L`impact du diabète sur la dépression et de la dépression sur le

général. Les personnes atteintes de diabète
et de dépression sont également plus souvent
victimes d’une mort précoce.
En outre, dans certains cas, la dépression
clinique réapparaît plus fréquemment, les
crises durent plus longtemps et le taux de
guérison à long terme est beaucoup plus
bas. Un rapport international récent a clai-
rement montré que l’impact sur la qualité
de vie était le plus significatif en cas de
co-existence du diabète et de la dépression
par rapport à la présence de diabète ou
de dépression ou même par rapport à
d’autres conditions chroniques.3
Les personnes atteintes de
diabète et de dépression sont
plus exposées aux complications
du diabète et à une mort précoce.
La dépression pourrait être liée au contrôle
glycémique soit en raison d’un dérèglement
hormonal, soit plus probablement en
Le diabète peut avoir un impact à la fois au quotidien et à
long terme sur les personnes atteintes de la condition – tant
physiquement quen termes deffets psychosociaux. On
sait désormais que les personnes atteintes de diabète sont
beaucoup plus exposées à la souffrance morale, en particulier
à la dépression. En outre, de plus en plus détudes vèlent une
relation bidirectionnelle entre ces conditions. Pourtant, souvent,
la dépression nest pas diagnostiquée chez les personnes
atteintes de diabète. Cathy Lloydcrit les effets du diabète
sur la dépression et vice-versa et se penche sur lefficacité des
outils disponibles pour la détection de la pression chez les
personnes atteintes de la condition.
Un rapport important a démontré que les
personnes atteintes de diabète étaient au
moins deux fois plus susceptibles de dé-
velopper une dépression par rapport aux
personnes non atteintes de la condition.
1
Certains pensent également que la dépres-
sion augmente le risque de développer un
diabète de type 2.2 Les recherches les plus
récentes sur le diabète et la dépression in-
diquent que la combinaison de ces deux
conditions augmente le risque de développer
des complications du diabète, notamment
des troubles cardiovasculaires. La dépression
peut également avoir un effet considérable
sur le contrôle glycémique, la surveillance
autonome du diabète et la qualité de vie en
Limpact du diabète
sur la dépression et de
la dépression sur le diabète
Cathy Lloyd
Pratique clinique 23
Mars 2008 | Volume 53 | Numéro 1
raison de ses effets négatifs sur la prise en
charge autonome du diabète, notamment
l’augmentation du sédentarisme, du taba-
gisme et de la consommation d’alcool et le
mauvais contrôle glycémique. Des études
récentes ont également mis en évidence
un lien entre la dépression et le risque de
surpoids et d’obésité.
Ces statistiques marquantes et l’inquiétude
pour le bien-être mental des personnes at-
teintes de diabète ont conduit à la rédaction
de directives nationales et internationales
pour la détection de la dépression et à
la formulation de recommandations pour
sa prise en charge et son traitement. Par
exemple, la Fédération Internationale du
Diabète (FID) a publié des directives pour la
prise en charge des personnes atteintes de
diabète de type 2 qui incluent l’évaluation
de l’état psychologique et l’orientation vers
des professionnels de la santé mentale.4
Les directives de la FID pour
la prise en charge du diabète
de type 2 incluent l’orientation
vers des professionnels
de la santé mentale.
Définir la dépression
La dépression est généralement définie par
le nombre de symptômes identifiés : pour
qu’une dépression grave soit diagnostiquée,
on procède à un entretien clinique, à travers
lequel un certain nombre de symptômes
doivent être identifiés. L’ouvrage Diagnostic
and Statistical Manual of Mental Disorders
4
th
edition
5
énumère les critères de diagnos-
tic de la dépression (voir encadré 1).
Dans de nombreux environnements clini-
ques, et pour déterminer la prévalence
de la dépression dans le cadre d’études
à grande échelle, tout un éventail d’instru-
ments est utilisé pour détecter la dépression
ou des symptômes dépressifs. Des facteurs
tels que le temps et la formation empêchent
souvent de recourir aux entretiens cliniques
en vue d’un diagnostic. Les symptômes
dépressifs (encadré 2) et la dépression
clinique ne sont pas incompatibles en ter-
mes de critères ; la plupart des instruments
utilisés mesurent des symptômes proches
des niveaux cliniques de dépression.5
Que la détresse psychologique augmente le
risque de développer le diabète et/ou ses
complications, que le diabète et/ou les com-
plications du diabète augmentent le risque de
dépression ou que la présence de ces deux
conditions se produise de façon purement for-
tuite, les conséquences sont lourdes tant pour
les personnes atteintes de diabète que pour
les prestataires de soins impliqués dans leur
prise en charge. Toutefois, malgré sa plus forte
prévalence, la dépression chez les personnes
atteintes de diabète semble mal reconnue.
