ZABRE Georges Grand Séminaire Saint Pierre Saint Paul Année Académique 2007-2008 1ère Année de Philosophie Devoir d'Année: ANTHROPOLOGIE (Lundi 10 Décembre 2007 au Lundi 12 Mai 2008) Sujet: Faites des recherches en vue de déterminer avec précision ce qu'est: 1). L'anthropologie au sens large 2). L'anthropologie philosophique 3). L'anthropologie sociale. Professeur: Abbé Gabriel ILBOUDO INTRODUCTION Pendant longtemps, on crut en la possibilité d'éclaircir le mystère de l'existence humaine. Il est maintenant reconnu, qu'en dépit de la marche de nos connaissances «le nuage entourant l'origine et la destinée humaine, dixit Bryce, est si dense, que notre savoir scientifique en est toujours aussi éloigné ». Dire de l'homme, au début de l'humanité, qu'il est créé à l'image et à la ressemblance de Dieu, c'est le dire de tout homme. Cependant, l'anthropologie, qui est l'étude de l'homme, dans ses démarches élabore de nouveaux concepts, qui ont défini ses divers domaines, qu'à travers notre approche nos tenterons d'en déterminer avec précision ce qu'est: d'abord l'anthropologie au sens large, ensuite l'anthropologie philosophique et enfin l'anthropologie sociale. 1. L'anthropologie au sens large L'anthropologie prise au sens large, serait de rassembler dans une perspective globalisante toutes les disciplines étudiant l'homme. Dans le monde anglo-saxon, l'anthropologie rassemble sous son titre à la fois l'anthropologie physique, l'étude comparée des variations anatomiques et physiologique de l'espèce humaine, l'anthropologie sociale et culturelle, l'étude des institutions des productions culturelles et des relations que celles-ci entretiennent les unes avec les autres. Par contre, en Europe le terme d'anthropologie désigna longtemps l'anthropologie physique 1, ce qui explique l'usage général du mot ethnologie pour les études s'appliquant à l'aspect social et culturel des populations. Vers la fin du XXIè siècle A. de Quatrefuges, le premier à enseigner l'anthropologie entendait par ce mot « une branche de l'histoire naturelle qui s'occupe de l'homme,… Il y incluait l'étude non seulement des caractère physiques, anatomique de l'être humain; mais aussi de son langage, donc de sa civilisation, des ses mœurs. » 2 Par la suite, et comme le constatait P. Rivet dès 1936, on prit l'habitude, en Allemagne comme en France, de réserver le plus souvent le mot anthropologie pour désigner l'aspect physique de la science de l'homme, et d'appeler ethnologie l'aspect culturelle et social de l'anthropologie au sens large. Sous l'influence de la distinction marxiste des différentes instances de la réalité sociale, on assiste à l'heure actuelle à de nouvelles divisions de l'anthropologie. Elle se donne un objet universel, l'homme, dont elle admet l'identité par-delà les différences. Elle l'étudie à différents niveaux. Ainsi la vie sociale de l'homme varie non seulement, dans le temps, mais aussi dans l'espace. A l'intérieur d'une même société, on peut distinguer différents niveaux d'activité et d'organisation, et chacune de ces activités peut donner lieu à une observation systématique et à l'étude comparative. On parlera ainsi d'anthropologie économique, sociale, politique 3 ou autre, dans la mesure ou l'observateur privilégie un niveau particulier de la réalité sociale. On peut donc dire de l'anthropologie que l'unité de son objet commande la pluralité de ses démarches et de ses champs d'actions. D'où sa division parce que voulant se constituer comme une science universelle de l'homme. 2. L'anthropologie philosophique L'anthropologie philosophique est une science qui embrasse l'homme dans la totalité de ses manifestations. Ce terme renvoie à un courant de pensée qui a groupé, depuis 1920 environ, des représentants de disciplines très diverses. Dans l'anthropologie philosophique, la philosophie prend appui sur les données des sciences humaines pour rechercher le sens de l'homme. « Elle vise, dit Lévi-Strauss, à une connaissance globale de l'homme embrassant son sujet dans son extension (…), aspirant à une connaissance applicable à l'ensemble du développement humain, (…), mais valable pour toutes les