Dynamique de la biodiversité végétale dans les paysages d

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UNIVERSITE DE TOULOUSE II – LE MIRAIL
UFR SCIENCES – ECONOMIE - SOCIETE
DEPARTEMENT GEOGRAPHIE – AMENAGEMENT
2004
N° attribué par la bibliothèque
THESE pour obtenir le grade de
Docteur de l’Université de Toulouse II – Le Mirail
Discipline : Géographie – Aménagement
Présentée et soutenue publiquement par
Brigitte SCHWAL
le 5 juillet 2004
Dynamique de la biodiversité végétale dans les
paysages d’agriculture intensive
Utilisation du sol, composition floristique, végétation et structures paysagères du
Lauragais haut-garonnais (Sud-Ouest, France), XIXe-XXe siècles
Dynamics of plant biodiversity in intensive farming landscapes
Land-use, floristic composition, vegetation and landscape’s pattern of Lauragais
haut-garonnais (South-west of France), XIXth-XXth centuries
Sous la direction de
M. Jacques HUBSCHMAN
M. Thierry GAUQUELIN
Devant la commission d’examen composée de :
J. BAUDRY (Rapporteur)
Directeur de recherche à l’INRA-SAD Armorique
T. GAUQUELIN (Directeur de Thèse) Professeur à l’Université Paul Sabatier Toulouse III
C. GERS (Examinateur)
Chargé de recherche CNRS
J. HUBSCHMAN (Directeur de Thèse) Professeur à l’Université Toulouse II – Le Mirail
G. LARGIER (Examinateur)
Directeur du CBN Midi-Pyrénées
J-P. METAILIE (Examinateur)
Directeur de recherche CNRS
J. MORET (Rapporteur)
Professeur du Muséum National d’Histoire Naturelle
GEODE
UMR5602 UT2-CNRS
Ecole Doctorale
Temps-Espaces-Sociétés-Cultures
LADYBIO
UMR5172 UT3-CNRS
Remerciements
Je tiens à adresser mes remerciements aux nombreuses personnes qui ont apporté à leur
niveau une contribution à ce travail.
En premier lieu, je témoigne toute ma gratitude envers mes directeurs de thèse, Mrs T.
Gauquelin (Professeur à l’Université Paul Sabatier à Toulouse) et J. Hubshman (Professeur à
l’Université de Toulouse-Le Mirail), de m’avoir accorder leur confiance, de m’avoir permis
d’exécuter ce travail dans les meilleures conditions, de leur disponibilité à chaque fois que je
les ai sollicité, ainsi que de leurs conseils avisés.
Mes remerciements vont également à M. C. Gers, Chargé de recherche CNRS, que j’ai eu
l’occasion de rencontrer pour la première fois lors d’un stage à l’ancien Laboratoire
d’Ecologie Terrestre et lors duquel il me présenta un inventaire floristique datant de 1885,
document qui devint le point de départ de ma recherche. Je le remercie grandement de ses
encouragements, du temps consacré à me conseiller vers certaines directives de recherche et
de son soutien plus qu’une fois heureux. Mon immersion dans le Lauragais haut-garonnais qui
a commencé en DEA, s’est poursuivi en thèse au laboratoire GEODE, grâce à l’obtention
d’une allocation de recherche. Ma profonde reconnaissance va à M. J-P Métailié, Directeur du
laboratoire GEODE, pour sa bienveillance et ses conseils avisés. Je remercie ici l’ensemble
des membres du laboratoire GEODE qui ont toujours été à mes côtés pour me soutenir et
m’aider dès qu’ils le pouvaient. Je tiens à remercier en particulier M. M. Paegelow, Maître de
conférence à l’Université de Toulouse-Le mirail, de son soutien et de sa relecture critique.
Je remercie tout particulièrement Ms P. Le Caro, Ingénieur d’étude CNRS et L. Belhacène,
Responsable de l’association Isatis, de leur aide précieuse lors du grand plongeon dans l’étude
de la flore et notamment des herborisations sur le terrain et des déterminations, ainsi que de
leur disponibilité à chaque fois que j’ai eu à solliciter leurs connaissances de naturalistes
avertis.
Ma formation aux traitements statistiques a été instruite par M. A. Fabre, Ingénieur d’étude
CNRS, à qui je rends hommage. Je remercie plus généralement l’équipe du LADYBIO qui
m’a aidé et soutenu par ses compétences, notamment M. S. Maumont du temps qu’il a bien
voulu consacré au partage de ses connaissances botaniques. Le CBN Midi-Pyrénées m’a
permis de constituer une base de données à partir de ses références. Je remercie son directeur
M. G. Largier et l’ensemble de l’équipe qui m’ont aidé à un moment ou à un autre dans mon
travail. Mes remerciements vont également à l’équipe DYNAFOR de l’INRA de Toulouse,
qui a fait avancer mes réflexions.
Merci à Monsieur Le Maire de Nailloux, Georges Méric, à son conseiller municipal, M. A.
Marty ainsi qu’aux responsables du Centre Culturel du Lauragais, Mme A. Nivet-Sanger, M.
M. Dutech et M. J. Odol, pour l’intérêt qu’ils ont accordé à mon travail.
Je tiens également à exprimer ma profonde gratitude à Ms J. Baudry (Directeur de recherche
INRA) et J. Moret (Professeur au MNHN) qui m’ont fait l’honneur d’être rapporteurs de cette
thèse.
Enfin, l’aboutissement de ce travail est aussi le fruit du soutien et parfois de la patience de
mes proches. Merci à Benjamin, Gisèle, Marianne et Bernard.
2
Table des matières
Remerciements ....................................................................................................................... 2
Liste des figures ..................................................................................................................... 8
Liste des tableaux ................................................................................................................. 10
Liste des photographies ........................................................................................................ 11
Abréviations spécifiques à la thèse ...................................................................................... 12
Introduction .......................................................................................................................... 13
1 - Contexte de l’étude : la biodiversité végétale dans les paysages d’agriculture intensive ............ 13
2 - Hypothèses et objectifs de l’étude : impact des pratiques agricoles et de leur évolution sur la
biodiversité, au cours des deux derniers siècles........................................................................... 14
3 - Méthodologie de recherche et organisation du mémoire ............................................................. 17
Chapitre 1 La biodiversité, un concept émergent et son expression
dans les paysages d’agriculture intensive ................................................ 21
I-
Le concept émergent de biodiversité ............................................................... 22
1234-
Origines du concept de biodiversité............................................................................................. 22
Définition du concept de biodiversité .......................................................................................... 23
Textes juridiques relatifs à la protection de la biodiversité.......................................................... 23
Niveaux d’organisation de la biodiversité ................................................................................... 24
4. 1 - Niveau intraspécifique ......................................................................................................... 25
4. 2 - Niveau spécifique ................................................................................................................ 26
4. 3 - Niveau interspécifique ......................................................................................................... 26
4. 4 - Niveau supra-spécifique ...................................................................................................... 26
5 - Importance de la biodiversité végétale ........................................................................................ 26
5. 1 - Préoccupations et menaces pesant sur la biodiversité végétale............................................ 27
5. 2 - Valeur des composantes de la biodiversité végétale ............................................................ 28
5. 2. 1 - Valeur comme fonction au sein de l’écosystème........................................................................ 28
5. 2. 2 - Valeur pour l’économie et la santé............................................................................................ 29
5. 2. 3 - Valeurs de caractère éthique et culturel .................................................................................... 29
5. 3 - Évaluer la biodiversité : Considérations qualitatives et quantitatives.................................. 30
6 - Facteurs influençant la biodiversité végétale et la répartition de la végétation............................ 32
6. 1 - Facteurs mésologiques......................................................................................................... 32
6. 2 - Facteurs anthropiques .......................................................................................................... 32
II - L’expression de la biodiversité végétale dans les paysages d’agriculture
intensive ............................................................................................................. 33
1 - Comment l’expression de la biodiversité végétale est-elle possible dans des paysages fortement
anthropisés ? ................................................................................................................................ 34
1. 1 - L’Ecologie du paysage, ou l’étude des effets des composantes de la mosaïque paysagère sur
la biodiversité végétale.................................................................................................................. 35
1. 1. 1 - Les perturbations, sources d’hétérogénéité spatio-temporelle .................................................. 36
1. 1. 2 - La fragmentation ....................................................................................................................... 39
1. 1. 3 - La connectivité........................................................................................................................... 40
1. 2 - Rôle de la variabilité génétique et de la banque de graine, dans la colonisation d’habitats. 41
2 - Conséquences des pratiques agricoles sur la biodiversité végétale.............................................. 42
2. 1 - Impact négatif de la modernisation des paysages agricoles sur la biodiversité végétale ..... 42
2. 1. 1 - La dégradation des habitats ...................................................................................................... 43
2. 1. 2 - La réduction du nombre d’espèces utilisées .............................................................................. 43
2. 1. 3 - La disparition de la vie sauvage ................................................................................................ 43
3
2. 2 - Les pratiques agricoles peuvent être initiatrices de biodiversité.......................................... 44
III - Réflexion sur l’importance de la valeur écologique des espèces dans une
optique conservatoire........................................................................................ 45
1 - Abondance des espèces dans le milieu ........................................................................................ 45
2 - Valeur patrimoniale des espèces.................................................................................................. 46
3 - Origine biogéographique des espèces.......................................................................................... 47
Chapitre 2 Le territoire d’étude : le Lauragais haut-garonnais, Pays
d’agriculture intensive ............................................................................... 49
I-
Limites du Lauragais haut-garonnais ............................................................. 50
II - Identité paysagère du Lauragais haut-garonnais .......................................... 53
1234567-
Géomorphologie .......................................................................................................................... 53
Hydrographie ............................................................................................................................... 54
Grands traits du climat................................................................................................................. 54
Pédologie ..................................................................................................................................... 55
Végétation.................................................................................................................................... 55
Économie ..................................................................................................................................... 56
Population.................................................................................................................................... 56
III - Les sites d’étude, représentatifs du Lauragais haut-garonnais .................... 57
1 - Le site de Nailloux....................................................................................................................... 57
2 - Le site de Préserville.................................................................................................................... 58
IV - Éléments pour une histoire de l’agriculture lauragaise ................................ 58
1 - Du Néolithique au Moyen-Âge : les grands traits de la mise en place des paysages agraires ..... 58
2 - De la fin de l’Antiquité à la fin du Moyen-Âge : continuités et restructurations du paysage rural
..................................................................................................................................................... 60
3 - De la fin du XVe au XVIIe siècle, l’âge d’or du pastel ............................................................... 61
4 - Du XVIIIe siècle au début du XXe siècle, la diversification des cultures et les progrès des
méthodes...................................................................................................................................... 62
4. 1 - Le XVIIIe siècle, des systèmes agricoles traditionnels........................................................ 63
4. 2 - Au XIXe siècle, les mutations des systèmes agricoles traditionnels.................................... 64
5 - Au XXe siècle, la modernisation de l’agriculture lauragaise....................................................... 66
Chapitre 3 Organisation spatiale de la végétation en réponse à
l’artificialisation du paysage ..................................................................... 69
I-
Acquisition des données spatiales .................................................................... 70
1 - Intérêt et principe d’un SIG ......................................................................................................... 71
1. 1 - Stockage de l’information en mode vecteur ........................................................................ 71
1. 2 - Stockage de l’information en mode raster ........................................................................... 72
2 - Inventaire des documents de référence ........................................................................................ 72
2. 1 - Échelles d’observation......................................................................................................... 73
2. 2 - Nécessité d’un état de référence .......................................................................................... 73
2. 3 - Documents retenus............................................................................................................... 73
2. 3. 1 - Les documents numériques ........................................................................................................ 73
2. 3. 2 - Les documents cartographiques ................................................................................................ 73
2. 3. 3 - Les documents photographiques................................................................................................ 74
3 - Typologie de l’occupation du sol des formations végétales ........................................................ 76
3. 1 - Formations végétales artificialisées ..................................................................................... 78
3. 2 - Formations à végétation spontanée...................................................................................... 79
4 - Définition des attributs spatiaux des unités paysagères ............................................................... 82
II - Analyse de l’organisation spatiale des formations végétales : une
hétérogénéité des paysages en relation avec les pratiques agricoles ............ 84
4
1 - Organisation actuelle des formations végétales : analyse synchronique...................................... 84
1. 1 - Étude synchronique des attributs spatiaux ........................................................................... 86
1. 1. 1 - Structures du paysage................................................................................................................ 86
1. 1. 2 - Fragmentation des taches boisées ............................................................................................. 90
1. 2 - L’hétérogénéité spatiale des paysages influence leur capacité d’accueil............................. 92
2 - Évolution de l’organisation des formations végétales : analyse diachronique............................. 95
2. 1 - Un état de référence du paysage, 1834. Des paysages différemment organisés pour les deux
sites 95
2. 2 - Étude diachronique des attributs spatiaux............................................................................ 98
2. 2. 1 - Structure du paysage ................................................................................................................. 98
2. 2. 2 - Fragmentation des taches boisées ........................................................................................... 104
2. 3 - Étude des grands traits d’évolution du paysage ................................................................. 105
2. 4 - Synthèse : une hétérogénéité temporelle des paysages en relation avec des pratiques
agricoles évolutives..................................................................................................................... 107
III - Les enseignements tirés de l’organisation spatiale de la végétation........... 114
12345-
L’hétérogénéité du paysage en réponse à son aménagement..................................................... 115
Fragmentation des taches boisées et effet-lisière....................................................................... 116
Les activités humaines, facteurs favorables et / ou préjudiciables aux formations végétales .... 116
Notion de supplémentation versus complémentation ................................................................ 117
Discussion sur la méthode ......................................................................................................... 117
Chapitre 4 Variation de la flore et de la végétation en réponse à
l’artificialisation du paysage : composition et diversité floristiques ... 119
I-
Les listes floristiques, documents de base de l’étude de la flore ................. 121
1 - La flore d’une région, élément d’évaluation de la biodiversité.................................................. 121
1. 1 - Connaissance de la flore actuelle : l’inventaire des taxons................................................ 121
1. 1. 1 - Mise en place des relevés de végétation .................................................................................. 122
1. 1. 2 - Réalisation des relevés de végétation ...................................................................................... 127
1. 1. 3 - Limites de la méthode par relevés phytosociologiques............................................................ 129
1. 2 - Connaissance de la flore passée : l’inventaire floristique communal ................................ 129
1. 3 - Liste floristique globale ..................................................................................................... 131
1. 4 - Indications bibliographiques : des sources d’information supplémentaires....................... 131
1. 4. 1 - Les documents floristiques anciens.......................................................................................... 131
1. 4. 2 - Les documents floristiques actuels .......................................................................................... 133
1. 5 - Harmonisation nomenclaturale .......................................................................................... 134
2 - Les caractéristiques descriptives de la flore et de la végétation................................................. 134
2. 1 - Les indices de biodiversité, caractéristiques de la flore ..................................................... 134
2. 2 - Les données de l’autécologie, descripteurs de la végétation.............................................. 135
II - Mise en évidence de la variation spatio-temporelle de la flore : estimation de
la tendance évolutive des espèces................................................................... 138
1 - Aspects actuels de la flore et de la végétation lauragaises......................................................... 138
1. 1 - Caractérisation de la flore .................................................................................................. 139
1. 1. 1 1. 1. 2 1. 1. 3 1. 1. 4 1. 1. 5 1. 1. 6 -
Richesse spécifique .................................................................................................................. 139
Diversité floristique ................................................................................................................. 141
Diversité supraspécifique ........................................................................................................ 141
Richesse patrimoniale.............................................................................................................. 144
Fréquence des espèces............................................................................................................. 146
Synthèse sur la caractérisation de la flore............................................................................... 148
1. 2 - Description de la végétation .............................................................................................. 149
1. 2. 1 - Liste floristique globale ........................................................................................................... 149
1. 2. 2 - Liste floristique pour chaque site............................................................................................. 152
1. 2. 3 - Synthèse : des végétations disparates pour les deux sites........................................................ 156
1. 3 - Physionomie de la végétation et identification des formations végétales .......................... 157
1. 4 - Des nuances de la flore actuelle, sous l’influence de schémas d’organisations spatiales
différentes.................................................................................................................................... 159
2 - Variations de la flore et de la végétation lauragaises, depuis 1885............................................ 160
2. 1 - Exploitation de la Flore d’Haulier, Nailloux, 1885............................................................ 160
2. 1. 1 - Caractérisation de la flore....................................................................................................... 161
5
2. 1. 2 - Description de la végétation.................................................................................................... 164
2. 1. 3 - Physionomie de la végétation et identification des formations végétales ................................ 167
2. 2 - Variations des caractéristiques floristiques........................................................................ 168
2. 2. 1 2. 2. 2 2. 2. 3 2. 2. 4 -
Variation de la richesse spécifique .......................................................................................... 168
Variation de la diversité supraspécifique ................................................................................ 170
Variation de la richesse patrimoniale...................................................................................... 171
Variation de la fréquence ........................................................................................................ 172
2. 3 - Variations de la flore : estimation de la tendance évolutive espèce par espèce (stabilité,
régression, expansion)................................................................................................................. 173
2. 4 - La flore lauragaise depuis 1885 : les évolutions 1885-2001, à la lumière de l’ensemble des
interprétations des données ......................................................................................................... 184
III - Les enseignements tirés de la composition et de la diversité floristiques... 186
123456-
Espèces autochtones versus espèces allochtones ....................................................................... 187
Abondance, rareté de l’espèce et menaces................................................................................. 189
Flux d’espèces et recolonisation ................................................................................................ 189
Sensibilité des plantes à la fragmentation des milieux............................................................... 190
Les perturbations anthropiques, source de diversité .................................................................. 191
Discussion sur la méthode ......................................................................................................... 191
Chapitre 5 Hiérarchisation des facteurs actifs influençant la
distribution de la végétation et la composition floristique ................... 193
I-
Principes et démarches des traitements statistiques.................................... 195
1 - Principe de l’AFC ...................................................................................................................... 195
2 - Préparation de la table des données analysées ........................................................................... 196
2. 1 - Choix des espèces analysées.............................................................................................. 196
2. 2 - Mise en forme du tableau de contingence.......................................................................... 197
2. 2. 1 - Codage des espèces ................................................................................................................. 197
2. 2. 2 - Codage des relevés ou milieux en types de végétation............................................................. 197
3 - Étude des facteurs ...................................................................................................................... 199
4 - Apport des variables supplémentaires ....................................................................................... 199
4. 1 - Les facteurs stationnels : composantes écologiques des formations végétales .................. 200
4. 2 - Les facteurs spatiaux : composantes structurelles du paysage........................................... 200
4. 2. 1 - Composantes structurelles intrinsèques à chaque unité paysagère ......................................... 201
4. 2. 2 - Composantes structurelles entre les unités de paysage ........................................................... 202
4. 3 - Les facteurs taxonomiques : composantes taxonomiques de la végétation........................ 202
5 - Analyses inférentielles : validation de la significativité des variables et de leurs modalités ..... 203
6 - Identification des formations végétales ..................................................................................... 204
II - Étude des facteurs potentiels influençant la végétation............................... 205
1 - Facteurs influençant la végétation actuelle ................................................................................ 206
1. 1 - Valeurs propres.................................................................................................................. 206
1. 2 - Étude des axes factoriels.................................................................................................... 207
1. 3 - Apport des variables supplémentaires, stationnelles et taxonomiques............................... 207
1. 3. 1 1. 3. 2 1. 3. 3 1. 3. 4 -
Significativité des variables supplémentaires .......................................................................... 207
Étude des modalités pour les variables supplémentaires significatives................................... 209
Interprétation des axes d’après les variables supplémentaires ............................................... 210
Interprétation des plans factoriels........................................................................................... 212
1. 4 - Apport des facteurs spatiaux : le cas des taches boisées .................................................... 213
1. 5 - Description des groupements végétaux : Interprétation de l’AFC..................................... 216
1. 5. 1 - Flore des groupements végétaux ............................................................................................. 217
1. 5. 2 - Cas particuliers ....................................................................................................................... 254
1. 6 - Relations entre groupements végétaux .............................................................................. 254
2 - Facteurs influençant la végétation passée .................................................................................. 259
2. 1 - Valeurs propres.................................................................................................................. 259
2. 2 - Étude des axes factoriels.................................................................................................... 260
2. 3 - Apport des variables supplémentaires, taxonomiques ....................................................... 260
2. 3. 1 2. 3. 2 2. 3. 3 2. 3. 4 -
6
Significativité des variables supplémentaires .......................................................................... 260
Étude des modalités pour les variables supplémentaires significatives................................... 261
Interprétation des axes d’après les variables supplémentaires ............................................... 262
Interprétation des plans factoriels........................................................................................... 264
2. 3. 5 - Formations non caractéristiques des plans factoriels ............................................................. 265
2. 4 - Description des groupements végétaux : Interprétation de l’AFC..................................... 266
2. 4. 1 - Flore des groupements végétaux ............................................................................................. 266
2. 4. 2 - Cas particuliers ....................................................................................................................... 293
2. 5 - Relations entre groupements végétaux .............................................................................. 294
III - Les enseignements tirés de la hiérarchisation des facteurs influençant la
distribution de la végétation et la composition floristique .......................... 296
1234-
Le rôle des facteurs mésologiques, face aux exigences des plantes........................................... 297
Le rôle des composantes structurelles sur le cortège floristique boisé....................................... 298
Conséquences de l’action anthropique et de son évolution sur la végétation ............................ 299
Discussion sur la méthode et sur les données analysées ............................................................ 303
IV - Dynamique de la végétation et de la composition floristique en réponse aux
changements d’usage de l’espace agricole .................................................... 304
123456789-
Les cultures................................................................................................................................ 305
Les vignes .................................................................................................................................. 305
Les lieux incultes anthropisés .................................................................................................... 306
Les bords des eaux..................................................................................................................... 306
Les prairies ................................................................................................................................ 306
Les pelouses............................................................................................................................... 307
Les fruticées............................................................................................................................... 308
Les bois...................................................................................................................................... 308
Les haies .................................................................................................................................... 309
Synthèse conclusive des résultats : régression de la biodiversité végétale et variation de la
composition floristique, en réponse à des organisations spatiales changeantes................. 310
Chapitre 6 Gestion conservatoire, appliquée aux paysages lauragais :
valorisation des facteurs favorisant la biodiversité végétale................ 313
I-
Fondements d’une gestion conservatoire dans les paysages d’agriculture
intensive ........................................................................................................... 315
II - Recommandations pour une gestion conservatoire des paysages du
Lauragais, en faveur de la biodiversité ......................................................... 318
1 - Mise en valeur des paysages ruraux........................................................................................... 319
2 - Valorisation d’une diversité et d’une hétérogénéité des composantes paysagères .................... 320
2. 1 - Les cultures........................................................................................................................ 322
2. 2 - Les lieux incultes rudéralisés ............................................................................................. 325
2. 3 - Les formations de bord des eaux ....................................................................................... 326
2. 4 - Les prairies de fond de vallon............................................................................................ 328
2. 5 - Les pelouses sèches de coteaux ......................................................................................... 329
2. 6 - Les fruticées....................................................................................................................... 331
2. 7 - Les bois.............................................................................................................................. 331
2. 8 - Les haies ............................................................................................................................ 335
3 - Cohérence des connectivités entre composantes paysagères ..................................................... 336
III - Vers une réalité de la gestion conservatoire des paysages du Lauragais... 336
Conclusion de l’étude de la dynamique de la biodiversité végétale dans les paysages
d’agriculture intensive........................................................................................................ 339
Bibliographie ...................................................................................................................... 343
7
Liste des figures
Figure 1.
Figure 2.
Figure 3.
Figure 4.
Figure 5.
Figure 6.
Figure 7.
Figure 8.
Figure 9.
Figure 10.
Figure 11.
Figure 12.
Figure 13.
Figure 14.
Figure 15.
Figure 16.
Figure 17.
Figure 18.
Figure 19.
Figure 20.
Figure 21.
Figure 22.
Figure 23.
Figure 24.
Figure 25.
Figure 26.
Figure 27.
Figure 28.
Figure 29.
Figure 30.
Figure 31.
Figure 32.
Figure 33.
Figure 34.
Figure 35.
Figure 36.
Figure 37.
Figure 38.
Figure 39.
Figure 40.
Figure 41.
Figure 42.
Figure 43.
Figure 44.
8
Fragmentation des taches : réduction et isolement, d’après (Burel et Baudry, 1999)
39
Forme des taches et importance de la lisière, d’après (Burel et Baudry, 1999)
40
Carte géologique simplifiée de la région toulousaine. Source, Brunet, 1965
51
Limites du Lauragais haut-garonnais, fond tiré de la carte topographique au 1/50 000e
53
Diagramme ombro-thermique, P = 3T, commune de Ségreville (canton de Caraman), moyenne sur
25 années. D’après (Dubucq, 1989)
54
La rose des vents, station de Toulouse-Blagnac
55
Histoire des forêts françaises (13000 BP-1991). Source, Biodiversity in France, Ministère de
l’Environnement, 2000
59
Évolution et du nombre de tracteur en Haute-Garonne (Brunet, 1965)
67
Cartes de Cassini (1760-90), pour les deux sites d’étude
74
Carte d’occupation du sol, 1998
85
Surface totale des TOS, en % de la surface totale de la zone d’étude
86
Surface moyenne des taches (ha) et nombre de taches par hectare de la surface totale du site
87
Surface minimale, ha
89
Surface maximale, ha
89
Voisinage des taches boisées, % du nombre de taches totales
91
Carte d’occupation du sol, 1834
96
Évolution de la surface par TOS (ha), Nailloux. Les valeurs indiquées au-dessus des barres
correspondent au nombre de taches
99
Évolution de la surface par TOS (ha), Préserville. Les valeurs indiquées au-dessus des barres
correspondent au nombre de taches
99
Évolution du morcellement : rapport du nombre de taches sur la surface des TOS
103
Évolution du PSI et du nombre de taches, entre 1834 et 1998, pour les deux sites
104
Évolution de la distance moyenne et de la surface moyenne des taches, entre 1834 et 1998, pour les
deux sites
104
Types de dynamique pour les deux sites d’étude
106
Dynamique des taches, pour chaque Type d’Occupation du Sol, entre 1834 et 1998, commune de
Nailloux, seules les dynamiques les plus importantes en terme de surface sont présentées
108
Dynamique des taches, pour chaque Type d’Occupation du Sol, entre 1834 et 1998, commune de
Préserville, seules les dynamiques les plus importantes en terme de surface sont présentées
109
Relation théorique entre la surface du relevé, l’homogénéité et la représentativité de l’aireéchantillon. D’après (Gillet, 2000)
125
Extrait de l’inventaire floristique de Haulier, 1885
130
Richesse spécifique par type de milieux
140
Richesse spécifique par type de milieu et différence en pourcentage entre le site de Préserville et de
Nailloux
140
Importance des Familles représentées actuellement
142
Familles représentées
142
Caractéristiques écologiques ou traits de vie des espèces, liste floristique globale actuelle.
Répartition des modalités pour chaque variable considérée
151
Groupe écologique
152
Aire de répartition
153
Exigence en lumière
154
Exigence en humidité
154
Mode de dissémination
155
Type biologique
155
Richesse spécifique par type de milieux
161
Importance des Familles représentées en 1885
162
Caractéristiques écologiques ou traits de vie des espèces, flore 1885
166
Évolution de la richesse spécifique par type de milieu, en %
170
Projection des relevés sur le plan factoriel 1-2. La taille des symboles est proportionnelle à la
contribution des variables aux axes
212
Projection des relevés (en rouge) et des espèces (en vert) sur le plan factoriel 3-4. La taille des
symboles est proportionnelle à la contribution des variables aux axes
212
Distribution des relevés de type ‘bois’ sur les deux premiers axes factoriels et caractérisation des
axes par les variables supplémentaires significatives
215
Figure 45. Modèle de schémas synthétique des groupements végétaux décrits
219
Figure 46. Schéma de la dynamique progressive de la végétation en Lauragais, après abandon de terres
cultivées
255
Figure 47. Schéma de l’organisation et de l’utilisation de l’espace en 2001
256
Figure 48. Schéma synthétique des relations actuelles entre groupements végétaux et mise en évidence des flux
majeurs d’espèces entre formations végétales
258
Figure 49. Projection des types de milieu (en rouge) et des espèces (en vert) sur le plan factoriel 1-2. La taille
des symboles est proportionnelle à la contribution des variables aux axes
264
Figure 50. Projection des types de milieu (en rouge) et des espèces (en vert) sur le plan factoriel 3-4. La taille
des symboles est proportionnelle à la contribution des variables aux axes
264
Figure 51. Schéma de l’organisation et de l’utilisation de l’espace en 1885
296
9
Liste des tableaux
Tableau 1. Niveaux et composantes de la biodiversité, d’après (Noss, 1990)
25
Tableau 2. Caractérisations des deux sites, source : RGA
57
Tableau 3. Caractéristiques des documents cartographiques et photographiques utilisés, pour les deux sites
d’étude
75
Tableau 4. Écart-type des surfaces moyennes
87
Tableau 5. Nombre de taches par classe de surface, en ha
88
Tableau 6. PSI moyen et écart-type, pour les taches boisées
90
Tableau 7. Distance minimale et écart-type, pour les taches boisées
91
Tableau 8. Valeurs des attributs des TOS, pour les sites de Nailloux et Préserville
97
Tableau 9. Morcellement (nombre de taches/surface totale), en 1834
97
Tableau 10. Surfaces, en ha et % de la surface totale, des types de dynamique
106
Tableau 11. Nombre d’espèces, de relevés, richesse spécifique moyenne par relevé, minimale et maximale 139
Tableau 12. Indice de diversité de Shannon, H’
141
Tableau 13. Nombre de Familles et de Genres
141
Tableau 14. Familles propres à chaque site et caractéristique biogéographique des espèces concernées, d’après
(Heywood, 1996)
143
Tableau 15. Genres représentés par quatre espèces ou plus (nombre d’espèces indiquées entre parenthèse)
143
Tableau 16. Espèces inféodées à un seul type de milieu, nombre de relevés ≥ 3, indiqué entre parenthèse
147
Tableau 17. Résumé des particularités de la flore de chaque site et explications possibles
157
Tableau 18. Évolutions de la richesse spécifique
168
Tableau 19. Évolution de la richesse spécifique selon les traits de vie des espèces, en %. Appauvrissement (-),
enrichissement (+) ou stabilisation, entre 1885 et 2001
169
Tableau 20. Évolution de la diversité supraspécifique entre 1885 et 2001, en %
170
Tableau 21. Evolution de la richesse patrimoniale entre 1885 et 2001, en %
171
Tableau 22. Dynamiques et tendances évolutives des espèces
174
Tableau 23. Dynamiques de la richesse spécifique relative, par modalité, pour chaque trait de vie, en %. En gras,
valeurs les plus fortes
175
Tableau 24. Types de végétation retenus pour le codage des relevés et milieux cités
198
Tableau 25. Histogramme des valeurs propres des premiers axes de l’AFC
206
Tableau 26. Interprétation des axes, d’après les variables principales significatives
207
Tableau 27. Significativité de la contribution des variables aux quatre premiers axes
208
Tableau 28. Tableau des fréquences des modalités des variables ‘traits de vie’
208
Tableau 29. Tableau des fréquences des modalités des variables stationnelles
208
Tableau 30. Significativité des variables supplémentaires aux axes 1-2 de l’AFC, en gras valeurs significatives, <
à 0,05
214
Tableau 31. Variables significatives pour les axes 1 et 2
214
Tableau 32. Milieux simplifiés (28), citées en 1885
259
Tableau 33. Histogramme des valeurs propres
259
Tableau 34. Significativité de la contribution des variables aux quatre premiers axes
260
Tableau 35. Tableau des fréquences des modalités des variables ‘traits de vie’
261
10
Liste des photographies
Photo 1.
Photo 2.
Photo 3.
Photo 4.
Photo 5.
Photo 6.
Photo 7.
Photo 8.
Photo 9.
Photo 10.
Photo 11.
Photo 12.
Photo 13.
Photo 14.
Photo 15.
Photo 16.
Photo 17.
Photo 18.
Photo 19.
Photo 20.
Photo 21.
Photo 22.
Photo 23.
Photo 24.
Photo 25.
Photo 26.
Photo 27.
Photo 28.
Photo 29.
Photo 30.
Photo 31.
Photo 32.
Photo 33.
Photo 34.
Photo 35.
Photo 36.
Photo 37.
Photo 38.
Mosaïque d’habitats d’un paysage du Lauragais haut-garonnais et flore associée (Schwal)
35
Paysage lauragais, Nailloux (Schwal)
50
Borde, bœuf, moulin à vent et dépiquage à la charrue, dans le Lauragais haut-garonnais entre le
XVIIe et le XIXe siècle (Archives départementales de la Haute-Garonne)
62
Paysages du Lauragais au début du XX siècle. Photographie des haies interchamps, des travaux de
champs, du paysage, des moutons. (Archives départementales de la Haute-Garonne)
64
Recolonisation arborée sur forte pente. Site de Nailloux, XIXe siècle - 2001 (Archives
départementales de la Haute-Garonne, Schwal).