Selon une estimation récente, plus de trois
quart des cas ne seraient pas détectés.6 Il est
possible que la non détection des symptômes
dépressifs chez les personnes atteintes de dia-
bète s’explique par le fait que les problèmes
psychologiques sont souvent perçus comme
secondaires tant par la personne concernée
que par le prestataire de soins.
Pratique clinique 25
Pratique clinique
24
Encadré 1 : Critères pour le diagnostic de la dépression5
La présence d’au moins cinq symptômes pratiquement chaque jour depuis
2 semaines, parmi les suivants :
• Etat dépressif
• Manque d’intérêt pour les activités quotidiennes
• Perte/gain de poids important ou perte d’appétit
• Insomnie ou hypersomnie
• Agitation psychomotrice ou retard psychomoteur
• Fatigue ou perte d’énergie
• Sentiment d’inutilité/culpabilité
• Difficultés de concentration/de prise de décision
• Pensées récurrentes liées à la mort ou au suicide
Encadré 2 : Symptômes dépressifs – souvent mesurés par le biais
d’instruments d’auto-estimation
Humeur triste/déprimée
Troubles du sommeil
Réveil à l’aube
Manque d’intérêt/plaisir
Fatigue/manque d’énergie
Perte d’appétit
Sentiment de culpabilité/inutilité
Pensées récurrentes liées à la mort ou au suicide
Mars 2008 | Volume 53 | Numéro 1
Détection
Plusieurs organismes nationaux et inter-
nationaux recommandent le dépistage
de la dépression. Par exemple, le minis-
tère de la santé britannique demande à
présent que tous les médecins des soins
primaires utilisent deux questions sim-
ples pour identifier les symptômes de la
dépression :
Au cours du dernier mois, vous êtes-vous
senti triste, déprimé ou désespéré ?
Au cours du dernier mois, avez-vous res-
senti un manque d’intérêt ou de plaisir
vis-à-vis de certaines activités ?
En cas de réponse affirmative à ces deux
questions, un questionnaire d’auto-estima-
tion est alors utilisé pour mesurer l’ampleur
et la nature des symptômes.
Bien que certains instruments soient plus
largement utilisés que d’autres, il n’y a
pas vraiment de consensus concernant le
questionnaire le plus approprié. Par exem-
ple, certains questionnaires mentionnent
des symptômes de dépression qui peuvent
être confondus avec des symptômes du
diabète, à savoir la fatigue, une altération
du sommeil, du poids et de l’appétit.
Même si c’est parfois le cas, ces symptômes
ne compromettent pas de façon significative
la sensibilité ou la validité du diagnostic
de dépression, soit lorsque l’on utilise les
symptômes de diagnostic basés sur des cri-
tères, comme les diagnostics du Diagnostic
and Statistical Manual, soit lorsque l’on
utilise des outils de dépistage tels que le
Beck Depression Inventory. Les instruments
d’auto-estimation, comme le CES-D (Center
for Epidemiologic Studies Depression Scale),
se sont également avérés appropriés pour
détecter la dépression chez les personnes
atteintes de diabète. Un autre objet d’étude
Lorsqu’ils sont combinés, le diabète et la dépression ont un impact extrêmement négatif sur la qualité de vie.
Pratique clinique 25
Pratique clinique
24
Mars 2008 | Volume 53 | Numéro 1
Pratique clinique 27
Pratique clinique
26
est la récente inquiétude relative à un degré
de chevauchement entre les symptômes de
la dépression et la détresse associée au
diabète, qui aurait des implications impor-
tantes pour le traitement de la dépression
et pour la gestion du diabète.
7
La recherche a montré que certains outils
de dépistage pouvaient être facilement uti-
lisés en milieu clinique. L’une des études a
utilisé un court questionnaire en 14 points,
le Hospital Anxiety and Depression Scales.8
Un tiers des participants affirmait être in-
téressé par une psychothérapie. Suite à
cette étude, un service psychologique a
été mis en place et propose une prise en
charge constante aux personnes atteintes
de diabète confrontées à des problèmes
psychologiques. Plus récemment, des ques-
tionnaires plus courts, comme le Patient
Health Questionnaire, et le WHO-Five
Well-being Index ont été développés. Leur
utilisation est simple, tant comme outils
d’enquête qu’en milieu clinique.
