de formation en tourisme : nos
formations sont trop cloisonnées ; nous avons un déficit de vision
globale des besoins quantitatifs et qualitatifs du marché ; la
concertation
entre
professionnels
et
enseignants
sur
la
prospective en matière de qualifications et sur la réalité du
marché de l’emploi est trop insuffisante ; les jeunes qui
s’engagent dans le secteur du tourisme manquent de formation
entrepreneuriale alors que les opportunités de création et de
reprises
d’entreprises
sont
nombreuses
dans
le
secteur
touristique. Ce constat français, j’en suis convaincu, n’est guère
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différent de celui que peuvent dresser de nombreux pays mebres
de l’OCDE.
Mais il n’est en rien tragique ! En effet, plus que d’une carence,
c’est d’une trop grande floraison d’initiatives que nous souffrons,
parfois de qualité remarquable, mais prises en fonction des
contextes locaux.
Il
importe
donc
d’apporter
davantage
de
rationalité,
de
coordination, de transparence et bien sûr d’ambition dans nos
systèmes de formation initiale et continue en tourisme.
Mais il nous faut aussi articuler entre pays proches les besoins
d’emploi dans les secteurs en tension et les besoins de formation
en tourisme.
Les métiers de l’hôtellerie et de la restauration connaissent des
difficultés de recrutement. En France, dans ce secteur des HCR,
les professionnels avancent le nombre de 60 000 emplois non
pourvus.
Le
secteur
de
la
restauration
recherche
des
cuisiniers,
charcutiers, boulangers, des serveurs, maîtres d’hôtel, chefs de
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rang, sommeliers. L’hôtellerie recrute à la réception (employés de
réception, chefs de réception, réceptionnistes), dans les services
d’étage (employés d’étage, valets, femmes de chambres,
gouvernantes, …). Les cafés recherchent des serveurs, des
responsables de salle, des barmans, des responsables de
comptoir.
Je souhaite donc la mise en place de véritables partenariats qui
permettraient des échanges en vue de formations qualifiantes
avec des pays voisins, notamment des rives sud de la
Méditerranée dont le tourisme se développe fortement et qui ont
donc de grands besoins de formation pour leur futur personnel.
Il ne s’agit pas de profiter cyniquement de la ressource de main
d’œuvre dont disposent les pays du sud, mais bien d’un accord
structurant de partenariat mêlant formation et apprentissage, mais
aussi accueil de travailleurs, dans le but de faire profiter chacun
des avantages et savoir-faire de l’autre.
En
d’autres
termes,
il
s’agirait
d’offrir
des
formations
professionnelles qualifiantes à des jeunes issus des pays
émergents disposant d’une main d’œuvre abondante, leur
demander de rester travailler en France quelques années en
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contrepartie de la formation reçue, avant de leur faciliter un retour
dans leur pays d’origine afin de consolider et développer une
économie touristique, dans bien des cas essentielle à l’économie
globale locale. Une immigration raisonnée. Une immigration du
travail.
C’est ce que j’ai rappelé lors du Forum européen du tourisme qui
s’est tenu à Bordeaux le 18 et 19 septembre, mais également lors
du dernier 5+5 tourisme organisé par la France, cette réunion
informelle de pays riverains du nord et du sud de la Méditerranée,
qui s’est tenu à Ajaccio en mai dernier.
Le marché du travail dans le secteur du tourisme est primordial.
Sur le territoire métropolitain français, le tourisme génère près de
deux millions d’emplois directs et indirects.
L’apprentissage est également la principale voie d’accès aux
métiers de la restauration et de l’hôtellerie. Dans le cadre de la
présidence française de l’Union européenne, il a été décidé de
promouvoir une plus grande mobilité des apprentis en Europe afin
de rendre plus attractive cette voie de formation professionnelle et
de renforcer les compétences en matière de maîtrise des langues
et des techniques européennes. La France est à l’initiative de la
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1ère rencontre européenne des jeunes apprentis dite « journée des
12 000 apprentis à Bercy », événement destiné à mettre en valeur
l’apprentissage et l’excellence de cette voie de formation pour de
nombreux métiers, dont ceux du tourisme, et qui permet à 8
apprentis sur 10 de trouver un emploi 6 mois après l’obtention du
diplôme.
Je pense également que la validation des acquis de l’expérience
par l’obtention de diplômes reconnus est un axe qu’il faudrait
davantage privilégier.
Pour conclure sur cette difficile question, je voudrais proposer
quelques pistes de réflexion au plan international :
- il faudrait accroître le dialogue entre les acteurs du tourisme,
les formateurs et les autorités publiques en charge de l'emploi,
de la formation et du tourisme. Le comité du tourisme de
l’OCDE peut sans doute nous y aider, notamment dans le
cadre de l'activité 2 du programme de travail 2009-10 pour
lequel la France est prête à présider le Groupe de direction qui
pilote ce projet ;
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- il faudrait développer des programmes spécifiques pour mieux
utiliser les politiques de migration afin de combler le manque de
main d'œuvre en formation et permettre à l’ensemble de nos
jeunes de pouvoir se former sur ces métiers d’avenir ;
- il faudrait structurer les réseaux de formation à l’intérieur des
pays membres pour accélérer les échanges d’expériences et
de formation, l’apprentissage des langues, la connaissance des
cultures. Nous avons du reste décidé le principe lors du Forum
5+5 de mai dernier.
Voici Mesdames, Messieurs, les réflexions que je souhaitais vous
soumettre.
Je vous remercie de votre attention.
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