68
Le Lauragais haut-garonnais au XXe siècle (Schwal)
68
Photographies aériennes, mission 1998. Communes de Nailloux et Préserville
77
Pelouse et bois apparus autour du lac aménagé, Nailloux (Schwal)
94
Vastes bois, Préserville (Schwal)
94
Vaste prairie méso-hygrophile, Préserville (Schwal)
94
a et b. Reconquête de la végétation sur des cultures abandonnées (Schwal)
112
Taillis, Préserville (Schwal)
112
Messicoles, espèces à intérêt patrimonial (Schwal)
145
Espèces xénophytes invasives (Schwal)
146
Espèces retrouvées dans de nouveaux habitats (Schwal)
177
Espèces non retrouvées (Schwal)
180
Espèces dernièrement trouvées (Schwal)
183
Flore des lieux cultivés (Schwal)
222
Flore des vignobles (Schwal)
223
Flore des endroits incultes anthropiques (Schwal)
223
Flore des murs (Schwal)
223
Flore des bords de route (Schwal)
226
Flore des formations prairiales herbacées sèches (Schwal)
230
Flore des bords des eaux (Schwal)
234
Flore des prairies (Schwal)
238
Flore des chênaies neutrophiles sur sol équilibré (Schwal)
243
Flore des chênaies oligotrophes acidophile (Schwal)
243
Flore des haies (Schwal)
247
Flore des fourrés arbustifs (Schwal)
250
Flore des cultures
271
Flore des moissons
271
Flore des vignobles
271
Flore des coteaux secs
277
Flore des bords des eaux
282
Flore des prairies humides
284
Flore des chênaies neutrophiles sur sols équilibrés
289
Flore des chênaies acidophiles oligotrophes
290
Flore des haies
290
11
Abréviations spécifiques à la thèse
Nomenclature
FVA
FVS
TOS
Formations végétales artificialisées
Formations à végétation spontanée
Type d’Occupation du Sol
Code des traits de vie des espèces
Groupe écologique
Pio
Rud
Adv
For
Prm
Prg
Mar
Aqu
Cul
pionnière
rudérale
adventice
forestière
prairie maigre
prairie grasse
marais
aquatique
cultivée
Aire de répartition
Eur
Eas
Esi
Atl
Med
Mat
Cos
Cir
Int
européenne
eurasiatique
eurosibérienne
atlantique
méditerranéenne
méditerraneo-atlantique
cosmopolite
circumboréale
introduite
Exigences en lumière
Hel
Pho
Scia
héliophile
photophile
sciaphile
Exigences en humidité
Xe
Mx
Me
Mh
Hy
La
12
xérophile
mésoxérophile
mésophile
mésohygrophile
hygrophile
large amplitude
Mode de dissémination
Bar
Aut
Myr
Hyd
End
Epi
Ane
barochore
autochore
myrmécochore
hydrochore
endozoochore
épizoochore
anémochore
Type biologique
Abr
Abu
Csu
Cfr
Hbi
Hcs
Her
Hro
Hru
Hst
Gbu
Grh
Gth
Tes
Tve
arbre
arbuste
chaméphyte suffrutescent
chaméphyte frutescent
hémicryptophyte bisannuel
hémicryptophyte cespiteux
hémicryptophyte érigé
hémicryptophyte rosetté
hémicryptophyte ruboïde
hémicryptophyte stolonifère
géophyte bulbeux
géophyte rhizomateux
géophyte tubuleux
thérophyte estival
thérophyte vernal
Introduction
1-
Contexte de l’étude : la biodiversité végétale dans les paysages
d’agriculture intensive
En réaction aux multiples crises écologiques à travers le monde, accrues par des technologies
de plus en plus déconnectées de la Nature, la biodiversité, notamment sa composante végétale
(premier maillon des chaînes trophiques), est aujourd’hui reconnue comme un bien vital et
commun à tous. Progressivement, l’Homme a pris conscience de l’incidence que ses activités
entraînent sur la biodiversité et de la nécessité de sa protection. S’il est clairement établi
actuellement que la conservation de la biodiversité est une mesure prioritaire à mettre en
œuvre dans l’ensemble des développements humains, les processus permettant son maintien
sont bien moins connus. Dans ce contexte, nous nous proposons d’apporter une contribution
aux connaissances relatives à l’inventaire le plus exhaustif possible de la biodiversité mais
aussi relatives aux interactions entre systèmes anthropiques et biodiversité, grâce à l’étude de
la dynamique de la biodiversité végétale dans les paysages fortement anthropisés du
Lauragais haut-garonnais (Sud-ouest, France), en révélant les facteurs responsables de cette
dynamique.
Dans le domaine de la recherche, nombreuses sont les études qui témoignent d’une érosion de
la biodiversité (Cauderon et al., 1995), mais les facteurs responsables de cette évolution ne
sont pas encore compris en totalité et les études engagées ne prennent souvent en compte
qu'un seul facteur en particulier (rôle de la prédation des graines, de leur taille, des fourmis
dans la dispersion des graines, des herbivores, du type biologique, effet de la lumière, du
désherbage des bords de champs, de l’acidité du sol) (Hodgson et al., 1993 ; De Snoo, 1997 ;
Marino et al., 1997 ; Dietz et al., 1998 ; Olff et al., 1998 ; De Snoo et al., 1999 ; Allirand et
al., 2000 ; Gorb et al., 2000 ; Roem et al., 2000 ; Kleijn et al., 2000). Les travaux adoptant une
démarche plus empirique et envisageant simultanément l’ensemble des facteurs, sont plus
rares et ne concernent qu’une composante particulière de la biodiversité (Dutoit, 1996). C’est
à partir de cet état des connaissances que nous souhaitons mener une analyse approfondie des
facteurs potentiellement responsables de la dynamique de la biodiversité végétale, dans un
paysage d'agriculture intensive.
Nous choisissons d’estimer la biodiversité au niveau de la flore, ensemble le plus
classiquement utilisé comme indicateur biotique dans les études de la dynamique de la
biodiversité (Blandin, 1986), pour ses qualités comme descripteur de milieu et comme
marqueur d’usage. Les plantes à fleurs, en raison de leurs exigences écologiques strictes, sont
de bonnes indicatrices des conditions dans lesquelles elles se développent. Par ailleurs, en tant
qu’organismes les moins mobiles, on peut penser qu'elles expriment au mieux les dynamiques
paysagères et révèlent aisément l'impact des activités humaines sur la biodiversité dans les
paysages agricoles (Polunin, 1967 ; Burel et al., 1998).
Au final, les résultats obtenus dans cette étude permettront d’évoquer les questions plus larges
qui se posent quant aux aménagements à proposer et aux moyens à mettre en œuvre en
priorité pour permettre l’expression d’une biodiversité végétale maximale dans les paysages
fortement anthropisés. Les choix d’aménagement doivent pouvoir se fonder sur la
connaissance des facteurs responsables de la dynamique de la biodiversité végétale, en
valorisant ceux qui sont favorables à son expression et en réduisant ceux qui lui sont
13
préjudiciables. Dans cette perspective, une tentative de hiérarchisation des facteurs actuels et
passés nous permettra de connaître ceux qui favorisent ou qui ont favorisé la biodiversité
végétale. Ces facteurs, une fois identifiés, apportent des enseignements très utiles sur les
habitats qui ont été hier le support de la biodiversité végétale et pourraient l’être encore
demain. À partir de ces enseignements, nous pourrons, à la fin de notre étude, proposer des
bases de gestion conservatoire dans les paysages d'agriculture intensive et avancer des
éléments de réflexion sur la conservation des milieux (organisation spatiale, maintien
volontaire) et des espèces (abondance, distribution).
2-
Hypothèses et objectifs de l’étude : impact des pratiques agricoles et
de leur évolution sur la biodiversité, au cours des deux derniers
siècles
En France comme dans toute l’Europe, l’agriculture qui occupe une large part du territoire est
considérée comme le premier intervenant sur les paysages et les écosystèmes, et donc sur leur
composante biologique (Mac Laughin et al., 1995a ; De Jong, 1997 ; Pujol et al., 1999).
Depuis la sédentarisation des sociétés humaines, le développement de l’activité agricole a
utilisé des espaces de plus en plus vastes, au détriment de la végétation originelle (Conseil de
l'Europe, 1997). La dernière vague de modernisation de l’agriculture en France, dans les
années 1950, initiée par la mécanisation et l’artificialisation des pratiques, a porté un coup
fatal à des fragments de Nature qui avaient subsisté jusqu’alors (Mac Laughin et al., 1995a).
Cette « Révolution verte » garante de rendements élevés, a nécessité un nouvel aménagement
de l’espace (reparcellisation), qui s’est accompagné d’un bouleversement des paysages
agraires traditionnels par intervention sur les formations végétales (destruction des haies, des
talus, fragmentation des bois, conversion en terres arables) (Henin, 1960 ; Diry, 1991). Face
aux conséquences de la modernisation de l’agriculture sur les formations végétales, il est plus
que probable que la biodiversité végétale associée a subi des déséquilibres.
Les menaces qui pèsent de plus en plus sur la biodiversité végétale amènent à se demander
dans quelles mesures les pratiques agricoles et leur évolution agissent sur la biodiversité
végétale et sa dynamique, et plus généralement dans quelles mesures les paysages agricoles
fortement anthropisés peuvent présenter un certain niveau de biodiversité végétale. Dans cette
optique, la compréhension des facteurs responsables de l’établissement et du maintien des
espèces végétales est fondamentale. C’est grâce à l’acquisition de cette connaissance qu’il est
possible d’envisager la conservation et/ou la restauration de la biodiversité (Lawton, 1997).
Les vastes étendues cultivées, laissant une place réduite aux formations végétales naturelles,
rappellent constamment à l’observateur que les paysages agricoles modernes, hérités de
pratiques anciennes, ont été créés à la suite de changements intervenus dans la mosaïque
d’habitats favorables à une biodiversité végétale maximale. Si de nombreux habitats,
notamment ceux liés à des pratiques agricoles traditionnelles (prairies de fauche, vignes), ont
été transformés en terres arables, d’autres (friches) sont apparus avec l’abandon de terres
inadaptées aux conditions modernes d’exploitation agricole (forte pente, versant nord …). Il
est à présumer que ce changement de la mosaïque d’habitats perturbe les cortèges floristiques
associés, par remaniements de la diversité floristique (perte ou gain d’espèces) mais
également de la composition floristique (distribution différente des espèces dans les habitats).
Face à cet état de fait, nous postulons que la biodiversité végétale, exprimée par la diversité et
la composition floristiques, varie en réponse à des changements dans la mosaïque d’habitats,
eux-mêmes dictés par des pratiques agricoles changeantes dans l’espace et dans le temps.
Notre hypothèse de travail est que l’artificialisation du paysage, entraînée par la
14
modernisation des pratiques agricoles, et qui se traduit à la fois par une intensification des
pratiques agricoles (homogénéisation des cultures, emploi d’herbicides, destruction des
habitats et introduction d’espèces étrangères) et par une fragmentation des formations1 à
végétation spontanée, tend globalement à l’appauvrissement et à la banalisation de la flore.
Suivant cette hypothèse, nous pouvons identifier trois types de facteurs comme
potentiellement responsables des changements de la flore :
1- Les facteurs naturels qui définissent les conditions de la station2 sur laquelle s’installe la
végétation (climat, nature du sol, relief) et sur laquelle se manifestent les pratiques
agricoles,
2- Les facteurs spatiaux qui s’expriment au niveau des structures paysagères (surface, forme,
fragmentation, hétérogénéité),
3- Les facteurs anthropiques qui sont liés au développement des activités humaines
(pratiques agricoles, urbanisation, multiplication des échanges).
Bien que nous fassions la distinction entre ces trois types de facteurs, il convient de souligner
l’influence majeure des facteurs anthropiques sur les deux autres types de facteurs. En
particulier, les facteurs anthropiques sont à l’origine de presque toutes les caractéristiques des
facteurs spatiaux, dont ils se dégagent pourtant. Pour chacun de ces facteurs, des hypothèses
subsidiaires s’ajoutent.
1. Les facteurs naturels
Ils définissent les conditions de station dans lesquelles les espèces végétales vont pouvoir
s’installer et former une végétation spécifique à ces conditions. Les caractéristiques du relief
(exposition, pente, situation topographique), combinées aux caractéristiques climatiques et
édaphiques locales (lumière, température, humidité, nature du sol) vont conditionner
l’installation des espèces selon leurs propres exigences vis à vis de ces caractéristiques (traits
de vie) et déterminer les formations végétales en un lieu déterminé.
Nous supposons d’une part que les qualités offertes par le milieu sont déterminantes pour le
développement agricole et conséquemment la végétation. En effet, certains terrains non
propices à la mise en valeur agricole (pente trop forte, mauvaise exposition…) vont être
libérés pour l’établissement de formations à végétation spontanée. D’autre part, nous
supposons que des paysages présentant une topographie sensiblement différente, vont être
exposés à des degrés d’artificialisation du paysage distincts, qui auront pour conséquence de
présenter des nuances locales de la flore.
2. Les facteurs spatiaux
Ils correspondent aux caractéristiques structurelles des composantes de la mosaïque
paysagère (surface, forme, fragmentation, hétérogénéité). Ces caractéristiques vont influencer
les possibilités de colonisation et d’établissement des espèces végétales puisque les variations
spatio-temporelles de l’organisation des composantes de la mosaïque paysagère (formations
végétales) peuvent inclure des changements dans le nombre, la diversité d’habitats
1
2
Formation Groupement botanique caractérisé par sa forme biologique dominante (Rey, 1960).
Station Peuplement végétal floristiquement et écologiquement homogène (Delpech, 2001).
15
disponibles ou encore la distance entre habitats. Ces variations vont se traduire par un certain
degré d’hétérogénéité, de fragmentation et de connectivité au niveau des structures
paysagères. Ces changements paysagers, qui pèsent sur la végétation, peuvent conduire à
terme à un appauvrissement et à une banalisation de la flore locale, puisque la dynamique et le
maintien des espèces sont gouvernés par les interactions entre les traits de vie des espèces, qui
déterminent les niveaux locaux d’extinction et de colonisation, et les propriétés paysagères
(Fischer, 2001). Dans ce cadre, nous pouvons nous interroger sur la dépendance des
peuplements végétaux vis-à-vis de l’hétérogénéité spatio-temporelle, de la fragmentation et de
la connectivité.
- D'une part, il convient de souligner l’importance de l’hétérogénéité dans la biodiversité
végétale car nous supposons que les plantes ont plus de chances de trouver la combinaison
adéquate dans une mosaïque paysagère que dans un paysage uniforme. A cet égard, nous
pouvons penser que la modernisation de l’agriculture qui a entraîné une homogénéisation au
cours du temps des habitats susceptibles d’accueillir une diversité d’espèces, en simplifiant les
cultures (spécialisation) et en détruisant certains milieux (haies, talus), freine l’établissement
de cortèges floristiques variés. En contrepartie, les contraintes qui accompagnent la
modernisation (les tracteurs ne pouvant emprunter des pentes trop fortes) peuvent bloquer la
mise en culture de certaines terres et permettre l’expression de séries de végétation, créant une
diversité d’unités paysagères dans lesquelles la biodiversité végétale va pouvoir s’épanouir ;
- D'autre part, nous postulons l’influence de la fragmentation, en supposant que la
fragmentation des habitats, parce qu'elle engendre un isolement des habitats restants et une
proportion supérieure de lisières, phénomène qui s’exprime en particulier au niveau des taches
boisées, menace la persistance des espèces associées et favorise certains cortèges floristiques
généralistes composés d’espèces à haut pouvoir de dissémination et d'espèces exotiques
(Blondel, 1995a). Ceci suppose que l’artificialisation du paysage entraîne une fragmentation
accrue des formations à végétation spontanée et leur régression au profit des formations
artificialisées, et que cette fragmentation est accentuée par des interventions de plus en plus
brutales sur le milieu ;
- Enfin, tout indique que l’influence de l’homogénéisation et de la fragmentation est d’autant
plus perceptible sur la flore, que les habitats ne sont pas connectés entre eux, freinant les flux
d’espèces entre fragments paysagers et menaçant à terme leur persistance dans les habitats.
3. Les facteurs anthropiques
Ils sont liés au développement des activités humaines (pratiques agricoles, urbanisation,
échanges). Nous supposons que les pratiques actuelles dans les paysages d’agriculture
intensive ont des conséquences, directes ou indirectes, sur la composition floristique, en
modifiant les conditions du milieu (désherbage, goudronnage des routes, drainage, coupe
forestière). Par ailleurs, la modernisation agricole, qui entraîne la disparition des formations à
végétation spontanée et l’artificialisation des formations restantes, va favoriser des espèces
banales à large amplitude écologique. L’émergence de nouveaux usages et aménagements de
l’espace (intensification des moyens de communication, replantation des haies, création
d’espaces de loisir) conduit à libérer des espaces propices à un dynamisme spontané de la
végétation mais peut également ouvrir la voie à la pénétration de plantes exotiques, de
manière volontaire ou accidentelle.
16
Notre objectif principal consiste donc essentiellement à mettre en évidence les facteurs
responsables des changements de la biodiversité végétale de paysages fortement anthropisés
comme ceux du Lauragais haut-garonnais, à partir de l’étude d’organisations paysagères
différentes dans l’espace et dans le temps. À travers cette étude, nous cherchons à comprendre
comment les pratiques agricoles, en modelant les paysages et la qualité des habitats, affectent
la biodiversité végétale dans un cadre dynamique, et à identifier les échelles auxquelles elles
agissent, avec pour objectif final de proposer des éléments de gestion conservatoire qui se
fondent sur le maintien d’une biodiversité végétale maximale et sur des priorités en matière de
conservation. A partir des données historiques et des connaissances acquises par la
communauté scientifique, la démarche adoptée vise à mettre en lumière les liens qui existent
entre la structure spatio-temporelle du paysage - en réponse à l’évolution des pratiques et à
l’utilisation de l’espace - et la distribution des espèces au sein de la mosaïque paysagère. Plus
précisément, on cherchera à :
i-
Comprendre l’organisation spatiale des composantes de la mosaïque paysagère, dans un
cadre dynamique, en relation avec les pratiques agricoles,
ii- Étudier les variations spatio-temporelles de la biodiversité végétale, illustrée au niveau de
la diversité et de la composition floristiques,
iii- Évaluer le poids des facteurs qui entrent en jeu dans la distribution de la végétation et
dans sa composition floristique,
iv- Identifier les conditions optimales, écologiques ou anthropiques, qui participent au
maintien de la biodiversité végétale, afin de proposer des bases de gestion conservatoire.
3-
Méthodologie de recherche et organisation du mémoire
Compte tenu des objectifs à atteindre, l’analyse entreprise s'inscrit dans une démarche
interdisciplinaire qui privilégie l'approche spatiale, floristique et statistique. En réponse à la
variation de la mosaïque paysagère, les changements de la biodiversité végétale sont
appréhendés dans l’espace et dans le temps grâce à une analyse multi-sites et multi-dates, à
l’échelle de la parcelle comme à celle du paysage. Notre travail est structuré en six chapitres,
dans lesquels sont données les grandes lignes de la méthodologie de recherche suivie.
1- La biodiversité, un concept émergent, son expression dans les paysages d’agriculture
intensive
Afin d’éclairer les objets de l’étude, nous abordons succinctement dans ce premier chapitre
les bases conceptuelles de la biodiversité et l’état des connaissances, en particulier dans les
paysages d’agriculture intensive.
2- Le territoire d’étude : le Lauragais haut-garonnais, pays de l’agriculture intensive
Après avoir délimité le territoire d’étude, les différentes caractéristiques, physiques et
anthropiques, qui forment son identité sont décrites. Deux communes représentatives des
paysages d’agriculture intensive du Lauragais haut-garonnais sont retenues comme sites
d’étude pour mettre en évidence les facteurs locaux, actuels et passés, qui influencent la
distribution et la composition floristique de la végétation. Une reconstitution diachronique des
paysages agraires lauragais à partir des archives, qui s’appuie surtout sur les trois derniers
17
siècles, apporte des indications sur les pratiques passées et actuelles, et permettra d’interpréter
l’organisation spatiale de la végétation dans la suite de l’étude.
3- Analyse de l’organisation spatiale de la végétation en réponse à l’artificialisation du
paysage
Le but final de ce troisième chapitre est d’analyser et de comprendre les modes d’organisation
spatiale différents des composantes paysagères (formations végétales), en réponse à des
usages différents de l’espace, et ce pour une période de temps illustrant le paysage tout au
long du processus d’intensification de l’agriculture ; nous allons donc procéder à une analyse
multi-dates du paysage sur les deux sites d’étude, fondée sur la prise en compte de la structure
des taches d’habitat. Pour cela, l’analyse se déroule en deux parties :
-
une analyse synchronique qui étudie la structure des taches d’habitat pour la période
actuelle, pour les deux sites d’étude,
une analyse diachronique qui étudie l’évolution de la structure des taches d’habitat
depuis un siècle et demi, pour les deux sites d’étude.
Le mode opératoire repose sur l’exploitation sous S.I.G.1 de documents spatiaux multisources, échelonnés dans le temps (plan cadastral de 1834 et photographies aériennes de 1946,
1972, 1993, 1998) pour les 2 sites d’étude. L’analyse de la structure des taches d’habitat est
réalisée à deux niveaux d’organisation du paysage : la mosaïque paysagère et la parcelle.
- Au niveau de la mosaïque paysagère, l’exploitation des documents permet de rendre
compte de l’organisation paysagère et de son évolution sous forme cartographique, où
chaque parcelle est identifiée par un Type d’Occupation du Sol qui illustre un certain
degré d’artificialisation.
- Au niveau de la parcelle, divers attributs spatiaux sont extraits du S.I.G. afin de
caractériser les taches d’habitat et d’appréhender l’expression de la fragmentation
notamment au niveau des taches boisées.
La connaissance historique de l’utilisation du paysage et des pratiques agricoles (chapitre 2),
ainsi que la prise en compte des données extraites d’un M.N.T.2 (exposition, pente, situation
topographique) offrent des possibilités d’interprétation et de compréhension des résultats
obtenus de la comparaison spatio-temporelle de l’organisation des composantes paysagères
(formations végétales) et des attributs spatiaux.
4- Variation de la flore et de la végétation en réponse à l’artificialisation du paysage :
composition et diversité floristiques
Dans ce quatrième chapitre, afin de tester l’hypothèse d’un appauvrissement et d’une
banalisation de la flore, nous envisageons d’une part de révéler les variations spatiotemporelles de la flore et d’autre part de décrire les physionomies de la végétation actuelle et
passée, en réponse à des schémas d’organisation paysagère variant dans l’espace et dans le
temps, eux-mêmes dictés par des degrés d’artificialisation du paysage distincts. Pour cela,
nous basons notre travail sur l’analyse spatio-temporelle de listes floristiques inventoriant
l’ensemble des plantes vasculaires sur les deux sites d’étude, actuel (2001) et pour une
période passée (1885). Les listes floristiques actuelles (2001) ont été établies sur les deux sites
d’étude suite à un travail de terrain au cours duquel nous avons inventorié les plantes
1
2
S.I.G. Système d’Information Géographique
M.N.T. Le Modèle Numérique de Terrain est une représentation numérique du relief.
18
vasculaires par la réalisation de relevés phytosociologiques représentatifs des différentes
formations végétales, selon la méthode de Braun-Blanquet. La liste floristique passée (1885)
est extraite d’un inventaire floristique réalisé à cette époque sur la commune de Nailloux.
L’analyse se déroule en deux parties. Pour chacune des deux analyses, nous envisageons la
comparaison de plusieurs indicateurs floristiques :
- Comparaison des espèces inventoriées dans les listes floristiques,
- Comparaison des caractéristiques descriptives de la flore et de la végétation,
estimées pour chaque liste floristique (indices de biodiversité, structures de la
végétation et caractéristiques écologiques des espèces).
-
-
La première analyse, synchronique, est menée pour étudier les aspects actuels du tapis
végétal et révéler l’existence de nuances locales de la flore, illustrant des degrés
d’artificialisation du paysage distincts. Cette analyse se base sur l’emploi des listes
floristiques actuelles.
La seconde analyse, diachronique, est menée pour étudier les variations de la flore qui se
sont opérées depuis plus d’un siècle. Ces variations sont appréciées par comparaison des
listes floristiques actuelles (2001) et de l’inventaire floristique de 1885, d’où se dégagent
trois types de dynamique : espèces maintenues, disparues, apparues. Grâce à la prise en
compte de la fréquence relative citée dans d’anciennes flores locales (1884, 1907 et 1961)
pour l’ensemble des espèces inventoriées en 1885 et/ou en 2001, nous pouvons formaliser
une tendance évolutive des espèces depuis plus d’un siècle (stabilité, régression,
expansion) afin de comprendre les trois types de dynamique illustrant la variation de la
flore. L’apport des données de l’autécologie et la prise en compte des milieux fréquentés
par les espèces en 1885 et en 2001 permettront d’interpréter ces dynamiques.
Au final, cette étude de la végétation, qui s’avère intéressante en soit, est surtout importante
pour comprendre les facteurs écologiques qui président à la répartition des végétaux et
indispensable pour comprendre l’évolution de la végétation. Ce point est étudié dans le
prochain chapitre.
5- Hiérarchisation des facteurs influençant la distribution de la végétation et sa
composition floristique
L’objectif de ce cinquième chapitre est de hiérarchiser les facteurs potentiellement explicatifs
de la végétation et de la distribution des espèces au sein des formations végétales. Ces
facteurs correspondent aux différentes variables obtenues dans les précédentes analyses :
variables spatiales (attributs spatiaux des taches d’habitat), variables stationnelles (annotées
lors de l’inventaire floristique sur le terrain), variables taxonomiques (indices de biodiversité
et caractéristiques écologiques des espèces).
L’Analyse Factorielle des Correspondances (AFC) est retenue pour identifier les groupements
végétaux présents actuellement et dans le passé. Pour cela, l’AFC est lancée sur la liste
floristique actuelle (2001) et sur la liste floristique passée (1885). La significativité des
facteurs et celle des modalités pour les facteurs significatifs sont estimées par analyses
inférentielles (Analyse de la variance, Coefficient de corrélation de Pearson). L’intérêt de la
hiérarchisation des facteurs est double.
- D’une part, les facteurs et leurs modalités révélés comme significatifs permettent de
caractériser les groupements végétaux actuellement et en 1885 discriminés par AFC, et de
décrire les formations végétales qui constituent ces groupements.
19
- D’autre part, ces facteurs et modalités permettent d’interpréter la présence des espèces dans
les formations végétales actuelles et passées, en fonction des conditions mésologiques
présentes, dont l’influence peut être atténuée voir écartée par des facteurs anthropiques
prépondérants.
Au final, une meilleure compréhension des relations entre groupements végétaux actuels et
passés permettra d’expliquer la dynamique de la végétation et de la composition floristique en
réponse aux changements d’usage de l’espace agricole.
6- Gestion conservatoire de la biodiversité dans les paysages d’agriculture intensive
Proposer des bases de gestion conservatoire qui se fondent sur le maintien d’une biodiversité
végétale maximale et qui fixent les priorités en matière de conservation des milieux et des
espèces : tel est l’objectif de ce chapitre. Pour cela, nous envisageons de valoriser les facteurs
actuels et passés, révélés comme ‘optimisant’ la biodiversité végétale, et d’apprécier, de
manière objective, les valeurs écologiques des espèces (d’abondance, patrimoniale, d’origine
biogéographique).
Les bases de gestion conservatoire proposées doivent permettre de définir un certain nombre
de principes de gestion et d’aménagement de l’espace, nécessaires pour atteindre des objectifs
environnementaux liés au maintien de la biodiversité végétale et sur lesquelles peuvent se
baser les décideurs et autres acteurs de l’aménagement du territoire rural.
20
Chapitre 1
La biodiversité, un concept émergent et son
expression dans les paysages d’agriculture intensive
« La diversité des milieux
est à l’origine de la
diversité du monde vivant »
(Lévêque, 1994a)
21
En réaction aux multiples crises écologiques qui surgissent à travers le monde, accrues par
des technologies de plus en plus déconnectées de la Nature, une nouvelle demande de
l’utilisation de l’espace émerge de la part des concitoyens, depuis plusieurs années. C’est dans
ce courant écologique émergent, que le concept de diversité biologique, contracté sous
l’expression de biodiversité, est apparu. Face à des activités anthropiques qui perturbent,
transforment, détruisent de plus en plus les écosystèmes, il devient indispensable et urgent de
se préoccuper des conséquences que ces activités humaines causent en particulier sur la
diversité des plantes qui assurent les fonctions écologiques primaires inhérentes à toute vie sur
terre.
Partout dans le monde, des études diachroniques témoignent de la régression de la
biodiversité, notamment végétale. Si différentes causes peuvent être avancées comme
responsables de cette érosion, dans certains cas irréversible, un secteur est particulièrement
visé : en France comme dans beaucoup d’autres pays, ce sont les activités agricoles qui sont
les premières pointées du doigt comme responsables des déséquilibres causés à la biodiversité
végétale. En effet, l’extension toujours plus grande des surfaces agricoles depuis que la
civilisation s’est sédentarisée, accompagnée par des moyens technologiques toujours plus
perfectionnés et mécanisés, a entraîné une destruction drastique de nombreux habitats
écologiques. Dans un passé plus récent, l’intensification de l’agriculture a porté, de nouveau,
un coup fatal à des fragments de Nature qui avaient subsisté jusqu’alors. Les quelques îlots de
Nature restant dans ces systèmes d’agriculture intensive, fortement anthropisés, présentent
malgré tout une certaine diversité floristique. L’étude de cette diversité présente un grand
intérêt, comme témoin d’une flore passée, reflet de la biodiversité actuelle et garant d’une
transmission future.
Dans le souhait d’éclairer le contexte de notre étude, après avoir établi les bases conceptuelles
de la biodiversité, ce chapitre s’attache à faire le point sur les connaissances déjà acquises sur
la diversité biologique, en particulier dans les paysages d’agriculture intensive.
I-
Le concept émergent de biodiversité
Afin de spécifier l’objet de notre étude, nous présentons le concept de biodiversité
successivement à travers son origine, sa définition, les textes juridiques relatifs à sa
protection, ses niveaux d’organisation, les raisons de la nécessité de sa préservation, ainsi que
les facteurs influençant la biodiversité et la répartition de la végétation.
1-
Origines du concept de biodiversité
La diversité biologique, ou biodiversité, encore appelé diversité du vivant, est une notion
relativement récente, dont l’emploi est désormais largement répandu. La généralisation de son
emploi est en partie due au fait que la préservation1 de la diversité biologique est récemment
devenue une préoccupation, tant au niveau des instances nationales (Ministère de
11
Préservation Mise en œuvre de mesures visant à ce que les ressources de la biodiversité soient utilisées,
gérées et protégées de façon à ne pas entraîner un déclin de la biodiversité (OCDE, 1999).
22
l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement, 1998) qu’internationales (CNUED,
1992), gouvernementales (OCDE, 1996) que non-gouvernementales (MELLOR, 2002).
L’érosion de la biodiversité est devenue un problème d’environnement global (Aubertin,
1998), apparu après que les scientifiques eurent exprimé leur inquiétude devant les rythmes
sans précédent de disparition d’espèces et de pans de forêts (Wilson, 1993 ; Lévêque, 1994b ;
OCDE, 1999 ; Loreau, 1999a ; Tyrberg, 2000 ; Rosenzweig, 2000). Certains auteurs vont
jusqu’à dire que l’érosion de la biodiversité participe au processus de la mondialisation
(Aubertin et al., 1998). La préoccupation de sa préservation illustre la confrontation qui existe
entre des pratiques d’utilisation des ressources naturelles et des attachements à des valeurs
générales.
2-
Définition du concept de biodiversité
Les définitions proposées par la communauté scientifique sont nombreuses. La diversité
biologique est d’abord le résultat de plus de trois milliards d’années d’évolution des êtres
vivants. Elle illustre la profusion des espèces vivantes, avec plus d’un million et demi
d’espèces connues et quelques millions encore inconnues (May, 1992, in Barbault, 1993).
Solbrig (Aubertin et al., 1998) la définit en 1991 comme « la propriété qu’ont les systèmes
vivants d’être distincts, c’est-à-dire différents, dissemblables ». La biodiversité apparaît
comme synonyme du « vivant » de la vie. Lors de la Convention sur la Diversité Biologique
(CNUED, 1992), la définition de ce concept a été posée comme étant
La variabilité des organismes vivants de toute origine y compris, entre autre, les
écosystèmes1 terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques et les
complexes écologiques dont ils font partie ; cela comprend la diversité au sein
des espèces et entre espèces ainsi que celle des écosystèmes.
3-
Textes juridiques relatifs à la protection de la biodiversité
L’intérêt croissant pour la conservation de la biodiversité, amplifié par des menaces de plus en
plus manifestes, a emmené les Etats à adopter, depuis plusieurs années, un ensemble de
conventions et autres textes juridiques relatifs à sa protection.
- La première en date est la convention de Berne ou « Convention relative à la conservation
de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe » du 19 septembre 1979 (publié en France
par décret du 22 août 1990), ratifiée par plus de 30 pays. Elle concerne tout à la fois des
espèces végétales et animales. Elle prévoit, pour les espèces végétales qui figurent dans son
annexe I, l’interdiction de cueillette, coupe ou déracinage intentionnels.
- À l’échelle mondiale, la Charte mondiale de la Nature, (UICN, 1982), reconnaît que le genre
humain fait partie intégrante de la Nature et que chaque forme de vie est unique et mérite le
respect.
1
Ecosystème Complexe dynamique formé de communautés de plantes, d’animaux et de micro-organismes et de
leur environnement non vivant qui, par leur interaction, forment une unité fonctionnelle. Art2. (CNUED, 1992).
23
- Avec l’émergence de l’Union européenne, a vu le jour la Directive communautaire
« Habitats, faune, flore », du 21 mai 1992 concernant la « conservation des habitats naturels
ainsi que de la flore et de la faune sauvages, dite Directive Habitats, faune, flore ». Elle se
donne pour objet « d’assurer la conservation des habitats ainsi que de la faune et de la flore,
sauvages sur le territoire européen des États membres, y compris leurs territoires maritimes ».
- La même année, la Convention sur la Diversité Biologique, (CNUED, 1992), issue des
travaux de la Commission Mondiale pour l’Environnement et le Développement, ou
Commission Bruntland (1987), entre dans le cadre d’une coordination internationale sur les
problèmes environnementaux. Son principe est la conservation et la gestion durable de la
biodiversité, en privilégiant la conservation in situ des écosystèmes et des habitats naturels par
la mise en place de zones protégées ou la gestion durable des milieux et des ressources
exploitées, et le maintien et la préservation des connaissances et pratiques traditionnelles.
L’ensemble de ces conventions comprend notamment un programme d’action pour la mise en
œuvre du Développement Durable, ou Agenda 21, ou Action 21. Plus particulièrement, les
objectifs et activités présentées dans le Chapitre 15 d’Action 21 visent à améliorer la
préservation de la biodiversité et l’utilisation durable1 des ressources biologiques. Il y a lieu
de renforcer les capacités d’évaluation, d’étude et d’observation systématique de la diversité
biologique.
- Le 21 mai 1992, à l’échelle européenne, la réforme de la PAC est adoptée. Elle vise la
réduction des excédents agricoles et une baisse des soutiens agricoles, tout en protégeant les
revenus agricoles. La Commission des Communautés Européennes (1991) exposait « que le
rôle des agriculteurs dans la protection de l’environnement rural et la gestion du paysage
devrait être davantage reconnu et rémunéré en conséquence … ».
- Le programme international Diversitas, 1993, mis en place par l’IUBS, le SCOPE et
l’UNESCO, répond au besoin d’accroissement des connaissances dans le domaine de la
biodiversité. Les objectifs scientifiques de ce programme sont i) d’étudier les facteurs qui
façonnent la biodiversité et déterminent ses changements, ii) d’évaluer, modéliser et prévoir
les effets des activités humaines sur la dynamique de la biodiversité et le fonctionnement des
écosystèmes, iii) d’analyser et tirer parti de la portée que peut avoir la biodiversité pour les
sociétés humaines, qu’elle soit économique, éthique ou culturelle (Collectif, 1993 ; Younes,
1994 ; Collectif, 1999a ; Loreau, 1999b).
C’est dans ce cadre que nous aborderons la problématique de la biodiversité et de sa
préservation dans des systèmes anthropisés.
4-
Niveaux d’organisation de la biodiversité
La notion de biodiversité est complexe car elle regroupe une diversité de composantes : gène,
espèce, paysage, composition, structure et fonction. Les entités vivantes étudiées se
distinguent à la fois d’un point de vue qualitatif, ce qui permet de les regrouper en catégories
dans une hiérarchie emboîtée (Deconchat, 1999), et d’un point de vue quantitatif.