Les thérapies antidépressives
sont efficaces sur les
personnes atteintes de diabète
et ont des effets bénéfiques
sur le contrôle glycémique.
Traitement
Certaines personnes atteintes de diabète
souffrent de niveaux de dépression cli-
niquement reconnus ; d’autres peuvent
connaître de légères altérations de l’hu-
meur ou afficher des symptômes dépres-
sifs légers. Bien qu’il existe encore peu
d’écrits sur le traitement de la dépression
chez les personnes atteintes de diabète,
les données scientifiques indiquent que la
thérapie cognitivo-comportementale et les
anti-dépresseurs sont tout aussi efficaces
chez les personnes atteintes de diabète
que chez les personnes non atteintes de
la condition et qu’elles ont en outre des ef-
fets bénéfiques sur le contrôle glycémique.
Une étude récente a révélé qu’un meilleur
contrôle glycémique pendant une dépres-
sion était associé à la fois à une amélio-
ration de l’humeur et à un meilleur indice
de masse corporelle. A plus long terme,
l’amélioration des soins autonomes avait
également un rôle important à jouer.9
En résumé
Bien que la dépression soit beaucoup plus
fréquente chez les personnes atteintes de
diabète que chez les personnes non attein-
tes de la condition, il existe des traitements
efficaces. La dépression augmente le ris-
que de développer le diabète, influence le
contrôle glycémique et augmente le risque
de développer des complications du dia-
bète. Elle est associée à une prise de poids
ou à l’obésité et à une détérioration des
soins autonomes du diabète. Il est important
d’être conscient que, bien que le diabète
et la dépression soient des conditions dis-
tinctes, elles coexistent souvent et les traite-
ments proposés doivent en tenir compte afin
de maximiser les bienfaits pour la personne
atteinte de diabète. De récentes études
ont mis en évidence les effets positifs du
traitement de la dépression sur le diabète
ainsi que sur la qualité de vie.
Depuis quelque temps, les aspects psycho-
logiques et psychosociaux de la gestion
des conditions chroniques suscitent un vif
intérêt et la recherche dans le domaine
de la dépression et du diabète est mieux
reconnue. Cette évolution s’explique par
l’accumulation des données scientifiques
démontrant le lourd impact des problèmes
psychologiques sur les personnes atteintes
de conditions chroniques comme le dia-
bète, leur impact sur la vie quotidienne et
les coûts élevés pour la personne concernée
mais aussi pour la société.
Cathy Lloyd
Cathy Lloyd est conférencière principale
auprès de la
Faculty of Health and Social
Care
, The Open University, Royaume-Uni.
Références
1 Anderson RJ, Freedland KE, Clouse RE,
Lustman PJ. The prevalence of co-morbid
depression in adults with diabetes.
Diabetes Care 2001; 24: 1069-78.
2 Knol MJ, Twisk JWR, Beekman ATF, et al.
Depression as a risk factor for the onset of
type 2 diabetes mellitus. A meta-analysis.
Diabetologia 2006; 49: 837-45.
3 Moussavi S, Chatterji S, Verdes E, et al.
Depression, chronic disease, and decrements
in health: results from the World Health
Surveys. Lancet 2007; 370: 851-8.
4 International Diabetes Federation Clinical
Guidelines Task Force. Global guideline for
type 2 diabetes. IDF. Brussels, 2005.
5 American Psychiatric Association.
Diagnostic and Statistical Manual of
Mental Disorders, 4
th
Edition. American
Psychiatric Association. Arlington, 2000.
6 Hermanns N, Kulzer B, Krichbaum M, et al.
How to screen for depression and emotional
problems in patients with diabetes: comparison
of screening characteristics of depression
questionnaires, measurement of diabetes-specific
emotional problems and standard clinical
assessment. Diabetologia 2006; 49: 469-77.
7 Pouwer F, Skinner TC, Pibernik-Okanovic M,
et al. Serious diabetes-specific emotional
problems and depression in a Croatian-
Dutch-English Survey from the European
Depression in Diabetes Research Consortium.
Diabetes Res Clin Pract 2005; 70: 166-73.
8 Lloyd CE, Dyer PH, Barnett AH. Prevalence
of symptoms of depression and anxiety
in a diabetes clinic population. Diabet
Med 2000; 17: 198-202.
Mars 2008 | Volume 53 | Numéro 1
1 / 4 100%

L`impact du diabète sur la dépression et de la dépression sur le

La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !