XIX - CONDUITE A TENIR DEVANT LA DECOUVERTE D’UNE HYPERGLYCEMIE La découverte d’une hyperglycémie est une situation fréquemment rencontrée dans la pratique médicale compte tenu de l’augmentation constante de l’incidence des troubles de glycorégulation dans la population de nos pays industrialisés. Par conséquent, tous les médecins, qu’ils soient généralistes ou spécialistes, doivent parfaitement maîtriser la démarche à adopter face à cette situation. 1- CONFIRMER L’EXISTENCE DE L’HYPERGLYCEMIE : La découverte d’une hyperglycémie capillaire ou veineuse impose toujours la réalisation de contrôles itératifs réalisés au laboratoire. Ainsi, avant d’affirmer le diagnostic de trouble de glycorégulation, il est indispensable de vérifier l’hyperglycémie sur deux prélèvements veineux distincts, généralement effectués à quelques jours d’intervalle, hormis lors d’une hyperglycémie franche ≥ 2 g/l associée à des symptômes de diabète (polyurie, polydipsie, amaigrissement). En effet, avant de conclure à l’existence d’une authentique hyperglycémie, il faut toujours éliminer une éventuelle erreur de mesure. D’autre part, il convient toujours de rechercher et de tenir compte d’éventuels facteurs favorisant l’hyperglycémie de façon transitoire : pathologie aiguë intercurrente (infection, infarctus du myocarde, AVC), iatrogénie (corticoïdes, oestro-progestatifs). Au terme de cette démarche indispensable de vérification, les modalités de prise en charge initiale d’un diabète avéré (glycémie à jeun > 1,26 g/l et/ou glycémie postprandiale > 2 g/l) et d’une hyperglycémie modérée (glycémie jeun : 1,10 à 1,26 g/l et/ou glycémie postprandiale : 1,40 à 2 g/l) peuvent être envisagées de manière distincte. 2- CONDUITE A TENIR DEVANT LA DECOUVERTE D’UN DIABETE : La démarche adoptée à la découverte d’un diabète procède par plusieurs étapes : 2-1- Analyser les circonstances de découverte du diabète : Cette première étape est indispensable pour tenter de préciser l’étiologie de l’hyperglycémie, et en particulier l’existence d’une insulinopénie imposant la mise en route d’une insulinothérapie initiale. Elle impose la réalisation d’un interrogatoire précis et d’un examen clinique complet. Elle permet d’identifier des arguments cliniques de probabilité : sont en faveur d’un diabète de type 1 : - Absence d’hyperglycémie préalable (normoglycémie stricte sur bilans antérieurs) - Syndrome cardinal franc, en particulier amaigrissement conséquent et rapide - Cétonurie initiale - Contexte d’auto-immunité : hypothyroïdie, insuffisance surrénale, vitiligo ... - Age inférieur à 35 ans sont en faveur d’un diabète de type 2 : - Age supérieur à 40 ans - Notion d’hyperglycémie modérée antérieure - Antécédents familiaux de diabète de type 2 - Antécédent personnel de diabète gestationnel, enfants de PN ≥ 4 kg - Surpoids androïde (IMC ≥ 25 kg/m2) - Facteurs de risque cardiovasculaire associés dans le cadre d’un syndrome métabolique - Absence d’amaigrissement, symptomatologie absente ou peu “ bruyante ” - Présence de complications micro, macroangiopathiques ou neurologiques - Absence de cétonurie NB : L’âge de survenue n’est pas un argument suffisant pour définir le type de diabète. Cependant, la détermination précise du type de diabète demeure parfois délicate lors de la prise en charge initiale. C’est la confrontation d’éléments biologiques, permettant d’analyser objectivement l’insulinosécrétion endogène (C peptide) et le contexte d’auto-immunité (Anticorps anti ilôts de Langerhans et anti GAD), et du suivi évolutif qui permettra alors de trancher ultérieurement. 2-2- Evaluer le niveau des facteurs de risque cardio-vasculaire associés : Cette étape doit être systématique, mais elle revêt un caractère primordial pour tout diabète de type 2 nouvellement diagnostiqué. Il faut donc rechercher : - des antécédents familiaux de maladies cardio-vasculaires précoces chez des parents du premier degré - un tabagisme - une HTA - une surcharge pondérale androïde - une dyslipidémie NB : l’existence d’un déséquilibre majeur et d’une cétose entraîne des perturbations lipidiques majeures. La réalisation d’un bilan lipidique complet doit donc être différée. 2-3- Réaliser un bilan de l’éventuel retentissement du diabète : Ces explorations sont indispensables et systématiques pour tout diabétique de type 2, dès la découverte de l’hyperglycémie qui évolue probablement silencieusement depuis plusieurs années : examen clinique complet, ECG, FO éventuellement complété par une angiographie rétinienne, créatininémie, microalbuminurie des 24 heures. De plus, la fréquence des facteurs de risque cardio-vasculaire associés justifie souvent la réalisation d’un bilan exhaustif à la recherche de lésions macroangiopathiques (épreuve d’effort, doppler artériel cervical et des membres inférieurs...) 2-4- Conduite à tenir thérapeutique : Elle dépend essentiellement des mécanismes physiopathologiques prédominants, et en particulier de l’existence ou non d’une carence insulinique. En situation d’insulinopénie franche, une insulinothérapie doit être instaurée initialement. Dans tous les autres cas, le traitement repose toujours initialement sur la mise en place de mesures hygiéno-diététiques. Pour plus de précisions, se reporter aux chapitres correspondants. Dans les situations où la classification étiologique initiale est difficile, une insulinothérapie est le plus souvent instaurée, l’adaptation thérapeutique s’effectuant secondairement. 3- CONDUITE A TENIR DEVANT LA DECOUVERTE D’UNE HYPERGLYCEMIE MODEREE : Cette situation est extrêmement fréquente, mais souvent négligée par le patient comme par le corps médical. Or, cette hyperglycémie modérée et les différents éléments du syndrome d’insulinorésistance qui l’accompagnent fréquemment, confèrent à ces sujets un risque cardio-vasculaire très nettement supérieur à celui de la population normoglycémique. Par conséquent, ces patients doivent faire l’objet d’une prise en charge attentive ayant pour objectifs : - la normalisation des chiffres glycémiques - le contrôle des facteurs de risque cardio-vasculaire associés En premier lieu, les moyens interventionnels sont toujours d’ordre hygiéno-diététique, visant dans la plupart des cas l’obtention d’un amaigrissement (activité physique, réduction de l’apport lipidique et éventuellement calorique, fractionnement de l’alimentation). Les traitements anti-hypertenseurs et hypolipémiants doivent être employés à bon escient. Par contre, l’hyperglycémie modérée ne justifie pas la mise en route d’un traitement hypoglycémiant oral en première intention. Enfin, la découverte fortuite d'une hyperglycémie modérée doit toujours entraîner une surveillance glycémique régulière, il s'agit parfois du début clinique du processus auto-immun qui conduit quelques mois ou quelques années plus tard d’un diabète de type 1.