Nouvelle maquette

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photo LiriZONE
fabrizio chiovetta au festival vernier classique
ISSN 1016-9415
272 / mai 2015
CHF. 12.-- 12 €
Rendez-vous le 3 juin
Théâtre Forum Meyrin
Rendez-vous le 3 juin
Théâtre Forum Meyrin
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cine die / raymond scholer
ciné-club universitaire : cycle alain cavalier
cinémathèque suisse en mai / raymond scholer
cinémas du grütli en mai / christian bernard, serge lachat
les films du mois /e. beck, c. bernard, é. gür, s. lachat
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opéra de lausanne : saison / éric pousaz
berlin : la rondine & la fanciulla del west / éric pousaz
beaune : festival / pierre-rené serna
strasbourg : la clemenza di tito / éric pousaz
bâle : daphné / éric pousaz
mémento opéra
moscou : le prince igor & boris godounov / martine duruz
valence : norma / gabriele bucchi
montpellier : a clemenza di tito / françois jestin
new york : ernani & lucia di lammermoor / frank fredenrich
lyon : festival jardins mystérieux / françois jestin
avignon : simon boccanegra / françois jestin
marseille : tosca / françois jestin
monte-carlo : don giovanni / françois jestin
nice : semiramide / françois jestin
toulouse : castor et pollux / françois jestin
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théâtre du grütli : comme il vous plaira / l. tièche-chavier
théâtre des amis : la cerisaie / julie bauer
entretien : brigitte rosset / laurence tièche-chavier
le poche : dispersion / gilles costaz
entretien : jacques probst / rosine schautz
tournée : la visite de la vieille dame
théâtre du crève-cœur : jean et béatrice / rosine schautz
théâtre équilibre fribourg : big apple
espace nuithonie : constellation*cendrillon / valérie vuille
entretien : guy jutard / laurence tièche-chavier
opéra
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théâtre
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ailleurs
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danse
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chronique lyonnaise / frank langlois
bfm : salue pour moi le monde ! / emmanuèle rüegger
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portrait : gleb skvortsov / martine duruz
agenda romand / yves allaz
agenda genevois / martina diaz
portrait : ophélie gaillard / yves allaz
portrait : per tengstrand / beata zakes
portrait : daniel harding / pierre jaquet
festival vernier classique : fabrizio chiovetta / chr. bernard
carouge : bose-pastor duo / serene regard
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rencontres musicales : cédric pescia / yves allaz
portrait : philippe jordan / david verdier
le nouvel alhambra / martine duruz
festival les athénéennes : felicity lott / françois lesueur
entretien : véronique gens / françois lesueur
cd’s suisses en vrac / éric pousaz
festival de lucerne en été / emmanuèle rüegger
festival de lucerne à pâques / emmanuèle rüegger
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le locle : sandrine pelletier / nadia el-beblawi
berne : henry moore / nadia el-beblawi
mémento beaux-arts : france
évian : jacques-émile blanche
mémento beaux-arts : ailleurs
milan : leonardo da vinci
mémento beaux-arts : suisse romande
fondation baur : alfred baur, pionnier et collectionneur
mémento beaux-arts : suisse alémanique
musée bellerive, zurich : cosi fragili
aix-en-provence : hans berger / régine kopp
expositions
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philharmonie II : pierre boulez / pierre-rené serna
palais des congrès : le presbytère / stéphanie nègre
opéra de paris : le lac des cygnes / stéphanie nègre
petit palais : de carmen à mélisande / pierre-rené serna
petit palais : les bas-fonds du baroque / régine kopp
grand palais : vélasquez / régine kopp
opéra : le cid en fanfare / pierre-rené serna
chronique des concerts / david verdier
encarts - comédie française : la maison de bernarda alba /
odéon : les fausses confidences / colline : affabulazione /
rond-point : murmures des murs
sélection musicale de mai / françois lesueur
mémento théâtre
théâtre de l’odéon : henry VI
théâtre du rond-point : semianyki express
mémento expositions
fondation custodia : raphaël, titien, michel-ange
les mémentos
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encarts : coup fatal à annecy / françois morel à thonon /
nikolaï lugansky à évian / david krakauer à annemasse
encarts - à la folie feydeau à sion / philippe jaroussky à
l’abbaye de bonmont / ion à l’adc / le quatuor de genève
encarts - l’osr et le bicentenaire / chœur et orchestre de
l’université / l’âne et le ruisseau à saint-gervais / haute
autriche à l’alchimir
musicales de compesières
opéra de lausanne : béjart ballet lausanne
théâtre du crochetan : les bonnes
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Darbellay, Frank Dayen, Martine
Duruz, Frank Fredenrich,
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éditeur responsable
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Rime, Julien Roche, Emmanuèle
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Schautz, Raymond Scholer, PierreRené Serna, Bertrand Tappolet,
Laurence Tièche Chavier, David
Verdier, Valérie Vuille,
Christian Wasselin, Beata Zakes,
François Zanetta
maquette : Viviane Vuilleumier
imprimé sur les presses de
PETRUZZI - Città di Castello, Italie
Aux comédiens inconnus...
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l y a de cela quelques décennies, les programmes des théâtres pouvaient
ressembler à des bibles concoctées avec un soin indéniable par de fringants
universitaires prompts à dégainer les inévitables citations du « Petit
Organon pour le théâtre » ou du « Journal » de Bertolt Brecht ou encore des
extraits d'essais sur le théâtre de Roland Barthes. « Shakespeare notre contemporain » de Jan Kott servait de repère pour analyser les œuvres du dramaturge
anglais, et quelques enseignants et spécialistes comme Anne Ubersfeld ou
Bernard Dort étaient volontiers cités par les metteurs en scène ayant suivi un cursus universitaire.
On connaît mal les effets secondaires de ces références sur le public mais toujours est-il que l'on constate de manière générale une diminution du volume des
analyses dans les programmes et cela est d'autant plus facile à remarquer que
ceux-ci ont considérablement diminué en volume au fil des années. On mettra cela
sur le compte des problèmes économiques et de la nécessité de diminuer les coûts
de production, d'autant que désormais il est habituel de faire passer des informations assez systématiquement sur le net, avec extraits de spectacles et contacts
directs avec les spectateurs potentiels via les réseaux sociaux. Concrètement cela
signifie que les programmes consistent bien souvent désormais en de simple
feuilles volantes.
Reste qu'hier comme aujourd'hui, on a pu constater et l'on constate encore très
fréquemment que les principaux oubliés dans ces programmes sont tout simplement les comédiens. Inutile le plus souvent de chercher la moindre biographie,
sans parler d'une photo, le terme trombinoscope – certes un peu barbare, mais dont
la signification est fort claire – ne figurant pas dans le vocabulaire de l'univers du
théâtre, contrairement à l'opéra. Mais il existe encore une habitude plus gênante,
celle consistant à simplement énumérer le nom des comédiens par ordre alphabétique, sans que l'on puisse savoir quel est l'interprète de tel ou tel rôle.
S'agit-il d'une démarche intentionnelle, histoire de démontrer que le hallebardier est bien l'alter ego du rôle-titre ou que la soubrette n'a rien à envier à la jeune
première ? Ou peut-être veut-on faire travailler les méninges des quelques critiques en activité sensés pouvoir reconnaître au premier regard les interprètes ?
Ceci étant, il est un personnage dont le nom figure toujours bien en évidence,
c'est le metteur en scène, de même que ses collaborateurs ou collaboratrices.
Est-il si compliqué de rendre à César ou à Ophélie le nom de son interprète ?
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le cinéma au jour le jour
Cine Die
Berlinale : Panorama
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Le film le plus romanesque du festival fut de JK Yoon (dont le film
précédent, Haeundae, sur un tsunami géant, était un des plus gros succès
du cinéma sud-coréen) : Ode to My Father / Gukje Shijang est une
fresque qui suit les tribulations d’une famille du Nord sur 60 ans. Cela
commence avec l’évacuation de la population civile par les navires de
guerre américains dans le port de Hungnam, en 1951. Dans le chaos de
l’embarquement, Deok-Su, un garçon de 12 ans, perd sa petite sœur : le
père redescend à terre à sa recherche. On ne les reverra plus. La mère,
Deok-Su et le reste de la famille sont recueillis par une tante qui tient une
échoppe dans le bazar de Gukje à Busan. Ils survivront tant bien que mal
aux privations de la guerre. Deok-Su prend à cœur son rôle de chef de
famille et ne rechigne devant aucun travail pour subvenir aux besoins des
siens. Dans les années cinquante, il s’expatrie en Allemagne pour œuvrer
dans les mines de charbon de la Ruhr, un boulot décemment payé. Et en
plus, il semble y avoir une grande colonie de compatriotes, des infirmières coréennes pas vilaines du tout, atout majeur lorsqu’on vous hospitalise amoché par un coup de grisou. Et c’est ainsi que Deok-Su rencontre la
femme de sa vie. Entretemps, le miracle économique coréen a pris son
essor et une nouvelle tranche de vie dans la mère patrie commence, interrompue par la guerre du Vietnam qui voit notre héros servir, derechef pour
des raisons économiques, dans les auxiliaires de la logistique, alors que les
femmes font fleurir le commerce à Busan. Les remous de la dictature de
Park Chung Hee, puis de celle de Chun Doo-hwan sont un peu balayés
sous le tapis, car le film se veut ode et non complainte. Mais cette production commerciale hautement maîtrisée prodigue plus d’émotion que
maints films d’auteur.
Côté documentaires, Censored Voices de l’Israélienne Mor Loushy
nous replonge, au moyen d’actualités militaires de l’époque, dans la
Guerre des Six Jours (1967), à la fin de laquelle Israël avait triplé son territoire. Contrairement aux idées reçues, la victoire foudroyante de Tsahal
n’avait pas été fêtée dans la liesse et l’euphorie générales : bien des soldats n’étaient pas tellement fiers de leurs faits de guerre. Quelle gloire à
massacrer des soldats égyptiens notamment se laissaient tuer avec une
Jeong-min Hwang et Yunjin Kim dans «Ode to my Father»
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curieuse léthargie, comme s’ils ne voyaient aucune échappatoire au rouleau compresseur des chars de Moshe Dayan ? Les jeunes gens de son kibboutz que l’écrivain Amos Oz avait réunis autour d’une table pour échanger leurs impressions racontaient les destructions inutiles et les actes de
vengeance primaires dont ils avaient été acteurs ou témoins : beaucoup
avaient honte de ce qu’Israël avait fait et peur pour l’avenir. Leurs propos
furent enregistrés. Mais lorsqu’Oz voulut les publier, l’armée avait déjà
confisqué les bandes magnétiques. La cinéaste a retrouvé les propriétaires
- maintenant septuagénaires - de certaines de ces voix censurées et les
confronte aux archives d'époque. Certains dénigrent leurs jugements de
jadis en les mettant sur le compte du traumatisme subi, d’autres, dont Oz,
pensent que leur validité est encore plus pertinente de nos jours.
«Censored Voices»
29e Festival International de Films de Fribourg
Les Roms, la Syrie, les indigènes nord-américains, voilà des sections
parallèles qui sentent furieusement le festival bio qu’était Fribourg avant
Edouard Waintrop, quand il fallait dénoncer la misère, notamment celle du
Tiers-Monde. Il y a un petit retour aux préoccupations ethnographiques :
The Journals of Knud Rasmussen, 2008, de Norman Cohn et Zacharias
Kunuk, sur la visite de l’explorateur danois dans le grand Nord canadien
en 1922, ressemble plus à un catalogue des mythes et coutumes chamaniques qu’à un récit proprement dit. Mais heureusement que deux autres
sections, numériquement plus importantes, Pouvez-vous rire de tout ? et
Terra Erotica étaient là pour dérider. La compétition internationale reprenait Taxi de Jafar Panahi, l’Ours d’Or de la Berlinale, mais le jury n’y
trouva pas matière à prix. Le Regard d’Or fut donné à Gonzalez du
Mexicain Christian Diaz Pardo, où un jeune chômeur croulant sous les
dettes trouve un emploi de téléopérateur pour le compte d’un télévangéliste charismatique et commence à s’intéresser aux possibilités de s’enrichir
sur le dos de crédules fidèles. Le film, sorti au festival de Morelia, dispose déjà d’un bon capital critique, mais je n’ai pas pu le voir.
Le Jury a donné son prix spécial à Ata, réalisé par un moine bouddhiste tibétain, Chakme Rinpoche. L’histoire est émouvante et, combinée
avec le statut et l’origine du réalisateur, explique peut-être cela. Quelque
part en Mongolie Intérieure, une mère conductrice de camions élève seul
son fils ado aveugle et s’est mis en tête de l’inscrire aux championnats de
ping-pong. Pour lui faire plaisir, le jeune prend des leçons auprès d’un
moniteur qui le fait souvent jouer contre un autre étudiant aveugle, orphelin de surcroît, mais le fait est qu’il n’aime pas ce sport. Un beau jour, il
disparaît. La mère qui était tellement occupée jusque-là à travailler pour
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joindre les deux bouts, a soudain beaucoup de temps pour se mettre à la
recherche de son fils, les yeux couverts d’un bandeau opaque pour se mettre en situation et sentir le monde comme son fils l’a senti. Elle finira par
adopter l’orphelin, à défaut de retrouver son rejeton. C’est bien joué et
photographié, mais trop de questions restent en suspens à la fin pour faire
de Ata plus qu’un film émotionnel.
Une mention spéciale fut accordée à Flapping in the Middle of
Nowhere de la Vietnamienne Diep Hoang Nguyen, l’histoire d’une jeune
étudiante enceinte dont les intentions d’avorter sont constamment contrecarrées par des complications financières et psychologiques. À des lieues
de la détermination et du cartésianisme d’une Juno (Jason Reitman,
2007), le film soigne la description des valses-hésitations de sa protagoniste en l’habillant d’atours poétiques (sans doute l’influence de Tran Anh
Hung, l’auteur de L’Odeur de la papaye verte (1992), crédité comme
conseiller spécial) : le colocataire et conseiller de l’adolescente est une
drag queen, le père du futur bébé est un employé municipal accro aux
combats de coqs et couvert de dettes, mais il invite volontiers sa belle à
s’envoyer en l’air dans la nacelle mécanique utilisée pour la maintenance
de l’éclairage public. C’est ainsi qu’ils trouvent dans un globe de lampadaire un petit poisson nageant dans l’eau ! Jacques Prévert a dû frémir
dans sa tombe. Une séquence onirique où un déluge de limaces est expulsé du vagin de la future maman pourrait même mettre Cronenberg mal à
l’aise. Mais ni le Jury des Jeunes ni le Jury Œcuménique ne s’en sont
offusqués : ils ont également donné leurs prix à ce film dévoilé à Venise.
Sae-ron Kim dans «A Girl at my Door»
Le deuxième grand film de la compétition était A Girl at my Door de
la Sud-Coréenne July Jung, une disciple de Lee Chang-Dong, montré dans
la section Un certain Regard à Cannes. Young-nam, une jeune policière,
est transférée dans une bourgade au bord de la mer, à la suite d’un incident
non spécifié. Elle rencontre Do-hee, une ado précoce qui se fait régulièrement tabasser par son beau-père alcoolique. Young-nam laisse la jeune se
réfugier chez elle pour la protéger. Jusqu’au jour où le village se rend
compte que Young-Nam est lesbienne. Le beau-père s’engouffre alors
dans la brèche et prétend qu’il a vu la policière abuser de Do-Hee. Mais il
est connu depuis l’affaire d’Outreau que les enfants ont des armes redoutables lorsqu’il s’agit de piéger les adultes. Rira donc bien qui rira le dernier.
Autre titre méritoire: Theeb du Jordanien Naji Abu Nowar est l’histoire du passage, un peu brutal, à l’âge adulte d’un petit Bédouin du
Hedjaz, pendant la Première Guerre mondiale, alors qu’il entreprend avec
son frère aîné un voyage périlleux à travers le désert infesté de brigands
pour amener un officier britannique vers une destination secrète à l’intérieur des lignes ottomanes. A Venise, Abu Nowar est parti avec le prix
« Horizons » du meilleur réalisateur. Corn Island, A Girl at my Door et
Theeb étaient pour moi les sommets de Fribourg.
Mariam Buturishvili et Ilyas Salman dans «Corn Island»
Personnellement, j’ai préféré le Prix du Public, Corn Island du
Géorgien George Ovashvili. Le réalisateur de The Other Bank (2009) y
livre un poème lyrique dans la tradition de Man of Aran (1934) de Robert
Flaherty ou The Wind (1928) de Victor Sjöström sur le combat entre l’homme et la nature. Chaque année au printemps, les alluvions venues du
Caucase créent au milieu de la rivière Enguri (qui forme la frontière entre la
Géorgie et l’Abkhazie) de petites îles très fertiles. Le premier qui plante son
mouchoir dessus en a la jouissance, mais il faut être conscient qu’à la crue
des eaux, ces îles disparaissent. Pendant les quelques mois que met le blé ou
le maïs à pousser et mûrir, on peut donc ensemencer, entretenir et récolter.
A condition de vivre sur l’île, car il faut bien protéger son capital. C’est ce
que fait un grand-père abkhaze avec sa petite-fille orpheline, à peine sortie
de l’enfance. Des détachements des deux armées ennemies rôdent dans le
coin, et la petite n’a pas encore connu le loup. Une certaine tension distingue donc ce récit du tout-venant bio. Le cinéaste enregistre par le menu les
gestes quotidiens : le tournage a peu ou prou duré ce que dure la diégèse. La
fin, quoique humainement logique et naturelle, vous brise le cœur.
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Jacir Eid Al-Hwietat dans «Theeb»
Le nadir était le film de clôture : A Girl Walks Home Alone at Night
de l’Irano-Britannique Ana Lily Amirpour, un film-(im)posture qui veut
nous faire croire qu’il s’agit d’une histoire de vampires iraniens, alors
qu’il a été tourné à Bakersfield en Californie, un film qui croit que le choix
du noir/blanc est un manifeste esthétique, alors que c’est le lieu commun
de la prétention, un film qui avance avec une lenteur de mélasse pour que
les bobos puissent se repaître de ses soi-disant beautés. Ignominie à éviter !
Au mois prochain
Raymond Scholer
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au ciné-club universitaire de genève
Alain Cavalier,
le cinéma en vie
Tous les lundis jusqu’au 15 juin à 20h00 à l'Auditorium
Arditi, sauf la séance au Grütli du 4 mai à 20h00, en la
présence exceptionnelle d'Alain Cavalier pour la
première suisse de son dernier film Le paradis.
Cinéaste français commençant son œuvre cinématographique en
1962, il n'a cessé dès lors de renouveler ses formes filmiques. Depuis les
films politiques des débuts, avec de grands acteurs, jusqu’aux films réalisés complètement seul, le parcours d'Alain Cavalier n’est qu’à lui.
Un univers sensible et intelligent, s'approchant au plus près des êtres,
plongeant le spectateur au coeur des préoccupations du cinéaste.
Le programme (10 séances):
13 avril : Pater (2011)
20 avril: Le plein de super (1976)
27 avril: Le combat dans l'île (1962)
4 mai: Le paradis (2014) en sa présence
11 mai: Thérèse (1986)
18 mai: Soirée courts et moyens métrages.
«Le paradis» © Pathé Distribution
25 mai: Libera me (1993)
01 juin: René (2002)
08 juin: Cavalier Express (2014)
15 juin: Le filmeur (2004)
Rens.: http://a-c.ch/?p=102
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mai à la
Cinémathèque suisse
Jean-Pierre Melville
Jean-Pierre Grumbach naît en 1917 à Paris
dans une famille juive alsacienne. Alors qu’il
n’a que six ans, ses parents lui offrent une
caméra Pathé Baby : la graine du cinéma est
semée. En 1940, il fait partie des soldats français évacués de Dunkerque pendant l’Opération
Dynamo. Rejoignant la Résistance, il prend le
pseudonyme de Melville en hommage à l’auteur
de Moby Dick. Il décrira les pratiques de la
Résistance par le menu dans son chef-d’œuvre
l’Armée des Ombres (1969). Mais dès son premier long métrage, Le Silence de la Mer
(1947), il aborde les relations entre les Français
et l’occupant allemand. Le Syndicat des techniciens lui ayant refusé une carte d’assistant stagiaire, parce qu’il n’avait pas de formation idoine, Melville fonde sa propre maison de production et réalise l’adaptation du texte de Vercors
en toute indépendance. Plus personne ne lui
imposera ses volontés : tout comme Marcel
Pagnol, il sera son propre producteur. Dès ses
Roger Duchesne dans «Bob le flambeur»
gie de la virilité et des sociétés d’hommes. Le
Doulos (1962), Le Deuxième Souffle (1966),
Le Samouraï (1967) sont, après Deux Hommes
dans Manhattan (1959, où éclate la fascination
du décor américain), les réussites essentielles
d’un des auteurs les moins réalistes du
cinéma français.
» (Jean-Pierre
Jeancolas) Ces polars sont toujours
imprégnés de fatalisme : la lâcheté et la
trahison deviennent les obsessions primordiales, à l’instar de certains films
noirs américains. Ce n’est guère étonnant : le panthéon personnel de Melville
était en effet composé de soixante-trois
réalisateurs, tous américains, tous
confirmés dès les années trente !
plans statiques, immobilité narrative, etc. Un
parangon de modernité, en somme. Ce qui
m’est arrivé avec Goodbye South, Goodbye
(1996) n’aurait pas pu m’arriver avec Melville.
J’ai vu ce film à sa présentation à la presse au
cinéma Richemont. La fine fleur de la critique
romande était réunie pour l’occasion, car la
réputation du cinéaste était déjà bien assurée
grâce à sa trilogie centrée sur la cellule familiale et le passage de l’enfance à l’âge adulte : Un
été chez grand-père (1984), Un temps pour
vivre, un temps pour mourir (1985),
Poussières dans le vent (1986). Et ses deux
films historiques, La Cité des douleurs (1989,
sur les soubresauts de la grande Histoire à l’époque du Massacre 228 et de la Terreur
Blanche du Kuomintang vus par 4 frères) et Le
Maître de marionnettes (1993, où un illustre
marionnettiste raconte en voix-off sa vie, de sa
naissance en 1909 à la fin de l’occupation japonaise en 1945, confrontant la mémoire à
l’Histoire, la parole à l’incarnation). Rien ne
nous préparait à la langueur inouïe, à l’ennui
monumental que provoqua la vision de
Goodbye South, Goodbye : une interminable
pérégrination de deux cuistres à travers l’île de
Formose. À mi-film, je me retournai et constatai que la moitié des spectateurs s’étaient éclip-
Hou Hsiao-Hsien
Jean-Paul Belmondo et Serge Reggiani dans «Le Doulos»
débuts, il se positionne donc comme outsider et,
sans s’en douter, comme précurseur de la
Nouvelle Vague. Cocteau, qui admire Le
Silence de la Mer, lui confie l’adaptation de Les
Enfants terribles (1950), ce « livre d’un certain
désordre psychologique et sociologique propre
aux êtres jeunes » (Jacques Siclier). Avec Bob
le Flambeur (1956), un film de gangsters mâtiné d’une comédie de mœurs, « Melville inaugure une ligne qui lui est personnelle : des films de
moraliste désabusé, qui exaltent une image qui
serait désuète si elle ne composait une mytholo-
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Le premier film de ce réalisateur
taïwanais, originaire du Guangdong, date
de 1980. Melville est déjà mort depuis 7 ans.
Quel rapport, demandez-vous ? C’est simple:
ces deux cinéastes, c’est comme le jour et la
nuit. Si le cinéma de Melville est truffé d’emprunts au polar américain et déroule des récits
intensément structurés où loyauté et trahison,
égoïsme et générosité, bien et mal sont en lutte
perpétuelle selon des schémas quasi ataviques,
celui de Hou prétend chroniquer la vie de tous
les jours sans jugements, souvent de manière
très contemplative, avec un style dégagé de
toute recherche de séduction, ce qui implique
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Shu Qi dans «Millenium Mambo»
sés. Après 90 minutes, nous n’étions plus que
deux. Je ne me souviens plus si l’autre a tenu
jusqu’au bout. Depuis ce jour-là, je n’ai plus vu
de film de Hou. Il paraît que Les Fleurs de
Shanghai (1998) se laisse voir. Sur Millenium
Mambo (2001) je n’ai entendu que des horreurs.
Sur les suivants, je ne sais plus rien du tout :
Caveat emptor !
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cinémas du grütli
Journées du film historique,
Jean-Pierre Melville
La programmation « cinéma » des Rencontres de Genève Histoire et Cité
propose une quarantaine de films sur le thème « Construire la paix ».
Autre temps fort, le cycle Melville propose 11 des 13 longs-métrages du
cinéaste, en présence de Rui Nogueira, auteur de « Le Cinéma selon
Jean-Pierre Melville », livre de référence incontournable.
Les Journées du film historique
(14-16 mai)
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C’est l’appellation donnée au volet “cinéma” des Rencontres de Genève Histoire et Cité,
important événement culturel et scientifique
organisé par La Maison de l’histoire de
l’Université de Genève. La programmation est
éclectique. Elle ambitionne de susciter la curiosité et d’approcher la question du lien entre
cinéma, histoire et paix. Vaste programme! Son
principal intérêt est d’offrir l’occasion de voir
un ensemble de films importants relatifs au
conflit israélo-palestinien.
En ouverture (13 avril, Auditorium Arditi),
Le juge et le Général (Chili, USA, 2008) un
documentaire retraçant l'enquête sur les crimes
du général Pinochet racontée par le juge chilien
Juan Guzman, chargé en 1998 de son instruction. Au moment du coup d’État de 1973, le
magistrat était lui-même un opposant à
Salvador Allende. Issu d’une famille politiquement conservatrice, son enquête l’amène à
changer de point de vue. Le film s’attache à
retracer les épisodes marquants du régime
Pinochet ainsi que les diverses tentatives - vaines - de le juger…
Films sur le Proche-Orient
L’ensemble des films sur le Proche-Orient
comprend Dans un jardin je suis entré de
l’Israélien Avi Mograbi (2012). Issu d’une
famille juive ayant quitté Damas en 1920, Avi
Mograbi propose à son professeur d’arabe Ali
Al-Azhari de faire un film ensemble. Ali est un
«Ana Arabia» d'Amos Gitaï © Cinémathèque suisse
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Palestinien originaire d’un village près de
Nazareth, c’est un réfugié dans sa propre patrie
depuis 1948. Il a passé la majeure partie de sa
vie d’adulte à Tel-Aviv où il s’est marié avec
une femme juive qui lui a donné une fille. Le
film est un retour fantasmé vers un MoyenOrient “d’avant” sans les frontières ethniques et
religieuses d’aujourd’hui séparant les communautés. Ana Arabia d’Amos Gitaï (Israël,
France, 2013) évoque en un plan-séquence
d'une heure et vingt et une minutes (mais il y a
quelques raccords bien dissimulés…) l’histoire
d’amour entre un Arabe et une Juive déterminés
à rester ensemble même si le prix à payer est de
vivre en réprouvés. Dans Fix Me (2010), le
Palestinien Raed Andoni se met en scène à la
manière d’Avi Mograbi, alternant sur un mode
tantôt burlesque tantôt grave un best of de ses
séances de psychothérapie et son quotidien au
milieu de sa famille. Comment rester libre face
aux injonctions collectives, à l’occupation de la
terre et des esprits ? Et maintenant on va où ?
de et avec Nadine Labaki, (France, Liban, 2010)
a été tourné aussi bien dans la Beeka, fief du
Hezbollah, que dans la montagne chrétienne.
Formellement baroque (comédie musicale,
drame et comédie pure se côtoient), le film fait
le tour des stratagèmes employés par les femmes pour empêcher les hommes de reprendre le
sentier de la guerre. Suivi d’une table ronde
avec J.-P. Gontard.
Petit hommage au cinéaste israélien Eyal
Sivan à la HEAD qui organise une table ronde
(avec extraits) autour de son remarquable dernier film Dancing Arabs (Mon Fils) et une
grande soirée (vendredi 19 mai de 19h à
minuit) où sera projeté l’essentiel Route
181, Fragments d'un voyage en
Palestine – Israël de Michel Khleifi et
Eyal Sivan, road-movie documentaire où
le Palestinien et l’Israélien suivent le
tracé des frontières selon la résolution
181 de l’ONU du 29 novembre 1947 prévoyant le partage de la Palestine en deux
Etats. Au hasard de leurs rencontres, ils
donnent la parole aux hommes et aux
femmes, israéliens et palestiniens, jeunes
ou anciens, civils ou militaires, saisis
dans l’ordinaire de leurs vies quotidiennes. A défaut d’aller sur place, la meilleure initiation aux complexités de la situation… Le même jour au Grütli, Au nom
du temple (2014) de Charles Enderlin,
correspondant de France 2 à Jérusalem
ayant fait sa vie en Israël, donne largement la parole aux partisans de la cons-
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truction d’un « troisième temple » sur
l’Esplanade des mosquées, projet explosif s’il
en est. Et démontre la dérive historique d’un
combat politique vers un affrontement entre
“fous de Dieu”.
On relèvera encore dans cette riche programmation 1919-1939 : la drôle de paix
(2009) de David Korn-Brzoza, film coécrit par
Jean-Noël Jeanneney, (présent à une table ronde
à l’issue de la projection): une analyse d’une
clarté exemplaire. Ainsi que la projection du
J’accuse d’Abel Gance accompagné par JeanYves Poupin, pianiste compositeur de jazz, suivie d’un débat avec Antoine De Baecque.
qui n’aime que le cinéma américain des années
30-40, avec sa liste de 63 réalisateurs qu’il
accepte dans son Panthéon). Cette mythologie
est complaisamment peaufinée par ses exégètes
et ses thuriféraires. Mais elle ne dit rien de son
cinéma et de son importance.
Le parcours de l’œuvre permettra de mesurer l’évolution d’un style “bressonien” (voix
off, quasi absence de dialogues) présent dès son
premier film, Le Silence de la Mer, d’après
Vercors, confirmé par la sobriété, voire l’ascétisme de Léon Morin, prêtre (1961) qui annonce le goût de l’épure à venir dont le sommet est
atteint avec Le Samouraï (1967) dans une per-
Alain Delon dans «Le Samouraï» © Cinémathèque suisse
Cycle Jean-Pierre Melville
Ce cycle s’étendra sur tout le mois de mai,
proposant la quasi totalité de l’œuvre, chacun
des 11 films programmés étant projeté à trois
reprises. L’occasion de faire le point sur un
ensemble allant de Le Silence de la mer (1949)
à Un Flic (1972).
Melville s’est très rapidement construit une
image mythique - image physique d’abord (le
Stetson et les Ray-Ban, le trench-coat, les grosses voitures américaines dans lesquelles il promène ses amis dans Paris la nuit), - image psychique ensuite (celle d’un prétentieux mythomane doublée de celle d’un caractériel qui ne
cesse de se brouiller avec ceux qui travaillent
avec lui rendant les tournages infernaux), image politique (celle d’un anarchiste de droite,
ou d’un ancien résistant gaulliste inconditionnel), - image culturelle enfin (celle de quelqu’un
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fection artistique faite de minimalisme, d’ellipses et de lenteur (ses scènes comme “distendues” proches du temps réel)... Ce parcours permettra aussi de mesurer la constance des thèmes: l’amitié trahie, thème omniprésent à partir
de Deux hommes dans Manhattan (1959); l’ironie du sort ; la réversibilité des rôles (les
méthodes de gangsters de la police dans Le
Cercle Rouge (1970) ; la vie comme immense
solitude, comme navigation en eaux troubles
pour un combat secret. Ce parcours devrait permettre, enfin, de mesurer l’importance de
Melville pour la Nouvelle Vague. Deux films
sont particulièrement éclairants à cet égard :
Bob le flambeur (1956), sur un scénario original et des dialogues de Lebreton, tourné en
décors naturels, est une déclaration d’amour à
Paris (mais à un Paris disparu) et à la pègre d’avant-guerre. Tandis que Deux hommes dans
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Manhattan (1959), est surtout une déclaration
d’amour à New-York, un vague thriller prétexte
à se balader dans la ville, y faire des rencontres,
s’arrêter. Deux films, réalisés avec très peu de
moyens, en décors naturels et avec des acteurs
très peu connus. Deux films empreints d’une
légèreté et d’une mélancolie douce-amère…
Comme ceux de la Nouvelle vague.
Le polar comme tragédie
Avec lui, le film policier devient une tragédie, avec ses codes et ses rituels spécifiques précisément décrits (cf. les mises à mort extrêmement stylisées). Les enjeux du polar chez
Melville sont éclairés par ce qui est probablement son meilleur film L’Armée des
Ombres (1969), film sur la Résistance
(expérience cruciale pour Melville), où,
comme dans les polars, il s’agit de préparer des « coups » (avec des armes, donc
des risques de mort), de nouer des alliances, d’être victime de trahisons… Le
regard pessimiste de Melville porté sur
l’après-guerre trouverait-il là son explication? Les héros solitaires de ses polars
seraient-ils les résistants des années 5060, et les flics et les mafieux les héritiers
directs de ceux qui avaient travaillé avec
la Gestapo : mêmes méthodes, mêmes
tortures (suggérées toujours, jamais montrées), même aveuglement quant à leur
rôle réel, concentrés qu’ils sont sur la pratique de leur métier?
On se réjouit de revisiter un cinéma
riche en paradoxes: un cinéma de l’épure,
de l’esquisse, (mais pas un cinéma
abstrait : toujours le monde pèse, les personnages sont souvent englués), mais aussi un cinéma
du détail, de la précision des gestes de spécialistes. Il fait un cinéma dégraissé de toute psychologie (il n’indique jamais les motivations de ses
personnages, ni leur intériorité), et pourtant ses
personnages nous touchent… Cinéaste résolument moderne et pourtant si classique, référentiel et pourtant jamais vraiment maniériste,
machiste dans sa façon de montrer les femmes
dans ses polars, et pourtant presque féministe
dans sa façon de les peindre dans ses films sur
la Résistance…
Christian Bernard, Serge Lachat
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dans la comptabilité de l’entreprise (hérédité des
gènes mafieux ?) que l’affaire décisive pourra
finalement se conclure ! Curieuse image du couple en Dr Jekyll et Mrs Hyde !
C’est là que le cinéaste reste flou dans son
discours moral : nous dit-il
que le monde des affaires
est un monde d’une violence sans limite et qu’on ne
peut y rester les mains
pures ? Son héros arrive-t-il
à cette prise de conscience à
la fin du film ? A-t-il fait,
malgré ses états d’âme le
deuil de son idéalisme après
avoir constaté que celui-ci a
fait des victimes malgré
tout (le suicide de son
employé)? Chandor dénonce-t-il le rêve américain de
réussite individuelle en
montrant qu’il ne peut se
réaliser sans dommages collatéraux ? Laisser le spectateur libre de conclure peut
être une qualité. Mais
aujourd’hui, le cinéaste ne
«A Most Violent Year» avec Anna Morales (Jessica Chastain), Abel Morales (Oscar Isaac) © Elite Films
peut pas ignorer qu’au tournant des années 80 le
A MOST VIOLENT YEAR
est dans les années Reagan, après le deuxième monde occidental a fait de deuil de tout idéalisun film de J.C. Chandor, avec Oscar Isaac, choc pétrolier de 1979, la violence urbaine explo- me et qu’on est à la veille d’expéditions guerrièJessica Chastain, Alessandro Nivola, Albert se. Le film la signale par d’abondantes nouvelles res pour le contrôle du pétrole justement ! A souBrooks, David Oyelowo,… (USA, 2015)
radiophoniques ou télévisées plus que par des lever la question de la morale dans le business
scènes violentes ; celles-ci restent relativement sans essayer de l’inscrire plus clairement dans
Dans un premier temps, A Most Violent Year rares (un braquage de camion, un suicide…). son contexte historique, Chandor condamne son
se donne comme un film de facture classique Mais on est aussi avant les jongleries financières film à rester une agréable distraction plus qu’une
(soin des cadrages, de la photographie qui doit de Wall Street, les affaires se traitent encore dénonciation (ou un vrai questionnement) de l’irendre les couleurs hivernales de 1981, dialogues d’homme à homme, les yeux dans les yeux, déal américain de la réussite et de ses implicaloin de toute improvisation…) organisé autour même si ces pratiques ont déjà un air un peu tions.
Serge Lachat
d’une question éthique qui fait penser à Lumet. désuet…
En effet, ce film raconte l’histoire d’un immigré
Cette histoire d’un homme d’affaires qui se
latino qui vend du pétrole et qui entend faire for- veut intègre dans un cadre de plus en plus délétètune en acquérant une friche industrielle en bor- re aurait pu prendre une dimension « historique » A GIRL WALKS HOME
dure d’East River ou d’Hudson River qui lui per- si le cinéaste avait élargi son propos. Or à rester ALONE AT NIGHT
mette de se faire livrer sa marchandise directe- constamment sur son protagoniste (qui est prati- de Ana Lily Amirpour, USA, 2014, 99'. Avec
ment par bateau, mais se focalise sur sa volonté quement de tous les plans) et ses états d’âme, il Sheila Vand, Mozhan Marnò, Dominic Rains
de réaliser son rêve américain sans recourir à des empêche son film de décoller vraiment. Tout est
À Bad City, sinistre ville abandonnée au
pratiques illégales et sans demander l’aide de la déjà dit dans la scène où le couple heurte un cerf
milieu
d'une plaine désertique, une jeune femme
mafia. Pour cet achat, il verse un acompte impor- en rentrant en voiture : lui ne réussit pas à achevoilée
erre
seule dans la nuit. Il s'agit d'un vamtant qu’il risque de perdre s’il ne réussit pas à ras- ver la bête agonisante alors que sa femme la tue
pire
qui
s'attaque
aux hommes de pouvoir, lequel
sembler le solde dans un délai bien défini. Or des à coups de révolver. Cette épouse, fille d’une
s'incarne
aussi
bien
dans le fructueux marché de
ennuis avec le fisc et avec la police lui aliènent famille mafieuse (grâce à laquelle d’ailleurs
la
drogue
que
dans
l'idéologie patriarcale qui
l’appui de sa banque et des détournements de ses notre Monsieur Propre a pu se lancer dans les
guide
la
conduite
de
la
plupart des mâles qui peucamions de livraison mettent sa trésorerie en affaires), ne supporte pas le refus de la violence
plent
Bad
City.
Au
cours
de ses promenades à
péril… Le lieu et l’époque sont clairement indi- de son mari qu’elle considère comme une faitravers
la
ville
déserte,
elle
rencontre truands,
qués en ouverture du film : New York, 1980. On blesse. C’est d’ailleurs grâce à ses malversations
Les films du mois
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enfants égarés, prostituées,
qu'elle menace ou pourfend.
Les corps de ses victimes
s'entassent dans un ravin
situé aux abords de la ville.
Après avoir mis à mort deux
misogynes, la femme-vampire rencontre un jeune
homme sensible et séduisant. Une romance s’esquisse entre ces deux personnages. Ensemble, ils finiront
par quitter Bad City, ville
corrompue à laquelle décidément rien ne les rattache.
Film d'auteur s'appropriant les codes du
cinéma de genre (plus précisément l'épouvante et
le western), A Girl Walks Home Alone at Night
prend à contre-pied les conventions narratives de
ces « sous-genres ». Nul suspense dans cette
œuvre à l'intrigue dédramatisée qui réserve bien
peu de frissons. Le film lorgne plutôt du côté du
cinéma de la modernité de Wenders ou de
Jarmusch, dont il évoque le dernier opus, Only
Lovers Left Alive, figuration de l'errance de deux
vampires dandys. La forme moderniste et esthétisante qu'emprunte le film tourne malheureusement à vide : la photographie noir et blanc, si elle
impressionne par sa maîtrise, ne laisse nulle
place à l'émotion : on est vite « las de cette beauté écœurante » pour citer (de mémoire) les premiers mots du personnage désabusé de
Nostalghia de Tarkovski.
«A Girl Walks Home Alone at Night» © Praesens Film
Si l'hybridation des genres et des formes
peine à convaincre, le discours critique tenu par
le film est en revanche plus intéressant. A Girl
Walks Home Alone at Night dépeint un Iran morbide, gangréné par les Pères (ceux-ci sont à la
fois tyranniques et violents) et rendu amorphe
par l'éternel ressassement du même discours politique et religieux (celui que l'on entend en boucle
à la télévision). La jeunesse n'est pas présentée
sous un jour des plus favorables : ayant trouvé en
l'ecstasy le moyen de fuir son malaise, elle se
désintéresse de toute problématique sociale. On
ne peut toutefois manquer de reprocher au film
son culte excessif de la beauté : tous les corps des
jeunes sont sublimes, semblant sortis droit d'une
publicité pour parfum.
Cette représentation esthétisante des corps
transforme la charge sociale et politique en
Anaïs Demoustier et Emmanuel Mouret dans «Caprice» © Agora Films
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contemplation auto-suffisante d'une imagerie
trop léchée.
Emilien Gür
CAPRICE
d’Emmanuel Mouret, avec Emmanuel Mouret,
Virginie Efira, Anaïs Demoustier, Laurent
Stocker (France, 2014)
Quand le film commence, le ton est d’emblée donné, il sera léger, tendance humour décalé. On voit Clément (Emmanuel Mouret), enseignant, la trentaine élégante, assis sur un banc
public avec son fils. Celui-ci a le nez plongé dans
un livre (!) et c’est en vain que Clément lui propose un film ou un jeu vidéo sur son portable…!
Quand il le ramène chez son ex-femme, Clément
avoue qu’il a perdu sa veste et a oublié de lui
faire faire ses devoirs. On
voit que Clément est aussi
irresponsable qu’indécis
mais cela fait partie de son
charme. Générique: Paris
au printemps, lumières
chaudes, lilas en fleurs sur
fond de Jazz cool années
50, April in Paris, ça pourrait être Paris when it sizzles, comédie romantique de
Richard Quine de 1964…
On se rend immédiatement
compte
qu’Emmanuel
Mouret a le sens du rythme
et beaucoup d’oreille, qualités indispensables quand on
ambitionne d’offrir une
comédie de charme et de
sophistication en hommage
à Tati, Chaplin et Blake
Edwards. Car, la suite le
montrera, il y a délibérément
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du M. Hulot et du Charlot dans le personnage de
Clément, et aussi du Hrundi V. Bakshi, l’acteur
indien immortalisé par Peter Sellers dans The
Party de Blake Edwards, chef-d’oeuvre du
comique slowburn.
Redevenu célibataire, donc, Clément est
secrètement amoureux d’Alicia (Virginie Efira),
une actrice arrivée qu’il va admirer presque
chaque soir sur scène. Le hasard l’amène à donner des cours du soir au fils d’Alicia. Il entre
ainsi dans le bel appartement de la dame de ses
rêves puis très vite dans son coeur, séduite qu’elle est par l’honnêteté maladroite de Clément,
alors qu’elle a été beaucoup trahie par les hommes. Leur Bonheur serait complet si Clément
n’était poursuivi au gré de rencontres fortuites
par une actrice débutante, Caprice (Anaïs
Demoustier, Bird People, Une nouvelle amie),
prompte à faire de ces rencontres des signes du
destin, puisque, dit-elle, tout est écrit et qu’ils
sont faits l’un pour l’autre… Même si Caprice ne
se montre pas jalouse et ne voit pas de problème
s’il en aime une autre, elle est convaincue que
Clément l’aime et devient objectivement dangereuse comme l’héroïne de Liaison fatale (la vio-
genre particulier se transforme en quatuor,
Thomas (Laurent Stocker) le directeur - et ami de Clément n’étant pas insensible au charme
d’Alicia… Inutile de chercher une morale de la
fable trop précise dans cet élégant marivaudage
sans drame véritable qui tourne résolument le dos
à la déprime générale hexagonale. Sinon qu’au
gré des jeux de l’amour et du hasard, où une fois
encore les femmes se révèlent décidées et les
hommes hésitants, les couples auraient pu être
tout autres… Une agréable comédie champagne.
Christian Bernard
LE DERNIER COuP
DE MARTEAu
d’Alix Delaporte, avec Romain Paul, Clothilde
Hesme, Grégory Gadebois (France, 2014)
Une route interminable sépare Victor
(Romain Paul, prix Marcello-Mastroianni) de la
plage du Languedoc où se trouve son habitation,
un bungalow précaire dans lequel il habite avec
sa mère malade (Clothilde Hesme). Cette distance physique évolue en fonction du chemin mental du garçon de treize ans, qui s’éloigne de la
loirs de l’école et les stades de football pour errer
dans les limbes de l’opéra.
Malgré l’aspect mélodramatique du scénario, Le dernier coup de Marteau refuse toute
forme de sensiblerie. Le récit est irrigué par le
volontarisme des personnages, qui refusent la
victimisation et affrontent leurs situations avec
dignité. C’est à travers le corps que s’incarne
cette lutte. Alors que Victor, confronté aux changements de l’adolescence, découvre l’amour
avec Luna, sa jeune voisine espagnole, la mère
de Victor masque la dégradation de son cancer et
semble abandonner le combat pour sa survie. Le
père de Victor, qui guide ses instrumentistes par
une série de gestes contradictoires, se trouve
quant à lui en inadéquation avec son orchestre.
Les mutations physiques parcourent le film au
fur et à mesure que se tissent les rapports entre
les personnages et qu’un langage s’instaure :
l’enfant murit, renoue avec ses capacités sportives et refuse la capitulation de sa mère en se
rasant la tête.
Ce trio familial en décomposition, jamais
réunis dans le même plan, parvient finalement à
se rassembler à travers une communication nou-
«Le dernier coup de marteau» © Cineworks
lence en moins). Les efforts maladroits et bien
sûr vains de Clément pour cacher l’existence de
Caprice nous valent quelques scènes réussies
dans le cadre d’un suspense très classique dont
on ne dévoilera pas l’issue. Disons tout de même
que cette histoire de triangle amoureux d’un
a
mer pour investir de nouveaux lieux. En quête
d’identité, l’adolescent cherche à reprendre
contact avec son père, Samuel Rovinski
(Grégory Gadebois), célèbre chef d’Orchestre
venu interpréter la sixième symphonie de Mahler
à Montpellier. Victor va alors déserter les cou-
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velle. Ce langage est muet ; les ellipses, les nondits et la musique remplacent les mots et confèrent aux dialogues et à l’image une certaine
pudeur. A travers les yeux et l’ouïe de l’adolescent introverti qu’est Victor, le spectateur parvient à atteindre son intériorité. Le film de
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Delaporte joue subtilement sur une stylisation de
la lumière qui entoure progressivement le personnage d’une « aura », sublimée par la justesse
du jeu d’acteur de Romain Paul. La première rencontre entre l’adolescent et son père dans l’auditorium est emblématique d’une intéressante
variation de la profondeur de champ présente
dans tout le film: l’arrière plan, particulièrement
flou au départ, nous laisse apercevoir graduellement le chef d’orchestre, encore étranger pour
Victor. La 6e symphonie de Mahler résonne brutalement en arrière fond de la même manière
qu’elle investira progressivement l’entièreté de
l’univers du film. La musique devient le pont
entre les trois personnages : le dernier coup de
marteau n’est pas donné.
Eléonore Beck
LE JOuRNAL D’uNE
FEMME DE CHAMBRE
de Benoît Jacquot avec Léa Seydoux, Vincent
Lindon, Clotilde Mollet (France, 2015)
Après un échange vif entre Célestine, jeune
chambrière de Paris du début du siècle, et une
Normandie. Le journal d’une femme de chambre,
c’est le début d’une « épopée de la servitude
humaine » (Camillle de Sainte-Croix) à travers
laquelle le travail domestique dépasse de loin le
simple engagement salarial.
Au lieu de s’appesantir sur les caractères
archétypaux des personnages, le film de Benoît
Jacquot se focalise avant tout sur l’ambiguë
Célestine. Un port de tête droit et fier, une moue
boudeuse, Léa Seydoux incarne un personnage
complexe qui a intégré les mœurs bourgeoises
sans quitter le bas de l’échelle sociale. Serait-ce
l’univers parisien qui lui a insufflé cette piquante
insolence et ses revendications ultra-modernes?
La chambrière choisit ses patrons et refuse sa
condition. Elle ne peut toutefois quitter la servitude : lorsque le chômage plane, les voraces racoleuses des maisons de passe s’abattent sur elle.
La femme de chambre n’a d’autre choix que de
se soumettre aux exigences de la domesticité.
Les exigences, ce sont celles de Mme
Lanlaire, femme revêche et frustrée, obsédée par
son argenterie, agitant sans arrêt sa petite cloche
exaspérante. Ce sont également celles de M.
Lanlaire, patron soumis et manipulable, engros-
sa domestique Rose (qui devient vite interchangeable), rejetant le statut de servante-maîtresse
qui conduit Marianne à l’expulsion du domaine,
Célestine ne se trouve pas moins asservie par la
passion qu’elle éprouve pour le mystérieux
cocher Joseph, cruel antisémite et potentiel
assassin.
Après les adaptations de Martov (1916),
Renoir (1946) et Buñuel (1964), Benoît Jacquot
délivre une quatrième version du célèbre roman
éponyme d’Octave Mirbeau paru en 1900. Le
film de Jacquot cherche à se distancer des autres
versions par une plus grande fidélité au texte original. Alors que le film de Buñuel déplaçait le
récit dans les années trente et nous exposait une
Jeanne Moreau silencieuse et mutine, le film de
Jacquot choisit d’entreprendre un travail de
reconstitution d’époque et de redonner le pouvoir
de la narration à la femme de chambre. Si l’on ne
visualise pas le processus d’écriture de la chambrière, on le devine par l’introduction d’une voixover à la première personne et par l’intervention
ponctuelle de flash-backs, qui restituent au récit
sa forme première. Les costumes d’époque et
l’accès à l’intériorité du personnage incarné par
«Le journal d’une femme de chambre» © Carole Béthuel / Pathé films
« placeuse », qui suggère implicitement à la
jeune domestique d’user « d’inconduite » pour
parvenir à s’élever socialement, l’intrépide
femme de chambre se retrouve propulsée à l’intérieur de la haute bourgeoisie provinciale de
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sant successivement toutes les domestiques de la
pension. Cette condition d’esclave (potentiellement sexuelle), conduit Célestine à choisir une
liberté teintée de crime. Refusant la condition du
concubinage à la manière du capitaine fou et de
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Léa Seydoux n’empêchent pas une vision moderne de l’œuvre de Mirbeau. Loin de l’étude de
mœurs particulièrement subversive propre au
roman, le film de Jacquot choisit de s’attacher
plutôt au portrait de la femme de chambre, de sa
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discrimination sexuelle et salariale,
laissant en toile de fond le contexte
social et politique du tournant du siècle.
Eléonore Beck
SPARTIATES
documentaire de Nicolas Wadimoff
(Suisse, 2015)
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“Yvan Sorel porte à bout de bras
un club de MMA (Mixed Martial
Arts, un sport de combat) dans les «
Quartiers Nord » de Marseille, une
partie de la ville principalement
connue dans les médias pour le trafic
de drogue qui s'y déroule, les gangs et
les kalashnikov... Seul, envers et
contre tout, sans aucun soutien financier de l'Etat
qui a délaissé ces quartiers depuis bien longtemps, Yvan Sorel tente de garder les enfants et
les adolescents dans le « droit chemin ».
Le synopsis du pressbook l’annonce bien:
Spartiates est essentiellement le portrait de cet
Yvan Sorel, sorte de “grand frère” porteur d’une
mission à accomplir et de valeurs à transmettre.
Doté d’une forte personnalité et d’un indéniable
charisme, ce lutteur professionnel (on voit deux
de ses combats) veut être en tant que coach un
véritable éducateur et transmettre ses valeurs
(respect, effort, discipline) aux jeunes du quartier
souvent sans pères ni repères. Il veut en faire des
combattants, car “il faut être fort pour affronter la
vie, encore plus dure que le ring”. On découvre
rapidement ses méthodes de sergent instructeur
et que sa pédagogie, censée apprendre le respect,
«Spartiates» © Filmcoopi
est fondée sur la peur, la menace et l’humiliation… C’est que le personnage est limité, totalement aveugle à la contradiction entre son discours et ses méthodes.
A aucun moment Wadimoff ne nous fait entrer dans l’intimité d’Yvan Sorel qui reste un personnage en perpétuelle représentation. Rien n’est
montré de lui en dehors du rôle qu’il se donne.
Rien n’est dit de son identité alors qu’il entre sur
le ring enveloppé dans les drapeaux algérien et
serbe, se signe à la manière orthodoxe et parle
l’arabe… Et le détour par sa compagne, infirmière montrée sur son lieu de travail – le seul
moment du film où Sorel n’est pas à l’écran –
apparaît inutile. Peut-être aurait-il fallu décrire
d’avantage le “contexte” ramené à quelques
gamins terrorisés par Sorel et à la Maire d’arrondissement, voulant aider mais sans moyen finan-
Le vendeur de DVD et Jafar Panahi dans «Taxi» © FilmCoopi
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cier (elle remettra une médaille à Sorel très
ému…) Le seul charisme du personnage ne suffit
pas à faire tenir le long-métrage sur la durée.
Ramené à 52 minutes, y gagnerait-il?
Christian Bernard
TAxI TEHERAN (TAxI)
Faux documentaire écrit, réalisé et produit par
Jafar Panahi (Iran, 2015)
Interdire les films du plus grand cinéaste iranien (plus grand sans doute - et moins prudent que Kiarostami dont il fut l’assistant sur Au travers des oliviers) et, pour faire bon poids, lui
interdire de tourner et de sortir du pays, est parmi
les plus scandaleuses forfaitures commises par le
gouvernement de la République islamique
d’Iran, s’agissant de la liberté d’expression.
Internationalement reconnu
dès son premier film, le
merveilleux Ballon blanc
(1995), ses oeuvres ont toutes été primées dans les
grands festivals, alors qu’en
Iran elles ne sont accessibles qu’en DVD vendus
sous le manteau.
C’est que, contrairement à son aîné, Panahi traite de sujets politiques. La
condition des femmes (et
plus particulièrement la
prostitution) pour Le Cercle
(Lion d’or à Venise en
2000), alors que le puissant
Sang et Or pointe les inégalités sociales à travers l’histoire d'un vétéran de la
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guerre avec l'Irak. Quant à Hors Jeu (Ours d'argent à Berlin en 2006) il raconte les stratagèmes
déployés par des Iraniennes fans de foot, pour
contourner l’interdiction qui leur est faite d’assister aux matchs opposant des équipes masculines.
Ceci n'est pas un film, coréalisé en 2011 avec
Mojtaba Mirtahmasb, décrit sa situation de
cinéaste interdit de tournage, filmé chez lui avec
une caméra numérique ou un iPhone, attendant le
verdict d’une cour d’appel.
A ce film d’intérieur succède donc ce Taxi
(Ours d'or au Festival de Berlin 2015) avec
lequel Panahi trouve le moyen de sortir, de décrire la rue à Téhéran et les gens… S’improvisant
chauffeur de taxi, il installe derrière son pare
brise une caméra numérique qu’il oriente à
volonté, filmant selon les moments la rue, ses
passagers ou lui-même. Un dispositif aussi astucieux que discret… Dans ce faux documentaire,
les passagers de “son” taxi sont des acteurs nonprofessionnels (qui resteront anonymes pour des
raisons de sécurité). Se succédant, ils introduisent dans le taxi des morceaux de vie dont l’addition offre un aperçu étonnamment riche de la
société iranienne. On voit ainsi défiler l’homme
qui veut qu’on exécute les voleurs de roues de
voiture, évidemment pas d’accord avec la femme
qui soutient qu’il vaut mieux chercher les causes
de la délinquance (le taxi est occasionnellement
collectif), elle se révélant
enseignante, lui refusant de
dire sa profession… (flic?). Il
y aura la nièce de Panahi, sorte
de Zazie filmant avec sa caméra numérique (d’où un changement de point de vue) pour
réaliser un film “diffusable”
selon les critères de son maître
d’école (les gentils n’ont pas
de cravates; les gentils ont de
la barbe…!). Il y aura le pirate
du web qui vend toutes sortes
de films dont les censurés…
Moment surréaliste avec les
deux dames superstitieuses qui
doivent relâcher avant midi
des poissons rouges dans un
certain bassin, comme chaque
année à cette date sous peine de mort.
