Travail présenté à M. Leonard Dudley ECN1350

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Travail présenté à
M. Leonard Dudley
ECN1350 - Histoire économique du monde occidental
L’impact de l’imprimerie au vernaculaire en France de 1700 à 1800
par
Catherine Deschamps
Samuel Leblanc
Sébastien Métivier Grenier
Antoine Noël
Université de Montréal
5 décembre 2013
Sommaire
Ce projet de recherche présente une analyse de l’impact de l’imprimerie dans le
vernaculaire en France entre 1700 et 1800. Il comprend plusieurs étapes qui commencent
par une mise en situation au plan économique, géographique et technologique au début de
la période. Ceci permet de faire une comparaison avec la situation finale pour mieux
observer les changements amenés par la technologie de l’imprimerie dans le vernaculaire.
L’étape suivante consiste à faire une analyse théorique. Pour ce faire, une série de cinq
études concernant le sujet de l’imprimerie sont développées. De toutes les études
révisées, le modèle de Leonard Dudley et d’Harold Innis sont utilisés pour faire une
analyse théorique de l’impact de la technologie. Celle-ci permet d’arriver à la conclusion
que
l’imprimerie
dans
le
vernaculaire
augmente
les
économies
d’échelles
informationnelles ce qui entraîne une augmentation de la marge interne et externe de
l’État soient le taux d’impôts et la superficie respectivement. Le but de ce présent
document est de vérifier si le modèle de Dudley est en effet applicable à cette situation.
L’analyse historique à la fin de la période étudiée permet de voir l’évolution de ces deux
marges et de confirmer ou d’infirmer le modèle. Pour ce travail, le modèle est infirmé. En
effet, selon l’analyse des faits historiques, la marge interne de la France diminue et l’effet
de la technologie sur la marge externe est ambigüe. Le travail se terminera sur les raisons
possibles des effets observés de l’imprimerie au vernaculaire ainsi que des possibilités
d’avancement pour de futures études.
i Table des matières
Sommaire (Catherine Deschamps) ...................................................................................... i
Liste des tableaux et figures............................................................................................... iii
Section I. - Introduction (Catherine Deschamps) ............................................................... 1
Section II. - La situation initiale(Samuel Leblanc)............................................................. 3
Section III. - Revue des études déjà réalisées (Samuel Leblanc) ....................................... 6
Section IV. - L’imprimerie dans le vernaculaire et ses effets sur la structure de la France
de 1700 à 1800 (Antoine Noël)......................................................................................... 11
L’imprimerie dans le vernaculaire ................................................................................ 11
Le modèle théorique présenté ....................................................................................... 15
Hypothèses à partir du modèle...................................................................................... 17
Section V. - Analyse historique (Sébastien Métivier Grenier) ......................................... 18
L’analyse historique...................................................................................................... 18
1700............................................................................................................................... 18
1700 à 1800 : L’impact de l’imprimerie dans le vernaculaire:..................................... 19
1800 : La marge externe ............................................................................................... 21
1700 à 1800 : La marge interne .................................................................................... 22
Vérification des hypothèses .......................................................................................... 27
Addenda : Napoléon (1800 à 1815) .............................................................................. 28
Section VI. - Conclusion (Catherine Deschamps) ............................................................ 31
Bibliographie..................................................................................................................... 32
Annexes............................................................................................................................. 38
ii Liste des tableaux et figures
Figure 1 : Marge externe en 1700......................................................................................38
Figure 2 : Premier empire colonial (en bleu clair).............................................................39
Figure 3 - Représentation graphique du modèle théorique (avant le choc).......................40
Figure 4 - Représentation graphique du modèle théorique (après le choc).......................41
Figure 5 : Marge externe finale en 1800............................................................................42
Figure 6 : Territoire à l’apogée de l’Empire......................................................................43
Figure 7 : Marge externe en 1815......................................................................................44
iii Section I. - Introduction
La France de la première moitié du XVIe siècle se caractérisait par de multiples dialectes
du français en devenir. On appelait ces dialectes des patois. Beaucoup de problèmes au
niveau de la diffusion du savoir et des écrits existaient parce que la langue n’était pas
standardisée et la majorité des ouvrages qui étaient imprimés étaient en latin. Ceci
restreignait donc la diffusion du savoir aux personnes qui savaient lire le latin ou
déformait les langues vernaculaires lorsque les imprimeurs voulaient rendre les
impressions plus accessibles.1
L’imprimerie en essor dans cette période a amené un mouvement de révision de la langue
vulgaire, le françois, par les imprimeurs. Beaucoup d’imprimeurs voulaient redonner une
certaine richesse à la langue en ramenant des racines latines au niveau de l’écriture du
françois. «Ainsi, le mot abhorrer, avec ses nouvelles formes latinisantes (< lat.
abhorrere), apparaissait comme nettement supérieur à l'ancienne graphie populaire avorir,
décidément trop simple.»2 Plusieurs erreurs par rapport aux racines latines se sont
glissées à ce moment. C’est ainsi que le français tel que nous le connaissons aujourd’hui
est apparu. Plusieurs défendeurs du français étaient contre cette idée de latiniser et
préféraient utiliser le français populaire. Plusieurs érudits comme Joachim du Bellay
préconisaient la diversification des mots par des racines anciennes et des influences de
langues régionales ou étrangères3.
C’est après que le français soit devenu la langue officielle de France en 1539 qu’une
réelle codification a pris de l’importance. Le principal effort de l’État dans cette direction
fut la création de l’Académie française en 16354. « La principale fonction de l’Académie
sera de travailler avec tout le soin et toute la diligence possibles à donner des règles
certaines à notre langue et à la rendre pure, éloquente et capable de traiter les arts et les
1
Contributeurs à Wikipédia, «Histoire du livre»
Leclerc, Jacques, «Histoire de la langue française : Renaissance»
3
Leclerc, Jacques, «Histoire de la langue française : Renaissance»
4
Contributeurs à Wikipédia, «Histoire de la langue française»
2
1 sciences.» 5 Il est aussi écrit dans ces missions qu’elle doit :
« constituer avec sagesse et économie une langue qui ne fût pas celle des
spécialistes, des érudits, ni celle des corporations, qui eût la clarté et l’élégance
qu’on accorde au latin, où ne fût pas accentué l’écart entre langue écrite et
langue parlée, qui tînt enfin sa force de son double attachement à l’usage et à la
norme.»6
Ces deux missions et la création du dictionnaire aident énormément à la standardisation
du français. Les effets de cette normalisation se manifestent grandement pendant le règne
de Louis XIV qui aide la diffusion de la langue par l’encouragement de l’imprimerie et
par la colonisation en Amérique du Nord où elle est très bien implantée7.
Cette petite partie de l’histoire de la langue française et de l’imprimerie permet de se
mettre en contexte pour analyser plus en profondeur l’imprimerie au vernaculaire en
France dans la période qui suivit soit de 1700 à 1800. Ce projet de recherche vise à en
détailler les impacts au niveau économique, géographique et social.
Le tout commencera par une analyse de la situation initiale de la France en 1700. Par la
suite, une série d’études de différents auteurs concernant l’imprimerie au vernaculaire
seront détaillées pour mieux pouvoir analyser théoriquement l’influence de cette nouvelle
technologie. Une description de cette innovation, l’imprimerie au vernaculaire, permettra
de mieux comprendre son impact. Conséquemment, l’analyse théorique par rapport au
modèle de Leonard Dudley et d’Harold Innis sera faite. Finalement, ce rapport conclura
en faisant une comparaison de l’aspect théorique et des faits historiques véritables pour
pouvoir vérifier la validité du modèle dans cette situation particulière par rapport à la
marge interne, le niveau d’imposition, et la marge externe, la superficie du territoire de la
France en 1800.
5
Académie française, «L’histoire»
Académie Française, «L’histoire»
7
Contributeurs à Wikipédia, «Louis XIV de France»
6
2 Section II. - La situation initiale
Pour débuter l’analyse de l’impact de la nouvelle technologie informationnelle sur les
marges externes et internes de l’état, il est indispensable de regarder la situation
économique, sociale et géographique de l’état avant l’arrivée de la technologie. Cette
section portera sur le portrait de la France juste avant le XVIII siècle quant à la fiscalité,
le territoire et la situation globale socioéconomique de la France dans le dernier quart du
XVIIe siècle.
Initialement, dans le dernier quart du XVIIe siècle avant le siècle des lumières, on assiste
à une période où la France est dans une période de remise en question quant à la
monarchie et au pouvoir absolu en France, sous le règne du roi Louis XIV qui commence
à se faire vieux. De plus, cette période est marquée par la guerre de ligue d’Augsbourg
qui implique la France contre une Europe coalisée8.
La situation économique dans le dernier quart de XVIIe siècle ne se porte vraiment pas
bien et est victime de plusieurs crises économiques dues, par exemple, aux mauvaises
récoltes en 1693-1698 9. Les citoyens français sont de plus en plus victimes d’une
fiscalité grandissante avec l’introduction de la capitation en addition à la taille10. Il s’agit
d’une pensée économique instaurée par Colbert, qu’on appela plus tard ‘’Colbertisme’’
ou mercantilisme qui dit que la puissance d’un état est donnée par l’augmentation des
impôts et plus d’exportations que d’importations, soit une grande balance commerciale
positive. On peut donc dire qu’en 1675-1700, la France est un état ou un royaume
interventionnisme. Ce qui implique que la marge interne de la France est déjà très élevée.
La France est, à cette période de l’histoire, le pays avec le plus grand nombre
d’habitants : comptant approximativement 21 millions de personnes à la fin du XVIIe
siècle, qui resta constant presque tous le siècle avant d’entamer sa croissance à partir de
8
Contributeur à Wikipedia, «Histoire de France au XVIIe siècle»
Jean Meuvret, 1951, 327
10
Contributeur à Wikipedia, «Histoire de France au XVIIe siècle»
9
3 170011. Elle est de plus impliquée dans une rivalité coloniale franco-anglaise dû à son
mercantilisme qui implique d’apporter des matières premières de ses colonies et de les
transformer en produits finis en France. Son empire colonial, à cette époque, est
principalement constitué de la Nouvelle-France, des Antilles, des Indes ainsi que de
petites îles un peu partout. La marge externe de la France est très importante pour cette
époque et elle doit gérer beaucoup de gens sur beaucoup de territoires. Les annexes 1 et 2
présentent la France et le premier empire colonial de la France sous forme de carte au
dernier quart du XVIIe siècle.
L’imprimerie, en France, resta dans la même technique de 1650 jusqu’à la fin de l’ancien
régime français. Les imprimeurs français utilisèrent généralement la même technique,
soit par taille-douce12. Celle-ci est contraire à l’imprimerie par taille d’épargne. Tailledouce désigne en fait le procédé par lequel l’encre est déposé en premier dans de
minimes creux sur une plaque. Ensuite, l’encre en trop est enlevé pour qu’il n’en reste
seulement que dans les petits creux et après on compresse le papier sur la plaque et
finalement l’encre transféré sur le papier13. De plus les imprimeurs utilisèrent
majoritairement de l’eau forte et du burin. Employés ensemble sur une même planche. Le
problème avec l’imprimerie dans la fin du dernier quart du XVIIe siècle est
principalement le papier : il est le plus cher dans la fabrication. Le papier n’était formé
que de vieux linges usés14.
Cependant, même si de 1675-1700 la majorité des livres publiés sont en Français et que
seulement un peu plus de 10% des livres sont imprimés en Latin, le moyen de rendre les
gens informés reste quand même très bas à la fin du siècle15. Cela peut être expliqué par
deux options : la première étant que le coût pour apprendre le Latin est très cher et le
deuxième est tout simplement du fait que la population française à un taux
d’alphabétisation très bas, soit de 29% pour les gars et 14% pour les femme de 1686 11
Contributeur à Philisto, «La population française sous l’Ancien Régime»
Roger Chartier et Henri-Jean Martin, 1989, 95
13
Contributeur à Wikipédia, «Taille-douce»
14
Roger Chartier et Henri-Jean Martin, 1989, 95
15
Roger Chartier et Henri-Jean Martin, 1989, 95
12
4 169016. À la fin du siècle, le pouvoir royal oblige les parents à envoyer leurs enfants dans
de ‘’petites écoles’’ sous l’ordonnance du 13 décembre 1698 de Louis XIV. Ces petites
écoles apprennent aux enfants à lire, à écrire et à compter ; c'est-à-dire une instruction de
base17. Ceci pourrait expliquer la hausse du taux d’alphabétisation au XVIIIe siècle. De
plus, en 1685 on assiste à la révocation de l’édit de Nantes qui favorisa les journaux et
pamphlets à contourner la censure qui fut longtemps contrôlée par l’état.
Le fait que les français n’ont pas réellement accès à l’information ou à des livres qu’ils
peuvent comprendre pourrait expliquer le mécontentement qu’ils ont quant à leur lourd
fardeau fiscal grandissant et l’absolutisme royal. De plus, on pouvait remarquer une
certaine inefficacité du système de taxation car certains nobles ou marchands pouvait être
exempté pour des raisons politiques par exemple. En somme, la complexité et
l’inefficacité de la taxation n’était pas vraiment compris par la majorité des français avant
de débuter le XVIIIe siècle. Une analyse plus profonde du modèle sera nécessaire dans
les pages suivantes.
Finalement, nous pouvons conclure que la période classicisme de l’empire français dans
le dernier quart du XVIIe siècle est un marasme économique et démographique sous le
règne du roi Louis XIV. Cependant cela va changer lors du siècle des lumières où une
hausse du taux d’alphabétisation, géographique et technologique aura lieue. De plus la
France n’est qu’à ses débuts dans son empire colonial. Dans la prochaine section, il sera
possible d’y voir des études antérieures qui ont déjà portées sur le sujet en question. À cet
endroit, nous pourrons voir à quoi ces études ont tentées de répondre.
16
17
Contributeur à Jean-Marcshdelporte, «Histoire d’alphabétisation»
Contributeur à Wikipédia, «Histoire de l’éducation en France»
5 Section III. - Revue des études déjà réalisées
Disposant maintenant du contexte historique juste avant la période étudiée, c'est-à-dire au
dernier quart du XVIIe siècle, il sera alors nécessaire de regarder dans cette section des
études antérieures qui ont déjà portées sur le sujet traité ici. Ces études, au nombre de
cinq, nous permettront de bâtir notre point de vue et apporteront d’autres informations
nécessaires pour en arriver à une conclusion. Nous commencerons par le modèle de
Dudley(1991), qui nous présente les effets sur une marge interne et externe d’un état
quand les technologies militaires et d’informations varient suivie immédiatement par
Innis qui présente un modèle sur les effets de la technologie de l’information sur
l’organisation d’une société. Trois études supplémentaires seront additionnées pour nous
permettre d’ajouter d’autres éléments à notre argument toujours en se basant sur les
modèles de Innis et Dudley.
Le livre libellé par Léonard Dudley, ‘’The Word and the Sword’’ nous présente un
modèle économique qui nous sera d’une grande utilité pour analyser l’impact d’un choc
informationnel en France au XVIIIe siècle. Son texte présente l’état ayant le monopole
sur l’information et la violence, d’où peut-être l’idée du titre du livre, car nous pouvons
remarquer les termes ‘’mot’’ et ‘’épée’’ où les mots sont d’une grande utilité pour
informé les gens et une épée est avantageuse lors de situations de guerre ou de violence.
Il nous explique que dans toute l’histoire de l’humanité, huit innovations techniques et
quatre militaires on causé des changements majeurs dans la vie socioéconomique de
différents états et empires18. Dans son modèle économique, la volonté du citoyen d’un
pays de payer des impôts diminue plus la distance entre lui et le centre de l’état est grand,
c'est-à-dire la marge interne. Cela implique en quelques sortes que plus un citoyen reçoit
des services de l’état, plus sa volonté de payer des impôts est grande. De plus, le citoyen
est un payeur de taxes. Un autre aspect du modèle de M. Dudley est la taille de l’état qui
représente la marge externe. Cette taille est déterminée quand le coût du contrôle de
territoire de cette dernière unité est égal aux recettes fiscales de cette dernière partie de
18
Dudley, 1991, viii
6 territoire. Ensuite on projette sur la volonté moyenne de payé des impôts chez tous les
citoyens (qui est d’ailleurs plus élevé que la volonté marginale) pour déterminer le taux
d’imposition à l’optimalité ou à l’équilibre. Ce modèle nous permettra de voir comment
des empires se créent ou s’effondre. L’étude de ce modèle sera donc très utile lors de
notre analyse, car nous pourrons voir un mélange de l’imprimerie dans le vernaculaire et
de l’augmentation du nombre de personnes qui peuvent lire le Français (dans notre cas) et
d’autres facteurs qui favorisent l’alphabétisation et la publication. Nous verrons comment
ce mélange favorisera ce nouveau pouvoir de communication et comment cela affectera
les marges internes et externes de la France au XVIIIe siècle.
Né en 1894 près de Woodstock en Ontario, doctorat en économie en 1923 à l’université
de Chicago, Harold Innis écrit Empire & Communications en 195019. Son étude
principale explique l’effet de la communication sur les empires ou de la structure de
ceux-ci. Il parle de l’utilisation du papyrus trois siècles avant l’ère commune jusqu’à
l’emprise des journaux à grand tirage au XIXe siècle. Pour lui, la communication est
quelque chose de vitale dans l’organisation d’espaces très grands20. De plus, un de ses
concepts le plus connu est que les connaissances à travers l’espace sont favorisées si le
moyen de communication est léger et facilement transportable et que les connaissances à
travers le temps seront encouragées si le moyen de communication est lourd et durable. Il
explique que plus les citoyens sont loin du centre de l’état, plus les coûts de transactions
(coûts permettant l’interaction entre les agents : coût d’informations, de transports, de
propriété, d’application de contrat) sont élevés. Donc, plus la volonté moyenne de payée
des impôts du citoyen diminue, plus il est loin de ce centre21. Aussi, il explique qu’un
bien qui perdure à travers l’espace encouragera une centralisation de l’état et à l’inverse,
un bien qui perdure à travers le temps encouragera la décentralisation d’un état. Innis dit
aussi (Traduction libre) :
‘’Le déclin de l’apprentissage en France était parallèle à une amélioration de la position
de la langue du pays’’22
19
Dudley, 2014, diapo 18
Innis, 2007, 26
21
Dudley, 2014, diapo 33
22
Innis, 2007, 169
20
7 Cela explique bien la situation que nous étudions, c'est-à-dire qu’à la fin du XVIIe siècle,
malgré un grand nombre de publications en français versus le Latin, la majorité de la
population n’était pas instruite ou informée, car il y a un taux d’alphabétisation très
faible. Et nous tenterons d’expliquer plus loin pourquoi cela à changer au XVIIIe siècle.
De plus son modèle nous sera très utile, puisqu’il parle de l’impact de l’imprimerie dans
le vernaculaire en France et dans d’autres pays d’Europe (comme l’Angleterre par
exemple). Innis explique aussi plusieurs liens entre l’intervention de l’état dans la
situation socioéconomique d’un pays et l’impact d’un choc technologique informationnel
qui nous sera d’une grande utilité dans notre étude.
Henri-Jean Martin est un historien français spécialiste de l’histoire du livre et de l’édition.
Roger Chartier est aussi un historien français qui travaille également sur l’histoire du
livre de la lecture et de l’édition23. Ces deux historiens ont écrit, en collaboration avec
Jean-Pierre Vivet et d’autres collaborateurs, l’histoire de l’édition française. Cette
‘’bible’’ de l’édition française est répartit sur quatre tomes. Nous allons nous concentrés
principalement sur le tome II car il porte sur la période 1660-1830. Ce livre met
principalement l’accent sur l’édition plutôt que sur l’imprimerie dans le vernaculaire,
mais il nous sera quand même d’une très grande utilité car nous allons justement voir le
lien entre l’imprimerie et l’édition, et puisque l’édition rend les gens informés, nous
pourrons en conclure comment l’impact de ce choc qu’est l’imprimerie a affecté les gens.
Ce livre explique aussi, clairement, comment une hausse de l’imprimerie en français n’est
pas immédiatement suivie d’une hausse du taux d’alphabétisation ou une hausse de
l’information. Qu’il y a d’autre facteur à regarder comme une politique du contrôle des
livres du pouvoir monarchique comme décrit dans le tome II qui pourrait empêcher la
diffusion de certain livres ou publications24. Nous allons donc pouvoir remarquer, dans
cet ouvrage, pourquoi l’imprimerie dans le vernaculaire en France utilisé conjointement
avec plusieurs autres facteurs au XVIIIe siècle fut un impact technologique pour la
population française. Nous pourrons aussi voir comment le passage de la censure royale à
la censure révolutionnaire à changé l’empire français sur plusieurs plans.
23
24
Contributeur à Wikipedia, «Roger Chartier et Henri-Jean Martin»
Roger Chartier, 1990, 84 tome II
8 La révolution de l’imprimé dans l’Europe des premiers temps modernes est un livre écrit
par Elizabeth Lewisohn Eisenstein en anglais traduit par Maud Sissung et Marc
Duchamp. Mme Eisenstein est une historienne américaine née en 192325. Il sera
important de remarquer que son livre porte plutôt sur la période de la renaissance en
Europe, c'est-à-dire avant la période que nous étudierons. Cependant ce livre nous sera
commode pour comprendre comment l’imprimerie et ses différentes techniques ont
changées notre façon de penser. En quelques sortes, l’étude principale de ce livre ne porte
pas sur l’expansion de l’alphabétisation mais sur les transformations qu’a apporté
l’imprimerie dans la communication écrite sur les idées des élites qui maîtrisaient déjà la
lecture et l’écriture, donc ceux qui connaissaient le Latin. De plus, Élizabeth dit :
‘’Je tiens l’imprimerie pour un agent, non pour l’agent, et encore moins pour
l’unique agent de la mutation en Europe occidentale’’26
C'est-à-dire que l’imprimerie n’est qu’une partie de l’équation des différentes réformes,
changements politiques ou toutes autres mutations en Europe. Ce livre sera donc une
excellente prémisse pour notre étude, car il nous permettra de comprendre comment
l’imprimerie à changer la façon de conserver les idées et comment en nous en sommes
venus à une standardisation de la langue, un peu plus tard, par les imprimeurs et comment
cela à mené à un meilleur réseau de communication.
The Gutenberg Galaxy (1962) fut écrit par Marshall McLuhan. M. McLuhan est un
professeur de littérature anglaise et théoricien de la communication27. Connu pour sa
célèbre phrase publié dans un autre livre : ‘’Le message, c’est le médium’’, l’auteur se
concentre dans The Gutenberg Galaxy sur l’histoire de l’évolution de l’humanité en
fonction des avancées technologiques des médias et plus particulièrement celui de la
presse imprimée qui est arrivée grâce à l’imprimerie et à Gutenberg. En quelques sortes,
il essaie d’expliquer comment les technologies de propagation (l’imprimerie dans notre
cas) affectent l’intellectuel de l’Homme, qui lui, est à la base des changements d’une
25
Contributeur à Wikipedia, «Elizabeth Eisenstein»
Eisenstein,1991, 12
27
Contributeur à Wikipedia, «Marshall McLuhan»
26
9 société. Pour lui, un medium de communication est une extension des facultés de
l’Homme et de ses effets sensoriels. Même si ce livre parle beaucoup de la presse
imprimée, il nous permettra d’apporter des explications supplémentaires et des
changements au XVIIIe siècle en France, car on parle aussi de l’imprimerie et comment
celle-ci affecte une société tant sur le plan économique que social. Pour notre cas, on
devra utiliser cette information conjointement avec le fait que l’imprimerie ce fait en
Français et qu’il y a eu hausse de la population française étant capables de lire durant
notre période étudiée.
En conclusion, toutes ces études nous permettront d’apporter des arguments
supplémentaires dans notre analyse, que se soit directement ou indirectement. De plus,
cela nous permettra d’analyser et de mieux comprendre les changements sur la marge
interne et externe de l’état suite à l’impact de l’imprimerie dans le vernaculaire, d’une
hausse de l’alphabétisation, de d’autres facteurs et comment tout cela a permis des
économies d’échelles informationnelles. Cependant, tout cela sera étudié d’une façon
méthodique et en détail dans la section suivante.
10 Section IV. - L’imprimerie dans le vernaculaire et ses effets sur la
structure de la France de 1700 à 1800
La situation initiale nous a permis de mettre en contexte les débuts de l'utilisation du
vernaculaire dans l'imprimerie. Dans cette section, nous allons faire état de la nouvelle
technologie, l’imprimerie dans le vernaculaire, en France de 1700 à 1800. Cette partie de
section couvrira le développement de ladite technologie et les étapes de sa diffusion. Une
fois cette description faite, un modèle expliquant les effets sur les marges interne et
externe de la France à cette même époque sera développé, à l’aide des travaux de
Leonard Dudley et d’Harold Innis qui ont été analysés à la section précédente. En
d’autres mots, des hypothèses émises à partir du modèle détermineront comment la
structure de l’État a été affectée par l’arrivée de cette avancée technologique dans le
monde de l’imprimerie.
L’imprimerie dans le vernaculaire
Le vernaculaire ou la langue vernaculaire est une langue «parlée seulement à l’intérieur
d’une communauté, souvent restreinte»28. Par le fait même, l’imprimerie dans le
vernaculaire a pour fonction d’imprimer dans les langues parlées par des communautés.
Cette nouvelle technologie est une amélioration d’une technologie déjà existante à
l’époque, soit l’imprimerie. Il faut aussi comprendre que le développement de cette
technologie s’est fait sur une longue période. En effet, «two hundred years were
necessary for most of the definitive changes to knowledge and society produced by print
to fall into place»29. Même si l’imprimerie a facilité l’accès à la lecture, la population
avait «peu de motivation d’apprendre à lire et à écrire»30. Tout était imprimé dans le latin,
une langue difficile à maîtriser et exclusive à la haute classe sociale. Le latin, coûtant très
28
Petit Robert (2012, 2695)
Crowler (2011, 65)
30
Dudley (1991, 151)
29
11 cher à décoder, créait un «goulot d’étranglement dans le système d’information»31. Pour
élargir leur clientèle, les éditeurs ont «favoris[é] l’essor des langues vulgaires»32 en
«élimin[ant] les fantaisies orthographiques et les expressions dialectales»33, dans
l’objectif de faire le plus d’argent possible. Il s’agit de la standardisation des langues
nationales. Dans le cas de la France, la seule langue officielle depuis 1539 est «le dialecte
de la région parisienne»34, c’est-à-dire le français. Cette restructuration linguistique, de la
part des imprimeurs, a eu pour effet de favoriser «le développement de[s langues
nationales] – et l’élimination de la langue latine»35. Autrement dit, le latin disparaît
puisqu’il est inaccessible à la majorité de la population, laissant ainsi place aux langues
nationales; le français dans le cas de la France. Toutefois, pour alphabétiser la population,
«societies had to be willing to undergo the enormous cost of teaching large numbers of
people to read and write; that is, to acquire literacy»36. Ce fut le cas de la monarchie
française. Le roi de France, Louis XIV vit en l’imprimerie dans le vernaculaire un moyen
de propagande efficace des décisions politiques et militaires, auprès de la population, afin
de maintenir son pouvoir :
«Les princes qui avaient employé les incommodes méthodes du manuscrit pour
communiquer avec leurs sujets passèrent rapidement à l’imprimé pour annoncer
les déclarations de guerre, publier les récits des batailles, promulguer des
traités ou opposer leurs arguments à des points litigieux soulevés par des
pamphlets. Ils s’attachèrent […] à
remporter la guerre psychologique qui
préparait et accompagnait les opérations militaires du pouvoir»37.
Louis le Grand avait avantage à s’assurer que sa population sache lire. Par la distribution
de pamphlet, le Roi-Soleil pouvait justifier ses actions auprès de celle-ci. Donc, et
l’imprimerie dans la langue française et la volonté du roi Louis XIV de voir ses sujets lire
ses communiqués ont permis d’alphabétiser la population française. En effet, en 16861690, 29 % des hommes et 14 % des femmes étaient alphabétisés38. En 1786-1790, le
31
Dudley (2014, chapitre 5, 7)
Febvre (1971, 440)
33
Febvre (1971, 440)
34
Dudley (1991, 151)
35
Febvre (1971, 455)
36
Dudley (1991, 152)
37
Klaits (1976, 6-7)
38
Todd (2008, 53)
32
12 taux avait augmenté à 47 % pour les hommes et 27 % pour les femmes39. En d’autres
mots, la population s’est instruite et, ipso facto, elle s’est trouvée à lire plus40 car elle était
maintenant en mesure de le faire.
Avant la standardisation, «it was virtually impossible for large numbers of people to
share an identical storable message»41. Par la suite, les gens avaient accès à une
information similaire. En effet, le XVIIIe siècle a assisté à une diversification des
publications. Celles-ci ont été favorisées par la création d’un réseau routier où Paris était
«le cœur d’un territoire en voie d’unification»42. «La route se révélait utile aussi pour
ceux qui voulait diffuser à grande échelle d’autres vérités que celles énoncées par le
pouvoir»43. Autrement dit, c’était aussi un moyen de communication pour les
révolutionnaires. En 1789, près de 1320 relais de poste étaient fonctionnels44. Le combat
entre la censure et le droit à la liberté d’expression sera un évènement marquant de ce
siècle et sera vécu à travers les différentes publications. En 1750, une «semi-liberté de
presse»45 prend forme. Durant cette époque, apparurent des publications majeures dans
diverses spécialités. L’Encyclopédie fut «l’entreprise éditoriale la plus considérable»46 du
siècle. Cet ouvrage avait pour but d’être «le fidèle reflet des idées nouvelles, doublé d’un
esprit optimiste, d’une foi inébranlable dans les vertus du progrès des hommes et des
techniques»47. Les années 1780 ont été marquées par «un développement journalistique,
mais aussi pamphlétaire, inédit par son ampleur. La censure se montra impuissante à le
contrôler [...]»48. Par-exemple, en 1777, le premier quotidien, le Journal de Paris, arriva
en France49, soit 75 ans de retard sur l’Angleterre. «Il participait, à sa manière, à
l’effervescence intellectuelle et politique qui précéda la Révolution»50. De plus, une place
39
Todd (2008, 53)
Colin (1976, 313)
41
Dudley (1991, 156)
42
Cornette (2000, 211)
43
Cornette (2000, 213)
44
Cornette (2000, 213)
45
Bellanger (1969, 162)
46
Cornette (2000, 250)
47
Cornette (2000, 250)
48
Cornette (2000, 263)
49
Bellanger (1969, 240)
50
Cornette (2000, 263)
40
13 importante de l’imprimé était occupée par une «infra-littérature»51 ayant pour but de
s’attaquer aux «perversités supposées des hommes et des femmes proches du pouvoir»52.
Sans parler des journaux périodiques qui s’établissaient peu à peu. De plus, des espaces
nouveaux furent créés pour faire fleurir l’opinion parisienne. Des clubs, des salons et des
cafés firent leur apparition où la population pouvait s’exprimer53. Les gens illettrés
pouvaient alors s’informer et participer au réseau d’information malgré leur
analphabétisme. Une prise de conscience collective s’établit, menant à la Révolution
française en 178954 et éventuellement à la Première République55.
La disparition du latin ayant eu pour effet de favoriser l’émergence des langues
nationales, un sentiment d’appartenance nationale est apparu en France. Des «links to
larger collective units were being forged»56, au détriment des petites communautés. Il y a
donc une montée du nationalisme en France, «bien plus que n’importe quelle autre nation
moderne»57. Cette montée de la fierté nationale est expliquée par l’effet de réseau. C’est
«une externalité positive par laquelle l’utilité d’un bien pour un agent croît avec le
nombre des autres utilisateurs»58. Un livre n’a pas beaucoup d’utilité s’il ne peut être lu
que par un petit nombre de gens. Toutefois, plus les gens sont instruits et plus les gens
lisent. Plus les gens lisent et plus l’utilité des livres croît. Des «frontières nationales dans
la sphère d’activités intellectuelles»59 se sont alors développées. Une montée du
nationalisme en a été le résultat.
Avec cette technologie, il y a aussi un effet d’entraînement. Les éditeurs ont favorisé
l’émergence de l’imprimerie dans le vernaculaire. La monarchie a favorisé
l’alphabétisation de la population. Celle-ci s’est instruite et lisait plus. Cette hausse de la
lecture a incité les imprimeurs à produire plus. Les gens ont donc accès à encore plus de
51
Cornette (2000, 263)
Cornette (2000, 264)
53
Biard (2008, 146)
54
Contributeur à Wikipédia, «Révolution française»
55
Contributeur à Wikipédia, «Première République (France)»
56
Crowler (2011, 84)
57
McLuhan (1964, 199)
58
Dudley (2014, chapitre 5, 1)
59
Steinberg (1996, 54)
52
14 savoir. Il s’agit de la loi de Metcalfe qui stipule que «la valeur d’un réseau de
communications est proportionnelle au carré du nombre d’usagers»60.
Pour une information écrite donnée, la nouvelle technologie, ainsi que la hausse
d’alphabétisation de la population, lui permettent d’être lue par un plus grand nombre de
gens. Il s’agit d’économies d’échelle informationnelles. Par-exemple, elles ont lieu
lorsqu’on triple le capital et les travailleurs et qu’on rejoint plus du triple de personnes.
L’information durant le siècle des Lumières est devenue plus accessible aux individus
qu’elle pouvait l’être avant l’ère de l’imprimerie dans le vernaculaire.
Le modèle théorique présenté
Pour bien comprendre les effets de l’imprimerie dans le vernaculaire sur la structure de la
France de 1700 à 1800, il faut créer un modèle simple qui représentera la réalité
économique des marges interne et externe de cet État avant et après le choc
technologique.
La publication Empire and Communications d’Harold A. Innis, publié en 1950, sera la
principale utilisation pour modéliser l’impact de cette nouvelle technologie. Selon lui,
une technologie informationnelle va favoriser «la dissémination des connaissances à
travers l’espace s[i elle] est lég[ère] et facilement transportable»61 et «la dissémination
des connaissances à travers le temps s[i elle] est lourd[e] et durable»62. Le livre appartient
à la deuxième catégorie. Toujours selon la théorie d’Innis, une avancée technologique
informationnelle qui augmente les économies d’échelle informationnelles hausse la
volonté de la population de payer des impôts pour «accéder aux biens publics
informationnels offerts par l’État»63. À travers son analyse des moyens de communication
et des économies d’échelle d’information, il sera possible de statuer sur l’influence de
l’imprimerie dans le vernaculaire.
60
Dudley (2014, chapitre 8, 1)
Dudley (2014, chapitre Introduction, 5)
62
Dudley (2014, chapitre Introduction, 5)
63
Dudley (2014, chapitre Introduction, 6)
61
15 La publication de William H. McNeill, La recherche de la puissance, sera aussi utilisée
pour construire le modèle théorique, de manière passive. Elle détermine la taille de l’État,
aussi bien interne qu’externe, en fonction de la technologie militaire en question. Selon
McNeill, plus grandes seront les économies d’échelle militaires, « […] plus le coût du
contrôle d’un territoire donné sera faible»64.
Pour modéliser les effets de la nouvelle technologie sur la structure de la France du
XVIIIe siècle, le modèle de Leonard Dudley sera pris en considération. En effet, ce
dernier s’est basé sur la plus grande publication d’Antoine-Augustin Cournot, Recherches
sur les principes mathématiques de la théorie des richesses. Dans son travail, Cournot
explique qu’un «monopoleur doit produire jusqu’à ce que […] le revenu additionnel de la
dernière unité vendue soit égal au coût additionnel encouru pour sa production»65.
Autrement dit, le revenu marginal de production égalant le coût marginal de production
(Rm=Cm) permet au monopoleur de «maximiser ses bénéfices nets du coût de
production»66. Dudley a utilisé ce modèle et l’a reformulé pour pouvoir répondre aux
changements de technologie informationnelle ou militaire toujours en optimisant la
structure de l’État. Pour ce faire, il a réuni les deux théories d’Innis et de McNeill. Alors,
pour qu’un État soit optimal, la «volonté marginale de payer des impôts» de la population
(Vm) doit être égale au «coût marginal du contrôle du territoire»67(Cm). La marge externe
de l’État, c’est-à-dire la «limite de son monopole sur la violence»68 se trouve à
l’intersection de la droite Vm et de celle de Cm. Alors, la dernière unité de territoire
contrôlée fait ses frais, uniquement. La marge interne de l’État, c’est-à-dire la «limite de
son monopole sur la fiscalité»69 se trouve sur la droite de la volonté moyenne de payer
des impôts (VM) qui représente les recettes totales sur la superficie totale de l’État. Il
s’agit du taux optimal d’impôts. Le graphique de l’Annexe 3 démontre le modèle à
l’équilibre avant le choc technologique.
64
Dudley (2014, chapitre Introduction, 10)
Dudley (2014, chapitre Introduction, 13)
66
Dudley (2014, chapitre Introduction, 12)
67
Dudley (2014, chapitre Introduction, 13)
68
Dudley (2014, chapitre Introduction, 14)
69
Dudley (2014, chapitre Introduction, 14)
65
16 Hypothèses à partir du modèle
L’imprimerie dans le vernaculaire est un choc informationnel. Cette technologie a permis
de rendre les livres plus accessibles à la population. Une diffusion du savoir a alors lieu.
Non seulement il y a eu alphabétisation de la population au courant du siècle, mais il y a
aussi eu une augmentation du nombre de personnes instruites. Ceux-ci sont incités à
payer plus pour faire partie d’«un réseau d’information efficace»70. Désormais, plus de
gens ont accès à la même information. Il s’agit d’un accroissement d’économies d’échelle
informationnelles. Cette hausse déplace les droites Vm et VM vers le haut dans le
graphique de l’Annexe 4. On constate alors un accroissement des marges interne et
externe. En d’autres termes, la superficie de l’État et la taille d’impôts augmentent.
En conclusion, l’impact de l’imprimerie dans le vernaculaire sur la structure de la France,
dans la période de 1700 à 1800, a été démontré à l’aide du modèle théorique. Cette
nouvelle technologie, par l’entremise des éditeurs et de la monarchie française, a permis
d’alphabétiser la population. En lisant, elle s’est instruite dans un contexte national. Le
choc technologique a augmenté les économies d’échelle informationnelles. Selon le
modèle développé, ceci eut pour effet de hausser les marges interne et externe de l’État.
La volonté de payer des impôts ainsi que la superficie de l’État se sont vu augmentées. La
prochaine section vérifiera le modèle à partir des données historiques.
70
Dudley (2014, chapitre 5, 23)
17 Section V. - Analyse historique
L’analyse historique
La section précédente s’étant efforcée de décrire le plus fidèlement possible le choc
apporté par la technologie informationnelle que représente l’imprimerie dans le
vernaculaire en présentant les étapes de son développement et de sa diffusion, il est
maintenant possible de décrire l’impact que celle-ci a eu en France au cours des années
1700 à 1800. De la même façon, les modèles théoriques élaborés sur les changements
subits par les marges interne et externe seront comparés aux faits historiques concernant
le niveau de taxation de l’État dans l’économie et les frontières géographiques de l’unité
politique. Ces étapes permettront de tirer des conclusions sur la validité des modèles et
d’approfondir la compréhension de la nouvelle technologie.
1700
Avant de procéder à cette analyse, un rappel de la situation au début de la période étudiée
permettra de façonner la fondation factuelle sur laquelle elle reposera. En l’an 1700, la
France débute une période de stabilité relative au niveau de l’étendue de son territoire.
Comme le montre l’annexe 1, il est déjà possible de discerner l’Hexagone dans les
frontières de l’époque. La guerre de la Ligue d’Augsbourg s’est terminée trois ans
auparavant avec le traité de Ryswick et se solde par un gain minime de territoire pour la
France71. Louis XIV réaffirme cependant son emprise sur ce qui est maintenant nommé le
Premier empire colonial, illustré dans l’annexe 2, composé de la Nouvelle-France, les
Antilles et divers territoires le long de la voie maritime empruntée pour le commerce avec
l’Inde et l’Extrême-Orient.
71
Contributeurs à Wikipédia, «Traité de Ryswick»
18 L’impact le plus durable de ce conflit se révèlera être l’affaiblissement économique des
pays impliqués, tant pour la France que pour les membres de l’alliance ligués contre elle.
Aux nouvelles tactiques visant les navires marchands se sont ajoutés les emprunts
effectués pour financer la guerre, laissant Louis XIV avec une lourde dette72. Cette dette
va mettre en évidence les faiblesses d’un système de taxation complexe, peu efficace et
largement inégal. Les divers impôts payés comprennent entre autres la taille, la
capitation, la gabelle et l’octroi, tous appliqués à des taux variant selon l’endroit et le
statut social de la personne73. La taille, le principal impôt direct, représente bien les
problèmes du système. Les nobles, l’Église et les bourgeois en sont souvent exempts ou
payent des sommes forfaitaires, des sommes dont l’importance est plus liée au poids
politique de chacun plutôt que leur revenu réel74. Une grande partie du fardeau fiscal est
donc portée par les plus démunis. Bonney mentionne d’ailleurs dans son livre The Rise of
the Fiscal State in Europe c.1200-1815 «Louis XIV did not create this reliance on the
taxation of agriculture; but he certainly consolidated it». De plus, le droit de collecter des
impôts est souvent vendu à des particuliers par l’État. Les revenus sont donc détachés de
la réalité économique du pays et mal comptabilisé. Bref, ces différents facteurs se
combinent pour former une marge interne initiale qui est définitivement sous-optimale,
mais qui est malgré tout historiquement élevée75 grâce au pouvoir conféré par la nature
absolutiste du règne de Louis XIV.
1700 à 1800 : L’impact de l’imprimerie dans le vernaculaire:
Tel que souligné dans la description du choc dans la section précédente, le français est
déjà solidement implanté en France en l’an 1700 et l’alphabétisation est en progression
constante tout au long du XVIIIe siècle. L’usage du vernaculaire dans le monde de
l’imprimerie se répand lui aussi. Ces deux facteurs font en sorte que les effets de
l’imprimerie dans le vernaculaire gagnent progressivement en importance tout au long du
siècle, suivant la progression d’un modèle d’effet de réseau. L’imprimerie dans le
72
Contributeurs à Wikipédia, «Guerre de la Ligue d’Augsbourg»
Brenda, 2007, 113
74
Brenda, 2007, 113
75
Bonney, 1999, 146
73
19 vernaculaire bénéficie aussi des bénéfices liés à un mode de communication léger et donc
facilement transportable.
Cette grande mobilité aura des répercussions importantes. Se sentant menacés par les
écrits à caractère politique, les autorités de l’époque les censurent, peu importe leur point
de vue76, ce qui force les écrivains à publier à partir de l’extérieur. Relatée par des
contributeurs à l’encyclopédie Wikipédia, l’histoire de la vie de Voltaire, un des écrivains
les plus marquants de cette époque, représente bien cette diaspora des intellectuels
français au centre de qui sera appelé le siècle des Lumières. S’il était déjà d’une nature
peu encline à supporter l’autorité royale, son exil en Angleterre en 1720 lui fait découvrir
les détails du parlementarisme britannique et renforce son opinion sur le régime français.
Cet exil ne sera que le premier de plusieurs subit par Voltaire. Tout au long de sa vie, il
lui sera cependant possible de diffuser ses écrits en France à partir de l’étranger.
De la même façon, Mirabeau publiera à partir des Pays-Bas son Essai sur le despotisme77
puis plus tard de Londres Sur la liberté de la presse, imité de l’anglais, une publication
qui se révèlera importante lors de la Révolution78. Une autre publication importante, les
Lettres Persanes de Montesquieu vont être imprimées à Amsterdam79. Voltaire, Mirabeau
et Montesquieu, comme plusieurs autres intellectuels, insuffleront de l’extérieur au
peuple français ces idées nouvelles qui influenceront le cours de la Révolution. L’effet
inverse est aussi vrai. Aux huguenots s’étant récemment exilés s’ajoutent ces écrivains et
ils forment ainsi une communauté intellectuelle sans attachement80 qui va répandre les
idées des Lumières au travers de l’Europe81.
Un autre aspect intéressant à noter est que l’avènement de l’imprimerie dans le
vernaculaire provoque non seulement l’effacement du latin, mais aussi la montée du
français comme langue de choix de l’Europe des domaines scientifique et politique au
76
Steinberg, 1996, 134
Contributeurs à Wikipédia, «Honoré-Gabriel Riqueti de Mirabeau»
78
Steinberg, 1996, 135
79
Eisenstein, 1992, 105
80
Eisenstein, 1992, 6
81
Eisenstein, 1992, 101
77
20 cours de cette période82. Les publications en langue nationale des divers pays d’Europe
destinées à l’exportation sont donc traduites en français83. Grâce à cette nouvelle
technologie informationnelle, les français bénéficient donc, en plus d’une accessibilité
accrue du matériel littéraire local, d’un accès privilégié aux livres étrangers. Du point de
vue français, le fait que les imprimeurs étrangers produisent du matériel français dans le
but de le vendre à l’extérieur de la France est une d’économie d’échelle informationnelle.
Les autres pays d’Europe subventionnent en quelque sorte leur accès à l’information.
La prise de conscience collective, la montée du nationalisme et l’alphabétisation, facteurs
démontrés dans la description du choc, s’additionnent aux éléments présentés ici.
Ensembles, ils progressent au cours de la période étudiée et façonnent les éléments
historiques qui s’y sont produits. Il est donc impossible de dissocier la progression du
vernaculaire dans l’imprimerie de la Révolution Française et par conséquent de l’arrivée
au pouvoir de Napoléon, personnage historique qui va marquer l’Europe.
1800 : La marge externe
Si la société française est bouleversée au cours de la période étudiée, les variations de
l’étendue du territoire contrôlé par la France sont toutes aussi marquantes et représentent
bien les succès et les échecs des différentes politiques sociales et économiques misent en
place par les personnes à la tête du pays. La situation initiale présentée change dès 1713,
quand la guerre de Succession d’Espagne se termine avec le traité d’Utrecht84. La France
perd avec ce traité Terre-Neuve et une partie de l’Acadie. Ces pertes pavent la voie au
traitée de Paris, qui, en 1763, lui fait perdre la plupart de ses territoires coloniaux, dont le
Canada et une majorité de ses possessions en Inde85.
Du côté de l’Europe, l’Ancien Régime ajoute et perd divers petits territoires au fil des
guerres. Un ajout permanent est cependant la Corse, achetée par Louis XV en 1768. Ce
82
Eisenstein, 1992, 38
Eisenstein, 1992, 16
84
Contributeurs à Wikipédia, «Traité d’Utrecht»
85
Contributeurs à Wikipédia, «Traité de Paris»
83
21 n’est qu’avec l’avènement de la Révolution que les marges externes de la France vont
changer d’une façon appréciable. Les enclaves plus ou moins indépendantes à l’intérieur
du territoire français seront absorbées définitivement. Un jeune général, Napoléon
Bonaparte, a de vifs succès dans le nord de l’Italie et y installe des Républiques sœurs
sous dominance française86. L’armée de la République, du Directoire et du Consulat
repousse peu à peu la frontière est du pays jusqu’à atteindre le Rhin.
Le résultat final est ambigu. En 1800, le territoire appartenant à la France est certes
moins grand puisqu’elle a perdu la plupart de ses colonies, dont l’imposante NouvelleFrance. En Europe cependant, elle a repoussé sa frontière est et a ainsi acquis un territoire
plus petit que celui perdu en Amérique, mais qui est par contre densément peuplé,
fortement industrialisé et donc taxable (annexe 5). Elle a donc perdu des territoires dont
les marges externes étaient immenses mais qui représentait une dépense plutôt qu’un
revenu et a annexé des places plus petites et profitables.
Les effets directs de l’imprimerie dans le vernaculaire sont assez limités. Bien sûr, il faut
considérer que son influence a contribué aux problèmes de taxation et que la Guerre de
Sept Ans menant au Traité de Paris, entre autres, a partiellement été décidée par la
capacité à lever des taxes et à emprunter. Il faut aussi souligner la ferveur nationaliste
qui a animé l’armée révolutionnaire et la nature libératrice donnée aux conquêtes. Ce sont
tous des facteurs qui pourraient être liés aux éléments vus dans la description du choc et
ses impacts.
1800 : La marge interne
Les transformations de la France couvertes précédemment vont aussi avoir un impact sur
la marge interne du pays. Tout au long de la période étudiée, les personnes au pouvoir
font tenter d’améliorer le système de taxation afin de résoudre les problèmes de
l’endettement et du financement. L’étude des finances de la France est une tâche ardue,
86
Contributeurs à Wikipédia, «Deuxième Coalition»
22 les problèmes liés à l’inflation et aux changements de monnaie et de taxes rendant
difficile les comparaisons directes. Bonney affirme dans le même livre:
« Any survey and analysis of the French fiscal system from the Italian to the
Napoleonic wars, or from the reign of Louis XII to Louis XVIII, is faced by a
daunting array of massive evolutionary and structural changes, a relative paucity
of documentation, and an absence of reliable general surveys apart from the
ageing works of Clamageran and Marion.»87.
Néanmoins, certaines données permettent dresser un portrait de la situation et d’évaluer
les revenus du gouvernement et le poids du fardeau fiscal soutenu par les citoyens.
Au début du XVIIIe siècle, le roi est terriblement endetté et la guerre de Succession
d’Espagne n’améliore pas la situation. Louis XIV dispose, grâce à la forte centralisation
de pouvoirs, d’une capacité exceptionnelle de taxer qui fait l’envie des autres dirigeants
de l’Europe8889 et il en profite pour instaurer une nouvelle taxe durant cette guerre, le
dixième. Avec cette taxe, qui est imposée par le roi sans l’aval du parlement, le peuple
français subit à ce moment le plus haut taux d’imposition de l’histoire de l’Ancien
Régime90.
En 1715, lorsque le Régent prend le pouvoir à la mort de Louis XIV la dette est de 2,8
milliards de livres, soit dix années de recette91. Il est important de souligner que pour
assurer sa position the Régent, Philippe d’Orléans doit redonner au parlement une partie
des pouvoirs que Louis XIV avaient acquis lors de son règne92. Sa gouvernance est
marquée par une forte inflation et par le Système de Law, le premier essai français d’une
monnaie fiduciaire, qui tourne au désastre. Les règnes de Louis XV et Louis XVI ne
connaissent qu’une faible augmentation des revenus réels93 et les taxes comme la taille,
87
Bonney, 1999, 123
Bonney, 1999, 131
89
Bonney, 1999, 146
90
Bonney, 1999, 146
91
Contributeurs à Wikipédia, «Système de Law»
92
Contributeurs à Wikipédia, «Philippe d’Orléans»
93
Bonney, 1999, 147
88
23 qui ne sont pas ajustées à l’inflation, sont de moins en moins importantes94. Les revenus
tirés de la taille se stabilise autours de 305 millions de livres95. Si les revenus stagnent, les
guerres augmentent encore l’endettement. La Guerre de Sept Ans, avec son front
maritime, est particulièrement coûteuse. Le service de la dette accapare une partie de plus
en plus grande du budget, passant de 28% en 1751 à 49.3% en 1788. De plus, il devient
difficile de refinancer la dette. Dans les dernières années de l’Ancien Régime, la
Couronne emprunte systématiquement et utilise cet argent pour balancer les dépenses
courantes. Necker, responsable du budget à cette époque, doit emprunter à des taux
défavorable pour le gouvernement. Ensemble, ces facteurs paralysent le gouvernement96.
Devant cette situation difficile, le roi décide de rétablir une ancienne tradition, les États
Généraux, afin d’établir de nouveaux impôts ou d’obtenir un refinancement. Necker y
argumente que le gouvernement ne peut continuer de payer de telles sommes97 et cherche
à imposer des réformes. Cependant, si le pouvoir royal s’est érodé au fil des années à la
suite de l’acte du Régent et qu’en pratique la monarchie absolue était disparue dès
178798, le roi demeure puissant. Les opposants du roi réalisent donc que:
« Pitted against a king who held a very strong hand, the revolutionaries realized
that precarious public finances were their most powerful weapon in a battle not
over finance but constitutional reform »99.
Ils forcent donc la main du roi. Rassemblés pour les États Généraux, les représentants du
peuple tiennent tête au roi et la Révolution Française vient changer la donne fiscale.
Tout est fait pour éliminer les traces de l’ancien système et partir à neuf. Les propositions
de Necker sont rejetées et il démissionne. De plus, le nouveau régime abolit toutes les
anciennes taxes et impôts. Pour les remplacer, quatre nouvelles taxes directes sont
instaurées. Un fait notable dans la conception de ces taxes est la recherche d’égalité.
94
Bonney, 1999, 144
Bonney, 1999, 143
96
Bonney, 1999, 148
97
Bonney, 1999, 149
98
Bonney, 1999, 137
99
Hoffman, 2000, 277
95
24 C’est d’ailleurs ce qui incite le nouveau gouvernement à éviter les taxes indirectes. La
plus importante des nouvelles taxes est sans nul doute la taxe foncière liée au cadastre.
L’arpentage et le recensement des terres et richesses commencent dès les premières
années de la révolution et si cette tâche ne sera qu’achevée en 1830, ce nouvel impôt
devient malgré tout la plus grande source de revenu. Plus simple, l’impôt sur les portes et
les fenêtres taxe en fonction du nombre de celles-ci sur chaque maison. Il y a ensuite la
patente, l’équivalent de ce qu’était le vingtième pour les industries et finalement la
contribution personnelle et mobilière, une taxe complexe sur les biens100.
L’application de ces taxes est difficile. Bonney décrit la situation de cette façon :
«It is one of the ironies of a Revolution that was to resort to Terror in 1793 that it
singularly failed to secure tax compliance in the new departments: tax collection
did not become really effective, nor were revenues stabilized, at least in nominal
terms, until 1797»
« This loss of governmental authority, together with a reduction in expenditure
and a lurch away from indirect taxes, ensured that Revolutionary France would
experience a massive problem of resistance to taxation in the 1790s.»101
Il est donc clair que non seulement la transition est laborieuse, mais aussi que volonté
moyenne de payer des impôts est en baisse.
Pour contrer la baisse des revenus, le gouvernement crée les assignats, une nouvelle
monnaie fiduciaire évaluée en livres avec cours légal102 et qui était au début basée sur les
revenus qu’on espérait obtenir de la vente des biens confisqués à l’Église durant la
révolution. Le gouvernement révolutionnaire a besoin d’argent rapidement et étant
pratiquement sans revenu à la suite de toutes ses abolitions il ne peut attendre la mise en
place de nouvelles taxes. En cinq ans, l’équivalent de 14 années de revenue est imprimé,
soit 7000 millions de livres103. L’inflation est si élevée que le gouvernement met en place
des lois forçant les gens à effectuer leurs transactions avec les assignats. Le
100
Bruguière, 1969, 17
Bonney, 1999, 164
102
Hoffman, 2000, 276
103
Bonney, 1999, 149
101
25 gouvernement va malgré tout continuer d’imprimer jusqu’à ce que les assignats ne valent
plus que le papier sur lequel ils sont imprimés. C’est un nouvel échec pour la monnaie
fiduciaire.
Après les échecs de la République, le Directoire et le Consulat vont tenter d’améliorer la
situation. Napoléon ramène les taxes indirectes, dont celle sur le sel et celle sur la vente
d’alcool104. La machine de guerre est cependant gourmande et malgré les nouveaux
revenus, c’est surtout les sommes acquises par les victoires militaires qui vont lui
permettre de balancer le budget105. À elle seule, l’Italie versera près de 47 millions en
1796106.
Au final, la période étudiée aura produit plusieurs changements. Le cadastre, plus
équitable, vient remplacer le dixième et le vingtième. Les nobles, l’Église et la
bourgeoisie perdent certains de leurs privilèges face à l’impôt107. Si avant certaines
régions jouissaient de droits acquis et si la capacité de taxer du gouvernement diminuait
avec la distance de Paris, l’imposition est maintenant plus uniforme108. L’instabilité
causée par les changements de régimes et les guerres nuisent cependant à la marge
interne.
En 1700, la France recevait environ 300 millions en impôt. En 1788, juste avant la
révolution, c’était 475. De 1715 à 1785, les impôts sont passés de 12% à 11% du revenu
d’un individu109. En 1800, l’État collecte 265 millions en taxes directes, 185 millions en
taxes indirectes pour un total de 450 millions en impôt. De plus, il retire 75 millions de la
vente d’actifs et de ses guerres. Ajusté à l’inflation, ces chiffres donnent une baisse de la
marge interne réelle tout au long de la période étudiée.
104
Bruguière, 1969, 23
Bonney, 1999, 162
106
Branda, 2007, 143
107
Bonney, 1999, 160
108
Bonney, 1999, 157
109
Brenda, 2007, 111
105
26 Pour ce qui est de l’influence de l’imprimerie dans le vernaculaire, des effets directs sont
visibles. Deux de ces effets se démarquent. Premièrement, celui de la monnaie fiduciaire,
qui est rendue possible grâce à cette nouvelle technologie. Le Système de Law et les
assignats ont tous deux marqués le domaine de l’imposition et ont à leur façon influencé
le cours des évènements. Ensuite, la publication des ouvrages nommés Compte rendu au
roi, une tradition commencée par Necker en 1781. Ces documents permettaient à tous les
français de connaître les détails des budgets de la France et ils ont donnés des arguments
aux révolutionnaires de 1789110.
Vérification des hypothèses
Construites à partir du modèle de Léonard Dudley avec des informations tirées des
œuvres d’Innis et de McNeill et basées sur les années 1700 à 1800, les hypothèses
prévoyaient une hausse de la marge interne et externe. En effet, l’imprimerie dans le
vernaculaire est une nouvelle technologie qui devrait permettre des économies d’échelles
informationnelles et inciter les gens à payer plus pour faire partie d’un réseau efficace.
Au travers de l’analyse historique, il est possible de constater que les hypothèses ne sont
pas vérifiées. Jusqu’à la chute de l’Ancien Régime, la nouvelle technologie au travers de
l’éducation qu’elle apporte et des idées dont elle permet la diffusion baisse la volonté de
payer. Si au départ l’absolutisme de Louis XIV lui permet d’imposer unilatéralement une
nouvelle taxe, une proposition semblable de Louis XVI lui fera perdre le trône. La
population veut de moins en moins soutenir un régime monarchique. Les paramètres du
modèle prédisent cependant correctement que des problèmes de taxation mènent à une
perte de territoire, ce qui est vérifié par les pertes subies par l’Ancien Régime.
Le modèle n’est pas plus exact lors des années de la République, du Directoire et du
Consulat. Le chaos baisse les services offerts et par conséquent la volonté de payer. La
République augmente cependant les marges externes de l’État. L’arrivée du Consulat et
les réformes de Napoléon viennent corriger les lacunes de la République en rétablissant
les taxes indirectes et inaugurant de nouvelles institutions axées sur les citoyens, mais en
110
Branda, 2007, 105
27 1800 ces changements sont trop récents pour améliorer la marge interne. Les succès
remportés sur les champs de batailles viennent compenser quelque peu pour les pertes de
l’Ancien Régime.
Globalement, si l’année de départ est comparée à l’année finale, l’effet total est donc
négatif pour la marge interne et ambigu pour la marge externe. Les frontières de la France
métropolitaine sont élargies et ajoutent de riches territoires, mais les colonies sont
perdues et cela limite le potentiel de croissance futur. Le système de taxation présent à la
fin de la période étudiée règle plusieurs problèmes présents sous l’Ancien Régime, mais
le revenu total réel est plus bas. Il est donc possible de dire que si le modèle aide à
comprendre cette période, la nouvelle technologie informationnelle que représente
l’imprimerie dans le vernaculaire a eu, dû à la nature du régime en place, l’effet inverse
aux prédictions sur la marge interne et, par conséquent, n’a pas eu l’effet escompté sur les
marges externes de la France.
Addenda : Napoléon (1800 à 1815)
Étendre la période étudié pour y inclure le règne de Napoléon permet d’étudier quelque
peu les effets de ses réformes.
Le sacre de Napoléon en tant qu’empereur va marquer le début d’un règne court, mais qui
sera marqué par des campagnes militaires fructueuses. En 1803, la vente de la
Louisiane111, qui désignait à l’époque un territoire immense au cœur de l’Amérique du
Nord, confirme la fin des intentions coloniales de la France sur ce continent. Soutenues
par la Grande Armée, Napoléon prend possession d’une grande partie de l’Europe
occidentale et, en 1812, contrôle ainsi le plus grand territoire de l’histoire de la France
(annexe 6)112. Il faut aussi souligner la ferveur nationaliste qui a animé la Grande Armée
de Napoléon.
111
112
Contributeurs à Wikipédia, «Vente de la Louisiane»
Contributeurs à Wikipédia, «Formation territoriale de la France métropolitaine»
28 La progression de Napoléon est cependant bloquée dans un premier temps par le Portugal
à l’ouest puis par la Russie à l’est. En 1812, la terrible campagne de Russie dévaste son
armée. Les années suivantes seront marquées par des replis et des défaites. En 1815, la
défaite de Waterloo marque la fin définitive de l’Empire et un retour aux frontières de
1790 (annexe 7)113.
Dans les derniers mois du règne de Napoléon, on se retrouve avec un budget qui a les
dépenses de l’Empire mais les revenus de la France114. En 1813, la dernière année
complète où Napoléon est au pouvoir, 340 millions sont reçus des taxes directes et 150
millions des taxes indirectes115 pour un total de 590 millions.
Le système de Napoléon corrige la sous taxation de l’Ancien Régime mentionnée au
début de cette section. Il devient, au fil du temps, une proportion croissante de la
production, contrairement aux taxes fixes de l’Ancien Régime. Il est aussi plus élevé par
rapport au produit intérieur brut que tous les régimes du siècle précédent116. En termes
réels, les français sont donc plus taxés.
Les conquêtes de Napoléon, quoiqu’impressionnantes, ne sont qu’éphémères. Les
réforment augmentent donc la volonté de payer, mais le territoire qu’il occupe à son
apogée dépasse ce qu’il est capable de soutenir et les marges externes finales sont plus
petites que celles de la République. La perte de la Louisiane à elle seule diminue le
territoire considérablement et limite le potentiel de croissance commercial et territorial de
la France.
Le Premier Empire se conclut donc par une diminution des marges externes et un
accroissement des marges internes, mais le tout reste instable. Son règne est suivi par la
Première Restauration, puis il y a l’interlude des Cent-Jours, la Seconde Restauration et
la Seconde République. Cette instabilité politique en France et les changements qu’elle
113
Contributeurs à Wikipédia, «Formation territoriale de la France métropolitaine»
Bruguière, 1969, 30
115
Bruguière, 1969, 13
116
Bonney, 1999, 167
114
29 apporte tant au niveau de la marge interne qu’externe vont lui nuire et vont ainsi ouvrir la
voie aux évènements du 19e siècle, qui sera définitivement celui de l’Empire Britannique.
30 Section VI. - Conclusion
Pour conclure ce travail concernant l’impact de l’imprimerie au vernaculaire en France de
1700 à 1800, il est important de résumer les résultats de l’analyse.
En ce qui concerne le modèle théorique, l’approche de Leonard Dudley et d’Harold Innis
énonce que l’imprimerie au vernaculaire aura comme effet une augmentation des
économies d’échelles informationnelles. Ceci entraînera une augmentation de la marge
externe et de la marge interne. Les causes associées à ces changements sont en autre une
diffusion du savoir, l’alphabétisation de la population et un réseau d’information plus
efficace.
Lors de l’analyse historique, le modèle est contredit. En effet, le territoire de la France
diminue lorsqu’on compare 1700 et 1800. La France perd ses colonies durant ces années
ce qui réduit considérablement la superficie de son territoire mais gagne plusieurs
territoires industrialisés ce que rend l’évaluation du changement ambigüe. Au niveau de
la taille d’impôts, l’effet est négatif pour cette période bien qu’il soit difficile de
comparer les deux périodes. Les faits historiques permettent de voir que l’imprimerie au
vernaculaire a bel et bien un effet de diffusion des idées. Par contre, les idées véhiculées
par cette technologie sont contre l’absolutisme et informent la population des problèmes
de changements de régimes et des guerres ce qui diminue la volonté de payer des impôts.
Cette explication est donc une partie de l’hypothèse qui aurait pu influencer les marges à
aller à l’encontre du modèle de Dudley et Innis. Il serait intéressant d’analyser des
impacts de l’imprimerie au vernaculaire sur d’autres aspects qui aurait pu avoir un effet
indirect sur la superficie ou le taux de taxation. Par exemple, se peut-il que l’imprimerie
ait eu un impact sur des technologies militaires ou qu’un autre avancement militaire au
même moment ait aussi influencé les marges interne et externe de manière inverse au
modèle théorique?
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37 Annexes
Annexe 1 : Marge externe en 1700
Contributeurs à Wikipédia, «Formation territoriale de la France métropolitaine»
38 Annexe 2 : Premier empire colonial (en bleu clair)
Contributeurs à Wikipédia, «Premier empire colonial français»
39 Annexe 3 : Représentation graphique du modèle théorique (avant le choc)
Fait par Antoine Noël (avec Power Point)
40 Annexe 4 : Représentation graphique du modèle théorique (après le choc)
Fait par Antoine Noël (avec Power Point)
41 Annexe 5 : Marge externe finale en 1800
Contributeurs à Wikipédia, «Consulat (Histoire de France)»
42 Annexe 5 : Territoire à l’apogée de l’Empire
En bleu foncé la France et en bleu clair ses vassaux
Contributeurs à Wikipédia, «Formation territoriale de la France métropolitaine»
43 Annexe 6 : Marge externe en 1815
Contributeurs à Wikipédia, «Formation territoriale de la France métropolitaine»
44 
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