L’émergence du concept de biodiversité, en tant que biologie du nombre et de la différence,
1
Utilisation durable Utilisation des éléments constitutifs de la diversité biologique d’une manière et à un
rythme qui n’entraînent pas leur appauvrissement à long terme, et sauvegardent ainsi leur potentiel pour
satisfaire les besoins et aspirations des générations présentes et futures. Art 2 (CNUED, 1992).
24
correspond à une évolution profonde de l’écologie. L’expression biodiversité se rapporte le
plus souvent au nombre, à la variété et à la variabilité des organismes vivants. Elle recoupe
deux concepts : la mesure du nombre d’êtres vivants différents et la mesure de leur degré de
différence (OCDE, 1996).
La biodiversité se définit d’abord en fonction des agents qui la perçoivent (Gauthier, 1997),
faisant chacun référence à une dimension particulière de la biodiversité (Lévêque, 1994b) :
-
La dimension économique perçue à travers les économistes, d’une part agricoles qui
considèrent la biodiversité en tant que facteur de production, d’autre part de
l’environnement qui considèrent la biodiversité comme un bien de consommation,
-
La dimension éthique à travers le grand public. Sa mesure est fondée sur la notion de
bénéfices qui en sont issus,
-
La dimension écologique par les naturalistes, comme les biologistes qui définissent la
biodiversité au niveau génétique, spécifique et écosystémique.
En nous plaçant du point de vue écologique, nous pouvons dire que la qualité et la quantité
des êtres vivants sur un territoire fondent sa biodiversité. Cette notion intègre la diversité
génétique intraspécifique, la multiplicité des espèces et l’abondance relative de chacune, la
variété de leur organisation en écosystèmes différents, et la complexité des relations entre ces
écosystèmes (Cauderon et al., 1995). Ainsi, la biodiversité recouvre tous les niveaux
d’organisation de la vie, des gènes aux paysages, en passant par les populations, les
communautés et les écosystèmes (Di Castri et al., 1990 ; Cauderon et al., 1995 ; Aubertin et
Vivien, 1998). A chacun de ces niveaux, elle se caractérise non seulement par la diversité de
ses composants, mais aussi par sa diversité structurelle et fonctionnelle (Noss, 1990). Pour
étudier la diversité d’un système écologique donné, il apparaît donc essentiel de prendre en
compte simultanément plusieurs niveaux d’organisation (cf. Tableau 1).
STRUCTURE
Structure des paysages
Structure des habitats
Structure de population
Structure génétique
Tableau 1.
4. 1 -
FONCTIONNEMENT
Processus, perturbations
Tendances dans l’utilisation du
territoire
Interactions entre espèces
Processus au niveau des systèmes
écologiques
Processus démographiques
« life histories »
Processus génétiques
COMPOSITION
Types de paysages
Communautés
Écosystèmes
Espèces
Populations
Gènes
Niveaux et composantes de la biodiversité, d’après (Noss, 1990)
Niveau intraspécifique
La diversité génétique peut être appréhendée à l’échelle des populations (variabilité entre
espèces) et des espèces (variabilité entre individus). La variabilité génétique des populations
naturelles est la condition première de leur survie à long terme puisque d’elle dépend leur
capacité d’adaptation à des conditions changeantes (Barbault, 1993 ; Gray, 2000). La
variation du capital génétique, associé à la variation due à l’influence de l’environnement,
25
permet l’existence d’organismes différents (OCDE, 1996). C’est donc une notion importante
pour comprendre la biodiversité et pour maintenir la biodiversité aux autres niveaux. Les
agronomes savent bien aujourd’hui que l’homogénéisation génétique des variétés de plantes
produites et cultivées à une échelle industrielle les expose particulièrement aux ravageurs à
évolution rapide (Barbault, 1993).
4. 2 -
Niveau spécifique
Les espèces1 sont les unités de base des systèmes modernes de classification des organismes
vivants (hiérarchie phylogénétique). La diversité spécifique peut être déterminée par le
nombre d’espèces présentes sur un site donné, elle peut également être appréhendée à
l’échelle des groupes fonctionnels.
4. 3 -
Niveau interspécifique
Il correspond à la diversité écologique, en référence aux écosystèmes (Bornard et al., 1996).
Chaque espèce est appelée à évoluer dans un décor naturel, au sein de communautés et
d’écosystèmes qui remplissent leur fonction, et en interaction avec d’autres espèces et avec
l’environnement non biologique. L’écosystème présente des caractéristiques qui lui sont
propres, au plan géographique et biologique, ainsi qu’en terme de résilience2 face aux
différents types de pressions provenant des activités humaines, il appelle ainsi des mesures
d’incitation adaptées à ses besoins spécifiques (OCDE, 1999).
4. 4 -
Niveau supra-spécifique
Il correspond à la diversité des paysages, désignée parfois comme diversité spatiale (Bornard
et al., 1996). Ce niveau est plus particulièrement développé en Écologie du paysage, incluant
les êtres vivants et le biotope (Forman et Godron, 1986).
Dans notre étude, nous n’avons pas poussé les déterminations au-delà du niveau
subspécifique.
5-
Importance de la biodiversité végétale
Face à la menace grandissante de la dégradation de la biodiversité végétale, un certain nombre
de préoccupations émergent, en réponse à une prise de conscience que cette valeur présente
de nombreux intérêts et mérite protection à bien des égards.
1
Espèce Population dont les membres peuvent se croiser sans difficultés dans des conditions naturelles
(Aubertin et Vivien, 1998).
2
Résilience Mesure de la capacité d’un écosystème de résister à des contraintes et à des chocs, ou de subsister
face à des pressions et à des bouleversements naturels imprévisibles et parfois de très grande ampleur (OCDE,
1999).
26
5. 1 -
Préoccupations et menaces pesant sur la biodiversité végétale
La biodiversité végétale est fortement menacée à l’échelle planétaire. Si elle a toujours été
exploitée par l’Homme pour subvenir à ses besoins, l’on assiste aujourd’hui à une rupture
résultant de son exploitation accélérée et des profondes transformations de l’environnement
imposées par l’expansion de l’économie et de la démographie au XXe siècle (Wilson, 1993 ;
Lévêque, 1994b ; Cauderon et al., 1995 ; Lévêque, 1997). Comme le signale Wilson, dans le
Monde entier, le taux des extinctions est déjà des centaines ou des milliers de fois plus élevé
qu’avant la venue de l’Homme (Wilson, 1993), normalement, la durée de vie moyenne d’une
espèce étant de un à dix millions d’années (Bouchet, 2000). Wilson estime à 27 000 le
nombre d’espèces condamnées chaque année. 5 à 25% des espèces seraient menacées à
moyen terme (Lévêque, 1994b) et l’inventaire des espèces vivantes est loin d’être achevé.
De nombreuses causes d’appauvrissement de la biodiversité végétale ont été avancées par les
auteurs (Barbault, 1997 ; Lévêque, 1997 ; Gauthier, 1997). La principale cause de l’érosion de
la diversité des espèces sauvages est la dégradation des habitats1 des espèces, se manifestant à
travers leur disparition et leur fragmentation2 (Wilcox et al., 1985 ; Cauderon et al., 1995 ;
Barbault, 1997 ; Parizeau, 1997 ; Pimm et al., 2000), et traduisant une perte de biodiversité
aux différentes échelles à l’intérieur desquelles elle s’exprime – locale, régionale, globale
(Aubertin et al., 1998). Ces effets sont renforcés par d’autres facteurs, comme la croissance
élevée et non soutenable de la population et de la consommation des ressources naturelles, la
réduction continue de la gamme de produits manufacturés, l’inégalité dans la propriété, la
gestion et le partage des avantages liés à l’usage et à la conservation des ressources
biologiques, les systèmes législatifs et institutionnels favorisant l’exploitation non durable, la
transformation des terres, l’intensification de l’agriculture.
Paradoxalement, on assiste en parallèle à un enrichissement de la biodiversité, qui résulte de
l’introduction3 d’espèces dans les écosystèmes (voir réflexions sur ce terme p.47). Depuis le
Néolithique, l’Homme introduit des espèces hors de leur aire naturelle et en crée à des fins
agronomiques ou esthétiques (Lévêque, 2000). Avec la multiplication des échanges, ce
phénomène prend aujourd’hui une ampleur inédite. L’on peut se demander ainsi, à l’instar de
Lambinon, si cette augmentation, au moins temporairement, est un facteur positif ou si elle
constitue automatiquement une menace en termes de conservation de la Nature (Lambinon,
1998). L’introduction d’espèces renvoie à la problématique plus générale de la part de
l’Homme, des animaux et des facteurs naturels dans les migrations des flores à l’échelle de la
planète. Même si les invasions biologiques ont toujours existé à l’échelle des temps
géologiques, l’époque actuelle marque une fréquence, une intensité et une généralisation du
phénomène (Lovei, 1997 ; Lévêque, 2000). D’après Wilson, il est dangereux de vouloir
introduire sans retenue des espèces exotiques n’importe où, car elles peuvent devenir nuisibles
ou peuvent obliger les espèces indigènes à émigrer (Wilson, 1993).
La prise en compte de la biodiversité passe par la reconnaissance de la diversité des relations
des Hommes à la Nature (Aubertin, 1998). L’analyse se déplace du monde de la Nature au
rôle des sociétés humaines dans la dynamique de la biodiversité, par l’utilisation qu’elles font
des ressources biologiques, par l’altération qu’elles imposent aux écosystèmes, par leur action
sur les paysages (Barbault, 1997). L’érosion de la biodiversité végétale pourrait être en
1
Habitat Lieu ou type de site dans lequel un organisme ou une population existe à l’état naturel. Art2.
(CNUED, 1992).
2
Fragmentation Correspond à la fois à une perte d’habitat et à un isolement de l’habitat (Collinge, 1996).
3
Introduction Transport opéré intentionnellement ou accidentellement par l’Homme, d’espèces dans un milieu
qui se situe hors de leur aire de distribution naturelle (Lévêque, 2000).
27
dernier recours préjudiciable à l’Homme lui-même (Lévêque, 1994b), d’autant plus que
l’Homme peut avoir un effet perturbateur, et a aujourd’hui une capacité de transformation des
milieux incomparablement supérieure à l’aptitude de ceux-ci à se régénérer (Cauderon et al.,
1995).
5. 2 -
Valeur des composantes de la biodiversité végétale
Face au discours volontairement provocateur de Barbault qui écrivait qu’aux intégristes de la
conservation, l’on peut rétorquer : « Des espèces disparaissent … et alors ? C’est le propre de
la vie », il est utile de s’interroger sur l’importance de la biodiversité à travers les valeurs que
ses composantes peuvent rendre à la société (Barbault, 1993 ; Chauvet et Olivier, 1993 ;
OCDE, 1996). Les ressources biologiques sont souvent négligées dans nos sociétés modernes.
Pourtant, les organismes vivants sont une source immense de richesses inexploitées (Barbault,
1993). Trois composantes essentielles de la biodiversité végétale illustrent la valeur de cette
ressource.
5. 2. 1 -
Valeur comme fonction au sein de l’écosystème
La biodiversité rassemble des valeurs écologiques « primaires » (régulation des eaux de
surface, défense contre l’érosion, contrôle des populations de parasites, recyclage des
substances nutritives…). Même si les mécanismes ne sont pas encore connus en détail, il est
aujourd’hui clairement établi que la biodiversité entre en jeu de manière étroite dans la
diversité de composition, de structure et de fonctionnement des écosystèmes, qui est vital
pour maintenir l’équilibre et l’habitabilité de la planète par le biais des phénomènes
régulateurs au niveau des grands cycles biogéochimiques (eau, carbone, azote, phosphore…)
(Bornard et al., 1996 ; Loreau, 1999a). De nombreuses études montrent que lorsque la
biodiversité décline, la qualité des services fournis par les écosystèmes baisse (Kareiva, 1994 ;
Tilman et al., 1994 ; Tilman et al., 1996 ; Hooper, 1997 ; Mc Grady-Steed et al., 1997 ;
Naeem et al., 1997 ; Hector et al., 1999 ; Wardle, 1999 ; Loreau, 1999a ; Naeem, 2000). De
plus, à mesure que les extinctions progressent, certaines des espèces perdues peuvent s’avérer
des « clés de voûtes », dont la disparition entraîne celle d’autres espèces et déclenche une
série de ricochets dans la population des espèces survivantes (Barbault, 1995 ; Aubertin et al.,
1998).
La préservation des espèces n’est possible qu’à travers celle de l’écosystème qui l’abrite. Or,
il est vraisemblable qu’au-delà d’un seuil écologique1, l’érosion de la diversité biologique
entraînerait une perte d’adaptabilité (ou capacité de résilience) de l’écosystème, mais il n’est
encore pas prouvé que les écosystèmes complexes sont plus résistants ou plus productifs que
les systèmes les plus simples (Aubertin et al., 1998), même s’il a été observé que les systèmes
les plus productifs du Monde sont ceux où la diversité biologique est la plus importante
(Aubertin et Vivien, 1998). Il s’agit de déterminer en réalité quelle proportion d’espèces peut
disparaître sans qu’il y ait modification significative du fonctionnement des écosystèmes
(Lévêque, 1994b). Selon le communément nommé « May’s paradox » (May, 1972), la
complexité des systèmes entraîne leur instabilité. Comme le signale Loreau, quelques
expériences récentes de grande envergure suggèrent qu’une diversité modérée doit suffire à
assurer un fonctionnement instantané de l’écosystème proche de l’intensité maximale
1
Seuil écologique Niveau de dégradation de la biodiversité au-delà duquel l’écosystème connaît un
accroissement subit des effets négatifs et éventuellement irréversibles sur son fonctionnement et sa résilience
générale au changement (Le Floc'h et al., 1995).
28
(Loreau, 1999a). Le principal rôle de la diversité résiderait alors dans la stabilisation à long
terme du fonctionnement de l’écosystème face à un environnement fluctuant, plutôt que dans
son contrôle à court terme, d’où le rôle clé de l’asynchronisme des réponses des différentes
espèces aux fluctuations de l’environnement.
5. 2. 2 -
Valeur pour l’économie et la santé
L’usage productif de la biodiversité apparaît à travers ses nombreuses applications dans les
domaines de l’industrie, de l’énergie, de la santé, de l’agriculture et de l’élevage (Gauthier,
1997 ; Aubertin et Vivien, 1998 ; OCDE, 1999).
- L’importance de la biodiversité végétale pour l’économie se manifeste par le fait qu’à long
terme, toute espèce est potentiellement utilisable par l’homme. L’extractivisme, prélèvement
direct de certaines espèces sauvages, présente encore aujourd’hui des enjeux économiques
considérables (pêche, exploitation de forêts non gérées). À tire d’exemple, les ressources
économiques provenant des seules espèces sauvages s’élèvent approximativement à 4,5% du
PIB des États-Unis. La pêche a fourni en 1989 environ 100 millions de tonnes de nourriture
au niveau mondial (FAO, 1988).
- Les composantes de la biodiversité végétale sont importantes pour la santé humaine. Les
substances extraites des plantes et utilisées en médecine sont nombreuses (aspirine dont une
molécule dérive du saule, if à l’origine d’une substance anticancéreuse, digitaline traitant les
insuffisances cardiaques et provenant de la digitale pourpre). Les médecines traditionnelles
sont à la base des soins primaires pour environ 80% de la population des pays en
développement. Quant aux médicaments modernes, un quart des prescriptions délivrées aux
États-Unis contient des principes actifs extraits des plantes (Roche et al., 1992).
- Les composantes de la biodiversité végétale fournissent de nombreux produits de
l’agriculture. Les Hommes, tout au long de leur histoire, ont façonné les espèces cultivées1 en
pratiquant le croisement et la sélection des variétés végétales les plus aptes à répondre aux
conditions de production et à leurs besoins économiques et culturels. Le génie génétique
permet aujourd’hui de s’affranchir de la barrière spécifique de la reproduction.
Paradoxalement, au-delà de sa très faible diversité génétique qui conditionne son efficacité
technique et économique, l’espèce cultivée est le fruit, par ailleurs souvent biologiquement
stérile, d’une très grande biodiversité si l’on inclut l’ensemble du matériel génétique qui a été
utilisé pour aboutir à la variété cultivée (Cauderon et al., 1995 ; Aubertin et al., 1998).
5. 2. 3 -
Valeurs de caractère éthique et culturel
Le maintien de la biodiversité végétale est également une question éthique. « La diversité
biologique devrait être conservée comme une question de principe, parce que toutes les
espèces méritent le respect en regard de leur utilité pour l’humanité » (IUCN et al., 1991). La
Nature dans toutes ses composantes joue un rôle très important dans la formation de nos
idéaux et de nos aspirations. Une espèce est le produit unique et irremplaçable de millions
d’années d’évolution. De plus, la disparition des espèces entraîne celle de nouvelles
connaissances scientifiques. Par ailleurs, la biodiversité offre un cadre unique pour d’autres
1
Espèce cultivée Espèce dont le processus d’évolution a été influencé par l’Homme pour répondre à ses
besoins. Art.2 (CNUED, 1992).
29
types d’utilisation directe tels que les loisirs et le tourisme écologique, ou « tourisme vert »,
qui se développe particulièrement dans le monde rural. Dans l’ensemble du monde, le
tourisme vert correspond à un chiffre d’affaire de 12 milliards de dollars par an (Lindberg,
1991). Une diversité culturelle se reflète dans la diversité paysagère. Nous valorisons cette
diversité car elle contribue à notre sentiment d’appartenance. Les paysages traduisent
l’histoire locale et inspirent l’imagination des peuples depuis des millénaires. Enfin, par sa
beauté, la biodiversité est une grande source de plaisir. Cet aspect esthétique constitue un
véritable besoin profondément ancré en chacun de nous, la diversité de la vie ajoutant à la
qualité de la vie.
X
Par les valeurs qu’elle fournit, la biodiversité végétale et sa préservation sont à considérer
comme essentielles. Ces valeurs constituent un fondement de base dans la mise en place de
politiques de conservation ou de gestion des espaces et des espèces (Barbault, 1993), après
avoir procéder à son évaluation.
5. 3 -
Évaluer la biodiversité : Considérations qualitatives et quantitatives
Au sens strict, la biodiversité est la diversité qui s’exprime au sein des systèmes biologiques.
La biodiversité peut s’évaluer aux différents niveaux d’organisation (gène, espèce,
écosystème), considérés selon les intérêts, les perceptions, le choix des outils d’analyse ou
l’organisation (Aubertin et al., 1998) :
- La diversité génétique s’évalue par des techniques de décodage génétique.
- La diversité locale de la population, qui représente la diversité alpha, correspond au nombre
d’espèces végétales présentes par unité de surface homogène, dans une communauté donnée
(Whittaker, 1970). Cette diversité s’exprime au niveau de l’espèce. Elle mesure la diversité
structurelle ou informationnelle (Kolasa et al., 1991). C’est un critère souvent utilisé
(Tokeshi, 1997), qui englobe également l’abondance relative des différentes espèces dans la
communauté. À nombre égal d’espèces, un peuplement étant plus diversifié si les espèces qui
le composent y ont des effectifs plus voisins, la diversité spécifique est couramment évaluée
par l’indice de Shannon1 (H’) :
H’ = - Σ (pi log pi)
où pi est l’abondance proportionnelle de l’espèce i dans l’échantillon :
pi = ni / Σ nj
1
La diversité informatique de Shannon, dont est issu cet indice, utilise des logarithmes de base 2. Elle
correspond au nombre total de questions auxquelles on peut répondre par oui ou par non pour connaître l’identité
d’un objet tiré au hasard dans un ensemble d’objets différents en nombre fini.
30
où ni est le nombre d’individus de l’espèce i.
L’indice de Shannon est d’autant plus élevé que le nombre d’espèces est grand. L’équitabilité
(R), R= H/Hmax, mesure la régularité de la distribution des espèces. L’inconvénient de cet
indice est qu’il présente une gamme de variation faible, en dépit de sa valeur synthétique.
Nous ne le retiendrons pas dans l’étude, d’autant qu’il est fortement corrélé à l’indice de
Shannon.
- La diversité supraspécifique, ou diversité taxonomique, se fonde sur le précepte que les
espèces qui sont très différentes les unes des autres contribuent d’avantage à la diversité
globale que les espèces proches. Certains taxonomistes pensent qu’il est préférable de mesurer
la diversité à des niveaux taxonomiques supérieurs, estimant que la diversité d’une zone
abritant 10 espèces d’un même genre est moins importante que celle d’une zone abritant 10
espèces de genres différents (OCDE, 1996).
- La diversité écosystémique, qui représente la diversité bêta, correspond au nombre de
communautés végétales homogènes qui peuvent être identifiées dans une surface donnée. Elle
s’exprime au niveau de l’écosystème. Elle est plus difficile à mesurer que la diversité
spécifique ou génétique car les frontières « entre communautés » et les écosystèmes sont
floues.
- La flore, qui représente la diversité gamma, correspond au nombre d’espèces présentes dans
toute la zone d’étude. Comme le précise Parizeau (1997), c’est la diversité spécifique totale
d’une région étendue et s’exprime au niveau du paysage.
Étant donné que la diversité biologique peut s’appliquer à différents niveaux et diverses
échelles, on ne peut pas la réduire à une seule mesure. En pratique, la diversité des espèces est
essentielle pour évaluer les autres niveaux de diversité et constitue un point de référence
constant pour les études sur la diversité biologique (OCDE, 1996). C’est ce niveau de base
que nous prendrons en compte dans notre étude.
D’autres critères peuvent être employés pour décrire cette diversité, cités par (Alard, 2002) :
-
les critères d’affinité ou de similarité définissent sa diversité de composition, en
référence à une échelle spatiale donnée (Scheiner, 1992),
les critères d’attributs vitaux des espèces, définissent sa complexité (Pignatti, 1996),
les critères d’attributs de niche des espèces, définissent sa cohérence écologique
(Alard et al., 2000),
la combinaison des deux critères précédents, définissent sa diversité fonctionnelle
(Lavorel et al., 1997).
La mesure de la biodiversité et son interprétation ne peuvent s’écarter de la prise en compte
de différents facteurs qui influencent la biodiversité végétale et la répartition de la végétation
et qui dictent les limites des écosystèmes distincts.
31
6-
Facteurs influençant la biodiversité végétale et la répartition de la
végétation
L’identification des facteurs responsables de l’origine et du maintien de la diversité
biologique est un problème fréquemment soulevé par les auteurs. La diversité biologique est
l’héritage d’une longue histoire évolutive des espèces et des peuplements, dans un contexte
climatique, géomorphologique et anthropique (Huetz de Lemps, 1994 ; Lévêque, 1994b). Il
convient donc de distinguer les facteurs mésologiques et les facteurs anthropiques.
6. 1 -
Facteurs mésologiques
Les conditions du milieu déterminent la possibilité de telle ou telle formation végétale en un
lieu déterminé à un instant donné de l’histoire du groupement. L’étude du milieu et de son
histoire est donc la condition essentielle pour comprendre la raison d’être du tapis végétal. Les
facteurs du milieu (Polunin, 1967)sont d’ordre physique (altitude, pente, érosion, géologie
locale, orientation), climatique (lumière, température, précipitation, évaporation, vent, gelées
tardives) et édaphiques (nature du sol, constitution, teneur en eau et en air, microfaune)
(Gaussen, 1954).
La diversité biologique est fortement dépendante des conditions écologiques qui prévalent
dans les systèmes étudiés (Huetz de Lemps, 1994 ; Lévêque, 1994b). Alors que certaines
plantes prospèrent sur une grande quantité de type de sols, (espèces dites indifférentes),
d’autres exigent des conditions pédologiques particulières pour s’installer sur un substrat
donné et sous un climat donné. Ces conditions déterminent un type de station auquel est
associée la végétation adaptée à ces conditions (Rameau et al., 1989 ; Gonin, 1993). La nature
du sol a sur la végétation, une influence de premier plan (Rey, 1960). Par exemple, les sols
calcaires produisent un réchauffement local et une perte des précipitations utilisables, alors
que les sols sableux (silico-argileux) sont très drainés. S’ajoutent à ces variations
mésologiques, celles d’ordre biologique. Certaines plantes dites sociales, ont la capacité de se
multiplier en grand nombre autour d’un point de départ et éliminent les autres.
6. 2 -
Facteurs anthropiques
Les activités humaines ne se sont pas manifestées de la même manière sur l’environnement au
cours du temps. Pendant la Préhistoire, les principaux agents destructeurs de la diversité
biologique ont été la chasse excessive et les animaux introduits (Wilson, 1993). D’après
l’UICN1, aujourd’hui les facteurs principaux de déclin de la diversité biologique sont la
destruction physique de l’habitat, le déplacement par espèces introduites, la pollution
chimique de l’habitat, l’hybridation avec d’autres espèces. Ces causes peuvent être
immédiates comme la destruction et la modification des habitats, l’exploitation d’espèces
sauvages, l’introduction d’espèces exogènes (Turner, 1997)2, l’homogénéisation des systèmes
1
UICN Union Internationale pour la Conservation de la Nature.
Des fragments de forêt sont plus susceptibles d’invasion par des espèces étrangères que les forêts continues,
notamment car de telles espèces sont, en général, plus tolérantes aux conditions de la zone exposée à l’extérieure
que le sont les espèces natives. Invasions qui peuvent être favorisées par de plus importantes perturbations autour
des fragments (Turner, 1997).
2
32
(synonyme de vulnérabilité (Wilson, 1993)), la pollution, la réaffectation des terres,
d’utilisations offrant une diversité élevée à d’autres n’offrant qu’une faible diversité (par
exemple, de la forêt naturelle à l’agriculture intensive). D’autres causes peuvent modifier la
biodiversité de façon sous-jacente comme les modes de production et de consommation, la
croissance démographique et la répartition de la population, les défaillances économiques
(OCDE, 1996).
- Sur le territoire français, les aménagements (urbain, grands travaux), la pression humaine
(piétinement, arrachage, défrichement, débroussaillage) et les menaces d’origine biotique
(envahissement par les espèces exotiques, fermeture du milieu) sont considérés comme les
causes premières de menaces d’espèces (Olivier et al., 1995). L’aménagement du territoire,
avec la construction d’infrastructures routières et l’urbanisation croissante, affecte à
différentes échelles, les niveaux hiérarchiques de la diversité biologique et contribuent à la
fragmentation des milieux par destruction des habitats, facteur d’appauvrissement de la
diversité biologique (Lévêque, 1997).
- À l’échelle régionale, l’aménagement des écosystèmes, l’introduction d’espèces et
l’exploitation des ressources vivantes affectent la dynamique des écosystèmes et des
peuplements, et la biologie des populations. Elles augmentent la dominance en raréfiant les
populations de la plupart des espèces des communautés modifiées tout en favorisant un petit
nombre d’espèces utiles ou opportunistes. Cela suppose une banalisation de la flore (Collinge,
1996).
- À l’échelle locale, la dégradation et la création d’habitats affectent la biologie des
populations (Lévêque, 1994b).
Si les activités humaines sont en général destructrices, au tout du moins perturbatrices,
certaines peuvent avoir un effet positif sur la biodiversité végétale. Ainsi, les Hommes créent
par leurs cultures et leurs activités diverses, un grand nombre d’écosystèmes nouveaux,
contribuant à accroître la diversité des paysages (Lamotte, 1995). Tel est l’exemple de la forêt
tropicale où la diversité en écosystèmes est relativement importante à cause des sociétés
humaines qui y ont vécu pendant des milliers d’années et de la domestication des paysages
qu’elles ont entreprise (Balée, 2000). Cet accroissement est toutefois limité par un excès
d’anthropisation.
W
II -
L’expression de la biodiversité végétale dans les
paysages d’agriculture intensive
Comme nous l’avons signalé, les pratiques agricoles modernes sont le premier facteur
influençant la biodiversité végétale en France, cette influence s’exprimant au niveau du
paysage. Après avoir énuméré les déterminants principaux qui sont connus pour permettre à la
biodiversité végétale de s’exprimer dans des paysages fortement anthropisés, nous réaliserons
plus précisément une synthèse des études menées sur les pratiques agricoles et leurs
conséquences sur la biodiversité végétale.
33
1-
Comment l’expression de la biodiversité végétale est-elle possible
dans des paysages fortement anthropisés ?
Le paysage, dont l’étude s’inscrit dans le cadre de l’écogéographie (Tricart, 1994), est le lieu
où se posent concrètement les questions d’environnement et d’aménagement (Lizet et De
Ravignan, 1987 ; Bertrand, 1994). Le paysage peut se résumer comme étant l’expression
visuelle d’une combinaison dynamique, instable entre la nature, la technique et la culture des
Hommes, dans un espace géographique, ou géosystème (Bertrand, 1970 ; Rougerie et
Beroutchachvili, 1991). Les formes du relief, le réseau hydrographique, la végétation,
l’habitat et le réseau routier composent les éléments de base du paysage ; ils s’intègrent dans
l’espace en une mosaïque d’unités homogènes par leur couleur, leur forme, leur nature ou leur
texture, qui sont visuellement distinctes les unes des autres (Collectif, 1999b).
Le paysage peut être considéré comme représentant le niveau d’organisation des systèmes
écologiques supérieurs à l’écosystème, caractérisé par son hétérogénéité et sa composition, et
gouverné pour partie par les activités humaines. En France, les paysages dominants sont ceux
de l’agriculture intensive, dont la productivité a prodigieusement augmenté au cours des
quarante dernières années par suite d’intensification. Ce résultat qui a été obtenu grâce à une
spécialisation des cultures, à la mécanisation, au développement du drainage et de l’irrigation,
et à la mise au point et à l’utilisation accrue d’engrais et de pesticides, met l’accent sur
l’influence que peuvent avoir ces systèmes agricoles sur le paysage (Aubertin et al., 1998).
L’observation de paysages d’agriculture intensive, aux immenses étendues cultivées,
dépourvus de toute végétation spontanée, et laissant une place très réduite aux formations
végétales ‘naturelles’, fait douter de la capacité de ces paysages à renfermer une biodiversité
végétale notable. D’autant plus que la plupart de nos milieux réputés naturels ont été euxmêmes façonnés par les pratiques agricoles traditionnelles (Chauvet et Olivier, 1993). Les
formations végétales résiduelles font souvent l’objet, ou tout du moins ont fait l’objet de par
le passé, d’exploitations et d’usages qui ont bouleversé les équilibres en place et ont pu
transformer la végétation existante. De ce fait, l’écosystème ne peut plus être étudié comme
s’il s’agissait d’un milieu vierge et fixe, étant hérité de pratiques humaines, qui sont
changeantes au cours du temps (Aubertin et Vivien, 1998). Plusieurs facteurs sont connus
pour défavoriser la biodiversité végétale dans les paysages ruraux : le drainage, la suppression
de la végétation naturelle, la monoculture, la monosuccession, des champs homogènes sans
marge de végétation, des champs ouverts sans haies, un paysage simplifié (Mac Laughin et
al., 1995b ; Paoletti, 2001).
Dans ce contexte, nous pouvons nous demander dans quelle mesure la biodiversité végétale
peut s’exprimer dans de tels paysages, fortement anthropisés. Comme l’illustre la figure cidessous, les paysages d’agriculture intensive, en France, présentent généralement une
mosaïque d’habitats dispersés dans l’espace, créés par l’exploitation humaine à partir des
climax, et que l’on peut réunir en types de végétation (culture, prairie, vergers, pelouses,
fourrés…) (Lemée, 1967). Or, chacun de ces habitats est susceptible de contenir une diversité
d’espèces végétales qui lui sont propres (cf. Photo 1). Cette mosaïque d’habitats peut donc
être perçue comme une source de biodiversité.
34
Photo 1. Mosaïque d’habitats d’un paysage du Lauragais haut-garonnais et flore
associée (Schwal)
La compréhension de l’expression de la biodiversité végétale et de sa dynamique dans des
paysages d’agriculture intensive passe par la prise en compte des différents facteurs
susceptibles d’influencer la végétation et sa composition floristique, ces facteurs étant euxmêmes sous l’influence plus ou moins forte des activités anthropiques qui dominent les
paysages agricoles. Dans cette optique, nous envisageons d’aborder les aspects conceptuels et
bibliographiques concernant les relations entre paysage agricole et biodiversité, qui
s’inscrivent en particulier dans le champ disciplinaire de l’Ecologie du paysage.
1. 1 -
L’Ecologie du paysage, ou l’étude des effets des composantes de la mosaïque
paysagère sur la biodiversité végétale
La thématique d’étude des relations entre paysage agricole et biodiversité s’inscrit dans le
champ de l’Écologie du Paysage, qui étudie les effets des composantes de la mosaïque
paysagère et de leur transformation sur la végétation et la flore (Naveh et Lieberman, 1984 ;
Forman et Godron, 1986). L’Écologie du Paysage est une discipline qui se base sur la prise en
compte de la dimension spatiale de façon explicite, de la reconnaissance de l’homme comme
partie intégrante du système écologique et de la reconnaissance de l’hétérogénéité spatiale et
temporelle des milieux (Burel et Baudry, 1999). En Ecologie du Paysage, le paysage est défini
comme un système formé par une mosaïque de taches (Urban et al., 1987), la tache étant
décrite comme une surface contiguë et homogène. Cette notion est d’une importance
fondamentale dans les études de fragmentation de l’habitat, de la dynamique des populations,
de la sélection de l’habitat et dans la théorie de la recherche optimale de ressources (Chust,
2002). C’est le niveau élémentaire que nous prendrons en compte dans l’analyse du paysage.
Les taches correspondent aux parcelles, exploitées ou non, qui constituent le maillage du
paysage agricole.
L’usage de l’espace et les pratiques agricoles à l’échelle de la parcelle sont les déterminants
principaux de la biodiversité végétale. Leurs actions s’expriment à travers la structure du
35
paysage (Deffontaines et al., 1995), dont l’organisation, qui peut être définie comme
l’ensemble des interactions et des propriétés de la structure qui rend sa perpétuation possible,
a déjà été mise en avant pour analyser les systèmes écologiques (Kolasa et al., 1989). Les
processus écologiques dépendent de la structure spatiale du paysage (Burel et al., 1990) : les
agencements spatiaux des ressources affectent le maintien des organismes et le potentiel de
dispersion (Dunn et al., 1991 ; Lavorel et al., 1995). La structure du paysage est décrite par
des attributs, ou descripteurs, des taches de la mosaïque qui référent à des relations spatiales
définies par le lieu (Turner et al., 1991a). Ces attributs sont variés : nombre de taches, forme,
degré d’isolement, accessibilité (barrières de dispersion : routes, champs cultivés),
interaction, dispersion. Ainsi, la forme peut avoir des implications importantes à l’échelle du
paysage. Des taches de formes simples avec des limites droites peuvent avoir plus de
transitions nettes. Des taches de formes complexes peuvent avoir différentes sortes de
conditions environnementales. Les connections entre les taches peuvent, elles, faciliter le
mouvement des individus et des graines à travers le paysage. Si les espèces ne peuvent pas se
déplacer de tache à tache, la probabilité d’extinction augmente avec le temps. Il n’existe pas
de relations simples et univoques entre systèmes de production agricole et structure
paysagère : un paysage est une combinaison de parcelles appartenant à des exploitations ayant
des systèmes de production différents. La taille des parcelles, le fait qu’elles soient ou non
entourées de haies, la manière dont elles se combinent sur le territoire entre elles et avec
d’autres éléments, sont autant d’éléments qui déterminent la structure du paysage agricole
(Laurent, 1994). Des études ont montré le rôle des bosquets et des forêts dans les paysages
agricoles, comme éléments clefs pour un grand nombre d’espèces, ou encore celui des
bordures de champ (Baudry et al., 1998). Dans ce cadre conceptuel, nous pouvons nous
interroger sur la dépendance des peuplements végétaux à l’hétérogénéité spatio-temporelle, la
fragmentation, la connectivité.