Changement de ton avec l’accidenté qu’il faut
transporter d’urgence à l’hôpital et qui dicte son
testament, filmé par la nièce de Panahi, léguant
tout à sa femme en pleurs (qui rappelera Panahi
plus tard, son mari sauvé, pour avoir quand
même une copie du testament…)
On reste admiratif devant l’ingéniosité et la
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fécondité du dispositif permettant de tourner
envers et contre tout ces portraits témoins aussi
bien de l’Iran d’aujourd’hui que de l’intelligence,
de l’humour et de l’humanité de Panahi.
A la fin du film, la caméra ayant été tournée
vers l’avant, on voit Panahi sortir de son taxi et
s’éloigner. Surviennent deux motards dont l’un
s’approche. Bruit d’effraction en son off, l’écran
devient noir mais le son continue. La camera estelle volée? Par des voyous? Par des “agents des
services”? Mais elle n’a pas disparu puisque le
plan est dans le film… Admirable subtilité pour
dire que le cinéma sera toujours vainqueur de la
censure.
Christian Bernard
IRANIEN
un documentaire de Mehran Tamadon (France,
2014)
Iranien et athée, le réalisateur Mehran
Tamadon réussit à convaincre quatre mollahs
partisans de la République Islamique d’Iran de
venir passer quelques jours dans la maison inhabitée de sa grand-mère pour y discuter de la possibilité de vivre ensemble en Iran lorsqu’on a des
visions du monde complètement différentes.
Ce projet d’une sorte de téléréalité à visée
philosophique est intéressant en lui-même, quand
sans souci de la canaliser ou lui donner vraiment
une forme.
Très rapidement, le spectateur se trouve
confronté à un débat à deux, un des mollahs prenant très vite l’ascendant sur les autres, qui se
contentent d’opiner ou de ricaner sans rien
apporter au débat. Débat qui n’a jamais lieu : le
discours et les questions de Mehran Tamadon se
heurtent aux certitudes et aux réponses « inattaquables » du religieux puisqu’elles trouvent toutes leur origine dans le Coran. Quant à la possibilité de ne pas suivre le Coran (à défaut de pouvoir
le discuter), elle se heurte systématiquement à
l’ultima ratio : nous avons le pouvoir puisque
nous sommes majoritaires depuis 30 ans et la ou
les minorité(s) doivent se soumettre à la majorité ! Ce discours totalitaire se tient dans une sorte
de bonhomie particulièrement détestable (plaisanteries sur les femmes qui se promènent sans
culottes en Occident !) qui camoufle mal le côté
franchement fasciste du propos quant il est question de l’homosexualité (un virus !), du divorce,
des femmes comme figures sataniques parce
qu’elles soumettent l’homme à la tentation…
Enfin, et c’est là peut-être le pire, Mehran
Tamadon est tellement amorphe, muet devant ce
qu’il entend, nul dans son argumentation qu’il
n’offre aucune contradiction réelle à ce mollah
pétri de certitudes, habile rhéteur, cabotin et
«Iranien» © First Hands films
bien même il ne comporte pas d’aspect spécifiquement cinématographique. C’est d’ailleurs une
des faiblesses graves du film que de ne jamais
interroger son dispositif qui voit 5 personnes
évoluer dans un huis-clos à préparer des repas, à
les manger et à discuter de la liberté de penser
dans un Etat islamique. L’autre défaut est de laisser la conversation se développer ou s’enliser
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d’une mauvaise foi consternante et jamais relevée par son « contradicteur ». On s’étonne d’apprendre que le cinéaste a été interdit de retour en
Iran pendant quelque temps : il ne représente
vraiment pas le moindre danger pour le pouvoir !
Serge Lachat
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saison lyrique lausannoise
Des productions mixtes
Du neuf et du non
conventionnel....
Eric Vigié présentait, au début du mois d'avril, sa dixième saison lyrique
lausannoise. Comme il a tenu à le préciser en préambule, il ne compte pas faire
des effets de manches spectaculaires pour marquer cet anniversaire, mais
entend bien plutôt tirer profit de la confiance que le public lui accorde pour
inviter son public à parcourir des sentiers moins directement passants du
répertoire international.
Opéras
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Sept ouvrages seront à l'affiche au cours de
la saison 2015-2016, huit si l'on compte le spectacle bisannuel de la déjà traditionnelle Route
lyrique. Dans presque tous les cas, il s'agit de
titres qui ne font pas partie du grand répertoire,
ou qui n'ont pas été présenté à Lausanne depuis
de nombreuses années. L'amateur de (re)découvertes ne peut que s'en réjouir.
La Cenerentola de Rossini, une version
très rationaliste du conte de Cendrillon, ouvrira
les feux en octobre. Il s'agit d'une nouvelle production de l'Opéra de Lausanne (qui d'ailleurs
ne fera pratiquement jamais recours à l'emprunt
de spectacles achetés clef en main à des théâtres
étrangers pendant tout l'hiver prochain) dont les
rôles principaux sont confiés à des spécialistes
jeunes mais confirmés qui ont nom Serena
Malfi, Edgardo Rocha, Giorgio Caoduro ou
Kelly Markgraf, la direction de l'Orchestre de
Chambre de Lausanne étant assurée par Pascal
Meyer et la mise en scène par Adriano Sinivia,
bien connu des Lausannois après ses passages
en terre romande pour régler ses versions rafraîchissantes du Barbier de Séville, de Monsieur
de Pourceaugnac et de La Périchole notamment..
Le spectacle pour enfants sera consacré à
L'Enfant et les Sortilèges de Ravel, proposé
également dans une production maison en
novembre prochain avec le concours de jeunes
chanteurs qui ont la lourde tâche de rester crédibles dans des emplois qu'il faudrait presque
réserver à des enfants!
Pour les fêtes de fin d'année, l'Opéra s'offre une nouvelle réalisation scénique de My
Fair Lady, une comédie musicale de Frederic
Loewe d'après George Bernard Shaw que le
cinéma a rendue immortelle avec la complicité
de l'improbable couple que formaient Audrey
Hepburn et Rex Harrison. Pour la circonstance,
la version proposée sera mixte car les lyrics
seront chantés dans l'original anglais alors que
les dialogues seront, eux, dits en français, ce qui
devrait satisfaire tous les puristes du genre tout
en assurant un maximum de complicité entre
acteurs et spectateurs... François Leroux sera le
Professeur Higgins, alors que son élève rusée
aura les traits et la voix de Marie-Ève Munger.
Le Sinfonietta de Lausanne sera dirigé par Arie
van Beek et les intermèdes chorégraphiés se
verront confiés au Ballet Centre Igokat.
Une autre soirée composite au programme
séduisant attend les fidèles de l'Opéra en janvier
avec une soirée commençant par Les Mamelles
de Tirésias, dans une production empruntée aux
théâtres de Bilbao et de Barcelone. Ce court
ouvrage, écrit sur un livret surréaliste par un
Francis Poulenc à l'humour décapant, servira de
hors-d'œuvre à La Gaieté parisienne un ballet
dansé sur une musique d'Offenbach, dans la version qu'a promenée le Béjart Ballet aux quatre
coins du monde sans l'avoir jamais présentée
jusqu'ici à Lausanne!..
Trois titres absents depuis trop
longtemps
Retour vers des eaux plus fréquentées avec La fille du régiment, un opéra
comique de Donizetti écrit sur un livret
français suite à une commande d'un
opéra parisien. L'œuvre n'a pas été jouée
à Lausanne depuis des lustres (l'a-t-elle
même jamais été ?) et est surtout connue
pour son air de ténor qui enchaîne les
notes suraiguës sur un rythme endiablé.
Il s'agit du grand air du ténor qui vient de
s'engager à l'armée pour plaire à sa dulcinée, une page rendue autrefois célèbre
par un certain Luciano Pavarotti qui
aimait à l'inscrire régulièrement à son
répertoire lors de ses récitals de chant. A
Lausanne, Frédéric Antoun aura le
redoutable honneur de se mesurer à ces
monstres sacrés qui ont nom Juan Diego
Florez ou Nicolaï Gedda alors que la
jeune Julie Fuchs se chargera du rôle de
Marie dans lequel Nathalie Dessay a
4, 6, 7, 8 et 11 novembre 2015 : «L’enfant et les sortilèges»
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17, 20, 22 & 24 janvier 2016 : «Les Mamelles de Tiresias»
souvent brillé sur toutes les scènes du monde. Il
s'agit encore une fois d'une nouvelle production
lausannoise placée sous la direction du bien
connu Roberto Rizzi Brignoli (cinq représentations en mars)...
Le baroque est à l'honneur avec une autre
production étrennée en avril : Ariodante de
Haendel offrira au public l'occasion de découvrir un jeune contre-ténor ukrainien au seuil
d'une brillantissime carrière : Yuriy Mynenko. Il
aura à ses côtés, dans le rôle du méchant
Polinesso, un autre haute-contre plus célèbre, le
Français Christophe Dumaux, alors que Robin
Johannsen et Clara Meloni prendront en charge
les deux autres rôles importants. La direction
sera assurée par Diego Fasolis, fondateur du
fameux ensemble baroque tessinois I
barocchisti, qui est devenu entretemps
un des orchestres favoris de Cecilia
Bartoli qui l'accompagne jusqu'au
Festival de Salzbourg Le spectacle sera
mis en scène, décoré, costumé et éclairé par Stefano Poda qui reviendra deux
mois plus tard pour prendre également
en charge une nouvelle mouture du
Faust de Gounod, lui aussi absent des
affiches lausannoises depuis fort longtemps. L'OCL sera dirigé par Jean-Yves
Ossonce alors que les quatre rôles principaux sont confiés à des voix qui n'ont
pas encore eu l'occasion de briller souvent dans ce répertoire : Paolo Fanale
sera Faust, Kenneth Kellog Méphisto
(il sera l'Orateur et Sarastro dans la
Flûte enchantée vaudoise qui sera donnée en juin 2015), Maria Katzavara
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Marguerite (elle fut Juliette au Théâtre de
Beaulieu) et Régis Mengus Valentin (après
avoir été Danilo dans la Veuve joyeuse et le Père
dans Les Mamelles de Tiresias sur ce même plateau...)
Ballets et Concerts
Au plan des ballets, signalons en septembre la rare venue en Suisse du Mikhailovsky
Ballet de Saint Petersbourg qui se produit sur
la scène du Théâtre Michel; il s'agit en fait de la
deuxième grande compagnie de danse de cette
ville et plusieurs spécialiste n'hésitent pas à dire
que ses spectacles valent ceux de la compagnie
du Marinsky (anciennement le Kirov), beaucoup plus connue sous nos latitudes. Au pro-
gramme, deux pièces contemporaines
sur des musiques de Schubert et de
Debussy présentées en première suisse.
The Dance Factory interprétera ensuite
en novembre et en première suisse également sa vision de Carmen sur des
musiques de Bizet, Chédrine et Arvo
Pärt. Trois concerts ajoutent encore une
touche de variété bienvenue à l'affiche :
l'Orfeo Barockorchester présentera
des oeuvres de Bach, Muffat et Fischer
en octobre, l'Irish Baroque orchestra
apportera quant à lui le Messie de
Haendel dans ses valises lors de sa première tournée suisse le 15 novembre.
Enfin, au début février 2015, Isabelle
Meyer présentera un programme original réunissant, sous le titre : le violon à
l'opéra, diverses transcriptions pour
cordes d'airs célèbres confiés d'habitude aux gosiers agiles des divos et divas un peu
partout dans le monde. Elle sera accompagnée
de l'Ensemble Arc-en-ciel et se prêtera aux
divers jeux de mise en scène concoctés par
Gérard Diggelmann.
Pour finir sur une note plus détendue,
signalons que les jeunes artistes en formation à
l'Opéra de Lausanne se réuniront sous la houlette de Patrick Lapp pour présenter en divers
endroits du canton, sous le label 'Route lyrique',
leur version de la Belle de Cadix de Francis
Lopez.
Eric Pousaz
Pour plus de précisions, contacter l'Opéra à :
www.opera-lausanne.ch
30 septembre et 1er octobre 2015 : «Nunc Dimittis», photo Mikhailovsky Theatre
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berlin : tour de piste pour un opéra de puccini rarement à l'affiche
La rondine
La rondine (ou L'hirondelle en français) est une de ces oeuvres dont on parle
beaucoup dans les manuels d'histoire de l'art lyrique mais que l'on rencontre
rarement à l'affiche d'un théâtre.
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«La Rondine» © Bettina Stoess
L'histoire semble faire référence à plusieurs titres célèbres autrement plus connus : la
courtisane Magda attirée par la pureté de sentiments d'un jeune homme de bonne famille, naïf
et sincère, fait immanquablement penser à la
Traviata; une dame d'âge mûr qui renonce à un
jeune jouvenceau rappelle la situation dans
laquelle se démène la Maréchale du Chevalier à
la rose de Richard Strauss, alors que la servante empruntant une toilette de soirée de sa maîtresse pour aller au bal se retrouve déjà dans le
2e acte de la Chauve-souris d'un autre Strauss!
Puccini, très avisé en affaires, voyait d'un
bon œil le profit qu'il pouvait tirer du succès
remporté par ses ouvrages sur les scènes germaniques; il souhaitait donc écrire une fois une
œuvre légère de ton, dans le style d'une opérette viennoise à la Lehár, pour partir à la conquête d'un public avide de savourer des musiques
plus digestes. Aussi n'hésite-t-il pas longtemps
lorsqu'un théâtre de la capitale autrichienne lui
passe commande d'une opérette, même s'il n'entend pas se soumettre avec servilité aux lois du
genre avec intermèdes parlés et dansés...
L'éclatement de la Première Guerre mondiale
anéantira ses projets, et c'est finalement à
a
Monaco en mars 1017 qu'aura lieu la création
mondiale de cette Rondine...
L'œuvre se présente comme une longue
conversation en musique, parsemée de quelques
airs plus consistants qui permettent aux solistes
d'accaparer l'attention un instant. Mais l'époque
des grands 'tubes' qui ont fait le succès de
Bohème, Tosca ou Butterfly est révolue et il faut
bien admettre que les plaisirs immédiats que
procure ce nouvel opus sont bien moins intenses
qu'auparavant. Ce changement radical dans le
langage musical du compositeur explique sans
le justifier le relatif mépris dont est victime cet
opéra que beaucoup de théâtres prestigieux ne
se sont pas encore souciés d'inscrire à leur
répertoire.
La mise en scène de la création berlinoise
de cette œuvre à la Deutsche Oper a été confiée
à Rolando Villazón; le ténor vedette semble en
effet soucieux de varier ses activités après la
crise vocale qui a ébranlé les fondements de sa
carrière au cours des saisons passées et signe
trois nouvelles productions d'ouvrages lyriques
au cours de cette année (il sera encore à BadenBaden pour une nouvelle Traviata en mai prochain).
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Sa production ravit l'oeil et prend bien
garde de ne pas froisser le public. Tout baigne
dans un climat d'élégance raffinée, depuis les
costumes seyants dessinés par Brigitte
Reifenstuel jusqu'au splendide décor unique,
regorgeant d'ors et de miroirs, dessiné par
Johannes Leiacker. La mise en scène se veut
d'abord illustrative et remplit pleinement son
contrat, même s'il eût peut-être été souhaitable
de scruter d'un peu plus près le livret pour en
soutirer quelques prolongements qui auraient pu
donner un brin de mordant à cette œuvrette; en
l'état, la nouvelle Rondine berlinoise réglée par
Rolando Villazón propose un pur divertissement sans conséquence et finalement un peu
longuet sur lequel on n'est pas mécontent de
voir tomber le rideau.
Il faut dire que la distribution ne tient pas
ses promesses : la Magda d'Aurelia Florian nous
gratifie d'un chant bien trop dramatique et
presque inconvenant chez cette coquette superficielle dont l'opéra est censé brosser le portrait;
de même, avec son ténor déjà épais et compact,
Charles Castronovo convainc difficilement dans
son rôle de jeune premier timide dont on peine
à croire qu'il tombe amoureux pour la première
fois. Les personnages secondaires sont nettement mieux servis : Alvaro Zambrano est un
Prunier délicieusement bavard, dont le baryton
léger se marie idéalement au soprano aigu de la
Lisette mutine d'Alexandra Hutton. Le chœur et
l'orchestre de l'institution font bonne figure sous
la direction enthousiasmante de vigueur et de
subtilité de Roberto Rizzi Brignoli, un chef bien
connu des Lausannois où il a déjà dirigé entre
autres Tosca, Norma, Lucia di Lammermoor et
Luisa Miller. Si une telle soirée se justifie
amplement dans une capitale où les plaisirs
lyriques sont légion, il est néanmoins compréhensible que l'on reste plus frileux en province
devant une œuvre au charme aussi suranné,
malgré l'habit chatoyant que le compositeur a
greffé sur un livret d'une accablante banalité...
(Représentation du 12 mars)
La fille du Far-West
Autre atmosphère le lendemain soir pour la
reprise de La fanciulla del West, qui marquait le
début d'un véritable festival dédié par la
Deutsche Oper au compositeur italien dont pas
moins de six titres étaient à l'affiche en mars et
avril. La mise en scène de Vera Nemirova a déjà
plus de dix ans; elle transplante avec succès l'univers du Far West dans un monde de containers
où des ouvriers travaillant au noir ont trouvé
refuge, constamment tiraillés entre la peur de se
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«La Fanciulla del West» © Bettina Stoess
faire éjecter et celle de se voir trompés par des
spéculateurs capitalistes avides d'abuser de leur
crédulité. La violence est partout; seule Minnie,
la tenancière d'une minable boutique de fast
food, parvient à faire régner un semblant d'ordre dans cet espace dénaturé. C'est pourquoi l'idylle qui s'ébauche entre elle et un bandit au
grand cœur fait sourire dans un tel contexte
actualisé, mais la musique de Puccini est si forte
et si novatrice de ton que la magie opère comme
au premier jour.
L'orchestre, cravaché par Carlo Rizzi, rappelle à bon escient que le compositeur restait à
l'écoute de son temps et ne se contentait pas
d'appliquer de vieilles recettes italiennes en les
rhabillant quelque peu, comme le faisaient un
Mascagni ou un Giordano. La modernité de ce
langage, souvent traversé de violentes zébrures
qui mettent à mal les lois de l'harmonie traditionnelle, colle admirablement au sujet, en souligne la violence latente et sous-tend avec verdeur un chant à la fois exalté et sensuel. La voix
éblouissante de la Minnie incendiaire qu'incarne
une Emily Maggie survoltée survole la soirée
avec une intensité dramatique d'une rare beauté
alors que le ténor à l'étoffe mordorée mais aux
aigus engorgés de Zoran Todorovich peine à se
hisser sur les mêmes sommets dans le rôle du
hors-la-loi bien-aimé. Plus inattendu, le Jack
Rance belcantiste de Jon Lundgren, au baryton
chaud et charnu, fait preuve d'un aplomb séduisant jusque dans ses accès de colère, au point de
rendre presque incompréhensible le rejet dont il
fait l'objet. Excellents, les nombreux chanteurs
qui se partagent les petits rôles se fondent avec
aplomb dans l'ensemble et réussissent à faire de
cette soirée un moment d'un inoubliable dynamisme dramatique. (Représentation du 13 mars)
Eric Pousaz
LA VISITE DE LA VIEILLE DAME
DE FRIEDRICH DÜRRENMATT
MISE EN SCÈNE OMAR PORRAS
THÉÂTRE | EQUILIBRE
MA 12 ET ME 13 MAI
2015 À 20H
Chef d’œuvre d’humour grotesque,
cette comédie féroce est recréée pour la 3e fois
par le Teatro Malandro à l’occasion de ses 25 ans.
Son célèbre metteur en scène, récent
récipiendaire de l’anneau Hans-Reinhart,
y endosse à nouveau le rôle-titre avec
une franche jubilation.
WWW.EQUILIBRE-NUITHONIE.CH
RÉSERVATIONS FRIBOURG TOURISME
ET RÉGION 026 350 11 00
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entretien avec anne blanchard
Beaune cru 2015
Anne Blanchard poursuit contre vents et marées la croisière glorieuse du
Festival de Beaune, au cœur historique de la Bourgogne et au croisement des
routes d’Europe. L’édition 2015 du « Festival international d’opéra baroque
& romantique », 33e édition, s’annonce tout aussi fastueuse. L’entreprenante
directrice de cette manifestation incontournable de l’été musical français,
livre les grandes lignes de sa programmation.
tion à Beaune. C’est un programme d’airs de
cour – que je peux dévoiler par rapport à la brochure éditée – consacré à Lambert, Moulinié et
Charpentier. Un spectacle qui se promet magnifique, interprété par des chanteurs éprouvés,
essentiellement anciens du « Jardin des Voix ».
La jeune garde de Christie !
Le lendemain, 11 juillet, nous recevons un
orchestre qui n’avait jamais foulé le sol beaunois : les Siècles. Accompagné d’un ensemble
vocal lui aussi inédit chez nous : les Cris de
Paris. Et un chef également nouveau en ces
lieux, Geoffroy Jourdain. Pour Israël en Égyp-
« Nous poursuivons l’intégrale des opéras
et oratorios des compositeurs emblématiques du
festival, comme Haendel qui est présent à
Beaune depuis plus de 25 ans ; et Lully bien sûr,
initié en 2001 avec Persée et Christophe
Rousset, qui donnera cette année son cinquième
opéra de Lully.
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Le festival commence donc en force avec
Armide, le dernier opéra et chef-d’œuvre de
Lully. Et je peux ajouter que nous prévoyons en
2016 certainement un autre opéra de Lully, toujours avec Rousset. Cela fait maintenant 14 ans
que ce cycle Lully-Rousset se poursuit. Une
anthologie des opéras de Lully ! Ici Armide, un
opéra sublime, avec le magnifique personnage
central. Qui a inspiré tant d’autres compositeurs, à commencer par Gluck.
Le lendemain, le samedi 4 juillet, nous
accueillons Damien Guillon, qui avait été déjà
reçu chez nous comme contre-ténor. Pour un
Orchestre les Siècles © Marie Nicolas
programme Vivaldi, comme les contre-ténors
savent parfaitement faire : Stabat
Mater et Nisi Dominus. Il dirige
cette fois son nouvel ensemble, qui
fait son apparition à Beaune : le
Banquet Céleste. C’est ainsi que
d’autres ensembles vont également
faire leur première à Beaune cet été.
J’y reviendrai.
Le dimanche se donne aux
célèbres Vêpres de Monteverdi, par
le plus grand spécialiste de
Monteverdi, qui est Rinaldo
Alessandrini. Lui aussi un ancien
habitué du festival, où il a débuté il
y a 24 ans.
Week-end 2
Pour le week-end 2, nous retrouvons notre fidèle William
Christie, chez nous depuis 1985.
Ce sera la 31e année de sa participa-
William Christie © Sylvain Mignot
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te de Haendel. Cet oratorio qui multiplie les
chœurs, dans une conception extrêmement dramaturgique, contant l’épopée biblique de la sortie des Juifs d’Égypte. Un thème immémorial.
Avec beaucoup d’effets spectaculaires et une
musique très descriptive, quasi picturale.
Le dimanche qui suit, nous retrouvons
Gaëlle Arquez pour un récital, et sa neuvième
collaboration, avant sa dixième, en l’espace de
quatre ans. C’est notre festival qui l’a lancée
dans les grands rôles lyriques. Et l’on sait la carrière qu’elle accomplit actuellement.
Week-end 3
Le troisième week-end s’ouvre par
Jephtha, pour continuer dans la veine haendelienne – puisque Beaune doit en être à son quarantième ouvrage de Haendel ! C’est notre fidèle Ottavio Dantone qui mène la soirée, avec la
présence de Gaëlle Arquez, Delphine Galou,
Catherine Watson, une ancienne du « Jardin des
Voix » forte maintenant d’une belle carrière.
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ment fondateur, et qui justifie notre nouvelle appellation « Festival international d’opéra baroque & romantique ». Œuvre pharaonique, emblématique du génie de
Beethoven.
Le lendemain, retour de notre cher Paul
McCreesh, qui avait débuté à Beaune dans
Purcell et y revient, après 23 ans de bons et
loyaux services ; pour King Arthur. La
pièce anglaise fétiche, british, celtique…
Avec une distribution uniquement de jeunes
Britanniques. La nouvelle génération.
Le dimanche marque le trentième anniversaire de René Jacobs à Beaune ; depuis
ce premier jour, sous la direction de William
Christie, où il chantait des airs de cour. Il
sera à la tête d’un orchestre nouveau ici, le
Helsinki Baroque Orchestra. Dans deux
cantates profanes de Bach, Trauerode et
Hercule à la croisée des chemins. Une belle
soirée en perspective.
Week-end 4
Le dernier week-end termine avec l’oratorio inédit de Porpora, Il Trionfo della
Divina Giustizia, que dirige le jeune
Thibault Noally à la tête des Accents. Une
grande première ! La partition a été récemment découverte, et vient seulement d’être éditée. Thibault Noally, qui l’a examinée, s’en est
René Jacobs © Marco Borggreve / Harmonia Mundi
passionné. Je précise que ce sera notre nouveau
chef invité, sur au moins trois ans. Après
Christophe Rousset,
il y a plus de vingt
ans, puis Emmanuelle
Haïm, puis Jérémie
Rhorer, puis Raphaël
Pichon…
La clôture le
samedi 25 juillet se
fait en beauté, avec la
Missa Solemnis, dirigée
par
JeanChristophe Spinosi.
Un moment romantique particulière-
Gaëlle Arquez © Gilles Brebant
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Et il y a une nouveauté pour cette édition : les dîners de Gala, destinés à des
levées de fonds en quelque sorte. Chaque
week-end, un dîner qui convie en compagnie des artistes, avec uniquement des vins
des Hospices de Beaune. Si l’on fait ces
dîners, c’est aussi pour tenter de trouver des
fonds supplémentaires. Car nous avons
perdu quelque 50 000 euros par rapport à
l’an passé. Ce qui a obligé à supprimer une
dernière pièce initialement prévue dans la
programmation. C’est une situation générale, que l’on retrouve ailleurs. Le Conseil
régional de Bourgogne, qui réunit les quatre
départements, n’a pas de fond propre. Il
dépend exclusivement des dotations de l’État. Il participe donc avec ses moyens,
réduits cette année, sans possibilité de lever des
fonds. Mais il nous soutient toujours. Et il reste
notre premier partenaire. En compagnie de la
Ville de Beaune, le Ministère de la culture, le
Conseil général de la Côte-d’Or. Le mécène
principal demeure la Fondation Orange, avec
aussi les Hospices civils de Beaune, qui non
seulement nous hébergent mais aussi nous subventionnent, et la Caisse des Dépôts. Ainsi que
tous nos habituels partenaires, dont les partenaires médias. »
Propos recueillis par Pierre-René Serna
Du 3 au 25 juillet, en quatre week-ends.
Tél. : 00 33 3 80 22 97 20. www.festivalbeaune.com
Thibault Noally
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opéra du rhin
bâle
L'ultime opéra seria de Mozart est avant tout un drame
psychologique, et la metteuse en scène Katharina Thoma
a eu raison de se concentrer sur l'interaction entre les
personnages au lieu de chercher à épicer une action
scénique relativement pauvre d'éléments dramatiques
extérieurs afin de maintenir la tension.
Daphné est l'une des dernières créations de Richard
Strauss; créé en 1938 sous la direction de Karl Böhm à
Dresde, l'opéra n'est jamais parvenu à s'imposer au
répertoire et fait aujourd'hui encore figure de rareté
lorsqu'il est programmé par un théâtre aventureux.
Clemenza di Tito Daphné
24
Le décor élaboré de Julia Müer placé sur une scène tournante définit
trois lieux : un jardin pour les rencontres informelles, une chambre pour les
scènes plus intimistes et un lieu de réception aussi froid qu'impersonnel pour
les moments où les impératifs de la vie publique passent avant ceux de la vie
privée. En faisant sans cesse virevolter ce décor, le spectateur se sent
transporté dans la tête des personnages où les sentiments contradictoires se
mêlent, où les désirs inavoués et frustrés s'entrechoquent et où la raison finit
par céder le pas face aux impératifs du coeur ou de l'ambition.
Le procédé, efficace en soi, eût pourtant mérité d'être utilisé avec plus
de parcimonie pour éviter la surcharge inutile, mais dans sa conception d'ensemble, cette traduction scénique convainc de bout en bout. L'orchestre
symphonique de Mulhouse est dirigé par Andreas Spering, un chef qui s'est
fait une spécialité des relectures 'à l'ancienne'. Les tempos sont vifs, les
accompagnements des airs ont du relief et vibrent à l'unisson des passions
chantées, - en un mot : le langage
dramatique de Mozart n'a jamais
paru aussi vivant et complexe au
point que cette approche vivifiante
rend peu compréhensible le relatif
dédain des programmateurs de salles
lyriques à l'encontre de cette partition. La distribution réunie pour l'occasion frappe d'abord par la magnifique complémentarité des timbres,
«La Clemenza di Tito» © Alain Kaiser
malgré une défection de dernière
minute due à la maladie de Jacquelyn Wagner; cette dernière a pourtant tenu
à incarner Vitellia scéniquement, tandis que le chant était confié à Elodie
Hache, familière du rôle, qui se tenait sur le côté de la scène. La représentation n'a pas souffert de cette substitution de dernière minute tant les deux
artistes semblaient aborder le rôle avec la même conception : vocalité ardente, vocalise portée sur le panache plutôt que sur l'intériorité et propension
marquée à l'emphase... Stéphanie d'Oustrac aborde le personnage central de
Sesto dans la même perspective avec un timbre chaleureux qu'entache parfois une émission qui devient brouillonne dans le haut de la tessiture. Malgré
la beauté du grain de sa voix claire, Benjamin Bruns reste un bien pâle Titus:
son ténor exigu peine à passer la rampe et l'interprétation manque de punch,
de dignité, de vraie grandeur au point que son pardon final semble bien arbitrairement télescopé pour permettre le happy end d'usage. Chiara Skerath est
une Servilia à la personnalité déjà affirmée dont le chant ravit à chaque
instant, contrairement à l'Annius résevé au style plutôt hésitant d'Anna
Radziejewska. Comme à leur habitude, les chœurs font excellente figure...
(Représentation du 6 mars)
Bâle a pris le risque de proposer une version scénique de cette pastorale tragique en en confiant la réalisation à Christof Loy, un des metteurs en
scène les plus discutés du moment. Son approche est radicalement opposée
à ce qu'on attend dans ce répertoire : on ne voit donc pas de bergers batifolant dans de verts pâturages, pas de reconstitution d'un monde idéalisé à l'antique, pas de transformation magique de Daphné en arbre mythique. L'action
se déroule au contraire pendant une fête de la bière (à Munich?). Les hommes portent chemises blanches et culottes de cuir, les femmes s'accommodent d'un 'dirndl' seyant. Daphné n'est que la serveuse d'une cantine que possèdent son père Peneios et sa mère Gaea. Elle est sans cesse houspillée par
une gent masculine prompte à tomber la chemise et se réfugie dans le rêve
en caressant une misérable petite plante en pot qu'elle soigne comme la prunelle de ses yeux. Elle repousse les avances d'un adorateur timide Leukippos - car elle ne consent pas à perdre une once de sa pureté originelle. Même Apollon ne la fait pas fléchir. Quand elle tue son amoureux devenu trop entreprenant, elle est emmenée sans façon par la police tandis que le
corps sans vie de l'amant malheureux reste abandonné sur la scène. La voix
off de Daphné transformée en arbre résonne alors dans le lointain comme la
réminiscence d'un bonheur passé, d'une occasion manquée.
Evacuer ainsi toute dimension magique a un prix, certes, et les dix dernières minutes de l'opéra paraissent bien artificielles. Mais l'action y gagne
en lisibilité et les enjeux dramatiques en véracité. Ainsi représentée, Daphne
retrouve une vigueur et un impact scénique que les versions plus traditionnelles ont tendance à gommer outrageusement sous une élégance de convention. Agneta Eichenholz se révèle sublime de bout en bout dans le rôle écrasant de l'héroïne: l'aigu sonne clair et domine un orchestre pourtant puissant
avec une aisance qui frise l'effronterie; et quelle fluidité dans le débit, quelle richesse de nuances dans les longs monologues qui lui sont dévolus!... On
ne saurait imaginer mieux sur quelque plan que ce soit... Rolf Romei, dans
le rôle difficile de Leukippos, se hisse sans peine à son niveau avec son ténor
clair et délié qui lui permet de brosser de son admirateur transi un portrait
délicatement coloré. La voix plus raide de Marco Jentsch convient bien au
personnage d'Apollon malgré quelques notes élevées d'une facture plutôt
malhabile. Hanna Schwarz en Gaea rappelle une fois de plus que les ans ne
semblent pas avoir de prise sur son timbre velouté et charmeur alors que la
basse sonore et virile d'accents de Thorsten Grümbel dote le personnage de
Peneios du poids dramatique idéal.
L'orchestre placés sous la direction de Hans Derwanz privilégie les
effusions lyriques à la mise en exergue des innombrables raffinements d'instrumentation dont le compositeur a parsemé sa partition. Devant tant de
beautés sonores alignées sans recherche de contrastes, l'oreille finit par ne
plus s'y retrouver et s'abandonne à une sorte d'assoupissement bienheureux
qui nuit finalement à l'intelligibilité du propos. (Représentation du 8 mars)
Eric Pousaz
Eric Pousaz
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t
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o p é r a
zurich
Opernhaus (044.268.66.66)
s La Traviata (Armiliato-Hermann) –
1er, 3, 6, 8, 14, 17, 20, 23 mai
s Fidelio (Poschner-Homoki) – 2, 5,
10 mai
s Falle (Matheson-Essingen) – 8, 10,
12, 16, 19, 21 mai
s La Verita in cimento (DantoneGloger) – 25, 27, 29, 31 mai
paris
Champs-Elysées (01.49.52.50.50)
s Macbeth (Gatti-Martone) – 4, 7, 11,
13, 16 mai
Opéra Comique (0.825.01.01.23)
s Ciboulette (Equilbey-Fau) – 3, 5, 7
mai
s Contes de la lune vague après la
pluie (Wurtz-Huguet) – 18, 19 mai
Opéra National (08.92.90.90)
Bastille :
s Die Zauberflöte (Trinks-Carsen) – 3,
6, 10, 14, 26, 29 mai
avignon
Opéra Grand Avignon
(04.90.82.81.40)
s Hamlet (Ossonce-Boussard) – 3, 6
mai
dijon
Opéra (03.80.48.82,82)
s Wozzeck (Pomarico-Anglade) – 6,
8, 10 mai
lyon
Opéra (0826.30.53.25)
s Carmen (Minasi-Py) – 2, 5, 7, 9, 11,
13, 15, 17 mai
montpellier
Opéra National
(04.67.60.19.99)
s Wesendonck Lieder/Château
de Barbe-Bleue (BaleffScarpitta) – 5, 7, 10 mai
Gilliam) – 9, 12, 15, 18, 25, 28,
31 mai
Föttinger) – 8, 10, 12, 15, 17
mai
s La Clemenza di Tito
(Ehrhardt) – 11 mai
s Les
Mamelles de
Tiresias/L'Heure espagnole
(Rocco-Krenn) – 28, 30 mai
bruxelles
La Monnaie (32/70.23.39.39)
s Un Ballo in maschera (RizziOllé) – 12, 13, 15, 16, 17, 19,
20, 21, 23, 24, 26, 27 mai
berlin
barcelone
Liceu (34.934.85.99.13)
s Cosi fan tutte (PonsMichieletto) – 20, 21, 22, 24,
26, 27, 28, 29, 30 mai
s I due Foscari (Zanetti) – 3
mai
madrid
Teatro Real
(34/90.224.48.48)
s La Traviata (PalumboMcVicar) – 2, 3, 5, 6, 7, 8, 9 mai
s Fidelio (Haenchen-Pier'Alli) –
27, 30 mai
Etienne Dupuis chantera le rôle-titre dans
«Eugène Onéguine» à Berlin
milan
londres
ROH (0044/207.304.4000)
s Le Roi Roger (Pappano-Holten) –
1er, 6, 9, 12, 16, 19 mai
s La Traviata (Minkowski-Eyre) – 18,
22, 25, 28 mai
s La Bohème (Ettinger-Copley) – 23,
27, 30 mai
florence
Teatro del Maggio Musicale
(39/056.27.79.350)
s Fidelio (Mehta-Pier'Alli) – 3, 5 mai
s The Turn of the screw (Webb-Sicca)
– 22, 24, 28, 30 mai
s Candide (Axelrod-Micheli) – 23, 25,
31 mai
Opéra National du Rhin
(03.89.36.28.28)
s Ariane et Barbe-Bleue
(Calligari-Py) – 4, 6 mai, à
Mulhouse les 15, 17 mai
toulouse
Théâtre du Capitole
(05.61.63.13.13)
s Les Fiançailles au couvent
(Sokhiev-Duncan) – 15, 17, 19,
22, 24 mai
amsterdam
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Anastasia Kalagina sera Louisa des «Fiançailles
au couvent» à Toulouse © DR
u
rome
Teatro dell’opera (39/06.48.16.02.55)
s Le Nozze di Figaro (Böer-Strehler)
strasbourg
De nederlandse Opera
(31.20.62.55.456)
s Benvenuto Cellini (Elder-
Teatro alla scala (39/02.720.03.744)
s Turandot (Chailly-Lehnhoff) – 1er,
5, 8, 12, 15, 17, 20, 23 mai
s Lucia di Lammermoor (RanzaniZimmermann) – 28, 31 mai
a
l
– 21, 24, 26, 28, 30, 31 mai
turin
Teatro Regio (39/011.881.52.41)
s Hänsel und Gretel (SteinbergBorrelli) – 6, 7, 8, 9, 10 mai
vienne
Staatsoper (43/1514447880)
s Eugène Onéguine (LangréeRichter) – 1er mai
s Don Pasquale (Lopez-CobosBrook) – 2, 5, 8, 11 mai
s L'Elisir d'amore (Garcia
Calvo-Schenk) – 6 mai
s Il Barbiere di Siviglia (GüttlerRennert) – 7, 12 mai
s Nabucco (Lopez CobosKrämer) – 10, 14, 18, 22 mai
s Das Rheingold (RattleBechtolf) – 16, 30 mai
s Die Walküre (Rattle-Bechtolf)
– 17, 31 mai
s Siegfried (Rattle-Bechtolf) –
20 mai
s La Cenerantola (PidoBechtolf) – 21, 23, 26 mai
s Götterdämmerung (RattleBechtolf) – 25 mai
Theater an der Wien
(43/15.88.85)
s La Mère coupable (Hussain-
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t
é
Deutsche Oper
(49/30.343.84.343)
s Eugène Onéguine (AltinogluFriedrich) – 7, 10, 14, 24 mai
s La Damnation de Faust
(Lacombe-Spuck) – 8, 13, 15
mai
s Il Barbiere di Siviglia (GnannThalbach) – 20, 22 mai
s L'Elisir d'amore (CarterBrook) – 23, 25 mai
s L'Amour des trois oranges
(Sloane-Carsen) – 28 mai
Staatsoper
(49/30.20.35.45.55)
s Emma und Eginhard (JacobsHöckmayr) – 2, 8, 10 mai
s Die Entführung aus dem Serail
(Moulds-Thalheimer) – 3, 9, 17 mai
s Die Zauberflöte (Soltesz-Everding)
– 1er, 7, 16 mai
s The Rake's progress (HindoyanWarlikowski) – 15, 21, 24, 29 mai
s La Traviata (Rustioni) – 31 mai
Komische Oper (49/30.47.99.74.00)
s Cosi fan tutte (Sandner-Hermanis)
– 1er, 7, 16, 25 mai
s Moses und Aron (Jorowski-Kosky)
– 2, 10 mai
s Don Giovanni (Nanasi-Fritsch) – 3,
17 mai
s Die Zauberflöte (Poska-Kosky) – 23
mai
s Carmen (Tyla-Baumgarten) – 6, 14,
30 mai
s Lucio Silla (Poska) – 9, 13 mai
s Giulio Cesare (Junghänel-Steier) –
31 mai
new york
Metropolitan Opera
(00.1.212.362.60.00)
s The Rake's progress (Levine-Miller)
– 1er, 4, 9 mai
s Cavalleria Rusticana/Pagliacci
(Luisi-McVicar) – 2, 5, 8 mai
s Un Ballo in maschera (LevineAlden) – 2, 6, 9 mai
s The Merry Widow (Luisi-Stroman) –
7 mai
25
o p é r a
théâtre bolchoï de moscou
Le Prince Igor &
Boris Godounov
La célèbre scène moscovite présentait en alternance les
deux chefs-d’œuvre lyriques du xIxe siècle russe.
26
Migunov (Ivan), honnête mais manquant d’envergure, soutenait mal la
comparaison avec Elchin Azizov, titulaire du rôle titre lors de la première.
Une exception, Anna Nechaeva (Yaroslavna), nouvelle étoile montante,
qui s’est montrée en tous points convaincante.
Le chef Pavel Klinichev, particulièrement à l’aise dans les danses
polovtsiennes, a eu parfois quelque difficulté à éviter les attaques imprécises du chœur et autres petits décalages. Pour terminer, saluons la superbe chorégraphie de Kasiyan Goleyzovski et ajoutons qu’une représentation au Bolchoï d’un opéra russe, par les Russes et pour les Russes, qui,
soit dit en passant, chuchotent pendant les introductions de l’orchestre
sans apparemment déranger personne ( !) - (on voit peu d’étrangers dans
le public) - constitue une expérience unique.
La treizième représentation du Prince Igor de Borodine, nouvelle
C’est la version de Boris Godounov réorchestrée par Rimskiproduction dont la Première eut lieu le 8 juin 2013, était proposée dans une Korsakov, la plus populaire en Russie, qui était donnée le 14 mars. La
mise en scène du légendaire Iouri Lioubimov. Figure mythique du théâtre 715ème représentation depuis la première au Bolchoï en 1888 et la
russe, icône de la résistance au régime soviétique, il a quitté ce monde en 460ème de la plus récente production de 1948. Chiffres impressionnants
octobre dernier, à l’âge de 97 ans. Lui seul sans doute pouvait se permet- qui méritent d’être relevés ! L’œuvre a retrouvé la scène rénovée du
tre de donner une version aussi personnelle du Prince Igor, joué pour la Bolchoï en 2011, après six ans de travaux de restauration fastueuse, et a
1082ème fois depuis sa création au Bolchoï en 1898! La principale carac- fait l’objet d’un dépoussiérage efficace. Costumes somptueux, décors
téristique de cette version est sa durée : deux heures trente au lieu des qua- grandioses qui nécessitent trois entractes pour les changer (!), c’est du
tre heures de la version complète. Seule
grand spectacle, en particulier la procession
la musique servant une certaine vision
des boyards et des gardes dans la cour du
historique a été retenue, et tant pis pour
Kremlin, entre la cathédrale de
les airs et les scènes laissés de côté. Il
l’Assomption et la cathédrale de
est bon de rappeler ici que le travail de
l’Archange, où l’or et le brocart rivalisent
composition de Borodine s’était étendu
d’éclat éblouissant. Difficile de savoir quels
sur dix-huit ans, sans pouvoir être achechangements ont eu lieu dans la mise en
vé avant sa mort. Rimsky-Korsakov et
scène. Ce qui est sûr c’est que la scène metGlazounov se sont chargés de terminer
tant en présence Marina et Dimitri aurait pu
l’œuvre, finalement créée en 1890 au
être « modernisée ». En l’état actuel elle
Mariinski de Saint-Pétersbourg.
présente de façon un peu trop évidente les
On admire chez Lioubimov la
défauts du « vieux théâtre ». Personne n’y
direction d’acteurs autant que la maîtricroit, d’autant plus que les protagonistes
se des masses chorales, dont la gestuelsont physiquement mal assortis : Eduard
le est travaillée avec soin, et les déplaMartinyuk paraît trop jeune pour Irina
cements organiquement réglés. Les
Dolzhenko, par ailleurs peu sensuelle, dont
lumières de Damir Ismagilov souliles aigus semblent fatigués.
gnent subtilement les intentions et parDans la distribution, on pouvait appréticipent notamment à la beauté flamcier la noble basse d’Alexander Naumenko
boyante, sensuelle ou barbare, des dandans le rôle de Pimen, le contralto moelleux
ses polovtsiennes. Les costumes de
d’Evgeniya Segenyuk (la nourrice), et l’éMaria Danilova parviennent à conjumouvant ténor Stanislas Mostovoy (l’idiot),
guer avec succès tradition et modernité
tout en soulignant que les autres chanteurs
et les décors de Zinovi Margolin séduise situaient à un niveau parfaitement honoVladimir Matorin est le Prince of Galich.
sent par la noblesse de leur simplicité :
rable. Mikhail Kazakov, qui a incarné Boris
Photo by Damir Yusupov/Bolshoi Theatre.
sur fond de disque solaire d’abord – staà maintes reprises, doit convenir mieux au
tues primitives, cheval de pierre -, puis un ensemble géométrique simple roi Philippe II de Don Carlos, par exemple : à notre avis il ne possède pas
dont le principal élément est une frise traversant la scène de cour à jardin, ce fond de sauvagerie primitive et sous-jacente que l’on aime à sentir chez
telle un pont sur lequel Igor et sa femme seront à la fin réunis.
le tsar assassin ; sinon, en ce qui concerne sa conduite vocale ou son jeu,
De la distribution originale dans les rôles principaux, il ne restait que il n’a rien à se reprocher.
Vladimir Gilmanov (le Khan) et Vladimir Matorin (le Prince de Galich).
Le chœur, plus précis que dans le Prince Igor, et l’orchestre du
Ces derniers, tout comme les protagonistes de cette « deuxième distribu- Bolchoï sous la direction d’Alexander Polyanichko, ont contribué à dontion » (Bogdan Volkov (le fils d’Igor), Agunda Kulaeva (Koncharova) ner à cette soirée de répertoire une authenticité prenante.
Martine Duruz
sont de bons comédiens, dotés d’un organe puissant et de qualité, mais
quelques faiblesses techniques ne passaient pas inaperçues. Pyotr
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opéra de valence
Norma
Au mois de mars, l'Opéra de Valence proposait une
nouvelle production de «Norma» mise en scène par David
Livermore, directeur artistique du même théâtre.
Après avoir abordé une première fois le rôle en 2013 à
Bologne (à 65 ans!), Mariella
Devia retrouvait à nouveau la prêtresse des Gaules, dont elle a offert
une lecture techniquement miraculeuse. Mis à part des tempi un peu
plus circonspects par rapport aux
agilités endiablées d'autrefois et
quelques duretés dans les passages
de
registre, par ailleurs négligeaMariella Devia est «Norma»
© Opéra de Valence
bles, l'assurance et la maîtrise vocale de cette cantatrice face aux difficultés de l'écriture bellinienne nous ont
encore une fois profondément impressionnés. Certes, Devia a été toujours
plus à l'aise avec les personnages stylisés et angéliques (Gilda, Elvira,
Konstanze et surtout Lucia) que dans le style dramatique et spinto, abordé
prudemment seulement en fin de carrière. Aussi, elle a été bien plus
convaincante dans les pages élégiaques et solennelles de l'œuvre –comme
«Casta Diva», le duo avec Adalgisa, «Qual cor tradisti» – que dans les passages où la partition semblait exiger plus de participation émotionnelle et de
mordant («In mia mano alfin tu sei», «Deh, non volerli vittime»). Grâce à un
contrôle parfait de l'émission et à un sens superbe du phrasé, le soprano italien a été toujours à la hauteur d'un des rôles plus exigeants de tout le répertoire. A côté d'elle, le Pollione de Russell Thomas se faisait remarquer par
une technique approximative ainsi que par un style vériste et hyper dramatique absolument incongru. Le ton larmoyant et affolé de ses interventions
dans le sublime final, pendant qu'il monte au bûcher avec Norma, était plus
proche des sanglots hystériques d'un Canio que du noble repentir seyant à
un général romain. Le rôle d'Adagisa était assuré par Elisa Barbero. Formée
à l'Académie de Valencia dirigée par Placido Domingo, la jeune mezzo a fait
preuve d'une voix soyeuse et très bien timbrée, qui n'est pas sans rappeler
celle d'une Cossotto; toutefois elle semble destinée à des rôles plus dramatiques et véristes que ceux du Belcanto. La distribution était complétée par
la basse Serguéi Artamonov (un Oroveso à la belle ligne vocale, malgré un
vibrato très serré), Cristina Alunno (Clotilde), David Fruci (Flavio). Le chef
d'orchestre Gustavo Gimeno à la tête de l'Orchestre de la Communauté
Valencienne a offert une lecture de l'œuvre vigoureuse, mais plus rhétorique
que profonde. Sous sa baguette, la mélodie bellinienne, souvent noyée sous
des effets assez épidermiques, n'a pas trouvé l’élan et l’abandon qu'elle
exige. Le final, notamment, a manqué totalement de ce souffle cathartique
et sublime qui suscitait l'admiration de Wagner. La mise en scène de
Livermore restituait Norma à ce monde barbare et guerrier dont maints metteurs en scène l'ont dérobée pour transposer l’action tantôt dans la culture
néoclassique qui inspire encore le drame de Soumet (1831), tantôt dans le
monde des conflits armés contemporains.
Brendan Tuohy, Kangmin Justin Kim, Christina Gansch et Antoinette Dennefeld
© Ginot
à montpellier
Titus lapinus
Signataire de cette nouvelle production, Jorinde Keesmaat
semble nourrir une véritable passion pour les lapins, certes
originale mais souvent incompréhensible et rapidement
envahissante !
Mais c’est d’abord avec une heure de retard que démarre la représentation, à la suite d’un débrayage syndical de dernière minute, nouvelle preuve
que la crise qui mijote depuis plusieurs années à l’Opéra National de
Montpellier est toujours ouverte. Le lapin à l’honneur donc ce soir, et ce sont
d’abord en cage deux spécimens vivants que Sesto emmène avec lui dans un
plus petit clapier de voyage… le second ne se laissant d’ailleurs pas attraper
facilement ! L’animal apparait aussi comme déguisement d’enfant sur plusieurs images projetées, ce même déguisement étant enfilé par les choristes
dans la scène finale, avant qu’un enfant ne torde le cou à une pauvre bête
comme image conclusive du spectacle, projetée sur le rideau. A côté de trop
rares bonnes idées – comme Tito fou de rage qui tape du poing partout après
avoir généreusement accordé Servilia à Annio –, on ne retient malheureusement que les nombreuses incongruités, par exemple lorsque Tito et Sesto
soulèvent des haltères dans une scène qui voudrait jouer sur l’ambiguïté des
sentiments, mais qui frise surtout le ridicule. Le plateau vocal est plus
sérieux, à commencer par le ténor Brendan Tuohy dans le rôle-titre, toujours
aussi robuste dans le grave et le medium et plus convaincant qu’en
Idomeneo il y a 3 mois ici-même, les passages vocalisés étant sans doute
moins exposés chez Tito. Le rôle de Vitellia n’est peut-être pas le plus idéal
pour les moyens actuels de Marie-Adeline Henry, voix en excès de puissance qui se transforme en cri par moments, et en manque de fureur naturelle
aux deux extrémités du registre. On se dit que le choix de confier le rôle de
Sesto au contre-ténor Kangmin Justin Kim est excellent, tant la musicalité
est sûre et le legato soigné, mais ceci est vrai jusqu’aux passages d’agilité à
la fin de l’air « Parto, ma tu ben mio » qui sont assez catastrophiques !
L’autre soprano Christina Gansch (Servilia) n’appelle pas de reproches,
mais ne possède pas non plus de séduction particulière dans l’instrument. La
mezzo Antoinette Dennefeld (Annio) est quant à elle impeccable, d’une
richesse de timbre et d’une maîtrise technique impressionnantes, tout
comme la basse David Bizic (Publio), très solide et bien placé. Malgré le
retard au démarrage, les musiciens en fosse gardent leur concentration et
leur application, et il faut saluer la clarinette solo qui maîtrise ses quelques
redoutables passages. La direction musicale de Julien Masmondet est à la
fois classique et dynamique, souvent bien plus sonore que le rendu des
chœurs, très discrets la plupart du temps… mais il est vrai que les lapins ne
chantent habituellement pas très fort !
Gabriele Bucchi
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François Jestin
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o p é r a
passéiste. En comparaison, la production de
Lucia di Lammermoor présentait en fin de
compte des atouts théâtraux correspondant mieux
aux intentions du “general mana-ger“ du Met,
Peter Gelb dont on sait qu'il veille à renouveler
l'esprit d'un lieu connu très longtemps pour son
conservatisme. La reprise d'Ernani signée par
Peter McClintock (sous la direction musicale de
Paul Nadler) ne faisait rien pour rendre plus
Chanter ou ne pas chanter, telle est la question. Y a-t-il pour le chanteur plus
intéressant ce retour aux traditions du passé, avec
de noblesse à endurer les coups et les revers d'une voix incertaine , ou s'armer
une mise en place des protagonistes frisant la carcontre elle pour mettre frein à une marée de douleurs ? C'est là le hic.
icature, avec une gestuelle très typée. Cela n'était
sans doute pas le plus important pour une partie
prise
en
défaut
de
justesse,
mais
à
nouveau
on
en
du public venu apprécier un des derniers monEternel dilemme de l'artiste lyrique victime
vient
à
s'interroger
sur
l'absence
de
sensibilité
qui
stres
sacrés des scènes lyriques, à savoir Placido
des outrages du (mauvais) temps : s'abstenir et
ressort
de
cette
interprétation
marquée
par
une
Domingo
dont l'entrée en scène a été saluée par
s'assurer ainsi du mécontentement d'une partie du
scène
de
la
folie
dépourvue
de
toute
émotion.
une
salve
d'applaudissements ! On le sait, le
public, voire craindre pour sa réputation selon les
Restait
donc
à
apprécier
Luca
Salsi
(Enrico)
à
la
ténor
a
franchi
le Rubicon improbable des
circonstances ou chanter envers et contre tout et
voix
homogène
et
aux
belles
nuances
rendant
une
chanteurs
en
interprétant
désormais non plus le
risquer à peu près les mêmes désagréments. C'est
vision
plus
ambivalente
de
son
«
mauvais
»
rôle
rôle-titre, mais celui de Don Carlo du même
ainsi que Joseph Calleja était incertain le mardi 7
avril puisqu'il avait préféré se faire porter pâle la ou encore Alastair Miles (Raimondo) et le opéra. Il résulte de cette volonté de poursuivre
semaine précédente. On le trouvait pourtant prometteur Matthew Plenk. La production de une longue carrière entamée il y a 46 ans en ce
fidèle au poste pour interpréter Edgardo un rôle Mary Zimmermann vieillit plutôt bien dans les qui concerne la scène du Met une impression très
qu'il avait déjà bien rodé sur la scène new décors de Daniel Ostling et les costumes de Mara mitigée. Certes, la prestance ne fait pas défaut,
yorkaise depuis plusieurs années (cf. Scènes Blumenfeld situant l'action au 19ème siècle, mais la prestation vocale déconcerte, trop uniMagazine no 232 mai 2011). Cette version de alors que la direction musicale de Maurizio forme, et l'on peine à saluer autre chose que la
noblesse déclinante du personnage de Don Carlo.
Lucia di Lammermoor méritera peut-être un jour Benini s'avérait précise à défaut d'être inspirée.