sociétés humaines (…) ». Ainsi, trouver le sens de l'homme est le but poursuivi par l'anthropologie philosophique. Déjà la philosophie grecque témoigne d'une grande diversité au sujet de la conception de la nature humaine. On reconnaît généralement à Socrate et à Platon le mérite de la découverte de la raison. En identifiant la réalité de l'homme à son Idée, Platon a, par là, scellé le primat de la pensée théorique, identifié l'existence à l'essence. A l'époque moderne, la misère de la philosophie face au développement prodigieux des sciences se trouve incapable de dire l'home. « Les phénoménologues (surtout Husserl et Heidegger) réclament donc que la philosophie en revienne au Lebenswelt ou au monde où l'homme existe. Ils tentent de définir la certitude du sujet, mesure de toute vérité, et, finalement de toute réalité. » 4 La révolution copernicienne de Kant fait montre que le souci de fonder la vérité de la science ne pouvait s'étendre jusqu'à assurer, sur le plan ontologique, l'existence du moi, du monde et de Dieu, car « l'homme est en principe plus que ce qu'il peut savoir de soi.» 5 Au-delà des méthodes de la science positiviste, l'anthropologie cherche à réintroduire une problématique purement philosophique, celle de la nature ontologique de l'existant humain individuel et collectif. L'anthropologie philosophique entend étudier l'homme en tant qu'unité psychologique, irréductible à une explication déterministe de type causal comme c'est le cas des sciences naturelles. Sa tâche consistera à tenter de comprendre intuitivement et rationnellement la signification existentielle ou culturelle de la liberté, de l'angoisse, du temps vécu, du sentiment, de l'attitude religieuse et morale de l'homme. D'où « elle évolue précisément du ‘‘théomorphisme’’ vers l'intuition phénoménologique des essences et enfin vers la métaphysique.» 6 La méthode qui sert cette perspective synthétique consiste à décrire puis à comprendre la représentation du monde qui caractérise une société humaine à un moment donné de son évolution, de manière à dégager le sens directeur de la conduite humaine par rapport aux valeurs propres à une culture particulière. Ce qui nous conduit donc à parler maintenant de l'anthropologie sociale. 3. L'anthropologie sociale « L'anthropologie sociale est l'actuel épicentre de l'anthropologie. » 7 Elle cherche à saisir la totalité d'une société. Elle est de ce fait monographique et contraint l'anthropologue à une analyse qualitative et exhaustive d'unités sociales nécessairement restreintes; telles un village, une tribu ou un quartier, accessibles au regard d'un seul et même observateur. Certains veulent même la confondre avec la sociologie en raison de l'identité de leur objet. Lévi-Strauss montre à cet effet que le paradoxe de la démarche en anthropologie sociale réside dans le fait que l'on y « cherche à faire de la subjectivité la plus intime un moyen de démonstration objective. » 8 A l'ethnologie pratiquée en Europe, on pouvait faire correspondre l'anthropologie sociale et culturelle anglo-saxonne. En France, il fut proposé, au XXIè siècle de remplacer ethnologie par anthropologie sociale. Cette expression ne s'opposant plus à anthropologie culturelle -les deux étant supposées réunies- mais à anthropologie physique. 9 Mais l'anthropologie sociale appréhende d'une façon particulière une même réalité. Ses objets, ses concepts et ses théories ne sont pas nés d'un seul mouvement. Les hommes ont toujours eu intérêt à vivre en sociétés, mêmes produites par la force. Il a fallu donc se représenter arbitrairement l'homme comme un individu, avant tout lien avec les autres hommes pour que les hommes concrets en arrivent à vouloir, à un moment donné de l'histoire à des institutions juridiques et bien d'autres structures du même genre pour organiser la société. C'est dire que si l'homme a toujours vécu, en fait, en société, il est né et a été élevé dans une société; en droit, sa nature est d'abord celle d'un individu. Quelques théories et concepts sont donc utilisés et débattus en anthropologie sociale. 