1. 1. 1 -
Les perturbations, sources d’hétérogénéité spatio-temporelle
Les perturbations qui vont opérer dans l’écosystème déclenchent dans le temps et dans
l’espace une série de successions écologiques locales, avec des stades divers de
développement, pour une formation végétale donnée. Ce sont ces séries d’habitat de structures
différentes qui permettent le maintien de la richesse spécifique à l’échelle des paysages
(diversité gamma) : lorsque la dynamique successionnelle transforme l’habitat d’une espèce,
celle-ci ne peut survivre que si elle trouve dans le voisinage un habitat semblable, émergeant
d’une nouvelle succession. Ces successions asynchrones ont été nommées des métaclimax1.
Elles garantissent en permanence la totalité des habitats nécessaires à toutes les espèces à
l’échelle du paysage et dévoilent la nécessité d’un paysage hétérogène dans le maintien de la
diversité biologique, grâce aux perturbations.
Le modèle d’un écosystème fermé, en équilibre, avec peu de variables, est abandonné au
profit d’une Ecologie évolutionniste (Aubertin et al., 1998). L’étude des communautés
végétales est corrélée à celle de leur agencement spatial (Legendre et al., 1989), qui est
variable au cours du temps (Roche, 1995). La notion d’hétérogénéité se manifestant dans les
dimensions spatiale et temporelle (Parizeau, 1997), est un concept clef lorsqu’il s’agit de
biodiversité (Metzger, com. pers.), les espèces pouvant répondre à l’environnement et à ses
variations, à des échelles spécifiques (Lavorel et al., 1995). L’hétérogénéité spatiale est liée
d’une part au nombre de types d’éléments qui composent le paysage, d’autre part à
l’organisation spatiale de ces éléments.
1
Métaclimax Ensemble des sous-systèmes successionnels déphasés les uns par rapport aux autres, mais tous
également nécessaires au fonctionnement du système à l’échelle du paysage (Blondel, 1995a).
36
D’une manière générale, la diversité des unités paysagères varie selon les caractéristiques du
milieu physique (type de sol, relief, climat), l’environnement biogéographique, notamment le
type de végétation potentiellement présent dans la région, et des facteurs humains (Collectif,
1999b). Les actions humaines sur le milieu naturel sont génératrices d’habitats originaux. En
application du concept d’Ethnodiversité, les perturbations anthropiques contribuent à
maintenir une grande diversité d’unités de paysage et de végétation (cas des associations1
prairiales, des lisières, des cultures) (De Foucault, 2001). En effet, les perturbations induisent
une hétérogénéité temporelle qui s’exprime à travers des successions de végétation et des
diversités d’unités paysagères. Toutefois, un système écologique subit continuellement des
‘micro-perturbations’, ou stress, qui peuvent être considérées comme insignifiantes car
n’entraînant pas de modification dans la structure fondamentale. Si la perturbation, qui peut
être d’origine humaine (défrichement, pâturage, pollutions) ou naturelle (chablis suite à une
tempête, sol mis à nu suite à une crue), est suffisamment importante, elle va modifier plus ou
moins profondément le système écologique dans sa physionomie, sa composition
taxonomique, mais aussi son organisation spatiale (surface, forme), déclenchant une nouvelle
dynamique écologique. L’écosystème pourra ou non revenir à son état initial, selon sa
résilience (Holling, 1973) : le paysage a un seuil critique au-delà duquel les processus
écologiques voient des changements qualitatifs dramatiques (Turner et al., 1991b). Cette
transformation peut amener une modification de la formation et de la composition floristique
qui la caractérisent (Gaussen, 1954). Il peut y avoir jusqu’à un certain point modification de la
formation sans transformation du type de formation (par exemple, quand un taillis se
transforme en futaie, la composition peut rester à peu près la même). Cependant, si on regarde
les choses de près, l’ombre des arbres fait disparaître certaines plantes, en fait apparaître
d’autres : la composition varie. Inversement, on peut dire qu’une prairie formée d’une certaine
composition peut donner une autre prairie formée d’une autre composition sans changer de
formation. Il est maintenant admis (Kolasa et al., 1989) que les phénomènes se déroulant dans
les systèmes écologiques présentent une structure hiérarchique avec des niveaux dont les
entités sont caractérisées par un rythme de déroulement du phénomène propre d’autant plus
lent qu’il est élevé dans la hiérarchie (Allen et Starr, 1982). En d’autres termes, les stades
inférieurs des successions végétales évoluent plus vite vers le stade qui leur font suite que les
stades de rang hiérarchique supérieur. Chaque stade forme une entité du stade supérieur et
inclut lui-même des sous-systèmes. Les entités sont duales, à la fois faisant partie d’un tout et
composée de parties (Koestler, 1967 in Allen et Starr, 1982). L’exploitation en taillis et les
éclaircies, dans le paysage agricole, contribuent significativement à l’accroissement de la
richesse spécifique et augmentent aussi la diversité de la végétation dans le paysage (Moonen
et al., 2001). La germination des graines est stimulée par des trous dans la végétation qui
changent les conditions d’habitat.
Toutes ces modifications constituent le dynamisme de la végétation. Le dynamisme naturel est
en général peu connu ; ce qu’on appelle dynamisme est essentiellement l’étude de la façon
dont la végétation lutte contre l’action de l’homme et tâche d’atteindre l’état d’équilibre que
l’homme lui a fait perdre. La forme finale, en France, est la forêt. Deux types de succession
s’opposent selon l’intervention ou non de facteurs extérieurs (Huetz de Lemps, 1994). La
succession « régressive » où les échelons successifs l’éloignent du climax à la suite de
perturbations. La succession « progressive » où les interventions extérieures cessent. L’intérêt
de cette conception hiérarchique est de permettre une description et une simplification d’un
phénomène dans un cadre conceptuel explicite et transposable à d’autres situations (Allen et
Starr, 1982 ; O'Neill et al., 1986 ; Allen et Hoekstra, 1992).
1
Association Unité floristique de groupement végétal (Rey, 1960).
37
Face à cette hétérogénéité spatio-temporelle, les échanges entre dispersion, compétition,
mortalité sont fondamentaux pour procurer une dynamique de population et le maintien d’une
diversité d’espèces (Malanson et al., 1996). En effet, les auteurs avancent qu’un écosystème
ne peut se maintenir que s’il y a un équilibre dynamique qui s’opère entre les colonisations et
les extinctions (Blondel, 1995b). L’organisation spatiale et l’échelle sont au cœur du
problème. Les limites sur la dispersion sont identifiées comme des facteurs importants
affectant l’organisation des communautés. L’hétérogénéité spatiale peut permettre le maintien
de plus d’espèces dans un territoire mais la fragmentation de l’espace tend à baisser la
diversité spécifique. Ainsi, nous pouvons avancer que l’évolution de la biodiversité végétale
est stimulée par la variabilité des milieux dans lesquels vivent les espèces (Lévêque, 1997).
L’histoire de l’écosystème est une composante essentielle à prendre en compte quand on
aborde l’étude de la flore (Lévêque, 1994a). En cela, il est fondamental de comprendre les
processus d’assemblage des espèces en communautés végétales. Les communautés végétales
peuvent être considérées comme des systèmes complexes (Gisiger, 2001), exhibant des
patrons de composition, spatiaux et temporels qui suggèrent leurs propriétés d’autoorganisation (Kolasa et al., 1989 ; Wilson, 1997), le long de trajectoires spontanées en
réponse à un environnement donné (Alard et al., 2002). L’identification des écosystèmes peut
sembler problématique dans le sens où la nature est beaucoup plus proche d’un continuum
que d’une mosaïque d’unités écologiques bien différenciées (Parizeau, 1997). Le premier
stade d’une succession végétale démarre par l’établissement plus ou moins rapide d’espèces
pionnières, sur une surface nue soustraite aux influences destructrices ou tout du moins
perturbatrices (Lemée, 1967). Le stade terminal, d’équilibre, est atteint après une succession
de groupements plus ou moins stables et durables, de complexité structurale croissante. La
communauté végétale est composée d’un assemblage particulier d’espèces dont la coexistence
est régie par divers processus (compétition, séparation spatiale et temporelle de l’utilisation
des ressources, suppression des dominants par les herbivores, et diversification des espèces)
(Eriksson, 1993 ; Rosenzweig, 1995 ; Tokeshi, 1997 ; Dietz et al., 1998). Pour Whittaker, la
compréhension des mécanismes de diversité nécessite la prise en compte, sur de larges
échelles spatiales, des aspects de spéciation, d’extinction et biogéographiques (Whittaker,
1977). Les communautés seraient en fait dans un état de non-équilibre, où les nouvelles
espèces pourraient coloniser les communautés grâce à la création permanente de "zones
vides" (Hubbell et al., 1986). Au-delà d’un seuil d’extinction d’espèces, l’écosystème local
commence à décliner de façon visible (Wilson, 1993), la colonisation et l’extinction
dépendant des caractéristiques de l’espèce, à savoir les capacités de dispersion, les exigences
en ressource et les possibilités de compétition. La diversité spécifique dans une communauté
étant par ailleurs influencer par le pool d’espèces (“species-pool”) potentiellement capables
d’exister dans la communauté (Eriksson, 1993).
Les communautés végétales doivent donc être étudiées en appréhendant sur une échelle de
temps fine, les capacités de dispersion des espèces, en réponse à la mosaïque paysagère. Dans
ce contexte, le développement de l’Écologie du paysage (Naveh et Lieberman, 1984) a mis en
avant l’importance des flux d’espèces dans l’espace et dans le temps (Forman et Godron,
1986) : pour aller d’un habitat à un autre, les espèces utilisent des corridors1, qui viennent
souvent compenser la fragmentation des forêts (Baudry et al., 1995).
1
Corridor Élément linéaire ayant une structure végétale proche des habitats principaux (Baudry et al., 1995).
38
1. 1. 2 -
La fragmentation
Le développement agricole a entraîné, lors des phases de remembrement, le remplacement de
larges parties de l’écosystème naturel par une matrice de parcelles dont certaines sont des
vestiges de l’écosystème originel. Les paysages agricoles modernes sont caractérisés par une
surface étendue, une homogénéité des cultures qui fragmentent le paysage naturel, la perte
d’habitat et l’isolement étant les deux composantes de la fragmentation (cf. Figure 1). Les
fragments de végétation naturelle sont devenus une composante des paysages agricoles
français.
Figure 1.
Fragmentation des taches : réduction et isolement, d’après (Burel et Baudry, 1999)
Depuis les années 1980, de nombreuses études se sont penchées sur les conséquences de la
fragmentation de parcelles d’habitat. La disparition des habitats n’entraîne pas seulement
l’extinction locale d’espèces, mais aussi la fragmentation des populations, posant le problème
des populations isolées : la fragmentation rend les espèces qui vivaient au sein d’écosystèmes
continus particulièrement vulnérables (Heywood, 2000), en limitant les capacités de
dispersion des espèces (Barbault, 1997). S’appuyant sur la théorie de la biogéographie
insulaire (Mac Arthur et Wilson, 1967), qui établit que plus une île est éloignée du continent,
moins nombreuses sont les espèces qui y vivent, la communauté scientifique a fréquemment
évoqué et mis en avant la distance qui sépare les populations isolées, comme responsable du
flux d’espèces entre population (Wilson, 1993 ; Roche, 1995). Suivant le même fondement,
ils ont mis en avant l’influence de la superficie de l’espace habitable dans le maintien des
espèces (Wilson, 1993 ; Barbault, 1997). En prenant l’exemple courant des milieux forestiers,
composants importants de l’héritage naturel du territoire européen (Franklin et al., 1987) et
particulièrement dans les systèmes agricoles en tant que réservoirs de biodiversité (Balent et
al., 1995), l’on observe que même si l’intérieur de chaque parcelle est intact, la fragmentation
d’un territoire entraîne une perte de biodiversité végétale, de nombreuses espèces exigeant de
larges espaces pour survivre. En fait, ce n’est pas nécessairement la diversité floristique qui
diminue mais plutôt la composition spécifique qui est modifiée (Robinson et al., 1992) :
généralement, quand la fragmentation augmente, les espèces étroitement liées aux milieux
boisés (forestières, sciaphiles) diminuent, remplacées par des espèces généralistes et de haie.
Ainsi, la fragmentation des habitats peut diminuer les niveaux de recolonisation (Sih et al.,
2000) et engendrer des métapopulations. Le concept de métapopulation établit les bases
théoriques pour comprendre les mécanismes d’extinction des espèces. Une espèce étant
représentée par un ensemble de populations distinctes qui occupent des territoires différents,
par fragmentation des habitats qu’elle occupe, une métapopulation se définit comme
« l’ensemble constitué par diverses populations occupant des habitats disjoints mais qui
peuvent échanger leur gène par migration d’individus » (Collinge, 1996). C’est un concept
qui est appliqué dans la prédiction du maintien des espèces qui occupent des fragments
d’habitats induits par l’Homme. En application de cette théorie aux milieux boisés, le
maintien de la diversité en espèces forestières est possible par des échanges constants entre
fragments et est déterminé par l’organisation des bois dans le paysage (Levins, 1969) et les
caractéristiques du milieu environnant. Dans le processus de la conversion du paysage pour
39
les activités humaines, les écosystèmes forestiers natifs, transformés en fragments de taille
réduite et déconnectés des habitats adjacents et continus, provoquent des populations de
plantes subdivisées et réduites, augmentant la probabilité d’extinction de certaines (Wilcox,
1980 ; Wilcox et al., 1985 ; McNeely et al., 1990). Une autre conséquence importante de la
fragmentation des bois est une forte augmentation de la lisière (Laurance, 2000) (cf. Figure 2).
Cette lisière affecte négativement les espèces forestières, en autorisant plus d’espèces
exotiques et de rudérales dans l’intérieur de la forêt. Ces espèces réduisent la diversité (par
compétition) (Ebinger, 1997).
Figure 2.
Forme des taches et importance de la lisière, d’après (Burel et Baudry, 1999)
La fragmentation de l’habitat limite les capacités de dispersion et de colonisation des espèces
(Barbault, 1997 ; Linhart, 1999 ; van Dyck et al., 1999). D’autant plus que la dispersion des
mammifères, réduite par la fragmentation de leur habitat, peut affecter des plantes si elles en
dépendent pour la dispersion de leur graine (Turner, 1997). Des fragments d’habitat isolés ne
seront pas colonisés par des espèces qui pourraient y vivre. La dispersion est une composante
de la dynamique des métapopulations et de leur persistance (With et al., 1999) ; Thompson in
(Hendry et Grime, 1993). C’est la clé du maintien des espèces dans des paysages fragmentés.
La dispersion des graines a un profond effet sur la structure de la végétation, en intervenant de
la colonisation de nouveaux habitats au maintien de la diversité (Wang et al., 2002). L’effet
de la fragmentation est par ailleurs influencé par l’éloignement de la graine aux plantes
parents. Plus l’éloignement est grand, moins la graine a de chance de survivre et de germer
(Cain et al., 2000). La dispersion décline si la distance entre les taches excède la capacité des
organismes à atteindre un habitat ou à traverser les trous d’habitats défavorables. Les auteurs
avancent que le succès de la dispersion est généré et diminué dans les paysages avec une
distribution des habitats en groupe (With et al., 1999).
Toutefois, le principe biogéographique que des aires plus grandes et rapprochées contiennent
plus d’espèces semble avoir des limites dans certaines applications (Oertli et al., 2002). Même
des habitats petits peuvent contenir d’importants groupes d’espèces pour la conservation.
Certaines espèces peuvent être plus associées à des petits habitats. En terme de conservation,
protection, restauration, aménagement, il est donc nécessaire de promouvoir la conservation
de tous les habitats, au regard de leur taille.
Les connaissances qui viennent d’être exposées sur la fragmentation seront largement mises à
profit dans notre étude.
1. 1. 3 -
La connectivité
La connectivité caractérise la capacité du paysage à faciliter le mouvement à travers les taches
ressources (Taylor et al., 1993 ; Metzger et al., 1997). Elle apparaît comme une propriété
fondamentale pour la survie d’une métapopulation dans un paysage fragmenté. Les
connections entre les taches peuvent faciliter le mouvement des individus et des graines à
40
travers le paysage. Deux notions s’opposent quand l’on s’intéresse aux problèmes de
connectivité dans les paysages fragmentés : la notion de zone de connexion et de barrière. La
notion de zone de connexion (ou continuité) biologique, est définie comme un espace
fonctionnel d’échange biologique permettant le maintien des biodiversités locales. À
l’opposé, la notion de barrière est définie comme un espace qui inhibe les échanges en raison
de l’obstacle physique qu’il constitue (Ménard et al., 2001). Les routes peuvent constituer un
exemple de barrière. Le maintien de la biodiversité végétale, initié par les échanges, la
dispersion des organismes entre fragments d’habitats, est déterminé par un seuil de
connectivité structurale. La préservation des corridors à travers des taches d’habitat isolées
semble modérer l’effet négatif de la fragmentation d’habitats, en facilitant le mouvement des
plantes.
1. 2 -
Rôle de la variabilité génétique et de la banque de graine, dans la colonisation
d’habitats
Un facteur essentiel à l’expression de la biodiversité végétale dans des paysages anthropisés
est la variabilité génétique qui est notamment présente et stockée dans la banque de graines, et
qui garantit en partie la colonisation d’une diversité d’habitats fragmentés. Nombre d’espèces
occupent des habitats transitoires et fonctionnent en métapopulations. Cette succession de
phénomènes d’extinction et de colonisation qui caractérisent de telles populations, intervient
pour conserver une certaine forme de variabilité génétique et se révèle certainement comme
un mécanisme de survie de la plante et constitue une adaptation à des habitats transitoires
(comme les sols riches en azote après les coupes). Par ailleurs, la variabilité génétique
d’individus par rapport à leurs parents permet à ces individus de coloniser de nouveaux
habitats (Beattie, 1976). L’isolement de populations locales de très petits effectifs contribue
au danger de létalité génétique (Lamotte, 1995). Les métapopulations participent à la
constitution d’une « banque de semences » dans le sol, phénomène qui assure la survie à long
terme des taxons (Olivier et al., 1995).
Il convient de s’interroger sur l’intérêt de certaines pratiques qui visent à bloquer
artificiellement une succession dynamique. Une telle pratique pourrait s’avérer néfaste pour
certains taxons, en conduisant plus ou moins rapidement, à un appauvrissement
inexorablement létal pour la population concernée de la réserve en graines du sol. Les
banques de graine sont importantes dans le sens où elles permettent le rétablissement d’une
population fragmentée après une perturbation (Kalisz et al., 1997). La banque de graine
persistante, associée à des graines de petite taille, est bien adaptée aux paysages modernes
fortement perturbés (Thompson in Hendry et Grime, 1993). Une étude sur des pelouses
calcaires riches en espèces, et pourtant caractérisées par un faible nombre d’espèces dans la
banque de graines, révèle notamment le caractère transitoire des graines de la banque (Kalisz
et al., 1997). Les auteurs concluent que le nombre d’espèces dans la banque de graines
diminue avec le nombre d’espèces présentes dans la végétation, et que le pourcentage
représenté dans la banque est toujours plus élevé dans les végétations envahies par les
mauvaises herbes que dans les pelouses naturelles. Aussi, la restauration de pelouses riches en
espèces ne peut reposer uniquement sur la banque de graine, mais doit être complétée par un
enrichissement des milieux environnants. Les auteurs s’accordent aujourd’hui à recommander
la gestion en métapopulation qui permet de maintenir une variabilité génétique sur
l’ensemble, notamment lorsqu’il s’agit d’espèces occupant des habitats transitoires entrant
dans le cadre de successions végétales. Les populations élémentaires ainsi constituées doivent
échanger peu d’information génétique entre elles, favorisant localement une dérive maximale
41
tout en conservant des fréquences alléliques globales (Olivier et al., 1995). Cette solution
permet, si le taxon est soumis à des perturbations locales non contrôlées, de garantir sa survie
à l’échelle de la population. Pour les généticiens des populations (Olivieri et al., 1992), ce
mode de gestion présente d’autres avantages comme :
-
2-
la présence d’une forte dérive locale pouvant rendre négligeable l’effet de la sélection,
la fragmentation de la population globale pouvant permettre le maintien d’un
polymorphisme sélectionné.
Conséquences des pratiques agricoles sur la biodiversité végétale
Selon les situations, les activités agricoles peuvent favoriser ou décimer, voire éliminer les
espèces non domestiques (Conseil de l'Europe et al, 2002a). La relation entre l’agriculture et
l’environnement est complexe. Par ailleurs, l’évolution de l’agriculture détermine fortement la
dynamique des composantes de la biodiversité végétale de par l’étendue des espaces couverts
et des interactions avec le milieu. Les facteurs qui ont une incidence sur la biodiversité
végétale s’expriment aux différentes échelles spatiales :
-
Au niveau d’une région, ce sont le type d’activité pratiqué (culture intensive) et l’espace
exploité (herbage).
Au niveau d’un paysage, la taille d’un champ, la couverture végétale et les différents types
de délimitations.
Au niveau d’une ferme, le mode d’exploitation de la terre (succession et rotation des
cultures).
Au niveau d’un champ, les pratiques agricoles qui déterminent la qualité de l’habitat et la
biodiversité correspondante.
À ces différents niveaux, l’agriculture peut occasionner des transformations sur la biodiversité
végétale, qui se révèlent souvent comme préjudiciables mais qui peuvent être également
parfois bénéfiques.
2. 1 -
Impact négatif de la modernisation des paysages agricoles sur la biodiversité
végétale
Dans le passé, l’agriculture a joué un rôle crucial dans la conservation et la création de
milieux riches en espèces. De nos jours, l’agriculture intensive, associée à un remplacement
progressif des pratiques traditionnelles par une mécanisation accrue, a tellement simplifié les
écosystèmes qu’on peut parler d’un grand désert biologique à propos des surfaces qu’elle
exploite. Les activités agricoles ont des effets négatifs sur les paysages et sur la flore. Il est
largement admis que l’agriculture moderne est l’activité humaine en France qui cause le plus
de dommages aux habitats naturels (Commission Européenne, 1999).
42
L’examen des causes générales de la détérioration de la diversité biologique qui peuvent être
imputées à des pratiques agricoles inadéquates, fait apparaître l’existence d’interrelations
ayant des effets directs et indirects à différents niveaux (Conseil de l'Europe et al, 2002a) :
1- La dégradation des habitats
2- La réduction du nombre d’espèces utilisées
3- La disparition de la vie sauvage
2. 1. 1 -
La dégradation des habitats
Avec la modernisation des techniques, de nombreux habitats ont été réduits. Les
remembrements, la mécanisation ont causé la destruction des haies, le drainage des terres
humides, le défrichement de terres boisées, qui ont altéré les conditions environnementales et
détruit des systèmes complexes. Or, les bosquets, les haies, les milieux humides sont connus
pour jouer un rôle fondamental pour la survie de nombreuses espèces. Par exemple, la
disparition ou la dégradation des terrains marécageux provoquent directement la raréfaction
des plantes hydrophiles. Un autre exemple qui est général en France est la disparition des
formations prairiales qui ont perdu 12,5% de leur surface entre 1982 et 1990 (Ministère de
l'Environnement, 2000). Parallèlement les surfaces drainées ont quadruplé, l’application de
pesticides a triplé, l’application de fertilisants à base de nitrate a presque doublé.
Le résultat net de la simplification de la biodiversité à des fins agricoles est une
artificialisation de l’écosystème qui requière des interventions humaines constantes et qui
dépend fortement des apports externes (Altieri, 1999). Pour comprendre comment les causes
de perte d’habitat induisent une réduction de la biodiversité végétale, il faut envisager les
conséquences de cette perte (Sih et al., 2000). La perte d’habitat entraîne quatre phénomènes :
-
la réduction de la surface de l’habitat,
sa fragmentation,
une détérioration de l’intérieur d’une tache,
la détérioration de l’habitat entre les taches.
2. 1. 2 -
La réduction du nombre d’espèces utilisées
Au niveau génétique, la forte réduction du nombre d’espèces utilisées, par spécialisation, fait
peser une menace sur un potentiel génétique inestimable. La variabilité génétique des
populations naturelles est la condition première à leur survie à long terme puisque d’elle
dépend leur capacité d’adaptation à des conditions changeantes (Barbault, 1993 ; Gray, 2000).
2. 1. 3 -
La disparition de la vie sauvage
Les équilibres qui existaient dans les systèmes biologiques sont modifiés par des pratiques
intensives (mécanisation, désherbage et fertilisation). Sur l’ensemble des espèces que compte
la flore française, 34 sont présumées éteintes depuis 1900, certainement en raison des activités
humaines et 20% sont considérées en danger à cause de la destruction ou de l’altération des
habitats dans lesquels elles vivent. L’usage d’herbicides dans les champs a permis d’éliminer
la plus grande partie des populations de commensales liées aux cultures. Dans les prairies, les
engrais ont favorisé les espèces productives. Les pratiques ont également eu des conséquences
43
sur la survie des espèces. La pratique de l’ensilage d’herbe de prairie permet des coupes plus
précoces que la production de foin mais, dès lors, les plantes prairiales ne peuvent plus
produire de graines. D’autres causes de dégradation de la biodiversité végétale peuvent être
mises en avant comme le pâturage ou l’enfrichement qui étouffe les espèces (prairie de fauche
abandonnée en raison de nouvelles technologies) (Dussaussois, 1997). Un autre exemple est
celui des herbicides. Même si leur efficacité peut atteindre 90%, les 10% restant suggèrent
une compétition possible entre plantes cultivées et adventices (comme par exemple, la
compétition pour la lumière) (Allirand et al., 2000). L’utilisation à outrance des herbicides
évoque les risques d’évolution des populations adventices développant des résistances
(Rivière et al., 1995). En fait, quelle que soit la technique de désherbage utilisée, sa mise en
œuvre gagnerait sans doute à être raisonnée en terme de préservation de l’environnement et de
la biodiversité. Selon Assemat (2000), la forte économie d’herbicide rendue possible par un
désherbage localisé en post-levée deviendra, dans certaines situations, une stratégie optimale
de gestion des mauvaises herbes dans l’avenir.
2. 2 -
Les pratiques agricoles peuvent être initiatrices de biodiversité
Le développement de l’agriculture a eu un profond impact sur les paysages et les
écosystèmes. Les milieux agricoles ont favorisé l’expansion et le maintien d’espèces liées à
des stades transitoires et/ou spatialement dispersés de la forêt pré-néolithique, qui était en plus
probablement instable (fluctuations climatiques de l’Holocène). En revanche, les milieux qui
sont apparus avec les activités agricoles - bocages, prairies de fauche, pâtures, pelouses
calcaires - sont des milieux souvent plus riches en espèces que les forêts naturelles dont ils
dérivent. Les haies des bocages, patiemment créées par les paysans et sacrifiées au
remembrement, contiennent plus de diversité que les forêts (Aubertin et Vivien, 1998). De
plus, en défrichant et en exploitant à des degrés d’intensité variables différentes surfaces, les
agriculteurs créent une mosaïque de milieux favorables à de nombreuses espèces (comme
nous l’avons déjà vu, les perturbations sont source d’hétérogénéité paysagère). Par ailleurs,
pendant les derniers siècles, l’Homme a été un facteur d’enrichissement de la biodiversité
végétale et notamment des mauvaises herbes en rapport avec les plantes cultivées (Polunin,
1967). Au sein des agrosystèmes, face à la biodiversité planifiée (variétés de plantes utilisées,
espèces cultivées, types de couverts, réseau de haies, présence de vergers, …) s’installe une
biodiversité associée (écotypes, espèces sauvages et communautés apparaissant spontanément
dans les systèmes de production), surtout en marge des champs cultivés (van Elsen, 2000).
Le degré de biodiversité végétale dans les agrosystèmes dépend de quatre caractéristiques des
agroécosystèmes :
-
la diversité de la végétation,
la permanence de cultures variées,
l’intensité de l’aménagement,
l’accroissement de l’isolement des agroécosystèmes de la végétation naturelle.
W
44
Face aux multiples conséquences des pratiques agricoles modernes sur le paysage et la
biodiversité végétale, l’adoption de mesures de gestion conservatoire apparaît comme une
nécessité. Pour ce faire, il convient tout d’abord d’évaluer les priorités en matière de
conservation en initiant une réflexion sur l’importance de la valeur écologique des espèces,
toutes les espèces ne présentant pas les mêmes menaces d’extinction.
III -
Réflexion sur l’importance de la valeur écologique
des espèces dans une optique conservatoire
Nous venons de voir que l’ensemble des perturbations induites par les activités humaines et
agissant sur le paysage et la végétation n’ont pas le même effet sur toutes les espèces de
plante, certaines espèces paraissant plus menacées que d’autres. Ceci est lié aux
caractéristiques propres à chaque espèce, induisant des réponses différentes des plantes face
aux conditions du milieu. Ainsi, l’identification des urgences en matière de conservation et la
proposition de mesures de gestion conservatoire appropriées supposent l’établissement de
critères qui soient les plus objectifs possibles et qui laissent peu de place à une approche
affective (Olivier et al., 1995). Dans notre recherche, nous retenons comme critères les
valeurs écologiques des espèces dont l’appréciation objective sera possible à partir de la
connaissance des conséquences des perturbations et des changements paysagers sur la
végétation. Les valeurs écologiques des espèces concernent :
1-
-
l’abondance des espèces dans le milieu (des espèces abondantes sont-elles moins
menacées d’extinction que d’autres plus rares ?),
-
la valeur patrimoniale des espèce (la conservation d’espèces à forte valeur
patrimoniale doit-elle être privilégiée au détriment d’espèces plus banales ?),
-
l’origine biogéographique des espèces (question de la conservation des espèces
d’origine étrangère plus ou moins ancienne),
Abondance des espèces dans le milieu
Comme le rappelle Ramade, dans tout écosystème, il existe des espèces banales, d’autres
rares, plus vulnérables à un risque d’extinction. Selon les caractéristiques propres à chaque
espèce, les perturbations n’ont pas le même effet sur toutes les espèces de plante. Les espèces
qui ont une faible valence écologique1 seront limitées à une faible diversité de milieux ; les
plantes à large valence écologique, au contraire, peuvent se développer dans des milieux très
différents (espèces dites indifférentes). Par ailleurs, certaines plantes dites sociales, ont la
capacité de se multiplier en grand nombre autour d’un point de départ et éliminent les autres.
Ces considérations amènent à s’interroger sur le caractère rare d’une espèce. La faible
abondance d’une espèce dans un territoire donné signifie-t-elle que l’espèce est menacée et
doit faire l’objet de mesures de protection ? La difficulté à répondre à cette question réside
1
La valence écologique d’une espèce est la faculté de cette espèce à peupler des milieux caractérisés par une
plus ou moins grande variation des facteurs écologiques.
45
dans l’appréciation des valeurs absolues de rareté et de menace. La plupart des biologistes
considèrent que les espèces rares sont plus susceptibles de s’éteindre que les espèces plus
abondantes (Terborgh et al., 1980). Aussi, une définition plus précise de la rareté peut
permettre de mieux définir les priorités d’intervention et les mesures à promouvoir.
L’abondance d’une espèce dans un écosystème dépend du potentiel biotique de l’espèce,
c’est-à-dire de son aptitude à se reproduire, et de la distance entre populations qui met en jeu
l’aptitude à se disperser. Or, de par ses activités, l’Homme agit sélectivement sur le milieu
naturel, entraînant la disparition de certains habitats, réduisant de manière significative les
effectifs, fragmentant ou isolant des ensembles de populations autrefois plus amples et
certainement plus diversifiés.
La rareté peut avoir d’autres causes, indépendamment de toute intervention anthropique
(Harper, 1981). Souvent l’espèce est rare car les habitats qui lui sont favorables sont euxmêmes rares et ont toujours été rares (cas des espèces endémiques). Les taxons concernés
occupent depuis très longtemps les localités où on les rencontre aujourd’hui. Au cours des
temps, ces populations n’ont pas vu leurs effectifs varier de manière significative. De
nombreux auteurs s’accordent à penser que la variabilité de ces taxons est aujourd’hui
suffisante pour assurer leur maintien sur le long terme pour autant que leur environnement
reste stable. Nous pouvons aussi nous interroger sur l’intérêt de la conservation des espèces
rares, qui relève dans certains cas, d’un véritable « acharnement thérapeutique ». Au-delà de
l’intérêt patrimonial qu’elles représentent, nombreux sont les biologistes qui considèrent
aujourd’hui que les espèces rares jouent un rôle dans le fonctionnement des systèmes
écologiques : celui de doublure ou d’éléments de substitution susceptibles de remplacer des
espèces plus communes au cas où ces dernières viendraient à disparaître en raison de
l’évolution de leur environnement.
2-
Valeur patrimoniale des espèces
En matière de conservation de la biodiversité végétale, il est fondamental de s’interroger sur
la valeur patrimoniale des espèces. La conservation des espèces à forte valeur patrimoniale
doit-elle être privilégiée au détriment des espèces plus banales ? La notion « d’espèces à
responsabilité patrimoniale » fait référence au fait que la biodiversité est inégalement répartie
à la surface de la terre et que pour des raisons principalement de spécificité écologique, les
espèces doivent être conservées dans leur contrée d’origine (Olivier et al., 1995). Citons par
exemple, les taxons endémiques, ou encore les taxons en limite d’aire ou en situation de
"refuge ". Cette notion de responsabilité relevait par le passé d’un engagement moral.
Aujourd’hui, il existe pour les pays d’Europe des textes internationaux qui s’imposent aux
États et leur confèrent des responsabilités très officielles en matière de conservation de la
flore (Convention de Berne, Directive « Habitats, faune, flore ») (cf. p.23). Face à la
dégradation de la qualité floristique des milieux et à la banalisation de la flore dans des
milieux connus pour leur originalité est apparue récemment la notion d’espèce dite
‘déterminante’. Cette notion regroupe les espèces en danger, vulnérables, rares ou
remarquables, protégées ou non, se développant dans des conditions écologiques ou
biogéographiques particulières. Les auteurs proposent des mesures de gestion et de protection
des ‘habitats déterminants’ : protection de l’habitat, conciliation de la gestion et de
l’utilisation des habitats, maintien des conditions actuelles (Guerlesquin et al., 1999).
46
3-
Origine biogéographique des espèces
Face à l’origine étrangère de certaines espèces dans le milieu (exemple des messicoles) se
pose la question de l’intérêt de la conservation des espèces allochtones. Cette question
soulève une autre interrogation sur le caractère spontané d’une plante. Ce qui peut paraître
d’origine naturelle aujourd’hui peut être en réalité le résultat de colonisations plus ou moins
anciennes par des introductions1 volontaires (plantes cultivées) ou non (plantes véhiculées)
par propagation des graines (Lévêque, 1994a). Par exemple, les mauvaises herbes sont
présentes dans les cultures depuis le début du Néolithique, amenées avec les céréales. Par
ailleurs, si certaines espèces introduites ne sont devenues que des adventices fugaces, d’autres
persistent ou s’étendent (Natali et Jeanmonod, 1996 ; Lambinon, 1998). Une plante
naturalisée2 peut devenir envahissante lorsqu’elle se répand brusquement, qu’elle pullule et
qu’elle devient indésirable. Cette prolifération dans des milieux naturels ou semi-naturels peut
produire des changements significatifs sur la composition spécifique dans le cas d’espèce
compétitive, sur la structure des peuplements et sur le fonctionnement des écosystèmes. Elle
peut également entraîner une uniformisation des paysages. Il est donc nécessaire de pouvoir
estimer le degré d’envahissement des milieux par une espèce déterminée et la dynamique du
phénomène (Lambinon, 1998). Au sein du « pool » de végétaux, dans nos plaines tempérées,
la plupart des plantes des milieux « naturels », considérées comme spontanées, sont en fait des
immigrées assez récentes. Les plus nombreuses sont chez nous depuis le réchauffement
climatique succédant au Tardiglaciaire, certaines étant peut-être issues d’un passé plus
lointain. L’homme n’a cessé ensuite d’intervenir sur ce cortège floristique depuis ses
premières activités agricoles au Néolithique jusqu’à nos jours. Selon l’ancienneté de
l’intervention humaine, on parle de "néophytes" dans le cas d’introductions récentes et
d’"archéophytes" dans le cas d’introductions anciennes. La dénomination se fait en fonction
de deux dates les plus communément admises dans la littérature (Lambinon, 1998 ;
Aboucaya, 1998) :
- L’an 1500 basé principalement sur le fait qu’à partir de ce moment, des plantes d’origine
américaine furent introduites en Europe, en raison du développement des voyages autour
du globe.
- La période du Néolithique, pendant laquelle l’Homme a commencé à emporter avec lui de
nouvelles espèces afin de les acclimater.
Les archéophytes et néophytes n’ont pas la même valeur patrimoniale. Une espèce est dite
indigène, autochtone ou native quand elle appartient à une communauté de plantes particulière
sensée être "originelle". Ce mot sous-entend que l’espèce concernée est locale, ancienne et
naturelle. Il suggère donc trois cadres d’étude : les limites spatiales et temporelles et
l’intervention anthropique.
W
Cette partie introductive et conceptuelle a démontré la forte imprégnation de l’évolution de
l’agriculture sur la dynamique de la biodiversité végétale, de par l’étendue des espaces
1
Espèce introduite Espèce qui a étendu son aire de répartition originelle vers un territoire, un habitat où elle
n’était pas présente auparavant (xénophyte, non-indigène, allogène, exotique) (Pénelon, 2002).
2
La naturalisation est réalisée lorsque l’espèce a la capacité de se reproduire de façon autonome dans le milieu
nouvellement colonisé, et ainsi d’équilibrer la balance entre immigration et extinction.
47
couverts et des interactions avec le milieu. Cette biodiversité dépend également des preneurs
de décisions qui gèrent l’utilisation des sols. La fonction principale des paysages ruraux n’est
plus seulement la production agricole, on assiste à une utilisation variée de ces espaces que ce
soit les loisirs, l’hébergement ou la production. Autant d’usages qui constituent des supports
différents pour la conservation de la biodiversité végétale.
L’ensemble des bases conceptuelles et bibliographiques que nous venons d’exposer nous
permettent maintenant d’aborder l’étude comparative et diachronique de la biodiversité
végétale dans les paysages d’agriculture intensive.
48
Chapitre 2
Le territoire d’étude : le Lauragais haut-
garonnais, Pays d’agriculture intensive
49
Ce chapitre présente le Lauragais haut-garonnais, territoire pris comme exemple des
paysages d’agriculture intensive, en France ainsi que les sites retenus comme représentatifs de
ce territoire. Dans un premier temps, nous définirons les limites et les caractéristiques qui
façonnent l’identité du territoire d’étude. Puis, nous présenterons la démarche qui a permis de
choisir les sites d’étude. Enfin, nous envisagerons une restitution historique de l’agriculture
lauragaise.
Selon l’objectif de départ qui est de mettre en évidence l’incidence des activités humaines sur
la biodiversité végétale dans les paysages d’agriculture intensive, il convient d’écarter les
facteurs d’ordre naturel dans les analyses que nous souhaitons mener. De ce fait, le choix du
territoire d’étude s’appuie sur deux conditions : avoir un substrat géologique et un climat
global similaires afin d’avoir des conditions édaphiques et hydrologiques identiques. Le
Lauragais haut-garonnais (Sud-ouest de la France) se présente comme une zone d’étude
appropriée dans le sens où ce Pays1 regroupe des conditions de milieu globalement
homogènes et où l’activité agricole, depuis toujours pivot de l’économie, constitue l’exemple
d’une agriculture de pointe, modernisée, aux rendements élevés.
Photo 2.
Paysage lauragais, Nailloux (Schwal)
I-
Limites du Lauragais haut-garonnais
Selon le point de vue envisagé, historique (Alphonse de Poitiers), géographique (Enjalbert,
1960 ; Brunet, 1965 ; Courjault-Rade et al., 2001) ou administratif (Jorré, 1971), les limites
du Lauragais fluctuent (Odol, 1999a). Même si ce territoire a forgé son identité et ses limites
au cours d’événements historiques, une conception géographique permet de délimiter le
Lauragais qui désigne les terres labourées à l’est de Toulouse et se caractérise par une
morpho-pédologie particulière (Tricart et Kilian, 1979) (cf. Figure 3). Divisé, selon les
1
La dénomination de Pays Lauragais peut s’appliquer selon les termes de la loi de Février 1995, relative à
l’Aménagement du territoire.
50
découpages administratifs, entre deux régions (Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon) et
quatre départements (Haute-Garonne, Aude, Tarn, Ariège), le Lauragais s’illustre comme
étant le “ Pays des coteaux molassiques “ où le trait dominant est son unité physique (Rey,
1976 ; Dupias et Rey, 1985). Le substrat géologique est en effet caractérisé par des terrains
molassiques dont la partie supérieure argilo-calcaire est horizontalement stratifiée. Cette roche
mère a été mise en place au Tertiaire par usure pyrénéenne de matériaux peu résistants
(argiles, marnes, sables, calcaires), déblayés au Quaternaire par l’érosion fluviatile dans la
plaine (phénomène de solifluxion) (Leymerie, 1861 ; Jacquemay, 1989 ; Dubucq, 1989 ;
Vidal de la Blache, 1994). Toutefois, les variations locales du substrat géologique entraînent
la formation de modelés différents (cf. Figure 3). Le Lauragais que nous prenons en compte
dans notre étude est celui appartenant au Département de la Haute-Garonne, caractérisé par un
paysage de coteaux peu à moyennement accidentés, où la molasse plus ou moins homogène
est d’âge oligocène.
Figure 3.
Carte géologique simplifiée de la région toulousaine. Source, Brunet, 1965
Le Lauragais haut-garonnais comprend plus de 150 communes (cf. Annexe 1), réparties sur
12 cantons (Montastruc, Verfeil, Toulouse centre et sud, Lavaur, Cuq-Toulza, Puylaurens,
Caraman, Lanta, Montgiscard, Nailloux, Villefranche de Lauragais) (cf. Figure 4). Il s’oppose
aux régions avoisinantes par l’unité de ses paysages. La vallée de l’Ariège en constitue la
limite méridionale ouest (environs de Cintegabelle, Auterive, Venerque) jusqu’au confluent
51
de l’Hers vif dont la vallée sépare la plaine de Pamiers sur sa rive gauche. Après avoir longé
la vallée du Fresquel, le canton de Cuq-Tolsa qui se situe sur un plateau calcaire constitue la
limite orientale sud (Plande, 1935 ; Goron, 1937). Le Lauragais haut-garonnais se distingue
au sud est, des collines de la Piège qui font partie des coteaux calcaires sous-pyrénéens, où les
paysages de grandes cultures sont enrichis par le maintien de l’élevage et de petits massifs
boisés, avec le Volvestre sur la rive gauche qui repose sur une molasse holocène mélangée à
des poudingues. À l’Est, les contreforts de la Montagne Noire entourés de plaines, d’altitude
moyenne comprise entre 600 et 1200m (Odol, 1999b), marquent une limite nette avec les
coteaux du Lauragais haut-garonnais (Faucher, 1933 ; Collectif, 1985). Le pays des collines
de Caraman se termine sur une succession de côtes calcaires. Au nord, les plateaux du BasAlbigeois qui pourraient être assimilés à notre région par leurs sols, le climat et leurs paysages
agricoles, sont en fait une limite de par des bancs calcaires en surface qui introduisent un
élément résistant dans le relief de l’Albigeois (Jorré, 1971). La vallée de l’Agout définit la
limite septentrionale est. La limite septentrionale ouest est constituée par une zone de plateaux
continus sur la rive droite de la vallée du Girou, après avoir descendu la vallée de l’Agout
jusqu’au confluent Girou / Hers mort. L’Hers mort constitue une bordure jusqu’au confluent
avec l’Ariège. À l’ouest, le fossé garonnais marque la limite où le sol de la vallée de la
Garonne est constitué d’alluvions argilo-siliceux. Le paysage de polyculture fruitière et
maraîchère contraste avec celui du Lauragais haut-garonnais. Finalement, le Lauragais hautgaronnais se compose de deux unités paysagères :
- Les coteaux de Caraman qui présentent une forte raideur de pente et des vallées étroites,
- Les coteaux de Nailloux qui présentent une plus faible raideur de pente et des vallées plus
larges (Zamithe, 1998).
52
Figure 4.
Limites du Lauragais haut-garonnais, fond tiré de la carte topographique au 1/50 000e
II -
Identité paysagère du Lauragais haut-garonnais
L’identité du paysage rural lauragais se définit par la combinaison de plusieurs variables : le
milieu naturel (relief, eau, climat, sol, végétation), les systèmes agricoles qui dépendent
grandement du milieu physique, les héritages historiques, chaque génération ayant modifié
l’espace rural par son travail et ses initiatives, et le jeu des acteurs contemporains,
économiques et sociaux (Diry, 1991).
1-
Géomorphologie
Les formes du relief sont en rapport étroit avec la nature du sous-sol (Taillefer, 1943 ; Lizet et
De Ravignan, 1987). La formation molassique sujette à des phénomènes d’érosion (Hormiere,
1992) a conduit à un relief de coteaux entrecoupés de petites vallées et de profonds vallons
53
(Gonin, 1997). L’altimétrie est comprise entre 120 et 350 m avec une altitude moyenne
d’environ 200 m (Collectif, 1995). Une dissymétrie nette apparaît souvent : les versants
exposés au nord ou au nord-est sont réguliers et en pente faible (< 12%) alors que les versants
exposés au sud ou à l’ouest sont en pente raide (Guilaine, 1991).
2-
Hydrographie
Zone de partage des eaux (seuil de Naurouze), le Lauragais haut-garonnais présente un
pendage sud-est / nord-ouest et les cours d’eau principaux suivent globalement cette
orientation (Aramendy, 1995). La molasse peu perméable et tendre a pu être incisée par un
réseau hydrographique très dense (Faucher, 1930 ; Brunet et Jalabert, 1974) mais souvent non
pérenne (Collectif, 1995). La plupart des ruisseaux ont été canalisés dès le règne de Catherine
de Médicis, comtesse du Lauragais au XVIe siècle (Odol, 2000). Des lacs collinaires
artificiels et généralement récents sont présents un peu partout.
3-
Grands traits du climat
Le Lauragais haut-garonnais s’identifie comme une région de transition climatique où
s’affrontent les influences océaniques et méditerranéennes (Escargueil, 1933). La tendance
atlantique s’illustre par un printemps plus pluvieux que l’automne et par la dominance des
vents d’ouest. Il n’existe pas de période de sécheresse à proprement parler (illustré en général
par P=2T) mais un déficit hydrique existe (illustré par P=3T en hachuré sur la Figure 5),
accentué par une évapotranspiration intense. Le Lauragais haut-garonnais est le pays des
vents, d’ouest (Cers) régulièrement répartis sur l’année qui emmènent l’essentiel des pluies et
d’est (Autan) surtout durant la période de chaleur estivale qui apportent des averses (cf.
Figure 6). L’Autan est une véritable signature climatique du Lauragais haut-garonnais,
responsable de l’assèchement très rapide et sévère des terres, d’échaudage, etc. (Odol, 1999c).
Figure 5. Diagramme ombro-thermique, P = 3T, commune de Ségreville (canton de Caraman),
moyenne sur 25 années. D’après (Dubucq, 1989)
54
Figure 6.
4-
La rose des vents, station de Toulouse-Blagnac
Pédologie
Les principaux types de sol rencontrés dans le Lauragais haut-garonnais sont des sols bruns
calciques et calcaires, difficiles à travailler surtout avant la modernisation de l’agriculture,
mais robustes et fertiles, particulièrement favorables à la culture du blé (Eude, 1933). Ces
caractéristiques structurelles du Lauragais haut-garonnais expliquent sa qualification séculaire
de "Terrefort"1. Les couches qui se superposent sont peu perméables aux eaux pluviales qui
restent en surface. La grande variabilité des pentes explique la distribution des sols selon une
complexe mosaïque qui s’ordonne en toposéquences le long des versants (Hubschman, 1974 ;
Dubucq, 1989). Sur les versants longs à pente modérée, les sols sont assez profonds, riches,
argileux. Le creux des vallons présente des sols colluviaux, riches en limons, très profonds.
Les versants courts à pente raide présentent des sols peu épais, peu évolués et calcaires,
argilo-limoneux. Les replats sont formés de sols bruns lessivés très évolués, limoneux à
argileux (Guilaine, 1991). La fertilité décroît avec la position topographique : maximale au
bas de la pente et minimale au sommet.
5-
Végétation
Comme dans tout le Pays aquitain (Rey, 1960), trois types de séries de végétation caractérisée
chacune par une espèce forestière dominante2 sont potentiellement présents :
- la série subméditerranéenne dominée par le chêne pubescent dans notre région
d’étude, qui se développe sur molasse en situation chaude et sèche,
- la série à affinité atlantique dominée par le chêne pédonculé en situation chaude et
humide,
- la série à affinité médio-européenne dominée par le chêne rouvre et le charme sur
des sols humides drainés peu acides, le frêne sur des sol humides ou mouillés et
l’aulne dans les ripisylves.
1
Terrefort Terre cultivée des coteaux du sud-est aquitain, dérivée d’un sol forestier brun légèrement lessivé au
Mésolithique et dont la roche mère est un semi-éluvium des formations superficielles, plus ou moins remaniées,
de la molasse (Enjalbert, 1960).
2
Une espèce est qualifiée de dominante par l’action qu’elle exerce sur l’habitat en créant pour ainsi dire la
station.
55
Dans ce paysage entièrement artificialisé, la végétation naturelle est assez restreinte, limitée à
quelques espaces boisés exploités en taillis, des pelouses sur coteaux à pente forte et de rares
prairies de fauche en fond de vallon. Les haies anciennes se raréfient, mais des plantations
récentes pallient cette régression. Ces replantations dont le rôle écologique est largement
démontré, peuvent être sujettes à critique puisqu’elles sont souvent constituées de plantes
horticoles dotées certes d’un effet esthétique mais qui ne sont souvent pas adaptées à la région
et qui peuvent présenter des risques d’invasion (exemple du Buddleja). Les ripisylves
représentées par l’aulnaie sont très dégradées voire inexistantes. Avant la dominance des
cultures sur les collines, les bois composaient l’essentiel du paysage (Enjalbert, 1960).
Aujourd’hui, appartenant totalement à la propriété privée (Collectif, 1992 ; Anonyme, 1999),
ils sont essentiellement maintenus sur les hauteurs, près des fonds de vallon et sur les versants
nord, c’est-à-dire sur les sols aux potentialités agricoles les plus faibles (Aramendy et al.,
2000). Nous avons donc affaire à une mosaïque complexe où les facteurs édaphotopographiques sont mis en jeu, créant une diversité écologique importante.
6-
Économie
L’activité économique du Lauragais haut-garonnais a toujours été marquée par une agriculture
riche, symbolisée par l’image du Pays de Cocagne, où poussent des plantes à haut rendement
(les blés de tout temps et le tournesol aujourd’hui) dont certaines ont fait jadis la fortune du
pays (pastel). La grande parcelle céréalière domine. Le rapport SAU / ST est d’environ 75%.
Les grandes cultures représentent 89% de la SAU et les cultures spécialisées 1% (Collectif,
1995). Les cultures qui ne sont pas irriguées alternent en blé comme culture d’hiver, sorgho
(ou colza) et tournesol comme culture d’été (Collectif, 1992). La distribution des sols
agricoles reflète celle du relief. Les vignes autrefois très présentes ont quasiment disparu. Le
paysage rural lauragais a été modelé par des générations de paysans. Mais même si l’activité
agricole domine, ce monde rural ne saurait se confondre avec l’agriculture. Bien d’autres
activités y sont installées (zones de loisir, maisons de retraite, centres équestres, …) (Dot,
1983 ; Diry, 1991).
7-
Population
Sur le plan démographique, le Lauragais haut-garonnais est resté une région fortement
peuplée jusqu’à la guerre de 1914-18. Il faudra attendre les années 1960-1970 pour qu’elle
connaisse à nouveau un formidable essor sous l’influence de la métropole régionale
toulousaine (Odol, 1999a). L’habitat est mixte, caractérisé par des villages-rues perchés en
situation de belvédère et des exploitations agricoles isolées, dispersées dans le paysage
(bordes céréalières). Les châteaux, maisons de maître et les moulins sont les témoins d’une
économie révolue. Le Lauragais haut-garonnais est marqué par sa vocation d’axe de
communication Océan / Méditerranée (route, autoroute, voie ferrée, canal du Midi) (Pinel,
1989). Les routes de crête sont les chemins privilégiés pour se repérer dans l’espace. Les
églises sont d’époque gothique, caractérisées par un clocher mur (Collectif, 1980). Depuis
quelques années, le bâti fait l’objet de constructions modernes, regroupées en lotissement.
56
III -
Les sites d’étude, représentatifs du Lauragais hautgaronnais
Dans le but de mettre en évidence les facteurs locaux, actuels et passés (organisation spatiale,
diversité des formations à végétation spontanée), qui influencent la distribution de la
végétation, une analyse ‘multi-sites’ s’impose. Les sites sont choisis de manière à présenter un
degré de pression anthropique différent et à traduire une organisation spatiale différente tant
au point de vue du parcellaire agricole qu’au point de vue de la diversité des zones à
végétation spontanée. Ils ont été choisis parmi la liste des communes appartenant aux coteaux
du Lauragais haut-garonnais pour leur représentativité ou parce qu’ils présentent un paysage
original (148 communes, cf. Annexe 1). Ce choix a dépendu également de la disponibilité de
données (archives cadastrales, photographiques, recensements agricoles, monographies
communales anciennes, études floristiques anciennes, données historiques sur le monde rural,
…) que nous avons recensées dans les différentes administrations (Archives départementales
et communales, Centre culturel du Lauragais, Service du cadastre, DDAF) et à partir de la
lecture du paysage sur le terrain. Les communes situées sur une zone de plaine importante ou
près d’un axe routier majeur ont été exclues de la liste initiale. Les sites sont choisis selon un
plan d’échantillonnage qui prend en compte des critères illustrant le caractère rural du
Lauragais haut-garonnais (superficie communale modeste, nombre d’habitats limité,
parcellaire agricole étendu, dispersion des formations végétales).
Deux sites sont retenus, les communes de Nailloux et de Préserville (cf. Figure 4), pour la
typicité du paysage représenté et pour les aspects contrastés que l’on peut observer entre eux
(champs de plus grande étendue, bois plus fragmentés, présence de vignes pour le premier
site). Le choix du premier site d’étude est privilégié par la présence d’un inventaire floristique
datant de 1885 qui va constituer le document de base de l’analyse de la flore et de ses
changements dans le chapitre 4 (cf. p.129 pour plus de précision). Le second site d’étude est
choisi parmi la liste des communes hors des coteaux auxquels le premier site d’étude
appartient. Les sites représentent des petites unités paysagères distinctes appartenant au
Lauragais haut-garonnais (cf. Tableau 2).
Nailloux
250
Préserville
230
1870
1028
110
1230
297
86
42
(86 exploitations en 1956)
21
chevaux 15, bovins 437, vaches laitières
135, ovins 52, porcins 200
-
Altitude, m
Surface totale, ha
Population en 1998, hab.
Superficie forêt en 1988, ha
Nb exploitants agricoles
en 1988
Cheptel en 1956
Tableau 2.
1-
Caractérisations des deux sites, source : RGA
Le site de Nailloux
Ce site, chef-lieu de canton, est représenté par des surfaces agricoles très étendues et des
formations à végétation spontanée (bois, pelouses) très fragmentées, c’est-à-dire dispersées au
sein du paysage et de petites tailles. Le relief partagé entre les coteaux et les plaines (vallée de
la Hyse) est assez accentué avec de fortes pentes. D’un point de vue historique, la commune
57
de Nailloux est un ancien domaine fondé par un riche propriétaire en 1318 (Odol, 1998a). Elle
appartint au prieuré de Saint-Étienne de Toulouse au XIe siècle.
2-
Le site de Préserville
La commune appartient à la microrégion agricole du Lantarès (canton de Lanta) (Odol,
1998b), les paysages sont caractérisés par des collines qui s’étirent en longues lanières
orientées d’est en ouest comme les principales rivières. Cette commune présente des parcelles
agricoles moins étendues avec un relief plus modeste partagé entre les coteaux et les plaines
(vallée de la Marcaissonne), une vaste zone de pelouses et pelouses boisées, des bois peu
fragmentés, un bocage ancien important et un néobocage.
IV -
Éléments pour une histoire de l’agriculture
lauragaise
Cette restitution rapide a pour but de donner les grandes lignes de l’histoire agraire du
Lauragais, surtout sur les trois derniers siècles, afin de comprendre l’état actuel du paysage et
d’interpréter l’organisation spatiale de la végétation.
La région agricole du Lauragais (Louault, 1982), dont le nom n’apparaît dans l’histoire qu’au
XIe siècle (Ramière de Fourtanier, 1941), constitue un bassin de production où les
agriculteurs ont tendance à adopter des pratiques identiques sous l’effet du milieu naturel, des
héritages historiques, des structures agraires et de multiples variables économiques. Ces
particularités définissent le ‘Pays Lauragais’ (Zégierman, 1999). Le blé d’origine procheorientale, (Cauderon et al., 1993), y a toujours été la céréale par excellence, adaptée à un sol
argilo-calcaire riche et au climat local humide au printemps et sec en été (Eude, 1933).
L’identité de cet ensemble de terroirs1 homogènes (Severac, 1960), a été façonné par des
modes d’exploitation diversifiés, perpétués pendant des siècles et adaptés aux contraintes
naturelles.
1-
Du Néolithique au Moyen-Âge : les grands traits de la mise en place
des paysages agraires
Bien que le Lauragais soit probablement une grande région agricole depuis les premiers temps
de l’agriculture, on connaît encore peu de choses sur la mise en place des paysages à partir du
Néolithique. La plupart des sites archéologiques connus dans la région toulousaine pour la
période allant du Néolithique à l’Antiquité sont localisés dans les vallées de la Garonne, de
l’Hers-Mort et du Tarn, où les conditions de sédimentation les ont laissés en surface. Il
semble que dans les collines du Lauragais haut-garonnais, la plupart des vestiges anciens
soient enfouis sous les colluvionnements provoqués par la longue érosion des sols de
mollasse, ce qui rend leur découverte aléatoire ; par ailleurs, aucune étude paléo1
Terroir Surface où dans des conditions de relief, de sol et de climat présentant une homogénéité suffisante,
s’inscrit actuellement une activité agricole spécifique (Deffontaines, 1973).
58
environnementale approfondie n’a encore été menée dans cette zone. Il y a donc un véritable
trou noir dans la connaissance des premiers temps de l’anthropisation des milieux du
Lauragais haut-garonnais, alors qu’on sait que dans le pourtour méditerranéen comme dans le
nord de la France, la création des paysages agraires s’opère en deux grandes vagues, au
Néolithique (dès le milieu du VIe millénaire av. J.C sur le littoral languedocien) puis à l’Âge
du Bronze (Guilaine, 1991 ; Vaquer in Pailler, 2001) (cf. Figure 7).
Figure 7. Histoire des forêts françaises (13000 BP-1991). Source, Biodiversity in France,
Ministère de l’Environnement, 2000
Les recherches archéologiques récentes dans la région toulousaine (in Pailler, 2001)
permettent cependant d’extrapoler les grandes lignes de la mise en place des paysages
agricoles dans le Lauragais :
- La plupart des sites néolithiques de la région toulousaine appartiennent au
Néolithique moyen (4300-3500 av. J.C.) ; ils montrent déjà un peuplement dense par endroits,
et probablement une diffusion dans l’ensemble de la région, d’autant plus que la vallée de
l’Hers constitue dès cette époque un axe majeur de communication entre l’Aquitaine et la
Méditerranée. On peut en déduire qu’une agriculture d’essartage commence à transformer les
forêts, ce qui s’est certainement accéléré à la fin du Néolithique avec l’apparition des araires
tractées par la force animale.
- A partir du Bronze et de l’âge du Fer, on trouve des sites d’habitat dans les collines,
ceux des coteaux de Pech-David étant les plus connus (Le Cluzel, Vieille-Toulouse). Des silos
y ont été découverts, contenant des céréales (blé amidonnier et épeautre, orge) et des vesces,
mais aussi des glands, ce qui montre une utilisation des ressources forestières du milieu.
L’élevage était centré sur le bœuf, le mouton et le porc, avec une part encore importante de la
59
chasse dans l’alimentation : cerfs et sangliers vivant dans les chênaies. L’absence de petit
gibier semblerait indiquer un environnement encore très forestier.
- A la fin de l’Âge du Fer, le territoire de Tolosa, capitale des Volques Tectosages,
englobe complètement le Lauragais. Des indices de grande production céréalière sont
discernables dès cette époque vers Castelnaudary : production intensive de jarres de stockage,
traces de nombreuses fermes datant du IIe-Ier siècle avant J.C.
- Après le rattachement à la Province romaine, la cité devient une grande ville à partir
du Ier siècle après J.C. Diverses cadastrations ont été identifiées sur le territoire de la cité,
englobant le Lauragais, qui devait être donc une région agricole organisée. La vallée de l’Hers
devint un des principaux axes de communication de l’Empire et une plaine d’exploitation
intensive, mais les collines devaient être également défrichées, avec un paysage probable de
cultures céréalières en jachère biennale sur les sols argilo-calcaires et de forêts sur les versants
humides et les sols lourds. C’est aussi de cette époque que date l’apparition locale de la vigne.
Là où des prospections ont été menées, on a mis en évidence l’existence d’un habitat dispersé
au Ier siècle, occupant pratiquement tous les vallons du terrefort, avec de grandes villæ dans
les plaines. Le bétail abondant (bœuf, porc et mouton) retrouvé dans les sites montre aussi que
des étendues importantes de pâturages devaient exister, qu’il s’agisse de prairies dans les
vallées humides ou d’une utilisation des forêts. Nous pouvons donc considérer que les
éléments du paysage agraire du Lauragais étaient déjà pour une large part en place dès
l’Antiquité (Sillières in Pailler, 2001).
2-
De la fin de l’Antiquité à la fin du Moyen-Âge : continuités et
restructurations du paysage rural
Comme partout, il y a dans la région toulousaine disjonction dans les formes d’occupation de
l’espace entre l’Antiquité et le Moyen-Âge. Après la crise de la fin de l’Antiquité et du haut
Moyen-Âge (invasions, guerres et pestes), le tissu des villages médiévaux se réorganise en
fonction des bourgs ecclésiaux et castraux. Au Xe siècle, le régime de la propriété se
transforme et la caste seigneuriale agrandit ses domaines au détriment des petits tenanciers
(Armengaud, 1979). L’étude de Roblin (1937) indique que dès le Xe siècle, la féodalité
religieuse est puissante dans la région toulousaine. Aux Xe, XIe, XIIe siècles, les terrains sont
occupés par les abbayes, sur de bonnes terres mais mal cultivées et souvent en friches ;
l’habitat se concentre. Au XIIe siècle, la croissance économique et démographique, et les
conflits d’influence entre les grands seigneurs se traduisent par la multiplication des bastides,
dont plusieurs sont établies dans le terrefort ou dans les plaines proches, ce dont témoigne la
toponymie. Aux alentours de 1200, on parle de l’Archidiaconé du Lauragais. En 1317, le
Lauragais devient un évêché puis un comté en 1477 sous Louis XI et une sénéchaussée à
partir de 1554 (Odol, 1999a).
Durant toute cette période, les formes de l’exploitation agraire semblent être peu différentes
de celles de l’Antiquité : céréaliculture en jachère biennale, prairies dans les vallées humides
pour le bétail, forêts à exploitation sylvo-pastorale. Les productions se diversifient encore
peu : seigle, méteil, fèves et pois ne concurrencent guère la culture hégémonique du blé. La
vigne est peu développée, faute de moyens de transport sauf sur les terrasses de la Garonne.
Mais la croissance démographique se traduit par une diffusion de l’habitat et ainsi que par des
défrichements, un morcellement des boisements et une pression accrue sur les taillis. C’est à
cette époque que le hêtre semble avoir disparu de la région : les nombreux toponymes en
lafage, fajac laissent penser à une persistance tardive de stations de cette essence dans le
terrefort, ce qui a été confirmé par des découvertes anthracologiques à Castelnaudary
60
(Durand, 1991). Il est probable que le bocage se met en place également à ce moment, pour
contrebalancer la raréfaction des boisements.
3-
De la fin du XVe au XVIIe siècle, l’âge d’or du pastel
À partir de la fin du XVe siècle, de grands changements vont s’opérer dans l’agriculture
lauragaise, avec le développement du pastel, culture spéculative pouvant apporter de grands
revenus : c’est alors la seule teinture bleue de bonne qualité qui soit connue et elle est
commercialisée sur les marchés d’Anvers et de Londres. Le pastel, plante bisannuelle aimant
les sols secs et des printemps pas trop pluvieux, est particulièrement bien adapté au terrefort,
qui va devenir le cœur de la production dans la région. Le Lauragais haut-garonnais devient
alors le « pays de Cocagne »1 (Batigne, 2000), des moulins pasteliers (cf. Photo 3) sont
construits et une grande part de l’activité locale va tourner autour de cette plante. De grands
bouleversements sociaux et économiques vont en découler. Notaires et marchands achètent
des terres à la campagne, constituant de grands domaines, amenant de nouvelles méthodes
d’exploitation (Roblin, 1937). Le mode d’exploitation est basé sur le faire-valoir indirect : le
propriétaire n’assure pas l’exploitation de la terre qu’il possède (Diry, 1991) mais la confie à
un tiers qui est soit un métayer, soit un fermier. Dans le cas du métayage, le propriétaire
apporte le capital (terre, bâtiment, cheptel, matériel) et le métayer fournit son travail. Dans le
cas du fermage, le propriétaire loue la terre et perçoit un loyer annuel. D’énormes fortunes
vont se constituer à Toulouse grâce au pastel, ce qui va transformer l’apparence de la ville
mais aussi des villages du Lauragais où se répand une certaine prospérité. Durant cette
période, on cultivera aussi le safran et de nombreux mûriers pour la production de la soie
(Odol, 1998b).
Mais la concurrence de l’Indigo va mettre un terme à cette expansion dès les années 1560.
C’est tout d’abord l’Indigo des Indes orientales qui arrive sur le marché, par la route du Cap ;
puis, à partir du XVIIe siècle, c’est l’Indigo des Indes occidentales et de Virginie qui envahit
les marchés européens et achève la crise du pastel toulousain. La culture du pastel se réduit
jusqu’à disparaître vers le milieu du XVIIIe siècle (Collomb, 1984). Par ailleurs, les guerres
de religion vont dévaster le pays à la même période, approfondissant la crise de la fin du
XVIe siècle.
Au XVIIe siècle, le paysage lauragais est dominé à nouveau par les cultures céréalières ; au
blé s’est ajouté le maïs (introduit à la deuxième moitié du XVIe siècle) qui constitue la base
de l’alimentation populaire sous forme de bouillie (le millas). De minces rubans de prairies
longent les cours d’eau. La pression s’accentue sur les taillis, situés principalement sur les
pentes les plus raides, qui sont pacagés toute l’année et peuvent être coupés tous les cinq ans
(Henry, 1943), ce qui peut donner une idée de leur physionomie. Le bocage de haies basses et
de chênes émondés devient indispensable à l’économie paysanne.
1
Le terme « cocagne » désignait la boule de feuilles de pastel écrasées et séchées pour la conservation et le
transport.
61
Photo 3. Borde, bœuf, moulin à vent et dépiquage à la charrue, dans le Lauragais
haut-garonnais entre le XVIIe et le XIXe siècle (Archives départementales de la HauteGaronne)
4-
Du XVIIIe siècle au début du XXe siècle, la diversification des
cultures et les progrès des méthodes
A la fin du XVIIe et surtout au XVIIIe siècle, le pays est déboisé, pour être intensément
cultivé. Des espèces étrangères ont été introduites, d’autres sont arrivées clandestinement. Les
formes traditionnelles d’agriculture ont pesé sur une grande partie de la biodiversité existant
dans ce paysage et ont, dans une certaine mesure, préservé cette dernière (Baldock et al.,
1993).
Le pays s’enrichit aux XVIIIe et XIXe siècles, grâce à la vente du blé transporté par le canal
du Midi. La culture du maïs, dont le Lauragais devient la terre d’élection, progresse au XIXe
siècle. Tout au long du XVIIIe et du XIXe siècle, les plantations se multiplient dans les
domaines, le long des routes, chemins, haies et ruisseaux mais aussi dans les prairies et
pacages : arbrisseaux (sureau, laurier, noisetier, aubépine, lilas), arbustes (pommiers nains,
vigne, groseilliers, chèvrefeuille, bruyères, genêt sauvage, romarin), arbres à haute tige
(ormes, charmes, platanes, trembles, chênes, frênes, aulnes, peupliers, acacias, tilleuls,
marronniers), fruitiers (mûriers, sorbiers, cerisiers, merisiers, guigniers, noyers, figuiers,
poiriers). Les arbres fruitiers à tige haute sont plantés dans les vignes et les jardins. Les arbres
sont élagués en têtard. Ils constituent un excellent chauffage du four et un fourrage d’appoint
62
pour le bétail (frêne, orme, acacia) (Vacher, 1908). Les haies jouent le rôle de clôture la plus
ordinaire des petites propriétés rurales, sèches ou vives1. La hauteur de haie est réglementée.
Il faut étêter au-dessus de la hauteur normale (2m au maximum). Des haies d’acacia
commencent à être introduites. Les haies sont taillées à la hauteur de 1m à 1,5m. Les haies qui
servent de clôture sont émondées plus souvent.
4. 1 -
Le XVIIIe siècle, des systèmes agricoles traditionnels
L’économie rurale du XVIIIe siècle est fondée sur la polyculture, le morcellement libre et
l’assolement biennal (Faucher, 1934). Une multitude d’achats et de ventes, et de partages lors
des successions entraînent un morcellement des propriétés, avec des parcelles de dimension
réduite et éloignées les unes des autres. Ce morcellement du parcellaire est accentué par les
nécessités de la polyculture, qui demande d’exploiter au mieux les multiples potentialités du
terroir. Le métayage représente le mode d’exploitation dominant (Fons et Fons, 1910). Les
métairies ont une étendue moyenne de 12 à 25 ha, qui est composée d’un vingtième de prairie
naturelle, autant de vigne, de bois taillis soumis à des coupes régulières, le reste est livré à la
culture des céréales, avec prairies artificielles, pomme de terre et légume (Lacaux, 1880). Le
métayer a l’obligation de cultiver en bon père de famille2. On cultive le blé, seigle, sarrasin,
maïs, fève, vesce, haricot, pomme de terre, pois, chanvre, lin. On élève des bêtes à corne, à
laine, juments, ainsi que des chèvres, cochons, truies, oies, canards, dindons, chapons, poules.
Dans les prairies artificielles, on cultive la grande luzernière, le sainfoin, le trèfle, l’esparcette.
À la fin XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle, l’augmentation de la population contraint
les propriétaires à défricher pour la mise en culture, des espaces incultes (bruyères, ‘landes’),
en fonction de la qualité des terres (Chauvet, 1935). Les pentes où le sol est graveleux et
médiocre, restent boisées. Les ‘landes’ et bois sont remplacés par les blés et surtout la vigne.
Mais cette transformation compromet la nourriture du bétail. En 1786, le défrichement est
soumis à des règles, le reboisement est encouragé. Le pâturage est pratiqué en forêt. Le taillis
simple ordinaire est coupé à blanc étoc ou avec réserve de baliveaux disséminés dans toute la
superficie du bois (25 à 30/ha), à la hache. La révolution3 est de 10 à 15 ans, avec des éclaircis
du taillis vers 5 ans. Les bruyères, genêts, épines, arbustes présents dans les coupes sont
nettoyés pour le chauffage. Dans le sous-bois, on coupe les brins de noisetier, épines et bois
blancs ou autres arbrisseaux et on élague les branches des arbres. Les taillis composés
représentent 76% des taillis particuliers, ils sont soumis aux même révolutions que les taillis
simples. Dans les fonds frais, les bois sont coupés tous les 18 à 20 ans. Dans les fonds
médiocres, tous les 14-15 ans, dans les mauvais fonds, à 10 ans (Fons et Fons, 1910). Les
oseraies, brins de bouleau, têtes de saules, émondages de peupliers, ormes, ormeaux, aulnes,
chênes, noisetiers, qui bordent les terres labourables, les prés ou les vignes, sont tondus tous
les 3-4 ans.
1
Les haies vives sont formées d’arbustes vivants - épine vinette, ajonc marin, aubépine et autres arbustes.
L’épine noire est non plantée, considérée comme envahissante, sa destruction est ordonnée. Les haies sèches ou
mortes se font avec des branches d’arbres de ronces et d’épines desséchées, liées ensemble et qu’on renouvelle
tous les ans.
2
Le métayer doit tailler les haies vives, refaire les haies sèches, entretenir les fossés, répandre les fumiers,
sarcler les blés, façonner les vignes du domaine, faucher les prairies et les faire pâturer aux époques d’usage,
faire l’émondage des saules et peupliers, des orées des bois et des bords de champs et des haies (bois de
chauffage). Le métayer coupe les brandes et les bruyères pour la cuisson du pain. Il peut profiter pendant l’hiver
pour son chauffage de la tonte des haies, du bois mort et du mort-bois.
3
Révolution Nombre d’années au bout duquel on reviendra exploiter sur le même point (Nesmy, 1947).
Actuellement, pour un peuplement constitué par des bois durs comme les chênes, frênes, charmes, la durée de la
révolution est portée à 25 ou 30 ans.
63
4. 2 -
Au XIXe siècle, les mutations des systèmes agricoles traditionnels
Durant la première moitié du XIXe siècle, se développe l’exploitation par maître-valet1, ou
bordiers. Elle consiste à prendre une famille payée à gages fixes. Des ouvriers auxiliaires
(brassiers, estivandiers2, estachants, bergers) peuvent être ajoutés aux travaux de culture, mais
le nombre de ces employés tend à diminuer par l’emploi de machines à dépiquer.
L’assolement biennal encore en place favorise grandement la jachère (Théron de Montaugé,
1865), mais l’assolement triennal se met en place. Le domaine possède des juments, taureaux,
vaches, bêtes à laine. Une paire de bœufs est employée pour 20 arpents de terre3. On compte
par domaine 40-50 brebis (race du mouton Lauragais) qui obligent au maintien de la jachère
et de dépaissances pour les sorties. Il peut y avoir la présence de bergers. Les prairies
naturelles et artificielles sont pâturées par les bovins. Les ovins pâturent dans les chaumes et
les terrains incultes du domaine. La population rurale commence à diminuer : diminution de la
natalité dans les familles de bordiers et de maîtres-valets, exode des ouvriers ruraux vers la
ville qui offre de multiples emplois, évolution renforcée par la diffusion de machines qui
demandent de moins en moins de main d’œuvre (Fons et Fons, 1910).
Photo 4. Paysages du Lauragais au début du XXe siècle. Photographie des haies
interchamps, des travaux de champs, du paysage, des moutons. (Archives
départementales de la Haute-Garonne)
1
Les maître-valets sont autorisés à faire pousser du lin, des fèves, des pois et des pommes de terre. Ils ne
peuvent pas garder leurs bêtes dans les taillis âgés de sept ans. Ils peuvent prendre comme chauffage les
buissons, ronces et bois rampant qui se trouvaient dans les bords de champs. Ils ont à élaguer les arbres.
2
L’estivandier se tient à l’exploitation d’un sol à cultiver. Deux hommes et deux femmes sont employés par
paire de labourage. Ils doivent couper la moisson, la ramasser, la charger sur les charrettes.
3
Mesures : pour les cantons de Lanta et Nailloux : 1 arpent = 59 ares 274.
64
Au milieu du XIXe siècle, le système de maître-valet (en 1862, on compte encore 6289
exploitation dirigées par des maîtres-valets en Haute-Garonne, (Théron de Montaugé, 1868))
est progressivement remplacé par celui de fermage, surtout après 1850 et dans les grands
domaines1 (Diry, 1991). L’assolement triennal s’impose : blé, ou seigle – autre céréale (maïs,
avoine, millet) – jachère avec plantes nettoyantes des végétations étrangères (betterave (de
Bastoulh, 1863), pomme de terre, topinambour, haricot, pois), ou avec fourrages artificiels de
plantes améliorantes (grande luzerne au premier rang (Viguier, 1881) (cultivée depuis la
moitié du XVIIIe siècle (Clos, 1880a)), plus luzerne lupuline, esparcette ou sainfoin,
anthyllide vulnéraire (Anonyme, 1864), vesce commune, trèfle incarnat, trèfle des prés) (Clos,
1869 ; Faucher, 1950). La superficie moyenne des exploitations est de 25 ha (de Viguerie,
1867). Le maïs tient une place importante à cette époque dans le Lauragais (D'Aldéguier,
1909). Les champs sont clôturés par les pierres extraites des sols labourés (de Planet, 1861).
Les finages2 sont étendus par défrichement des ‘landes’ et des bois où l’on cultive le blé
bladette, variété résistante au vent d’autan (Heuzé, 1868), la vigne incitée par une
consommation croissante de vin (Théron de Montaugé, 1865 ; Chombard de Lauwe, 1948) et
le colza d’hiver. Les labours de déchaumages consistent à faire germer les graines des
mauvaises herbes tombées et à enfouir les herbes venues par un deuxième labour. Les labours,
fréquents, sont effectués à bras d’homme, à la charrue attelée de deux bœufs, ou à la charrue à
vapeur (de Comminges, 1894). Les terrains laissés en jachères (jachère soit pure non
entretenue, soit travaillée pour purger les sols des mauvaises herbes, ou cultivée comme les
légumineuses sarclées) sont progressivement supprimés, remplacés par des terres sarclées
(maïs) grâce au marnage et au chaulage, à l’emploi des engrais naturels ou artificiels, mais
aussi par des prairies artificielles, nécessaires pour nourrir les animaux de trait (D'Aguin,
1868), après un travail préparatoire où les mauvaises herbes et plantes adventices sont
enlevées par des labours profonds (Vianne, 1870). C’est une période de culture à outrance
(Martegoute, 1860 ; de Baiches, 1862 ; Théron de Montaugé, 1866). Les prairies naturelles
sur les bords des rivières sont semées pour éviter l’envahissement par les mauvaises herbes,
en graminées tel que le fromental, la flouve odorante, le vulpin, les pâturins, les fétuques,
accompagnées de légumineuses telles que les trèfles, le sainfoin, les luzernes, les gesses, et de
diverses plantes fourragères inféodées à ces milieux (achillée, pimprenelle, marguerite,
renoncules, carotte, etc. (Clos, 1864)). Les joncs et autres (Carex, scirpus, Juncus, Typha,
Iris), qui donnent du foin aigre, ou encore les rhinanthus, chardons, colchique et pissenlit, qui
sont toxiques pour le bétail, sont enlevés (Clos, 1878). Mais les ruisseaux canalisés privent les
prairies naturelles des crues annuelles, diminuant la fertilité du sol et donnant des rendements
faibles (Pratviel, 1869a). On élève des bestiaux de trait et de croît. De nouveaux fourrages
permettent un cheptel considérable à cette époque (sorgho, betteraves, maïs, choux barrus,
topinambours, vesce-avoine) (D'Ounous, 1859). Les prairies artificielles sont semées de
plantes annuelles ou bisannuelles - trèfles, luzerne, vesce, gesse, fèves, lupins, mélilot, avoine,
orge, chicorée, chou, consoude du Caucase, moutarde, pimprenelle (de Comminges, 1894).
Les bœufs gascons, race bovine généralisée en Lauragais (Théron de Montaugé, 1926), sont
employés car considérés comme les plus aptes à travailler les terres compactes du Lauragais,
mais ils sont mal soignés et se nourrissent souvent des rares herbages des jachères et des
chemins publics (Armaing, 1870). La litière est constituée d’épilobe hérissée (commune dans
les lieux humides), d’eupatoire à feuille de chanvre (abondante mais mangées uniquement par
1
Le fermier doit cultiver les terres labourables, vignes, prairies et bois, convertir en fumier les pailles des
récoltes, éclaircir les taillis tous les 3-4 ans, plus les coupes régulières, entretenir le sol des bois, arracher les
plantes parasites dont arbustes, entretenir les vignes labourées, déchaussées, terrées, binées, fumées, soufrées,
sulfatées, entretenir les haies de septembre à février, les rigoles d’arrosage, les fossés de clôture, les barrières et
clôtures en bois ou en fil de fer. Émonder les arbres tous les trois ans (saules, ormes, peupliers, chênes).
2
Finage Espace mis en valeur par une exploitation ou par les agriculteurs d’une commune (Diry, 1991).
65
les chèvres), de vergerolle du Canada (espèce commune (Clos, 1873)) et de consoude
tubéreuse et officinale (Clos, 1880b). Les coupes de taillis ont lieu dans la contrée tous les 12
à 15 ans. Le pacage des bestiaux dans les taillis ne peut se faire qu’après sept années de
repousse. Les moutons ne pacagent pas dans les bois. Des reboisements sont opérés sur des
terrains peu propices à la culture de céréales où les labours sont impraticables, dans les
expositions nord et sur les pentes raides, par semis de chêne pédonculé mais aussi d’acacias
qui poussent vite1 et "s’autoprotègent" des dents du bétail (Théron de Montaugé, 1866 ; de
Bastoulh, 1868).
Les machines agricoles qui accélèrent le travail et diminuent les risques de perte (Givelet,
1873) (égrenoir, ventilateurs, batteuses à vapeur, hydrauliques, à manège avec chevaux2 et
surtout bœufs, moissonneuses, faucheuses (de Planet, 1861 ; de Planet, 1863)) apparaissent
avec lenteur (Anonyme, 1858 ; Caze, 1861). Cette lenteur est due à l’absence de capitaux (la
grande propriété qui peut investir, diminue) et aux révolutions que leur introduction doit
entraîner dans les rapports des maîtres et des agents de culture. Le morcellement de la
propriété, les mauvais chemins, les champs de petite étendue, entourés de fossés complantés
d’arbres, les coteaux de forte pente constituent des obstacles au labourage à la vapeur (de
Planet, 1859). Vers 1890, la moissonneuse apparaît. Dans les années 1870, les villages se
vident de la classe artisanale et se consacrent uniquement à la culture (Marconis et Kayser,
1976). L’abaissement du prix des céréales, joint à la dépopulation des campagnes, à un taux
de natalité diminué et au renchérissement des salaires, tend à diminuer l’importance du
fermage (de Pons, 1870 ; de Carrière-Brimont, 1873) qui, au début du XXe siècle, s’applique
surtout aux domaines de 100 ha et plus. À la fin du XIXe siècle, la main d’œuvre manque
dans les campagnes, l’agriculture est peu avancée et la crise menace. D’abord, le phylloxéra
qui apparaît en 1883, est partout en 1885. Toutes les vignes dans le Lauragais haut-garonnais
sont détruites. Des cépages américains sont introduits (Loi du 8 mars 1898). De plus, les blés
et maïs sont concurrencés par ceux d’outre-mer (Enjalbert, 1947).
Cette crise agricole entraîne en 1907 un exode rural, dû au poids des impôts et au coût de la
main d’œuvre. Le manque de main d’œuvre entraîne une diminution des terres labourables
(13%), transformées en pâturages ou en jachères, optant pour un système de culture extensif,
non rentable dans les moyennes exploitations. La grande propriété diminue et le sol dans les
propriétés moyennes est encore plus divisé (de Montgaillard, 1910). Ce ‘morcellisme’
augmente le nombre des petits propriétaires et est perçu à cette époque comme bénéfique. Les
produits agricoles restent le blé, le maïs, l’avoine, les fèves et les fourrages. La production
chevaline est faible, alors que celle des volailles assure un revenu complémentaire.
Après la guerre de 1914, un très fort courant d’immigration, surtout italienne et espagnole
vers l’Aquitaine, va renouveler la population agricole et pallier la crise de la main d’œuvre.
La culture mécanique prend alors une importance considérable (Héron, 1916). Des matériels
lourds apparaissent pour les labours profonds (tracteurs à chenille lourds et charrues balance),
obligeant les petites et moyennes propriétés à se regrouper (Niel, 1916). Les vignes sont
arrachées et indemnisées.
5-
Au XXe siècle, la modernisation de l’agriculture lauragaise
Dans les années 1930, la population augmente à nouveau, grâce à une forte natalité et par
l’arrivée de familles de non-cultivateurs, encouragée par la révolution des transports et la
1
Sur la commune de Fourqueveaux, jouxtant celle de Préserville, des bois de chêne clairsemés sont repeuplés en
acacia depuis plus de 40 ans et coupés tous les 6 à 7 ans (Martegoute, 1868).
2
Apparition dans le Lauragais dans les années 1860 (Pratviel, 1869b).
66
diffusion de l’automobile dans les années 1930 (circulation hippomobile jusqu’à 1928 (SuretCanale, 1944)) qui facilite la pluriactivité des campagnes (artisanat, commerce, services
divers) (Diry, 1991). Au début du XXe siècle, le canton de Nailloux peut être pris comme
type dans le Terrefort, (Delaurelle, 1930) : 86% du sol sont mis en labour (blé pour un tiers,
maïs 37%, fourrages 23%). Le bétail est abondant mais le fourrage est insuffisant, les
moutons disparaissent, les bovins sont juste assez nombreux pour les travaux des champs. On
note la médiocrité de la production.
Avec la seconde Guerre Mondiale et la reconstruction qui l’a suivie, c’est l’expansion
industrielle et urbaine qui amplifie l’exode rural et rend la crise agraire irréversible. De
nouvelles techniques bouleversent les pratiques agricoles (Collomb, 1984 ; Brun et al., 1992) :
les outils à la main ont disparu, on assiste à la motorisation généralisée surtout à partir de
19531, à l’extension de nouveaux outils provenant des USA (disqueuse, rouleau,
moissonneuse-batteuse), l’apparition de nouvelles variétés de blés grâce aux sélections
scientifiques (hybride américain, étoile de Choisy) (Henin, 1960), plus productives qui
permettent l’extension de l’aire et de la productivité (Polunin, 1967), en parallèle à une
recherche de fertilité supérieure, considérée comme l’aptitude culturale d’un milieu par les
agronomes (Sebillote, 1993), à l’emploi de produits phytosanitaires et d’engrais chimiques (la
consommation d’engrais augmente de 60% en Haute-Garonne entre 1939 et 1956). Le maïs
est cultivé pour les animaux. La place des prés naturels et de l’espace boisé est fort réduite
(Brunet, 1957a). La vigne sert uniquement à la consommation familiale (Piat, 1985). La
production de semences se diversifie (sorgho, luzerne, colza, tournesol, betteraves, carottes)
(Wolff, 1967). La modernisation de l’agriculture est stimulée à travers un modèle
productiviste (Pech, 1997). L’agriculture moderne suit le faire-valoir direct où propriété et
exploitation se confondent. Le propriétaire devient chef d’exploitation. Ces transformations
sont dues à l’existence d’une classe de grands propriétaires exploitants avisés et de
cultivateurs aisés qui disposent en moyenne d’une cinquantaine d’hectares. Les rapatriés
d’Afrique du Nord qui s’installent dans la région et introduisent la modernisation des
méthodes de culture, vont jouer un rôle important dans cette évolution. Ces colons s’installent
sur les grands domaines morcelés en métairies et en font des exploitations modèles aux vastes
parcelles. Nos sites de Nailloux et Préserville sont considérés comme des régions à grande
propriété dès 1954.
Figure 8.
Évolution du nombre de tracteur en Haute-Garonne (Brunet, 1965)
La bonne utilisation de la traction mécanique va se retrouver sous l’étroite dépendance de la
forme et des dimensions des champs (Roche, 1951). Le tracteur et ses instruments ne peuvent
1
Le nombre de tracteurs en Haute-Garonne est passé de 1050 en 1947, à 2501 en 1953 et à 6804 en 1957
(Brunet, 1957d).
67
pas fonctionner valablement sur des parcelles trop exiguës (Brunet, 1957b). Le morcellement
est un obstacle à la motorisation (pertes de temps pour aller d’un lieu à l’autre, difficultés
d’utiliser des machines dans des champs trop exigus et malaisés d’accès du fait de leur
enclavement ou de chemins trop étroits) (Carillon, 1960). Les opérations de remembrement,
réglées par la loi du 9 mars 1941 et le décret du 7 janvier 1942, entraînent des
bouleversements des paysages agricoles traditionnels (Diry, 1991). Les parcelles sont
fusionnées (régression du nombre d’exploitation), les limites - haies, fossés, talus - effacées
au bulldozer. Le prix des terres augmente entre 1953 et 1957 (+ 30% en Haute-Garonne)
(Brunet, 1957c). L’agriculteur exerce désormais un métier exigeant compétences et capitaux.
Au cours des dernières décennies, on a également assisté à la disparition de la pratique
traditionnelle de la rotation des cultures. L’intensification s’est généralement accompagnée
d’une simplification du paysage liée à la mécanisation, l’agrandissement des parcelles, à
l’augmentation du recours aux intrants, une destruction des habitats. Parallèlement, la taille
moyenne des exploitations a augmenté et leur spécialisation s’est accrue, souvent au profit
d’une monoculture, comme dans beaucoup de régions en France (Alsace Nature, 1996). Au
fur et à mesure de la pénétration de l’économie de marché et de la mécanisation, le paysan a
renoncé aux plantes textiles, à la vigne... Parallèlement, des parcelles cultivées sur des pentes
fortes sont abandonnées à un dynamisme spontané de la végétation (cf. Photo 5). À cette
époque, la Coopérative Agricole Lauragaise est créée, cheville ouvrière incontestable de cette
remarquable évolution (Jacquemay, 1989).
Photo 5. Recolonisation arborée sur forte pente. Site de Nailloux, XIXe siècle - 2001
(Archives départementales de la Haute-Garonne, Schwal).
Photo 6.
Le Lauragais haut-garonnais au XXe siècle (Schwal)
Aujourd’hui, le poids de la population agricole est trop faible pour jouer un rôle décisif dans
l’évolution de la population rurale (Bontron, 1993), accentuée par la mobilité des habitants et
la liberté de dissocier travail et résidence. La dynamique de création d’activités non agricoles
dans le tissu rural joue un rôle décisif dans l’évolution de la population rurale (tourisme,
maisons de retraite). Dans le Lauragais haut-garonnais, c’est l’influence de l’aire urbaine de
Toulouse et la transformation progressive de la région en lointaine banlieue de la ville qui
devient aujourd’hui le moteur principal des changements sociaux.
68
Chapitre 3
Organisation spatiale de la végétation en
réponse à l’artificialisation du paysage
« The past is the key of the
present 1»,
Axelrod, 1975
1
‘Le passé est la clé du présent’
69
Dans le contexte général de l'évaluation de l’incidence des activités humaines sur la
biodiversité végétale dans un paysage d’agriculture intensive, l’objectif de ce chapitre est
d’analyser et de comprendre l’organisation spatiale (traduction de l’anglais ‘pattern’), c'est-àdire l’importance et la répartition, des formations végétales et notamment des formations à
végétation spontanée, réservoirs de biodiversité végétale en zone de grande culture, où la
pression anthropique actuellement très forte s’est amplifiée avec le temps par intensification
de l’agriculture et fragmentation des milieux ‘naturels’. Afin de mettre en évidence la réponse
des formations végétales en terme d’organisation, à l’artificialisation des paysages (que nous
définissons comme la combinaison d’une fragmentation des habitats ‘naturels’ et d’une
intensification des pratiques dans ces habitats) et ses conséquences au cours du temps, nous
proposons de mener une analyse multi-sites et multi-dates.
Nous supposons que l’artificialisation du paysage a entraîné principalement une
fragmentation accrue des formations à végétation spontanée et leur régression, au profit des
formations artificialisées, notamment dans les milieux les plus propices à la mise en valeur
agricole, et que cette dégradation des formations à végétation spontanée a été accentuée par
des interventions sur le milieu de plus en plus intenses. Nous souhaitons donc, à travers cette
analyse spatio-temporelle, mettre en évidence les modes d’organisation différents des
formations végétales s’exprimant à travers les attributs spatiaux de leurs éléments constitutifs
(parcelles), dans différents paysages touchés par l’intensification agricole, et ce pour une
période de temps décrivant le paysage tout au long du processus d’artificialisation.
Afin d’illustrer cette approche du paysage et les réflexions qui la sous-tendent, nous nous
appuyons sur les deux sites retenus appartenant au Lauragais haut-garonnais, pris comme
exemples des paysages d’agriculture intensive. L’analyse est menée par comparaison de
l’organisation actuelle des formations végétales et de l’évolution de cette organisation depuis
un siècle et demi, en relation avec les conditions physiques du terrain et étayée par une
connaissance bibliographique de l’utilisation du paysage, des pratiques agricoles et de leur
évolution, pour le territoire d’étude concerné.
W
Les concepts évoqués par la suite feront systématiquement référence au territoire d’étude qui
a été défini dans le précédent chapitre. La suite du travail consiste à recueillir ou générer les
données spatiales qui seront traitées pour décrire l’organisation spatiale des formations
végétales sur les deux sites d’étude, depuis une période illustrant le paysage avant
intensification. Le développement récent des techniques d’analyse spatiale proposant des
outils très adaptés à la demande des géographes, l’acquisition des données va se faire en
générant un Système d’Information Géographique.
I-
Acquisition des données spatiales
Pour satisfaire à l’approche géographique des paysages que nous nous proposons d’aborder,
nous nous appuyons sur l’utilisation d’un Système d’Information Géographique (SIG), moyen
70
technique reposant sur une maîtrise raisonnée de l’espace (Bielecka et al., 1994). Grâce aux
données obtenues et aux moyens informatiques propres qui en facilitent l’utilisation et le
traitement, il est possible de mettre en évidence, sur des bases scientifiques assurées et
reproductibles, des aspects variés de la réalité paysagère et de son organisation spatiale
(Brossard et al., 1996). Ainsi, et dans le but de mettre en évidence les conséquences de
l’artificialisation du paysage sur les formations végétales, notamment la fragmentation des
formations à végétation spontanée et leur régression, nous envisageons d’abord de produire
différentes cartes thématiques qui retranscrivent la répartition et l’importance des formations
végétales et leur évolution et ensuite d’étudier différents attributs spatiaux des éléments qui
constituent le maillage de ces cartes. Ces étapes sont réalisées pour les deux sites d’étude et
pour plusieurs dates.
Afin de réaliser ces objectifs, nous allons procéder dans un premier temps à l’inventaire des
documents qui vont permettre la collecte de l’information spatiale, puis nous identifierons les
types de formation cartographiés et définirons les attributs spatiaux qui vont être traités pour
répondre à nos interrogations. La cartographie intervient comme le moyen d’analyser et de
comprendre les fonctionnements et les dynamismes des activités agricoles dans les systèmes
ruraux (Deffontaines et Lardon, 1994). Tout d’abord, nous rappelons l’intérêt et les principes
d’un S.I.G.
1-
Intérêt et principe d’un SIG
Le grand intérêt des SIG est de permettre l’analyse et le traitement croisé de données spatiales
provenant de différentes sources (Brossard et al., 1994), de les présenter sous forme
cartographique, de générer des informations quantitatives et/ou qualitatives et d’afficher les
objets géographiques selon une certaine répartition spatiale (calcul de proximité,
intersection…). Son emploi permettra au final d’appréhender le paysage dans ses
composantes structurelles et fonctionnelles, et d’établir des directives de gestion de l’espace
rural (Buche et al, 1991 ; Benmouffok, 1993 ; Benmouffok et al., 1993). Les données
cartographiques sont organisées et structurées pour faciliter leur traitement. Ces manipulations
sont possibles car les données sont géoréférencées1 dans un même référentiel cartographique,
ce qui les rend superposables. Les données spatiales peuvent renfermer des informations de
nature physique telles que les modèles numériques de terrain et informations dérivées (pentes,
orientations, forme de relief) ou de nature structurelle au sens où nous l’entendons2 telles que
les cartes thématiques usuelles. Suivant les concepts de représentation de l’espace (continu en
mode image ou discret en mode objet), les informations dérivées du MNT sont stockées en
mode raster et les informations d’ordre cartographique le sont en mode vecteur.
1. 1 -
Stockage de l’information en mode vecteur
Le mode vecteur consiste à décrire des entités géographiques sous forme d’objets (l’objet
étant la représentation matérielle sous SIG des entités géographiques). Cette approche
1
Le géoréférencement localise les entités spatiales. Plusieurs référentiels spatiaux peuvent assurer ce
positionnement : coordonnées cartographiques, géographiques, adresses postales, etc.
2
Nous entendons par ‘structurel’ les caractéristiques qui définissent l’organisation spatiale des unités paysagères
(surface, forme, distribution, …), et qui sont usuellement employées en Écologie du Paysage. Leur description
précise sera réalisée par la suite.
71
suppose une sélection a priori des données à traiter (exemple : les routes d’un espace donné)
qui sont clairement définies et délimitées. L’objet est décrit par des primitives graphiques
(point, ligne, polygone) et pourvu d’un identificateur permettant de le décrire, dans une base
de données généralement relationnelle, par des attributs. Le mode vecteur étant adapté au
traitement des informations géographiques structurées est employé pour obtenir des données
cartographiques de type carte thématique et permet la gestion des informations topologiques
et sémantiques.
Les données vectorielles sont obtenues selon une procédure générale qui se déroule en
plusieurs étapes :
1. Numérisation des documents (plans cadastraux, photographies aériennes),
2. Géoréférencement des documents sous ErMapper. Le document de calage est la carte
topographique au 25 000e, en utilisant la projection Lambert 2 étendu,
3. Mosaïquage des documents, qui consiste en leur assemblage pour obtenir la surface totale
des sites d’étude,
4. Vectorisation sous le logiciel GeoConcept (5.0) par digitalisation1 à l’écran des
informations composant le maillage parcellaire et production des cartes thématiques, après
importation des documents géoréférencés.
Les informations digitalisées sont organisées en couches et concernent des objets de différente
nature : éléments surfaciques de l’occupation du sol, réseau hydrographie, réseau routier. Ces
données génèrent des données dérivées. Ce sont les attributs spatiaux et thématiques des
unités paysagères, stockées dans des tables de données (cf. p.82).
1. 2 -
Stockage de l’information en mode raster
Le mode raster conçoit l’espace comme un continuum échantillonné par un carroyage
régulier. Chaque élément de la matrice correspond à un pixel qui possède une valeur (le
compte numérique qui est son seul attribut). On ne peut donc traiter, dans une carte en mode
raster, qu'un seul attribut à la fois. Ce mode est généralement utilisé pour générer un M.N.T.
qui permet de calculer les pentes, les expositions et l’altitude, dont nous dérivons la position
topographique.
Ces procédures, en mode vecteur et raster, permettent d’obtenir des informations spatiales,
collectées à partir de diverses sources documentaires, dont nous présentons maintenant la
liste.
2-
Inventaire des documents de référence
Le choix de ces documents est dicté par les phénomènes spatiaux que nous souhaitons mettre
en évidence. Cela suppose de définir au préalable les échelles d’observation auxquelles nous
allons travailler.
1
Digitalisation : méthode d’acquisition de données spatiales en mode vectoriel.
72
2. 1 -
Échelles d’observation
Selon l’échelle envisagée (individus, population, communautés, écosystèmes, paysages,
biomes …), la perception du paysage et de la biodiversité renvoie à des conceptions toutes
différentes (Aubertin et al., 1998 ; Huston, 1999). Ainsi, le choix de l’échelle est fondamental
et il est pertinent de considérer un éventail d’échelles pour mettre en évidence des
phénomènes de différentes sortes. L’échelle, définie dans les dimensions spatiales et
temporelles, est en partie imposée par les documents disponibles - photographies aériennes,
cadastres, etc. L’échelle spatiale qui définit la résolution de l’observation, c’est-à-dire la taille
du plus petit élément pouvant être observé en relation avec l’étendue du territoire étudié, est
choisie de manière à permettre l’identification des unités paysagères. La dimension
temporelle, qui représente une zone d’interprétation de l’histoire, sera délimitée par un
intervalle ‘intergénérationnel’ entre deux documents, de manière à rendre compte des
changements spatiaux aux fils des générations d’agriculteurs.
2. 2 -
Nécessité d’un état de référence
L’analyse temporelle implique la référence à un état initial, avant intensification de
l’agriculture. La connaissance de l’état initial du paysage au temps t0 permettra d’estimer le
degré de perturbation des formations végétales suite à l’intensification, afin d’envisager des
alternatives de gestion plus en accord avec les conditions naturelles offertes par le milieu
utilisé (cf. chapitre 6). À l’opposé, la période la plus récente qui sera employée est considérée
comme représentative de l’état actuel du paysage.
2. 3 -
Documents retenus
Une recherche dans les centres d’archives (municipales et départementales) et de production
cartographique (IGN, Service du cadastre) nous a permis d’inventorier et de collecter les
différents types de documents existants et disponibles pour les deux sites d’étude :
numériques, cartographiques et photographiques (cf. Tableau 3).
2. 3. 1 -
Les documents numériques
Ce sont le M.N.T., qui renseigne sur le modelé du terrain, à savoir l’exposition, la pente et la
position topographique.
2. 3. 2 -
Les documents cartographiques
Ils apportent des informations sur l’organisation du paysage à des époques plus ou moins
anciennes (cf. Tableau 3).
- Cartes de Cassini, prise en compte comme référence à un état ancien (cf. Figure 9).
L’échelle et la précision de cette carte limitent son usage à la conception de l’occupation du
73
sol à l’époque (entre 1760 et 1790), notamment concernant la présence et l’étendue des bois.
La carte d’État major qui n’apporte pas d’informations détaillées des sites d’étude, n’a pas été
utilisée.
- Cadastre napoléonien, 1834. Il correspond à la première carte existante qui détaille les
différents types d’occupation du sol. Nous n’avons pas eu à effectuer le dépouillement
laborieux de la matrice cadastrale, la nature des parcelles étant précisée sur les feuilles
cadastrales. Même si nous ne mettons pas en doute le sérieux des auteurs de ce document,
nous pouvons émettre des suspicions quant à l’exactitude des tracés du cadastre qui dépendent
des techniques de l’époque. Malheureusement, le réseau bocager n’est pas indiqué sur ces
documents. Nous considérons ce document comme l’état de référence du paysage, avant les
grandes transformations liées à la modernisation de l’agriculture. Il correspond, pour ainsi
dire, au ‘degré initial d’intensification’, pour la période de temps étudiée.
- Cadastre révisé de 1954. La révision étant superposée au cadastre 1834, nous avons utilisé
cette information comme élément de contrôle de la photo-interprétation pour les documents
photographiques datant de 1946-48.
Nailloux
Figure 9.
2. 3. 3 -
Préserville
N
1
2 km
Cartes de Cassini (1760-90), pour les deux sites d’étude
Les documents photographiques
Nous avons utilisé les photographies aériennes fournies par l’IGN, dont les avantages sont
multiples (Tricart et al., 1970 ; Chevallier, 1971) :
74
-
La photographie aérienne fournit un apport majeur à la réflexion géographique et aide
à relier les opérations de terrains.
-
C’est un outil de premier plan pour l’analyse des paysages agraires, car à toute échelle,
elle propose une représentation concrète et objective de la réalité à un instant donné et
permet de visualiser immédiatement certains éléments fondamentaux du paysage, en
offrant simultanément une vue d’ensemble du site étudié.
-
Elle autorise inventaires et dénombrements, en apportant des données plus nombreuses
et variées que la carte.
-
Elle permet de saisir les liaisons réciproques des phénomènes situés dans leur
contexte, comme outil de synthèse.
-
Le rapprochement entre deux photographies d’époques différentes souligne l’ampleur
des transformations en quelques décennies.
-
A contrario de l’image satellitale à haute résolution qui ne permet la perception que
des unités paysagères les plus vastes, la photographie aérienne autorise une approche
plus fine du paysage, en mettant en évidence des unités paysagères plus petites
(Collectif, 1999b) et son acquisition est plus modeste.