Contrairement à certains stéréotypes, une jeune
de faire l'objet d'un ouvrage critique puisque,
basse interprète le rôle du vieux Silva face au
depuis la création en 2008 qui avait été un des Ernani
Comparaison n'est pas forcément raison, baryton... d'un certain âge. L'effet est original et
grands succès de la carrière de Natalie Dessay,
mais
quelques remarques peuvent s'imposer dans permet de découvrir une voix digne d'un
d'autres interprètes avaient fait les belles soirées
ce
sens
si l'on s'en tient aux impressions entre Commandeur, de Boris ou de Philippe II, à savoir
du Met, que ce soit Diana Damrau ou Anna
deux
productions
dans le cadre de l'alternance l'Ukrainien Dmitry Belosselsky. Voix profonde,
Netrebko, avec comme il se doit quelques ténors
belle autorité , expressivité, il
de même niveau. Le ténor maltais
s'avère très convainquant face au
a-t-il eu raison de revenir sur scène
« bandit » Ernani qu'interprète avec
alors qu'à l'évidence il n'était pas en
brio Francesco Meli. Et si, dans
pleine possession de ses moyens ?
cette adaptation du célèbre drame
Une partie du public aura approuvé
hugolien, on sourit en songeant
ce choix, il convient de le préciser.
qu'un ténor, une basse et un baryton
Présence scénique indé-niable, un
s'affrontent pour l'amour d'une
phrasé élégant, des aigus projetés
soprano - cela faisant un protagoavec puissance, on sait que Joseph
niste de plus qu'habituellement - le
Calleja ne manque pas d'atouts.
talent vocal d'Angela Meade justifiMais la voix dérape à plusieurs
ait cette sombre hispanisante rivareprises ce qui rendait sa prestation
lité. Si scéniquement elle renvoie
très inégale. Cela est d'autant plus
sans aucun doute à la tradition du
domma-geable que sa partenaire
«Ernani» avec Angela Meade (Elvira) et Francesco Meli (Ernani)
milieu du siècle passé, la voix ne
reste très en-deçà de ce que l'on
Photo: Marty Sohl/Metropolitan Opera
mérite que des éloges, l'émission
attend de l'interprète du rôle-titre du
chef-d'œuvre donizettien. Anna Shagimuratova quotidienne proposée par le Met. Ainsi, pour est irréprochable, la voix ample, ses aigus puisn'a guère modifié son style d'interprétation du Ernani, la mise en scène et les décors « pit- sants et projetés sans effort apparent et l'on ne
rôle de Lucia depuis sa prestation à la Scala il y toresques » de Pier Luigi Samaritani, les cos- peut que déplorer que le rôle de Lucia qu'elle a
a une année (cf. Scènes Magazine no 261, avril tumes « à l'ancienne » de Peter J. Hall semblaient déjà interprété ne lui soit pas proposé dans ce
2014). Les mêmes remarques ne peuvent que porter le poids des ans, cela était effectivement le même lieu.
Frank Fredenrich
s'imposer, la voix ne manque pas de puissance ce cas puisque datant de 1983, mais déjà à l'époque,
qui est un avantage dans un tel lieu et n'est jamais elle méritait sans doute d'être cataloguée
new york : lucia di lammermoor & ernani
Bel canto comme ci,
comme ça
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Concerto pour violon et orchestre, op. 64
Gustav Mahler
Symphonie Nº 5
W. A. MOZART
*Compositeur suisse
5 JUIN
7
10
12
14
Billetterie: Service culturel Migros Genève, Rue du Prince 7, Tél. 022 319 61 11
Stand Info Balexert et Migros Nyon-La Combe.
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T 021 315 40 20
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Organisation: Service culturel Migros Genève
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o p é r a
en scène, et passe bien mieux la rampe que dans son récent Holländer icimême. Magdalena Anna Hoffmann (Carlotta) projette sa voix avec véhémence et musicalité, mais dans un registre plutôt métallique et agressif.
Dans les rôles secondaires, on relève surtout les deux basses Markus
Marquardt (le Duc Adorno) et Michael Eder (Podestat).
à lyon
Festival Jardins
mystérieux
Rendez-vous annuel très attendu, le mini-festival lyonnais
proposait trois spectacles très différenciés et, comme
souvent à l’Opéra de Lyon, marqués du sceau de
l’originalité.
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En tête d’affiche, la création française en version scénique des
Stigmatisés de Franz Schreker, œuvre composée en 1918 et classée en
« musique dégénérée » (entartete Musik) par le régime nazi. La partition
riche et luxuriante pouvant évoquer un Richard Strauss est somptueusement servie par le chef Alejo Perez, entendu régulièrement dans le répertoire du XXème siècle (cf SM 270, Death in Venice de Britten à Madrid
en décembre dernier). Le discours orchestral prend beaucoup d'ampleur,
de la puissance, et la réduction obligée des effectifs dans la fosse lyonnaise ne se fait pas sentir, et serait même bienvenue en considérant la taille
de la salle. La production imaginée par David Bősch ne revêt pas exactement le même pouvoir de séduction, avec une relecture originale mais qui
se laisse un peu piéger par ses choix. Pendant l'ouverture, des affiches
"Missing" de jeunes filles disparues défilent en projection sur le rideau,
«Orfeo ed Euridice» © Stofleth
Un vieil homme tape, plutôt bruyamment, à la machine et les textes
s'inscrivent sur l'écran en fond de plateau, au centre une maison s'enlise
dans le sable, et à gauche une table est dressée pour un banquet. Deux
chanteurs se partagent le rôle d'Orfeo ce soir, la basse assez caverneuse
Victor van Halem et le contre-ténor Christopher Ainslie, avec heureusement une plus large partie de récitatifs confiés à la voix grave, et une
majorité des arias conservée par l'instrument plus élégiaque du contreténor, y compris "Che farò senza Euridice". La longiligne soprano Elena
Galitskaya (Euridice) fait valoir un timbre élégant et nourri, le personnage de l'Amour étant confié à un groupe de six enfants bien sonnants, tandis que les chœurs sont également harmonieux et vaillants. La direction
musicale d'Enrico Onofri est particulièrement vivante et rebondie, avec
des choix de tempi originaux mais aussi des silences très prolongés et
quelques battues répétées en boucle à la demande du metteur en scène
David Marton. L'avancée dans la partition est en effet souvent interrompue par des bruitages, comme ce train qui passe deux fois dans la salle et
envahit totalement l'espace sonore. Au bilan le spectacle s'éloigne certes
sensiblement de l'original Orfeo ed Euridice mais porte des images fortes
et simples, à mi-chemin entre la poésie d'Orphée et quelques gestes de la
vie courante comme lorsqu'Eurydice sert la soupe dans les assiettes et
appelle les enfants "à table !".
«Les Stigmatisés» © Stofleth
puis vient une vidéo d'une fillette retenue en otage, menacée, maltraitée.
La violence, mais aussi la vulgarité débarquent très tôt dans le spectacle,
dans un décor qui peut intelligemment figurer des scènes d'intérieur ou
d'extérieur en fonction des images projetées en fond de plateau : de la terre
sur le sol, deux poteaux électriques, mais aussi une table de banquet au I,
des éclairages suspendus aux cintres par la suite, et un entrepôt chez les
caïds de la drogue dans la 1ère scène du II où l'on sniffe de la poudre à
plein nez. Avec plus de mouvement et d'ampleur, le III semble plus en
résonance avec la musique, un ciel étoilé pour l'île "paradisiaque"
l'Elysium, puis dans l'espace même où sont enfermées les femmes, jetées
sur des matelas à même le sol. Vocalement, l'ancien ténor rossinien
Charles Workman (Alviano) réalise un sans-faute dans une partition extrêmement tendue. Le baryton Simon Neal (Tamare) est un vrai beau gosse
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Après sa création au Barbican Center de Londres il y a deux ans, Le
Jardin englouti est proposé au Théâtre National Populaire de Villeurbanne
dans une version légèrement resserrée sur les récitatifs. Il s'agit d'une œuvre
exprimée par plusieurs médias, mise en scène par Michel van der Aa qui a
composé la musique et réalisé les séquences filmées en support du spectacle.
Sur une intrigue de thriller agrémentée de mystère et d'humour, le spectateur
chausse à mi-parcours une paire de lunettes 3D et passe dans un jardin luxuriant où domine une dimension fantastique. Certains personnages existent uniquement à l'écran, en interviews ou interprétant des chansons, et trois solistes
évoluent sur scène, parfois intégrés à l'image en bordure d'écran. Ces trois protagonistes sont absolument formidables : le baryton robuste et expressif
Roderick Williams (Toby Kramer), la soprano Katherine Manley (Zenna
Briggs) dont le timbre ciselé rappelle irrésistiblement celui de Dawn Upshaw,
et la superbe Claron McFadden (Iris Marinus) dont la courte joute vocale avec
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«Le jardin englouti» © Michel Cavalca
la précédente restera un moment d'anthologie. Dirigeant une petite trentaine
de musiciens en fosse, le chef Étienne Siebens coordonne une partition à la
fois accessible, moderne, séduisante, agrémentée d'une petite dose de musique
électronique.
François Jestin
à avignon
partition, l’une des plus géniales écrites par Verdi. Les chœurs chantent aussi
en douceur, sans éclats de décibels mis à part pour la scène du Conseil en fin
de premier acte. Le plateau avignonnais est d’excellente qualité et bénéficie
d’abord de la présence de George Petean dans le rôle-titre, à coup sûr l’un
des tout meilleurs barytons Verdi actuels. La voix est particulièrement séduisante, saine, homogène, et toute l’humanité de Simon est contenu dans la
phrase « E vo gridando : pace ! E vo gridando : amor ! » chantée à plein
volume. La soprano Barbara Haveman (Amelia) est moins constante, beaucoup plus à l’aise dans le chant corsé que lorsqu’il faut alléger où elle perd
alors l’exactitude de l’intonation. A côté de très beaux moments, en particulier dans les ensembles, certains aigus sont plus difficiles, comme dans son
air d’entrée ou en fin du I. Troisième rôle en ordre d‘importance, la basse
Wojtek Smilek (Fiesco) soigne sa ligne de chant et atteint sans encombre les
graves les plus abyssaux, tandis que le ténor Giuseppe Gipali (Gabriele
Adorno) au joli legato est capable, après un début plutôt timide, de sons claironnants dans l’aigu. Lionel Lhote (Paolo) paraît quant à lui un deuxième
baryton de luxe, tant l’instrument est posé et sonore. La production de Gilles
Bouillon fait d’abord ressentir une évidente économie des moyens déployés,
mais ceux-ci sont utilisés au mieux, dans une ambiance le plus souvent très
sombre. Le voile agité assez prosaïquement en fond de scène n’est sans
doute pas la manière idéale d’évoquer la présence de la mer et ses vagues,
on lui préfère le joli coup d’œil proposé pour la salle du Conseil des Doges,
pleine d’austérité sous la carte de Gènes suspendue aux cintres.
François Jestin
Simon Boccanegra
à marseille
Tosca
La dernière représentation de Simon Boccanegra à
l’Opéra d’Avignon remontait à 1983, avec – excusez du
peu ! – Renato Bruson, Ghena Dimitrova, et Alain
Guingal déjà placé au pupitre.
Nouvelle production de Tosca à l’Opéra de Marseille avec la
flamboyante soprano américaine Adina Aaron dans le
rôle-titre.
Les meilleurs sites spécialisés américains proposent même en variante
le chef Alain « Guignal » pour vendre leurs enregistrements pirates… souvenirs, souvenirs ! Trente-deux ans plus tard le chef français privilégie l’efficacité et la prudence vis-à-vis du volume sonore qu’il maintient sous
contrôle pour ne pas couvrir les chanteurs. L’Orchestre Régional AvignonProvence en fosse ne déploie pas de trésors de brillance ou de chatoyance,
mais assure un bon niveau de concentration et de technique pour servir cette
Le rideau se lève sur Angelotti ensanglanté qui court devant une façade toute noire, puis après un demi-tour du dispositif c’est l’envers du décor
qui figure l’autel de Sant’Andrea della Valle délimité par deux portraits de
Marie-Madeleine, l’une brune et l’autre blonde à l’état d’ébauche. Deux
décors donc pour trois actes, le II du Palais Farnese se jouant en extérieur
avec un balcon côté droit qui amène une certaine originalité aux déplace-
Giuseppe Gipali, Barbara Haveman et George Petean © Delestrade
Adina Aaron et Carlos Almaguer © Dresse
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ments et situations, par exemple le « Vissi d’arte » est chanté sur ce balcon. Au troisième acte, Cavaradossi est enfermé derrière les barreaux
d’une cellule sur le flanc du décor, puis le plateau tournant se remet à fonctionner et l’église réapparait deux fois : c’est d’abord Tosca qui la traverse en courant, puis nouveau passage pour l’exécution de Cavaradossi. La
proposition la plus marquante du metteur en scène Louis Désiré est cependant l’image finale, avec en lieu et place du suicide de Tosca, le retrait de
l’artiste entre les deux rideaux rouges tirés, disparaissant à mesure que le
faisceau de lumière s’amenuise. Après un démarrage où Adina Aaron
(Tosca) joue un peu trop à fond l’amoureuse espiègle, on se laisse très
rapidement gagner tant par la beauté en scène que par l’incarnation puissante de la femme blessée, vengeresse, désespérée. La palette vocale est à
cette image, même avec une rupture sensible entre ses registres, du grave
assombri et souvent très excitant jusqu’à l’aigu puissant. Le ténor Giorgio
Berrugi est un bon titulaire du rôle de Mario Cavaradossi mais ne brille
pas autant, une voix surtout robuste mais en manque de séduction pour le
phrasé, qui s’encombre de vibrato et de fragilité sur l’extrême aigu (« La
vita mi costasse » et « Vittoria ! Vittoria ! » sont plutôt douloureux !). Le
baryton mexicain Carlos Almaguer (Scarpia) est une valeur sûre et développe une spectaculaire projection du son qui confère une méchante autorité au personnage, l’intonation amenant le cynisme qu’on attend également. Le reste de la distribution manque d’homogénéité, Loïc Félix
(Spoletta) se montrant par exemple bien plus convaincant qu’Antoine
Garcin (Angelotti) ou Jacques Calatayud (le Sacristain). La direction
musicale de Fabrizio Maria Carminati se situe dans la tradition en ayant le
mérite de l’efficacité, en particulier sur les moments les plus démonstratifs de la partition.
François Jestin
à monte-carlo
Don Giovanni
L’Opéra de Monte-Carlo reprend la production montée en
2008 par son directeur Jean-Louis Grinda, en réunissant
une distribution vocale proche de l’idéal.
C’est d’abord la basse uruguayenne Erwin Schrott qui marque son
passage en Don Giovanni, et ne peut laisser indifférent. Le chanteur dispose de très gros moyens et se sent visiblement comme un poisson dans l’eau
dans ce rôle. Les graves sont magnifiques, la projection spectaculaire –
surtout dans la petite salle Garnier ! –, et l’aisance et le charme du séducteur sont indéniables. Le problème est qu’il s’éloigne de la partition de
manière récurrente, surtout dans les récitatifs chantés où il adopte un style
parlando en surjouant le personnage. Difficile d’être un Leporello à côté
d’un tel tourbillon, et Adrian Sampetrean s’en tire mieux que dans des
rôles purement buffo, comme dans l’Elisir d’amore ici-même ou Il Turco
in Italia à Aix-en-Provence l’été dernier. La voix n’est cependant pas toujours homogène et il faut tendre l’oreille à certains moments. Annoncée
malade avant le lever de rideau, Patrizia Ciofi (Donna Anna) ne semble
pas diminuée de manière flagrante dans son chant et son engagement
interprétatif, les graves étant simplement fragilisés mais la musicalité
intacte. Sonya Yoncheva (Donna Elvira) est quant à elle aujourd’hui au
sommet de son art : clarté de la diction, réserve assez considérable de puis-
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Sonya Yoncheva et Erwin Schrott © Hanel – OMC
sance, et capacité d’allègement pour les passages les plus doux. Le ténor
Maxim Mironov (Don Ottavio) a gagné en largeur vocale ces dernières
années, et sa ligne de chant toujours soignée en fait l’un des meilleurs titulaires actuels, alors que Giacomo Prestia est un Commandeur à la voix
autoritaire et bien stable. Le couple de paysans se situe un peu en-deça,
surtout le baryton très discret Fernando Javier Rado (Masetto) alors que
Loriana Castellano aux aigus souvent tendus et parfois à bout de souffle
ne possède pas exactement le timbre enchanteur d’une Zerlina. La direction musicale de Paolo Arrivabeni, aux commandes de l’Orchestre
Philharmonique de Monte-Carlo qui tourne comme une Formule 1, est
sérieuse et classique, avec de petites initiatives personnelles, comme les
prises d’un tempo très lent sur « Là ci darem la mano » ou « Deh vieni alla
finestra ». La production est avant tout élégante et simple, dans un décor
de place de village en clair-obscur qui évoque irrésistiblement les tableaux
en perspective de Giorgio de Chirico. Un lustre descend des cintres pour
passer à une ambiance plus intérieure, puis une passerelle transversale à la
fin de chaque acte permet un jeu plus développé.
Entre deux représentations de Don Giovanni, le Voyage d’hiver schubertien prenait l’allure d’un concert de salon, tant la Salle Garnier monégasque permet une proximité visuelle et une acoustique d’exception. Pour
interpréter le cycle de Lieder, la basse coréenne Kwangchul Youn est
beaucoup plus à l’aise dans les déploiements de notes forte – conséquence de sa grande fréquentation d’emplois lourds wagnériens – que pour
amener des nuances plus délicates, plus fragiles techniquement en particulier lorsqu'elles arrivent en fin de phrase. Le timbre du chanteur est d'une
couleur sombre, et celui-ci se montre à son meilleur lorsqu’il doit conduire un legato à peu près homogène, comme sur Der Lindenbaum accompagné par le piano très inspiré de Burkhard Kehring.
François Jestin
à toulouse
Castor et Pollux
Créée au Theater an der Wien il y a 4 ans, la production
de Marianne Clément est proposée au Capitole de
Toulouse, avec à nouveau Christophe Rousset et ses Talens
lyriques qui assurent la partie musicale.
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Déjà à la baguette avec sa formation à l’Opéra d’Amsterdam en janvier
2008 (voir SM 203, production de Pierre Audi), le chef aixois insuffle une
énergie considérable à la partition, dans sa version révisée de 1754. L’urgence
qu’il donne au propos musical, y compris sur les récitatifs où il tient sans faiblir la partie de clavecin, est évidente et procure un enchantement pour l’oreille de bout en bout. Les chœurs du Capitole semblent quant à eux plus habitués au grand répertoire lyrique qu’à la délicatesse attendue dans les ouvrages
purement baroques. Annoncé dans le programme de saison, le ténor Bernard
Richter est remplacé par Antonio Figueroa (Castor), élégiaque, musical et suffisamment souple, qui a bien développé son volume depuis ses débuts à
Avignon en 2007 où l’on gardait le souvenir d’un filet de voix (voir SM 194,
Les Pêcheurs de Perles). Sans démériter sur l’ensemble de sa prestation, le
baryton Aimery Lefèvre (Pollux) ne possède pas naturellement la partie grave
du rôle et l’assombrit en l’accompagnant d’une prononciation pâteuse, voire
à nice
Semiramide
Dernier ouvrage conçu par Rossini pour la scène italienne,
le grand opera seria Semiramide est particulièrement
difficile à monter, et l’Opéra de Nice vient d’en faire une
nouvelle démonstration.
éteinte. Hélène Guilmette (Télaïre) est claire d’intonation, élégante, et tout à
fait satisfaisante dans ce type d’ouvrage. Les moyens actuels de Gaëlle Arquez
(Phébé) semblent au contraire surpuissants pour le baroque, mais son timbre
de bronze doit faire merveille dans des œuvres désormais un peu plus lyriques.
La troisième chanteuse de la distribution Hasnaa Bennani (Cléone, une suivante, une ombre heureuse) est sans doute la plus « baroqueuse » de l’équipe,
équilibre entre incisivité et douceur dans le timbre. Dashon Burton (Jupiter)
remplit correctement son office, Konstantin Wolff (Grand prêtre de Jupiter)
est handicapé par une diction impossible, et on retient surtout le second ténor
Sergey Romanovsky (Athlète, Mercure, Spartiate) très brillant sur le passage
« Eclatez, fières trompettes ». Loin des fastes du genre avec une absence complète de danse, Marianne Clément transpose l’action dans le vaste hall noir et
austère d’une grande maison bourgeoise desservie par un escalier central et
son tapis rouge. La chorégraphie habituelle sur les musiques de ballet est remplacée par des saynètes en flash-back – Castor et Pollux enfants qui jouent,
puis deviennent adolescents et ensuite jeunes adultes, leurs relations avec
Phébé et Télaïre – mais cette option montre tout de même ses limites. Les parties répétées de chat, colin-maillard ou cache-cache donnent le sentiment
d’une certaine saturation du procédé et d’assister à une pièce de théâtre, au jeu
très bien réglé il faut en convenir. On replonge dans une dimension opératique
à l’acte III lorsque l’escalier avance vers les spectateurs et que Jupiter apparait sur le palier assis derrière son bureau. Au IV c’est dans un espace en boîte
blanche ouverte et suspendue aux cintres que Castor, comme allongé sur un lit
d’hôpital, passe ses jours aux Champs-Elysées. Puis jusqu’au final une cérémonie funèbre se déroule autour d’un cercueil, parfois Castor est à l’intérieur… mais surprise d’autres fois la caisse est vide.
Pour honorer à sa juste valeur cette fête vocale, pleine de pyrotechnies redoutables, il faut en premier lieu réunir des chanteurs dotés d’une
technique quasiment exceptionnelle et de moyens conséquents. Ce n’est
pas exactement le cas ce soir, où nous est proposée une distribution assez
disparate. Dans le rôle-titre, la soprano américaine Joanna Mongiardo
maîtrise la vocalise mais ses aigus sont tirés et parfois aventureux, tandis
qu’à l’autre extrémité les notes les plus graves sont sourdes. La voix
manque surtout d’ampleur et ne peut rendre crédible le personnage de la
reine de Babylone. La mezzo Kristina Hammarström séduit d’entrée avec
un timbre et un instrument qui correspond à l’ambitus du rôle d’Arsace.
C’est elle qui ce soir, par son incarnation, sa projection vocale, son abattage, fait passer le frisson rossinien. Grosse déception en revanche pour la
basse Paolo Pecchioli (Assur), complètement égaré dans ce répertoire. En
grossissant quelques aigus de manière vériste et en perte de justesse d’intonation, en exécutant ensuite dans un style de mitraillette ses passages
d’agilité, c’est clairement le maillon faible de l’équipe. Daniele Zanfardino
(Idreno) est un modeste tenorino aux aigus
serrés par moments, mais la virtuosité et la
souplesse sont certaines pendant l’air « La
speranza più soave ». Son autre air « Ah
dov’è », ainsi que celui d’Azema n’ont pas
été retenus dans la version niçoise, de
3h30 de musique tout de même. Sous la
direction de George Petrou, l’orchestre
philharmonique de Nice sonne, cordes,
cuivres et percussions en tête, avec des
tempi plutôt dynamiques. Les bois ne
paraissent pas toujours très confortables
sur les nuances plus piano, mais dans l’enJoanna Mongiardo © Jaussein
semble le rendu orchestral est de qualité,
ce qui est curieusement beaucoup moins le
cas des chœurs, où chaque pupitre manque d’homogénéité. Signataire la saison dernière d’une très belle Semele de Haendel, le metteur en scène Jacob
Peters-Messer déçoit ce coup-ci en montrant une production qui sent à plein
nez le Regietheater déjà bien rabâché. La scénographie de Markus Meyer
pourrait constituer un bel écrin à ce « melodramma tragico » – un immense
scorpion noir au-dessus d’un cadre de scène sur un sol noir brillant –, mais
quelques procédés sont soit répétitifs (la cloison qui se lève et se baisse devant
le décor en fond de plateau), soit quelques-uns frisent le ridicule. A ce titre,
deux sbires aux lunettes noires et pistolet en main qui escortent Assur – ils
rampent un peu parfois ! –, Semiramide bien installée dans son fauteuil avec
son nounours au début du II, ou encore le fantôme ensanglanté omniprésent
du roi assassiné Nino, pris par moments de tremblements qui peuvent évoquer
le Grand-Guignol.
François Jestin
François Jestin
Antonio Figueroa (Castor) © Nin
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théâtre du grütli
Comme il vous plaira
ges y sont plus matures que dans Roméo bien
qu'il y ait plus de légèreté et de ludisme. Par
ailleurs la forêt est une thématique géniale: le
conscient, l'inconscient, la transgression, etc.
Je travaille par improvisation, nous en sommes
pour l'instant au filage avant de commencer à
travailler réellement ; cette forme d'approche
frontale permet d'évacuer tout de suite la peur,
de prendre d'emblée une baffe.
survie d'abord, puis qui cherche à séduire sous
cette apparence l'homme qui l'aime. Le travestissement lui permet d'accéder à la liberté et de
vivre ses désirs, ses craintes, ses angoisses, en
somme de découvrir le monde et l'autre - en
l'occurrence l'homme. Rosalinde a pour elle de
maîtriser parfaitement la joute verbale puisqu’elle a grandi avec le fou Pierre de Touche,
elle est donc à la fois toute ignorance et toutes
connaissances.
La mise en scène doit elle aussi oser toutes les
libertés, inventer, créer de la fantaisie, de l'imaginaire, surtout dans l'univers shakespearien où
l'énergie et l'intention priment sur la vraisemblance, où le chemin compte plus que la résolution des conflits. Par bonheur, la machine à jeu
qu’est le théâtre de Shakespeare est si inventive
et compliquée dans l’intrigue qu’elle permet
toutes les libertés de mise en scène.
Le théâtre de Shakespeare est très
incarné.
Quelles sont vos options de mise en
scène ?
Oui, le corps y est très parlant, tantôt puissant,
tantôt fragile, naïf ou roublard.
Il montre le trouble, la gêne, il
est un écrin à l'amour. C'est un
univers corporel saturé d'émotions, loin de tout contrôle, un
univers non mental. Aborder le
monde ainsi rejoint ma sensibilité féminine et rend plus évident le travail avec les comédiennes. Je trouve fascinant
d'entrer dans le corps joué dans
l'espace. Shakespeare ne veut
pas faire penser, son théâtre
n'est pas désignatif. Comme il
vous plaira laisse les comédiens
et les spectateurs libres: aimez,
jouez, pensez "comme il vous
plaira"... Je laisse donc faire
Camille Figuereo qui joue
Rosalinde. C'est une comédienne qui allie à merveille le masculin et le féminin par son
aspect de garçon manqué, ce qui
me permet de travailler sur le
trouble. J'avais monté en 2012
Héloïse d'après Marcel Aymé,
où le travestissement s'inversait:
un homme se déguisait en
femme. Ici c'est une jeune fille
qui se déguise en homme pour sa
À part quelques coupures, le texte est quasiment
intégral et je laisse les comédiens se l'approprier. C'est la pièce la plus chantée de
Shakespeare et il se trouve que huit comédiens
sur neuf jouent d'un instrument ou chantent.
Nous sommes donc partis d'un groupe anglais
de rock celtique et en avons réécrit la musique
pour l'adapter à la scène et à la langue de la
pièce.
L’espace sera ouvert et tentera de recréer le
labyrinthe de la forêt. Le scénographe Pietro
Musillo a l’habitude d’ajuster au fur et à mesure des répétitions. Ce sera fantaisiste et poétique, avec des faisceaux lumineux pour recréer
les rayons de soleil à travers les arbres. J’aurais
voulu de la terre sur le plateau mais ce n’est pas
possible. Nous jouerons néanmoins au milieu
de ruines envahies par la nature.
Camille Giacobino impressionne par la richesse de ses activités de
comédienne et de metteure en scène. Généreuse de son temps et de sa
parole, elle parle avec enthousiasme de la comédie pastorale de
Shakespeare qu'elle mettra en scène au Grütli en mai.
Comme il vous plaira, écrit après Roméo et
Juliette, baigne dans l'ambiguïté, l'originalité et
l'invraisemblance. Shakespeare invite le spectateur à entrer dans un univers fantasque et poétique où les genres se confondent pour mieux
atteindre à la vérité et à la connaissance de soi.
Camille Giacobino, c'est votre première mise en scène d'un texte classique.
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Je voulais monter Roméo et Juliette mais on
m'en a dissuadée en me disant que c'était trop
difficile. Comme il vous plaira répondait à mon
goût pour les rôles de travestis et les personna-
Camille Giacobino, photo CL Hirsig
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Propos recueillis par
Laurence Tièche-Chavier
Comme il vous plaira du 26 mai au 14 juin, réservations
au 022 888 44 88 et [email protected]
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transparente et déconstruite. Un lieu du temps
qui passe. Une maison qui est en train de se déstructurer avec des gens en son sein qui sont
aussi en plein processus de mutation.
théâtre des amis
La Cerisaie
un mot sur la distribution ?
Du 5 mai au 7 juin, le Théâtre des Amis terminera en beauté sa vingtième
saison avec la dernière œuvre écrite par Anton Tchékhov, La Cerisaie.
Cette pièce, qui parle d’un monde sur le point de changer, invite à la
réflexion, tant elle interpelle tout un chacun. Raoul Pastor, le directeur
des lieux, mais aussi acteur et metteur en scène de la pièce, nous
présente sa création.
Je suis ravi de cette équipe nombreuse, composée de treize comédiens. Il s’agit d’un groupe
sublime, avec lequel je travaille avec beaucoup
de bonheur. L’équipe est studieuse, inventive et
dégage de vraies qualités humaines et de travail.
Elle fait preuve, en quelques sortes, d’un mélange de rigueur et de liberté.
Comment vous est-il venu l’idée de monter La Cerisaie ?
Vous êtes à la fois metteur en
scène et incarnez Lopakhine, comComment ne pas monter La Cerisaie
ment conciliez-vous ce double
dans une vie théâtrale ? Il s’agit d’une
emploi ?
rencontre inéluctable. Il serait curieux
Je travaille avec un assistant pour la
de ne pas le faire, une fois dans sa vie.
mise en scène. La difficulté est de s’insCette pièce est essentielle. Tchékhov
crire dans une orientation générale du
est encore plus présent dans La
travail, de suivre en tant qu’acteur les
Cerisaie que dans ses précédentes pièdirectives qu’on a indiquées en tant que
ces. Il apporte une mise en perspective
metteur en scène. Cela fait quarante ans
de l’humain d’une redoutable efficacique j’exerce les deux métiers. S’il est
té. Pourquoi ai-je choisi de m’attaquer à
vrai que je me sens davantage metteur
cette œuvre maintenant ? Je sens que
en scène, pour La Cerisaie, ce sont les
nous vivons une fin de cycle et que
circonstances qui ont fait que je me suis
nous nous trouvons dans une société
retrouvé avec cette double casquette.
qui s’achemine, avec une joyeuse
J’en suis d’ailleurs très heureux, car le
insouciance, vers l’effondrement total.
rôle de Lopahkine est magnifique.
Nous sommes sur le Titanic, les gens
font la fête, alors que le monde est en
Le programme de la vingt-ettrain de changer d’axe. La société est
unième
saison vient de sortir, un cominsouciante et n’a pas la perception du
mentaire
sur la programmation ?
changement qui pourra se révéler terriCette
saison
2015-2016 me plaît bien.
ble ou salutaire. La pièce a donc une
Elle
représente
un mélange de désirs et
résonance particulière par rapport à
de
réalité.
Je
me
sens très en adéquation
cela, puisque La Cerisaie c’est l’histoi«La
Cerisaie»
avec
Raoul
Pastor
durant
une
répétition
de
la
pièce
avec
le
programme.
Nous allons
re de tous les changements d’ordre
© Pierre Emmanuel Fehr
accueillir
beaucoup
d’acteurs
et de metpolitique et sociaux. Les personnages
teurs
en
scène
différents.
Je
suis
content
de cette
se trouvent dans un moment d’effondrement de leur a donnée la vie à travers ses accidents, ses
diversité
dans
les
regards
théâtraux
et
dans le
civilisation, mais ils persistent à vivre sur le changements et ses ruptures. C’est un auteur du
choix
des
spectacles.
Je
qualifierais
cette
propassé avec une insouciance extraordinaire. kaléidoscope humain. Il ne condamne jamais et
grammation
comme
étant
la
plus
proche
d’un
Tchékhov ressent le changement de régime et de n’encense jamais. De même, il ne donne jamais
la structure sociétale, Il a conscience que de réponse, mais questionne. J’aime beaucoup idéal. J’ai beaucoup d’attente et aussi de plaisir
quelque chose va être définitivement différent.
le théâtre qui incite et qui stimule. J’ai envie de dans cette attente. Je me réjouis d’assister à ces
le suivre dans cette chose qui consiste à évoquer spectacles qui promettent des coqs à l’âne culLa Cerisaie est votre seconde mise en plutôt qu’affirmer « c’est comme ça ».
turels.
scène d’une pièce d’Anton Tchékhov; que
vous attire-t-il dans cet auteur ?
Ce que j’apprécie de Tchékhov c’est sa mise en
perspective de l’être humain, son regard amusé
mais pas distant, sa lucidité rare. Il donne toutes
les facettes de l’être humain, trouve aussi bien
les failles que les qualités de chaque personnage. Ces derniers possèdent tous une dualité que
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Quelle mise en scène avez-vous choisi
de privilégier ?
Propos recueillis par Julie Bauer
Au niveau de la mise en scène et du décor, ce
n’est pas le réalisme qui me fascine le plus.
Nous avons essayé de trouver un lieu de jeu qui
soit le plus éthéré et le plus transparent possible.
Nous sommes partis d’une chambre d’enfant
Du 5 mai au 7 juin 2015 : La Cerisaie d’Anton Tchékhov,
m.e.s. Raoul Pastor, Théâtre des Amis, réservations :
022/342 28 74
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tiguidou – tout le mal que l’on se donne pour se faire du bien
Brigitte Rosset
Brigitte Rosset a la quarantaine rieuse, insolente et vive. Passer un
moment avec elle est la garantie de fous rires et d’anecdotes savoureuses.
Qu’elle parle de sa maman - qui ne sera plus dans ses spectacles,
juré-craché ! – de ses années de collège, de ses tournées, de ses rencontres,
on est sous le charme de ce feu d’artifice verbal.
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La comédienne, fraîchement récompensée d’un
Prix suisse de théâtre, celui
d’actrice exceptionnelle
qu’elle ira recevoir à
Winterthur en mai des
mains du conseiller fédéral
Alain Berset, avoue avoir
cru à une blague quand on
lui a annoncé par téléphone
qu’elle venait d’être distinguée. Elle ignorait jusqu’à
l’existence d’un tel prix !
Mais elle reconnaît que cela
fera chic sur son CV, surtout
à l’étranger.
La Société suisse des
auteurs l’avait déjà récompensée en 2012 dans la catégorie humour, mais cette
fois-ci, il semble que ses
talents de comédienne
autant que d’auteure-interprète de seule-en-scène
aient été récompensés.
çon et deux filles, celles-ci très sages. Pour exister j’ai décidé de faire le clown…
Ce nouvel épisode des aventures de Brigitte la
montre lors d’une fête qu’elle organise pour ses
trente-neuf ans, alors qu’elle sort de clinique
psychiatrique (Smarties, Kleenex et Canada
Dry). Elle le fait pour se bouger et pour montrer
que tout va bien, entre l’autosuggestion et le
désir de renouer avec ses amis. Or, au lieu de
dresser une liste d’invités, elle envoie un sms à
tout son carnet d’adresses, c’est-à-dire à des
commerçants, des médecins, des fournisseurs,
des mères des copains de ses
enfants, des amis pas vus
depuis belle lurette, etc. Une
cinquantaine de personnes
répondent à l’invitation et l’on
s’aperçoit que personne ne va
vraiment bien. Malgré cela,
chacun fait avancer l’autre, à
son insu parfois, chacun joue
un jeu.
J’aime beaucoup l’humour de
Bacri-Jaoui, notamment dans
le film Le goût des autres que
je tiens pour un chef-d’œuvre,
ou celui de Benno Besson
dans Qui sait tout et gros bêta.
On n’y montre pas quoi ni
comment penser, on laisse la
liberté de réfléchir.
Vous jouez dans la
grande salle de La
Comédie : est-ce impressionnant ?
Non, je suis confiante. La
salle n’est pas si impressionnante que cela depuis la scène,
et depuis que j’ai intégré le
collectif de La Comédie en
2012, Hervé Loichemol a eu
l’occasion de me voir jouer à
plusieurs reprises, c’est pourquoi la proposition de me produire dans cette vénérable
institution est venue tout naturellement.
Vous présentez à
La Comédie en avril votre
dernier opus inspiré de
votre propre vie. Que
signifie Tiguidou ?
Quand j’effectuais une tournée au Québec avec mon
précédent spectacle, j’interpellais comme je le fais ici
des personnes dans la salle en leur demandant si
tout allait bien. L’un d’eux m’a répondu
Tiguidou et j’ai cru comprendre qu’il se présentait. Le quiproquo a duré tout le spectacle et je
ne comprenais pas que la salle s’esclaffe quand
je m’adressais à Monsieur Tiguidou. J’ai appris
plus tard que cela signifiait Tout va bien.
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Brigitte Rosset. Photo Pierre Vogel
Tout vous inspire, semble-t-il, rien
n’échappe à votre sens aigu de l’observation.
Tout m’inspire en effet, le spectacle de la rue,
les autres, ce que j’entends dans le train sans
voir les personnes, ce que l’on me raconte. De
ces bribes et de ma propre vie, je tire un spectacle car monter en scène c’est être proche de soi.
J’étais la quatrième d’une fratrie, après un gar-
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Propos recueillis par
Laurence Tièche-Chavier
Tiguidou – Tout le mal que l’on se donne pour se faire du
bien jusqu’au 3 mai 2015 à La Comédie de Genève,
www.comedie.ch et 022 310 50 01
Toutes les dates de tournée sur www.brigitterosset.ch
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Mais c'est la particularité, la force, la puissance de ce texte d'ouvrir des fenêtres dans la
nuit et de ne pas livrer une lumière totale. Dans
une maison de campagne, un homme questionne une femme sur sa relation avec un autre
homme – une relation étrange d'amour et de
perversion. La femme résiste aux interrogations. « Tu es un sale fouille-merde », dit-elle.
La recherche du passé n'en continue pas moins.
Mais où est la réalité ? L'histoire récente, les
persécutions, l'idée de Dieu tournoient dans
cette conversation en parallèle, où les deux personnages se parlent autant à eux-mêmes qu'à
l'autre personne. Cet amant d'autrefois se profile comme un bourreau. Mais où ? Mais quand ?
« J'ai toujours su que tu m'aimais », dit l'homme. « Pourquoi ? », répond-elle. « Parce qu'on
aime les mêmes chansons », précise-t-il. Elle
poursuit sa quête des souvenirs qui n'est plus la
sienne, mais celle d'une femme qu'elle croit
être...
le poche genève : dispersion d'harold pinter
Conversation
en parallèle
C'est l'un des derniers textes de Pinter. L'auteur était venu lui-même le
mettre en scène au Rond-Point, sous son titre anglais (Ashes to Ashes,
Cendre après cendre). C'était avec Christine Boisson et Lambert Wilson.
La soirée était énigmatique. La pièce le reste, une fois prise en main par
Gérard Desarthe.
Fascination
Le spectacle n'est pas d'un abord facile, et
l'on pourra rester à l'extérieur si l'on n'en accepte pas l'étrangeté. Gérard Desarthe, en compagnie de Jacques Connort, n'en a pas moins
orchestré un très beau moment, très étonnant. Il
y a des silences, une tension, un climat fort prenants, relayés par un miroitement délicat des
lumières et des couleurs. Carole Bouquet sait
être à la fois présente et absente, s'enfermer
avec grâce dans un errement mental. Gérard
Desarthe construit un être brisé qui lutte contre
l'obscurité d'une vie et d'une parole. C'est d'une
grande fascination.
Gilles Costaz
Du 27 mai au 7 juin. Dispersion (Ashes to Ashes) d'Harold
Pinter, traduction de Mona Thomas, mise en scène de
Gérard Desarthe, assitant de Jacques connort, dramaturgie de Jean Badin, décor et costumes de Delphine
Brouard, lumière de Rémi Claude, son de Jean-Luc
Ristord.
Avec Carole Bouquet et Gérard Desarthe. Le PocheGenève, lun et ven à 20h30, mer-jeu-sam à 19h, dim à
17h, mardi relâche (location +41 (0)22 310 37 59, [email protected])
Carole Bouquet dans «Dispersion» - photo Dunnara Meas
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Ramuz est une référence pour vous, a
été une référence pour écrire ce texte ?
théâtre de poche : festival les singulières
La septième vallée
Nuit. Cercle de lumière au centre de la scène. Corbeau y bondit. On voit dans
ses yeux, son cœur, son ventre, ses mains, notre planète entière qu’il a avalée,
un jour.
Corbeau : Immense. Immense. Immense. Mais
c’est l’enfer. L’enfer. C’est l’enfer (…)
Voix de Malvia : Je t’aime. Je t’aime. Sais-tu
que je t’aime ? En ce temps-là où tu es en moi,
je t’appartiens, sais-tu cela ? M’aimes-tu ?
M’aimes-tu ? Prouve que tu m’aimes. En ce
temps-là où je suis en toi, m’appartiens-tu ?
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Ainsi commence la pièce de Jacques Probst
qui sera présentée au Poche deux soirs seulement. A agender fissa ! Pour plusieurs raisons :
le spectacle réunit une kyrielle de comédiens,
véritable tour de force sur la scène de poche du
théâtre éponyme, le texte mêle poésie et politique, l’écriture est vive, scandée, rythmée
comme le sont parfois les joutes oratoires ou les
matches, et le thème touchera là où ça fait mal,
et aussi là où ça fait du bien.
Entretien avec Jacques Probst
Comment est née cette pièce, l’idée de
cette pièce ?
Pro Helvetia m’avait promis 12'000 francs, en
76, pour écrire une pièce. Ils attendaient de moi
que je leur envoie un synopsis. J’ai mis trois
mois à le préparer. A l’époque j’habitais dans
une étable à chèvre dans les montagnes, et je
dormais dans le foin avec mon chien. Lovay*
m’avait prêté une étable à chèvre dans le Val
d’Anniviers. Un jour, il est venu me trouver, on
a bu un café, et tout à coup il m’a dit : « Imagine
qu’on entende un haut-parleur qui annonce que
tous les hommes de 18 à 50 ans doivent se présenter sur la Grand’Place avec leurs fusils.
Tout le monde mobilisé. Qu’est-ce qu’on
ferait ? On prendrait deux meules de fromages
dans notre sac, on foncerait à la maison, on
emmènerait de la viande séchée, on prendrait
nos chiens, et on se tirerait tout de suite je
pense. »
L’idée, l’impulsion de ce récit, est née de ça. Le
haut-parleur, Lovay. Puis j’ai imaginé une révolution anarchiste dans ce décor de montagnes et
de vallées. Mais comme je tuais le Président
d’emblée, j’avais mauvaise conscience d’accepter l’argent de la Confédération et de dégommer
la Suisse. Mes copains de l’époque m’ont dit,
bah, prends l’argent, écris, et si t’as vraiment
mauvaise conscience, tu fais échouer ta révolution anarchiste. Alors c’est ce que j’ai fait.
J’ai envoyé mon synopsis à Pro Helvetia, j’ai
raconté la prise de pouvoir dans les montagnes.
Pro Helvetia a accepté, et j’ai raconté l’histoire par écrit. J’ai aussi pu
par la suite choisir le metteur en
scène, j’avais pris Mentha.
D’où viennent les noms des
gens, des lieux? Vous les inventez,
vous les transcrivez ?
J’aime inventer des noms. J’en ai
imaginé quelques-uns, et aussi j’en
ai repris qui existaient dans les montagnes. Gé, c’était un certain Gérard,
Clovis, un cantonnier que je connaissais par exemple. J’aime inventer
des sonorités, des noms, qui sonnent
parfois comme une autre langue.
Jacques Probst
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Pas spécialement. Mes influences, c’est surtout
les discussions que j’avais avec Lovay. Je ne
l’ai pas revu depuis une dizaine d’années, mais
ça ne fait rien, si on se revoit, on rediscutera
comme avant. Non, mes influences littéraires,
en fait c’est Thelonious Monk. Les solos. C’est
ce qui me donne la littérature, le littéraire. Avec
Bach aussi peut-être. Mais j’aime bien Ramuz
aussi….
A un moment Corbeau, le poète,
dit en parlant de ses poèmes : « seuls en sont
écrits les deux derniers vers ». Vous commencez aussi vos textes par les deux dernières
phrases ?
Oui, ça m’arrive parfois. Je sais comment ça
finit, et je retrouve le début…
Malvia crie en leitmotiv, presqu’en
récitatif, ses « je t’aime » à Corbeau : comment l’entendre ?
Souvent, dire « je t’aime » veut dire « aimemoi !». C’est plus une demande qu’une déclaration.
Sauf pour Corbeau, qui après 80
pages, arrive enfin à dire « je t’aime » à
Malvia. Là il me semble que ce n’est plus une
demande, mais bien un aveu, une déclaration…
Oui, là il admet qu’il l’aime, et il le lui dit.
Les monologues du poète sont écrits
sous forme de poème dans le texte : est-ce
ainsi que vivent les auteurs de poèmes? Ils
parlent en poète dans la vraie vie quand ils
dialoguent ?
C’est en tout cas sa manière à lui de vivre. Je ne
sais plus bien pourquoi, la pièce date d’il y a 40
ans, je la relis, la redécouvre avec Françoise
Courvoisier et ses acteurs. Je ferai, je dirai les
didascalies, car ce ne sont pas que des indications de mise en scène, mais déjà du texte théâtral pour moi. Donc oui, les poètes vivent en
poésie, comme les auteurs vivent avec leurs textes intérieurs.
Propos recueillis par Rosine Schautz
Le Poche. Mercredi 6 et jeudi 7 mai à 19h
* Jean-Marc Lovay, écrivain valaisan, voyageur, libre
d’esprit, toujours un peu à l’écart d’une certaine société,
d’une certaine civilisation.
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Samedi 2 mai à 19h : «Paradise Now !» avec Vincent Bonillo et Fanny Pelichet
Mardi 5 mai à 20h30 : «Six Sonates» d’Ysaÿe avec Martin Reinmann
Mercredi 6 et jeudi 7 mai à 19h :
«La septième vallée» avec Raoul Teuscher © Dorothee Thebert
Vendredi 8 à 20h30 et samedi 9 mai à 19h : «Toi, l’imbécile, sors !»
avec Julie Allainmat et Renald Laban
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« La visite de la vieille dame »
de Friedrich Dürrenmatt mis en scène par Omar Porras
Théâtre de Carouge, jusqu’au 9 mai 2015
Billetterie : 022/343.43.43, [email protected]
Théâtre Equilibre, Fribourg, les 12 et 13 mai 2015
Billetterie : 026/350.11.00, [email protected]
Théâtre du Jorat, Mézières, les 21, 22 et 24 mai 2015
Billetterie : 021/903.07.55, [email protected]
photos © Vanappelghem
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théâtre du crève-cœur, cologny
Jean et Béatrice
Au théâtre du Crève-Cœur, Mariama Sylla met en scène le texte de
Carole Fréchette, un texte qui, selon ses propres mots, l’accompagne depuis
longtemps et invite à réfléchir sur plusieurs thèmes, dont la vérité, le jeu ou
l’amour. Entretien.
Le texte commence comme un conte : une
jeune femme qui joue les princesses fait passer
des épreuves à des hommes en espérant rencontrer celui qui saura « l’intéresser, l’émouvoir et la
séduire ». Elle vit en haut d’une tour, mange des
pommes, boit de l’eau et se raconte des histoires.
Jean arrive avec son désir de posséder des
« billets de vingt » dans ses poches. Finalement,
on comprend que Béatrice ne cherchait pas vraiment à tomber amoureuse, mais escomptait combler le vide intérieur qu’elle ressent.
Entretien avec Mariama Sylla
A la première lecture de cette pièce
avez-vous su d’emblée que vous la mettriez
en scène un jour ?
Ce texte m’accompagne depuis longtemps et je
crois que je savais que je l’aborderais d’une
manière ou d’une autre. Quand je l’ai découvert,
je me suis projetée dans le rôle de Béatrice ! J’ai
tout de suite aimé la langue de Carole Fréchette,
j’avais envie de la dire. J’ai commencé à travailler sur le texte en imaginant proposer le projet à un metteur en scène qui me le ferait jouer.
Puis d’autres spectacles m’ont occupée en tant
que comédienne. Lorsqu’Aline Gampert m’a
invitée à faire une mise en scène, ce texte s’est
imposé. J’avais déjà un peu rêvé le projet, j’avais
quelques idées et fait une ébauche d’analyse dramaturgique de la pièce. Je me suis alors mise au
travail plus en profondeur, car il fallait que j’en
tire un projet clair, qui puisse être transmis à une
équipe. J’ai réalisé d’ailleurs que le projet avait
mûri avec moi, qu’il s’était nourri par mon parcours de comédienne.
Quel thème vous plaît le plus dans
cette pièce ? La place de la femme ?
L’homme « acheté » ? L’argent qui donne du
pouvoir sur les êtres ? Les jeux de séduction ?
Dans cette pièce en effet on parle du pouvoir de
l’argent, de séduction, des rapports hommefemme, dont Jean et Béatrice sont les prototypes.
Ce texte aborde en fait une quantité de thèmes.
Chacun retiendra probablement autre chose en
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«Jean & Beatrice», photo de repetition Ariane Catton
voyant le spectacle. On y parle d’enfance aussi,
mais surtout on y parle beaucoup de jeu. Jean
avec sa valise d’accessoires est un peu acteur,
Béatrice est un peu conteuse et metteure en scène
lorsqu’elle donne ses consignes à Jean. La pièce
parle donc de théâtre. Est-ce l’histoire de deux
personnes qui se rencontrent et n’arrivent pas à
s’aimer ou de deux acteurs qui racontent des histoires devant un public? Cet aspect-là du jeu dans
le jeu scénique m’a particulièrement interpellée.
Le texte invite également à réfléchir sur différents thèmes, par exemple sur la vérité : « Qu’estce qui est vrai au théâtre et dans la vie ? » ou sur
l’amour : « Comment s’aimer, qu’est-ce que s’aimer, se séduire, et pourquoi ? » J’ai tenté dans ma
mise en scène d’accentuer cet aspect théâtre dans
le théâtre, très présent déjà dans le vocabulaire
employé, en travaillant sur les différents niveaux
de narration, jusqu’à faire dire aux comédiens les
dernières didascalies. Dans la seconde partie du
texte, il y a aussi des moments où le ‘quatrième
mur’ * disparaît…
Comment définiriez-vous l’écriture
de Carole Fréchette ?
C’est une écriture empreinte d’humour, d’un
humour fin qui grince tout de même un peu...
On rit des clichés auxquels chaque individu est
un jour confronté. On rit des croyances de
Béatrice, de l’entêtement de Jean, on rit parce
que l’on se reconnaît lorsqu’ils tentent de
rejouer les scènes du quotidien d’un couple. On
peut aborder ce texte sous plusieurs angles. Ici,
nous n’avons pas cherché à forcer le trait de
l’humour car il apparaît spontanément entremêlé à des moments de poésie.
Deux personnages sur un plateau,
c’est plus difficile à mettre en scène, en rythme, en espace qu’un groupe de comédiens ?
J’ai eu en effet cette crainte pour ma première
mise en scène. L’énergie qui se dégage d’un
groupe est motivante, les multiples entrées et sorties, les apparitions de nouveaux personnages, les
relations qui se croisent sont autant de nouveaux
souffles sur un plateau. Ici, il y a une entrée au
début, une sortie à la fin, pas de scènes, d’actes
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ou de tableaux déterminés. J’avais très peur de ne
pas trouver les ressources qui dynamiseraient
cette relation unique, en huis clos, entre Jean et
Béatrice.
Puis, en y regardant de plus près, j’ai vu que le
texte était tout de même composé de microséquences. Je me suis alors attachée à trouver des
enjeux pour chacune d’elle et ai étudié les « virages » qui les séparent pour insuffler de nouvelles
dynamiques. Nous avons aussi beaucoup travaillé sur les rythmiques induites par le texte.
Par ailleurs, l’exiguïté du plateau du Crève-Cœur
me faisait un peu souci. Comment créer des diagonales, des gros plans et des plans plus serrés
dans un espace si petit ? Finalement, je pense que
c’est une aubaine. La particularité de ce plateau,
ses angles bizarres, que nous avons accentués
dans la scénographie, ont permis beaucoup plus
que je n’imaginais.
Et la scénographie ...
J’ai désiré renforcer la sensation d’intimité qui
lie acteurs et spectateurs, créer une boîte noire de
théâtre dans cet ancien pressoir. Nous avons
recouvert les murs de noir, placé une porte à l’entrée des spectateurs qui habituellement passent
par un rideau. Pour le reste, la sobriété a été de
mise. Une fenêtre, un fauteuil, la vis du pressoir
transformée en étagère, et quelques accessoires
indispensables. C’est sur ce fond noir que se dessinent les silhouettes des acteurs. L’éclairage aide
aussi à renforcer l’impression que l’on passe
d’une fiction à un théâtre plus « vrai ». Enfin, la
musique qui accompagne les endormissements
soudain de Béatrice contribue à faire entrer le
spectateur dans l’écrin du théâtre. Cette mise en
scène a été un travail d’équipe dont chaque membre m’a été essentiel pour donner à entendre ce
texte certainement moderne et contemporain.
Voire philosophique.
Propos recueillis par Rosine Schautz
* Au théâtre, le quatrième mur désigne un « mur » imaginaire situé sur le devant de la scène, séparant la scène
des spectateurs et « au travers » duquel ceux-ci voient les
acteurs jouer.
Jusqu’au 24 mai. Théâtre du Crève-Cœur, ch. de Ruth,
Cologny, mar au sam à 20h00, dim à 18h00 (rés.
022/786.86.00)
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« Big Apple »
d’Isabelle Le Nouvel dans la mise en scène de Niels Arestrup
avec
Christophe Malavoy
Le Reflet-Théâtre de Vevey, le 5 mai 2015
Billetterie sur : www.lereflet.ch
Théâtre Equilibre, Fribourg, le 7 mai 2015
Billetterie : 026/350.11.00, [email protected]
et Marianne Basler
Production Théâtre de l’Ouest Parisien Boulogne Billancourt
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espace nuithonie, villars-sur-glâne
Constellation*Cendrillon
Avec Constellation*Cendrillon, la compagnie de l’Oranger propose de
revisiter le célèbre conte dans une mise en scène contemporaine qui
déstructure et questionne. Rencontre avec Laurent Gachoud.
Vous avez commencé dans le registre
comique puis vous êtes dirigé vers le théâtre
contemporain, qui met en avant l’image.
Pourquoi travailler le conte aujourd’hui ?
Je dirai que Cendrillon est un projet carrefour
qui m’a longtemps suivi. Je me suis tout d’abord intéressé à la figure du prince sauveur. Je
voulais faire un spectacle solo. Le projet a
ensuite beaucoup évolué et j’ai eu l’idée de travailler sur les constellations familiales.
Vous pouvez nous en dire un peu plus
sur cette méthode ?
C’est une méthode de thérapie familiale qui
propose un travail sur soi par le biais de jeux de
rôle. Il y a donc énormément de liens avec le
théâtre. On réfléchit sur les conflits et la famille,
ce qui correspondait tout à fait à Cendrillon.
Elle vit dans une famille recomposée, de laquelle elle est rejetée. Avec cette pièce, on essaie en
quelque sorte de résoudre son conflit.
Et comment cela se traduit sur scènes ?
Au fur et à mesure des répétitions, le spectacle
est devenu très abstrait. On est arrivé à une pièce
très imaginée et poétique avec différents tableaux
qui représentent des moments. Il n’y a pas d’histoire ou de liens de causes à effets. On est parti
du principe que tout le monde connaissait le
conte de Cendrillon. On avait alors envie de
montrer autre chose. Mon personnage est une
sorte de prince-metteur en scène-thérapeute. Il
dirige, mais voit vite que cela coince. Cendrillon
vit dans le rejet. Son prénom même signifie son
état, puisqu’il vient de la cendre. Cette jeune fille
est en réalité complètement brûlée et a disparu. À
force de vouloir faire cette thérapie, mon personnage découvre qu’il est impossible de la sauver.
Cendrillon n’existe pas en dehors de l’échec.
Avec cette pièce vous restez ainsi dans
le registre de l’invisible et du poétique... ?
Exactement. Les constellations permettent de travailler sur le sentiment, tout se passe à l’intérieur
des personnages. Cette pièce raconte le passage,
la transformation. Je vois Cendrillon comme un
personnage qui est parvenu à un autre état et elle
s’est détachée de son corps. Tout part du deuil de
sa maman, petit à petit elle parvient avec humilité à lâcher prise et à aller vers la lumière. C’est
quelque chose qui peut parler à tout le monde.
Chaque personne doit vivre des deuils dans sa
vie, que cela soit le deuil d’une personne ou simplement d’un instant. Au fond, ce spectacle parle
au spectateur à travers son vécu, mais aussi à travers des sensations et des images. Ce que j’apprécie dans cette pièce, c’est qu’il y a plusieurs
niveaux de lecture. On peut y voir beaucoup de
métathéâtre et de métaphore sur la vie.
Vous avez choisi de travailler avec des
personnes qui ne sont pas comédiens professionnels. Pourquoi ce choix ?
Je les appelle des constellants amateurs. Tout a
commencé par un atelier où je proposais de travailler sur les constellations de Cendrillon. Ces
personnes ont suivi ces ateliers jusqu’à ce que
l’on décide d’en faire une pièce. Sur scène, il y a
un véritable contraste entre les constellants - qui
ne jouent pas, ils sont eux-mêmes - et les personnages, Cendrillon et le metteur en scène. Mon
personnage est très théâtral, toujours dans le
contrôle. Cendrillon, quant à elle, cherche tellement à être Cendrillon qu’elle en devient ridicule. C’est une manière de montrer que l’on porte
des masques dans la vie quotidienne et que le
théâtre n’est jamais loin.
Propos recueillis par Valérie Vuille
Les 7 et 8 mai. Espace Nuithonie (loc. 026/350.11.00)
WWW.BONLIEU-ANNECY.COM
T. 04 50 33 44 11
LES
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MICHEL HOUELLEBECQ
JULIEN GOSSELIN
MAR.12
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R.13 MAI
©Simon Gosselin
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marionnettes de genève
Rififi rue Rodo
Il y aura du rififi rue Rodo, qu'on se le dise !
Guy Jutard, qui dirige le Théâtre des Marionnettes de Genève depuis douze
ans, a décidé de faire du grabuge pour marquer son départ! Avec la
collaboration de Claude-Inga Barbey pour l'écriture et d'une belle brochette
d'acteurs genevois, il se fera complice d'un mystérieux tueur en série venu
s'acharner sur les marionnettes et mettre à sac le théâtre avant une
représentation.
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Une enquête
s'impose, menée
par
quelques
limiers secondés
par les spectateurs
dans les méandres
du théâtre, qui
sera radicalement
transformé à cette
occasion.
Qui en veut
donc autant aux
marionnettes, à
moins que ce ne
soit aux personnages qu'elles incarnent ? Qui a peur
des marionnettes
au point de vouloir les détruire ?
S'agit-il d'un vengeur au grand
cœur ou d'un
envoyé d'autres
théâtres craignant la concurrence déloyale ? Le
public le saura en allant prendre part à cette
déambulation théâtralo-policière qui convoque
les grandes figures emblématiques de la littérature policière.
Hommage
Le dernier spectacle imaginé par Guy
Jutard dans lequel il jouera son propre rôle, se
veut un hommage aux marionnettes et à celles
et ceux qui les créent et les manipulent.
« Chaque scène est à la fois un exercice de style
qui s'allie à une technique (virtuosité des
marionnettes à fils, efficacité gestuelle de la
marionnette à gaine, vie anémique des
objets...), et une façon d'évoquer la fonction
e
Guy Jutard
esthétique de la marionnette, sa transcendance
comme son immanence », écrit Guy Jutard.
Interrogation
Le spectacle entend également interroger le
spectateur-enquêteur sur le processus de la
manipulation et sur le principe du dédoublement : qui manipule qui ? la marionnette a-t-elle
une âme ? s'efface-t-elle derrière le personnage
qu'elle incarne ? la main du marionnettiste n'estelle qu'un instrument ?
Les fidèles spectateurs du TMG trouveront
là une somme des plaisirs qui les ont attirés
depuis douze ans vers des spectacles où, des
tout-petits aux adultes, chacun a trouvé matière
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à émerveillement ou à réflexion, où la peur l'a
disputé aux rires, et les autres découvriront que
les spectacles de marionnettes sont une manière
de transcender le monde ou d'en révéler l'état
brut pour ne pas dire brutal, sans jamais pour
autant en oublier l'immanente poésie.
Propos recueillis par
Laurence Tièche-Chavier
Rififi rue Rodo du 19 mai au 7 juin, Thèâtre des
Marionnettes de Genève, réservations au 022 807 31 07
ou sur www.marionnettes.ch
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chronique lyonnaise
Diversité
Dans ce mois d’avril à Lyon, le théâtre s’est enrichi de
maintes sources : son alter ego italien, le cinéma, le roman
et la danse. Au point de sembler bien rétréci lorsqu’il se
contemple lui-même… !
Théâtre des Célestins
Après que, le mois dernier, le Théâtre des Célestins ait accueilli un
grand metteur en scène étranger (Armin Petras), il a récidivé avec Le voci di
dentro [Les voix intérieures] d’Eduardo De Filippo que Toni Servillo et ses
Teatri uniti di Napoli (avec l’aide du Piccolo Teatro di Milano et du Teatro
di Roma). Cette pièce, où l’onirisme et l’utopie fabriquent du réel, se passe
dans un immeuble populaire de Naples, alors que la gêne sociale et la grisaille humaine ravagent les esprits et les cœurs. Un matin, un homme accuse une famille voisine d’avoir commis un meurtre, alors qu’aucun corps
n’est trouvable. Méfiances, accusations et inconstances humaines sont le sel
d’un théâtre – tantôt en italien, tantôt en napolitain, mais toujours tendrement ironique – où chaque caractère est tracé au cordeau et où le spectateur
croit assister à un réel intégral, c’est-à-dire : vrai. Interprétant les deux frères (l’un volubile, l’autre taiseux), Toni et Peppe Servillo sont confondants
de naturel et d’intelligence : chacun d’eux poursuit l’art d’un Marcello
Mastroiani, tandis que les douze autres comédiens sont à l’unisson. Par-delà
l’immédiateté de ce travail théâtral où art et peuple appartiennent au même
territoire, le spectateur sort de la salle ébahi, il a, simultanément, ri en toute
humanité et repris langue avec ses propres voix intérieures.
Dans ces mêmes colonnes (en mai 2014), Marc Lesage, codirecteur du
Théâtre des Célestins, présentait Territoires en écriture, qui associe le genevois “Poche” et le lyonnais “Célestins”. Recentré sur l’aujourd’hui et le
demain, ce projet triennal et transfrontalier (2013-2015) cherche « une expression ludique et non rébarbative du théâtre qui s’adresse à des spectateurs dont
la téléphagie a affaibli le discernement ». La dernière étape en est Nos serments, que l’expérimenté scénariste Guy-Patrick Sainderichin et la jeune metteuse en scène Julie Duclos ont très librement adapté de La maman et la putain
de Jean Eustache et de propositions formulées par les cinq acteurs. Ce texte
révèle une singulière écriture scénique où le théâtre s’hybride, intelligemment,
avec le cinéma : certes des séquences cinématographiques s’insèrent dans le
spectacle ; mais surtout l’art de l’interprète ici construit mâtine l’art du comédien (de théâtre) à celui de l’acteur (de cinéma). Travaillé dans la profondeur
des sentiments, ce projet réussit. Et, de la talentueuse équipe d’acteurs, Alix
Riemer se dégage, qui compose une fascinante Esther.
Scènes lyonnaises
La richesse théâtrale de la métropole lyonnaise invite à regarder le
Théâtre de la Renaissance, sis à Oullins, qui jouxte Lyon. Cette scène, qui
s’attache essentiellement au théâtre musical, a invité le jeune et prometteur
Thomas Jolly (et sa compagnie : La piccola familia), qui fut la coqueluche
du Festival d’Avignon 2014, avec son intégrale d’Henry VI de Shakespeare,
en dix-huit heures. Voici Arlequin poli par l’amour (1720) où Marivaux
entrelace les comédiens italiens de son temps au registre du merveilleux et
au conte magique. Entre sortilèges (une fée et sa baguette magique) et initiation adolescente au sentiment amoureux, cette pièce n’est pas aisée à saisir.
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Créée en 2007 et jouée jusqu’en 2010, cette production tourne de nouveau.
(À signaler que, en octobre 2014, Thomas Jolly a mis en scène cette même
pièce, en langue russe, avec les acteurs du Centre Gogol, à Moscou.) La
commedia dell’arte est ici remplacée par un style burlesque alla Chaplin,
qui ne convainc pas véritablement. Si Thomas Jolly maîtrise le métier théâtral, son permanent second degré, qui d’abord séduit, finit par lasser, tant il
empêche le premier degré, initiatique et bouleversant, du sentiment amoureux de s’épanouir et tant les comédiens sont de talents inégaux. Après avoir
vu Henry VI et cet Arlequin, il est permis de se demander si, au-delà de sa
séduisante vivacité, Thomas Jolly ne reprend pas les habiles ficelles d’un
“vieux-théâtre” replié sur lui-même, tant il évacue totalement la question
politique, sociale et culturelle. Sa prochaine production, Richard III, dissipera probablement ces ambiguïtés.
À chaque printemps, la Maison de la danse de Lyon organise son propre festival : La maison sens dessus dessous, sorte de relais gorgé de recherches chorégraphiques, entre deux Biennales de la danse, deux institutions
dont Dominique Hervieu assure la direction artistique. Un fil a traversé ce
festival : le texte, réel ou sous-jacent. Trois spectacles ont particulièrement
frappé. Dans Chalet 1, Denis Plassard et sa compagnie Propos se saisissent
du livre homonyme où l’écrivain belge, d’expression francophone, André
Baillon se tint à l’écart des normes (sociales, familiales, politiques, culturelles) de son temps. En 1923, cet auteur séjourna à l’hôpital de la Salpêtrière,
à Paris, pour soigner une fragilité psychique ; Chalet 1 en est le prodigieux
et bouleversant écho. Dans ce spectacle qu’il qualifie de “chœur chorégraphié” et où il s’associe à deux comédiens pour dire ce texte (souvent un
unisson à trois voix) tout en dansant, Denis
Plassard magnifie Baillon. D’abord étrange et
drôle, la représentation se poursuit dans une
poignante atmosphère où l’entrelacs de l’écrit
textuel et l’écrit vocalo-chorégraphique ouvre
à de troublantes abysses. Avec son spectacle
Exit/Exist, le danseur et chorégraphe sud-africain Gregory Maqoma mêle un récit mythique
qui, ancien d’un siècle, est un pilier historique
de la lutte contre l’apartheid, à une écriture
chorégraphique tracée au millimètre. Un battement de cil ou un infime déhanchement y prennent une ampleur épique, tel Israel Galvan
lorsqu’il fouaille la tradition flamenca. Avec
ses quatre acolytes (des chanteurs aux moyens
vocaux dignes des grandes scènes d’opéra),
Gregory Maqoma touche à l’humain universel, «D'après une histoire vraie»
© Marc Domage
à l’anthropologique. Notamment, il trace et
repense la structure même de la notion de représentation (dans son opposition avec la présentation). Enfin, après quatre-vingt représentations par toute
la planète, D’après une histoire vraie de Christian Rizzo a fait halte à Lyon.
L’attente était justifiée. Brassant des souvenirs et des archétypes de danses
ethniques et de comportements sociaux qui questionnent la source de l’humanité, les huit danseurs et les deux percussionnistes entament un crescendo de soixante-dix minutes : d’abord fait de gestes isolés et ordinaires, l’écriture s’agrège en un bouillonnement de rituels et d’assemblements
humains qui réalisent le prodige de faire société et de créer une bouleversante poésie. La fin, ubris irrépressible, soulève l’enthousiasme. Depuis le
début de cette année, Christian Rizzo dirige le Centre chorégraphique de
Montpellier. Heureux Montpelliérains !
Frank Langlois
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Avec son partenaire Régis Obadia, elle
fonde la compagnie l’Esquisse. Ils créeront
ensemble pas moins de dix-sept pièces, au
Havre puis à Angers. Ces pièces caractérisées
par leur fougue marquent le paysage chorégraphique français. Après leur séparation, Joëlle
continue seule de diriger le CNDC d’Angers
puis elle est invitée à Sceaux. Dans la dernière
décennie, elle aborde de vastes sujets comme le
destin de Jeanne d’Arc ou l’œuvre de Dante, la
Divine comédie. Forte du succès de son adaptation de Roméo et Juliette pour le Ballet du
Grand Théâtre de Genève (2010) elle revient et
propose sa version de Tristan et Isolde sur la
musique de Richard Wagner.
Le Tristan de Wagner a une
dimension mystique. Tout commence sur un bateau : Tristan rentre en
Cornouailles avec Isolde, une princesse irlandaise qui doit épouser le
roi Marke. Isolde demande à sa servante Brangäne de préparer un poison mortel pour Tristan, car ce dernier a tué son fiancé. Mais la servante prépare à la place un philtre d’amour. Après qu’ils l’ont bu, ils se
déclarent un amour éternel. Isolde et
Marke se marient mais ils ne
consomment pas leur mariage.
Tristan va voir Isolde une nuit, pendant que Marke est à la chasse. Ils
s’embrassent et chantent un hymne à
la nuit, désirant mourir d’amour.
Mais ils sont surpris par Marke.
Tristan et Isolde se séparent. Tristan
se retire en Bretagne, il veut mourir.
Finalement Isolde le rejoint et
Tristan meurt dans ses bras. Isolde se
noie dans l’âme de la terre, elle est
transfigurée.
Nous sommes impatients de
voir l’adaptation par Joëlle Bouvier
de cet amour mythique pour le Ballet
du Grand Théâtre de Genève !
bâtiment des forces motrices, genève
Joëlle Bouvier adapte
Tristan et Isolde
Joëlle Bouvier, née en 1957 à Neuchâtel est devenue dans les années 80
une figure de proue de la nouvelle danse française. Son parcours est
exemplaire. En 1980 elle est Lauréate du Prix de Nyon, un an plus tard sa
pièce obtient le 1er Prix du prestigieux concours de Bagnolet.
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Emmanuèle Rüegger
Les 21, 22, 26, 27, 28, 29, 30, 31 mai. Salue
pour moi le monde ! d’après Richard
Wagner, chor. Joëlle Bouvier, dir. Philippe
Cohen, Ballet du Grand Théâtre, création.
BFM à 19h30, le 31 à 15h (billetterie en
ligne sur le site du GrandThéâtre)
«Salue pour moi le monde !» avec
Sarawanee Tanatanit et Geoffrey Van
Dyck, photo de répétition © GTG /
Gregory Batardon
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Gleb Skvortsov
Martine Duruz
Dans la série des concerts organisés le dimanche au Victoria Hall à 17h,
l’Orchestre Symphonique Genevois dirigé par son chef titulaire Gleb
Skvortsov partagera l’affiche avec l’organiste Diego Innocenzi le 10 mai.
Entretien avec le chef.
Gleb Skvortsov
la comédie musicale Moskva Tcheriomouchki de
Chostakovitch, du Conte du Pope et de son serviteur Balda du même compositeur et de la version française d’Il Cappello di paglia di Firenze
de Nino Rota.
En 2009 il a créé la Camerata Venia, un
ensemble orchestral de haut niveau, dont le nom
est le même que celui du chœur d’hommes que
Gleb dirigeait à Saint-Petersbourg. L’une des traductions du latin venia est bienveillance.
Tous les deux ans, l’Orchestre Symphonique
Genevois participe à un concert du dimanche.
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C’est un orchestre amateur de bon niveau, qui a
son public et que la Ville de Genève soutient.
L’an passé, la nomination tardive de son chef a eu
pour conséquence de reporter le concert à 2015.
Le programme résulte d’une demande de Jacques
Ménétrey, conseiller culturel de la Ville, de
concocter un programme dans lequel l’orgue et
l’orchestre seraient mis aussi en valeur l’un que
l’autre. Deux fois par année en effet l’instrument
magnifique du Victoria Hall doit obtenir une
place de choix dans la série des concerts du
dimanche. Gleb Skvortsov et Diego Innocenzi
ont donc jeté leur dévolu sur la Symphonie No 1
pour orgue et orchestre d’Alexandre Guilmant,
organiste et compositeur français mort en 1911,
qui a orchestré sa propre Sonate No 1 pour orgue.
Cette œuvre présente pour l’orchestre un intérêt
symphonique indéniable, bien que certains passages soient un peu pompeux. C’est une œuvre
intéressante, ni trop facile, ni trop difficile pour
un orchestre d’amateurs qui a quand même des
limites techniques excluant certains choix, le
Sacre du Printemps par exemple !
La symphonie sera encadrée par deux pièces de J.-S. Bach, transcrites par des compositeurs plus tardifs. La Fantaisie et Fugue et la
Passacaille et Fugue, toutes deux en do mineur,
étaient à l’origine destinées à l’orgue. Nous en
découvrirons les transcriptions pour orchestre
d’Edward Elgar pour la Fantaisie, et d’Ottorino
Respighi pour la Passacaille.
Le répertoire de l’OSG est dépendant de certaines contraintes. Il ne s’agit pas d’un orchestre
de chambre mais d’un orchestre symphonique :
tout le monde doit pouvoir participer, ce qui
implique d’éliminer les compositeurs antérieurs à
Beethoven.
Le travail de préparation est évidemment
plus ardu avec les amateurs : le début des répétitions est un vrai défi. La période de déchiffrage
dure un mois à un mois et demi, à raison d’une
ou deux répétitions par semaine. Il faut maintenir
la motivation, soigner les rapports humains, faire
preuve de patience. Le but est d’arriver en forme
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au concert ! Régulièrement il s’avère nécessaire
d’ajouter des partielles, en fonction des difficultés. Par exemple dans la musique de Bach il est
nécessaire d’insister sur les dialogues à l’intérieur des fugues et de garder certains phrasés
polyphoniques même s’il s’agit de transcriptions.
l’orchestre symphonique genevois aux concerts du dimanche
Prenant la succession d’Hervé Klopfenstein,
Gleb Skvortsov est à la tête de l’orchestre depuis
janvier 2014. Né à Saint-Petersbourg, où il a
obtenu son diplôme de direction chorale avec
distinction, il arrive en Suisse en 1994 avec l’intention de se perfectionner auprès de Michel
Corboz, dont il deviendra l’assistant. Il suit également la classe de direction d’orchestre au
Conservatoire. Ses expériences se multiplient à
la tête de diverses formations : l’Orchestre
Symphonique de Saint-Petersbourg, l’Israël
Chamber Orchestra, l’Orchestre National de
Lyon, l’OSR, l’OCL, l’OCG entre autres.
De 1998 à 2008 il a la charge du chœur universitaire de Genève, et de l’Orchestre de
l’Université qu’il a fondé. Il a aussi été le directeur artistique et musical de la première suisse de
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Le 10 mai. Concert du dimanche de la ville de Genève.
Orchestre Symphonique Genevois, dir. Gleb Skvortsov,
Diego Innocenzi, orgues (Bach, Guilmant). Victoria Hall
à 11h (Billetterie en ligne http://billetterie-culture.villege.ch / Location Espace Ville de Genève)
Deux orchestres différents
Gleb Skvortsov dirige également la
Camerata Venia, un ensemble d’instrumentistes
professionnels dont le premier concert a eu lieu
en 2009.Le terme « camerata » suggère une formation à géométrie variable, de 11 à 30 musiciens. Il existe aujourd’hui plusieurs autres
« cameratas » dans notre pays, ce qui n’était pas
le cas en 2009.
Les musiciens viennent de Suisse ou de
France voisine, ou ont un rapport avec la Suisse.
Certains premiers pupitres de l’OSR et de
l’OCL apportent parfois leur contribution. Avec
eux la manière de procéder diffère : le travail se
fait pendant les trois jours qui précèdent le
concert, et le programme est exigeant. Un
noyau de vingt musiciens environ revient régulièrement, d’autres sont convoqués selon les
projets ponctuels. Les concerts ont lieu le plus
souvent au même endroit : la Salle Frank
Martin. Le répertoire comprend principalement
la musique du XXème siècle et des arrangements de grandes œuvres symphoniques
(Stravinski, Gulda, Gerschwin, Poulenc…),
mais pas de musique contemporaine, que
Contrechamps défend très bien. L’ensemble estil soutenu par la communauté russe ? Oui, mais
plus par sa présence aux événements que par un
apport financier. En 2009-2010, la Fondation
Neva a accordé une aide, mais plus depuis. Gleb
Skvortsov dit avoir mis plusieurs années pour
acquérir une crédibilité ; d’autres sont soutenus
dans leurs projets avant même d’avoir commencé. Pour lui le fait de diriger deux ensembles est
un avantage puisqu’il peut ainsi aborder des
répertoires différents. La Camerata Venia lui
offre un ancrage dans le milieu professionnel,
ce qui est enrichissant aussi pour son activité à
la tête de l’Orchestre Symphonique Genevois.
D’après des propos recueillis par
Martine Duruz
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scènes de mai
Agenda romand
Le festival de musique actuelle « Les Amplitudes » à la Chaux-de-Fonds
et les Rencontres avec Cédric Pescia « Ensemble enScène » au Théâtre
Kléber-Méleau de Malley-Renens constituent les manifestations les plus
marquantes du mois en Suisse romande.
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A Lausanne, à l’Opéra, l’Orchestre de
Chambre de Lausanne donnera son 9e concert
d’abonnement, sous la conduite de Kazuki
Yamada, avec le violoniste Augustin Hadelich,
soliste du Concerto en la mineur de Dvorak. La
Suite de Pelléas et Mélisande de Fauré et la
Symphonie en do majeur de Bizet, chef-d’œuvre précoce d’un compositeur de dix-sept ans,
complètent le programme. (lu18 et ma 19)
A l’Opéra également, Alondra de la Parra,
directrice artistique de l’Orchestre philharmonique de Jalisco (Mexique), sera à la tête de
l’OCL pour le 7e Concert du Dimanche. Au
programme figurent un Concerto pour basson
de Johann Baptist Vanhal (1739-1813) – soliste
François Dinkel - et la Symphonie No 7 de
Beethoven. (di 27)
Au BCV Concert Hall, Le Prince Heureux,
un conte d’Oscar Wilde, a inspiré au compositeur américain Jan Bach une musique d’accom-
Jamie Phillips. Crédit Russell Duncan
a
pagnement qui sera interprétée par l’OCL lors
du 4e concert Découvertes, sous la direction de
Jamie Phillips, jeune chef assistant du Hallé
Orchestra. (me 27)
Au Salon Alice
Bailly, pour un
Entracte du Mardi, un
groupe de musiciens
présenteront un portrait d’Henry Purcell.
(ma19)
A la Salle
Paderewski,
les
Concerts de Montbenon accueillent le
Quatuor Terpsycordes
et la pianiste parisienne Juliette Granier,
ancienne élève de
Dominique Weber à Genève, dans trois chefsd’œuvre du répertoire chambriste : le
Quatuor en sol Op. 76 No 1 de Haydn, le
Quintette en sol Op. 57 de
Chostakovitch, ainsi que le Quintette en
mi bémol Op. 44 de Robert Schumann.
(ve 29)
Au Théâtre de Beaulieu, un grand
concert choral et un concert de
l’Orchestre de la Suisse Romande sont
annoncés. La Messa di Gloria de
Puccini et l’oratorio Sancta Civitas de
Vaughan Williams, œuvre composée
entre 1923 et 1925, réuniront les forces
des Chœurs Faller et des Gymnases lausannois, de la Maîtrise Saint-Pierre aux
Liens de Bulle, de l’Orchestre romand
de Jeunes professionnels, sous la
conduite des chefs Olivier Piguet et
Gonzague Monney, avec la participation
du pianiste François Margot, du ténor
Valério Contaldo et de la basse Michel
Brodard. (di 10)
L’OSR, sous la conduite de Neeme
Järvi, jouera des œuvres de Rossini, de
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Stravinsky, de Ravel (le Boléro) et, avec des
solistes issus de ses rangs, le Concerto pour sept
instruments à vent et timbales de Frank Martin.
(je 21)
A Renens-Malley, au Théâtre KléberMéleau, les Rencontres Musicales « Ensemble
enScène » avec Cédric Pescia accueilleront
divers artistes, dont le jeune Kristian
Bezuidenhout au pianoforte et la soprano
Caroline Melzer dans le Pierrot Lunaire de
Schœnberg. (du me 27 au di 31)
A Morges, au Casino, Carine Séchaye,
mezzo-soprano et comédienne, et Marie-Cécile
Bertheau au piano, présenteront, avec leur verve
coutumière, des pages de Poulenc, de Chabrier,
ainsi que des airs d’opéras et d’opérettes.
Hélène Grimaud
A Rolle, au Rosey Concert Hall, le récital
d’Hélène Grimaud s’annonce aussi coloré que
captivant, avec Wasserklavier de Berio et Rain
Tree de Takemitsu précédant une Barcarolle de
Fauré et Jeux d’eau de Ravel, que suivront des
pages d’Albeniz, de Liszt, de Janacek et de
Debussy. La Sonate No 2 de Brahms, compositeur de prédilection de la pianiste française,
mettra un terme à ce récital substantiel.
A Chéserex, à l’Abbaye de Bonmont, deux
concerts sont à l’affiche. L’un, confié au violoniste Fabrizio von Arx et au pianiste Bruno
Canino, sera consacré à la Sonate No 5 du
« Printemps » de Beethoven, à la Sonate en la
majeur de César Franck, ainsi qu’à
l’Introduction et Rondo capriccioso de SaintSaëns. L’autre, à l’enseigne de « Mélodies françaises sur des poèmes de Verlaine », séduira
tous les amateurs de la voix de contre-ténor de
Philippe Jaroussky, qui sera accomnpagné au
piano par Jérôme Duclos. (Concert & Brunch di
3 et Concert & Gala Dîner ma 5)
A Romainmôtier, à l’Abbatiale,
l’Ensemble Amarcord - 2 ténors, 1 baryton et 2
basses, tous anciens membres du célèbre
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Thomanerchor de Leipzig,- interprétera des
œuvres allant du Moyen-Age à Heinrich Schütz
faisant partie des « Trésors de la bibliothèque de
Saint-Thomas ». (di 3) La Création de Haydn,
par les mêmes interprètes qu’à Yverdon, est
aussi à l’affiche. (di 10)
A Yverdon, au Temple, le grand oratorio
de Haydn La Création aura pour interprètes,
sous la conduite de Christian Delafontaine,
l’Orchestre d’Yverdon-les-Bains, l’Ensemble
vocal Horizons et les solistes Charlotte Müller
Perrier, soprano, Christoph Einhorn, ténor, et
Stephan Imboden, baryton-basse. (je 7 et ve 8)
A Vevey, à la Salle del Castillo, les
Quintettes pour clarinette et cordes de Mozart
et de Brahms sont au programme du dernier
concert de la saison d’Arts et Lettres. Les interprètes en seront le clarinettiste Lorenzo
Coppola, les violonistes Isabelle Faust et AnneKatharina Schreiber, l’altiste Yoshiko Morita et
le violoncelliste Emmanuel Balssa. (ma 27)
A Villeneuve, au Temple Saint-Paul, le
Belenus Quartett de Bâle, formé d’anciennes
étudiantes de la Haute Ecole des Arts de Zurich,
a choisi de présenter trois Quatuors à cordes :
l’Opus 74 No 3 dit « Le Cavalier » de Haydn, le
Quatuor No 3 de Schnittke, ainsi que l’Op. 96
« Américain » de Dvorak. (di 31)
A Monthey, au Château, carte blanche est
donnée à l’accordéoniste Stéphane Chapuis.
(di 10)
A Sion, à la Fondation de Wolff, le baryton
Siwoung Song, accompagné par la pianiste
Lauriane Follonier, a jeté son dévolu sur des
Lauriane Follonier et Siwoung Song
Lieder de Schumann et des Mélodies de
Reynaldo Hahn et de Fauré. (ve 1)
A Neuchâtel, au Temple du Bas, l’orchestre, les solistes et le chœur de l’Avant-ScèneOpéra, sous la baguette d’Yves Senn, se produiront à l’enseigne des « plus belles pages du
répertoire lyrique ». (ve 8 et di 10)
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Au même endroit, l’Orchestre
Symphonique Suisse des Jeunes,
conduit par Kai Bumann, accompagnera
le clarinettiste Pavlos Serassis dans le
Concerto en la K. 622 de Mozart, avant
d’affronter une partition monumentale,
la Symphonie alpestre de Richard
Strauss. (di 17)
A La Chaux-de-Fonds, différents
lieux seront investis par le festival biennal de musique contemporaine « Les
Amplitudes », qui consacre sa 7e édition
au compositeur toulousain Pierre
Jodlowski, dont notamment une nouvelle version de Passage, couloir sonore
dynamique dédié au monde des souvenirs, sera installée au Musée de
l’Horlogerie. (du di 3 au di 10 )
Au Temple Farel, l’OCL, sous la
direction de Marc Kissoczy, dans le
cadre du festival « Les Amplitudes »,
jouera les Interludes I-II et III, plus
Drones (2007) de Jodlowski, ainsi que
Chukrum (1963) de Giacinto Scelsi et Zipangu
(1980) de Claude Vivier. (ve 8)
A L’Heure Bleue, trois représentations des
Noces de Figaro de Mozart, confiées à l’AvantScène-Opéra de Neuchâtel et à la direction
musicale d’Yves Senn, sont annoncées hors
abonnement pour la fin de la saison. (me 27, ve
29 et di 31)
A Bienne, au Palais des Congrès, pour son
9e concert d’abonnemnent, l’Orchestre
Symphonique Bienne Soleure sera dirigé par
Lawrence Foster. Au
programme figurent
l’Ouverture
de
l’Italienne à Alger de
Rossini, le Concerto
pour violon No 1 de
Paganini, avec Feng
Ning en soliste, et la
Symphonie No 7 de
Beethoven.
Au Stadttheater,
suite des représentations de King Arthur
de Purcell, mis en
scène par Katharina
Rupp (ve 1, ma 19, ve 22 et je 28) et de celles
de La Tragédie de Carmen d’après Bizet, avec
Carine Séchaye et Roger Padullés, sous la
conduiote de Harald Siegel (ve 8, me 13,
ma 26).
A Saint-ursanne, à la Collégiale, la violoniste Plamena Nikitassova et l’organiste Jörg-
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Christian Poltéra
Andreas Bötticher feront entendre des pages de
J.Jakob Walther, J.Caspar Kerll, Georg Muffat
et Hieronymus Kradenthaler, compositeurs allemands du 17e siècle. (di 3)
A Saignelégier, l’Orchestre de Chambre
fribourgeois, avec le comédien Laurent Sandoz
comme narrateur, présentera une version instrumentale de l’Histoire du Soldat de Stravinsky et
Ramuz. (di 17)
A Fribourg, au Théâtre L’Equilibre, le
Tombeau de Couperin de Ravel, le Concerto
pour violoncelle No 1 de Chostakovitch, avec
Christian Poltéra en soliste, et la Symphonie No
101 « L’horloge » de Haydn figurent au programme d’un concert de l’Orchestre de
Chambre fribourgeois, conduit par son chef fondateur Laurent Gendre. (me 20)
A l’Aula Magna de l’Université,
l’Ensemble igma présentera des œuvres de
Debussy, Franz Deppler (1821-1883), Jolivet et
Reinecke, dans divers arrangements pour
instruments à vent, avec ou sans piano, ainsi
que le brillant Sextuor pour flûte, hautbois, clarinette, basson, cor et piano de Francis Poulenc.
(me 27)
Au même endroit, le duo violon et piano
d’Alena Baeva et Vadym Kholodenko jouera la
Sonate D. 385 et la Fantaisie D. 934 de
Schubert, ainsi que la Sonate No 3 « Epica » de
Nicolas Medtner. (di 10)
Yves Allaz
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Le concert du dimanche de la ville accueille,
le 10 mai, l’Orchestre Symphonique Genevois et
son chef Gleb Skvortsov, ainsi que l’organiste
Diego Innoncenzi, qui interpréteront des pièces
de Bach et Guilmant.
Le pianiste Monty Alexander sera accompagné du Harlem Kingston Express lors de son
concert du 12 mai au Victoria Hall.
Le Geneva Camerata propose une soirée le
21 mai, également au VH, avec comme invitée la
soprano Véronique Gens, qui interprétera un florilège d’airs d’opéras de genre et d’époque
variées.
en mai
Agenda genevois
La soprano Angela Gheorghiu sera au Grand Théâtre de Genève,
le 13 mai ! Accompagnée par l’Orchestre de la Suisse Romande, elle
propose un programme éclectique, allant de Haendel à Catalani.
Les amateurs de ballet se retrouveront sinon au Bâtiment des Forces
Motrices du 21 au 31 mai, pour découvrir une chorégraphie de Joëlle
Bouvier inspirée de Tristan und Isolde de Wagner.
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L’Orchestre de la Suisse Romande réserve
un programme symphonique dense en ce mois de
mai. Neeme Järvi sera à la tête de la formation le
6 mai, accompagnant au piano Per Tengstrand.
Au programme : Rosamunde, Ouverture de
Schubert, Concerto pour piano No 2 de
Stenhammar et la Symphonie No 5 de Beethoven.
L’on retrouvera le même chef le vendredi 22 mai,
toujours au VH, pour écouter le Boléro de Ravel,
le Concerto pour sept instruments à vent, timbyles, batterie et orchestre à cordes de Frank
Martin et la Symphonie No 8 de Beethoven.
Enfin, le 28 mai, ce sera au tour de Kazuki
Yamada de tenir la baguette pour soutenir la
soprano Laura Aikin dans le Concerto pour
soprano colorature et orchestre de Reinhold
Laura Aikin © Gerard Amsellem
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Glière ; la Symphonie No 7 de Dvorak
sera aussi au programme. Une délégation de musiciens de l’OSR se produira par ailleurs en formation réduite le dimanche 10 mai au BFM, pour
interpréter des œuvres de Frank
Martin et Rossini.
L’Orchestre de Chambre de
Genève donne rendez-vous le 27 mai
à midi et à 18h au pavillon Sicli ; Arie
van Beek promet alors des
« musiques en bouches », parmi lesquelles on peut relever le
Konzertstück N° 2 op. 114 pour deux
clarinettes & orchestre, le Chant des
oiseaux de Casals ou
encore les Danses roumaines de Bartók. La
formation sera aussi le 9
mai à la Cathédrale de
Genève pour accompagner les chœurs des collèges dans l’exécution
notamment du Requiem de Haydn.
Le 11 mai, l’Orchestre du
Chœur de l’Université, dirigé par
Sébastien Brugière, jouera au
Victoria Hall la 9e symphonie de
Dvorak, dite « Symphonie du
Nouveau Monde », renforcé par les
Chœurs de l’Université et ceux de la
Maîtrise du Conservatoire populaire
de Musique.
L’Orchestre de la Haute École
de Musique, dirigé par Laurent Gay,
offrira quant à lui le 3 mai un concert
toujours au VH; Ophélie Gaillard
sera la soliste du Concerto pour violoncelle de Schumann, tandis que la
4e symphonie de Brahms sera interprétée en deuxième partie.
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Monty Alexander
Notons enfin la venue de l’Orchestre
National de Paris, dirigé par Philippe Jordan, le
mercredi 20 mai, au Victoria Hall également,
pour un programme consacré à Beethoven ; le
London Symphony Orchestra, dirigé par Daniel
Harding, sera aussi de passage le 30 mai dans la
cité du bout du lac. Janine Jansen au violon jouera alors le Concerto pour violon de
Mendelssohn ; une création mondiale de Rushton
sera aussi à l’honneur, ainsi que la Symphonie No
5 de Mahler.
Martina Diaz
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gestuelle contemporaine et hip-hop.
portrait
Ophélie Gaillard
La discographie
Le dimanche 3 mai, la violoncelliste Ophélie Gaillard sera la soliste du
Concerto en la mineur de Robert Schumann lors du concert que donnera
au Victoria Hall l’Orchestre de la Haute Ecole de Musique de Genève, sous
la conduite de Laurent Gay. Au même programme figurent le Prélude du
3e acte des Maîtres chanteurs de Wagner et la Symphonie No 4 de Brahms.
Née à Paris, Ophélie Gaillard a reçu sa formation musicale au CNSMD dans la classe de
Maurice Bourgue pour la musique de chambre,
dans celle de Philippe Muller pour le violoncelle et celle de Christophe Coin pour le violoncelle baroque. Une formation qu’elle complète
ensuite par une licence en musicologie à la
Sorbonne. Elle obtient en 2008 un 3e prix au
Concours International de violoncelle de
Munich et grave à 26 ans pour le label
Ambroisie une intégrale des six Suites pour violoncelle de Bach, qu’elle réenregistrera avec un
égal bonheur en 2011 pour Aparté. Une nouvelle version qui met particulièrement en valeur les
fines sonorités de son violoncelle piccolo à cinq
cordes. Attirée par la pédagogie, Ophélie
Gaillard enseigne à partir de 2001 à l’Ecole de
musique d’Aulnay-sous-Bois. En 2003, elle est
élue « révélation soliste instumentale » aux
Victoires de la musique. Elle joue des concertos
classiques et romantiques, enchaîne récitals,
concerts de musique de chambre et master classes à travers le monde. Cette année, elle s’est
notamment produite à la Folle Journée de
Nantes.
Passionnée de musique ancienne, Ophélie
Gaillard travaille avec Christophe Rousset, avec
Emmanuelle Haïm, avec l’Ensemble Amarillis,
avant de fonder Pulcinella en 2005, un collectif
à géométrie variable réunissant des musiciens
intéressés par l’interprétation sur instruments
historiques. Elle aime aussi collaborer avec des
compositeurs vivants, comme
Pierre Bartholomée, dont elle a
enregistré Oraisons en 2007.
Elle a aussi formé un duo avec
l’accordéoniste Pascal Contet.
La scène et la danse
Ophélie Gaillard aime tisser des liens avec les arts de la
scène, en particulier avec la
danse contemporaine. Pierrot
fâché avec la lune, un spectacle autour de Debussy et de
Janacek, l’unit aux mimes et
comédiens Cécile Roussat et
Julien Beck, ainsi qu’à la pianiste Delphine Bardin. Elle
collabore avec des chorégraphes comme Daniel Larrieu,
Sidi Larbi Cherkaoui, Damien
Jalet ou encore Sasha Waltz, en
Allemagne et en Inde en 2013.
Tout récemment, au Théâtre
parisien du Ranelagh, elle formait avec le danseur Ibrahim
Sissoko un surprenant duo
dans En Filigrane, spectacle
mêlant avec poésie et humour
Ophélie Gaillard © Caroline Doutre
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A ce jour, la discographie d’Ophélie Gaillard
compte une quinzaine d’albums. Le dernier en
date, Alvorada, constitue une invitation au
voyage musical de l’Espagne à l’Amérique du
Sud, de Manuel de Falla et Enrique Granados
au tango argentin. La Suite pour violoncelle seul
de Gaspar Cassado, contrastant avec la féerie
sonore créée par les vingt-six musiciens entourant la violoncelliste franco-suisse, apporte une
lumineuse conclusion à ce double album.
Outre les Suites de Bach déjà citées, Ophélie
Gaillard a gravé avec Pulcinella pour
Naïve/Ambroisie une intégrale des Sonates
pour violoncelle et basse continue de Vivaldi,
ainsi que des Concertos, un Fandango et une
Aria pour soprano et violoncelle de Luigi
Boccherini avec Sandrine Piau. Pour le même
label, elle a enregistré les Phantasiestücke de
Schumann, l’intégralité de l’Oeuvre pour violoncelle et piano de Gabriel Fauré avec Bruno
Fontaine, et avec Vanessa Wagner un album
consacré à Benjamin Britten.
En 2009, elle publiait Dreams, des pages de
Satie, Fauré et Chopin, accompagnée par le
Royal Philharmonic Orchestra de Londres et en
2010, avec Edna Stern, l’Oeuvre pour violoncelle et piano de Chopin chez Aparté. En 2012,
avec Pulcinella, Sandrine Piau, le contre-ténor
Christophe Dumaux et le ténor Emilio Gonzalez
Toro, Ophélie Gaillard gravait Arias, des
extraits de Cantates de Bach comportant un violoncelle piccolo, ainsi qu’un air d’une Cantate
de Hoffman, longtemps attribuée à Bach. En
2014, un « Diapason d’Or de l’année » était
attribué à Pulcinella et Ophélie Gaillard pour
leur remarquable enregistrement d’œuvres de
Carl Philipp Emanuel Bach, à l’occasion du tricentenaire de sa naissance.
Notons enfin que depuis septembre 2014
Ophélie Gaillard enseigne le violoncelle à la
Haute Ecole de Musique de Genève, qui
accueillera le 10 mai son ensemble Pulcinella
dans le Stabat Mater de Pergolèse et le
Kammerkonzert de Ligeti.
Yves Allaz
Le 3 mai. Orchestre de la HEM, dir. Laurent Gay.
Ophélie Gaillard, violoncelle (Wagner, Schumann,
Brahms). Victoria Hall de Genève à 20h
Billetterie de la Ville de Genève, T. +41(0)22 418 62 45,
http://billetterie-culture.ville-ge.ch
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concerts d’abonnement osr
Perfection à la nordique
En fin de saison, Neeme Järvi continue à tisser sa programmation en e
ntremêlant les classiques et la musique du Nord. En mai, Per Tengstrand,
pianiste suédois de renom, lui viendra en renfort.
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Né en Suède en 1968, Per Tengstrand s’est
forgé au fil des années une réputation solide,
tant dans son pays que sur les scènes internationales. Forgé, car si le talent lui est indéniable,
c’est surtout un titan de travail - qui a certes eu
ses moments de doute - mais à qui la musique et
l’expérience de vie ont apporté équilibre et sérénité.
S’il est rare qu’un artiste classique
se dévoile - encore moins un nordique
peut-être - le Suédois a accepté il y a
quelques années de jouer son propre
rôle dans un documentaire depuis
acclamé: Dans Solisten (The Soloist), la
caméra devient la confidente du musicien dans ses tournées et révèle une personnalité perfectionniste, qui prend la
moindre critique - mais aussi la plus
minime suggestion ou conseil d’un
confrère ou d’un aîné - très à cœur.
Celui qui va jusqu’à se reprocher le
moindre relâchement de forme ou une
faille de concentration, donne facilement raison aux critiques… « Si seulement l’on pouvait toujours brandir la
pancarte : Je suis le meilleur en tout ! »
soupire-t-il. Dans ses plus jeunes
années, il concevait la carrière musicale comme un circuit automobile: « Ce
n’est pas le moment de lâcher, il faut
que je continue à 200 km/h, je ne peux
pas encore m’arrêter, j’ai trop à
apprendre, à découvrir »… Jusqu’à ce qu’un
accident de voiture grave lui ait fait passer des
jours aux soins intensifs, il y a quelques années.
Le repos du guerrier
Ce film - impressionnant et touchant à la
fois - nous fait découvrir un artiste pour qui la
carrière de pianiste soliste se rapproche d’un
sacerdoce… ou d’un pèlerinage dans lequel le
chemin est long, car il faut apprendre à durer. Il
ne cache pas non plus sa grande difficulté à
équilibrer sa vie professionnelle - qui le fait
voyager énormément - et sa vie privée, qu’il
a
partage… avec la pianiste chinoise Shan-Shan
Sun.
Elle est la seule à comprendre le besoin de
solitude de l’artiste et à partager son monde
intérieur. A l’austérité nordique, elle apporte le
calme zen, le sourire d’Asie. Elle est également
sa partenaire de scène : ils forment un véritable
Per Tengstrand
mêmes intérêts. Il travaille fréquemment avec
Neeme et Kristjan Järvi (père et fils), Esa-Pekka
Salonen, les orchestres de Göteborg, Malmö,
Helsingborg, Stockholm, Tapiola, ou encore de
la Radio Suédoise, sans mentionner de nombreuses phalanges prestigieuses aux quatre
coins du monde. Il a été nommé récemment
artiste-en-résidence de la nouvelle Spira
Concert House in Jönköping (Suède).
Sa saison 2014-2015 - à l’agenda débordant - comprend une série de concerts et récitals
des deux côtés de l’Atlantique. En Suède, il
interprète le Deuxième Concerto de
Rachmaninov, le second de Brahms et celui de
Stravinsky.
Lors de son apparition genevoise, Per
Tengstrand présentera aux mélomanes le 2e
Concerto de son compatriote Wilhelm
Stenhammar. Cette pièce du début du
XXe siècle, aux échos jazzy et chopiniens, ferait une excellente piste sonore
de film, tant elle semble raconter une
histoire. Selon quelques aficionados,
elle a tout (y compris un finale très virtuose) pour faire pâlir Grieg. Il y a une
dizaine d’années, le pianiste avait choisi le Premier concerto du même compositeur pour inaugurer un nouveau
Festival de Musique Nordique à StPétersbourg. D’autres festivals consacrées au répertoire cher au pianiste ont
vu le jour depuis: établi à Princeton
(New Jersey), Per Tengstrand vient de
créer the «New Nordic Music Festival»
à New York !
Tout ceci fait que vouloir suivre à
la trace ce musicien ambassadeur de sa
culture à travers le monde peut tenir de
la mission impossible... Mais rien n'empêche de passer une soirée envoûtante
en sa compagnie.
Beata Zakes
duo ying et yang, prêt à relever tout défi : cette
saison, par exemple, ils interprètent ensemble
une adaptation du Sacre du Printemps de
Stravinsky. Ils ont à leur compte trois CDs.
Au service du roi
Défenseur et promoteur fervent de la
musique de son pays - au point de se voir attribuer la médaille royale Litteris et Artibus par le
roi Carl XVI Gustave de Suède à un très jeune
âge - Per Tengstrand s’est construit un répertoire international aux fortes touches patriotiques
et un réseau de collaborations dédiées aux
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Abonnement OSR Grands classiques 4, le 6 mai 2015
Victoria Hall Genève
Direction Neeme Järvi
Franz Schubert, Rosamunde, ouverture D. 644
Wilhelm Stenhammar, Concerto pour piano n°2 en ré
mineur op. 23
Ludwig van Beethoven, Symphonie N°5 en ut mineur op.
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Tél. +41 (0)22 418 35 00
ou +41 (0)22 418 35 13 *
(*une heure avant le concert)
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daniel harding de passage à genève
La fougue d’un fort
en thèmes
Le 30 mai Genève accueille un encore jeune chef - mais à l'expérience déjà
longue - à la tête de l'Orchestre symphonique de Londres. Energie,
panache, bondissement, trépidance, sont des qualificatifs qui reviennent
souvent dans les comptes-rendus de ses concerts.
Ce fort en thème, bouillant, plein d'énergie,
au sourire ravageur, s'est toujours engagé à fond
dans sa passion. Si cela lui a permis de se faire
rapidement un nom sur les scènes, l'Anglais
porte sur son parcours un regard parfois amusé,
parfois doucement moqueur... très British en
somme !
Né durant un bel été en 1975 à Oxford,
Daniel Harding conduit une carrière placée sous
le signe de l'excellence et de la maturité précoce. A 13 ans déjà, celui qui est un trompettiste
encore un peu débutant, dirige un ensemble
instrumental, et à 18 à peine il devient assistant
de Simon Rattle à Birmingham. Il se rend ensuite à Berlin, où c'est avec Claudio Abbado qu'il
apprend son métier !
un impétueux ?
Le musicien porte sur son attitude à ses
débuts un regard acidulé. « Pour un jeune chef,
il est difficile de se faire une place sans parfois
s'affirmer trop. J'étais un peu arrogant, trop sûr
de moi à l'époque. Ça m'a été reproché, peutêtre pas sans raisons. Les hautes écoles, la formation exigeante, l'université, devraient se faire
à 30 ans, quand on est capable d'en tirer vraiment parti. Dans le travail de direction, quand
les années ont passé, comme on a un plus grand
bagage, une plus grand maturité, on devient
plus ouvert aux autres, détendu, serein. »
En 1995, le jeune Harding est remarqué à
l'occasion d'un concert à Paris qu'il dirige au
pied levé en remplacement de Simon Rattle. A
partir de ce moment-là, il enchaîne les spectacles prestigieux. « J'ai fait beaucoup de choses... et pas mal de folies, ce qui est normal. Il
faut du temps pour échapper à ses délires ! »
Dans les années qui ont suivi, des phalanges
aussi renommées que le Mahler Chamber
Orchestra, l'Orchestre national de France,
l'Orchestre philharmonique de Vienne, de
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Covent Garden, de Chicago, de la Bayerische
Staatsoper, de la Staatskapelle de Dresde l'appellent... Il est Premier chef invité de
l'Orchestre symphonique de Londres depuis
2007, ensemble avec lequel il se produira à
Genève.
Outre ses productions symphoniques,
comme celle qui sera offerte à Genève, le maestro effectue depuis longtemps un travail en profondeur dans l'univers opératique. Il s'est ainsi
produit à plusieurs reprises à la Scala de Milan.
Une collaboration marquante aura été le Don
Giovanni avec Peter Brook, en 2002 à Aix-enProvence.
un ado de 40 ans ?
Bientôt quadragénaire, le Britannique garde
intact son enthousiasme de débutant : « Je dirige,
parce que j'adore la musique. Cela me rend heureux, accompli. C'est comme une expérience
humaine vécue et qu'on a envie de partager,
quand il est possible de dire à d'autres: entendezvous aussi ces sonorités ? Cela me fait vivre ! »
Mais la gravité n'est jamais loin : « Oui, il y a un
plaisir, se sentir saisi physiquement par la
musique est un bien-être. Mais tout ce bonheur
est aussi lié à de la souffrance, de la douleur, qui
ne sont jamais loin. Et dans le fond, nous aimons
tous autant l'angoisse que le plaisir. »
Ce sens de la dramatisation et de la célébration lui paraît indispensable dans le contexte de
crise de la musique classique. « Les concerts
classiques ont trop souvent une image si
ennuyeuse. Il faut les rendre vivants et humains
! » C'est ainsi sans doute qu'il faut comprendre
une remarque adressée un jour à des contrebassistes : « Ne faites pas sonner tout cela aussi
bourgeois ! »
Pierre Jaquet
Disques chez DGG. un «coup de cœur»: Symphonie n°
10 de Maher, avec le Philharmonique de Vienne.
Genève / Victoria Hall / Samedi 30 mai 2015 à 20 h
Avec Janine Jansen (violon)
Edward Rushton (Compositeur suisse) : Being Mahler’s
Fifth symphony (Création mondiale) Commande MigrosPour-cent-culturel-Classics / Felix Mendelssohn
Bartholdy : Concerto pour violon et orchestre en mi
mineur, op. 64 / Gustav Mahler : Symphonie Nº 5 en ut
dièse mineur
Billetterie : Service culturel Migros, Stand Info Balexert,
Migros Nyon-La Combe
Daniel Harding
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festival vernier classique
Fabrizio Chiovetta
& Friends
Le pianiste genevois ouvre et ferme la Festival Vernier
classique qui se déroule en cinq concerts du 3 au 19
mai. Rencontre.
Vous donnez deux concerts en ouverture et en clôture du
Festival. Avec comme partenaires la jeune violoncelliste franco-belge
Camille Thomas pour l’un, la pianiste Audrey Vigoureux pour l’autre. Comment avez-vous été amené à ces choix ?
Comme l'an dernier, le festival m'a fait confiance et m'a permis de proposer deux concerts avec des artistes de mon choix. Camille Thomas est une
merveilleuse violoncelliste, l'une des plus prometteuses de la jeune géné-
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Camille Thomas © Aline fournier
ration. Elle et moi avons depuis longtemps exprimé le désir de travailler
ensemble et c'est avec un immense bonheur que nous nous produirons
pour la première fois en duo pour l'ouverture du festival. La pianiste
Audrey Vigoureux est une amie de longue date. C'est une musicienne
exceptionnelle pour qui j'ai une profonde estime. Elle vient d'ailleurs de
sortir un disque Bach/Beethoven qui est d'une beauté bouleversante. Nous
avons joué à plusieurs reprises à quatre mains, et nous explorerons également à Vernier le répertoire pour deux pianos.
Justement, parlez-nous du programme et des œuvres choisies.
Avec Camille, nous présenterons un programme germanique avec les
Fantasiestücke op.73 de Schumann, la sonate "Arpeggione" de Schubert
et la sonate en mi mineur de Brahms. Lors du concert de clôture avec
Audrey Vigoureux, nous alternerons entre quatre mains et deux pianos.
Nous jouerons la célèbre Fantaisie en fa mineur de Schubert, des chorals
de Bach transcrits par Kurtag, ainsi que quelques surprises qui permettront
terminer cette édition de manière festive...
Fabrizio Chiovetta, photo Romain Tornay
Festival Vernier Classique Salle des Fêtes du Lignon
3 mai 2015 à 17:00 heures
Récital Violoncelle-Piano
Camille Thomas (violoncelle) &
Fabrizio Chiovetta (piano)
Schumann, Schubert, Brahms
Juliette Galstian, Philippe Talec, Thomas
Hernandez, Noémie Bialobroda, Francesco
Bartoletti, Eva Aroutunian
Scriabine, Chostakovitch
9 mai 2015 à 20:00 heures
Quatuor Takács
Edward Dusinberre (violon), Károly Schranz
(violon), Geraldine Walther (alto), András Fejér
(violoncelle)
Haydn, Debussy, Beethoven
7 mai 2015 à 20:00 heures
Mosaïque Russe
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15 mai 2015 à 20:00 heures
Quatuor Modigliani
Philippe Bernhard, Loïc Rio (violons), Laurent
Marfaing (alto), François Kieffer (violoncelle)
Beethoven, Ravel, Dohnanyi
17 mai 2015 à 17:00 heures
Récital à 2 Pianos & 4 Mains
Audrey Vigoureux (piano) &
Fabrizio Chiovetta (piano)
Bach, Mozart, Schubert
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Vous venez d'enregistrer et vous avez
toujours pleins de projets...
Je viens en effet d'enregistrer un disque Bach
qui paraîtra dans quelques mois. L'été sera très
dense : je me produirai en Suisse à plusieurs festivals (Cully Classique, Rencontres Musicales
de Champéry, Zermatt, Amadeus) en solo, ou
avec des partenaires tels que le violoncelliste
Henri Demarquette, le baryton Benjamin Appl
ou le ténor Werner Güra. Je jouerai également
en récital en Allemagne, en trio au Canada, et
donnerai un concert de jazz avec Levon et
Grégoire Maret.
Mais avant cela, je me réjouis de participer au
Festival “Les Athénéennes“ qui aura lieu à
Genève du 8 au 16 mai et qui est organisé par
les pianistes Audrey Vigoureux, Marc
Perrenoud et Valentin Peiry. C'est un événement
que
j'affectionne
particulièrement.
L'atmosphère est unique et le programme varié
et passionnant, oscillant entre classique, jazz et
créations. L'édition 2015 permettra d'entendre
Audrey Vigoureux
entre autres des artistes prestigieux tels que
Felicity Lott, David Fray, Stefano Bollani,
Grégoire Maret, Audrey Vigoureux, Sarah
Nemtanu, Marc Perrenoud, Valentin Peiry.
J'aurai quant à moi le plaisir d'y jouer le 12 mai
avec le clarinettiste Patrick Messina et l'altiste
Nicolò Eugelmi.
Propos recueillis par Christian Bernard
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centre musical robert dunand, carouge
Bose-Pastor Duo
La jeune Association « Amigos de España » se consacre à la diffusion des arts
ibériques. Pour son inauguration officielle, elle propose un récital de piano à
quatre mains au Centre Musical Robert Dunand, à Carouge, le 3 mai prochain
à 17h. Au plaisir de l’écoute s’ajoute celui de la table : tapas et vins espagnols
seront à déguster après le concert. N’hésitez pas, l’entrée est libre !
C’est le Bose-Pastor Duo qui est à l’honneur
pour ce récital de piano à quatre mains.
L’occasion est belle de découvrir un répertoire
trop souvent absent des scènes musicales avec
des œuvres atypiques des grands représentants de
la musique espagnole. Pia Bose et Antonio
Pastor interprètent les partitions de Granados, de
Falla, Albéniz ou encore du compositeur catalan
Federico Mompou. Mais le rayonnement artistique de la péninsule a depuis longtemps franchi
les Pyrénées et Maurice Ravel est l’un des principaux compositeurs français à s’en être inspiré;
voilà pourquoi les deux pianistes proposent également une version de sa magnifique Rhapsodie
espagnole. Le Bose-Pastor Duo jouit d’une belle
réputation dans le monde du piano à quatre
mains. Il a notamment remporté le 2ème Prix lors
de l’International Piano Duo Competition en
2013, à Tokyo. Le duo se produit dans de prestigieuses salles européennes et américaines telles
que le Carnegie Hall’s Weill Recital Hall à New
York, The American Church à Paris, le Palais de
l’Athénée à Genève ainsi qu’à St. Martin-in-theFields à Londres. Les deux musiciens sont riches
d’un parcours musical reliant la tradition pianistique du Vieux Continent au Nouveau Monde.
Du Real Conservatorio Superior de Música de
Madrid pour Antonio Pastor à l’University of
Colorado à Boulder pour Pia Bose, le duo s’est
retrouvé en terre helvétique à l’Académie de
Musique Tibor Varga, à Sion, où il a obtenu un
diplôme de soliste dans la classe de Dominique
Weber.
Festival Goyescas
L’Association « Amigos de España » a pour
but de promouvoir et de partager la culture espagnole sous ses différentes facettes. Elle propose
ainsi un large spectre artistique à travers la
musique, la danse, les arts plastiques, la littérature ou la gastronomie, réunis dans un festival
annuel à Genève, intitulé Goyescas. Cette manifestation culturelle bénéficie du soutien privilégié de la banque Mirabaud et est placée sous le
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haut patronage de l’Ambassade d’Espagne à
Berne et du Maestro Jesús López Cobos. La première édition du Festival Goyescas se tiendra à
Genève le 11 et 12 décembre 2015 avec un programme d’une grande qualité décliné à travers
trois événements culturels. C’est la danse flamenca de la troupe d’Ana la China qui ouvrira le
festival dans la Grande Salle du Conservatoire de
Musique de Genève. Puis dans un souci permanent d’unir les arts entre eux, le Festival
Goyescas propose une discussion des professeurs
Jenaro Talens (Université de Genève) et Andrés
Soria (Université de Grenade) avec Diego
Bose-Pastor Duo
Martínez (directeur du Festival International de
Musique et Danse de Grenade) lors d’une soiréeconférence sur le Cante Jondo de Grenade et son
influence sur les œuvres de Federico García
Lorca et Manuel de Falla. Le concert de clôture
du festival mettra en scène deux stars actuelles
du monde artistique espagnol : la chanteuse de
flamenco Estrella Morente accompagnée par le
pianiste Javier Perianes ; le public sera invité à
découvrir alors des œuvres de Manuel de Falla
ainsi que la musique composée par le poète
Federico García Lorca.
Serene Regard
3 mai. Association « Amigos de España ». Bose-Pastor
Duo (Granados, de Falla, Albéniz, Mompou, Ravel)
Centre Musical Robert Dunand à 17h. Entrée libre
Plus d’information sur le site www.aade-geneve.com
Contact : [email protected]
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té à l’Eastman School of Music de Rochester et
à la Schola Cantorum de Bâle.
théâtre kléber-méleau
Rencontres musicales
avec Cédric Pescia
Cédric Pescia à l’œuvre
Les Rencontres musicales « Ensemble enScène » que Cédric Pescia
organise chaque printemps au Théâtre Kléber-Méleau, dans la banlieue
lausannoise, auront lieu du 27 au 31 mai à Malley-Renens. Deux récitals
de piano par Cédric Pescia et un récital de Kristian Bezuidenhout au
pianoforte sont à l’affiche des trois premières soirées, la quatrième étant
consacrée à des Lieder de Kurt Weill, ainsi qu’au Pierrot Lunaire
d’Arnold Schoenberg interprété par la soprano Caroline Melzer
et cinq instrumentistes.
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Les Rencontres Musicales de Cédric Pescia
ont vu le jour en 2007. Elles rassemblent des
amis musiciens unis par le plaisir communicatif
de jouer ensemble. Cette année, le dernier
concert, celui du 31 mai, en sera la parfaite
illustration, avec la rencontre, autour de Cédric
Pescia, de la soprano allemande Caroline
Melzer, de la violoniste Nurit Stark, du clarinet-
Cédric Pescia © Uwe Neumann
tiste Benjamin Benda et de deux jeunes musiciens pulliérans, Héléna et Constantin
Macherel, elle flûtiste, lui violoncelliste.
Caroline Melzer a fait partie de l’ensemble
du Komische Oper de Berlin, avant de rejoindre celui de la Volksbühne de Vienne en 2010.
Passionnée de musique contemporaine, elle
a
forme avec Nurit Stark un duo devenu en particulier l’interprète privilégié des KafkaFragmente de György Kurtag, œuvre du compositeur hongrois que ces deux artistes présenteront notamment aux Jardins Musicaux de
Cernier, le 20 août prochain. Caroline Melzer
s’est déjà produite aux Rencontres de Pescia en
2008, dans des Lieder de Schubert.
Violoniste et altiste, Nurit Stark maîtrise un
vaste répertoire, du baroque à la musique du
XXIe siècle. Liée à Cédric Pescia par une complicité musicale et affective de longue date, elle
a fondé avec lui et la violoncelliste Monika
Leskovar un trio de musique de chambre qui
porte son nom, le Trio Stark. Elle est une fidèle
de l’Ensemble enScène.
Le clarinettiste Benjamin Benda, professeur à l’Universität der Künste de Berlin et à la
Musik Akademie de Bâle, participe pour la troisième fois aux Rencontres de Pescia.
La flûtiste Héléna Macherel est actuellement élève de la Hochschule für Musik Hanns
Eisler de Berlin. Violoncelliste et compositeur,
Constantin Macherel a été quant à lui élève de
la Musik Akademie de Bâle.
Entièrement consacré à Mozart, le récital
de Kristian Bezuidenhout est des plus prometteurs. Cet artiste y jouera du pianoforte, « un
instrument tendre et introspectif » selon ses propres termes. C’est au pianoforte qu’il est en
train d’enregistrer pour Harmonia Mundi
l’Oeuvre pour clavier de Mozart. Le 7e et
avant-dernier volume du cycle vient de sortir,
salué comme tous les précédents par la presse
spécialisée (Diapason d’Or en mars 2015). Né
en Afrique du Sud en 1979, Kristian
Bezuidenhout enseigne comme professeur invi-
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Cédric Pescia a choisi quant à lui de présenter deux programmes contrastés. Le premier,
le mercredi 27, comportera une page de
Frescobaldi, les Variations pour piano op. 27 de
Webern, ainsi que les Variations Goldberg BWV
988 de J.S. Bach. Le deuxième, le jeudi 28,
verra le pianiste franco-suisse interpréter les
trois ultimes sonates de Beethoven, les Opus
109, 110 et 111, celles-là mêmes qu’il a enregistrées en janvier 2009 pour Claves. Un album qui
a valu à Cédric Pescia d’être considéré comme
un des meilleurs traducteurs actuels de ces
immenses chefs-d’œuvre. La liste des albums
de Pescia plébiscités par la critique internationale ne cesse d’ailleurs de s’allonger. Entre les
Variations Goldberg parues chez Claves en
2004 et l’Art de la Fugue de Bach chez Aeon en
2014, cette liste est révélatrice de l’étendue des
intérêts musicaux et de l’insatiable curiosité du
pianiste lausannois. Elle comporte des œuvres
de Bach et de Schumann principalement, mais
aussi de Couperin, de Schubert, de Debussy, de
Busoni, d’Enescu, de Cage, de Messiaen, de
Suslin, de Gubaidulina, en solo, en duo avec
Nurit Stark ou Philippe Cassard ou encore en
quatuor.
Notons enfin qu’avant de retrouver ses
amis musiciens et son public de Kléber-Méleau,
Cédric Pescia aura achevé une longue série de
concerts à travers l’Allemagne, avec un détour
par la Suisse, à Schaffhouse et à La Chaux-deFonds, en compagnie du Göttinger Symphonie
Orchester et de son chef Christoph-Mathias
Mueller, avec, dans ses bagages, une grande
œuvre romantique : le Concerto No 2 en si
bémol majeur op. 83 de Johannes Brahms.
Yves Allaz
Les rencontres musicales. Théâtre Kléber-Méleau, (loc.
au 021 625 84 29 ou Achat en ligne sur vidy.ch)
- le 27 mai à 20h: . Cédric Pescia, piano (J.-S. Bach).
- le 29 mai à 20h: Cédric Pescia, piano (Beethoven).
- le 30 mai à 20h: Kristian Bezuidenhout, pianoforte
(Mozart).
- le 31 mai à 17h30 : Caroline Melzer, chant, Nurit Stark,
violon, Cédric Pescia, piano (Weill).
www.ensemble-enscene.ch
www.kleber-meleau.ch
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portrait
Philippe Jordan
Le 20 mai prochain, le Victoria Hall accueille l’Orchestre de l’Opéra
National de Paris avec, à sa tête, le maestro Philppe Jordan et au
programme des œuvres de Beethoven. En soliste, le pianiste Nelson Freire.
De son enfance zurichoise au poste de
directeur musical de l'Opéra National de Paris et
des Wiener Symphoniker, le beau parcours de
Philippe Jordan a de quoi impressionner. Avec
une mère danseuse et un père chef d'orchestre,
rien d'étonnant à le retrouver dès l'âge de 6 ans
en train de pianoter ses premières gammes puis
intégrer, deux ans plus tard, les Zürcher
Sängerknaben. Le futur chef s'essaiera au violon avant de se laisser rattraper par le piano et
décrocher un diplôme de professeur à l'âge où
d'autres entrent au lycée. Formé auprès du compositeur suisse Hans Ulrich Lehmann, il continue ses études de piano auprès de Karl Engel.
On le retrouve à Paris comme assistant de
Jeffrey Tate sur le Ring de Wagner présenté au
Théâtre du Châtelet. Le jeune rebelle n'hésite
pas à déclarer à cette époque : « Mon père ne
m'a jamais donné de cours, mais il a influencé
toute mon enfance… J'ai commencé sous son
autorité, puis il a fallu que je m'éloigne. »
Son parcours passe par l'Allemagne :
D'abord Kapellmeister au Stadttheater d'Ulm
(de 1994 à 1998), la petite ville où débuta
Karajan, puis chez Daniel Barenboïm (son mentor) à la Deutsche Staatsoper de Berlin, avant de
devenir chef principal à l'Opéra de Graz en
2001. Il n'a pas trente ans et pourtant, il a déjà
fait des débuts remarqués à Glyndebourne, au
Metropolitan Opera de New York, à Salzbourg,
sans compter les concerts à la tête de nombreux
orchestres internationaux. Cette alternance
entre fosse d'opéra et pupitre symphonique
caractérise un style résolument moderne, un
modèle artistique qui place le chef comme
acteur d'une vie musicale sans frontières.
Alors qu'il dirige à Berlin en tant que principal chef invité à la Staatsoper Unter den
Linden, Nicolas Joël, nouvellement nommé à la
tête de l'Opéra National de Paris, lui propose le
poste de directeur musical. A 33 ans, il devient
ainsi le plus jeune titulaire de ce poste prestigieux. Sous sa direction, la “Grande boutique“
se tourne vers de nouveaux projets, parmi lesquels une retentissante Tétralogie de Wagner.
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Le jeune chef sortira avec les lauriers de cette
épreuve du feu, faisant taire les critiques
concentrées alors sur la mise en scène de Günter
Kramer. Symbole éloquent de cette réussite : les
musiciens, pourtant réputés pour être peu conciliants, lui offrirent un anneau d'or pour les
remercier de les avoir menés à un tel niveau
d'interprétation. Avec doigté et savoir faire,
Philippe Jordan est un chef qui sait imposer ses
choix mais sans verser dans un autoritarisme
inutile. Dirigeant souvent par cœur, il privilégie
chez ses musiciens une adéquation totale avec
le sens musical de l'œuvre et la fidélité aux
intentions du compositeur. Ses Mozart sont vifargent, ses Strauss énergiques et colorés… Le
répertoire français trouve en lui un interprète
d'exception, il suffit pour s'en convaincre de
visionner le DVD de la production Bob Wilson
de Pelléas et Mélisande – une référence moderne de l'ouvrage.
Défi
En acceptant la direction des Wiener
Symphoniker, Philippe Jordan relève le défi de
redonner toute sa place à un orchestre souvent
dans l'ombre des Philharmoniker, son illustre
concurrent. Après un cycle intégral des symphonies de Schubert, suivront des compositions
contemporaines et plusieurs grands oratorios de
Bach. Au Bayerische Staatsoper de Munich, il
dirige cette saison une nouvelle production
d’Arabella et une reprise de Tristan et Isolde,
tandis que Paris aura l'occasion de l'entendre
dans plusieurs nouvelles productions :
L’Enlèvement au sérail, la reprise de Pelléas et
Mélisande et le très rare Roi Arthus d'Ernest
Chausson (dont le premier enregistrement intégral était signé en 1986 par un certain… Armin
Jordan).
Pour sa première vraie saison aux commandes de l'Opéra de Paris, Stéphane Lissner
lui confiera les rênes des gigantesques
Gurrelieder et d'un prometteur Moses und Aron
d'Arnold Schœnberg, mis en scène par Romeo
Castellucci (le projet initial aurait dû être réalisé par Patrice Chéreau mais la mort en aura
décidé autrement…). Autres grands rendezvous de cette nouvelle saison parisienne : La
reprise des Meistersinger dans la production de
Stefan Herheim et une Damnation de Faust
avec une pluie de star (Jonas Kaufmann, Bryn
Terfel et Sophie Koch).
Désormais invité à Vienne ou au festival de
Lucerne, l'Orchestre de l'Opéra National de
Paris sort de sa fosse parisienne pour faire
entendre des qualités étonnantes pour une formation rodée au répertoire lyrique. Philippe
Jordan tient tout particulièrement à ce que les
musiciens puissent donner régulièrement des
concerts symphoniques et ce, afin de peaufiner
une sonorité idéale tant en fosse que sur scène.
Après plusieurs concerts à l'affiche desquels se
croisent les noms de Mahler ou Bruckner, c'est
une intégrale Beethoven qui est programmée
cette saison. Les neuf symphonies sont réparties
de septembre à juillet, avec comme apothéose
l'Ode à la joie sur la scène de Bastille, la veille
de la fête nationale. Ce mois-ci, l'Orchestre de
l'Opéra National de Paris et son directeur musical poseront leurs valises au Victoria Hall de
Genève dans un programme Beethoven. Le pianiste Nelson Freire interprètera le Concerto n°4,
suivi par la célébrissime 6e Symphonie dite
“Pastorale“.
Un rendez-vous à ne manquer sous aucun
prétexte.
David Verdier
Le 20 mai. Orchestre de l’Opéra National de Paris, dir.
Philippe Jordan (Beethoven). Victoria Hall à 20h (loc.
Service culturel Migros Genève)
Philippe Jordan
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Un ascenseur dessert maintenant tous les étages. Le hall accueille la
billetterie et une buvette, le sous-sol des vestiaires et des sanitaires.
Un deuxième foyer se trouve au deuxième étage, au-dessus de l’espace conservé pour le café restaurant et ses deux bars qui seront ouverts dès
le mois de septembre sept jours sur sept. Le tout entièrement rénové bien
sûr.
Dans l’espace d’accueil, les faux plafonds ont été retirés, mettant au
jour de magnifiques moulures.
genève
Le nouvel
Alhambra
L’Alhambra fait partie du patrimoine architectural
genevois. Construit entre 1918 et 1920, il fut à l’origine
appelé Théâtre cinématographique Omnia, dédié à l’art
et à la culture. Reconnu comme « la plus belle salle de
l’image animée de Suisse », il fut doté dès 1928 de la
première installation de cinéma sonore du pays.
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Sauvé de la démolition
qui le menaçait au profit d’un
parking ( !) en votation
populaire (1995), classé
monument historique en
1996, l’Alhambra renaît
aujourd’hui grâce à trois ans
d’importants travaux de
rénovation et après un long
processus de maturation
mené en concertation avec
les milieux culturels. Le
choix de l’architecte s’et
porté sur Jean-Daniel
Pasquettaz et le budget initial
n’a pas été dépassé
(25'264'940 francs).
La salle de spectacles de
cette nouvelle « maison de la
musique » offre 750 places
assises. Les balcons ont été
sécurisés, les loges latérales
du parterre réaménagées. Le
gradin central du premier
balcon a été reconstruit pour
augmenter la pente et améliorer la visibilité. Des décors peints de différentes périodes ont été découverts et conservés en partie.
Un plancher mobile assure la modularité du lieu, qui pourra prendre
trois configurations : une salle où le public assis se répartira entre le parterre et les deux balcons, une salle où une partie du parterre accueillera un
public debout, une fois les fauteuils montés sur rails glissés sous la scène
et une salle où le sol, monté au niveau de la scène, permettra de disposer
de tout l’espace, plateau compris. L’ensemble des installations scéniques
a été entièrement refait et adapté aux techniques les plus modernes. La
cabine de projection, elle, a été maintenue avec les projecteurs existants,
préservant ainsi la fonction de salle de cinéma. Elle a été équipée en vue
de recevoir d’éventuelles installations pour la diffusion numérique.
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L’enveloppe du bâtiment a été restaurée et la toiture isolée. Accolée à
l’arrière de l’édifice, une annexe comprenant des dépôts, des ateliers, les
loges et les bureaux administratifs a été construite. La façade est recouverte d’une peau métallique constituée de tôles perforées dont les motifs rappellent les moucharabiehs des oculi du plafond de la salle.
L’annexe est un bâtiment à haute performance énergétique.
Grâce à la plasticienne Carmen Perrin, le plafond incurvé à caissons
en stuc et les murs de la salle ont bénéficié d’un balayage métallique très
Alhambra, extérieur, photo P. Jordan
réussi, allant de l’or à l’anthracite en passant par l’aluminium et l’argent,
particulièrement favorable à la captation de la lumière. Le rideau rouge est
assorti aux fauteuils, dont le dossier est noir.
L’ouverture est prévue le 19 juin pour la Fête de la Musique. Nul
doute que les Genevois seront curieux de découvrir dès que possible leur
nouvel Alhambra : il vaut le déplacement !
Martine Duruz, d’après le dossier de presse
et la présentation de Rémy Pagani et Sami Kanaan
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portrait
Felicity Lott
La 5ème édition du Festival de Musique classique, jazz, créations
contemporaines, Les Athénéennes, aura lieu du 8 au 16 mai, Salle de
l'Athénée à Genève. Parmi les 80 artistes attendus, la présence de Felicity
Lott est à souligner : la célèbre cantatrice britannique interprétera le 14
mai des mélodies françaises ainsi que la 4ème de Mahler, pour soprano et
orchestre de chambre, dirigée par Gauthier Hermann et l'Ensemble Arties.
Faut-il aujourd'hui encore présenter Dame
Felicity Lott, l'une des plus admirables chanteuses de notre temps, dont la longévité vocale n'a
d'égal que l'amour pour la musique qui ne l'a
jamais abandonnée. Charme, musicalité, style et
distinction sont les maîtres-mots qui caractérisent
cette artiste. Si elle se fait désormais rare à l'opéra, pour lequel elle ne réserve que de brèves
apparitions pour le metteur en scène Laurent
Pelly (on l'a vue en Duchesse de Crackentorp
dans La Fille du régiment à la Bastille en 2012 et
elle sera dans le Roi Carotte à Lyon, Sorcière
Coloquinte, en décembre prochain), la soprano
continue de donner concerts et récitals à travers
le monde, ainsi que de nombreuses master classes. Née à Cheltenham en 1947, venue très tôt à
la musique, la jeune musicienne qui veut un
temps devenire traductrice, vient en France parfaire la langue du pays - qu'elle parle et chante,
comme l’allemand et l'italien, de façon exemplaire – après ses études de chant à la Royal
Academy of music.
D’un succès à l’autre
Son timbre fuselé à l'aigu rayonnant, ce ton
distingué et ce chic naturel qui ne l'a quitteront
plus, la conduisent sans tarder vers Mozart, compositeur idéal pour révéler toutes les facettes de
son talent : Pamina, La Comtesse, Fiordiligi,
Elvira lui ou-vrent les portes des plus grands
théâtres, tandis que Strauss lui permet d'accéder
bientôt à la notoriété. Glyndebourne lui offre tout
d'abord Octavian, mais le Chevalier laisse vite la
place à la Maréchale qui devient son rôle fétiche
et incontestablement son incarnation la plus
aboutie, avec la Comtesse Madeleine
(Capriccio), Arabella et Christine dans
Intermezzzo. Très appréciée chez Britten dont les
héroïnes douloureuses lui vont comme un gant
(Ellen Orford dans Peter Grimes, La
Gouvernante du Tour d'écrou), elle triomphe également dans The Rake's progress (Ann Trulove)
de Stravinsky, avant de faire revivre la Louise de
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Charpentier qu'elle chante en 1983 à Bruxelles
sous la houlette de Sylvain Cambreling (Erato).
Autre succès, celui qu'elle remporte en interprétant Blanche de la Force dans Dialogues des
Carmélites de Poulenc, dont l'enregistrement
parisien d'avril 1980 (TCE) demeure une référence absolue, se mesurant également à la virtuosité
haendelienne avec une étonnante Cleopatra dans
Giulio Cesare, chantant également à Londres,
Eva des Maîtres chanteurs de Wagner. Fidèle
cependant à ces deux auteurs de prédilection,
Mozart et Strauss, Lott devient rapidement une
récitaliste hors norme, prêtant sa science vocale,
ses connaissances stylistiques, son expressivité et
son humour ravageur à cet exercice délicat, apanage des grands.
Toujours heureuse de partager avec le public
son goût pour les mélodies les plus variées et d'établir un contact privilégié avec son auditoire, la
cantatrice n'a jamais éprouvé la moindre lassitude à voyager avec ces miniatures signées
Chausson, Fauré, Canteloube, Strauss,
Schumann, Schubert, ou Chabrier... Dotée d'un
solide sens de l'humour, Felicity Lott aura très
intelligemment mis à son répertoire Offenbach,
après s'être essayée à l'opérette viennoise avec
Die lustige Witwe de Lehar, renouvelant les interprétations de La belle Hélène et de La grande
Duchesse de Gerolstein (cd et dvd Virgin
Classics) jouées au Châtelet en 2001, 2003 et
2004, sous l'oeil attentif de Laurent Pelley et du
maestro Marc Minkowski, avant de tirer sa révérence scénique avec La voix humaine de Poulenc,
toujours avec Pelly à Lyon en 2007 (monologue
qu'elle avait gravé en 2001 avec Armin
Jordan/HM et qu'elle a enregistré pour la télévision anglaise récemment, avec accompagnement
au piano). Toujours active, on a pu l’entendre ces
dernières années chanter de mémorables Nuits
d'été de Berlioz à Paris au Musée d'Orsay, mais
surtout les Wesendonck-Lieder et une extraordinaire Mort d'Isolde de Wagner, accompagnés par
le Quatuor Schumann (AEON 2007). Ne vous
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Felcity Lott
privez pas de ce concert qui s'annonce déjà
comme le point culminant de ces Athénéennes.
François Lesueur
VENDREDI 8 MAI : Quartet !
- 20h00 : Sarah Nemtanu, violon. Miguel Da Silva, alto.
Edgar Moreau, violoncelle. Audrey Vigoureux, piano
(Chostakovitch: 2ème Trio / Fauré : Quatuor op.15)
- 22h00 : Jazz. Michel Benita 4tet.
SAMEDI 9 MAI : Transgression!
- 20h00 : Ciné-concert : Quatuor Bela (Janacek: 1er
Quatuor Sonate à Kreutzer / Chostakovitch: 7ème
Quatuor / Nicolas Bolens: La Ville Oblique, création sur
projection du film “un Chien Andalous”, Luis Buñuel.
- 22h00 : Jazz. Amazing Keystone Big Band. David
Enhco et John Boutellier, direction.
DIMANCHE 10 MAI : Confrontation !
- 19h00 : Clémentine Margaine et Céline Laly, voix,
Ensemble Pulcinella, Ophélie Gaillard, violoncelle,
Pierre Bleuse, direction (Ligeti: Kammerkonzert /
Pergolèse: Stabat Mater)
- 21h00 : Jazz. Grégoire Maret 4tet.
MARDI 12 MAI : Trio !
- 20h00 : Patrick Messina, clarinette, Nicolò Eugelmi,
alto, Fabrizio Chiovetta, piano (Mozart: Trio des Quilles
/ Schumann: Fantasiestuck / Kurtag: Trio)
- 22h00 : Jazz. Rusconi.
MERCREDI 13 MAI : Cantare !
- 20h00 : Création. Sur La Dune, recueil de chansons de
Valentin Peiry. Avec Mallika Hermand, voix, David
Brito, contrebasse, David Scrufari, électronique, Valentin
Peiry, piano, textes et compositions.
- 22h00 : Jazz. Stefano Bollani, piano solo
JEuDI 14 MAI : Extase !
- 20h00 : CARTE BLANCHE à DAME FELICITY LOTT.
Ensemble Arties. Gauthier Hermann, cello et direction
(Offenbach, Berlioz, Chausson: Mélodies Françaises /
Mahler: 4ème Symphonie)
VENDREDI 15 MAI : Sonare !
- 20h00 : Récital Schubert. David Fray, piano.
- 22h00 : Jazz. Marc Perrenoud Trio.
SAMEDI 16 MAI : Final Party !
- 20h00 : Concert Surprise.
- 22h00 : Léo Tardin, claviers. Black Cracker, slam,
Dominik Burkhalter, batterie &Garance & Lagardère
DJ-Set
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mettre en place un récital comme celui
d’Orsay ?
entretien
Véronique Gens
Loin de ces personnages fiévreux, malheureux, amoureux ou fièrement
drapés dans leur dignité, Véronique Gens est dans la vie quelqu'un de
franc et de directe qui aime de plus en plus aller là où on ne l'attend pas.
Si sa carrière lui a permis d'interpréter les grandes héroïnes baroques,
puis celles de Mozart, Gluck et Haendel, cette fervente mélodiste s'adonne
aujourd'hui à Verdi, à Poulenc et se prépare à prendre les traits d'une
certaine Duchesse de G.... Avant de la retrouver au Grand Théâtre à la
rentrée, elle sera au Victoria Hall le 21 mai, pour une surprenante Carte
Blanche proposée par Geneva Camerata. Retrouvons-là.
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Il y a quelques mois vous êtes sortie
de votre habituelle réserve en déclarant je
cite que : « Les Français n’aimaient pas la
musique française, ou alors seulement chantée par des Australiens ou des Coréens ! » et
d’ajouter que : « Vous n’étiez pas agressive
par nature, mais qu’il y avait des choses qui
vous énervaient ». Peut-on savoir quelles ont
été les réactions suite à ce cri du cœur, qui
n’est pas sans évoquer la position de Mireille
Delunsch qui a lancé sur sa page Face book
un vibrant appel à la mobilisation, pour sauver la musique classique en proposant un
« Classic Pride » ?
Véronique Gens : Ce n'est un secret pour personne et j'en ai assez de la langue de bois. Oui il
y a un problème avec les chanteurs français et
nous pouvons le constater tous les jours ! Tout
est parti de Munich où j'ai passé plusieurs mois,
lorsque j'ai appris qu'une nouvelle production
de Pelléas et Mélisande allait se faire sans un
seul chanteur français. Cela m'a vraiment agacée. Cet état de fait est vraiment dur à supporter,
car en France on ne cesse de répéter combien la
langue est difficile à chanter et nos voisins n'ont
même pas l'idée de faire appel à des chanteurs
pour qui cela ne pose pas de problème. Ce n'est
pas nouveau, tout le monde le sait, cela ne m'a
pas empêchée de faire carrière mais je trouve
vraiment regrettable que les Allemands nous
dédaignent pour interpréter notre répertoire.
Bon n'en parlons plus ! Vous savez lorsque j'ai
dit cela j'avais la tête sous l'eau, enchaînant trois
opéras en quelques semaines et je n'ai absolument pas su ce qu'avaient pu susciter mes propos. J'aurais pu aussi évoquer le fait que je ne
chante pour ainsi dire jamais à La Bastille où
l'on engage des artistes qui viennent souvent de
e
loin – sans doute pour des raisons économiques.
Passons à autre chose.
La perspective de chanter un plein
programme de mélodies à l’Auditorium du
musée d'Orsay le 26 mars, puis à Bordeaux
le 28 vous a-t-elle apaisée ?
Cela me fait bizarre de chanter à Paris, je n'y
suis pas habituée. Je suis également ravie de me
rendre à Bordeaux, car nous y donnerons un
programme différent et il est très agréable de
changer nos habitudes et de proposer des choses
amusantes, pour que le public réagisse. A Orsay
nous avons dû respecter un programme assez
strict et peu habituel puisqu'il débute avec des
œuvres du XVIIIème siècle et se poursuit par
des mélodies françaises. Susan Manoff et moi
venons d’ailleurs d'enregistrer un disque, enfin,
chez Outhere, un label belge et nous sommes
heureuses de nous sentir soutenues, c'est tout à
fait réconfortant. Il sortira à la rentrée et nous
donnerons un concert de promotion à la Salle
Gaveau. Voilà quelque chose d'enthousiasmant.
Hahn, Chausson et Duparc sont évidemment
présents puisqu'ils nous accompagnent depuis
longtemps. J'ai hâte d'entendre le premier montage, même si je tremble par avance car je
remarque tout et je sais que ces instants sont
épouvantables car tous les défauts, les aspérités,
les moindres scories sautent à mon oreille.
Susan Manoff est votre pianiste attitrée depuis plus de quinze ans, ce qui nous
autorise à parler d’un vrai duo. Il est toujours mystérieux de voir comment fonctionnent un chanteur et son accompagnateur et
d’imaginer ce qu’ils ressentent tout au long
d'un récital, quelle est la dose de préparation, d’improvisation. Pouvez-vous nous
dévoiler une part du travail effectué pour
n
t
r
e
En l'occurrence c'est assez compliqué car nous
avons dû revoir nos programmes pour répondre
à la demande du musée et il a nous a fallu retrouver un équilibre. Un récital doit être harmonieux, cohérent, éviter les ruptures trop vives,
respecter les univers. Celui-ci sera donc en deux
parties, l'une consacrée au XVIIIème, la seconde au XIXème. Comme toujours nous travaillons, nous discutons, nous cherchons mais
en nous amusant, car avec Susan la notion de
jeu n'est jamais loin ; après tant d'années, il nous
suffit de nous regarder et nous devinons immédiatement ce que désire, ou attend l'autre. Un
seul regard et tout est compris, c'est une vraie
complicité. Si nous devons aborder de nouveaux morceaux, nous faisons plus attention,
mais pour le reste, tout est évident. Nous savons
où nous devons aller : c'est un grand luxe.
Lorsque je collabore avec d'autres pianistes, les
choses sont un peu plus compliquées, je dois
faire des efforts particuliers, mettre plus d'énergie pour être claire dans mes respirations, mes
intentions. Mais je ne me sens jamais seule, surtout en compagnie de Susan, à aucun moment je
ne m’évade ou ne m'absente, car je sais qu'elle
est là et qu'elle me rattrapera ; je la sens tout le
temps, elle me sourit, elle est formidable.
Pour quelqu'un qui comme vous aime
depuis toujours le travail de troupe, à l’image de celui pratiqué pendant vos premières
années avec les Arts Flo, comment abordezvous celui vital pour vous, mais bien plus
solitaire, du récital. Considérez-vous cet
exercice comme un moment de pause entre
deux productions, et vous pèse-t-il ?
Mais non pas du tout, car lorsque je suis en récital, Susan est là à mes côtés toute la journée et
cela est très agréable. Je suis bien plus seule
lorsque je chante plusieurs opéras dans le même
théâtre comme cela a été le cas à Munich entre
novembre et janvier derniers. J'y ai chanté Les
Noces de Figaro, Don Giovanni et Falstaff et
me suis sentie bien seule car les chanteurs changeaient à chaque production et je ne me sentais
pas entourée : Munich est une maison fantastique, mais je me suis beaucoup ennuyée.
Vous avez la chance de participer à de
fréquentes résurrections comme à Versailles,
avec Herculanum de Félicien David et tout
récemment Cinq-Mars de Gounod.
Comment accueillez-vous ces propositions et
quelles satisfactions vous procure ce travail
de défricheur ? A ce titre avez-vous des projets en cours ?
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J'adore l'équipe du Palazetto Bru Zane, leur travail est considérable et ce qu'ils font est devenu
indispensable. Vous évoquez Cinq-Mars, quel
bel opéra, j’aime cette musique qui correspond
exactement à ce que j'ai envie de faire en ce
moment. Je peux vous avouer que nous avons
cinq projets en commun. Ils n'arrêtent pas. Il est
passionnant de faire revivre cette musique non
jouée depuis si longtemps, c'est un peu comme
avec le baroque, la démarche est similaire. En
juillet prochain je ferai partie d'une nouvelle
résurrection qui sera donnée à Montpellier avec
Radio France, La Jacquerie de Lalo : c'est une
œuvre magnifique. Il y aura Dante de Milhaud,
puis une Semele en 2018. J'aime ce répertoire et
ma voix centrale, proche du falcon correspond
parfaitement à ce répertoire oublié.
Si Mozart et Gluck tiennent toujours
une place de choix dans votre carrière, à côté
du grand répertoire romantique français,
interprété, je pourrai dire que la boucle est bouclée car lorsque j'ai passé mon bac musique, j'ai
travaillé l' « Air du Saule » qui m'avait bouleversé. Je ne connaissais pas l'ouvrage, mais je
m'étais dit que si je devenais un jour chanteuse,
j'aimerais chanter cet air. Je suis ravie et morte
de trouille bien entendu; car ce sera à l'Opéra de
Vienne en 2017. J'ai vraiment envie d'essayer,
car je sens qu'après il sera trop tard. J'aurais
peut-être dû accepter de le faire en Amérique du
sud, mais il est trop tard, je dois me lancer. J'ai
confiance en ce personnage qui donne l'impression de subir plus que d'agir et suis contente de
toute façon d'aborder cet opéra, car il va m'obliger à sortir de mon cadre habituel.
composer un personnage qui lui ressemble et je
ferai de même avec ma personnalité ; je suis
certaine qu'Olivier Py ne va pas me demander
de reproduire ce qu'il a construit avec Sophie,
que j'aurai des choses nouvelles à faire et qu'il
ne me dira pas comme cela m'est déjà arrivé de
regarder une vidéo et de me contenter de faire le
singe savant. Le fait que la distribution ait été en
grande partie renouvelée est également une
chance.
Après vos débuts à la Bastille en 2013,
dans le Don Giovanni mis en scène par
Haneke, vous serez bientôt Alceste à Garnier,
une partition que vous côtoyez depuis plusieurs années. Qu'est-ce qui vous rapproche
de ce rôle et que vous permet-il de mettre en valeur
que vous ne pouvez pas
avec d'autres ?
Oui il m'a déjà fait des propositions qui n'ont pu
se concrétiser pour le moment. Je sais qu'à
Madrid les problèmes d'argent l'ont contraint à
programmer plusieurs reprises, mais nos chemins vont à nouveau se croiser. Madrid est un
très beau lieu où j'ai souvent chanté à une
époque, un théâtre qui possède les loges les plus
confortables du monde. Et vous savez, il nous
arrive d'y passer parfois énormément de temps
(rires).
Vous savez que ce seront
mes débuts au Palais
Garnier, même si j'y ai chanté dans la fosse il y a longtemps pour un ballet... Il y a
tout dans cet opéra, où l’héroïne est contrainte de passer
par tous les stades, de la joie
au désespoir, de la culpabilité à l'espoir, c'est absolument
incroyable, difficile car
Alceste est tout le temps sur
scène, mais je l’adore, j’aime son courage, le fait qu'elle ne craigne rien et qu'elle
accepte de mourir pour sauver celui qu’elle aime. Par
les temps qui courent cette
attitude fait réfléchir.
Véronique Gens © MRibes and AVo Van Tao / VirginClassics
Verdi semblerait se développer puisque vous
devez aborder Otello, après Falstaff. une
chose est certaine, votre Desdemona n'aura
pas la voix de certains sopranos plus clairs et
plus légers qui ont peuplé les scènes.
Comment voyez-vous ce personnage et qu'avez-vous l'intention de faire passer de votre
personnalité ?
Cette production va
vous permettre de vous glisser à nouveau
dans l'univers d'Olivier Py, avec lequel vous
avez déjà travaillé sur Dialogues des
Carmélites au TCE et de succéder à Sophie
Koch. En général dans quel état d'esprit
êtes-vous lorsque vous devez vous mettre
dans les pas d'une artiste qui vous a précédée
et qui plus est lorsqu'il s'agit d'une collègue ?
Otello arrive en effet, le contrat est même signé.
Le rôle n'est pas très aigu, sauf le premier duo
qui me fait un peu peur, mais pas le reste, non ;
j'adore ce personnage et quand je l'aurai enfin
Nous sommes très différentes et le portrait que
je vais proposer ne sera pas celui de Sophie. Je
n'ai pas vu le spectacle, seulement quelques
images. Je sais par expérience que Sophie a dû
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Joan Matabosch a beaucoup fait
appel à vous lorsqu'il était aux commandes
du Liceu à Barcelone (Eva, Elvira, Burbero
di buon cuore, Clemenza...) ; aujourd’hui
qu'il est à Madrid vous a-t-il fait signe ?
un mot sur le concert Carte Blanche
que vous donnerez au Victoria Hall de
Genève en mai. Sur quels critères avez-vous
retenu Purcell, Gluck, Rameau, Gershwin et
Mozart ?
J’avais envie de proposer des airs dans lesquels
je ne suis pas totalement attendue ; pour aller
encore plus loin, le chef David Greilsammer
m'a proposé de chanter « The man I love » de
Gershwin et je dois vous avouer que je n'y
aurais jamais pensé. Comme la chose est amusante, j'ai accepté de jouer le jeu et de marier
Purcell à Gershwin. Il paraît que le public
adore. Nous verrons bien. A la rentrée prochaine je ferai partie de la nouvelle production de La
Belle Hélène d'Offenbach au Grand Théâtre, ce
qui me réjouit également. J'en parle depuis
longtemps et cela va enfin se produire.
Propos recueillis par François Lesueur
Le 21 mai. CONCERT PRESTIGE N°5. CARTE BLANCHE à
VéRONIQuE GENS, Geneva Camerata, dir. David
Greilsammer, Véronique Gens, soprano (Beethoven,
Purcell, Gluck, Rameau, Gershwin, Mozart). Victoria
Hall à 20h (billetterie : Fnac)
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CDs suisses en vrac
La crise ? ... Quelle crise ?...
Depuis quelques années, des voix alarmistes s'élèvent pour annoncer la fin programmée
du CD. Le streaming ainsi que d'autres méthodes moins honnêtes de se procurer de la
musique sans payer quoi que ce soit abondent
aujourd'hui et saturent un marché où artistes et
producteurs ne trouvent plus leur compte.
Pourtant, le rythme des nouvelles productions
ne baisse pas. Au contraire, aurait-on envie d'écrire en voyant ce qu'annoncent diverses petites
maisons suisses qui restent fidèles à leur politique de découverte de nouveaux talents...
Beatrice Berrut : Lux aeterna
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Bach et Escaich figurent au programme de
ce disque superbe gravé par la pianiste suisse
Beatrice Berrut, née à Genève en 1985; exigeant
pour la pianiste autant que pour l'auditeur, ce
document sonore mérite une place à part dans la
discothèque de tout amateur. Aucune facilité ici :
le programme est constitué de quelques transcriptions de pièces de Jean-Sébastien Bach par
Wilhelm Kempff, Alexander Siloti et Ferruccio
Busoni, ainsi que de trois études sur le mode
baroque de Thierry Escaich, un compositeur né
en 1965. La jeune pianiste suisse approche ces
ouvrages austères en aquarelliste sensible : si les
couleurs restent vives et les sonorités pleines
autant que vibrantes, le ton est résolument à la
réflexion, à la concentration, - à l'ascèse serait-on
tenté d'écrire tant la musique semble parfois se
réfugier entre les notes, notamment dans les pièces contemporaines. On fera peut-être le reproche à ce programme de ne pas laisser couler les
motifs mélodiques avec ce rien d'abandon qui
incite à la rêverie; tout paraît en effet construit
avec un souci constant de dominer le matériau
sonore pour éviter tout relâchement. Au terme de
ces septante-cinq minutes de musique, la relative
froideur du message musical laisse pourtant une
empreinte indélébile dans l'esprit de l'auditeur.
S'il y a peu de chances de voir tourner en boucle
ce CD sur votre platine, il y a également peu de
chances qu'il reste longtemps dans son emballage, car l'envie d'y revenir devient vite entêtante
(harmonia mundi)
Rafael Aguirre à la guitare. Les mélodies ici
réunies sont signées entre autres d'Enrique
Granados, Manuel de Falla (avec ses Sept
Chansons populaires espagnoles en plus d'un
thème tiré de l'opéra La vie brève) Gaspar
Cassadó, Egberto Gismonti, Astor Piazzolla,...
L'âpreté rythmique du guitariste sous-tend le jeu
fluide et virtuose de la violoncelliste dont les
notes aiguës évoquent à plusieurs endroits le
monde sonore du tango tel que le jouent les
accordéonistes dans les bals populaires. Une chaleur communicative se dégage de ces airs où les
frontières entre musique classique et mélopées
que l'on pourrait qualifier d'"ethniques" ont tendance à s'effacer. La virtuosité du guitariste est
par ailleurs tellement prenante et enveloppante
qu'elle fait oublier le rôle premier de cet instrument censé parfois remplacer un orchestre tout
entier, comme dans les pages de Granados par
exemple... (Ars production)
Joachim Carr joue Schumann,
Brahms et Berg
Lauréat du Concours international de piano
Edvard Grieg, ce jeune pianiste norvégien propose ici les Davidssbündlertänze de Schumann, les
Variations sur un thème original de Brahms Op.
2 No 1, la Sonate no 1 d'Alban Berg et le
Liebeslied de Schumann dans sa transcription par
Liszt. Dans ce programme exigeant, alternant les
pages de Berg aux sonorités âpres avec les mélodies aux rythmes fantasques et parfois primesautiers de Schumann, Joachim Carr fait montre
d'une virtuosité qui ne dégénère jamais en pur
exercice de style. A la fois flamboyant et super-
Nurit Stark & Cedric Pescia
jouent Schumann
La 2e Sonate pour violon et piano de
Schumann ouvre avec panache ce récital proposé
par Nurit Stark et Cedric Pescia. La violoniste ne
craint pas de solliciter son instrument à l'extrême
avec une recherche de sons tendus, extirpés des
cordes avec violence, donnant parfois l'impression d'ajouter encore de l'emphase à une musique
qui n'en manque pourtant pas : le jeu se veut
extraverti, puissant, rugueux parfois, comme s'il
fallait un contrepoint affirmé au jeu plus fluide et
souple du pianiste, très en retrait dans cette page.
L'œuvre gagne ainsi certainement en relief, mais
sa robustesse et son dynamisme se trouvent souvent mis en avant au détriment, par exemple, de
la linéarité limpide du 3e mouvement, qui paraît
moins simple que ne le suggère son appellation
sur la partition ('leise, einfach'). Les trois romances de Clara Schumann semblent bien légères de
ton et séduisent avant tout par leur charme mélodique alors que les Märchenbilder pour alto et
piano donnent à découvrir un aspect moins tendu
et moins grandiose du génie de Robert Schuman
dans une interprétation nettement plus équilibrée.
(Claves)
Louis Schwitzgebel : concertos
de piano no 1 & 2 de Beethoven
Le pianiste genevois avait déjà eu l'occasion
de présenter sa version brillantissime du langage
de Beethoven dans le cadre du Festival de
Verbier où il participait à une intégrale en direct
des concertos de piano du grand compositeur
allemand. Ici, dans les Concertos no 1 et 2, il
renouvelle son exploit: jouer vite et avec panache
deux pages qu'il sait pourtant ne pas rendre précipitées tant son interprétation respire. De plus, le
toucher reste d'une incroyable sensibilité, comme
le démontre puissamment l'entrée du piano après
l'introduction orchestrale du 1er mouvement du
Nadège Rochat & Rafael
Aguirre : La vida breve
Sous se titre évoquant une partition célébrissime de Manuel de Falla se cache un bouquet de
transcriptions qu'exécute avec panache le duo
que forment Nadège Rochat au violoncelle et
a
be de différenciation, son toucher fait vibrer d'un
énergie nouvelles ces pages presque galvaudées
que sont le 'zart und singend' (no 14) ou le 'ungeduldig' (No 4) des danses schumaniennes, dotées
ici d'une vitalité comme régénérée sous les doigts
de ce pianiste exigeant. Dans les Variations de
Brahms, le thème sous-jacent irrigue chaque
séquence avec un naturel et une variété de tons
rendant ses apparitions à la fois toujours plus
séduisantes et distantes, tandis que la courte
pièce de Liszt met un point final idéalement plus
léger après les tensions générées par l'âpreté du
langage qu'adopte Berg dans sa première sonate.
(Claves)
Louis Schwizgebel © Caroline Doutre
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Dialogue : William Byrd
vs Arvo Pärt
Concerto no 2. Le pianiste ne craint pas par
endroit de souligner l'espèce d'hommage indirect
que Beethoven rend à Mozart avec ses notes perlées qui entrent avec subtilité en dialogue avec le
jeu limpide des instrumentistes hors pair du
London Philharmonic Orchestra, que dirige ici
un Thierry Fischer toujours soucieux de ménager
assez d'espace au soliste pour que respirent les
échanges entre soliste et masse orchestrale. S'il
paraît difficile aujourd'hui de marquer d'une
empreinte durable l'interprétation de ces deux
pièces si souvent enregistrées, il ne fait pourtant
aucun doute que ce disque entre dans la catégorie
des meilleures gravures récentes... (Claves)
Excellente idée que celle de faire se répondre les entrelacs complexes de la polyphonie
chère au madrigaliste anglais William Byrd avec
les entrelacs plus éthérées, presque désincarnées
des courtes pièces d'Arvo Pärt! L'ensemble vocal
de poche de Genève se montre très à l'aise dans
ce répertoire qui demande de chaque voix une
précision d'intonation parfaite autant qu'un sens
de la respiration et des rythmes permettant à l'interprétation de vivre intensément sans sombrer
dans le formalisme. De curieux intermèdes réservés à des cloches médiévales sonnées par
Margaret Harmer sont censées permettre à la
musique et à l'auditeur de respirer; mais elle peuvent aussi agacer car la longueur de leurs interventions (plus de rois minutes chaque fois)
paraît, à écoutes répétées, bien artificielle.
(Claves)
Mozart et Stravinsky
N'était le programme plutôt malvenu de ce
CD (qui a envie d'entendre deux sonates de
Mozart entrecoupée d'un Divertissement de
Stravinsky ?), l'acheteur potentiel de ce CD n'a
que des motifs de se réjouir tant la qualité de ces
interprétations justifie amplement l'investissement consenti. Le jeu de la violoniste Esther
Hoppe dans les Sonates pour violon et piano K
296 et 545 de Mozart est à la fois racé, élégant,
précis et superbement tonique. Pas de préciosité
ni d'alanguissements inutiles, pas de fioritures
aux formes gracieuses et graciles mais une ligne
mélodique d'une précision et d'une éloquence
admirables. Même si le jeu de la soliste paraît
quelque fois en retrait par rapport à la formidable
faconde du jeu du pianiste, l'on est rapidement
conquis par une telle vitalité et une absence
réjouissante de recherche d'effets. La spontanéité
semble d'ailleurs le maître mot de cette approche
et Mozart gagne beaucoup à perdre cette gracilité dont on l'affuble trop souvent dans ces œuvres,
notamment dans la première des deux. Le
Divertimento de Stravinsky, construit sur des thèmes de son ballet Le baiser et la fée, écrit en
hommage à Tchaïkovski, montre une soliste légèrement moins à l'aise: dans les deux mouvements
extrêmes, les traits de l'instrumentiste ne sont pas
aussi incisifs qu'il le faudrait, le jeu reste en
retrait au point que l'expression paraît retenue. Le
caractère dansant du Scherzo ou les rythmes soutenus des danses suisses du 2e mouvement sont
par contre nettement plus convaincants. Dans
toutes ces pièces, le pianiste Alasdair Beatson se
profile comme un accompagnateur soucieux de
maintenir l'urgence du discours sans capter indûment l'attention de l'auditeur. (Claves)
un album russe
Esther Hoppe
leurs études de perfectionnement à la Julliard
School de New York et forment depuis leur premier concert américain en 1995 un duo qui se
produit régulièrement dans le monde entier. Dans
ce programme russe se côtoient des sonates de
Prokofiev (l'op.119), de Chostakovitch (l'op.40)
et de Schnittke (la sonate no 1, de 1978). L'unité
interprétative est impressionnante : le violoncelle, enregistré de très près, possède une volubilité
qui rend immédiatement sensible les dessins
complexes de ces trois oeuvres. Même si ces trois
partitions sont écrites dans une tonalité expressive fort différente, elles s'apparentent pourtant
dans leur désir de tester jusqu'à leurs limites les
possibilités de l'expérimentation harmonique.
C'est ici Prokofiev qui s'avère le plus facile d'accès tant le chant ample de l'instrument soliste
donne du corps à ces courts motifs dont la facture torturée porte les traces des événements qui
ont ébranlé l'Europe au milieu du siècle passé
(l'oeuvre date de 1949). L'ouvrage de
Chostakovitch, pourtant antérieur (il date de
1934) paraît plus aride, comme distancié alors
que les trois mouvements signés d'Alfred
Schnittke se caractérisent par une rhétorique sans
concession où les deux voix semblent cheminer
de concert plutôt que de former un véritable duo.
Le piano de Massimiano Mainolfi, toujours très
présent sans s'imposer excessivement, trouve
dans cette dernière pièce l'occasion de commenter avec une fourchette de nuances d'une ampleur
sonore inattendue le chant plus ouvertement intériorisé du violoncelle. (Claves)
Le violoncelliste Mattia Zappa et le pianiste
Massimiliano Mainolfi se sont connus pendant
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Berlioz
par le Philharmonia Zurich
Ce disque réussit l'exploit d'être à la fois
passionnant et ... inutile. Les grandes versions de
la Symphonie fantastique ne manquent pas et il
faut avoir quelque chose d'original à proposer
pour justifier une nouvelle gravure de ces pages
rabâchées. Ce CD enthousiasmera d'abord les
abonnés de l'orchestre de l'Opéra zurichois, car
cet ensemble se montre d'une virtuosité éblouissante dans ces cinq mouvements et rappelle qu'en
quelques années, ce deuxième ensemble symphonique de la métropole suisse-allemande est
devenu l'égal, pour le moins, du plus fameux
ensemble de la Tonhalle. Chef attitré de cette formation, le chef italien Fabio Luisi prouve une
fois de plus qu'il sait animer un discours symphonique sans en bouleverser les données essentielles, sans chercher à 'faire autrement' que ses
confrères pour le plaisir de surprendre l'auditeur.
Mais une fois admis que cette version est parfaitement digne de figurer dans toute discothèque,
rien ne justifie qu'on se la procure sans tarder : il
en existe de plus brillantes, de plus structurées,
de plus explosives, de plus ouvertement romantiques dans la démesure, - bref : il n'est pas une
conception qui n'ait déjà été documentée à satiété dans le vaste catalogue de CDs disponibles.
Une nouvelle gravure de Lelio, voire de l'intégrale de Roméo et Juliette eût été préférable si les
commanditaires de ce disque voulaient avant tout
prouver que cet orchestre peut légitimement prétendre se confronter aux plus brillants de ses
concurrents. (philharmonia records)
Eric Pousaz
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lucerne
Festival en été
Du 14 août au 15 septembre 2015 aura lieu à Lucerne un des plus grands
festivals de musique d’Europe qui unit qualité et éclectisme. Effectivement
il propose ce qui se fait de mieux dans tous les domaines que ce soit de la
musique d’aujourd’hui, d’hier ou d’avant-hier…
Grands orchestres
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Les quatre plus grands orchestres d’Europe
seront au rendez-vous : le Lucerne Festival
Orchestra ouvrira les festivités avec Haydn et
Mahler, à la baguette Bernard Haitink et Andris
Nelsons ; comme de coutume c’est l’Orchestre
philharmonique de Vienne qui clôturera le festival avec Haydn, Wagner, Brahms et Elgar, à la
baguette Semyon Bychkof et Simon Rattle. Ce
dernier dirigera également son orchestre, le
Philharmonique de Berlin le 1er septembre, avec
Britten et Chostakovitch. Christian Thielemann
dirigera quant à lui la Staatskapelle de Dresde les
7 et 8 septembre, avec Strauss, Beethoven et
Bruckner. Au piano, Yefim Bronfman.
symphonique de Boston et l’Orchestre symphonique de San Francisco. Le premier, dirigé par
Andris Nelsons, interprétera fin août Haydn,
Dean et Strauss lors d’un premier concert et
Strauss et Chostakovitch le lendemain. Au violoncelle, Yo-yo Ma. Le deuxième, dirigé par
Michael Tilson Thomas interprétera Schönberg,
Adams et Beethoven le 9 et Ives Bartók et
Mahler le 11 septembre. Au piano, Yuja Wang.
Yuri Temirkanov dirigera l’Orchestre symphonique de Saint-Pétersbourg avec deux programmes entièrement russes les 3 et 4 septembre
(Tchaïkovski, Rachmaninov, Chostakovitch,
Rymski-Korsakov et Stavinski). Au piano :
Nikolai Lugansky.
Parmi les autres orchestres invités, notons
l’Orchestre des jeunes Gustav Mahler,
l’Orchestre symphonique de la SWR BadenBaden et Fribourg en Br. et le Mahler Chamber
Orchestra. Maria Joao Pires jouera le sublime
concerto Köchel 488 accompagnée par
l’Orchestre de chambre d’Europe. La violoniste
Isabelle Faust, l’artiste étoile, participera à six
concerts et jouera entre autre L’Histoire du
Soldat (le 15 août), Kurtág (le 12 septembre)
ainsi que les concertos de Mozart (le 25 août), de
Mendelssohn (le 28 août) et de Szymanowsky (le
6 septembre).
Musique d’aujourd’hui
Yefim Bronfman © Dario Acosta
Certains orchestres viendront de loin
comme l’Orchestre Divan de Daniel Barenboïm
qui interprétera Debussy, Boulez et Tchaïkovski
le 16 août et Wagner, Beethoven et Schönberg le
lendemain. L’Orchestre philharmonique d’Israël
dirigé par Zubin Mehta jouera Strauss,
Schönberg et Tchaïkovski le 29 août. Deux phalanges viendront des Etats-Unis : l’Orchestre
a
Le Festival d’été abritera comme chaque
année une académie de musique contemporaine.
130 jeunes musiciens du monde entier seront
réunis pour étudier et pratiquer la musique des
XXe et XXIe siècles sous l’égide de l’Ensemble
intercontemporain. Toute la journée du 23 août
sera consacrée à Pierre Boulez, le fondateur et
directeur artistique de l’académie, qui fête ses
quatre-vingt-dix ans cette année. Pas moins de
sept concerts se suivront de 13h30 à tard le soir,
avec des œuvres du célèbre compositeur français
comme Notations, des œuvres de Berg et de
nombreuses créations comme celles de Kurtág,
Holliger et Rihm. À la baguette Matthias
Pintscher et Julien Leroy.
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Les cours et les concerts de l’académie
continueront et culmineront dans deux concerts
de l’Orchestre de l’académie du Lucerne Festival
les 5 et 6 septembre avec une création du compositeur américain Tod Machover, « compositeur
en résidence » et une belle soirée consacrée à
Bartok, Szymanowsky et Varèse dirigée par
Pablo Heras-Casado. Autre invité, le Suisse Jürg
Wyttenbach, compositeur atypique, fera l’objet
de quatre concerts.
Isabelle Faust © Detlev Schneider
Musique ancienne
Les programmes de musique ancienne sont
toujours des perles au sein du Festival : le 16
août, Isabelle Faust et Kristian Bezuidenhout
(clavecin) interpréteront Bach, Froberger et
Biber ; le 30 août, Meret Lüthi et l’ensemble Les
passions de l’âme se livreront à des farces joyeuses baroques ; le 5 septembre, le festival
accueillera William Christie et Les Arts florissants qui présenteront divers œuvres de compositeurs baroques et classiques ; le 6 septembre,
Rinaldo Alessandrini et le Concerto italiano
interpréteront une comédie de Banchieri et des
œuvres de Monteverdi.
Le thème du Lucerne Festival de 2015 est
l’humour, ce qui ne peut être mieux représenté
que par le Falstaff de Verdi. Il sera donné en version de concert par l’Orchestre symphonique de
Bamberg avec Jonathan Nott à la direction et
Ambrogio Maestri dans le rôle-titre.
Emmanuèle Rüegger
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Lucerne Festival à Pâques
Un concert a fait fureur lors du Festival
avant Pâques, celui de Rameau dirigé par un chef
charismatique, Teodor Currentzis. Commençant
dans l’obscurité totale, il était libéré du carcan
habituel des concerts classiques. Les musiciens
étaient debout et jouaient avec tout leur corps,
frappant des pieds et sautillant même quand la
musique s’y prêtait, ce qui est fréquent avec
Rameau. Teodor Currentzis, la quarantaine, élancé, dirige de façon expressive, bondissant ou
s’accroupissant à volonté. Quand les musiciens
n’avaient pas besoin de lui, il s’asseyait sur une
marche de la scène pour les écouter.
La musique de Rameau, un patchwork formé
des ouvertures et autres extraits des opéras du
compositeur français, gagnait au change, vivante, dansante, légère. L’Entrée des Sauvages n’a
pas manqué, lors de laquelle Currentzis s’est faufilé dans l’orchestre en jouant de la timbale.Ce
chef atypique, grec mais formé à SaintPétersbourg, dirigeait son propre orchestre, le
Musica Aeterna, installé à l’Opéra national de
Perm.
Changement
radical le lendemain
avec la Messe en si
mineur de Bach. Cette
œuvre dont la genèse
s’étend sur de longues
années et achevée peu
avant la mort de Bach
reste un mystère.
Composée en latin,
alors que Luther prônait l’usage de
l’Allemand, et comprenant des parties
absentes de la messe
Teodor Currentzis à la tête de l’Ensemble Musica Aeterna
protestante, elle fut
© P. Ketterer / Lucerne Festival
longtemps appelée
« grosse catholische Messe » (sic) et c’est l’œuv- lière pour le Credo qui déployait une palette d’ére la plus jouée du Kantor de Leipzig.
motions : joie pudique (Et incarnatus est), saisisL’interprétation qu’en ont donné les English sement (Crucifixus) et liesse (Et resurrexit).
Baroque Soloists, le Monteverdi Choir et les
Emmanuèle Rüegger
solistes dirigés par John Eliot Gardiner ont subjugué l’auditoire. Autant on avait dansé avec
Rameau, autant on a plongé dans les profondeurs
bibliques avec Bach. Avec une mention particu-
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Théâtre des Marionnettes de Genève
MAI
JE 7 – LE MENTEUR de Goldoni Comédie
ME 13 – A LA FOLIE FEYDEAU d’après Feydeau Comédie
RIFIFI RUE RODO
Adultes, ados
19 mai au 7 juin 2015
Petits crimes entre amis au fil
d’une déambulation marionnettique
et policière.
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g
es
nnett
mario
Rue Rodo 3 – Genève • 022 807 31 07 • www.marionnettes.ch
e x p o s i t i o n s
ment est bien sûr évident. Dans chacune de ses
installations se retrouve une élaboration
manuelle lentement amenée à instaurer une
balance entre sa conception et son geste artistique.
musée des beaux-arts, le locle : sandrine pelletier
Tout sauf pacifique…
Avec Only the Ocean is Pacific, Sandrine Pelletier présente une première
exposition monographique au Locle. La plasticienne joue le paradoxe et donne
libre cours à son univers empreint d'angoisse dans une immense fresque
réalisée au fusain. A cette vision sous-marine, elle confronte deux installations
où se mêlent le verre et le bois calciné. On y découvre sa maîtrise de l'espace
et une sensibilité sans détour intellectuel.
Plusieurs fois récompensée, notamment
l'an dernier par les prix Irène Reymond et la
section Arts plastique du Canton de Vaud,
Sandrine Pelletier a été invitée par le Musée des
beaux-arts du Locle à investir le rez-de-chaussée et le haut de l'institution. Les deux autres
niveaux étant réservés à une exposition hommage consacrée aux premières photographies de
Henri Cartier-Bresson du début des années 30.
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Inspiration
C'est une peur, une angoisse face à l'eau et
aux profondeurs abyssales, qui a inspiré les trois
installations de l'artiste vaudoise. La démesure
de ses craintes s'exprime d'abord avec éclat sur
une impressionnante fresque murale d'une vingtaine de mètres. Dessiné au fusain et couvrant
l'entière hauteur, un paysage marin, à fleur de
ciel, déploie ses reliefs noirs dans une eau
insondable modulée par les stries du soleil.
Éclairé depuis l'extérieur par les grandes baies
vitrées du musée, la vision se transforme en
fonction des lumières du jour et de la nuit. Dans
cette immensité oppressante, les détails se devinent plus qu'ils ne se voient. On repère de mystérieux récifs, une raie manta, des modulations
abstraites et fantomatiques, étonnamment une
main d'enfant… c'est un monde à la fois irréel,
fascinant et cauchemardesque que nous livre
l'artiste.
Sandrine Pelletier ne s'est pas appuyée sur
une projection pour réaliser l'ensemble, elle a
travaillé directement sur le mur à partir d'une
photographie et a improvisé en assimilant
autant les imperfections du mur que ses propres
repentirs. Une invention originale pour une
œuvre éphémère, puisque celle-ci sera effacée à
la fin de l'exposition. Mais le processus de l'œuvre répond à son goût du souvenir, ou plutôt du
commentaire qui accompagne le souvenir, un
peu comme une histoire fabuleuse qu'on se
raconterait. Le besoin de s'investir physique-
Paradoxe
L'apprentissage des techniques tient donc
une place toute particulière dans la démarche de
cette jeune femme de 38 ans formée à la scénographie et au design. Dès qu'elle le peut, elle
adapte un nouveau savoir à ses œuvres. C'est le
cas de l'installation qui fait face au mural.
Constituée de verre et de bois calciné, elle
évoque des flaques d'eau et des déchets charriés
par l'océan. Paradoxe subtil du feu et de l'eau,
de la noirceur et la transparence. C'est dans un
atelier verrier de Nantes qu'elle expérimente la
pâte de verre qui est utilisée ici comme des coulures dont les surfaces plissées laisse supposer
un corps à corps avec la masse en fusion.
Le bois se retrouve dans la pièce installée
en haut du musée, sous la toiture. La construction est un enchevêtrement de poutres calcinées.
Entre architecture et sculpture, l'occupation de
l'espace est particulièrement réussie. Il y a l'odeur, les variations de l'énorme structure qui
s'appréhende uniquement en se déplaçant.
Placée entre deux chaudières, l'évocation de la
chaleur ou du feu est très présente. Les surfaces
charbonnées et brillantes se jouent du halo des
spot lumineux placés en contrebas.
L'assemblage est dynamique, des pieux s'élèvent verticalement à différentes hauteurs, leurs
pointes déchirées rappellent les souffrances
subies durant un incendie, comme les traces d'une lutte. A cet élan vertical répondent des tasseaux obliques qui nous ferment toute traversée de l'ensemble. Seuls
les appuis horizontaux placés au sol affirme la stabilité de l'ensemble. Transposé
dans le thème de l'exposition, nous pourrions aussi imaginer une métaphore du
mouvement des vagues, les hauteurs différentes ne seraient-elles pas les marques
d'un Océan déchaîné?
Nadia El Beblawi
Musée des beaux-arts du Locle. Jusqu’au 31 mai.
Dans le même musée, et jusqu’au 31 mai également, le “Perspectives jurasiennes“ de Lermite, et
les “Premières photographies“ de Henri CartierBresson.
Sandrine Pelletier, «Composition n3» 2015. Credit photo Pierre Bohrer
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t
é
expos itions
Surréalistes et les Constructivistes, même s'il
connaissait parfaitement les créations de ses
contemporains – Figure à corde et Trois pointes,
de la fin des années trente, sont à cet égard parlantes. Mais Moore était surtout persuadé que la
création était d'abord un exercice libre.
zentrum paul klee, berne
Henry Moore
Il aura fallu 25 ans pour que la Suisse organise enfin une rétrospective
consacrée à l'un des plus importants sculpteurs anglais du 20ème siècle. Issue
d'une collaboration avec la Tate Britain et le British Council de Londres, le
Zentrum Paul Klee de Berne a réuni 28 sculptures et 42 dessins.
L'immense popularité du Britannique, ravivée par la fameuse rétrospective de la Tate
Britain en 2010, ne se dément pas. Et ce malgré
des critiques, soulevées déjà de son vivant, mettant en cause sa grande productivité et la surabondance de sa présence artistique. Il faut dire
qu'en 60 ans de carrière, Henry
Moore (1898-1986) a su assoir sa
notoriété. Une renommée due aussi
à l'originalité et à la modernité radicale de son œuvre qui porte indéniablement une signature.
La présentation thématique et
chronologique du ZPK n'est pas
rigoureusement linéaire et offre par
les qualités de son lieu une visite
totalement ouverte. L'ensemble ne
met pas en avant le mythe, mais rend
hommage à un travail qui s'est cherché dans les affres de la première
moitié du 20ème siècle. Loin des
clichés, l'exposition montre une
démarche forgée à l'écoute de la
nature, dans la fascination des arts
primitifs et sous le choc de deux
guerres mondiales.
tions en dehors de toute ressemblance extérieure et cherchera ainsi obstinément une analogie
aux formes naturelles. C'est donc dans les
années trente que Moore commence une collection d’ossements, de coquillages et de galets
pour observer des principes formels et ryth-
Figure allongée
Cette liberté va nourrir en particulier son
thème de prédilection, la figure allongée.
Inspiré par la statuaire de l'ancien Mexique, il
sera attiré par la singulière posture du corps
couché, non pas sur le côté, mais sur le dos avec
la tête droite. A cette gestuelle quelque peu tendue, Moore associe ses inventions biomorphes
et découvre de nouvelles façons de penser une
sculpture. D'un seul tenant ou fragmentée, ces
figures allongées offrent une grande
variété plastique et seront progressivement associées au paysage. Car
trouver un équilibre avec l'alentour
sera essentiel pour l'artiste anglais.
Du reste ses nombreux mandats pour
des sculptures en extérieur susciteront
un réel engouement auprès du public.
Genève en possède un très bel exemple sur la Promenade de l'observatoire, face au Musée d'art et d'histoire.
L'étonnement de cette exposition
est probablement de constater que le
sculpteur est un inlassable dessinateur. Toujours dans la problématique
de la sculpture, il trace les contours de
ses projets, les colore. Ce ne sont pas
des esquisses, mais des lithogravures
dont la plupart ne seront jamais réalisées en trois dimensions. Quand il
souhaitait réaliser la sculpture, dès
Au bord de l’abstraction
Dès ses premières œuvres,
1960, il passe par une maquette. Les
Moore cherche “la vérité du matégravures constituent en fait des œuvres autonomes et on en compte plus
riau“ et rejette le modelage acadéde 700 dans son Corpus. C'est du
mique en faveur de la taille directe.
Henry Moore (1898 - 1986) «Mère et enfant», 1953 bronze sur base en bois
53 x 27 x 34,5 cm. Tate: Presented by the Friends of the Tate Gallery 1960
reste en réalisant une série de dessins
Il sculpte indifféremment la pierre,
© Tate, London 2015
sur l'enfermement dans une station de
le granit, l'ardoise ou l'albâtre, qu'il
estimera pourtant trop plaisant pour mettre véri- miques de la nature qui l'inspireront ensuite métro où il se trouvait, lors du bombardement
tablement en valeur les formes. Avec d'autres dans sa sculpture. L'étude du paysage, des pro- de Londres en 1940, que sa popularité grimpa.
artistes de son époque, il revisite certains motifs cessus naturels de métamorphose, érosion et Mais la lithogravure sera surtout l'expression de
classiques à travers la découverte de l'art non transformation, se traduisent magnifiquement l'artiste vieillissant qui rêve sur papier toutes les
européen. Au British Museum, il admire en par- dans ses bronzes par des stries, des griffures, sculptures qu'il aurait pu encore réaliser.
ticulier l'art précolombien et s'en inspirera dans des arrondis, des nuances de tons et bien sûr des
Nadia El Beblawi
les années vingt pour inventer des figures, des trouées.
L'inspiration de la nature le mènera au bord
masques et des têtes aux formes simplifiées et
claires dont quelques exemplaires sont exposés. de l'abstraction. Des audaces formelles qu'il a Centre Paul Klee (Monument im Fruchtland 3).
Toute sa vie, la figure humaine sera son toujours refusé de cataloguer. Il ne participera à Jusqu’au 25 mai.
centre d'intérêt. Il veut inventer des représenta- aucun débat artistique, notamment entre les
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t
é
67
expos itions
en
FRANCE Giverny
Annemasse
Villa du Parc : Le monde entier
l
jusqu'à aujourd'hui. Jusqu’au 30
mai.
Beauvais
Galerie nationale de la tapisserie:
l
Amour. Tours & Détours. Du 30 mai
au 16 août.
Calais
Cité internationale de la denl
telle et de la mode : Balenciaga,
magicien de la dentelle. Jusqu’au
31 août.
Cassel
Musée de Flandre : La Flandre
l
et la mer - de Pieter l’Ancien à Jan
Brueghel de Velours. Jusqu’au 12
juillet
Enghien
Centre des Arts : Rouge, vert,
l
68
bleu, blanc - Rencontre entre
l’espace, la lumière et le mouvement. Jusqu’au 28 juin
Evian
Palais Lumière : Jacques-Emile
l
Blanche. Peintre, ecrivain, homme
du monde. Du 7 mai au 6 sept.
Musée des impressionnismes :
Degas, un peintre impressionniste?
Jusqu’au 19 juillet.
l
Grenoble
Musée de Grenoble : De
l
Picasso à Warhol - Une décennie
d'enrichissement des collections.
Du 7 mai au 30 août 2015.
Le CateauCambrésis
Musée Matisse : Geneviève
l
Claisse. Jusqu’au 20 septembre
Lens
Le Louvre : D’Or et d’ivoire l
relations artistiques entre Paris et
la Toscane, 2e moitié du 13e s. Du
27 mai au 28 septembre.
Lille
LaM : Aloïse Corbaz en constell
lation. Jusqu’au 10 mai
Lyon
Musée d'Art Contemporain :
l
Antoine Catala. Jusqu’au 12 juillet
Musée des confluences : Les
résors d’Emile Guimet & Dans la
chambre des merveilles. Jusqu’au
26 juillet A la Conquête du pôle
Sud. Jusqu’au 28 juin.
l
franc e
Marseille
St-Tropez
MuCEM : Lieux saints partagés.
L’Annonciade : Les 60 ans du
l
l
Jusqu‘au 31 août.
Martigues
Musée Ziem : Vlaminck, Lalique,
l
Picasso... dix années de donations
et d’acquisitions. Jusqu’au 4 mai
Metz
Centre Pompidou-Metz
musée. Hommage aux donateurs.
Jusqu’au 1er juin.
Strasbourg
Musée d'Art Moderne et
l
Contemporain : Jusepe de Ribera à
Rome, le premier Apostolado.
Jusqu’au 31 mai.
:
l
Rétrospective Tania Mouraud.
Jusqu’au 5 octobre
Toulon
Hôtel des Arts : Expressions
l
Wingen
Musée Lalique : 1715 - 2015 : les
Meudon
Musée Rodin : Robert Doisneau
(1912-1994). Sculpteurs et sculptures. Jusqu’au 19 novembre
Nice
Musée national Marc Chagall :
l
méditerranéennes - de la poésieà
l’engagement. Du 23 mai au 14 juin
l
300 ans du Hochberg. Jusqu’au 1er
novembre
AILLEuRS
l
Marc Chagall, œuvres tissées.
Jusqu’au 22 juin
Amsterdam
Rodez
Rijksmuseum : Rembrandt - les
Espace d’exposition tempol
l
raire du Musée Soulages :
Claude Leveque, Le Bleu de l’œil.
Jusqu’au 28 septembre
Rouen
Musée dest beaux-arts : Trésors
l
de Sienne. Aux origines de la
Renaissance. Jusqu’au 17 août.
années de plénitude. Jusqu’au 17
mai.
Bilbao
Musée Guggenheim : Niki de
l
Saint Phalle. Jusqu’au 11 juin.
Brescia
Musée de Sainte Julie : Brixia
l
Palais Lumière, Evian
Jacques-Émile Blanche (1861-1942)
Peintre, écrivain, homme du monde
Dans le cadre d’un projet hors-les-murs, le musée des Beaux-Arts de Rouen redonne vie à
son fonds d’œuvres du peintre Jacques-émile Blanche (1861-1942), en présentant au Palais
Lumière une exposition monographique de cet artiste qui fut « peintre, écrivain, homme du
monde ».
Reposant principalement sur le fonds riche de plus de cent quarante œuvres provenant de
la donation de l’artiste dans les années 1920-1930, l’exposition compte aussi des œuvres
majeures provenant principalement de collections publiques françaises. Des prêts exceptionnels du musée d’Orsay (Portrait de Marcel Proust), du musée de Grenoble (Portrait en pied de
Jean Cocteau), de la BNF, du musée du Petit Palais et du musée de la Vie romantique ont été
accordés pour cet événement. Des œuvres inédites de Blanche seront également visibles grâce
aux prêts de collectionneurs privés.
Cette première grande rétrospective consacrée à l’artiste depuis l’exposition de 19971998 au musée des Beaux-Arts de Rouen vient enrichir les thématiques abordées par les expositions récentes de la Fondation Pierre Bergé-Yves Saint Laurent et du Château-musée de
Dieppe en 2012- 2013.
L’exposition du Palais Lumière propose d’évoquer la carrière de Jacques-émile Blanche
dans sa diversité, les moments forts de sa vie de peintre et d’écrivain : depuis son enfance
parisienne aisée à ses séjours londoniens, en passant par sa vie mondaine, pour s’achever dans
la retraite normande d’Offranville.
Jacques-Emile Blanche, «Le Cherubin de Mozart»
(portrait de Desiree Manfred), vers 1903
Huile sur toile, 157 x 118 cm. Musee des Beaux-arts de la Ville de
Reims © Christian Devleeschauwer
a
. du 7 mai au 6 septembre 2015
g
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n
d
a
expos itions
en
europe
Palazzo Reale, Milan
Léonard de Vinci
L’année de l’Expo 2015 offre l’occasion au Palazzo Reale de célébrer le
génie de Léonard de Vinci au moyen de la plus grande exposition jamais organisée en Italie.
Cette exposition met en évidence la capacité de cet artiste à combiner la
pensée scientifique avec le talent créatif, l’art et la technologie. Elle inclut des
peintures, des dessins, des sculptures et des manuscrits, réunis grâce aux prêts
des plus grands musées mondiaux, parmi lesquels le British Museum de Londres,
les Offices de Florence, et le Metropolitan Museum de New York.
La Bibliothèque Ambrosiana de Milan contribue à l’exposition avec plus de
30 dessins du Codex Atlantic. Quant au Musée du Louvre de Paris, il a autorisé
le transfert à Milan de trois peintures de Léonard de Vinci, qui toutes sont des
chefs-d’œuvre : St John le Baptiste, L’Annonciation, et La Belle Ferronnière, qui
vient d’être restaurée.
Signalons que l’Homme de Vitruve, un des plus fameux dessins au monde,
fera également partie de l’exposition, un chef-d’œuvre que De Vinci a réalisé vers
1490. Il montre les corrélations de dimensions humaines idéales avec la
géométrie, telles que décrites par l’architecte romain Vitruve (Ier siècle av. J.-C.).
Ce dessin est conservé à la Galerie de l’Académie de Venise, et n’est montré
qu’occasionnellement au public. A l’exposition de Milan, il ne sera visible que
durant un mois, ce qui est le temps de prêt maximum autorisé par les règles de
conservation.
. Jusqu’au 19 juillet 2015
Léonard de Vinci «La Belle Ferronière»
Huile sur panneau de noyer; 63 x 45 cm. Paris, Louvre, Département des Peintures
© 2014. The Trustees of the British Museum c/o Scala, Firenze
- Rome et les gens du Po. Une rencontre de la culture - 3e au Ier s. av
JC. Du 8 mai 2015 au 17 janvier
2016.
Bruxelles
Bozar : F
. Portraits de
l
ACES THEN
la Renaissance aux Pays-Bas &
FACES NOW. Portraits photographiques europeens depuis 1990.
Jusqu’au 17 mai. L’Empire du
Sultan. Le monde ottoman dans
l’art de la Renaissance. Jusqu’au 31
mai.
l Hangar H18, Ixelles : Wabi Sabi
Shima - de l’esthétique de la perfection et du chaos dans l’archipel
nippon. Jusqu’au 24 mai.
Dresde
Staatliche Kunstsammlungen :
l
L’héritage de Jérôme Bosch.
Jusqu’au 15 juin
Ferrare
Palazzo dei Diamanti : La rose de
l
feu. La Barcelone de Piccaso et
Gaudi. Jusqu’au 19 juillet.
Florence
Galleria degli Uffizi : Gherardo
l
delle Notti, peintures étranges et
scènes joyeuses. Jusqu’au 25 mai.
a
g
La Barcelone de Picasso et Gaudi.
Jusqu’au 19 juillet.
l
Domenico :
Boldini. Le spectacle de la modernité. Jusqu’au 14 juin.
Madrid
Musée du Prado : Les cartons de
Forli
Musée San
l
Francfort
Schirn Kunsthalle :
Les
Affichistes. Jusqu’au 25 mai.
l Städelmuseum : Monet et la naissance de l’Impressionnisme.
Jusqu’au 21 juin.
l
La
Haye
Mauritshuis : Une maison de caml
pagne à New York : chefs-d’œuvre
de la Frick Coll. Jusqu’au 10 mai.
Londres
British Museum : Définir la beaul
té - le corps dans l’art de la Grèce
antique. Jusqu’au 5 juillet. Histoire
des Indigères australiens. Jusqu’au
2 août
l Courtauld Gallery : Goya - l’album des sorcières et des femmes
âgées. Jusqu’au 25 mai.
l National Gallery : Inventing
Impressionism. Jusqu’au 31 mai
l National Portrait Gallery :
Sargent - Portraits d’artistes et d’a-
e
n
mis. Jusqu’au 25 mai.
Wallace Collection : Joshua
Reynolds, expériences en peinture.
Jusqu’au 7 juin.
l
tapisserie de Goya dans le contexte de
la peinture de cours. Jusqu‘au 25 mai
l Musée Thyssen-Bornemisza :
Raoul Dufy. Jusqu’au 17 mai. Paul
Delvaux, une promenade avec l’amour et la mort. Jusqu’au 7 juin.
Milan
Palazzo Reale : Art lombard des
l
Visconti aux Sforza. Jusqu’au 28
juin. Léonard de Vinci 1452-1519.
Jusqu’au 19 juillet.
l Pinacoteca di Brera : Pérugin
et Raphaël. Le mariage de la
Vierge. Dialogue entre maître et
élève. Jusqu’au 12 juillet
Padoue
Palais du Mont de Piété : C’est la
l
guerre ! 100 ans de conflits au feu de
la photographie. Jusqu’au 31 mai.
na : Artistes du XIXe s. Thèmes et
redécouvertes. Jusqu’au 14 juin.
l Musée Capitolin : L’âge de
l’angoisse. De Commode à
Dioclétien. Jusqu’au 4 octobre.
l Palazzo Cipolla : Le Baroque à
Rome. La merveille des arts.
Jusqu’au 26 juin
l Scuderie del Quirinale : Matisse
arabesque. Jusqu’au 21 juin
Rovigo
Palazzo Roverella : Le démon de
l
la modernité - Peintres visionnaires. Jusqu’au 14 juin.
Venise
Peggy Guggenheim Collection:
l
Charles Pollock - une rétrospective.
Jusqu’au 14 septembre
Vienne
Albertina
l
(Albertinapl.)
Sturtevant - Drawing Double
Reversal. Jusqu’au 10 mai. La
beauté de la nature - Aquarelles du
XIXe siècle. Jusqu’au 31 mai.
Vincenza
Rome
Basilica
Palladiana
:
Chiostro del Bramante : Chagall. Toutankhamon, Caravage & Van
l
l
Amour et vie. Jusqu’au 27 juillet
l Galleria nazionale d’arte moder-
d
a
Gogh - Le soir et les nocturnes, des
Egyptiens au XXe s. Jusqu’au 2 juin.
69
expos itions
Genève
Art Bärtschi & Cie : Rafael Lozanol
70
Hemmer. Jusqu’au 23 mai. Khaled
Jarrar. Du 28 mai au 11 juillet.
l Art en île - Halle Nord (pl. de l’île
1) Slaughter Box - Jonathan
Delachaux. Jusqu’au 23 mai.
l Art & Public (Bains 37) Zhang
Wei. Jusqu’au 8 mai.
l Bibliothèque d’art et d’archéologie (Promenade du Pin) Les livres de
jeux. Quand les artistes entrent
dans la partie. Jusqu’au 30 mai.
l
Bibliothèque de Genève
(Promenade des Bastions) De l’argile
aux nuages. Du 6 mai au 19 juin.
l Blondeau & Cie (Muse 5) David
Maljkovic. Jusqu’au 9 mai. Mai-Thu
Perret. Du 28 mai au 18 juillet.
l Cabinet d’arts graphiques :
“Pardonnez-leur“. Jusqu’au 14 juin.
l Centre d'art Contemporain (VieuxGrenadiers 10) Giorgio Griffa & Reto
Pulfer. Du 28 mai au 23 août.
l Centre de la Photographie (Bains
28) Collectif Interfoto – Genève
interdite. Jusqu’au 31 juin.
l Ferme de la Chapelle, GrandLancy (39, rte de la Chapelle)
Barbara Cardinale, Lucie Kohler,
Oablo osorio / D’ânes à zèbre.
Jusqu’au 31 mai.
l Fondation Auer pour la photographie
(Hermance) Tevfik
Ataman. L’homme aux histoires
en
1984-2014. Jusqu’au 24 mai.
Fondation Baur (Munier-Romilly
8) Alfred Baur, pionnier et collectionneur. Jusqu’au 28 juin.
l Fondation Bodmer (Cologny) Les
livres de la liberté. Du 16 mai au 13
septembre.
l Galerie de la Béraudière (E.Dumont 2) Hommage à Lucien
Clergue, photographies. Du 7 mai
au 31 juillet.
l Galerie Bernard Ceysson (7,
Vieux-Billard) Nicolas Momein.
Jusqu’au 23 mai.
l Galerie Patrick Cramer (VieuxBillard 2) Fifo Stricker. Jusqu’au 26
mai. André du Besset. Du 28 mai au
18 juillet
l Galerie Anton Meier (Athénée 2)
Annelies Štrba. Du 7 mai au 27 juin.
l Galerie Mezzanin (63, Maraîchers)
Maureen Kaegi, Christina Zurfluh.
Jusqu’au 23 mai.
l Galerie Mitterand + Cramer (Bains
52) These basic forms of beauty.
Jusqu’au 16 mai.
l Galerie Skopia (Vieux-Grenadiers
9) Jean-Luc Manz. Jusqu’au 16 mai.
Claudio Moser. 28 mai au 11 juillet.
l Galerie Turetsky (25, Grand-Rue)
Laurent de Pury. Du 7 mai au 13 juin
l Interart (25, Grand-Rue) Pierre
Dmitrienko. Du 7 mai au 3 juillet.
l Maison Tavel (Puits-St-Pierre 6)
Devenir Suisse – GE 200. Du 17
mai 2015 au 10 janvier 2016.
l
s uis s e
l Mamco (Vieux-Granadiers 10)
Cycle Des histoires sans fin, printemps 2015 - avec Antoine
Bernhart, François Dilasser, Émilie
Ding, .... & La Collection du Frac
Île-de-France. Jusqu’au 10 mai
l Médiathèque du Fonds d'Art
Contemporain (Bains 34) Limes Voyages de frontière. Jusqu’au 23
mai. Histoires en devenir. Jusqu’au
29 août.
l Musée Ariana (Av. Paix 10) Le
verre artistique de Saint-Prex.
Jusqu’en octobre. Luxe, calme et
volupté - Concours swissceramics.
Du 31 mai au 1er novembre.
l Musée d’art et d’histoire (Ch.Galland 2) Christiane Baumgartner White Noise. Jusqu’au 28 juin.
Aimer la matière. Un regard mis à
l'honneur. Du 28 mai au 31 déc.
l Musée de Carouge (pl. Sardaigne)
Collectif Le Gac – Jean Pleinemer
L’atelier parallèle. Jusqu’au 30
août.
l Musée international de la CroixRouge (Paix 17) Expériences de
vérité -Gandhi et l’art de la nonviolence. Jusqu’au 3 jnvier 2016
l Musée d’ethnographie (Bd CarlVogt 65-67) Les rois mochica. Divinité
et pouvoir dans le Pérou ancien.
Jusqu’au 3 mai.
l Musée de la Réforme (Maison
Mallet) Le ciel devant soi. Jusqu’au
30 octobre.
l Red Zone Arts (r. Bains 40) Olivier
Morel. Jusqu’au 16 mai.
l Xippas Art Contemporain (Sablons 6) Faillir Pouvoir Prévoir.
Jusqu’au 16 mai.
Lausanne
Collection de l’Art brut (Bergières
l
11) Pascal Tassini & Eric Derkenne.
Jusqu’au 10 mai
l Fondation de l’Hermitage (2, rte
Signal) De Raphaël à Gauguin.
Trésors de la collection Jean
Bonna. Jusqu’au 25 mai
l Mudac (pl. Cathédrale 6) Le verre
vivant II. Jusqu’au 1er novembre.
L'Eloge de l'heure. Du 27 mai au 27
septembre.
l Musée cantonal des beaux-arts (pl.
Riponne) Kader Attia. Les blessures
sont là. Du 22 mai au 30 août.
l Musée de l’Elysée (Elysée 18)
William Eggleston, from Black and
White to Colour & PhotoBooks
Elysée. Coll. Schifferli. Jusqu’au 3
mai. reGeneration 3. Du 29 mai au
23 août.
l Musée Historique (pl. Cathédrale
4) Christian Coigny, photographies. Jusqu’au 15 juin.
Fribourg
Espace Tinguely - Saint-Phalle :
l
Sculpture et architecture dans
l’oeuvre de Niki de Saint Phalle.
Jusqu’au 31 décembre
Fondation Baur, Genève
Alfred Baur (1865-1951)
Pionnier et collectionneur
à l’occasion des 150 ans de la naissance d’Alfred Baur (1865-1951), la Fondation Baur rend hommage à son fondateur, en présentant une exposition qui évoque l’œuvre du pionnier à Ceylan et du collectionneur d’art asiatique à Genève.
Pot à eau et vase « peau-de-peche ». Porcelaine
Dynastie Qing (1644-1911), marque et regne de Kangxi
(1662-1722) H. 9 et 15.2 cm. Acquis aupres de Tomita
Kumasaku © Fondation Baur, musee des arts d’ExtremeOrient. Photo Hughes Dubois
à travers une sélection
des meubles de sa résidence,
des livres de sa bibliothèque,
des objets de sa collection sortis spécialement des réserves
du musée ainsi que d’archives,
l’exposition invite le visiteur à
un voyage dans le temps et à
entrer dans l’intimiteé de cet
homme d’exception et de son
épouse Eugénie.
En écho à l’exposition, de
nombreuses photographies
anciennes, présentées au premier étage, deévoilent Ceylan, la plantation de cocotiers de Palugaswewa ainsi que l’usine et
les bureaux d’A. Baur & Co. Ltd. à Colombo.
. jusqu’au 28 juin 2015
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g
e
Le port de Colombo
© Fondation Baur, musee des arts d’Extreme-Orient
n
d
a
expos itions
en
s uis s e
Musée Bellerive, Zurich
Cose fragili
Verre de Murano
L'exposition se concentre sur des œuvres modernes de verre en provenance des environs de
Murano, où l'architecte italien Carlo Scarpa a créé un nouveau style révolutionnaire dans les années
1930.
Pour ses vases et bols, il a remis en vigueur des techniques oubliées depuis longtemps, comme
les techniques de coupe appelées“battuto“ et “inciso“. Il a aussi utilisé des matières comme le verre
“pulegoso“ opaque ainsi que le “murrine“ fait de tiges en verre teinté.
Après la Seconde guerre mondiale, Fulvio Bianconi, Ercole Barovier, Flavio Poli et beaucoup
d'autres ont suscité une reprise d'intérêt pour le verre et attiré à Murano des artistes internationaux.
à ce jour, des objets magistraux en verre dans le style d'art de Murano continuent à être créés
par des artistes comme Monica Guggisberg et Philip Baldwin (Suisse, USA), Yoichi Ohira (Japon),
Mary Ann Toots Zynsky (USA) et Thomas Blank (Suisse).
Le Musée Bellerive expose environ 300 œuvres en verre rares et inhabituelles qui ont été créées
dans les usines renommées de verre de Murano et dans les studios des artistes.
. Du 8 mai au 13 septembre 2015
Dino Martens pour vitrerie Rag. Aureliano Toso. Vase Oriente
osselaria Congo, 1952. Sammlung Holz, Berlin;
photo Martin Adam © Sammlung Holz
Fri-Art (Petites Rames 22) Robert
Heinecken. Lessons in Posing
Subjects. Jusqu’au 3 mai.
- œuvres en verre contemporaines.
Jusqu’au 3 novembre. Vis-à-vis /
Visarte. Jusqu’au 31 mai.
DETOX. Croyances autour de la
nutrition. Jusqu’au 23 août
l Cabinet des estampes :
Printmaking by. Jusqu’au 31 mai.
l Musée Jenisch : Fred Deux - Le
For intérieur. Jusqu’au 24 mai.
Wallpaper Liberation - les carnets
de Jean-Luc Manz. Jusqu’au 16
août.
l
l
l
Mézières
Musée du papier peint : Fusions
l
Martigny
Yverdon
Fondation Pierre Gianadda :
Maison d’Ailleurs (Pl. Pestalozzi 14)
Anker, Hodler, Vallotton... Coll.
Bruno Stefanini. Jusqu’au 14 juin
l Fondation Louis Moret (Barrières
33) Alexandra Roussopoulos. enne.
Jusqu’au 24 mai.
l Manoir de la Ville : Céline Peruzzo,
Gaël Epiney, Cécile Giovannini, Dexter
Maurer. Jusqu’au 24 mai.
Neuchâtel
Centre Dürrenmatt (Pertuis du Saut
l
74) Dürrenmatt à Neuchâtel.
Jusqu’au 6 septembre
l Laténium (Hauterive) Aux origines
des pharaons noirs - 10’000 ans d’archéologie nubienne. Jusqu’au 18 mai
l Musée d'art et d'histoire (espl.
Léopold-Robert 1) 14/18 La Suisse et
la Grande Guerre. Du 14 mai au 18
octobre.
l Musée d'ethnographie (St Nicolas
4 ) Secrets. Du 17 mai au 18 octobre.
Vevey
Alimentarium (quai Perdonnet)
l
a
g
Alphabrick. Jusqu’au 31 mai
OuTRE SARINE
Bâle
Cartoon Museum (St. Albanl
Vorstadt 28) Peter Gut. Jusqu’au
21 juin.
l Fondation Beyeler (Riehen)
Alexander Calder Gallery III.
Jusqu’au 6 sept. Paul Gauguin.
Jusqu’au 28 juin.
l Kunsthalle : Vincent Meessen &
Thela Tendu. Jusqu’au 24 mai.
Mark Leckey. Jusqu’au 31 mai
l Dreiländermuseum (Lörrach) Audelà de la splendeur - Facettes de
St-Pétersbourg. Jusqu’au 21 juin.
l Museum für Gegenwartskunst
(St. Alban-Rheinweg 60) De
Cézanne à Richter. Jusqu’au 14
février 2016.
e
n
Musée Tinguely (Paul SacherAnlage 1) Belle Haleine – L'odeur
de l'art. Jusqu’au 17 mai.
l
Afrikanische Moderne. Jusqu’au 22
mai. Making Africa. A Continent of
Contemporary Design. Jusqu’au 13
septembre.
Berne
Centre Paul Klee (Monument im Winterthur
Fruchtland 3) Henry Moore.
l
Short Cuts. Jusqu’au 14 juin
l PhotoforumPasqu’Art : Regine
Petersen, Aleix Plademunt,
Jonathan Roessel, Yann Laubscher.
Jusqu’au 14 juin.
l Fotomuseum (Grüzenstr. 44)
Paul Strand. Jusqu’au 17 mai
l Fotostiftung Schweiz (Grüzenstr. 45) Meinrad Schade – La guerre sans la guerre. Jusqu’au 17 mai
l Museum Oskar Reinhart
(Stadthausstr. 6) The English Face Portraits miniatures. Jusqu’au 15
juillet.
l Museum Oskar Reinhart «Am
Römerholz» (Haldenstr. 95) Victor
Chocquet, collectionneur des
impressionnistes Renoir, Cézanne,
Monet, Manet. Jusqu’au 7 juin.
l
l
Jusqu’au 25 mai. Klee à Berne.
Jusqu’au 17 janvier 2016
l Musée des Beaux-Arts (Hodlerstr.
8-12) Max Gubler - Toute une vie.
Jusqu’au 2 août.
Bienne
CentrePasqu’Art (fbg Lac 71-75)
l
Riggisberg
Zurich
Abegg-Stiftung : Le triomphe
Kunsthaus (Heimpl.1) Monet,
des ornements. Tissus de soie du
XVe siècle italien. Jusqu’au 8 nov.
Saint-Gall
Kunstmuseum : Isabelle Lartault l
Michel Verjux. Jusqu’au 26 juillet.
Soleure
Kunstmuseum : Turo Pedretti.
l
Jusqu’au 25 mai. Peter Stoffel.
Jusqu’au 14 juin.
Weil
/ Rhein
Vitra Design Museum :
l
d
a
Gauguin, Van Gogh... Inspiration
japonaise. Jusqu’au 10 mai
l Museum Bellerive (Augustinergasse 9) Cose fragili - Verre de
Murano. Du 8 mai au 13 septembre.
l
Museum für Gestaltung
(Austellungsstr. 60) Do It Yourself
Design. Jusqu’au 31 mai
l Museum Rietberg (Gablerstr.
15) À cordes et à corps - Instruments
de musique de l'Inde. Jusqu’au 9
août.
71
expos itions
« Ce ne sont pas moins d’une centaine de toiles
qui, de la sourde Bretagne au feu de la Provence,
témoignent d’une création explosive, unique »
précise le conservateur. Si des traces du cloisonnement des formes se laissent entrevoir dans
Pommiers, paysage à Pont-Aven (1911) Le Train
(1909), ou même dans Paysage, la route blanche
(1909), c’est le rugissement matissien que l’on
retient dans Provence, pins et collines (1910). La
Que les Vaudois, qui ont vu partir la collection Planque, déposée pour quinze
solidité des paysans bien enracinés dans leur
ans dans la chapelle des Pénitents blancs restaurée à cet effet par le Musée
terre se lit dans son Paysan (1922) ou les
Granet, se rassurent. Elle y a non seulement trouvé un écrin qui rend hommage Paysans le soir (1935). Quant au visage si
à l’exigence du collectionneur vaudois et à la qualité des œuvres mais, aussi,
expressif du Facteur (1934), le rapprochement
qui vivifie et dynamise la collection.
avec Van Gogh est tout à fait légitime, tant on y
trouve la même vérité expressive.
Depuis son inauguration en 2011, comme le vaillée avec un goût du mouvement, de l’épaisC’est bien cette force et puissance d’évocastipulait aussi le contrat, la mise en valeur de la seur, se souciant peu de vraisemblance figurative, tion, cette grandeur dans l’expression qu’admicollection passait par l’organisation d’exposi- les couleurs souvent posées pures magnifient la rait avant tout Planque chez Hans Berger. Le coltions temporaires, qui pourraient aussi s’appeler lumière. « Il y a des tableaux de vous qui sont lectionneur regrettera d’ailleurs de n’avoir pu
« les amours de Planque ». Les idées ne manque- aussi beaux, aussi denses que ceux que Van Gogh collectionner des œuvres de la première période
ront pas au conservateur de la collection Florian a peints » notera Jean Planque. Il puise ses sujets du peintre, ne l’ayant connu qu’en 1957 à l’occaRodari, puisque de Jean Dubuffet à Picasso, Jean dans la vie simple : la terre, le paysage, les habi- sion d’une exposition à la galerie Beyeler à Bâle,
Planque était l’ami de beaucoup
pour laquelle travaillait Planque.
d’artistes et ces coups de projecNéanmoins en jetant son dévolu
teurs peuvent se décliner sous diffésur la très belle toile intitulée Du
rents éclairages.
vert (1965), véritable explosion de
Pour cette première exposition,
vert et l’aquarelle Rivière et colliriche d’une trentaine d’œuvres, le
nes (1960), plus abstraite que figuchoix du conservateur s’est porté
rative, le collectionneur ne s’est en
sur un artiste suisse que l’œil de
aucun cas trompé. Point d’orgue
Planque jugeait très important,
de cette exposition, Le Baigneur
Hans Berger. Un nom oublié voire
(1940), une toile provenant d’une
méconnu, aujourd’hui, mais cela
collection privée, en dépôt dans la
n’a pas toujours été le cas. Pour
collection, admirable par l’équilibpreuve : ses œuvres se trouvent
re de sa composition et la magie de
dans d’importantes collections suissa palette. Si les débuts de l’artisses mais aussi les grands musées
te sont marqués par « une sorte de
suisses. Peintre atypique, autodivéhémence presque aveugle, de
dacte, né à Bienne en 1882, il se
ferveur et de justesse miraculeumet à peindre après une formation
se », la peinture s’assagira. Ce
d’architecture, en 1907. Sa premièsont aussi les événements liés à la
deuxième guerre qui rendent sa
re exposition au Musée Rath à
production d’œuvres plus rare.
Genève en 1911 ne fait pas l’unaniHans Berger (1882-1977) «Les pins, Bretagne», Pastel, 50 x 64 cm.
Collection privée, Genève. Photo Maurice Aeschimann, Onex
« Une seule condition majeure
mité mais Hodler reconnaît dans le
pour les artistes : la patience. On
travail puissant et coloré le talent de
l’artiste et le recommande entre autres au collec- tants. Après un court séjour en Bretagne, au devrait leur accorder deux vies d’hommes », écrit
tionneur Joseph Müller et sa famille de Soleure. contact de l’Ecole de Pont-Aven, orientant sa Hans Berger. A l’occasion du centenaire de sa
Dans les années 1920-1930, Hans Berger appar- peinture vers des figures massives se détachant naissance en 1982, le musée d’Art et d’Histoire
tient à tous ces artistes suisses jouant un rôle sur des fonds monochromes, il va découvrir, à de Genève conjointement avec le musée des
Beaux-Arts de Soleure avaient présenté un panartistique de premier plan et participant à des partir de 1909, la Provence.
orama de ses œuvres. L’exposition d’Aix-enexpositions à Bâle, Zurich et Berne mais aussi à
Provence vient à point nommé pour sortir l’artisl’étranger.
Création explosive
Au contact de la lumière de ce pays, sa te de son purgatoire !
L’artiste avait tout pour plaire à Jean
Régine Kopp
Planque avec sa personnalité discrète, humble, palette s’éclaircit et le peintre va se laisser guihomme travailleur et méditatif et une œuvre der par la couleur, travaillant la pâte sans ménaexaltant les valeurs terriennes. La pâte y est tra- gement et utilisant le couteau ou d’épais pinceau. Jusqu’au 6 septembre 2015
musée granet, aix-en-provence
Hans Berger ou la
passion de peindre
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philharmonie II
Pierre Boulez
Compositeur français, Pierre Boulez n’a cependant jamais fait état d’un goût
immodéré pour le genre de l’opéra-comique. Qu’il semble avoir royalement
ignoré, voire méprisé (à l’exception de Pelléas). Autre époque ! Il est vrai aussi
que très longtemps, Boulez s’était pareillement défié de l’opéra. Avant de
changer d’avis. Bien que l’on attende toujours l’opéra qu’il avait, un temps,
promis d’écrire…
Le Musée de la Cité de la Musique, ou
Philharmonie II, consacre donc une exposition à
Pierre Boulez, dans le cadre des manifestations
qui viennent célébrer son quatre-vingt-dixième
anniversaire.
De 20 ans à 90 ans
L’exposition suit le parcours d’un compositeur, appelé à vite devenir également chef d’orchestre. Elle part ainsi des premières années qui
suivent la guerre, sur les pas du musicien frais
émoulu du Conservatoire de Paris (classe
d’Oliver Messiaen). Il a vingt ans, et ses premières œuvres voient le jour. Puis le chemin
conduit à la compagnie Renaud-Barrault, dont il
est le musicien de scène et où il se forme en
autodidacte à la direction d’orchestre (auprès de
Darius Milhaud et d’Arthur Honegger) ; aux
concerts du fameux Domaine Musical, dont il
est le mentor ; puis peu après à la tête d’orchestre de renom, comme du BBC et de New York.
s
qu’il en soit, chez un compositeur. L’exposition
s’attarde donc sur ces personnages rodant
autour du maître, avec force documents d’époque, photographies, films, vidéos, enregistrements audio (la pose d’un casque est vivement
conseillée), peintures et dessins, dans une
pénombre propice à la focalisation éclairée et
éclairante. On remarque toutefois certaine
absence, sur les photos présentées, parmi ces
personnes qui ont compté dans sa vie. On
regrette aussi que ce parcours s’arrête à mi-chemin, en suspens, dans les années 1980. Comme
si la carrière du grand homme de la musique
Et son parcours prestigieux se poursuit, que chacun
connaît et qui ponctue les
phases de l’exposition. C’est
ainsi que l’on voit Boulez en
compagnie de musiciens
comme Stravinsky ou Varèse,
Berio ou Stockhausen bien
évidemment,
d’écrivains
comme Claudel ou René
Char, d’artistes plasticiens
comme De Kooning, Staël,
Giacometti, Miró… C’est
curieux, au reste, cette fréquentation des plasticiens
chez un musicien.
Témoignage d’une curiosité ouverte ? ou aveu d’une
musique qui cherche ses justifications dans les autres arts ?
Un phénomène nouveau, quoi
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Pierre Boulez «Troisieme sonate. Formant 3.
Constellation miroir»
Partition manuscrite autographe polychrome.
Collection Pierre Boulez
Fondation Paul Sacher, Bale
© Avec l’aimable autorisation de Universal Edition
A.G., Vienne
française de la seconde moitié du XXe siècle
prenait fin. Ou qu’il avait tout dit. Autre forme
de non-dit ?... Mais trêve de réserves : l’exposition mérite tous les détours, dans sa mise en
regard de documents parlants : graphiques ou
sonores, voguant de la Deuxième Sonate à
Répons, en passant par le Marteau sans maître
et Rituel. Documents souvent inédits et parfois
inattendus.
Pierre-René Serna
Luigi Nono, Pierre Boulez et Karlheinz Stockhausen © Sudwestrundfunk / Dr. G.W. Baruch
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Jusqu’au 28 juin… également.
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palais des congrès
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opéra de paris
Le Presbytère
Le Lac des cygnes
Créé en 1997, Le Presbytère est l’hommage de Maurice
Béjart à Jorge Donn, son interprète fétiche, et au chanteur
Freddy Mercury, tous deux décédés du SIDA. Loin d’être
sombre, ce ballet est un grand spectacle programmé du 4
au 6 avril au Palais des Congrès de Paris, dans le cadre
d’une tournée française du Béjart Ballet Lausanne.
Le Lac des cygnes de Rudolf Noureev était de retour sur la
scène de Bastille du 11 mars au 9 avril. Cette nouvelle série
était l’occasion d’une mise en avant de jeunes solistes du
Ballet de l’Opéra de Paris.
Le Presbytère n’a rien perdu de son charme, ni le jardin de son
éclat… Tiré d’un roman de Gaston Leroux, ce titre énigmatique nimbe de
mélancolie le ballet que Maurice Béjart a voulu dédier aux êtres partis
dans la fleur de l’âge. A côté des tubes de Queen, si typiquement 80, il a
choisi des extraits d’œuvres de Mozart - comme la musique funèbre
maçonnique – décédé également prématurément. Ce choix donne une
dimension classique et tisse un lien entre ceux – artistes ou non – qui,
d’hier à aujourd’hui, nous ont quitté trop tôt. Il en résulte une grande
fresque qui passe du registre du divertissement à l’émotion. L’insouciance
laisse la place à la maladie comme le plaisir des rencontres d’un soir, à la
douleur de la séparation irrévocable. Le personnage de Freddy Mercury,
incarné par un danseur, traverse le ballet, de même que l’image de Jorge
Donn. Délicatement poignant, le final, sur The show must go one, évite
«Le Presbytère» LePresbytere - Photo Ilia Chkolnik - copie
toute grandiloquence. Les danseurs allient présence sur scène et grande
maîtrise technique. Le Béjart Ballet Lausanne continue de réunir des
talents brillants en solo dont la personnalité affirmée donne un supplément
d’âme aux scènes de groupe. Parmi eux, on remarque Oscar Chacon et la
toujours magnifique Elisabet Ros. Véritable ode à la vie, Le Presbytère
communique l’urgence à agir des artistes et le souffle insoumis des
années 70.
Stéphanie Nègre
La danse en mai :
A l’Opéra de Paris, Paquita de Pierre Lacotte sera de retour du 2 au 19
mai tout comme Les Enfants de Paradis de Jose Martinez du 28 mai au 6 juin.
Le Théâtre de la Ville présentera Deflagration d’Hofesh Shechter du 4 au
20 mai. Le Tanztheater Wuppertal sera de retour avec Nelken et Fur die
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Heloise Bourdon et Josua Hoffalt dans «Le Lac des cygnes». Photo Ann Ray
Héloïse Bourdon fait ses débuts dans le rôle d’Odette / Odile. Sujet
dans la compagnie, elle a déjà brillé dans les rôles de Nikiya dans La
Bayadère et d’Aurore dans La Belle au bois dormant. Sa prise de rôle est
une vraie réussite. Sa caractérisation du double personnage, la princessecygne et l’instrument du magicien Rothbart, irréel au deuxième acte puis
charnel au troisième, frappe par sa justesse. Sa belle présence, ses bras
dont elle fait des ailes expressives, illuminent la scène et nous font adhérer immédiatement à l’intrigue. Siegfried est incarné par Josua Hoffalt. Si
la technique du danseur étoile n’est pas des plus démonstratives, il campe
un prince tout en élégance. Le double rôle de Rothbard, précepteur du
prince et magicien, est assuré par Florimond Lorieux, également sujet
dans la compagnie. Le physique aiguisé de jeune danseur est en décalage
avec l’image traditionnelle, un personnage plus âgé. Pour cette prise de
rôle réussie, Florimond Lorieux, jouant la carte de la complicité perverse
en précepteur, a fait preuve de beaucoup de charisme. Ses sauts sont virtuoses et cette fougue donne une intensité diabolique aux scènes où il est
le maléfique Rothbart. Parmi les tableaux qui jalonnent le ballet, Marine
Ganio et Eléonore Guérineau brillent particulièrement dans le pas de trois
du premier acte. La soirée est de haute volée et les trois protagonistes nous
emportent dans le fantastique.
Stéphanie Nègre
Kinder de Pina Bausch, du 12 au 30 mai.
Les 19 et 20 mai, la Russell Maliphant company sera au Théâtre des
Champs-Elysées pour un programme de cinq courts ballets. Les rendez-vous
chorégraphiques annuels du Théâtre des Gémeaux de Sceaux accueilleront
Robot de Blanca Li du 5 au 7 mai et In the upper room de Twyla Tharp par le
Ballet de Loraine les 20 et 21 mai.
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petit palais
De Carmen
à Mélisande
L’Opéra-Comique marque l’anniversaire des trois cents ans de l’institution
par une exposition. Celle-ci, au Petit Palais, s’en tient toutefois à la période
qui va de 1875 à 1902 : autrement dit, entre les premières de Carmen et de
Pelléas et Mélisande.
D’où le titre de l’exposition : « De
Carmen à Mélisande ». Et le sous-titre :
« Drames à l’Opéra-Comique ». Car l’un
et l’autre de ces opéras (comiques ?)
verse dans le tragique, plutôt que la légèreté. C’est tout le sens du genre même de
l’opéra-comique, qui ne doit son intitulé
qu’à sa formule, voire à son lieu de
représentation, plutôt qu’à ses sujets. Il
en serait de même de genres lyriques
cousins, de la zarzuela espagnole au
singspiel allemand. Car l’opéracomique, au contraire du très
international opéra, est un
genre spécifiquement français.
Un genre caractérisé par ses
auteurs, compositeurs et librettistes, français, et des sujets en
langue française, piqués très
souvent de dialogues parlés.
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lièrement les salles consacrées au Rêve, inspiré
de Zola, et à Louise, deux œuvres lyriques marquées d’un sentiment social, alors neuf et émergeant au tournant des XIXe et XXe siècles. Le
pendant français du vérisme italien.
Autre point d’ancrage de l’exposition :
l’incendie survenu en 1887, qui devait détruire
le théâtre de l’Opéra-Comique, et préluder à sa
reconstruction, achevée en 1898. La troisième
Salle Favart (de Charles-Simon Favart, auteur et
responsable important de l’institution au XVIIIe
siècle), la salle actuelle, était née. Avec ici aussi
des images d’époque : dessins, photographies,
coupures de journaux, et même un film (des
années 50, assez croquignolet). La scénographie
se partage ainsi en autant d’espaces enserrés, au
fil des sujets et ouvrages ci-avant énoncés. Dans
l’esprit d’un théâtre, avec son endroit, la salle,
et son envers, la scène. Les couleurs des cimaises évoluent suivant les lieux et moments évoqués, du rouge intense de Carmen (bien sûr !)
au bleu gentil de Manon. Quelques costumes et
mannequins complètent les parures présentées.
Une plongée dans le temps et le rêve.
Pierre-René Serna
Jusqu’au 28 juin.
Oeuvres lyriques
Carmen de Bizet ouvre
donc le bal, si l’on peut dire.
Défilent ensuite, au long de
cette exposition : les Contes
d’Hoffmann
d’Offenbach,
Lakmé de Léo Delibes, Manon
de Massenet, le Rêve d’Alfred
Bruneau, Louise de Gustave
Charpentier et enfin, Pelléas et
Mélisande de Debussy. Autant
d’œu-vres lyriques sur des trames dramatiques ou sombres.
Des documents d’époque, des
témoignages audio, les réactions dans la presse, des peintures et portraits, des maquettes
de décors, forment les illustrations sur lesquelles se penche
l’exposition. On relève particu-
Lucien Doucet
Portrait de Galli Marie dans « Carmen », 1884
Huile sur toile, 193 x 83,5 cm ©BnF
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Studio Reutlinger
Mlle Garden dans «Pelleas et Melisande», 1902
Photographie, 50 x 35 cm © BnF
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petit palais
Bas-fonds du baroque
Après une présentation à la Villa Médicis, Paris a voulu, à son tour, montrer
l’envers du décor, baroque et fastueux, de la Ville éternelle. Dépeindre le
quotidien, dans lequel circulaient les artistes. Celui des bas-fonds, des tavernes,
sordide et crapuleux, un monde de misère, violent et grossier, que
connaissaient tous ces artistes accourus de toute l’Europe, venus étudier les
Antiques et espérant participer aux immenses chantiers lancés par les papes et
les cardinaux, les princes et grands de ce monde. .
76
C’est à deux femmes, Francesca Cappelleti,
professeur à l’université de Ferrare, et Annick
Lemoine, chargée de mission pour l’histoire de
l’art à l’Académie de France à Rome, que nous
devons ce parcours dans la Rome du vice et de la
turpitude. A travers plus de quatre-vingt
tableaux, nous suivons ces artistes qui privilégient la vision d’après nature plutôt que celle du
beau idéal, trouvant leur inspiration dans les tripots et les tavernes. Société cosmopolite que
cette communauté d’artistes, installés dans le
quartier « degli Ortacci », non loin de la Villa
Médicis, artistes français comme Valentin de
Boulogne, Simon Vouet, Nicolas Tournier,
Claude Lorrain ou hollandais comme Pieter van
Laer, Gerrit van Honthorst, Jan Miel ou espa-
gnols comme Bartolomeo Manfredi, Salvator
Rosa et Jusepe Ribera.
Maître Bacchus
En ouverture et avant de plonger dans les
bas-fonds romains, le metteur en scène d’opéras
baroques, Pier Luigi Pizzi accueille le visiteur
dans une scénographie donnant l’illusion d’un
palais romain, avec des vues de Rome gravées
par Giovanni Battista Falda, reproduites sur les
murs et des plâtres de statues antiques trônant au
milieu des salles. Une atmosphère de palais
romain que le visiteur retrouvera dans les deux
dernières salles, tendues de velours rouge et flanquées d’immenses miroirs entre les œuvres, mais
le ton a alors changé. D’irrévérencieux et de
Nicolas Regnier «La Farce», vers 1623-1625
Huile sur toile, 97 x 131 cm Stockholm, Nationalmuseum © Stockholm, Linn Ahlgren Nationalmuseum
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ludique, il devient plus grave. Le rideau tombe
sur une note mélancolique.
Qui mieux que Bacchus, Dieu de l’exaltation des sens, de la liberté et de la transgression
peut symboliser les artistes ? L’ivresse libère
l’homme de ses inhibitions et peut être à l’origine d’une folie des sens qui intensifie l’imagination créatrice. C’est sous l’égide de Bacchus, que
ces jeunes artistes pratiquent des rites d’initiation
très arrosés dans les tavernes, qu’ils n’hésitent
pas à représenter dans leurs œuvres. La figure
tutélaire de tous ces artistes était Le Caravage,
qui s’était représenté en Bacchus mais ce tableau
n’a pas fait le voyage. Le maî-tre meurt en 1610
non sans avoir fortement influencé toute une
jeune génération d’artistes caravagesques, au
centre de cette magnifique exposition. Il y a
Bartolomeo Manfredi dont le Bacchus hilare
enseigne le goût de l’ivresse à un buveur assoiffé, Bacchus et un buveur (1621) ou l’élégance du
corps efféminé du Jeune Bacchus (1610/1620) de
Pseudo-Salini. Ils aiment se mettre en scène sous
les traits de faunes, de sylènes ou de satyres.
Tous ces artistes venus du Nord se retrouvent dans une association baptisée les
Bentvueghels, les oiseaux de la bande, partageant
les excès de leurs rites dionysiaques dans leur vie
et la peinture et qui ne sont pas sans rappeler certaines pratiques actuelles de bizutage souvent
excessives. Roland van Laer peint cette vie sulfureuse dans une mise en abyme très évocatrice,
Les Bentvueghels dans une
auberge romaine (1626-1628).
Se retrouvent dans cette confrérie les plus grands caravagesques, les principaux paysagistes, des peintres d’histoire
fameux mais aussi des artistes se
délectant à peindre des scènes
pittoresques de la vie quotidienne romaine, les Bamboccianti,
ainsi nommés à cause du plus
célèbre d’entre eux Pieter van
Laer, surnommé il Bamboccio.
Son Autoportrait avec scène de
magie (1638-1639) où il se
représente en sorcier-alchimiste,
figure à la fois de mélancolie et
de l’érudition, a une forte connotation ironique. Dans le chefd’œuvre de Salvatore Rosa,
Scène de sorcellerie (1646) qui
met en scène des sortilèges d’amour concoctés par une communauté satanique, l’horreur de la
scène contraste avec le raffine-
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Giovanni Lanfranco «Jeune homme nu sur un lit avec un chat», 1620-1622
Huile sur toile, 113 x 160 cm Angleterre, Collection particuliere © Collection particuliere
ment du rendu. « Tout un jeu sur les chairs, les
décrépitudes mais aussi une excellence de la
peinture », commente Annick Lemoine.
Méditer les plaisirs
Une section est consacrée à la taverne, lieu
de réunion et de sociabilité dont tous ces peintres sont les protagonistes, où ils se retrouvent en
bonne compagnie de personnages incarnant le
vice et la misère. Que ce soient les courtisanes,
les entremetteuses, les diseuses de bonne aventure, tous ces personnages partagent les excès de
boisson, le jeu et l’érotisme. Avec son regard qui
se dérobe et ses atours somptueux, La joueuse de
guitare (1618-1620) de Simon Vouet trouble le
spectateur. Et que dire du Jeune homme nu au
chat (1620) de Giovanni Lanfranco, une étonnante Vénus masculine qui met en scène une
sexualité illicite au cœur du XVII° siècle! Toutes
les licences sont permises, supercherie, volupté
des sens mais aussi insulte comme ce geste obscène de la fica, qui consiste à mettre son pouce
entre deux doigts et devient un motif iconographique, où le spectateur est comme pris au piège
de l’insolence de l’artiste et dont témoignent Le
Jeune homme aux figues (1615) de Simon Vouet
ou Homme faisant le geste de la fica d’un anonyme caravagesque nordique et attribué à Simon
Vouet. Des artistes qui peignent les dérives du
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monde d’en bas comme Nicolas Régnier, Joueur
de dés et diseuse de bonne aventure (1624/1626)
qui orchestre le sujet dans une somptueuse mise
en scène ou encore Pietro Paolini et ses Tricheurs
(1625) fortement inspiré par le cadrage serré du
Caravage. Si Rome finira par s’imposer, au tournant du siècle, comme la capitale du paysage, les
Bambocciati font des paysages romains avec
leurs vestiges antiques le théâtre de la mendicité,
du viol ou du brigandage. Thématique évoquée
dans la section “Rome souillée“. Sébastien
Bourdon montre cette violence banale dans
L’embuscade ou les brigands (1636-1638) ou
Mendiants devant un four à chaux (16361638).Quant à Jan Both, c’est une rixe lors d’une
fête devant l’ambassade d’Espagne qui l’inspire,
tandis que Jan Miel dépeint une scène de brigandage sur fonds de paysages enchanteurs. Qui
d’autre mieux que Le Lorrain aura su magnifier
les ruines romaines et sa Vue de Rome avec une
scène de prostitution (1632) qui nous montre au
loin l’église de la Trinité-des-Monts dans la
lumière rose du soir intègre au premier plan, une
scène de prostitution plongée dans la pénombre,
révélatrice du regard sans concession de ces
artistes. Dans cette ville, décrite par Paolo
Pasolini, comme splendide et misérable, et que le
cinéma réaliste italien nous a rendu si attachante,
les peintres ont su, en offrant le droit au portrait,
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aux marginaux, bohémiens,
mendiants, vauriens prostituées, leur accorder leurs lettres de noblesse. « Ils jouent à
dessein sur une ambiguïté
troublante entre la représentation objective et l’idéalisation », souligne la commissaire. Portrait extraordinaire à
tous égards de ce Mendiant au
Cistre d’un anonyme italien.
Tout aussi remarquable, le
portrait du Mendiant (1612)
peint par Jusepe Ribera avec
maestria et sensibilité auquel
répond Le buveur ou allégorie
du goût (1610-1620). Michael
Sweerts met au service de son
Vieillard et un jeune homme
(1646-1647) son pinceau virtuose mais non moralisateur.
Quant au Jeune homme à la
fiasque (1620), Nicolas
Tournier en propose une
représentation plus introspective, voire nostalgique.
L’exposition s’achève sur
une tonalité plus grave, la dérision fait place à la
mélancolie. “La taverne mélancolique : méditer
les plaisirs“, tel est le titre de la dernière salle.
Enivrés par l’alcool et envoûtés par la passion de
la chair, tous ces protagonistes, cherchent à noyer
leur désespérance dans d’autres remèdes. La
musique semble ce remède souverain. Les scènes
de taverne signées par le grand caravagesque
français Valentin de Boulogne, dans Réunion de
musiciens et de soldats (1625) ou Le concert au
bas relief (1620-16625) ne trompent pas sur la
mélancolie qui habitent les protagonistes, en
proie à un travail introspectif. Dans Réunion de
buveurs (1619-1620) de Bartolomeo Manfredi,
musiciens et noceurs s’abandonnent au pouvoir
de la musique, comme le montre aussi le somptueux portrait du Jeune chanteur (1623) de
Claude Vignon, brossé dans une matière épaisse
et d’une étonnante liberté. Et quelle divine harmonie se dégage du Concert avec trois musiciens (1618) de Gerrit van Honthorst ! Il paraît
que la musique adoucit les mœurs. Il suffit de
vous mettre en route pour les bas-fonds romains
pour comprendre que cette phrase y trouve tout
son sens.
Régine Kopp
Petit Palais. Jusqu’au 24 mai 2015 (fermé le lundi)
www.petitpalais.paris.fr
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grand palais : le génie du siècle d’or espagnol
Vélasquez
Le Grand Palais s’enflamme aux couleurs chaudes et sensuelles du plus grand
artiste de l’âge d’or espagnol. Avec Remdrandt et Titien, Diego Vélasquez
(1599-1660) compte parmi les artistes les plus importants de l’histoire de l’art
occidental. C’est donc d’autant plus surprenant que cette exposition est une
grande première en France.
78
tion des cuisines et la présence d’une jeune
Africaine ou cette Scène de taverne (1618). La
mode du caravagisme n’épargne pas l’Espagne et
Vélasquez en prend connaissance une première
fois à Séville avec des tableaux de Jusepe de
Ribera envoyés depuis Rome et Naples, puis une
deuxième fois lors de son voyage à Madrid en
1622. Que ce soient les toiles représentant Saint
Paul ou Saint Thomas réalisé vers 1620, lorsque
l’artiste est encore installé à Séville ou Saint
Jean Baptiste au désert, réalisé après son premier
séjour madrilène de 1622, l’inflexion caravagesque s’y fit sentir.
Un double tour de force pour Guillaume moins au visiteur des repères thématiques. La
Kientz (34 ans), conservateur au Louvre en char- mise en bouche se fait avec les années de forma- Peintre de portraits
Avec ses premiers portraits, l’exposition
ge de la peinture espagnole, d’avoir pu réunir une tion. On y découvre les œuvres de son maître
trentaine d’œuvres du maître, véritables icônes Pacheco - dont Vélasquez épouse la fille - mais entre dans le vif du sujet. Ils s’inscrivent dans
espagnoles. Car les musées sont réticents à prêter aussi d’autres artistes de l’atelier comme Alonso son deuxième voyage à Madrid, au cours duquel
leurs chefs-d’œuvre et ce qui est plus surprenant, Cano et les premières œuvres exécutées par il s’impose comme le peintre de cour et sera
Le Louvre ne possède aucune toile de Vélasquez Vélasquez sur le sujet de L’Immaculée nommé peintre du Roi, abandonnant son naturaet les musées français sont très pauvres en œuv- Conception. Celle de Séville (1617) étant plus lisme bouillonnant pour la tradition froide et
res de l’artiste. On imagine combien de diploma- hiératique que celle conservée à Londres, où le figée du portrait de cour espagnol. Un an avant
tie et d’entregent il aura fallu au commissaire, à peintre dans sa représentation de la Vierge insis- de partir pour l’Italie, Vélasquez rencontre à
l’œuvre depuis 2012, pour négocier les divers te davantage sur le naturalisme du modèle. Le Madrid un artiste que les cours européennes
prêts sur la centaine d’œuvres autographes du succès de sa peinture se confirme ensuite dans s’arrachent, Rubens, avec lequel il se lie d’amimaître dont la plus grande partie est conservée au des compositions naturalistes, genre mineur que tié, partageant même un atelier. Voyage de forPrado à Madrid, qui a pour règle de ne jamais en le jeune Sévillan renouvelle, comme en témoigne mation, de Venise à Rome en passant par
sortir plus de sept et a consenti cette fois à en prê- Le Repas à Emmaüs (1617) avec une représenta- Ferrare pour se mesurer aux plus grands peintres de son époque. L’artiste
ter huit. Grâce à la force de persualibère
son style, s’intéresse
sion du maître d’œuvre de l’exposiaussi
bien
aux représentation, d’autres prêts ont été consentis
tions en extérieur, comme le
par les grands musées de Boston, Sao
montre la Vue des jardins de
Paolo, Saint-Pétersbourg, Londres,
la villa Médicis (1630) qu’ à
Dublin Rome et bien sûr Vienne et
l’articulation de plusieurs
son Kunsthistorisches Museum, parpersonnages en mouvement,
tenaire de l’entreprise.
Rixe de soldats devant l’amPour construire un vrai parcours
bassade d’Espagne (1630).
au Grand Palais, la trentaine d’œuvA son retour à Madrid,
res du maître s’est enrichie d’une
Vélasquez doit se consacrer
soixantaine de toiles, provenant de
aux portraits du fils du roi
l’entourage et de l’influence de
Philippe IV, l’Infant
Vélasquez. Il y a là les toiles de son
Baltasar Carlos,né lors de
maître à Séville, Francisco Pacheco,
son séjour en Italie. En l’abchez qui il se forme de 1611 à 1617,
sence de la photographie,
celles de ses disciples et suiveurs, les
ces portraits ont pour foncVelazquenos auxquels appartient Juan
tion de montrer l’enfant à
Bautista Martinez del Mazo (1612différents stades de sa crois1667), qui entre dans l’atelier de
sance, dans différentes
Vélasquez en 1631 et épousera sa
situations et tenues. L’artiste
fille. Il est aussi son plus fidèle collaétant chargé de mettre au
borateur. L’étude et la définition de
service de l’imagerie royale
son style par rapport à Vélasquez
tout son art, sublimé encore
constituent un des enjeux de l’exposipar les acquis italiens. A
tion.
Diego Velazquez «Portrait de l’infant Baltasar Carlos sur son poney»
commencer par sa grande
Le fil conducteur de l’exposition
1634-1635, huile sur toile, 211,5 x 177 cm Madrid, Museo Nacional del Prado
© Madrid, Museo Nacional del Prado
maîtrise du paysage, la virest chronologique, proposant néan-
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Diego Velazquez «Venus au miroir» vers 1647-1651
huile sur toile, 122,5 x 177 cm Londres, the National Gallery © The National Gallery
tuosité et la liberté dans le rendu de la nature qui
s’apprécient délicieusement dans des œuvres
comme celles du Portrait de l’Infant Baltasar
Carlos sur son poney (1634-1635) ou le
Portrait de Philippe IV en chasseur (16321634). Pour l’artiste, ces années correspondent
aussi à une accélération de sa gloire, impliquant
un carnet de commandes fort rempli, des honneurs et bien sûr la fortune. C’est alors qu’il
sera épaulé par Martinez del Mazo qui entre
dans son atelier en 1631. Toute une galerie de
portraits est offerte au visiteur : la famille royale et les gens de la cour et les bouffons sont ses
modèles. Un genre dont il veut casser les
conventions rigides, aérant ses compositions et
cherchant à régénérer la tradition. Peintre des
portraits certes, mais cela ne semble pas l’empêcher d’aborder la fable sacrée ou profane
comme cette délicate et très sensuelle Allégorie
féminine (1645-1655) et surtout l’énigmatique
et fascinante Vénus au miroir (1647-1651), seul
nu subsistant de l’artiste et qui rappelle sans
aucun doute combien l’artiste a été touché par
les nombreuses nudités vénitiennes, un genre
rare dans la peinture espagnole.
Lors de son deuxième voyage en Italie de
1649 à 1651, c’est plus en agent artistique du roi
d’Espagne qu’il parcourt la péninsule, chargé
d’acquérir des œuvres antiques et modernes
pour le palais de l’Alcazar qu’en artiste, désireux de parfaire sa formation. C’est au cours de
ce voyage qu’il peint le célèbre Portrait
d’Innocent X (1650) s’inscrivant dans la tradition des portraits de pape peints par Raphaël et
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Titien, sans renoncer à peindre des modèles
choisis dans la vie populaire comme cette jeune
paysanne, La Contadina (1650). A son retour à
la cour d’Espagne, les protagonistes de la
famille royale ont changé. Le roi a perdu sa première épouse mais aussi son fils chéri Baltazar
Carlos, seule l’infante Marie-Thérèse survit. En
seconde noce, il épouse Marie-Anne d’Autriche
qui lui donnera trois enfants, Marguerite, Felipe
Prospero, Charles II. La production de portraits
à destination des cours européennes pour témoigner de l’avenir de la dynastie mais aussi de sa
puissance redouble de vigueur. Son pinceau virtuose transforme les lourds vêtements de cour
en symphonies chromatiques. Dans le Portrait
de l’infant Felipe Prospero, Vélasquez rehausse
son teint livide par des touches de rouge. Celui
de l’Infante Marie-Thérèse (1652) se distingue
par sa coiffure, faite d’une perruque semé de
papillons scintillants. Le dernier Portrait du
Philippe IV (1654) peint par Vélasquez, a été
souvent copié mais c’est un sommet de perfection dans l’harmonie des noirs si magnifiquement maîtrisé par l’artiste.
Palette plus vive
Martinez del Mazo dont la tâche principale est de dupliquer les portraits royaux à partir
des originaux du maître signe celui de l’Infante
Marguerite en robe rose et argent. Vélasquez
crée une version en robe bleue de l’Infante
Marguerite, envoyée à son tour à la cour de
Vienne, comme les versions blanche et rose,
pour suivre en temps réel, dirait-on aujourd’hui
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l’évolution des traits
de la princesse. La
section consacrée à
Juan
Bautista
Martinez del Mazo
permet de mesurer
la difficulté à distinguer entre les originaux du maître et
les copies de Mazo.
Son style ne devaitil pas être le plus
proche possible de
celui du maître ?
D’ailleurs à la mort
de Vélasquez en
1660, c’est lui qui
sera nommé peintre
de la Cour. Son
identité artistique
montre une palette
plus vive et contrastée que celle de son mentor, une conception plus
simplifiée des formes et un goût pour les effets
de surface qui passe par la multiplication des
rehauts blancs, comme Les Petits Cavaliers
(1645-1650), admiré et copié par Manet.
Quant à la toile des Ménines, si célèbre et
si étrange, ne vous attendez pas à la contempler.
Ce tableau est un monument et les monuments
ne se déplacent pas, dit le commissaire. C’est
par contre une version réduite, conservée à
Kingston Lacy, qui est proposée. Longtemps
attribuée à Vélasquez, les experts semblent
d’accord pour dire que tant dans la vivacité de
la palette que les détails d’exécution, l’œuvre
serait de la main de Martinez del Mazo.
En présentant en épilogue deux
Autoportraits de Vélasquez, l’un mature (16401650) l’autre plus vieillissant (1644-1659),
encadrant un Cheval blanc (1634-1638), la lecture des œu-vres se fait plus intimiste. A celles
et ceux qui ont manqué les grandes rétrospectives organisées conjointement par le Prado à
Madrid et le Metropolitan de New York en
1889-1990 ou celle de la National Gallery à
Londres en 2006, c’est une occasion unique
d’admirer les œuvres de celui qui a inspiré tant
de peintres modernes de Renoir à Degas jusqu’à
Dali, Bacon et Picasso et dont Manet disait qu’il
disait « le peintre des peintres ».
Régine Kopp
Jusqu’au 13 juillet 2015
www.grandpalais.fr
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après la victoire sur les susdits Maures – avec
force déploiement de bannières espagnoles
(constitutionnelles d’aujourd’hui !). On peut
s’en divertir, bien qu’il n’y ait pas réellement de
second degré.
L’opéra nécessite donc un ténor glorieux.
Contrat rempli. Après Domingo il y a quelques
années, Alagna affronte un rôle-titre tout en
rodomontades. Bien lui en prend ! Son émission, son timbre, possèdent toujours des ressources de vaillance, avec quelque chose de
rayonnant. Passons sur quelques aigus qui lui
échappent dans son premier air (celui, fameux,
précité)... Notre ténor national reste la justification pleine et entière de cette production ! À ses
côtés, Sonia Ganassi ne faillit pas, Chimène au
chant sûr dans tous les registres. Annick Massis
(l’Infante), Paul Gay (Don Diègue), Nicolas
Cavallier (le Roi) et Luca Lombardo (Don
Arias) complètent un plateau vocal parfaitement
en phase. Michel Plasson dirige avec la science
experte d’un connaisseur comme peu de
Massenet, devant un orchestre clair bien que
parfois tonitruant. Mais l’œuvre est ainsi faite.
opéra
Le Cid en fanfare
Après presque cent ans d’absence, le Cid revient sur la terre de ses exploits.
L’occasion, au Palais Garnier, d’un beau plateau vocal, et éventuellement de
redécouvrir l’opéra de Massenet.
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Pré claironnant
Opéra Garnier : « Le Cid » © Agathe-Poupeney / Opéra national de Paris
C’est le devoir de l’Opéra de Paris, Opéra
national subventionné par le ministère de la culture, de présenter et défendre le répertoire
lyrique français. On ne peut donc que saluer le
retour dans la grande boutique du Cid, créé en
cette maison en 1885. Opéra d’un Massenet
alors au sommet de la gloire, il y fut repris jusqu’en 1919. Puis ce fut le silence, avec de rares
représentations de-ci de-là. En 2011, l’Opéra de
Marseille s’est avisé de donner l’ouvrage, au
prétexte tout trouvé de la présence de Roberto
Alagna. C’est cette production qui est reprise au
Palais Garnier, avec le même divo et le même
prétexte. Pour autant, on ne saurait croire qu’il
s’agit d’un chef-d’œuvre ; avec son livret tarabiscoté, et une musique de même substance,
malgré d’omniprésents renforts de fanfares et
chœurs guerriers. On notera trois airs, qui ont
acquis une renommée partielle au disque ou
dans certains récitals (par le héros : « Ô noble
lame étincelante », « Ô souverain, ô juge » ce
qu’il y a peut-être de mieux dans la musique ; le
doucereux « Pleurez mes yeux » par l’héroïne),
d’une inspiration un peu plus sentie. Mais guère
beaucoup plus…
Charles Roubaud reprend donc sa production, avec une action (sur un livret inspiré gros-
a
so modo de Corneille) transposée dans
l’Espagne des années 20 ou 30. Une idée
comme une autre… Si ce n’est que l’on ne comprend pas trop ce que viennent faire dans ce
contexte les Maures dont il est question. La
mise en scène se conforme tout du long à cette
idée, sans surprise, pour éclater dans un final –
L’art lyrique français est à la fête ! C’est
ainsi qu’à l’Opéra-Comique, le Pré aux clercs
fait aussi son grand retour. Cet opéra-comique
de Ferdinand Hérold (1791-1833) avait été créé
en 1832 dans ce même théâtre, pour s’y perpétuer avec plus de 1600 représentations (!) jusqu’en 1949. Puis survint l’oubli. Injuste ? On ne
saurait le prétendre… Sur un sujet historique de
convention (d’amours contrariées, bien entendu, plus ou moins sur fond de Saint-
Opéra-Comique : «Le Pré aux clercs» © DR Vincent Pontet
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Barthélemy), la musique égrène ses airs et
ensembles dans une pâle imitation de Rossini,
sans l’invention ni le génie. Tout juste détacherait-on le beau chœur des « Mascarades » vers
la fin, ou l’ensemble qui clôt le premier tableau
du dernier acte, mais l’un comme l’autre avec
des idées musicales répétées à satiété. On n’est
guère mieux loti sur ce plan que lors de la résurrection de Zampa, du même Hérold, en 2008 en
ce même lieu. L’entreprise se justifie toutefois
pleinement, pour illustrer le répertoire qui a fait
les riches heures de l’Opéra-Comique (on ne
manquera pas à cet égard l’exposition « De
Carmen à Mélisande » – voir notre article).
de saison, se déploient ceux de Chantons sous
la pluie. Singin’ in the Rain fut d’abord un film,
succès mondial de la Metro-Goldwyn en 1952.
Il reprenait, en les adaptant, des chansons de
Nacio Herb Brown et Arthur Freed, pour en
faire un classique de la comédie musicale au
cinéma. Par la suite, il servit de trame, avec de
nouvelles adaptations, à des arrangements pour
des théâtres de Broadway. C’est l’un de ces
arrangements, daté de 1986, que prend le
Châtelet, mais à nouveau adapté (par le chef
d’orchestre Gareth Valentine, avec une instrumentation plus étoffée et divers changements
musicaux). Le résultat musical en est « sim-
Châtelet : «Singin' in the Rain» © Theatre du Chatelet - Patrick Berger
D’autant que les meilleurs ingrédients sont
mis à son service. Éric Ruf conçoit une mise en
scène impeccablement réglée, avec un décor
propice de clairière boisée, des costumes d’époque et des gestes en phase avec l’action. Les
personnages sont campés avec précision, et parfaitement distribués vocalement. Pour le rôle
principal, Michael Spyres constitue tout un
luxe, ténor qui déploie son grand art (quasi
incongru en la circonstance). Christian Helmer,
Marie Lenormand, Jaël Azzaretti, Emiliano
Gonzalez Toro, Éric Huchet, figurent mieux que
des appoints, par la justesse du style alliée à la
franchise de l’émission. Et les uns comme les
autres aussi à leur aise dans les dialogues parlés.
Paul McCreesh mène tout ce beau monde en
compagnie du Chœur Accentus et de
l’Orchestre Gulbenkian, avec une conviction
presque communicative.
Pluie en chansons
Le Châtelet se donne aux parapluies. Après
ceux de Cherbourg, qui s’ouvraient sur le début
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cinéma – mais l’œuvre, qui comme on l’imagine fait la part belle à la danse de variétés, entre
claquettes et castagnettes, le veut. Parmi la troupe d’excellents chanteurs-danseurs, le virevoltant Dan Burton et l’impayable Emma Kate
Nelson se distinguent. L’Orchestre de chambre
de Paris ne ménage pas ses décibels, pour faire
la pige à l’amplification du chant, guidé par
l’assurance de Gareth Valentine.
Roméo d’époque
La grande salle de la fringante
Philharmonie ne cesse pas. Dans tous les répertoires, et tous types de formations. Cette fois
revient à François-Xavier Roth et à son orchestre les Siècles, d’essuyer les plâtres encore frais
du neuf auditorium. Pour une œuvre de choix,
alliant chœur, solistes vocaux et orchestre :
Roméo et Juliette de Berlioz. Fidèle à ses
options, le chef choisit de respecter au plus prés
les répartitions spatiales prévues par la partition ; pour les instruments (d’époque) et les
chanteurs, ceux-ci amenés à se déplacer en
fonction des passages de la « symphonie dramatique ». Autant que faire se peut ; car le volume
en rondeur de la Philharmonie ne correspond
pas exactement aux salles de concert rectangulaires du XIXe siècle (du type de la salle de
l’ancien Conservatoire, lieu de la création). Le
résultat n’en est pas moins saisissant. Avec des
fortunes diverses suivant les moments (comme
ce petit chœur prévu en coulisse qui résonne de
plet » (qualificatif de
Valentine lui-même),
avec des thèmes et
chansons gentillets
sans grande consistance. Le sujet est, lui,
beaucoup plus savoureux : qui conte les
mésaventures du premier cinéma parlant,
sorte de cinéma dans
le cinéma, évidemment avec moins d’effet à la scène. Avec
son grand talent,
Robert Carsen en tire
tout le sel. Jouant de
projections, de jeux
Francois-Xavier Roth © Marco Borggreve
scéniques dans les
projections, dans un noir et blanc des plus pro- par trop). Roth sort grand vainqueur de ce défi,
pices. Magnifique ! On regrettera seulement le déchaînant ses troupes, et accessoirement l’actableau final, dans le genre revue du Moulin cueil du public. Le ténor Jean-François Borras
Rouge, qui vient dépareiller cette allégorie du paraît un peu court de souffle (est-ce l’effet de
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la salle ?), quand Jérôme Varnier campe crânement son rôle (de basse, mais ici barytonant), et
qu’Isabelle Druet dispense des « strophes » sensibles. Excellent chœur Aedes, qui aurait toutefois gagné à être plus fourni pour l’apothéose
finale.
Confirmations d’atelier
82
L’Atelier lyrique de l’Opéra de Paris
confronte ses jeunes voix à des pages, célèbres,
d’opéras de Beethoven, Berlioz, Boieldieu,
Gluck, Wagner, Mozart et Rossini. Une sorte de
défi, pleinement rempli. Adriana Gonzalez, Élisabeth Moussous, Oleksiy Palchykov, Arto
Sarkissian, Yu Shao, Gemma Ni Bhriain,
Tomasz Kumiega ou Ruzan Mantashyan relèvent le gant, rivaux sans complexe et sans
déchoir de chanteurs fameux qui les ont précédé dans ce grand répertoire. Le relai du chant
(international, on le voit), comme de l’Opéra de
Paris semble des plus assurés ! Dans un Palais
Garnier qui affiche complet, l’accompagnement
des instrumentistes du Cercle de l’Harmonie
(renouvelé, après la scission ayant donné naissance au Concert de la Loge olympique) se
révèle, lui, perfectible, en dépit de la battue souple de Jérémie Rhorer.
Concert national et radiophonique
L’autre récente salle de concert de Paris,
celle de la Maison de la Radio, se livre à
l’Orchestre national de France, pour un programme également des plus classiques :
Beethoven, Brahms, Bartók. Viktoria Mullova
fait montre d’une dextérité aérienne dans le
Concerto pour violon brahmsien, alors que la
s
virtuosité d’ensemble de la phalange s’épanouit
dans le bien nommé Concerto pour orchestre de
Bartók, sous la férule emportée de David
Afkham.
Bon anniversaire M. Boulez !
La Philharmonie II célèbre avec faste les
90 ans de Pierre Boulez, à travers des concerts,
mais aussi des colloques et une exposition (voir
notre article). À Robert Piencikowski, connaisseur comme peu (unique ?) du compositeur et
responsable des archives de la Fondation Paul
Sacher de Bâle, détentrice des partitions autographes de Boulez, revient une brillante présentation qui éclaire sous des jours inédits une
œuvre dont on n’a pas fini de découvrir les ressources cachées. Ou quand le bagout s’allie à la
science ! Le soir, l’Ensemble Intercontemporain
distille le concert « À Pierre, le Grand Soir ».
Tout un programme ! Explosante fixe, œuvre
phare des années 90, est mise en regard du
tendu Torsion d’Olga Neuwirth, du parcellaire
Takdima du tout jeune compositeur Benjamin
Attahir, de l’apodictique (sic) Scales du regretté
Christophe Bertrand, du rutilant à Pierre de
Luigi Nono, à son confère et ami en 1985, du
très original Zug, pour sept cuivres, d’Enno
Poppe, ainsi que de Frontispice… de Ravel,
mais orchestré par Boulez. Le tout, sous la
direction efficace de Matthias Pintscher. Le lendemain, place aux élèves du Conservatoire de
Paris, pour « Messages et esquisses ». Ou un
concert d’hommage distribuant des créations :
de Betsy Jolas, chantant, d’Hugues Dufourt,
rude, de Marc Monnet, pétillant, de Frédéric
Durieux, décidé, d’Enno Poppe, allusif, de
Philippe Hurel, bavard, d’Ivan Fedele, fébrile,
de Johannes Maria Staud, ardent, de Philippe
Manoury, félin, et de Bruno Mantovani, résonnant. Et pour finir, Messagesquisses « sur le
nom de Paul Sacher », du maître lui-même.
Œuvre de 1977, qui n’a pas perdu de sa sensibilité, surtout dans sa troisième partie, au rebours
du rêche Explosante fixe. Puisque, il faut bien
dire, le soleil de Boulez, dans sa renommée et sa
valeur, a vu son éclat quelque peu se ternir ces
vingt dernières années.
Suave Rusalka
Excellente initiative que de ressortir
Rusalka ! production créée en cette même
Bastille en 2002, reprise en 2005, et ensuite
laissée dix ans en sommeil. L’opéra de Dvořák
est suffisamment rare (bien que moins, ces derniers temps) pour mériter d’être revu et réentendu. D’autant qu’il s’agit d’une réalisation en
tous points remarquable, dans sa restitution
musicale et sa représentation, signée ici (et
encore) Robert Carsen. Pour conter cette légende de naïade amoureuse d’un humain qu’elle
finira par perdre tout en se perdant, on retrouve
ainsi ce reflet onirique de deux mondes, aquatique et terrestre, par des images d’une splendide évocation : vaste chambre dédoublée par le
haut ou par le côté, puis les mêmes éléments
dispersés dans les airs, alliant plaisir esthétique
et intelligence scénique. Le plateau vocal (quasi
entièrement slave, à défaut d’être entièrement
tchèque) s’y baigne comme poisson dans l’eau,
dans des caractérisations bien profilées. Venus à
la rescousse des deux rôles principaux, après la
défaillance des chanteurs annoncés, Svetlana
Aksenova (Rusalka) et Pavel Cernoch (le
Prince) dépassent leur fonction de supplétif,
dans un prenant lyrisme pour la première et un
élan ferme pour le second ; trouvant son acmé
dans leurs voix conjuguées, lors du magnifique,
et attendu, duo final. Larissa Diadkova émerge
de son côté avec une Ježibaba, la sorcière de
l’histoire, caverneuse à souhait. Pertinente
intervention d’Alisa Kolosova pour la
Princesse, ou la rivale de l’héroïne. La direction
musicale de Jakub Hrůša soutient la partition de
mille détails, face à un orchestre rutilant, pour
rendre meilleure justice à une œuvre qui recèle
plus d’un charme.
Pierre-René Serna
«Rusalka» © C. Leiber / OnP
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chronique des concerts
De Bach à Wagner…
Heureux printemps musical qui s'annonce… Ce mois parisien est marqué par
la tradition des oeuvres de Jean-Sébastien Bach à l'occasion du week-end de
Pâques. C'est une véritable pluie polyphonique qui s'abat sur la capitale, jugez
plutôt : Pas moins de trois Saint-Jean, Deux Saint-Matthieu et une Messe en si,
le tout donné en l'espace de trois jours !
Un choix s'impose évidemment et il faut
faire des sacrifices. Un lamentable concours de
circonstances prive Daniele Gatti de “sa“ SaintJean à l'auditorium de Radio-France. Le projet
original visait à présenter l'ouvrage avec des
chanteurs lyriques en dehors de toute approche
baroquisante ; une combinaison de grève sociale et de curieuses mesures de sécurité exceptionnelles interdiront finalement le concert
(alors même que les répétitions avaient été
menées à leur terme). Le même soir, point
Maurizio Pollini
(encore ?) de grève à la Philharmonie et des
vigiles peu regardants à l'entrée. John Eliot
Gardiner donne une Messe en Si de toute beauté, à la tête de son Monteverdi Choir et son
orchestre. Le lieu offre une résonance très flatteuse qui sert d'écrin naturel à des interprètes de
haute volée. Les phylactères du Kyrie eleison
libèrent des entrecroisements de timbres magnifiques et rarement on aura entendu un W aussi
juste d'intonations et des rythmes. Le changement de disposition permet au Dona nobis
pacem final de rayonner dans un équilibre
quasi-miraculeux. Le lendemain, c'est au tour
de René Jacobs d'offrir au public parisien une
mémorable Passion selon Saint-Jean.
L'Akademie für Alte Musik Berlin est disposée
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de biais afin d'offrir le meilleur angle possible.
Le chef choisit de diviser le RIAS Kammerchor
en deux ensembles distincts : l'un à l'arrière
pour les interventions tutti et l'autre côté cour,
juste derrière les solistes comme une ombre
portée. Evidemment moins incisif que Gardiner
la veille, René Jacobs privilégie une ligne aux
reliefs mordorés souvent accentués par une longueur de note généreuse et des accents retenus.
Le Es ist vollbracht se fait l'écho sensible d'une
foi intérieure, tandis que les interventions du
chœur dans Ruht wohl, ihr
heiligen Gebeine renvoient à
une spiritualité sans lien avec
une quelconque incarnation
sonore.
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Un tout autre univers se déploie sur la
scène de l'amphithéâtre Bastille avec une reprise du brillantissime Siegfried et l'anneau maudit, mis en scène par Charlotte Nessi. Ce spectacle créé il y a un an tout juste, fait mentir la
catégorie “Jeune public“ dans laquelle il est présenté. Étonnant projet que celui qui consiste à
présenter en 1h30 la quasi totalité du Ring
wagnérien, qui plus est avec la Loge Olympique
en guise d'effectif de poche et une répartition
astucieuse des rôles chantés et joués… En faisant l'économie de plusieurs boucles narratives
(notamment la paternité de Siegfried dans la
Walkyrie et quelques éléments liés à Wotan),
l'action se concentre sur un flux dramatique
plein d'émotions et d'images fortes. Enfants et
adultes rient de bon cœur ou bien ouvrent de
grands yeux fascinés, sans que jamais l'attention
se relâche. Le comique des scènes des transformations ou la belle réussite du combat de
Siegfried (Jàn Rusko) contre le dragon Fafner
sont parmi les plus belles réussites de cette production à ne manquer sous aucun prétexte.
Malgré l'exiguïté du lieu, le plateau vocal se
prend au jeu et ne sous-dimensionne pas ses
interventions, bien aidé en cela par la battue
énergique de Vizenz Praxmarer. Quelle surprise
alors pour des jeunes auditeurs d'entendre à
quelques mètres seulement, Catherine Hunold
chanter l'immolation de Brünnhilde ou voir
débarquer dans leur dos Fasolt et Fafner (excellents Jérémie Brocard et Florian Westphal) !
L'utilisation de la video et des éclairages permet
une modularité très plastique des décors, si bien
qu'on oublie rapidement tous les repères
conventionnels pour se passionner d'un bout à
l'autre. Une grande réussite.
Incarnation totale en
revanche pour le beau récital
de Maurizio Pollini dans un
remarquable
programme
Chopin-Boulez. Le pianiste
milanais est dans ses bons
David Verdier
soirs et tient à le faire entendre. Les préludes op.28 trouvent sous ses doigts une
résonance et une luminosité sans égal. La lisibilité
totale des plans harmoniques est absolument
prodigieuse ; qui offrirait
aujourd'hui une telle combinaison d'impact et de
couleur ? L'interprétation
de la sonate n°2 de Pierre
Boulez élève la partition
au niveau des trois dernières sonates de Beethoven.
On plonge sans retenue
dans cette demi-heure de
bourrasques de notes et de
«Siegfried et l’anneau maudit» © Opéra national de Paris
fascinants paysages.
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Comédie Française
Théâtre de l’Odéon - Europe
La Maison de Bernarda Alba
Federico García Lorca
écrit La Maison de Bernarda
Alba en 1936, deux mois
avant son exécution par les
franquistes. Il a alors 38 ans.
Dernier volet de la trilogie
rurale après Noces de sang
(1933) puis Yerma (1935), ce
drame en trois actes a été
longtemps censuré par le
pouvoir franquiste, car
García Lorca y dénonce le
poids des traditions en même
temps qu’il annonce le long
repli de l’Espagne prisonnière de ses croyances et de
ses superstitions.
à travers trois générations de femmes emmurées,
ce texte interroge l’essence
Cécile Brune sera Bernarda
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même de la tyrannie, intime et politique.
Lilo Baur souhaite donner corps aux non-dits, où bruissent le désir et
la vie, et a ainsi imaginé une série de tableaux dédoublés où se joue le drame
de la modernité contre l’ordre ancien.
. Du 23 mai au 25 juillet 2015
Les Fausses Confidences
«Les Fausses Confidences» avec Manon Combes, Isabelle Huppert, Bulle Ogier
© Pascal Victor
Comment faire parler l'amour ? Luc Bondy aborde son quatrième
Marivaux avec une distribution exceptionnelle : Isabelle Huppert, Bulle
Ogier, Louis Garrel...
Un tel triomphe devait impérativement être repris. Le revoici à l'Odéon,
après une tournée internationale.
. Du 15 mai au 27 juin 2015
Billetterie en ligne :x
Billetterie en ligne :x
Théâtre de la Colline
Théâtre du Rond-Point
Affabulazione
Murmures des murs
Conçu et mis en scène par Victoria Thierrée-Chaplin, ce spectacle permet de voir ou revoir Aurélia Thierrée, accompagnée de Jaime Martinez,
Antonin Maurel.
«Affabulazione» © Samuel Rubio
écrit en 1977, ce texte de Pier Paolo Pasolini a une structure très simple : une mère, un père, un fils, et quelques figures qui font avancer le récit.
Il y est question de l’éternel problème de la filiation et de la rivalité dans la
filiation. Les figures sont des archétypes, mais l’auteur sait brasser
références littéraires, contexte politique, société bourgeoise et réalités individuelles pour construire un monde crédible, saisissant.
Ce spectacle mis en scène par Stanislas Nordey - qui sera sur scène
dans le rôle du Père, pour partager avec ses acteurs les fulgurances poétiques d’Affabulazione et l’inquiétant questionnement générationnel de
Pasolini - animera la scène du Théâtre de la Colline dès le mois de mai.
Elle disparaît dans l’un
des cartons de déménagement
qui jonchent le sol. Elle traverse le temps, l’espace et les
murs. Monte-en-l’air, elle
escalade les façades, pénètre
les chambres fortes des secrets.
Elle se laisse piéger par les
murs. Ils ont une âme et des histoires, du vécu.
Aurélia Thierrée fuit,
échappée au pays des merveilles dans une Venise déserte.
Danses, acrobaties et fantasmagories, les murs prennent
vie, elle en est l’actrice ou la
spectatrice.
«Murmures des Murs»
Peuplé de bestioles fantas© Richard Haughton
tiques, «Murmures des murs»
est un songe tangible, un périple aux paroles rares, avec plongée consentie
dans la folie douce.
. du 12 mai au 6 Juin 2015
. Du 4 au 23 mai 2015
Billetterie en ligne, ou réservation au 01 44 62 52 52
Billetterie en ligne : www.theatredurondpoint.fr/
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Sélection musicale de mai :
Clou de la saison 2014-2015 de l'Opéra de Paris présenté du 16 mai au
14 juin Le Roi Arthus de Ernest Chausson sera dirigé par Philippe Jordan et
mis en scène par Graham Vick. Sophie Koch interprétera le rôle de
Genièvre, Thomas Hampson sera Arthus et Roberto Alagna Lancelot en
alternance avec Zoran Todorovich (les 8, 11 et 14 juin), Orchestre et Chœur
de l'Opéra national de Paris.
Le 10 mai au Palais Garnier, Ferruccio Furlanetto chantera
Winterreise de Schubert accompagné au piano par Igor Tchetuev.
Dans le cadre de la série Convergences deux concert les 21 et 23 mai
autour d'Ernest Chausson par le Quatuor Les Dissonances et le violoniste
David Grimal, avec la soprano Maris Kalinine (Chausson, Enescu,
Schönberg le 21, Szymanowski, Chausson et Kodaly le 23), suivi le 27 mai
par un récital de Stéphane Degout en compagnie de Michaël Guido (piano),
d'Alexis Descharmes (violoncelle) et de Matteo Cesari (flûte) : au programme Wolf, Strauss, Ravel et Liszt.
Au TCE du 4 au 16 mai nouvelle production de Macbeth de Verdi dirigé par Daniele Gatti et mise en scène par Mario Martone avec Roberto
Frontali (Macbeth), Susanna Branchini (Lady Macbeth), Andrea Mastroni
(Banquo), Jean-François Borras (Macduff), Sophie Pondjiclis (La dame
d’honneur de Lady Macbeth) et Jérémy Duffau (Malcolm), l'Orchestre
National de France. Poursuite du cycle Shakespeare le 10 mai avec un
concert interprété par Anna Netrebko et l'Orchestre National de France
dirigé par Daniele Gatti dans le cadre des Grandes Voix (Berlioz Béatrice et
Bénédict, Strauss Quatre derniers Lieder et Prokofiev Roméo et Juliette). Le
18 mai, Requiem de Verdi par le chef Andris Poga et les chanteurs Maija
Kovalevska, Olesya Petrova, Giorgio Berrugi et Riccardo Zanellato,
l'Orchestre Symphonique de Lettonie.
Le 22 concert de l'Orchestre de chambre de Paris dirigé par
Jean-François Heisser également au piano avec la soprano
Anne-Catherine Gillet : œuvres de Manoury, Stockhausen,
Barber et de Copland. Le 23 à l'affiche des Grandes Voix Jonas
Kaufmann accompagné par le Munich Radio Orchestra dirigé
par Jochen Rieder en tournée parisienne avec son concert « Du
bist die Welt für mich » dans lequel il chantera des airs et chansons signés Lehár, Stolz, Kálmán, Benatzky, Tauber et May. Le
26 l'Orchestre de chambre de Paris sera placé sous la direction de
Sir Roger Norrington avec Ian Bostridge pour interpréter des
œuvres de Purcell, Vaughan Williams, Britten et Haydn. Le 29
toujours dans le cadre des Grandes Voix, Magdalena Kožená et
Mitsuko uchida joueront de Schumann Gedichte der Königin
Maria Stuart, de Debussy Chansons de Bilitis, de Mahler les
Rückert Lieder, de Debussy Ariettes oubliées et enfin de
Messiaen Poèmes pour Mi (Livre II).
Création à l'Opéra Comique les 18 et 19 mai, avec Contes de la lune
vague après la pluie de Xavier Dayer, opéra de chambre sur un livret
d’Alain Perroux, d’après le scénario du film de Kenji Mizoguchi, donné la
première fois le 20 mars 2015 à l’Opéra de Rouen, dirigé par Jean-Philippe
Wurtz et mis en scène par Vincent Huguet avec Taeill Kim, Majdouline
Zerari, Carlos Natale, Judith Fa, Luanda Siqueira, David Tricou, et
l'Orchestre Ensemble Linea.
Récital de Simone Kermes Salle Gaveau le 6 mai en compagnie de La
Magnifica Comunitta dirigée par Enrico Casazza (Eccles, Dowland,
Purcell...).
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Le 28 mai Christine Schäfer sera en récital avec le Quatuor Auryn :
au programme des œuvres de Anton Webern, de Schumann/Aribert
Reimann (Six mélodies, transcription pour soprano et quatuor à cordes, op.
107), de Schœnberg et de Felix Mendelssohn/Aribert Reimann ("... oder soll
es Tod bedeuten?", huit Lieder et un fragment de Felix Mendelssohn transcrit pour soprano et quatuor à cordes).
A Versailles les 5 et 6 mai, Dardanus de Rameau, mis en scène par
Michel Fau et dirigé par Raphaël Pichon à la tête de l'Ensemble Pygmalion
avec la distribution suivante Mathias Vidal (Dardanus), Gaëlle Arquez
(Iphise), Karina Gauvin (Vénus), Florian Sempey (Anténor), Nahuel Di
Pierro (Teucer, Isménor) et Katherine Watson (Un Songe, l’Amour, une
phrygienne). Rareté le 30 mai avec une version de concert de Uthal de
Mehul chanté par Karine Deshayes (Malvina), Yann Beuron (Uthal), JeanSébastien Bou (Larmor) et Sébastien Droy (Ullin), Les Talens Lyriques dirigé par Christophe Rousset.
La Philharmonie de Paris accueille l'Orchestre de Paris les 6 et 7 mai
pour un concert dirigé par Jaap van Zweden avec en solistes David Fray,
Mélanie Diener, Iris Vermillion et Werner Güra (Mozart, Mahler/Das
Klagende Lied). Le 10 retour à Paris de Jessye Normann en récital (de
Gershwin aux musicals). Opéra en concert le 12 avec La Fiancée du Tsar
de Rimski-korsakov, l'Orchestre National de France placé sous la direction
de Mikhail Jurowski, Olga Kulchinskaya (Marfa), Agunda Kulaeva
(Lubacha) et Alexey Tararintsev (Ivan). Madrigaux amoureux de
Monteverdi le 18 joués par Les Arts Flo et Paul Agnew aux commandes, en
compagnie de Miriam Allan, Hannah Morrison, Lucile Richardot et
Stéphane Leclercq. Les 20 et 21 retour de l'Orchestre de Paris dirigé par
Paavo Järvi avec Matthias Goerne (Debussy, Dalbavie, Moussorgski), le
23 concert du National d'Ile-de-France dirigé par David Levi avec Sandrine
Buendia et Marie Lenormand.
«Le Pré aux clercs» © Pierre Grosbois
Ailleurs en France : A Nice nouvelle production de La Juive de
Halévy du 17 au 26 mai dirigée par Frédéric Chaslin et mise en scène par
Gabriele Rech.
Vu et entendu : à l'Opéra Comique retour réussi du Pré aux clers
d'Hérold (31 mars) mené par une troupe soignée, drôle et endiablée placée
sous la direction tonique de Paul Mac Creesh.
François Lesueur
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Théâtre de l’Odéon - Europe
Henry VI
«Henry VI» © Nicolas Joubard
Shakespeare mis en scène par Thomas Jolly et joué par la Cie La
Piccola Familia... une véritable odyssée qui suscite une adhésion publique
extraordinaire. Car Thomas Jolly croit au théâtre. Et il fait ce qu'il faut pour
qu'on y croie avec lui.
. Du 2 au 17 mai 2015 / Berthier 17e
Durée : 2 cycles de 9 heures, à voir en 2 dates non dissociables : 2 et 3 mai, ou 8 et
14 mai, ou 9 et 10 mai, ou 16 et 17 mai
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ANTOINE (01.42.08.77.71)
Le Système d’Antoine Rault m.e.s. Didier Long - avec Lorànt
Deutsch et Stéphane Guillon - jusqu’au 30 mai
BOUFFES PARISIENS
(01.42.96.92.42)
u A gauche, en sortant de l’ascenseur de Gérard Lauzier - m.e.s.
Arthur Jugnot - jusqu’au 9 mai
COLLINE (rés. 01.44.62.52.52)
u Le Chagrin par la compagnie les
Hommes Approximatifs - m.e.s.
Caroline Guiela Nguyen - du 6 mai
au 6 juin.
u Affabulazione de Pier Paolo
Pasolini - m.e.s. Stanislas Nordey du 12 mai au 6 juin.
COMéDIE DES CHAMPS ELySéES
(01.53.23.99.19)
u Le Père de Florian Zeller - m.e.s.
Ladislas Chollat - avec Robert Hirsch
- jusqu’au 28 juin.
COMéDIE FRANçAISE
SALLE RICHELIEU (01.44.58.15.15)
u Les Estivants de Gorki - m.e.s.
Gérard Desarthe - jusqu’au 25 mai
u Le Songe d’une nuit d’été de
Shakespeare - m.e.s. Muriel MayetteHoltz - jusqu’au 25 mai
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u Innocence de Dea Loher - m.e.s.
Denis Marleau - jusqu’au 1er juillet
u Lucrèce Borgia de Victor Hugo m.e.s. Denis Podalydès - jusqu’au 19
juillet
u La Maison de Bernarda Alba de
Federico Garcia Lorca - m.e.s. Lilo
Baur - du 25 mai au 25 juillet
STUDIO-THéâTRE (01.44.58.98.98)
u Dancefloor Memories de Lucie
Depauw - m.e.s. Hervé Van der
Meulen - jusqu’au 10 mai
u La princesse au petit pois de Hans
Christian Andersen - m.e.s. Édouard
Signolet - du 29 mai au 28 juin
VIEUX-COLOMBIER (01.44.39.87.00)
u Les enfants du silence de Mark
Medoff - m.e.s. Anne-Marie Etienne
- jusqu’au 17 mai
u Le système Ribadier de Feydeau m.e.s. Zabou Breitman - du 29 mai
au 17 juillet
EDOUARD VII (01.47.42.59.92)
u Un dîner d'adieu d'Alexandre de
la Patellière et Matthieu Delaporte jusqu’au 31 mai
ESSAïON (01 42 78 46 42)
u Conversation ou Le voyage
d’Ulysse de Primo Levi et Ferdinando
Camon - m.e.s. Dominique Lurcel -
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jusqu’au 26 mai
HéBERTOT (01.43.87.23.23)
u Des Gens bien de David LindsayAbaire - m.e.s. Anne Bourgeois avec Miou Miou - jusqu’au 30 mai
LA BRUyèRE (01.48.74.76.99)
u On ne se mentira jamais ! d’Eric
Assous - m.e.s. Jean-Luc Moreau jusqu’au 30 mai
MADELEINE (01.42.65.07.09)
u Le Souper de Jean-Claude Brisville
- m.e.s. Daniel Benoin - jusqu’au 17
mai
MATHURINS (01.42.65.90.00)
u Fabrice Luchini - Poésie ? - jusqu’au 27 mai
NOUVEAUTéS (01.47.70.52.76)
u Le Tombeur de Robert Lamoureux
- m.e.s. Jean- Luc Moreau - jusqu’au
17 mai
ODéON EUROPE (01.44.85.40.40)
u Ivanov d’Anton Tchekhov - m.e.s.
Luc Bondy - création - jusqu’au 3 mai
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u Les Fausses Confidences de
Marivaux - m.e.s. Luc Bondy - avec
Isabelle Huppert, Bulle Ogier - reprise du 15 mai au 27 juin.
ATELIERS BERTIER
u Henry VI de Shakespeare - m.e.s.
Thomas Jolly / Cie La Piccola Familia
- du 2 au 17 mai
RIVE GAUCHE (01 43 35 32 31)
u Le joueur d’échecs de Stefan
Zwieg - m.e.s. Steve Suissa - avec
Francis Huster - jusqu’au 31 mai
u 24h de la vie d'une femme de
Stefan Zweig - m.e.s. Steve Suissa avec Clémentine Célarié - jusqu’au
29 août
THéâTRE DE LA VILLE
(01.42.74.22.77)
u Antigone de Sophocle - m.e.s. Ivo
Van Hove - avec Juliette Binoche jusqu’au 14 mai
Théâtre du Rond-Point
Semianyki Express
Saint-Pétersbourg, deux minutes d’arrêt.