10 Il s'agit du culturalisme, du diffusionnisme, de l'évolutionnisme, du patter culturel et du trait culturel. Le culturalisme stipule que l'homme que l'homme s'intègre par le biais de l'éducation dans le milieu social où il est né, qui fait de la culture le fondement des structures sociales, qui définit la culture comme un système de comportement appris. Avec Darwin est né l'évolutionnisme. Il montre ainsi que chaque groupe de l'humanité passe par une série de phases identiques quelles que soient les différences observées dans leurs évolution. Le diffusionnisme quant à lui montre que l'histoire culturelle de l'humanité s'exprime par des formes hétérogènes diverses qui ont pris naissance dans des milieux humains et qui se sont diffusés progressivement depuis leur lieu de naissance. Le patter culturel et le trait culturel sont des caractéristiques distinctives que l'on repère soit dans les membres d'une même ethnie soit dans une culture donnée. CONCLUSION Dans le cours de son histoire, l'anthropologie fut à la fois sensible à l'exotisme et soucieuse de déchiffrer sur toute institution originale la marque de la nature humaine. De l'anthropologie au sens large, autrefois réservée aux populations non-occidentales, on assiste aujourd'hui à de nouvelles divisions de celle-ci embrassant tout homme, par-delà la diversité et la pluralité. Ainsi, l'anthropologie philosophique tente de comprendre intuitivement et rationnellement la signification existentielle de tout homme. Ses fondements épistémologiques ont fait d'elle une science sociale c'est-à-dire un savoir positif, en développant le concept d'homme. Le discours sur l'homme et la société ne sera plus fondé sur des postulats invérifiables. L'homme est pensé selon le principe de l'unité du genre humain sur la base du postulat de l'existence du dénominateur commun comme ciment de la communauté humaine. D'où Rousseau stipule que « pour étudier l'homme, il faut apprendre à porter sa vue au loin, il faut d'abord observer les différences pour découvrir les propriétés. » 11 ________________________ 1. Cf. M. AUGE, « Anthropologie » in La grande encyclopédie, vol. 2, p. 787. 2. J. CAZENEUVE, Encyclopédie de l'ethnologie, p. 6. 3. Cf. M. AUGE, « Anthropologie » in La grande encyclopédie, vol 2, pp. 787-790. 4. A. de WAELHENS, « Homme » in Encyclopaedia Universalis, corpus 11, p. 580. 5. K. JASPERS, Introduction à la philosophie, p. 66. 6. www.tu-dresden.de/phfis/Phil%20A/Index%20fr.htm/ 7. E. COPET-ROUGIER, « Anthropologie » in Encyclopaedia Universalis, corpus 2, p. 519. 8. Ibid. 9. Ibid., p. 520. 10. Cf. M. AUGE, « Anthropologie » in La grande encyclopédie, vol .2, p. 790. 11. ROUSSEAU, Essai sur l'origine des langues, ch. 8, In. www.tu-dresden.de/phfis/Phil%20A/Index%20f BIBLIOGRAPHIE 1. BENEDICT R., Echantillons de civilisations, Gallimard, Paris, 1950. 2. CHANTEUR J. La vie intérieure: Une nouvelle demande, A.E.S., Fayard, Paris, 1998. 3. EVANS-PRITCHARD E. E., Anthropologie sociale, Petite-Bibliothèque, Payot, Paris, 1969. 4. KLUCKHOHN C., Initiation à l'anthropologie, Dessart, Bruxelles, 1944. 5. LEVI-STRAUSS C., Anthropologie structurale, Plon, Paris, 1958. 6. MERCIER P., Histoire de l'anthropologie, P.U.F., Paris, 1971. 7. TORT P. et DESALMAND P., Sciences humaines et philosophie en Afrique. La culture, Hatier, Paris, 1978. AUTRES *Dictionnaire: 1. Georges THINES et Agnès LEMPEREUR, Dictionnaire général des sciences humaines, Ed. Universitaires, Paris, 1975, pp. 73-75. *Encyclopédies: 1. Alphonse De WAELHENS, « Homme » in Encyclopaedia Universalis, corpus 11, Dir. Peter F. BAUMBERGER, Paris, 1990, pp. 577-586. 2. Elisabeth COPET-ROUGIER, « Anthropologie » in Encyclopaedia Universalis, corpus 2, Dir. Peter F. BAUMBERGER, Paris, 1990, pp. 519-555. 3. Jean CAZENEUVE, Encyclopédie de l'ethnologie, Larousse de poche, Paris, 1967. 4. Marc AUGE, « Anthropologie » in La Grande Encyclopédie, vol. 2, Dir. Corinne AMBROSINO et alii, Fleury-Les-Aubray, Paris, 1972, pp. 787-800. 5. Marcel GENEST, C.S.V., « Anthropologie » in Encyclopédie GROLIER, vol. 1, Ed. Grolier Limitée, Montréal, 1960, pp. 355-364. *Sites: 1. www.tu-dresden.de/phfis/Phil%20A/Index%20fr.htm/ 2. www.fr.Wikipédia.org/wiki/Anthrop_philosophique