- Photographies aériennes, 1946-48. Première mission disponible auprès de l’IGN pour les
sites d’étude, elle correspond à la période avant la modernisation de l’agriculture et surtout à
la période d’après Guerre, au cours de laquelle les bois ont été fortement exploités, comme
nous l’avons vu dans la partie historique.
- Photographies aériennes, 1972-78. Période après la modernisation de l’agriculture, c’est le
passage marquant des transformations des éléments paysagers face à l’intensification des
pratiques.
- Photographies aériennes, 1993. Elles évoquent une période de tournant des pratiques
agricoles, après la réforme de la PAC en 1992 (notamment gel des terres, plantation de haies).
- Photographies aériennes, 1998. Mission la plus récente proposée, nous la considérons
comme l’état actuel de la mosaïque paysagère.
Les clichés des photographies aériennes utilisés ont été pris entre les mois de juin et de juillet,
période où la végétation est à son apogée de synthèse foliaire et donc facilement identifiable.
Document
Année
Teinte
Carte de Cassini
1760-90
N&B
Nb de feuilles
utilisées
2
Cadastres
1834
1954
N&B
N&B
23
23
5 000e
5 000e
Photographies aériennes
1946-48 N&B
10
4/7
8
10
25 000e
30 000e / 20 000e
30 000e
25 000e
1972-78
1993
1998
N&B
Couleur
Couleur
Échelle
86 400e
Tableau 3. Caractéristiques des documents cartographiques et photographiques utilisés, pour
les deux sites d’étude
L’échelle des documents contraint d’employer plusieurs feuilles pour couvrir la surface dans
sa totalité pour les deux sites d’étude.
75
Les documents géoréférencés sont utilisés pour vectoriser le maillage du parcellaire. Ce
dernier est évident sur les cadastres. Par contre, pour les photographies aériennes, la
vectorisation du maillage n’est possible qu’après avoir interprété les photographies. La photointerprétation se base sur la reconnaissance de la physionomie des objets photographiés, dont
la hauteur est mise en évidence par l’usage d’un couple de photographies analysées sous
lunettes et miroirs stéréoscopiques. Parmi les objets pouvant être identifiés sur les documents
photographiques, nous retenons les différents types de formations végétales qui seront
cartographiés. En complément, les objets linéaires tels que les routes et réseau
hydrographiques sont identifiés et constitueront des repères spatiaux pour la présentation des
cartes thématiques produites. Cette photo-identification est décrite ci-après.
3-
Typologie de l’occupation du sol des formations végétales
Les formations végétales correspondent aux descripteurs du paysage dérivés des documents
spatiaux. Chaque formation végétale est désignée par un Type d’Occupation du Sol, abrégé
TOS. Nous présentons ici la typologie de l’occupation du sol pour l’ensemble des formations
végétales, établie à partir des photographies aériennes, en s’aidant de nos connaissances de
terrains, de cartes topographiques et thématiques (cf. Photo 7). Les formations végétales
représentent les unités paysagères qui composent le paysage (Steinberg et Husser, 1988), dont
l’identification se base sur l’examen de sa physionomie. Pour chaque TOS identifié, nous
envisageons sa contribution à la diversité floristique. Ces TOS ne sont pas forcément
représentés pour toutes les dates d’étude.
76
Photo 7.
Photographies aériennes, mission 1998. Communes de Nailloux et Préserville
77
Même s’il n’existe pas, à proprement parler, de milieux naturels et non naturels, puisque tous
les milieux sont influencés ou ont été influencés par les activités humaines, nous rassemblons
les types identifiés dans deux grands ensembles de formations végétales selon le degré
d’artificialisation lié directement à l’intensité des activités humaines qui s’exercent sur la
formation étudiée (ce regroupement est inspiré d’une précédente étude qui définit les AVA,
associations végétales artificielles et les AVS, associations végétales spontanées) (De
Foucault, 2001) :
-
Les formations végétales artificialisées, (FVA) moyennement à hautement artificialisées
et presque dépourvues de végétation. Il s’agit soit de milieux où l’Homme est intervenu
directement en plantant ou en semant des végétaux qui ont un intérêt économique, mais
par exploitation extensive (friches, prairies artificielles), soit de cultures très intensives où
l’intervention humaine modifie radicalement les conditions de vie des végétaux (cultures
sarclées, jardins) et des labours où l’Homme a presque totalement détruit la végétation.
Les zones urbaines fortement anthropisées sont intégrées à cet ensemble.
-
Les formations à végétation spontanée, (FVS) faiblement artificialisées. Il peut s’agir
d’une action ancienne intense ou très prolongée qui a modifié profondément la végétation
initiale (influence actuelle de l’Homme faible) (taillis, gaulis, perchis, herbages) ou d’une
faible pression par les Hommes ou les animaux, avec peu d’influence sur l’évolution
actuelle de la végétation (pâturage, cueillette).
Remarques
1. Dans les sites étudiés, fortement anthropisés, le degré d’artificialisation nul caractérisant
la végétation climacique n’existe pas.
2. Dans ces paysages depuis longtemps soumis à la main de l’homme, il n’existe plus à
proprement parler d’écosystème naturel. Pour être plus en accord avec la réalité, nous
éviterons par la suite ce terme auquel nous préférerons celui de « Formation à végétation
spontanée » quand l’intervention anthropique actuelle est nulle ou faible.
Pour les deux ensembles de formations végétales, les TOS sont présentés par degré
d’artificialisation décroissant, ou degré de ‘végétalisation’ croissant.
3. 1 -
Formations végétales artificialisées
Elles sont marquées par une forte emprise humaine et contribuent en général très peu à la
diversité floristique globale. Elles représentent les terres arables, grandement présentes sur les
sites d’étude quelque soit la date, les vignes considéré comme un type particulier de culture de
par les surfaces occupées et ses qualités photographiques, et les zones urbaines, sous forme
groupée ou isolée. Nous estimons les zones urbanisées comme les milieux les plus
artificialisés et les moins accueillant pour la colonisation des espèces végétales, puisque les
terres arables même cultivées intensivement présentent en leur marge des possibilité de
colonisation (Baudry et al., 1998 ; Burel et al., 2000 ; Le Coeur et al., 2002).
78
Les zones urbaines
Le type «zone urbaine » regroupe les constructions de toute nature (maisons, fermes,
immeubles, hangars…) ainsi que les zones rudéralisées (parking, cimetière), qui présentent
une surface suffisamment importante pour être identifiée (fonction de l’échelle
d’observation). Les zones urbaines sont identifiées par un relief moyen, une forme souvent
rectangulaire, une limitation par des clôtures, une teinte foncée. Les jardins sont inclus dans
les surfaces digitalisées. La surface des éléments linéaires de type route, chemin, muret, est
considérée comme négligeable à notre échelle de travail. Ces éléments sont numérisés à partir
de la carte topographique actuelle et superposés aux cartes d’occupation du sol pour faciliter
leur lecture et le repérage visuel.
Les terres arables
Les terres arables rassemblent les terres agricoles consacrées aux cultures permanentes de
différente nature (blé, tournesol, sorgho …), aux prairies artificielles semées annuellement
(Medicago, Trifolium…), à la rotation des cultures ou aux pâtures, ou encore laissées en
jachère ou en friche1 (OCDE, 1999). Les terres agricoles sont identifiées par un relief nul, une
forme polygonale, une texture homogène et une teinte plus ou moins claire. Il s’agit souvent
de monocultures dont la diversité floristique est limitée par l’emploi intensif d’herbicides et
des labours profonds et fréquents.
Les vignes
Catégorie particulière des terres arables, les vignes sont identifiées par une structure striée de
lignes parallèles. Elles ont marqué pendant longtemps l’activité agricole, mais sont
aujourd’hui, quasi inexistantes en raison de l’orientation vers une céréaliculture et du recul de
cette culture anéantie par le phylloxéra au XIXe siècle. Plus ou moins artificialisées selon
l’intensité et l’efficacité des désherbages pratiqués, les vignes sont des milieux qui peuvent
offrir des conditions favorables à l’installation d’une flore herbacée diversifiée. Ces
formations, entretenues le plus souvent par labour et désherbage, sont considérées comme
moins artificialisées que les terres arables.
3. 2 -
Formations à végétation spontanée
Les formations à végétation spontanée sont marquées par une relativement faible emprise
humaine et peuvent contribuer fortement à la diversité floristique globale. Les principaux
types d’occupation identifiés sont la ‘prairie’, la ‘pelouse’, la ‘fruticée’ et le ‘bois’, ainsi que
les ‘étendues d’eau’.
Remarques
1. Les termes de pelouses et fruticées ne témoignent pas d’une occupation passée de la
parcelle par la forêt. Pour ne pas les confondre avec les stades immatures de la forêt qui se
succèdent après coupe, leur identification est confirmée par l’observation de la nature de
la parcelle sur les photographies datant de la période précédente.
2. Pour le réseau bocager, formations linéaires, nous invitons le lecteur à se référer au travail
de Guiavarc’h, effectué sur les deux sites d’étude et dont les principaux résultats seront
1
La jachère, définie comme une règle agraire décidée par l’agriculteur, se différencie de la friche qui
correspond à l’abandon subi du fait de situations particulières (Vivier et al., 1994).
79
repris dans l’analyse (Guiavarc'h, 2002). La haie1, zone de frontière entre deux milieux,
peut contenir une diversité floristique intéressante.
Les étendues d’eau
Nous identifions les plans d’eau d’une surface suffisamment large (petites mares ignorées).
Seules deux parcelles sont identifiées sous ce type. Elles sont identifiées grâce à leur texture
lisse et leur teinte foncée.
Les prairies
Nous identifions sous ce type les prairies mésophiles à mésohygrophiles, permanentes de
fauche, situées sur des pentes faibles peu drainées ou dans les bas fonds humides. Elles
illustrent des formations denses d’herbes mésophiles à hygrophiles. Elles sont identifiées par
un relief quasiment nul, une texture granuleuse et une teinte assez sombre. La diversité des
prairies est liée à l’origine des milieux dont elles dérivent et à l’ensemble des cultures que
l’Homme a pratiqué depuis des millénaires. Ce sont des milieux qui peuvent être très
diversifiés en espèces végétales (Ministère de l'Environnement, 2000). Elles constituent une
composante essentielle de l’agriculture traditionnelle mais sont devenues menacées par
l’intensification de l’agriculture. C’est souvent dans les praires permanentes, avec de forts
potentiels en terme de conditions de sol et de climat, que l’agriculture intensive a progressé le
plus rapidement, avec des apports de fertilisants élevés pour augmenter la production. En
général, il en résulte un déclin significatif de l’abondance et de la diversité en espèces. Les
prairies permanentes sont souvent défrichées pour la culture (en France, 10% des prairies
permanentes ont été détruites entre 1982 et 1992).
Les pelouses
Nous rassemblons sous ce terme générique les formations des coteaux, composées d’herbes
rases non entretenues, denses ou clairsemées, dominées par les graminées en condition sèche
(forte pente, fort ensoleillement), dérivant souvent de terres arables abandonnées. Elles
peuvent être embroussaillées, faute d’entretien. Les pelouses sont identifiées par une texture
hétérogène, avec des taches dispersées représentant les ligneux colonisateurs. Les pelouses
sèches sont d’une grande importance pour la biodiversité végétale en France (Ministère de
l'Environnement, 2000). Elles sont comme des îlots de biodiversité qui servent d’habitat
refuges pour des espèces de plantes adaptées aux conditions spécifiques de ces milieux. Mais
la colonisation spontanée par des espèces ligneuses communes peut causer de considérables
pertes en espèces.
Les fruticées
Dénommées également fourrés arbustifs, elles représentent des formations végétales
dominées par les arbustes, identifiées par leur texture hétérogène et un relief moyen. Ce sont
des formations végétales souvent denses, fermées. Elles correspondent au stade succédant la
formation prairiale en l’absence d’entretien. Elles sont souvent perçues de manière négative
car elles témoignent des limites des possibilités agricoles.
1
Les haies sont définies, au sens de l’inventaire forestier National, comme des éléments boisés d’une largeur
moyenne au plus égale à dix mètres, de vingt cinq mètres de longueur au minimum et comprenant au moins trois
arbres inventoriables différents et au moins un arbre inventoriable tous les dix mètres (Bazile, 1993).
80
Les taillis
Les forêts, identifiées par un relief élevé, une teinte foncée et une texture pommelée,
correspondent à des formations arborées caducifoliées. Les forêts présentes dans les systèmes
d’agriculture intensive ne peuvent pas être considérées comme des forêts naturelles (Ministère
de l'Environnement, 2000). L’action ancienne et répétée de l’Homme a entraîné une
‘artificialisation’ de ces forêts avec altération de la structure et de la composition. Considérées
comme ‘semi-naturelles’, elles sont qualifiées de forêts paysannes (Balent, 1996). Les forêts
dans les milieux ruraux où l’agriculture est intensive, jouent un rôle paysager en structurant
l’espace, un rôle écologique en régulant les flux et en accueillant une diversité de plantes et un
rôle économique en constituant une ressource souvent sous-estimée (production de bois,
activité de chasse, cueillette, loisirs) (Deconchat et al., 1996 ; Pointereau, 1996). Les forêts
étant exploitées sous forme de taillis (cf. encadré ci-dessous), nous identifions les différents
stades de régénération : taillis jeunes, clairs et matures. Les taillis jeunes qui correspondent à
la formation végétale après coupe sont caractérisés par une physionomie de type formation
herbacée, accompagnée de portes graines dispersés, laissés sur la surface coupée et des
souches d’arbres. Les taillis clairs qui correspondent au stade de croissance du taillis,
illustrent une physionomie de type arbustif, dominée par des espèces fructifères.
Remarque
Pour des raisons de clarté de la légende des cartes d’occupation du sol présentées par la suite,
nous regroupons sous le type de taillis mature, les bosquets et les ripisylves bien développées.
L’exploitation forestière sous forme de taillis
D’après Deconchat, 1999
L’exploitation forestière peut être définie comme étant l’ensemble des travaux techniques,
économiques et d’organisation qui ont comme objet la récolte de bois nécessaire à l’activité
économique, en interaction harmonieuse avec les impératifs sylvicoles (Dalla-Pria et al.,
1995). Le cycle d’une exploitation sylvicole sous forme de taillis peut se résumer en quatre
stades principaux. La structure du peuplement des essences - hauteur, diamètre, surface
terrière - est un indicateur qui permet de décrire facilement les différents stades du cycle
sylvicole. Une parcelle de taillis mature présente une structure formée par une strate arborée
bien développée dominante et formant une canopée fermée. Il y a une certaine variabilité
entre parcelles, provenant de conditions pédo-climatiques, d’une histoire, d’un développement
ou d’un environnement différent. Le stade ‘coupe’ (taillis jeune) résulte de l’exploitation. Il se
caractérise par une très forte réduction de la strate arborée. Les évolutions sont très rapides
durant cette phase. Le stade ‘croissance’ (taillis clair) se développe peu à peu jusqu’à former
une canopée fermée. La croissance se fait principalement en hauteur dans une concurrence
pour la lumière. Après une période plus ou moins longue, la parcelle retrouve une structure
‘mature’ apte à être à nouveau exploitée.
La réalisation des opérations d’exploitation forestière provoque des modifications très visibles
du milieu à une échelle fine, faisant apparaître une hétérogénéité horizontale (zone de
rémanents, décapage de sol superficiel, tassement, ornière). Ces modifications ont des
répercussions écologiques (apparition de micro-biotopes humides dans les ornières).
L’ensemble des formations sont cartographiées où chaque parcelle vectorisée est renseignée
par un de ces types d’occupation du sol qui viennent d’être définis. Le SIG informe, dans des
tables de données, sur les caractéristiques structurelles des parcelles, ou attributs spatiaux, qui
81
vont permettre d’illustrer l’organisation spatiale des formations végétales et leur dynamique.
Ces attributs peuvent aussi dériver de calculs. Nous les définissons maintenant.
4-
Définition des attributs spatiaux des unités paysagères
Les changements dans la structure1 des taches d’habitat, liés eux-mêmes aux changements
agricoles, vont affecter la composition spécifique et la distribution de la végétation dans le
paysage (Alard et al., 1999). En suivant notre objectif de départ qui est de révéler la qualité,
l’importance et la distribution des formations végétales (fragmentation, intensification et
artificialisation), nous étudions la structure du paysage grâce à l’emploi de divers attributs qui
caractérisent les parcelles de la mosaïque paysagère, identifiées par un TOS. Ainsi, le paysage
est appréhendé par son niveau d’organisation élémentaire, la parcelle, usuellement désignée
comme unité paysagère ou tache (traduction du ‘patch’ des Écologues du paysage anglais).
Ces unités créent l’hétérogénéité du paysage qui s’exprime au niveau des parcelles
cartographiées et caractérisent leur structure par des attributs spatiaux (Collectif, 1999b).
L’analyse des structures spatiales ne porte que sur les objets surfaciques. Les objets ponctuels
- cabanes, petites mares - et linéaires - routes, chemins, haies - en sont exclus, leur surface
étant considérée comme négligeable en rapport aux échelles utilisées. Nous sommes
conscients qu’il n’est pas exclu que ces éléments paysagers, ponctuels ou linéaires, aient
toutefois un impact sur les éléments surfaciques traités.
Les attributs des unités paysagères les plus pertinents pour prédire et évaluer la biodiversité
dans une mosaïque paysagère agricole, que nous retenons parmi ceux définis et étudiés par le
monde scientifique en Écologie du paysage et établis plus particulièrement dans le contexte
des paysages agricoles (Dunn et al., 1991 ; Turner et al., 1991a ; Gustafson et al., 1992 ;
Taylor et al., 1993 ; Nassauer, 1995 ; Baskent et al., 1995 ; Otto, 1996 ; Haines et al., 1996 ;
Duelli, 1997 ; Thornton et al., 1998 ; Linhart, 1999 ; Thies et al., 1999 ; Selinger-Looten et
al., 1999), sont choisis selon les hypothèses posées en début d’étude et les objectifs à
atteindre :
-
La diversité des TOS, se résume au nombre de TOS représentés. Plus la valeur de cet
attribut est élevée, plus l’hétérogénéité paysagère augmente, offrant une plus grande
diversité de milieux pour les espèces végétales.
-
Le nombre total de taches par unité de surface, qui estime le morcellement des habitats.
Le morcellement du paysage et l’hétérogénéité paysagère augmentent avec le nombre de
taches.
-
La superficie des taches (totale, par TOS, moyenne, par classe, minimale et maximale)
illustre la représentativité de chaque TOS dans le paysage. La fragmentation augmente
quand la superficie des taches diminue, accentuant leur isolement.
Pour les taches boisées, diverses équipes en Écologie du Paysage ont mis l’accent sur
l’importance de la morphologie des bois sur leur composition floristique (Burel et Baudry,
1999). Cette morphologie est influencée par la fragmentation des taches boisées qui exprime
1
Structure Disposition et relations des éléments qui constituent l’ossature de l’organisation du paysage (Calsat,
1993).
82
une perte et un isolement de l’habitat (Collinge, 1996). La mise en évidence de la
fragmentation des formations boisées au sein du paysage s’inscrit dans l’étude de mesures
paysagères communément utilisées : la taille, le nombre et la forme, en rapport avec des
niveaux de perturbation croissants (dispersion des taches, distance moyenne au plus proche
voisin, rapport périmètre / aire, distance entre les fragments).
-
Le rapport périmètre / surface, exprimé par l’indice de forme de Patton (PSI, de l’anglais
Patton Shape Index) (Patton, 1975) selon l’équation
PSI = P/(√200 x π x A)
où P est le périmètre et A l’aire de la tache.
Cet indice illustre la forme de la tache. Il détermine les échanges avec les éléments
voisins. Les formes complexes à large indentation, dont le rapport périmètre / superficie
est maximal sont celles présentant le plus de lisière et donc la plus grande diversité
paysagère comme la plus grande biodiversité, cette dernière s’accroissant en lisière de
deux unités paysagères ou écosystèmes limitrophes (écotone). En contre partie, ces formes
sont aussi celles présentant un faible espace intérieur en regard de la surface totale. Cet
indice est un bon outil pour évaluer les effets de la forme et de la taille de la tache sur
l’abondance de l’habitat lisière.
-
La distance entre taches, exprime la dispersion des taches pour un même TOS, sur le
territoire et évalue leur isolement. Certains modèles en métapopulation stipulent que les
flux d’espèces entre populations « isolées » sont fonction de la distance qui les séparent
(Hanski, 1998).
-
Le voisinage des taches revient à mettre en évidence les relations spatiales avec les taches
environnantes qui constituent un effet barrière ou un milieu favorable à la dispersion des
espèces. Il peut exprimer la connexion entre les taches de même type (Pain et al., 2000) et
être mis en rapport avec l’isolement des taches. Nous l’estimons par la proportion de
surface des formations végétales artificialisées et à végétation spontanée (rapport
FVA/FVS).
-
Le rapport entre états d’écosystèmes sur une même trajectoire (juvénile - mature). Ce
rapport influe sur l’hétérogénéité paysagère.
La combinaison des précédents attributs permet au final de définir la capacité d’accueil du
paysage. Elle correspond à la capacité d’un habitat à accueillir une espèce ou un groupement
d’espèces donné. Elle exprime donc aussi l’isolement des taches. Elle est définie par la
surface occupée par un type d’habitat, couplée à la répartition spatiale des taches de cet
habitat, à la prise en compte des connectivités entre les taches et des habitats environnants.
Remarque
En cherchant à asseoir notre appréhension des paysages sur des méthodes quantitatives qui
font appel au traitement de l’information, nous sommes conscients de réduire l’objet de notre
propos à ses seules dimensions ‘mesurables’. Tout ce qui relève de la perception, du regard
individuel, de la charge affective que l’on peut associer au paysage, est maintenu hors du
champ d’investigation que nous nous fixons. La raison de ce choix est double :
83
-
-
Il convient de nous attacher à un domaine où notre spécialité disciplinaire nous assure
une pertinence propre : la réalisation de cartes et le traitement de données rapportées à
l’espace géographique.
Il y aurait quelques risques à vouloir amener sur le terrain de l’objectivité
« scientifique » les paysages singuliers qui sont au cœur et à l’esprit de chacun pour en
tirer quelque loi sur la valeur que l’on doit leur reconnaître (Bertrand, 1978).
W
Les données spatiales retenues vont nous permettre de décrire l’organisation et la répartition
spatiales des formations végétales sur les deux sites d’étude, depuis 1834, date de référence.
II -
Analyse de l’organisation spatiale des formations
végétales : une hétérogénéité des paysages en relation
avec les pratiques agricoles
Les attributs retenus constituent le point de départ de l’analyse de l’organisation spatiale des
formations végétales, et notamment l’importance et la répartition des formations à végétation
spontanée, considérées comme des réservoirs de biodiversité, en réponse à l’artificialisation
du paysage, l’objectif étant de révéler l’incidence de cette artificialisation en terme de
fragmentation, de régression des formations à végétation spontanée et de répartition spatiale.
Afin de révéler les modes d’organisation différents des formations végétales dans des
paysages de grande culture, et ce pour une période de temps illustrant le paysage tout au long
du processus d’intensification de l’agriculture, nous menons deux analyses pour les deux
sites. La première (analyse synchronique) se base sur l’étude des attributs des taches
paysagères pour la période actuelle, afin de connaître l’organisation actuelle des formations
végétales. La seconde (analyse diachronique) se base sur l’étude de l’évolution des attributs
depuis un siècle et demi (1834) afin de connaître l’évolution de l’organisation des formations
végétales. Les connaissances historiques de l’occupation du paysage et des pratiques agricoles
et les données du MNT viennent appuyer la discussion sur les résultats obtenus.
1-
Organisation actuelle des formations végétales : analyse synchronique
Cette partie se base sur l’analyse synchronique des formations végétales identifiées par un
type d’occupation du sol (TOS) composant deux paysages singuliers, dans le but de mettre en
évidence les variations de l’organisation spatiale des paysages, en réponse à des usages
différents de l’espace. Pour cela, les attributs spatiaux caractérisant les différents TOS sont
étudiés, sur les deux sites retenus - Nailloux et Préserville. Les données cartographiques sont
extraites des photographies datant de 1998, considérées comme représentatives de l’état actuel
du paysage (cf. Figure 10).
84
Nailloux
Préserville
étendue d’eau
terre arable
vigne
zone urbaine
prairie
pelouse
fruticée
taillis
cours d’eau
route
N
1
2 km
Figure 10. Carte d’occupation du sol, 1998
85
1. 1 -
Étude synchronique des attributs spatiaux
Les attributs spatiaux pris en compte apportent des informations sur la fragmentation et
l’hétérogénéité spatiale des paysages et mettent en évidence la capacité d’accueil du paysage
précédemment définie. Les attributs sont étudiés à l’échelle du paysage pour tous les TOS et à
l’échelle de la parcelle pour l’occupation du sol de type ‘bois’ afin de mettre en évidence la
fragmentation des taches.
1. 1. 1 -
Structures du paysage
Nombre de TOS et de taches
Huit TOS sont représentés sur Nailloux contre sept sur Préserville, par absence de vignes. Or
ce sont des milieux connus pour renfermer un cortège floristique spécifique. À surface égale,
les deux sites sont représentés par un nombre total de taches quasiment identique (0,26 tache
par ha).
Nous pouvons dire que le paysage de Nailloux est plus diversifié en terme de nombre de TOS
et donc plus hétérogène du fait de la représentation d’un TOS en plus. Cette valeur indique
une occupation du sol globalement identique pour les deux paysages. Les deux sites
présentent a priori un même morcellement du paysage, en considérant le nombre de taches.
-
Surface totale des taches par TOS
Remarque
La forte proportion des terres agricoles impose l’emploi d’une échelle différente dans la
représentation graphique de la surface totale par type d’occupation du sol.
Figure 11. Surface totale des TOS, en % de la surface totale de la zone d’étude
En terme de surface totale des TOS (cf. Figure 11), les deux paysages sont occupés par autant
de terres arables, dominantes dans le paysage. Chaque site est représenté par une seule
86
étendue d’eau dont la surface est six fois supérieure à Nailloux. Le paysage de Nailloux
connaît une surface de fruticées légèrement plus grande et une étendue des pelouses trois fois
plus importante que celui de Préserville. Par contre, le paysage de Préserville est occupé
proportionnellement par un peu plus d’espaces boisés, de zones urbanisées et par deux fois
plus de prairies.
Les deux paysages présentent une occupation spatiale globalement semblable, dominée par
des terres arables, chacun étant représenté par une diversité particulière concernant les TOS
représentant les formations à végétation spontanée. Le paysage de Nailloux est plus riche en
pelouse et celui de Préserville plus riche en bois et prairie.
-
Surface moyenne et nombre relatif de taches
Figure 12. Surface moyenne des taches (ha) et nombre de taches par hectare de la surface totale
du site
Remarque
La surface moyenne est suivie du calcul de l’écart-type. Rappelons que l’écart-type est
d’autant plus élevé que les valeurs sont largement distribuées.
Écart-type
Nailloux Préserville
fruticée
0,72
0,30
pelouse
0,54
0,32
prairie
0,14
0,95
bois
2,50
5,58
zone urbanisée
6,77
3,17
terres arables
7,43
4,78
Tableau 4. Écart-type des surfaces moyennes
- Surface moyenne
Hors étendue d’eau et vigne, les deux sites d’étude sont représentés par des fruticées, des
pelouses et des prairies dont la surface moyenne est relativement faible, en rapport aux bois,
87
aux terres agricoles et aux zones urbanisées. Les pelouses et les fruticées sont en moyenne
deux fois plus grandes sur la commune de Nailloux, mais avec une dispersion des valeurs plus
grande (cf. Tableau 4). Les prairies et surtout les bois sont, en moyenne, plus étendus sur la
commune de Préserville, mais avec une dispersion des valeurs bien plus grande. Les terres
arables ont une superficie moyenne un peu plus grande sur Nailloux. Les zones urbanisées
sont de superficie moyenne à peu prés identique, avec une dispersion des valeurs supérieure
sur le site de Nailloux.
En moyenne, pour les deux sites, les prairies et les pelouses sont de moins grande taille que
les bois, les zones urbanisées et les terres arables. La fragmentation étant usuellement estimée,
d’après les écologues, par la taille des zones boisées (Hanson et al., 1990 ; Saunders et al.,
1991 ; Robinson, 1995 ; Grashof-Bokdam, 1997 ; Turner, 1997), nous pouvons avancer que le
paysage de Préserville est moins fragmenté.
- Nombre relatif de taches
Le nombre de taches par hectare par rapport à la surface totale du site est un attribut illustrant
le morcellement en plus ou moins grandes unités. Cet attribut illustre la représentativité
relative des TOS dans le paysage : plus il y a de taches, plus le TOS concerné est représenté
dans le paysage. À surface égale, le paysage de Nailloux montre un morcellement plus
important pour les pelouses et les bois tandis que celui de Préserville est notamment
caractérisé par un éclatement plus grand des terres arables et dans une moindre mesure des
fruticées, des prairies et des zones urbanisées.
Tenant compte de la taille des échantillons relativement réduits pour certains TOS, nous
pouvons en conclure que l’organisation spatiale des TOS des deux communes est légèrement
différente.
-
Nombre de taches par classe de surface
La moyenne pouvant masquer des distributions particulières, nous prenons en compte
maintenant les classes de surface. En nous basant sur la division couramment utilisée de la
taille des exploitations agricoles en unités de production (RESO, 1998), nous définissons les
classes suivantes : inférieure à 10 ha (très petite taille), entre 10 et 20 ha (petite), entre 20 et
50 ha (moyenne), supérieure à 50 ha (grande). La division exprimant elle-même des surfaces,
les valeurs indiquent le nombre de taches par classe (cf. Tableau 5).
Nb taches/classe
Nailloux
de surface, ha
<10 10-20 20-50
1
Étendue d’eau
12
Fruticée
32
Pelouse
2
Prairie
55
Taillis
Terres arables
257
32
9
Vigne
3
Zone urbanisée
75
1
-
Tableau 5.
>50
1
1
Préserville
<10 10-20 20-50
1
8
11
3
20
5
190 22
2
54
1
>50
-
Nombre de taches par classe de surface, en ha
Seule la commune de Nailloux présente deux taches de taille supérieure à 50 ha, représentant
des terres arables et des zones urbanisées. De telles parcelles considérées comme grandes par
l’usage symbolisent une utilisation intensive de l’espace et une plus grande artificialisation.
Seules les terres arables et les zones urbanisées présentent des taches de taille moyenne,
88
comprise entre 20 et 50 ha, notamment à Nailloux. Tous les TOS sont représentés par des
taches de très petite taille, et hors étendue d’eau, les FVS (en gras dans le tableau) ne sont
représentées que par des taches de très petite taille (surface < 10 ha), sauf pour Préserville où
cinq taches boisées ont une taille définie comme petite.
Le paysage de Nailloux est plus intensifié par les activités humaines (agriculture et
urbanisation), intensification accentuée par des taches boisées représentées seulement par des
taches de très petite taille, contrairement au paysage de Préserville. La fragmentation des
zones boisées y est donc plus importante. Pour les deux paysages, les FVS non arborées ne
sont représentées que par des taches de très petite taille. Les deux paysages présentent donc
une fragmentation importante des FVS, symbole de paysages très anthropisés et artificialisés.
-
Surface minimale et maximale des taches
Les étendues d’eau n’étant représentées que par une seule tache, ne sont pas prises en compte.
Nailloux
1,60
Préserville
ha
1,20
0,80
0,40
0,00
fruticées
pelouse
prairie
bois
vigne
zone
urbanisée
terres
arables
Figure 13. Surface minimale, ha
Nailloux
Préserville
100
ha
75
50
25
0
fruticées
pelouse
prairie
bois
vigne
zone
urbanisée
terres
arables
Figure 14. Surface maximale, ha
89
- Surface minimale
Pour les deux communes, les fruticées et les pelouses sont représentées par des taches de taille
minimale quasiment identique. Le paysage de Nailloux est représenté par des terres arables
dont la taille minimale est deux fois inférieure à celles du paysage de Préserville. Le paysage
de Préserville est représenté par des surfaces en prairie et urbanisées qui ont une taille
minimale deux fois inférieure. Les bois de Préserville ont une surface minimale dix sept fois
supérieure à ceux de Nailloux, témoignant d’une fragmentation bien moins intense. Le
paysage de Nailloux est plus fragmenté que celui de Préserville.
- Surface maximale
Pour les deux sites, les fruticées, pelouses et prairies ont des tailles maximales très faibles en
rapport aux autres TOS. Le paysage de Nailloux présente des surfaces maximales deux fois
supérieures pour les pelouses, plus de deux fois supérieures pour les terres arables et les zones
urbanisées, et même trois fois supérieures pour les fruticées. En revanche, le paysage de
Préserville a des surfaces maximales en prairie et en bois plus de deux fois supérieures.
Les deux paysages illustrent des paysages anthropisés, peu représentés par des FVS non
arborées. Le paysage de Nailloux est plus marqué par l’intensification et l’artificialisation,
représenté par des terres arables et des zones urbanisées plus étendues. Toutefois, il présente
également de plus vastes FVS comme les pelouses et fruticées. Le paysage de Préserville
présente des prairies et surtout des bois bien plus grands, illustrant une fragmentation et une
intensification (maintien de grandes parcelles de prairies) moindres du paysage.
1. 1. 2 -
Fragmentation des taches boisées
La manifestation de la fragmentation des taches boisées est plus particulièrement soulignée
par l’étude de leur forme, de la distance aux autres taches boisées et des taches environnantes.
-
Indice de forme
Nailloux
Préserville
PSI moy
1,429
1,024
Écart-type
0,035
0,027
Tableau 6.
PSI moyen et écart-type, pour les taches boisées
Cet attribut n’est signifiant que pour les formations à végétation spontanée et en particulier
pour les bois, puisqu’il met en évidence les phénomènes d’effet de lisère, connus pour avoir
une incidence sur la composition floristique des formations boisées (Murcia, 1995 ; Kollmann
et al., 1997). Le rapport moyen est 1,4 fois plus grand pour le paysage de Nailloux, avec un
écart-type supérieur. Or, le rapport est d’autant plus grand que la forme de la tache est
irrégulière. Le résultat indique donc que les bois sur Nailloux présentent, en moyenne, des
formes plus irrégulières, les rendant plus sujets à des phénomènes d’effet-lisière et témoignant
d’une plus grande fragmentation. Ce phénomène a d’autant plus d’incidence que le bois
concerné est isolé des autres, dans le paysage. Cet isolement s’exprime par la distance entre
les taches boisées.
90
-
Distance moyenne au plus proche voisin
Elle exprime la distance minimale entre deux taches boisées et illustre communément les
possibilités offertes par les milieux à la dispersion et à la colonisation des espèces végétales.
Dist min
Écart-type
382
383
233
176
Nailloux
Préserville
Tableau 7.