Les clowns Semianyki, mot russe pour « famille », ont triomphé partout
avec leur tribu de fous furieux et de monstres de tendresse, version ruskov
des Simpson. Ils reviennent avec un nouveau spectacle sans mots. Ils ont
tellement bourlingué, ce sera leur sujet : le voyage. Un quai de gare, un
train. Une expédition, une promesse de départ.
«Semianyki Express»
Dans ce nouveau spectacle, nos six zouaves russes s’en donnent à cœur
joie. Ils croquent les personnages du quotidien avec une férocité délicieuse.
Les gags s’enchaînent à un rythme effréné. Chaque saynète est un régal qui
nous entraîne dans un univers onirique où la cruauté et le drame se transforment au final en rires !
. Du 28 mai au 5 juillet 2015
Réservation : 01 44 95 98 21 ou Billetterie en ligne
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Fondation Custodia
Raphaël, Titien, Michel-Ange
Dessins italiens du Städel Museum de Francfort
La Fondation Custodia offre au public une magnifique occasion de découvrir une sélection
de l’exceptionnel ensemble de dessins des maître italiens de la Renaissance en possession du Städel
Museum de Francfort.
90 chefs-d’œuvre des XVe et XVIe de Raphaël, Titien, Michel-Ange ou Corrège sont ainsi
exposées dans les salles de l’hôtel Lévis-Mirepoix, permettant d’examiner le meilleur de l’art du
dessin. La collection provient de la donation du banquier et collectionneur Johann Friedrich
Städel, et cet ensemble de dessins italiens fut complété, au milieu du XIXe s., par l’historien de l’art
John David Passavant, devenant ainsi une collection illustrant le différents courants artistiques de
cette époque.
L’exposition propose donc un large choix de dessins représentatifs de la période allant de
1430 à 1600, dont certains rarement ou jamais dévoilés au public. En premier lieu, des feuilles du
XVe attireront l’attention : quatre élégantes figures gothiques, en pied, du cercle de Pisanello (vers
1430), une étude à la pointe de méta, d’après nature, pour ue “Crucifixion“ (vers 1450), le dessin
vénitien d’un jeune homme régardant ver le ciel (vers 1500) ou encore l’esquisse exceptionnelle
d’une scène de deuil par l’artiste Marco Zoppo (vers 1470).
Parmigianino «Tête d’homme barbu tourné vers la droite», vers
1523/25 (?). Sanguine, 189 x 131 mm
© Städel Museum, Frankfurt am Main
Atelier Grognard
l VLAMINCK – jusqu’au 25 mai
Bibliothèque Nationale
l FRANçOIS IER, POUVOIR ET IMAGE –
jusqu’au 21 juin
Centre Pompidou
l QU’EST-CE QUE LA PHOTOGRAPHIE ? –
jusqu’au 1er juin
l TéLéMAQUE – jusqu’au 18 mai
Cité du cinéma, St.Denis
l HARRy POTTER – jusqu’au 6 sept.
Cité de la Musique
l DAVID BOWIE – jusqu’au 30 mai
l PIERRE BOULEZ – jusqu’au 28 juin
Fondation Cartier
l BRUCE NAUMAN – jusqu’au 21 juin
Fondation Custodia
l RAPHAëL, TITIEN, MICHEL-ANGE.
Dessins du Städel Museum de
Francfort – jusqu’au 21 juin
l CIRQUE D’ENCRES. L’œuvre sur
papier de Gèr Boosten – jusqu’au
21 juin
Fondation Louis Vuitton
l LES CLEFS D’UNE PASSION – jusqu’au 6 juillet
Grand Palais
l VELáZQUEZ – jusqu’au 13 juillet
l LUMIèRE ! Le cinéma inventé –
jusqu’au 14 juin
l JEAN PAUL GAULTIER – jusqu’au 3
août
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Mais d’autres chefs-d’œuvre sont exposés, tels les dessins de Fra Bartolommeo et MichelAnge à Florence, Raphaël à Rome, Le Corrège à Parme et Titien à Venise réalisés entre 1500 et
1525, voire des œuvres de la seconde partie du XVIe s. provenant d’Italie centrale et du Nord.
. jusqu’au 21 juin 2015
l ICôNES AMéRICAINES. Chefs-d’œu-
vre du SFMoma & de la collection
Fisher – jusqu’au 22 juin
Halle St. Pierre
l LES CAHIERS DESSINéS – jusqu’au 14
août.
Institut des Cultures d’Islam
l CHERCHEZ L’ERREUR – jusqu’au 19
avril
Jeu de Paume
l FLORENCE HENR & TARyN SIMON &
VANDy RATTANA – jusqu’au 17 mai
La Maison Rouge
l MATHIEU BRIAND - ET IN LEBERTALIA
EGOUN PROJET & JéRôME ZONDER - jusqu’au 10 mai
Maison de l'Amérique latine
l CARMEN PERRIN – jusqu’au 16 mai
Maison du Japon
l FIBER FUTURES. Les explorateurs de
la création textile au Japon – du 6
mai au 11 juillet.
Maison de la Photographie
l HARRy GRUyAERT, DENIS DARZACQ,
GéRARD RONDEAU, LyDIA FLEM, LUIZ
MAURO & yUKI ONODERA – jusqu’au
14 juin.
Musée des arts décoratifs
l DéBOUTONNER LA MODE – jusqu’au 19 juillet
Musée d’art du judaïsme
l MAGIE. Anges et démons dans la
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tradition juive – jusqu’au 28 juin
Musée d’art moderne
l GEORGES NOëL. La traversée des
signes – jusqu’au 3 mai
l LA PASSION SELON CAROL RAMA –
jusqu’au 12 juillet
l MARKUS LüPERTZ. Une rétrospective – jusqu’au 19 juillet
Musée Bourdelle
l MANNEQUINS D'ARTISTE, MANNEQUINS
FéTICHES – jusqu’au 12 juillet
Musée Dapper
l L’ART DE MANGER - Rites et traditions – jusqu’au 12 juillet
Musée Jacquemart-André
l DE GIOTTO à CARAVAGE - Les passions de Roberto Longhi – jusqu’au
20 juillet
Musée du Louvre
l POUSSIN ET DIEU – jusqu’au 29 juin
l LA FABRIQUE DES SAINTES IMAGES.
ROME-PARIS, 1580-1660 – jusqu’au
29 juin
l L’éPOPéE DES ROIS THRACES – jusqu’au 20 juillet
Musée du Luxembourg
l LES TUDORS – jusqu’au 19 juillet
Musée Maillol
l LE BAISER – jusqu’au 26 juillet
Musée Marmottan-Monet
l LA TOILETTE. Naissance de l’intime
– jusqu’au 5 juillet
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Musée de Montmartre
l L’ESPRIT DE MONTMARTRE ET L’ART
MODERNE 1875-1910 – jusqu’au 25
septembre
Musée d’Orsay
l PIERRE BONNARD. Peindre l’Arcadie
– jusqu’au 19 juillet
l DOLCE VITA. Art décoratif italien
1900-1940 – jusqu’au 13 sept.
Musée du Quai Branly
l LES MAîTRES DE LA SCULPTURE DE
CôTE D’IVOIRE – jusqu’au 26 juillet
Musée Zadkine
l DES(T/S)INS DE GUERRE – jusqu’au 14
juin
Palais Galliera
l JEANNE LANVIN – jusqu’au 23 août
Palais de Tokyo
l LE BORD DES MONDES & TAKIS,
champs magnétiques & BOUCHRA
KHALILI – jusqu’au 17 mai
Petit Palais
l LES BAS-FONDS DU BAROQUE – jusqu’au 24 mai
l CARMEN ET MéLISANDE, drames à
l’Opéra Comique - jusqu’au 28 juin
Pinacothèque
l AU TEMPS DE KLIMT. La Sécession
à Vienne – jusqu’au 21 juin
l LE PRESSIONNISME. Les chefsd’œuvre du graffiti sur toile – jusqu’au 13 septembre.
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Bonlieu, Annecy
Théâtre Maurice Novarina, Thonon
Alain Platel, une des grandes figures de la danse internationale, a créé
«Coup fatal», une spectacle qui traverse le temps, les genres et les frontières,
dressant le tableau du passé colonial du Congo sur une scène envahie de
douilles de munitions. Les gestes grands et fanfarons des danseurs et des
musiciens conjurent l’iniquité de la violence.
Avec son spectacle «La fin du monde est pour dimanche», François
Morel fait exister une galerie de personnages vieillissants qui font le bilan
de leur vie et viennent partager avec nous leurs rêves, leurs folies, leurs
angoisses et leurs petits bonheurs.
«Coup fatal» © Chris van Der Burght
«La fin du monde est pour dimanche» © Manuelle Toussaint
Exubérant, baroque et lumineux, ce spectacle bénéficie de la musique
du compositeur bruxellois Fabrizio Cassol, fusion de jazz, rock et musiques
traditionnelles, servie par des musiciens de Kinshasa, par le contre-ténor
congolais Serge Kakudji et par le guitariste Rodriguez Vandama.
. Mardi 5 mai 2015 à 20h30
Seul en scène, il nous parle du temps qui passe, avec en point de mire
ce dernier jour de la semaine. Tout est dit avec l’humour et l’affection qu’on
lui connaît, avec légèreté, voire parfois une tendre absurdité,
Coup fatal
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François Morel
. Jeudi 7 et vendredi 8 mai à 20h
Billetterie : [email protected]
Billetterie en ligne : billetterie.mal-thonnon.org, ou rés. 04.50.71.39.47
Grange au Lac, évian
Château Rouge, Annemasse
Doué d’une finesse, d’une sensibilité hors du commun et d’une
virtuosité à couper le souffle, Nikolaï Lugansky est un pianiste d’une polyvalence extraordinaire.
Le clarinettiste David Krakauer qui, à la fin des années 80, arpentait
les pays d’Europe de l’Est afin de recueillir les derniers vestiges d’une
culture yiddish presque totalement anéantie par l’Holocauste, est depuis lors
engagé dans une relecture de la musique klezmer qu’il ne cesse de
réinventer.
Nikolaï Lugansky
David Krakauer
Très apprécié par le
public international, l’annonce de ses concerts remplit chaque année les
salles dans lesquelles il est
invité.
A la Grange au Lac,
il saura charmer les mélomanes en interprétant des
œuvres de Franz Schubert
- Allegretto en do mineur
D915 & Sonate pour
piano en do mineur, D958
- et de Tchaïkovski - Trois
saisons : Janvier, Août,
Novembre & Sonate pour
piano en sol majeur, Op.
37 « Grande sonate ».
David Krakauer. Photo credit GMD Three
Débridé et sauvage, David Krakauer stupéfie sur scène. Quand il fait
surfer à une allure époustouflante sa clarinette sur la crête des aigus, c’est
une exubérante bouffée de joie qui passe.
Nikolaï Lugansky
© Marco Borggreve Naïve-Ambroisie
. mercredi 13 mai 2015
. samedi 16 mai 2015
Billetterie en ligne : www.chateau-rouge.net/,
ou rés. par téléphone : (+33) 450 43 24 24
Billetterie en ligne : billetterie.mal-thonnon.org, ou rés. 04.50.71.39.47
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Théâtre de Valère, Sion
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Abbaye de Bonmont
A la folie Feydeau
Philippe Jaroussky
Les Concers de
Bonmont accueillent le
contre-ténor vedette
Philippe Jaroussky en
mai, qui fera résonner
les murs impressionnants de l'Abbaye
presque millénaire de
Bonmont, située à 8
kilomètres au nord-est
de Nyon dans le canton
de Vaud, au fil d'un concert exclusif pour la
Suisse romande.
«A la folie Feydeau» © David Grimbert
En un même spectacle se trouvent réunies trois pièces en un acte de
Georges Feydeau offrant chacune une vision féroce de l’amour : Amour et
Piano, Feu la mère de Madame, Les Pavés de l’ours. Dans chacune des
intrigues, un couple se découvre, se déchire, se retrouve…
Dans un décor composé de trois structures mobiles, et conçu comme
une boîte à musique, les comédies s’enchaînent l’une l’autre en chansons,
servies par les comédiens de l’A2R compagnie, et mises en scène par
Léonard Matton.
. Mercredi 13 mai 2015
Aux côtés du
pianiste Jérôme Ducros,
il y présentera son programme «Green» dédié
à la poésie de Paul
Verlaine mise en
musique par Debussy,
Chausson, Fauré et
Hahn.
Philippe Jaroussky © Simon Fowler
. Mardi 5 mai 2015 à 19h
Réservez vos billets en ligne sur www.kulturticket.ch (Bonmont Concerts).
Billetterie : 027 / 323.45.61 ou en ligne
Salle Centrale de La Madeleine
ADC, Salle des Eaux-Vives, Genève
Le Quatuor de Genève
Ion
Le 3ème concert de la saison 2015 sera marqué par le passage à la
Salle Centrale de la
Madeleine, le Musée d’Art
et d’Histoire, traditionnel
lieu d’accueil de la formation, devant faire l’objet
d’importants travaux de
rénovation.
Le programme rapproche Schumann et son
Quatuor à cordes op. 41
n° 1, de Brahms et son
Quatuor à cordes op. 51
n° 1. On sait l’importance
pour le jeune Brahms de
sa rencontre avec le couple Schumann, Robert
l’ayant d’emblée qualifié
de «nouveau messie de
l’art», sans oublier l’amitié passionnée qui a lié
Brahms et Clara jusqu’à
la mort de celle-ci.
Quatuor de Genève: Sidonie Bougamont, violon, André Wanders, violoncelle, Emmanuel
Morel, alto et François Payet-Labonne, violon
. dimanche 3 mai à 11 heures
En mai, la danseuse et
chorégraphe Cindy Van Acker
viendra présenter sa nouvelle
création à la Salle des EauxVives.
Avec «Ion», Cindy Van
Acker revient à la possibilité
d’expérimentations radicales
que permet le solo et renoue
ainsi avec le travail de son
propre corps sur scène, à la
recherche d’une plasticité
extrême.
C’est un solo qui renverse des valeurs qu’on pensait admises pour soi-même,
qui redonne sa place au temps
et à l’exigence du travail dans
la durée.
Cindy Van Acker
Crédit Steeve Iuncker
. Du 6 au 13 mi 2015
Billetterie : Service culturel Migros, Stand Info Balexert, Migros Nyon La Combe
Billets à l’entrée
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Victoria Hall
La Cathédrale de Genève
L’OSR et le Bicentenaire
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La date historique du 19 mai 1815-2015 marque l’entrée officielle de
Genève dans la Confédération suisse.
Pour clôturer les festivités de ce bicentenaire, l’Association GE200.CH
et l’Orchestre de la Suisse Romande offrent à toutes et à tous un concert
symphonique au Victoria Hall.
Des œuvres de
Gioacchino Rossini
(Guillaume
Tell,
Ouverture en mi
mineur), Frank Martin
(Concerto pour sept
instruments à vent, timbales, batterie et
orchestre à cordes),
Igor
Stravinski
(Divertimento, Suite du
ballet Le Baiser de la
Fée) et Maurice Ravel
(Boléro,
pour
orchestre) seront au
programme de ce rendez-vous musical, sous
la battue de Neeme
Järvi.
Neeme Järvi
Chœur et l'Orchestre de
l'Université de Genève
Après une messe aux airs de tango argentin, «Misa Tango» de Martin
Palmeri, qui ajoute aux éléments traditionnels de la messe les rythmes
dansants et saccadés du tango, le Chœur et l'Orchestre de l'Université,
placés sous la direction de Sébastien Brugière, vous inviteront à vous laisser séduire par la «Mass of the Children» de John Rutter, une messe latine
composée en 2003, sur laquelle
le compositeur a ajouté des
textes poétiques anglais d’auteurs tels que Thomas Ken ou
William Blake.
Sébastien Brugière
. 19 mai 2015
Cette messe «des» enfants,
qui respire l'optimisme et la joie
de vivre, sera interprétée, de
concert, par le Chœur de
l’Université et les enfants de la
Maîtrise du Conservatoire populaire.
En solistes : Valérie
Bonnard - mezzo soprano,
Thibault Gérentet - baryton et
Jérémy Vannereau - bandonéon.
. dimanche 3 mai 2015
CONCERT GRATUIT SUR RESERVATION (4 billets par personne au maximum)
Billetterie : Ville de Genève ou Migros Genève
billetterie-culture.ville-ge.ch
Théâtre Saint-Gervais
Théâtre Alchimic
L’âne et le ruisseau
Haute Autriche
«Haute Autriche» © Isabelle Meister
Christian Geffroy Schlittler © C. Lutz
Il y a toujours dans la production d’un grand auteur un bijou qui sommeille. Pièce posthume écrite en 1855, «L’âne et le ruisseau» cristallise avec
éclat les thèmes centraux de l’œuvre de Musset : le besoin et la difficulté de
s’engager, en amour comme en politique.
En présentant ce texte étrangement méconnu, un bijou de lucidité et de
cruauté, Christian Geffroy Schlittler poursuit son travail de réappropriation
du répertoire classique.
Reprise au théâtre Alchimic de «Haute Autriche ou Grandeur et misère
d'être parents», une pièce de Franz-Xaver Kroetz mise en scène par Jérôme
Richer.
Il s'agit d'une comédie vive et populaire avec de l’humour sur la douce
tyrannie exercée par la société de consommation.
Si la pièce est profondément ancrée dans les années 1970, le texte
résonne très fortement aujourd’hui, car être consommateur, ce n’est pas forcément être heureux.
. Du 12 au 23 mai 2015
. du 5 au 17 mai 2015
Billetterie en ligne : www.saint-gervais.ch, ou 022/908.20.20
Billetterie en ligne : www.alchimic.ch, ou réservation au 022/301.68.38
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GENEVE
concerts
u 1.5. : Série répertoire. OSR, dir.
Markus Stenz, LEONIDAS KAVAKOS,
violon (Wagner, Sibelius, Adams).
Victoria Hall à 20h (Tél.
022/807.00.00 / [email protected])
u 3.5. : ORCHESTRE DE LA HEM, dir.
Laurent Gay. OPHÉLIE GAILLARD, violoncelle (Wagner, Schumann,
Brahms). Victoria Hall de Genève à
20h (billetterie de la Ville de
Genève, T. +41(0)22 418 62 45,
www.ville-geneve.ch/themes/culture/offre-culturelle/billetteries/
u 6.5. : Série Grands Classiques.
OSR, dir. Neeme Järvi, PER
TENGSTRAND, piano (Schubert,
Stenhammar, Beethoven). Victoria
Hall à 20h (Tél. 022/807.00.00 /
[email protected])
u 9.5. : CHœuRS DES COLLèGES, dir.
Marie-Isabelle Pernoud, Chœur
Cité-Lac, Chœur de Pontverre
(Haydn). Cathédrale Saint-Pierre à
20h (loc. Service culturel Migros,
022/319.61.11)
u 10.5. : Série Musique sur Rhône.
Ensemble de musique de chambre
de l’OSR, FRANçOIS PAyET-LABONNE
& DAVID VALLEZ, violon, EMMANuEL
MOREL & DENIS MARTIN, alto, SON
LAM TRâN, violoncelle, JONATHAN
HASKELL, contrebasse (Martin,
Rossini). BFM, Salle Théodore
Turrettini, 11h (Tél. 022/807.00.00 /
[email protected])
u 10.5. : Concert du dimanche de la
ville de Genève. ORCHESTRE
SyMPHONIquE GENEVOIS, dir. Gleb
Skvortsov, DIEGO INNOCENZI, orgues
(Bach, Guilmant). Victoria Hall à 11h
(Billetterie en ligne http://billetterieculture.ville-ge.ch / Location Espace
Ville de Genève)
u 10.5. : CITATIONS ET DÉCALAGES.
Sébastian Jacot, traverso, Antoine
Françoise, piano, Brice Pauset, pianoforte, Isabelle Magnenat, violon,
Hans Egidi, alto, Olivier Marron, violoncelle, Joan Mompart, comédien
(C.P.E. Bach, Zimmermann). Musée
d’art et d’histoire de Genève à 11h
(rés. : www.contrechamps.ch/)
u 11.5. : ORCHESTRE DE L’uNIVERSITÉ
DE GENèVE, CHœuR DE L’uNIVERSITÉ DE
GENèVE & MAîTRISE Du CONSERVATOIRE
POPuLAIRE DE GENèVE. Dir. Sébastien
Brugière. VALÉRIE BONNARD mezzosoprano, THIBAuLT GÉRENTET barytonbasse (Rutter, Dvorak). Victoria Hall
à 20h30 (loc. Espace Ville de
Genève)
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u 12.5. : Jazz Classics. MONTy
ALExANDER, piano & THE HARLEM
KINGSTON ExPRESS. Victoria Hall à
20h30 (loc. Fnac / Ticketcorner)
u 19.5. : OSR, dir. Neeme Järvi &
solistes (Rossini, Martin, Stravinski,
Ravel). Victoria Hall à 20h30 (concert
gratuit sur invitation à retirer aux
points de vente de la Ville de
Genève et Service culturel Migros)
u 20.5. : ORCHESTRE DE L’OPÉRA
NATIONAL DE PARIS, dir. Philippe
Jordan (Beethoven). Victoria Hall à
20h (loc. Service culturel Migros
Genève)
u 21.5. : Concert Prestige n°5. CARTE
BLANCHE à VÉRONIquE GENS, Geneva
Camerata, dir. David Greilsammer,
Véronique
Gens,
soprano
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(Beethoven, Purcell, Rameau,
Pelzel, Gluck, Gershwin, Mozart).
Victoria Hall à 20h (billetterie : Fnac)
u 22.5. : Série Symphonie. OSR, dir.
Neeme Järvi, SARAH RuMER, flûte,
JÉRôME CAPEILLE, hautbois (Ravel,
Martin, Beethoven). Victoria Hall à
20h (Tél. 022/807.00.00 /
[email protected])
u 27.5. : Heures Musicales. MuSIquES
EN BOuCHE, dir. et présentation Arie
Van Beek. Pavillon Sicli à 12h15 (loc.
[email protected], 022/807.17.90
ou www.ticketportal.com)
u 27.5. : Heures Musicales.
L’APÉROCG, dir. et présentation Arie
Van Beek. Pavillon Sicli à 18h (loc.
022/807.17.90 / [email protected]
ou www.ticketportal.com)
Musicales de Compesières
Vendredi 29 mai à 20h30 : Béatrice Berrut, piano
Programme : Bach-Busoni : Orgel Choralvorspielr
Chopin : Fantaisie en fa min, op 49
Brahms : Ballade op 10
Liszt : Après une lecture de Dante
Dimanche 31 mai à 11h00 - concert offert
Savika Cornu-Zozor, soprano, Marcelo Gionnini, orgue
Programme en cours d'élaboration
Dimanche 31 mai à 15h00
Causerie à la Commanderie - Salle des Chevaliers
Programme en cours d'élaboration
Dimanche 31 mai à 17h00
Chœur du Cern, Direction : Gonzalo Martinez
Programme : Donizetti : Missa di Gloria e Credo
. les 29, 30 et 31 mai 2015
Abonnements : www.musicalesdecompesieres.ch
Billets en vente sur place une heure avant le concert
Navette gratuite depuis la Place Neuve - 1h avant les concerts
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u 28.5. : Concert hors abonnement.
OSR, dir. Kazuki yamada, LAuRA
AIKIN, soprano (Tchaïkovski, Glière,
Dvorak). Victoria Hall à 20h (Tél.
022/807.00.00 / [email protected])
u 30.5. : Migros-pour-cent-culturelclassics.
LONDON
SyMPHONy
ORCHESTRA, dir. Daniel Harding,
JANINE JANSEN, violon (Rushton,
Mendelssohn Bartholdy, Mahler).
Victoria Hall à 20h (loc. SCM
022/319.61.11)
opéra
u 3.5. : CuPIDON à L’OPÉRA. Avec la
participation des jeunes solistes en
résidence du Grand Théâtre, dir.
David Greilsammer. Grand Théâtre
de Genève à 17h (billetterie en ligne
sur le site du Geca, ou Fnac ou le
soir du concert dès 19h)
u 13.5. : Récital ANGELA GHEORGHIu,
soprano, AEC L’OSR. Grand Théâtre à
19h30 (billetterie en ligne sur le site
du Grand Théâtre)
u Jusqu’au 2.5. : A L’AèDE de
Mathias Glayre, création. Théâtre
de l’usine (rés. 022/328.08.18 ou
www.theatredelusine.ch)
u Jusqu’au 3.5. : LE VILAIN PETIT MOuTON d'Olivier Chiacchiari, m.e.s. Guy
Jutard, création, dès 6 ans. Théâtre
des Marionnettes, mer à 15h, sam à
17h, dim à 11h et 17h (rés.
022/807.31.07)
u Jusqu’au 3.5. : PIèCES DÉTACHÉES de
et m.e.s. Valérie Poirier. Théâtre
Alchimic, mar+ven à 20h30, mer-jeusam-dim à 19h (rés. 022/301.68.38 /
www.alchimic.ch - loc. Service culturel Migros)
u Jusqu’au 3.5. : ANGELS de Cosima
Weiter, m.e.s. Alexandre Simon et
Cosima Weiter, création. Le Grütli,
Grande salle (sous-sol), mar-jeu-sam
à 19h, mer-ven à 20h, dim à 18h.
Relâche lun ([email protected] /
022/888.44.88)
u Jusqu’au 3.5. : BRIGITTE ROSSET SEuLE EN SCèNE de Brigitte Rosset,
m.e.s. Jean-Luc Barbezat. La
Comédie de Genève, mar-mer-jeusam à 19h, ven à 20h, dim à 17h (loc.
022/320.50.01 / [email protected])
u Jusqu’au 9.5. : LA VISITE DE LA VIEILLE
DAME de Friedrich Dürrenmatt, par le
Teatro Malandro, m.e.s. Omar
Porras. Théâtre de Carouge, salle
François-Simon, mar-mer-jeu et sam
à 19h, ven à 20h, dim à 17 (billetterie : 022/343.43.43 - [email protected])
Camerata du Léman
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théâtre
Samedi 30 mai à 20h30 : Camerata du Léman
Solistes : Fabrizio von Arx, violon, Béatrice Berrut, piano
Programme : Thème “Jeunes prodiges“
A. Corelli : Concerto grosso
W.A Mozart : Sérénade nocturne pour cordes
F. Mendelssohn : Double concerto pour violon et piano
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u Jusqu’au 24.5. : JEAN ET BÉATRICE
de Carole Fréchette, m.e.s.
Mariama Sylla. Théâtre du CrèveCœur, ch. de Ruth, Cologny, mar au
sam à 20h00, dim à 18h00 (rés.
022/786.86.00)
u 5, 6, 9, 10.5. : RIquET à LA HOuPPE
d'après Charles Perrault, m.e.s.
Laurent Brethome, création, dès 10
ans. Théâtre Am Stram Gram, mar à
19h, mer à 15h, sam+ dim à 17h
(Loc. 022/735.79.24 et Service
Culturel Migros)
u Du 5 au 17.5. : HAuTE AuTRICHE Ou
GRANDEuR ET MISèRE D’êTRE PARENTS de
Franz-xaver Kroetz, m.e.s. Jérôme
Richer. Théâtre Alchimic, mar+ven à
20h30, mer-jeu-sam-dim à 19h / relâche lun et le jeu 14 mai (rés.
022/301.68.38 / www.alchimic.ch)
u Du 5.5. au 7.6. : LA CERISAIE de
Tchékhov, m.e.s. Raoul Pastor.
Théâtre des Amis, Carouge, marven à 20h, mer-jeu-sam à 19h, dim
à 18h (rens. 022/342.28.74)
u 6 et 7.5. : Les Singulières. LA
SEPTIèME VALLÉE de Jacques Probst.
Le Poche à 19h (loc. en ligne)
u Du 7 au 9.5. : PIèCE DE CHAMBRE
N°1 B.L.A.S.T.E.D de Karim Bel
Kacem, théâtre. Théâtre de l’usine
(rés. 022/328.08.18 ou www.theatredelusine.ch)
u Du 7 au 17.5. : PAS GRAND-CHOSE
PLuTôT RIEN de et m.e.s. Joël
Maillard, création. Le Grütli, Petite
Salle (2ème étage), à 20h, dim à 18h.
Relâche lun (billetterie : [email protected] / 022/888.44.88)
u Du 7 au 24.5. : LE FESTIVAL DE L'IMAGINAIRE. Six productions originales
et créatives avec les meilleurs inventeurs de la francophonie. Théâtre
Pitoëff (rés. 022/793.54.45 ou
[email protected])
u Du 12 au 23.5. : L'âNE ET LE RuISSEAu d'Alfred Musset, m.e.s.
Christian Geffroy Schlittler. Théâtre
Saint-Gervais, grande salle, mar-jeusam à 19h, mer-ven à 20h30 (loc.
022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch)
u Du 19 au 31.5. : C’EST PEuT-êTRE
de divers auteurs dont Pessoa,
m.e.s. Geneviève Guhl et Sophie
Rusch. Le Galpon (rés. au
022/321.21.76 au plus tard 2 heures
avant le début de l’événement mail: [email protected])
u Du 16 au 31.5. : VIANDE, MORCEAux
CHOISIS, Théâtre du Loup. Théâtre du
Loup, mar-jeu-sam à 19h, mer-ven à
20h, dim à 18h (rés. 022/301.31.00)
u 19, 22, 23, 24.5. : LENTO de et avec
Olli Vuorinen et Luis Sartori Do Vale,
dès 6 ans. Théâtre Am Stram Gram,
mar+ven à 19h, sam+dim à 17h
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(Loc. 022/735.79.24 et Service
Culturel Migros)
u Du 19.5. au 7.6. : RIFIFI RuE RODO
de et m.e.s. Guy Jutard, Claude-Inga
Barbey et René Delcourt, création,
adultes et ados. Théâtre des
Marionnettes, à 19h, sam à 20h, dim
à 17h (rés. 022/807.31.07)
u Du 20.5. au 4.6. : HOMME ENCADRÉ
SuR FOND BLANC de et par Pierric
Tenthorey, Gaëtan Bloom. Théâtre
Alchimic, mar+ven à 20h30, mer-jeusam-dim à 19h / relâche les 23-25
mai et le 1er juin (rés. 022/301.68.38
/ www.alchimic.ch - loc. Service culturel Migros)
u Du 21 au 24.5. et du 28 au 30.5. :
L’ABSENCE DE GOuVERNAIL de
Dorothée Thébert Filliger et
Filippo Filliger, création. Théâtre
de l’usine (rés. 022/328.08.18 ou
www.theatredelusine.ch)
u Du 26.5. au 14.6. : COMME IL VOuS
PLAIRA de Shakespeare, m.e.s.
Camille Giacobino, création. Le
Grütli, Grande salle (sous-sol), marjeu-sam à 19h, mer-ven à 20h, dim à
18h ([email protected] /
022/888.44.88)
u Du 27.5. au 7.6. : DISPERSION
(Ashes to Ashes) de Harold Pinter,
m.e.s. Gerard Desarthe. Avec Carole
Bouquet et Gérard Desarthe. Le
Poche-Genève, lun et ven à 20h30,
mer-jeu-sam à 19h, dim à 17h, mardi
relâche (location +41 (0)22 310 37
59, [email protected])
u 28.5. : Midi, théâtre ! - LE DÉMON
DE APRèS-MIDI de Nicolas yazgi,
Compagnie Pied de Biche. Le Grütli,
Foyer du Théâtre à 12h ([email protected] ou 022 888 44 88)
danse
u Jusqu’au 3.5. : GO ! par la Cie de
l’estuaire, danse. Le Galpon (rés. au
022/321.21.76 au plus tard 2 heures
avant le début de l’événement - mail
: [email protected])
u 2.5. : WHAT THE BODy DOES NOT
REMEMBER de Wim Vandekeybus.
BFM (billets : Service culturel
Migros, Stand Info Balexert, Migros
Nyon La Combe)
u Du 6 au 13.5. : ION de Cindy Van
Acker. Salle des Eaux-Vives, 82-84 r.
Eaux-Vives, à 20h30 (billets : Service
culturel Migros, Stand Info Balexert,
Migros Nyon La Combe)
u Du 19 au 22.5. : MONO de
Thomas Hauert. Salle des EauxVives, 82-84 r. Eaux-Vives, à 20h30
(billets : Service culturel Migros,
Stand Info Balexert, Migros Nyon La
Combe)
a
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u 21, 22, 26, 27, 28, 29, 30, 31.5. :
SALuE POuR MOI LE MONDE! d’après
Richard Wagner, chor. Joëlle
Bouvier, dir. Philippe Cohen, Ballet
du Grand Théâtre, création. BFM à
19h30, le 31 à 15h (billetterie en
ligne sur le site du GrandThéâtre)
divers
u 14 - 16.5. : En partenariat avec
l’Université de Genève et l’Institut
des hautes études internationales
et du développement. RENCONTRES
DE GENèVE HISTOIRE ET CITÉ CONSTRuIRE LA PAIx. Manifestation
annuelle cvulturelle et scientifique.
Informations détaillées sur
www.unige.ch/rectorat/maisonhistoire/Rencontres.html
LAuSANNE
concerts
u 3.5. : Concert du dimanche.
O.C.L., dir. Alondra De la Parra,
FRANçOIS DINKEL, basson (Vanhal,
Beethoven). Opéra de Lausanne à
11h15 (Billetterie de l’OCL: Tél. 021
345 00 25)
u 18 et 19.5. : O.C.L., dir. Kazuki
yamada, AuGuSTIN HADELICH, violon
(Fauré, Dvorak, Bizet).
Salle
Métropole à 20h (Billetterie :
021/345.00.25)
u 19.5. : Les Entractes du mardi.
ASTRID PFARRER, mezzo-soprano,
STÉPHANIE JOSEPH, violon et récitante,
GàBOR BARTA et CATHERINE SuTER
GERHARD, violon, JANKA SZOMORMEKIS, alto, CATHERINE MARIE TuNNELL,
violoncelle, VERONICA KuIJKEN, clavecin. Salle Métropole à 12h30
(Billetterie : 021/345.00.25)
u 21.5. : OSR, dir. Neeme Järvi,
SARAH RuMER, flûte, JÉRôME CAPEILLE,
hautbois (Ravel, Martin, Rossini,
Stravinski). Théâtre de Beaulieu à
20h15 (Tél. 022/807.00.00 /
[email protected] ou Passion Musique)
u 27.5. : Concert Découvertes. LE
PRINCE HEuREux d’Oscar Wilde, OCL,
dir. Jamie Phillips, Comédien/ne de
La Manufacture, musique de Jan
Bach. BCV Concert Hall à 17h (Billets
sur place ou 021 345 00 25)
u 27.5. : Les rencontres musicales.
CÉDRIC PESCIA, piano (J.-S. Bach).
Théâtre Kléber-Méleau, à 20h (loc.
au 021 625 84 29 ou Achat en ligne
sur vidy.ch)
u 29.5. : Les rencontres musicales.
CÉDRIC PESCIA, piano (Beethoven).
Théâtre Kléber-Méleau, à 20h (loc.
e
n
au 021 625 84 29 ou Achat en ligne
sur vidy.ch)
u 30.5. : Les rencontres musicales.
KRISTIAN BEZuIDENHOuT, pianoforte
(Mozart). Théâtre Kléber-Méleau, à
20h (loc. au 021 625 84 29 ou Achat
en ligne sur vidy.ch)
u 31.5. : Les rencontres musicales.
CAROLINE MELZER, chant, NuRIT STARK,
violon, CÉDRIC PESCIA, piano (Weill).
Théâtre Kléber-Méleau, à 17h30
(loc. au 021 625 84 29 ou Achat en
ligne sur vidy.ch)
théâtre
u Jusqu’au 2.5. : LE GRAND HôPITAL LE quINTETTE POuRSuITE par Eustache.
Théâtre 2.21, sam à̀ 21h (loc. sur :
www.theatre221.ch/)
u Jusqu’au 3.5. : PAS GRAND-CHOSE
PLuTôT quE RIEN, de et m.e.s. Joël
Maillard. Théâtre de L’Arsenic, sa
19h / ve 20h30 / di 18h (rés. en
ligne)
u Jusqu’au 3.5. : PLAy STRINDBERG de
Frédéric Dürrenmatt par la Cie
Voeffray-Vouilloz, m.e.s. Joseph E.
Voeffray. Pulloff Théâtre, Industrie
10, ve à 20h, sa à 19h et di à 18h
(réservations en ligne sur : www.pulloff.ch, ou 021 311 44 22)
u Jusqu’au 10.5. : LE DÉRATISEuR DE
HAMELIN de yves Ali Zahno, m.e.s.
Julie Burnier et Frédéric Ozier, création, dès 7 ans. Le petithéâtre (réservation en ligne sur le site du théâtre)
u Jusqu’au 10.5. : LE MANuSCRIT DES
CHIENS III de Jon Fosse, m.e.s.
Guillaume Béguin. Vidy-Lausanne,
salle René Gonzalez à 18h30, jeu à
14h15 et 18h30 (loc. 021/619.45.45)
/ 30.4. - Rencontre autour du manuscrit des chiens III.
u 1.5. : LES PARTICuLES ÉLÉMENTAIRES
de Michel Houellebecq. Adapt &
m.e.s. Julien Gosselin. VidyLausanne, salle Charles Apothéloz, à
19h (rés. 021/619.45.45 www.billetterie-vidy.ch)
u Du 5 au 13.5. : uN MÉTIER IDÉAL d’après le livre de John Berger et Jean
Mohr, adatp. Nicolas Bouchard,
m.e.s. Eric Didry. Vidy-Lausanne, La
Passerelle, à 20h30, dim à 18h, relâche lun (loc. 021/619.45.45)
u jeudi 7, vendredi 8, dimanche
10.5. : DREyFuS - DEVOS de Raymond
Devos. Interprétation : Jean-Claude
Dreyfus. Piano : Thomas Février.
M.e.s. Christophe Correira. Espace
culturel des Terreaux, jeu à 19h, ven
à 20h, dim à 17h (billetterie 021 320
00 46)
u Du 7 au 13.5. : DERBORENCE d’après Ramuz. Adapt & m.e.s. Mathieu
d
a
m
Opéra de Lausanne
é
m
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AILLEuRS
Béjart Ballet Lausanne
annecy
xx
Le Béjart Ballet Lausanne revient briller à l’Opéra ! En mai, trois
représentations vous permettront de voir, ou revoir pour certains, trois ballets chorégraphiés par Maurice Béjart, à savoir «Suite Barocco», «Juan y
Teresa» et «Piaf».
Le programme comprend également une création de Gil Roman,
«Tombées de la dernière pluie».
. 8, 9 et 10 mai 2015
Billetterie : 021/315.40.20 ou en ligne sur le site de l’Opéra
Bertholet. Vidy-Lausanne, salle
Charles Apothéloz, mar-jeu à 19h,
mer-ven-sam à 20h, dim à 17h (rés.
021/619.45.45 - www.billetterievidy.ch)
u Du 19 au 24.5. : AByMES / volet 2
- Living Gallery & La Poétique de
l'Autre, m.e.s. Audrey Cavelius.
Théâtre de L’Arsenic, ma, je, sa
19h / me, ve 20h30 / di 18h (rés. en
ligne)
u 19 au 31.5. : L’ECHANGE de Paul
Claudel, production Cie Le Mérinos,
coproduction Théâtre des Amis,
m.e.s. Raoul Teuscher. Pulloff
Théâtre, Industrie 10, me/ve à 20h,
ma/je/sa à 19h et di à 18h (réservations en ligne sur : www.pulloff.ch,
ou au 021 311 44 22)
u Du 21 au 25.5. : LOLA FOLDING de
Marc Jeanneret, m.e.s. Ariane
Catton, dès 7 ans. Le petithéâtre
(réservation en ligne sur le site du
théâtre)
u 22 et 23.5. : CASTING par Lausanne
Impro. Théâtre 2.21, à 20h (billetterie sur : www.theatre221.ch/abosbillets/reservations)
u Du 27 au 29.5. : PARLEMENT, de et
m.e.s. Joris Lacoste. Vidy-Lausanne,
salle Charles Apothéloz, jeu à 19h,
mer-ven à 20h (rés. 021/619.45.45 www.billetterie-vidy.ch)
u 27 et 28.5. : NOuS AVONS LES
MACHINES, création collective des
Chiens de Navarres, m.e.s. Jean-
a
g
Christophe Meurisse. Théâtre de
L’Arsenic, me 20h30 / je 19h (rés.
en ligne)
danse
u vendredi 1, samedi 2, dimanche
3.5. : PAN, chor. Tania de Paola.
Espace culturel des Terreaux,
jeu+sam à 19h, mer-ven à 20h, dim à
17h (billetterie 021 320 00 46)
u Du 8 au 10.5. : BÉJART BALLET
LAuSANNE, dir. Gil Roman. Opéra de
Lausanne, le 8 à 20h, le 9 à 19h, le 10
à 15h (Billetterie : 021/315.40.20,
lun-ven de 12h à 18h / en ligne et
infos : www.opera-lausanne.ch)
divers
u Jusqu’au 3.5. : Fécule, Festival des
cultures universitaires. La Grange de
Dorigny (rés. 021/692.21.24 + en
ligne sur la page de chaque spectacle)
u 28.5. : Forum Opéra – DIE
ZAuBERFLöTE, Conférence de Luca
Zopelli. Salon Alice Bailly de l’Opéra
de Lausanne à 18h45 (Billets en
ligne et infos : www.opera-lausanne.ch)
e
n
BONLIEu SCèNE NATIONALE aux Haras
d’Annecy, sauf mention contraire
(rens./rés. 04.50.33.44.11 / [email protected])
u 5 et 6.5. : COuP FATAL d’après
Serge Kakudji et Paul Kerstens. dir.
Artistique Alain Platel
u 6.5. : LE PEuPLE DE LA NuIT d’Aïda
Asgharzadeh, m.e.s. Franck Berthier
u 12 et 13.5. : LES PARTICuLES ÉLÉMENTAIRES de Michel Houellebecq, m.e.s.
Julien Gosselin
u 13.5. : quEEN KONG – LA BAZOOKA,
par Etienne Cuppens et Sarah
Crépin
u 19 et 20.5. : LES TRIPLETTES GO OuESt
de et m.e.s. Sylvain Chomet
u 21.5. : Solo par ROBERTO FONSECA,
piano et voix
annemasse
RELAIS CHâTEAu-ROuGE à 20h30
sauf mention contraire (loc.
+33/450.43.24.24)
u 6.5. : HANSEL ET GRETEL des Frères
Grimm, m.e.s. Métilde Weyergans
u 13.5. : DAVID KRAKAuER, jazz klezmer
u 19 et 20.5. : IL N'EST PAS ENCORE
MINuIT… par la Cie xy, cirque
bienne
Loc. : www.spectaclesfrancais.ch /
guichet du TOBS, Théâtre municipal /
Points de vente Ticketportal
u 1.5. : LIA (Félicien Donzé), voix, guitare, composition, textes. Théâtre de
Poche à 20h15
u 5.5. : LE MENTEuR de Goldoni, par la
Cie Marin. Théâtre Palace à 20h15
bonmont
En l’Abbaye de Bonmont (rés. en
ligne sur www.kulturticket.ch )
u 3.5. à 11h : Concert-brunch. BRuNO
CANINO, piano & FABRIZIO VON ARx,
violon
u 5.5. : PHILIPPE JARROuSKy, contreténor & Jérôme Ducros, piano
(Debussy, Chausson, Fauré, Hahn &
poésie de Paul Verlaine.
fribourg
THÉâTRE EquILIBRE à 20h (billetterie :
Fribourg Tourisme 026/350.11.00 /
[email protected])
u 7.5. : BIG APPLE de Isabelle Le
d
a
n
t
o
Nouvel, m.e.s. Niels Arestrup
u 12 et 13.5. : LA VISITE DE LA VIEILLE
DAME de Friedrich Dürrenmatt,
m.e.s. Omar Porras
u 20.5. : Concert 5. ORCHESTRE DE
CHAMBRE FRIBOuRGEOIS, dir. Laurent
Gendre, CHRISTIAN POLTÉRA, violoncelle (Ravel, Chostakovitch, Haydn)
givisiez
THÉâTRE DES OSSES, 20h, di à 17h
(loc. 026/469.70.00)
u Jusqu’au 3.5. : LE MENTEuR de
Carlo Goldoni, m.e.s. François Marin
la chaux-fds
THÉâTRE POPuLAIRE ROMAND / CENTRE
NEuCHâTELOIS DES ARTS VIVANTS (loc.
032/967.60.50, www.tpr.ch)
u 6 et 7.5. : ANGELS par la
Compagnie_Avec, création. BeauSite, le 6 à 20h45, le 7 à 19h
u 6.5. : Rêver, explorer, amplifier.
ETERNAL SILENCE (2009). Ciné-concert.
Cinéma ABC à 19h
u 7.5. : Rêver, explorer, amplifier. LA
GRèVE. Ciné-concert. usine électrique à 21h30
u 8.5. : SINCÉRITÉS PARALLèLES, concert
de Florence Chitacumbi et Pascal
Auberson, création. L’Heure bleue à
20h15
u 9.5. : Rêver, explorer, amplifier.
OMBRA, concert. Beau-Site à 20h15
meyrin
THÉâTRE FORuM MEyRIN
(loc. 022/989.34.34)
u 1.5. au Théâtre Vidy-Lausanne :
LES PARTICuLES ÉLÉMENTAIRES de Michel
Houellebecq, m.e.s. Julien Gosselin
u 6.5. à Bonlieu Scène nationale
Annecy : COuP FATAL, dir. Alain
Platel, KVS & les Ballets C de la B
u 20.5. à Château Rouge,
Annemasse : IL N'EST PAS ENCORE
MINuIT… par la Compagnie xy
mézières
THÉâTRE Du JORAT à 20h, dim à 17h
(loc.
021/903.07.55
ou
[email protected])
u 2 et 3.5. : LA BIBLIOTHèquE par la
Cie EnVol, m.e.s. Diana Fontannaz,
création
u 7.5. : OSR, dir. Neeme Järvi. PER
TENGSTRAND, piano (Schubert,
Stenhammer, Beethoven)
u 10.5. : ENSEMBLE VOCAL
INSTRuMENTAL LAuSANNE, dir. Michel
Corboz (Bach, Haendel).
u 13.5. : CAMÉLIA JORDANA, chant.
93
m
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m
Clavier : Donia Berriri. Basse, contrebasse : Sebastien Gastine. Claviers :
Laurent Bardainne. Batterie : Steve
Argüelles. Guitare : Nicolas
Villebrun
u 21, 22 et 24.5. : LA VSITE DE LA
VIEILLE DAME de Dürrenmatt, m.e.s.
Omar Porras, par le Teatro
Malandro
u 28.5. : HuIT FEMMES, de Robert
Thomas, m.e.s. Jean-Gabriel Chobaz
u 30 et 31.5. : AVRACAVABRAC, avec
des comédiens romands, champions
de l’improvisation
monthey
THÉâTRE Du CROCHETAN à 20h
(loc. 024/471.62.67)
u Du 6 au 8.5. : LES BONNES de Jean
Genet, m.e.s. David Fauvel
u 28.5. : LAC de Pascal Rambert,
m.e.s. Denis Maillefer
u 30.5. : ODySSÉE – PARCOuRS EN VILLE,
m.e.s. Jean-René Dubulluit et
Lorenzo Malaguerra
94
morges
THÉâTRE DE BEAuSOBRE à 20h sauf
mention contraire
(loc. 024/471.62.67)
u 2.5. à 19h : LOuNIS AïT MENGuELLET,
Chanson
u 6.5. : LES HOMMES VIENNENT DE
MARS ET LES FEMMES DE VÉNuS 2 de
Paul Dewandre, m.e.s. Etienne de
Balasy, Théâtre
neuchâtel
THÉâTRE Du PASSAGE. A 20h, di à 17h
(loc. 032/717.79.07)
u 9.5. : PIèCES DÉTACHÉES de et
m.e.s. Valérie Poirier
u 10.5. : DES MuRS ET DES PORTES de et
par Ariane Racine, conte
u 20, 22, 24 et 25.5. : CAMION à HISTOIRES d'Alain Serres
u 21.5. : CONCERT NO. 4.
Professeurs et étudiants de la
HEM. Auditorium 1, Campus Arc, à
20h. Entrée libre
nyon
uSINE à GAZ sauf mention contraire
(loc. 022/361.44.04)
u 7.5. : D'ACIER par L'Outil de
Ressemblance.
onex
SPECTACLES ONÉSIENS, salle communale à 20h30 (loc. 022/879.59.99
ou [email protected])
u 6 et 7.5. : LA LISTE DE MES ENVIES de
e
n
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o
Grégoire Delacourt, m.e.s. Anne
Vaucher
Théâtre du Crochetan, Monthey
(loc. 022/888.64.60)
u 21.5. : J’AVAIS uN BEAu BALLON
ROuGE d’Angela Dematté, m.e.s.
Michel Didym, Théâtre
u 29.5. : VOyAGE EN ASIE, Homayun
Sakhi, Concert
La pièce de Genet est une messe, une cérémonie sacrificielle. Le spectacle, mené tambour battant par David Fauvel et ses actrices, délivre une
puissance de l’instant, rare et sauvage. Un théâtre physiquement et émotionnellement engagé, comme nous l’aimons.
plan/ouates
Les Bonnes
pully
L’OCTOGONE, à 20h30 sauf mention
contraire (loc. 021/721.36.20)
u 12.5. : L'AVARE de Molière. Avec
Jacques Weber, Alban Guyon...
rolle
ROSEy CONCERT HALL (Ticketcorner)
u 12.5. à 20h : HÉLèNE GRIMAuD,
piano (Takemitsu, Berio, Janacek,
Fauré, Liszt, Schubert/Liszt, Rael,
Debussy)
«Les Bonnes». Photo : Virginie Meigné
sierre
. mercredi 6, jeudi 7, vendredi 8 mai 2015 à 20h
THÉâTRE LES HALLES (www.theatre-leshalles.ch / loc. 027/452.02.90)
u Du 27 au 30.5. à 19h30 : LAC de
Pascal Rambert, m.e.s. Denis
Maillefer, par La Manufacture-Haute
Ecole de théâtre.
u 3.5. dès 2h : LA BOuM. Entrée libre
sion
THÉâTRE DE VALèRE à 20h15, sauf mention contraire (loc. 027/323.45.61)
u 7.5. : LE MENTEuR de Carlo
Goldoni, par la Cie Marin (CH),
m.e.s. François Marin
u 13.5. : A LA FOLIE FEyDEAu d'après
Feydeau, par l’A2R compagnie (F),
m.e.s. Léonard Matton
PETITHÉâTRE (rés. 027 321 23 41,
[email protected])
u Les 7, 8 et 9.5. : JANINE RHAPSODIE,
par la Cie Julien Mages. Horaire : jeu
à 19h, ven à 20h30, sam à 19h
thonon-évian
MAISON DES ARTS, ESPACE MAuRICE
NOVARINA à 20h30, sauf mention
contraire (loc. 04.50.71.39.47 ou en
ligne : billetterie.mal-thonon.org)
u 5.5. : L’OR de Blaise Cendrars,
m.e.s. xavier Simonin
u 7 et 8.5. : LA FIN Du MONDE EST
POuR DIMANCHE de François Morel,
m.e.s. Benjamin Guillard
u 12.5. : DyPTIK, chor. Souhail
Marchiche, Compagnie Dyptik
u 16.5., Evian : NIKOLAï LuGANSKy
a
g
Billetterie / lun.-vend. 14h-18h / +41 (0)24 475 79 09
(Schubert, Tchaïkovski)
u 19.5. : J’AVANCE ET J’EFFACE de et
m.e.s. Alexis Armengol
u 23.5. : J’ARRIVE de Jean Cagnard,
m.e.s. Delphine Lamand
u 29.5. : LÉVON MINASSIAN, musique
du monde
vevey
LE REFLET - THÉâTRE DE VEVEy, à 20h,
sauf mention contraire
(billetterie sur www.lereflet.ch)
u 1er et 2.5. : ELOGE DE L'AMERTuME
de et piano Victoria Harmandjieva
u 5.5. : BIG APPLE d'Isabelle Le
Nouvel, m.e.s. Niels Arestrup
u 9.5. : L'AFFAIRE WETTSTEIN, chor.
Angelo Dello Iacono, Compagnie
ADN Dialect, danse
u Du 18 au 20.5. : LE DÉMON APRèSMIDI de Nicolas yazgi, Compagnie
Pied de Biche
u 20.5. : ROBERTO FONSECA, musique
u Du 27 au 29.5. : ONCLE VANIA
d'Anton Tchekhov, m.e.s. Rodolphe
Dana et Katja Hunsinger
u 27.5. : Arts & Lettres. ISABELLE
FAuST, violon. ANNE-KATHARINA
SCHREIBER, violon. yOSHIKO MORITA,
alto. EMMANuEL BALSSA, violoncelle.
LORENZO COPPOLA, clarinette
(Brahms - Mozart). Salle del Castillo
à 19h30 (loc. : Théâtre de Vevey,
tél: + 41 21 925 94 94)
e
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villars s/gl.
ESPACE NuITHONIE, à 20h (loc.
Fribourg Tourisme 026/350.11.00 /
[email protected], ou
Nuithonie: 026 407 51 51)
u 7 et 8.5. : CONSTELLATION*
CENDRILLON de et m.e.s. Laurent
Gachoud
u 8.5. : FACE à FACE, chor. Abderzak
Houmi, Compagnie x-Press
u 9 et 10.5. : CAMION à HISTOIRES de
Nadine Demange, m.e.s. Dominique
Lardenois
yverdon
THÉâTRE BENNO BESSON
(loc. 024/423.65.84)
u 6.5. : uP, chor. József Trefeli et
Mike Winter
u 29.5. : LE DÉMON APRèS MIDI de
Nicolas yazgi, par la Compagnie
Pied de Biche
THÉâTRE DE L’ECHANDOLE (loc.
024/423.65.84 ou 024/423.65.89
une heure avant le spectacle
u 9.5. : SuPERBOuM
u 16 et 17.5. : LEFIL de et m.e.s.
Marie-Aude Guignard
u Du 26 au 29.5. : LE ROI LEAR de
Shakespeare, m.e.s. Jean-Claude
Blanc
u 30.5. : BOîTE à GANTS par La Toute
Petite Compagnie, dès 3 ans
d
a
DISPERSION
[ Ashes to Ashes ]
DE HAROLD PINTER
MISE EN SCÈNE GÉRARD DESARTHE
TRADUCTION FRANÇAISE MONA THOMAS
ÉQUIPE ARTISTIQUE CAROLE BOUQUET
GÉRARD DESARTHE, JEAN BADIN
DELPHINE BROUARD, RÉMI CLAUDE
JACQUES CONNORT & JEAN-LUC RISTORD
PRODUCTION (SIC) SCÈNE INDÉPENDANTE CONTEMPORAINE
THÉÂTRE LE POCHE
www.lepoche.ch / 022 310 37 59 / location Service culturel Migros
27 MAI > 7 JUIN 2015
CRÉATION VISUELLE JEAN-MARC HUMM, LA FONDERIE / PHOTOGRAPHIE DUNNARA MEAS
LE POCHE GENÈVE EST SUBVENTIONNÉ PAR LA VILLE DE GENÈVE (DÉPARTEMENT DE LA CULTURE)
LA RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE. IL EST GÉRÉ PAR LA FONDATION D’ART DRAMATIQUE (FAD)
PARTENAIRES MEDIAS : LEPROGRAMME.CH & NOUVELLES
Gérard Desarthe, comédien et metteur en scène
Carole Bouquet, comédienne
NOUVELLE PRODUCTION
NOUVELLE PRODUCTION
Fidelio
OPÉRA EN 2 ACTES
OPÉRA EN 2 ACTES
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MISE EN SCÈNE
MISE EN SCÈNE
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+41(0)22 322 5050
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