Distance minimale et écart-type, pour les taches boisées
Remarque
Deux taches boisées peuvent être contiguës dans le cas où elles sont séparées par une route et
dans le cas où elles correspondent à des physionomies différentes du taillis, la distance est
alors égale à zéro. Hors taches contiguës, la distance minimale est pratiquement égale pour les
deux paysages (environ 380 m), ce qui exprime, en moyenne, une répartition et un isolement
des taches boisées, dans le paysage, égaux. Cette distance minimale signifie que les espèces
végétales ont, en moyenne, une distance de 380 m à franchir pour assurer leur dispersion dans
le paysage et coloniser une autre tache boisée.
-
Voisinage
Cet attribut exprime le nombre de TOS différents autour de chaque tache boisée, en
distinguant les TOS caractérisant les FVA et ceux caractérisant les FVS. Il révèle ainsi le
niveau de contrainte pour la dispersion des espèces végétales, cette contrainte étant d’autant
plus forte que les taches environnantes sont de nature différente. Accentuant la fragmentation,
cette contrainte évoque la capacité d’accueil du paysage, les FVA se comportent comme des
milieux hostiles à la dispersion et les FVS comme des milieux favorables (cf. p.41)
Différentes combinaisons existent dont la proportion est résumée dans la figure ci-dessous.
Aux extrêmes, nous avons des taches boisées entourées seulement de FVA et des taches
entourées de 2 types différents de FVA et 3 types différents de FVS.
2
4
7
4
5
32
16
40
4
29
8
16
32
1FVA 0FVS
2FVA 0FVS
1FVA 1FVS
1FVA 2FVS
Nailloux
2FVA 1FVS
Préserville
2FVA 2FVS
2FVA 3FVS
Figure 15. Voisinage des taches boisées, % du nombre de taches totales
La proportion correspond au nombre de taches (%) par rapport au nombre total de taches,
pour chaque combinaison de voisinage existante. 56% (40 et 16) pour Nailloux et 40% (32 et
91
8) pour Préserville des taches boisées ne sont entourées que par des FVA, notamment des
terres arables. La fréquence de cette combinaison est particulièrement importante à Nailloux.
Pour les deux sites, les autres taches sont surtout entourées par un type de FVA et un type de
FVS (1FVA 1FVS). Pour Préserville, les taches peuvent être entourées jusqu’à trois types
représentant des FVS différents. Pour les deux sites, il n’y a pas de tache boisée entourée
uniquement de TOS représentant des FVS.
À Nailloux, les taches boisées sont plus isolées entre elles qu’à Préserville. Cet isolement
augmente la contrainte pour les espèces végétales propres aux milieux boisés de franchir la
barrière constituée par les formations environnantes, le paysage de Nailloux offre donc des
capacités d’accueil plus faibles. Les taches boisées étant systématiquement entourées par au
moins un TOS représentant des terres arables, pour les deux sites d’étude, elles caractérisent
des paysages agricoles fortement anthropisés, dominés par des parcelles de terres arables.
-
Rapport entre états d’écosystèmes sur une même trajectoire
Ce rapport exprime la proportion de bois sous forme de taillis jeune, clair et mature. Pour les
deux communes, les bois sont sous forme de taillis mature, exclusivement pour Nailloux et
presque exclusivement pour Préserville, une parcelle étant sous forme de taillis jeune. Les
bois, pour les deux paysages, n’ont pas été récemment exploités, ce qui diminue
l’hétérogénéité paysagère.
1. 2 -
L’hétérogénéité spatiale des paysages influence leur capacité d’accueil
L’analyse actuelle des formations végétales qualifiées par un type d’occupation du sol (TOS)
et composant des paysages singuliers nous a permis de mettre en évidence les variations de
l’organisation spatiale des paysages en réponse à des usages différents de l’espace. Plus
particulièrement, l’analyse montre l’importance de prendre en compte les attributs spatiaux
dans la connaissance de la fragmentation et de l’hétérogénéité spatiale des paysages, pour
finalement mettre en évidence la capacité d’accueil du paysage. Ainsi, d’après l’analyse des
attributs spatiaux pour les deux sites en 1998 illustrant l’état actuel du paysage, nous pouvons
dire que les deux paysages appartenant pourtant au même terroir lauragais, caractérisé par une
agriculture intensive moderne, ne présentent pas la même organisation spatiale. Si le
morcellement global identifié par le nombre de taches total sur les deux sites et
l’intensification exprimée par la surface de terres arables sont sensiblement égaux, l’analyse
détaillée de l’organisation spatiale révèle des différences, identifiées au niveau des
caractéristiques des taches. Ainsi, le paysage de Nailloux est plus diversifié, représenté à
l’instar du site de Préserville, par la vigne ; est plus représenté par des surfaces en pelouse
mais moins par des surfaces en prairie et bois. Les pelouses et les fruticées peuvent y être plus
étendues, ce qui n’est pas le cas des prairies, plus étendues sur le site de Préserville. Cette
différence de richesse d’habitat estimée par la surface totale montre-t-elle une différence de
composition floristique ? Cet aspect restera à analyser dans les prochains chapitres.
Les deux sites illustrent des paysages artificialisés, dominés par les terres arables, où très peu
de surfaces sont consacrées aux formations à végétation spontanée, qui sont dispersées dans
les paysages et de petite taille. L’occupation du paysage de Nailloux, représentée par des
parcelles agricoles et urbanisées plus étendues, témoigne d’une artificialisation plus
marquée, causée par des activités humaines plus intenses. Concernant les bois, les différents
92
résultats attestent d’une plus forte fragmentation pour le paysage de Nailloux avec des
taches boisées dont la surface est en moyenne plus réduite, pouvant être plus petites mais
jamais plus grandes. De plus, leurs formes sont, en moyenne, plus irrégulières. L’isolement
des taches est en moyenne identique quel que soit le paysage, mais il montre une amplitude
plus large sur Nailloux. De ces variations de l’organisation spatiale du paysage, nous pouvons
apprécier la capacité d’accueil du paysage qui exprime les possibilités de colonisation et de
dispersion pour les espèces végétales. Elle correspond à la combinaison des attributs relatifs à
la surface, à la distance et au voisinage, appréciés pour les taches boisées. Aux vues des
comparaisons précédemment effectuées, nous pouvons conclure que le paysage de Nailloux
possède une capacité d’accueil moindre que celui de Préserville, accentuée par une
intensification plus importante. Cette capacité est atténuée pour les deux sites par des
formations boisées très peu exploitées ne créant pas de stades intermédiaires, connus pourtant
pour renfermer une composition floristique riche et diversifiée, et ne favorisant pas
l’hétérogénéité paysagère.
Les raisons d’une organisation spatiale différente pour les deux sites sont multiples. Nous
estimons que cette différence est notamment due à des usages différents de l’espace, euxmêmes dictés en partie par des conditions de terrain dissemblables. Ces variations d’usages
sont fortement dépendantes du choix personnel des générations de propriétaires terriens qui se
sont succédés. La présence de parcelles de vigne sur le site de Nailloux en est le reflet. Ces
variations peuvent aussi être dictées par des politiques d’aménagement du territoire
différentes. Ce postulat est illustré par la présence plus importante de pelouses de coteaux sur
le site de Nailloux, qui correspondent à la recolonisation de sols nus, apparus suite à de
récents aménagements urbains (pelouses autour du lac de la Thésauque). L’explication de bois
plus fragmentés sur le site de Nailloux est moins évidente. Elle correspond probablement à la
résultante de la combinaison de plusieurs facteurs : le relief, le choix des agriculteurs, le
développement urbain. Les différences constatées entre les deux sites sont liées à des usages
différents de l’espace, qui sont pratiqués actuellement. Ils peuvent également avoir eu lieu
dans le passé et s’exprimer avec un décalage ou se maintenir dans le temps. Par exemple, la
faible proportion actuelle de prairies est le résultat de transformations passées, dictées par des
orientations de recherche de rendement agricole, où les terres en prairies ont été labourées
pour satisfaire à cette nouvelle demande. Il est donc nécessaire de prendre en compte et de
comprendre l’état du paysage passé pour saisir les processus influençant l’organisation
actuelle du paysage et ses variations. C’est ce que nous nous attachons à faire maintenant.
93
Photo 8.
Pelouse et bois apparus autour du lac aménagé, Nailloux (Schwal)
Photo 9.
Vastes bois, Préserville (Schwal)
Photo 10. Vaste prairie méso-hygrophile, Préserville (Schwal)
W
94
2-
Évolution de l’organisation des formations végétales : analyse
diachronique
Cette partie se base sur l’analyse diachronique des formations végétales identifiées par un
type d’occupation du sol (TOS) et de leur structure, dans le but de mettre en évidence et de
comprendre les changements de l’organisation spatiale des structures paysagères au cours du
temps sous l’impulsion des activités humaines. Pour cela, nous étudions d’une part l’évolution
des attributs spatiaux et d’autre part les grands traits d’évolution (maintien, régression,
expansion) qui ont touché les formations végétales depuis 1834, date définie comme le degré
initial d’intensification, sur les deux sites. Nous supposons que les FVS se sont maintenues
dans les milieux non propices à la mise en valeur agricole (fortes pentes et versants nord) et
pensons que l’évolution des FVS est en rapport avec les qualités offertes par le milieu et
l’intensification des pratiques agricoles.
Les données sont extraites des cadastres et photographies, datant de 1834, 1946(8),
1970(2)(8), 1993 et 1998, dont le choix a été précédemment justifié (cf. p.72). L’écart assez
important entre les deux premières dates d’étude (1834 et 1946) est pallié par la connaissance
de l’histoire du mode rural entre ces deux périodes (cf. p.64) qui nous permet de dire que peu
de transformations du paysage se sont opérées entre 1834 et 1946. Deux vagues importantes
d’exode durant le XIXe siècle ont freiné le développement de l’agriculture. Ce retard agricole
est accentué par des propriétaires peu entreprenants. L’exploitation de petite taille est celle qui
réussit le mieux, entraînant un parcellaire très morcelé. D’après les documents historiques, au
début du XXe siècle, Nailloux est constitué de 86% de sols en labour (80% en 1834 et 87% en
1946), indiquant que le paysage du début du XXe siècle est resté globalement inchangé
jusqu’en 1946, les transformations du paysage étant dictées par l’agriculture.
L’analyse diachronique est précédée par celle du paysage en 1834, pour les deux sites, qui
illustre l’état de référence du paysage, considéré comme le degré initial d’intensification.
2. 1 -
Un état de référence du paysage, 1834. Des paysages différemment organisés
pour les deux sites
95
Nailloux
Préserville
étendue d’eau
terre arable
vigne
zone urbaine
prairie
pelouse
fruticée
taillis
cours d’eau
route
N
1
2 km
Figure 16. Carte d’occupation du sol, 1834
96
Surface
ha
TOS, 1834
Étendue d’eau
Terre agricole
Vigne
Zone urbaine
Pelouse
Prairie
Fruticée
Bois
TOS, 1834
Étendue d’eau
Terre agricole
Vigne
Zone urbaine
Pelouse
Prairie
Fruticée
Bois
Tableau 8.
Nail
0
1504
118
41
12
16
0
185
Périmètre
%
Prés
0
869
74
11
23
51
0
158
Nail
0
80
6
2
1
1
0
10
Surface moyenne
des parcelles, m2
Nail
Prés
0
0
14873
13410
2703
11913
4896
1292
4164
2940
3723
9357
0
0
1432
37619
m
%
Prés
Nail
Prés
Nail
0
0
0
0
74 488763 308002 70
6
110610 27941
15
1
19819 12549
3
2
9300 19092
1
4
13437 24569
2
0
0
0
0
13
63175 34323
9
Surface minimale,
m2
Nail
Prés
0
0
99
139
67
485
142
78
269
138
130
229
0
0
460
159
Prés
0
72
7
3
4
6
0
8
Nombre parcelles
absolu
%
Nail Prés
Nail
0
0
0
1011 648
59
438
62
25
83
83
5
28
77
2
43
54
2
0
0
0
129
42
7
Prés
0
67
6
9
8
6
0
4
Surface maximale,
m2
Nail
Prés
0
0
265439
106557
57248
84532
159335
8311
13993
26059
22283
165568
0
0
285990
497420
Valeurs des attributs des TOS, pour les sites de Nailloux et Préserville
L’analyse est en particulier menée à partir de l’étude du morcellement.
-
Morcellement
Estimé par le rapport du nombre de taches par rapport à la surface totale, il exprime le degré
de fragmentation des TOS. Le rapport est d’autant plus élevé que le morcellement est
important.
Nailloux Préserville
bois
0,7
0,3
pelouse
2,4
3,4
prairie
2,7
1,1
vigne
3,7
0,8
zone urbanisée
2,0
7,7
terres agricoles
0,7
0,7
Tableau 9. Morcellement (nombre de taches/surface totale), en 1834
D’après la Figure 16 et les Tableau 8 et Tableau 9, les deux paysages sont dominés par des
terres arables qui témoignent d’une pratique agricole ancienne. Les bois ont également une
extension relativement grande. Le morcellement des terres arables est identique pour les deux
paysages, indiquant une intensification identique de l’agriculture en 1834. Les vignes
occupent en proportion la même étendue, mais pour Nailloux, le morcellement est quatre fois
plus important (parcelles quatre fois plus nombreuses et quatre fois moins grandes en
moyenne). Sur les deux sites, les vignes sont voisines de bois ou de terres arables. Or, d’après
les documents historiques, les vignes sont fréquemment plantées à proximité des exploitations
agricoles, tout comme les bois, utilisés tous deux, pour la consommation personnelle. La zone
97
urbanisée est deux fois plus étendue à Nailloux, représentée par des parcelles en moyenne
quatre fois plus grandes et trois fois moins morcelées que sur Préserville.
A surface totale égale, le paysage de Préserville est plus représenté par des FVS : deux fois
plus de pelouses avec des taches plus petites en moyenne et plus nombreuses, quatre fois plus
de prairies en moyenne plus étendues. Les bois, uniformément répartis sur l’ensemble des
deux paysages, étendus sur le paysage de Préserville sont de petite taille sur celui de Nailloux,
donc plus fragmentés (d’après les données du MNT, les deux tiers des bois de Préserville sont
en exposition Nord situés sur une pente moyenne de 5%, variant de 2,5 à 9%). La surface
moyenne des taches boisées pour Préserville est 26 fois plus grande. Parfois deux fois plus
petites, elles peuvent être également deux fois plus grandes qu’à Nailloux. Les fruticées ne
sont pas signalées sur le document source (plan cadastral). Est-ce à dire qu’il n’y en avait pas
à l’époque ? Il n’y a pas d’étendue d’eau de surface suffisamment grande pour avoir été
signalée. D’après la bibliographie sur le XIXe siècle, les mares et autres petites étendues
d’eau étaient fréquentes dans les propriétés agricoles.
Les deux paysages se différencient l’un de l’autre par des parcelles boisées et en prairie plus
étendues sur Préserville, des zones urbaines et des vignes plus importantes sur Nailloux. Les
deux sites ne montrent pas la même organisation spatiale en 1834 et n’offrent donc pas les
mêmes conditions de dispersion et de colonisation pour les espèces végétales, dont l’analyse
sera menée dans les prochains chapitres. Nous analysons maintenant l’évolution de
l’organisation spatiale à travers les attributs caractéristiques des taches.
2. 2 -
Étude diachronique des attributs spatiaux
Les attributs spatiaux pris en compte apportent des informations sur l’hétérogénéité
temporelle des paysages. Ils permettent de témoigner de la fragmentation des FVS et de
mettre en évidence l’intensification et l’artificialisation des paysages au cours du temps.
L’étude s’organise en deux parties : tout d’abord, nous prenons en compte le paysage dans
son ensemble et en étudions la structure. Ensuite, nous prenons en compte les taches boisées
afin d’illustrer la fragmentation au cours du temps.
2. 2. 1 -
Structure du paysage
Les attributs étudiés sont la surface, la physionomie des bois et le morcellement.
a-
Évolution de la surface des TOS
Les figures suivantes présentent, pour chaque site, la surface par TOS et le nombre de taches
correspondant pour les différentes dates étudiées. Le tableau sous le graphique indique
l’évolution globale de la surface estimée en %, entre 1834 et 1998.
Remarque
La forte proportion des terres agricoles impose l’emploi d’une échelle différente.
98
Figure 17. Évolution de la surface par TOS (ha), Nailloux. Les valeurs indiquées au-dessus des
barres correspondent au nombre de taches
Figure 18. Évolution de la surface par TOS (ha), Préserville. Les valeurs indiquées au-dessus des
barres correspondent au nombre de taches
99
L’observation de la surface pour chaque TOS montre des variations d’une période à l’autre.
Afin de comprendre la nature de ces variations, nous étudions, pour les deux sites, la
dynamique des parcelles entre deux dates, 1834-1946, 1946-1972(8), 1972(8)-1993, 19931998. Pour cela, les cartes d’occupation du sol sont superposées grâce à une procédure
automatisée lancée sous GeoConcept (superposition des taches). Dans les cartes dynamiques
obtenues, les taches de surface inférieure à 50 m2 sont ignorées. La description analytique de
cette évolution (cf. Figure 17 et Figure 18) est réalisée à deux niveaux : évolution globale et
évolution détaillée. L’évolution est globale lorsque nous envisageons la variation entre les
deux dates extrêmes (1834 et 1998), et détaillée lorsque nous considérons les variations pour
les dates intermédiaires (1946-1972-1993). Une tentative d’explication sera réalisée dans une
synthèse (cf. p.107). Nous observons, pour chacun des types d’occupation du sol,
- Bois
Pour Nailloux et Préserville, une diminution des surfaces, après 1834. Pour Nailloux, après
une première phase de diminution de la surface boisée entre 1834 et 1946, par conversion en
terres arables (120 ha), pelouses ou prairies (4 ha), zones urbanisées (4 ha) et vignes (2 ha), la
surface des bois augmente entre 1946 et 1972, surtout due à l’évolution de terres arables et
des vignes abandonnées (environ 40 ha) et à l’abandon de quelques hectares de zones
urbaines et de pelouses. Une nouvelle diminution de la surface boisée entre 1972 et 1993
correspond à la conversion de nombreuses parcelles boisées en terres arables (25 ha), en
pelouses (4 ha) et zone urbaine (2 ha), par défrichement. Une dernière augmentation de la
surface boisée entre 1993 et 1998 provient de l’abandon de 35 ha de terres, de l’évolution
spontanée de fruticées (12 ha). Pour Préserville, diminution jusqu’en 1978. Entre 1834, 1946
et 1978, les bois sont remplacés par des terres arables (48 ha et 17 ha, sur des terrains exposés
à l’Est et au Nord principalement, sur pente faible à forte) et des pelouses et prairies (16 ha et
4 ha, surtout exposées au nord sur des pentes assez fortes pour les pelouses et assez faibles
pour les prairies entre 1834 et 1946). Entre 1834 et 1946, ils sont également remplacés par des
vignes (8 ha), et entre 1946 et 1978 par des zones urbanisées (5 ha).
- Pelouse
Pour Nailloux, une augmentation globale de la surface (avec une surface maximale en 1993).
Dans une première période entre 1946 et 1993, les pelouses augmentent en raison
principalement de l’abandon de terres arables et de vignes (30 ha et 40 ha) (cette apparition
est certainement liée à celle des tracteurs et des techniques modernes de culture) et à la
régression (par défrichement ?), entre 1972 et 1993, de parcelles boisées (4 ha). Dans une
deuxième période entre 1993 et 1998, les pelouses diminuent, converties en terres arables (25
ha), en zone urbanisée (7 ha), ou n’étant pas entretenues évoluent vers la fruticée et la forêt
(10 ha). Après une période de modernisation agricole qui entraîne des contraintes dans les
possibilités d’exploitation, les terres arables délaissées évoluent vers les pelouses qui sont par
la suite converties en zone urbaine. À l’inverse, pour Préserville, une diminution globale des
surfaces. Après une première période d’augmentation entre 1834 et 1946, à la défaveur des
terres arables (50 ha), des bois (11 ha) et des vignes (5 ha), les pelouses diminuent depuis
1946, converties en terres arables (48, 19 et 12 ha entre 1946 - 1978 - 1993 - 1998) et zones
urbanisées (7, 8 et 5 ha entre 1946 - 1978 - 1993 - 1998). Certaines ont évolué en fruticées
(1,6 et 1,7 ha entre 1978 - 1993 - 1998) et en bois (5,4 et 2,6 ha entre 1946 - 1978 - 1993).
- Prairies
Pour Nailloux et Préserville, une disparition brutale et presque totale, retournées et converties
en terres labourables (pour Nailloux, 14 et 2 ha entre 1972 - 1993 - 1998) (pour Préserville,
48, 12 et 2 ha entre 1946 - 1978 - 1993 - 1998). Pour Nailloux, d’autres non entretenues
évoluent vers la fruticée (2 ha entre 1972 et 1993).
100
- Vignes
Pour Nailloux et Préserville, une disparition constante et presque totale depuis 1834,
converties en terres arables (pour Nailloux 100, 30, 13 et 1,5 ha entre 1834 - 1946 - 1972 1993 - 1998) (pour Préserville 55, 45, 6 et 1 ha entre 1834 - 1946 - 1978 - 1993 - 1998), en
zones urbanisées (pour Nailloux 3 et 2 ha entre 1834 - 1946 - 1972) (pour Préserville 2,7 ha
entre 1834 et 1946), évoluant en FVS, pelouses, prairies, fruticées (pour Nailloux 1,4 et 3,5 ha
entre 1834 - 1946 - 1972) (pour Préserville 5 et 1,7 ha entre 1834 - 1946 - 1978) et bois (pour
Nailloux 4 et 1,5 ha entre 1834 - 1946 - 1972) (pour Préserville 3 ha entre 1834 et 1946).
- Zone urbanisée
Pour Nailloux et Préserville, une augmentation constante de la surface. Cette augmentation
s’est faite au détriment de terres arables (pour Nailloux 45, 30, 51, 45 ha entre 1834 - 1946 1972 - 1993 - 1998) (pour Préserville 32, 17, 24, 28 ha entre 1834 - 1946 - 1978 - 1993 1998), de vignes (pour Nailloux 3 et 2 ha entre 1834 - 1946 - 1972) (pour Préserville 2,7 ha
entre 1834 et 1946, 1,6 ha entre 1978 et 1993), de pelouses (pour Nailloux 1 ha entre 1834 et
1946, 3 et 7 ha entre 1972 et 1998) (pour Préserville 7, 8, 5 ha entre 1946 - 1978 - 1993 1998), de fruticées (pour Nailloux 1 ha entre 1972 et 1993) (pour Préserville 1,5 ha entre 1993
et 1998) et de bois (pour Nailloux 4 ha entre 1834 et 1946, 2 et 1 ha entre 1972 - 1993 - 1998)
(pour Préserville 5, 2 et 4 ha entre 1946 - 1978 - 1993 - 1998). L’urbanisation suit donc une
même dynamique.
- Terres arables
Pour Nailloux et Préserville, une légère augmentation globale de la surface. Pour Nailloux,
d’abord une augmentation entre 1834 et 1946, due à la conversion de bois (120 ha), vignes
(100 ha), prairies (12 ha), pelouses (7 ha), anciennes fermes (3 ha). Puis une diminution
constante entre 1946 - 1972 - 1993 - 1998, remplacées par des zones urbanisées (30, 51 et 45
ha entre 1946 - 1972 - 1993 - 1998), des vignes (13 ha entre 1946 et 1972), des formations à
végétation spontanée - bois (33, 12, 35 ha entre 1946 - 1972 - 1993 - 1998), pelouses, prairies
et fruticées (47, 46 et 15 ha entre 1946 - 1972 - 1993 - 1998), et une étendue d’eau (11 ha
entre 1972 et 1993). Pour Préserville, elles remplacent entre 1834 - 1946 - 1978, des vignes
(55 ha et 45 ha), des zones urbaines (4 ha et 14 ha), des bois (48 ha et 17 ha), des pelouses et
des prairies (26 ha et 96 ha).
Des surfaces d’un nouveau type apparaissent pour les deux sites.
- Etendue d’eau après 1972-78
Pour Nailloux, aménagée en 1970 sur des terres arables (11 ha) et des bois (2 ha). Ce lac, de
la Thésauque, marque une nouvelle valorisation de l’espace, tournée vers le loisir. Pour
Préserville, en remplacement de terres arables (1,5 ha), elle correspond à un petit lac de
particulier.
- Fruticées
Pour Nailloux et Préserville, apparition après 1834 et 1946, en raison de l’abandon de terres
arables (pour Nailloux 4 et 3 ha entre 1972 - 1993 - 1998) (pour Préserville 0,4 et 1,4 ha entre
1834 -1946 - 1978). Cette dynamique est contrainte par l’emploi de machines puissantes et
lourdes (pour Préserville, beaucoup de terres arables sont exposées à l’Ouest sur des pentes
relativement fortes.), de défrichement de bois (pour Nailloux, 1 ha entre 1946 et 1972) (pour
Préserville 0,3, 1,3 et 2,7 ha entre 1834 et 1993) et pour Préserville, de l’évolution de
pelouses (1,6 ha entre 1978 et 1993).
101
b-
Rapport entre états d’écosystèmes sur une même trajectoire, pour les bois
La distinction faite des différents stades boisés permet d’analyser l’exploitation des bois
depuis 1946. En 1834, aucune distinction n’est faite entre les différents stades du taillis.
Cependant, la littérature laisse présager des bois fréquemment exploités au début du XIXe
siècle (cf. p.62). Pour Nailloux et Préserville, en 1946, les bois sont présents notamment sous
forme de taillis non mâture (jeune et clair). Ceci reflète une exploitation antérieure importante
des bois (seconde Guerre Mondiale, besoin de bois pour le chauffage et le charbon de bois).
Nous notons une bien plus faible proportion de ces stades dans les périodes postérieures,
révélant une absence de coupes de bois après 1972. Pour Préserville, notons toutefois une
période de coupe entre 1978 et 1993, que nous n’avons pas révélé pour Nailloux.
c-
Évolution du morcellement
Le morcellement est mis en évidence par le rapport nb/srfce, calculé aux différentes dates (cf.
Figure 19).
- Bois
D’une manière générale, les bois sont plus morcelés à Nailloux, quelle que soit la période,
même si le morcellement diminue au fur et à mesure. Notons pour les deux sites une
augmentation du morcellement entre 1834 et 1946.
- Fruticée
Morcellement relativement identique, sauf en 1970, où les fruticées sur Nailloux sont plus
morcelées.
- Pelouse
Après une phase de diminution entre 1834 et 1993, le morcellement augmente. Les pelouses
sur Nailloux étant moins morcelées.
- Prairie
Le morcellement sur Nailloux diminue progressivement. Sur Préserville, d’abord moins
morcelées jusqu’en 1970, les prairies le sont ensuite plus.
- Vigne
Diminution constante du morcellement sur Nailloux. Augmentation sur Préserville, alors que
le nombre de taches diminue jusqu’à être nul.
- Zone urbaine
Le morcellement diminue pour les deux communes avec l’agrégation des habitations en zones
plus denses et la disparition d’anciennes exploitations agricoles.
- Terres arables
Le morcellement diminue constamment pour les deux communes, celui sur Préserville étant
toujours inférieur. Cette dynamique est le résultat des périodes de remembrement,
reparcellisation.
102
Figure 19. Évolution du morcellement : rapport du nombre de taches sur la surface des TOS
Nailloux(gris clair), Préserville (gris foncé)
103
2. 2. 2 -
Fragmentation des taches boisées
Après nous être intéressés à la structure du paysage, nous nous penchons maintenant sur les
taches boisées au niveau desquelles s’exprime la fragmentation. Les attributs spatiaux des
taches boisées étudiés sont l’indice de forme (PSI), le nombre de taches, la distance minimale
entre taches et la surface moyenne des taches.
-
Évolution du PSI moyen et nombre de taches
Figure 20. Évolution du PSI et du nombre de taches, entre 1834 et 1998, pour les deux sites
Les deux paysages montrent une évolution du PSI moyen opposée. Globalement, l’indice
augmente au cours du temps à Nailloux alors qu’il diminue à Préserville, et cet indice est
toujours plus élevé à Nailloux. Ceci indique une augmentation de la complexité des formes et
une augmentation de la fragmentation des bois pour le premier paysage et une diminution
pour le second. Pour Nailloux, nous observons une diminution intermédiaire entre 1834 et
1946, en parallèle à une diminution du nombre de taches boisées. Puis les deux attributs
augmentent jusqu’en 1993. Dans la dernière période, nous assistons à une nouvelle évolution
marquée par l’augmentation du PSI et la diminution du nombre de taches. Ceci indiquerait le
maintien des taches les plus fragmentées. Pour Préserville, les deux attributs évoluent à peu
prés de la même manière vers une diminution. Comme pour Nailloux, la diminution du
nombre de taches entre 1834 et 1946 s’accompagne d’une diminution du PSI, mais qui est
bien plus faible, ce qui témoigne de bois peu fragmentés.
-
Évolution de la distance minimale moyenne et confrontation à la surface moyenne
Figure 21. Évolution de la distance moyenne et de la surface moyenne des taches, entre 1834 et
1998, pour les deux sites
104
Ces attributs sont utilisés pour mettre en évidence l’évolution de l’isolement. Globalement, la
distance minimale moyenne est égale et augmente pour les deux paysages, avec des variations
intermédiaires. Ceci traduit un isolement croissant des taches boisées. Pour les deux paysages,
nous observons une forte augmentation de la distance entre 1834 et 1946. Cette augmentation
est parallèle à une diminution de la surface moyenne des taches sur Nailloux. Par contre, elle
est parallèle à une augmentation de la surface sur Préserville, l’isolement étant fonction de la
surface des taches mais aussi du nombre de taches.
Nous constatons donc un isolement accru des taches boisées entre 1834 et 1946
(défrichement, forte exploitation des bois), diminution de l’isolement entre 1946 et 1972
(végétalisation par abandon de terres arables et dynamique progressive par abandon du
pâturage des pelouses), puis augmentation jusqu’en 1998, pour les deux paysages.
2. 3 -
Étude des grands traits d’évolution du paysage
Dans le but de mettre en évidence les grands traits d’évolution du paysage et son degré
d’artificialisation, nous étudions la dynamique des formations végétales qui s’est opérée en un
siècle et demi, en croisant les couches d’information géographique disponibles pour les dates
extrêmes, illustrant les états de référence du paysage (1834 et 1998) et pour les deux sites. Les
informations sont superposées par une procédure automatisée basée sur la prise en compte des
intersections, sous le logiciel GeoConcept. Cette procédure permet de connaître le devenir des
parcelles identifiées par un TOS, entre les périodes d’étude. La carte de synthèse qui en
résulte présente les grands traits d’évolution pour chaque parcelle identifiée, réunis selon trois
types de dynamique (cf. Figure 22). Ces types s’appuient sur la prise en compte du degré
d’artificialisation des formations végétales (FVA et FVS) qui ont déjà été étudiées dans ce
chapitre (cf. p.76). Nous distinguons,
-
Les dynamiques progressives au cours du temps qui illustrent une tendance au
boisement (végétalisation) du paysage, par apparition ou progression dans les
stades de succession des FVS.
-
Les dynamiques régressives au cours du temps qui illustrent une artificialisation ou
une intensification du paysage, par disparition ou régression dans les stades de
succession des FVS, au profit des FVA.
-
Les zones stables, qui illustrent les formations présentes à la première date et qui se
sont maintenues jusqu’à nos jours, en distinguant les FVS et les FVA. Ces zones
traduisent une ‘continuité biologique d’existence’, (Moreno, com. or., 2000).
La connaissance de la surface représentée par les différents types de dynamique permet
d’évaluer et de comparer le degré d’artificialisation du paysage, au cours du temps, pour les
deux sites (cf. Tableau 10).
105
Légende
Zone stable, Formation à Végétation Spontanée
Zone stable, Formation Végétale Artificialisée
Dynamique régressive, artificialisation
Dynamique progressive, végétalisation
N
1
2 km
Nailloux
Préserville
Figure 22. Types de dynamique pour les deux sites d’étude
Nailloux
Préserville
Zones stables
FVA
FVS
1323 - 70,6%
65,1 - 3,5%
813,4 - 67,8%
83,9 - 7%
Dynamique
régressive
358,7 - 19,2%
271,7 - 22,6%
Dynamique
progressive
125,1 - 6,7%
31,3 - 2,6%
Tableau 10. Surfaces, en ha et % de la surface totale, des types de dynamique
106
Dans l’ensemble, les paysages conservent une physionomie semblable, les trois quarts de la
surface totale restant inchangés (zones stables) et représentés en grande majorité par des FVA,
illustrant l’artificialisation poussée de ces paysages. Par ailleurs, il semble que le site de
Nailloux soit moins sujet à une artificialisation du paysage depuis 1834 puisque moins de
dynamiques régressives s’y sont opérées et qu’en parallèle, plus de dynamiques progressives
ont eu lieu. L’explication interprétative de ces différences est réalisée par la suite, en prenant
en compte les données de terrain et les évolutions transitoires.
2. 4 -
Synthèse : une hétérogénéité temporelle des paysages en relation avec des
pratiques agricoles évolutives
La dynamique de l’ensemble des taches, regroupées par Type d’Occupation du Sol, entre
1834 et 1998, apporte des indications sur les transformations de l’occupation du sol opérées
sur les deux sites en un siècle et demi, ainsi que sur les surfaces mises en jeu et l’intensité des
dynamiques, et permet au final d’interpréter les évolutions transitoires. Sur les deux schémas
ci-dessous (Figure 23 et Figure 24), seules les dynamiques les plus importantes en terme de
surface sont présentées.
107
Figure 23. Dynamique des taches, pour chaque Type d’Occupation du Sol, entre 1834 et 1998,
commune de Nailloux, seules les dynamiques les plus importantes en terme de surface sont
présentées
108
Figure 24. Dynamique des taches, pour chaque Type d’Occupation du Sol, entre 1834 et 1998,
commune de Préserville, seules les dynamiques les plus importantes en terme de surface sont
présentées
109
Nous procédons, maintenant, au descriptif explicatif des dynamiques détaillées dans les deux
schémas précédemment présentés, pour chaque TOS, en relation avec l’ensemble des résultats
obtenus dans l’analyse de l’évolution de l’organisation des formations végétales. Les données
de terrain extraites du MNT sont employées pour comprendre l’organisation spatiale des
formations végétales au cours du temps et les dynamiques mises en évidence, à savoir les
conditions dans lesquelles certaines FVS ont disparu au profit des FVA, sont apparues ou se
sont maintenues.
Nous constatons, pour les deux paysages, peu de dynamiques progressives, quelle que soit la
période, en partie dues à une faible représentation des FVS dans le paysage. Globalement, le
paysage de Nailloux est plus sujet au cours du temps à des transformations de l’occupation du
sol et à des modifications du parcellaire, avec une tendance à la diminution de l’occurrence de
ces transformations, pour les deux paysages (diminution du nombre total de dynamiques par
période). Les deux schémas précédents montrent une importante période de végétalisation
entre 1946 et 1972, que nous supposons liée au réaménagement du parcellaire induit par la
modernisation de l’agriculture (entre 1834 et 1946 comme entre 1946 et 1972, les terres
arables transformées se situent principalement en versant nord et ouest sur des pentes pouvant
être très fortes pour Préserville).
-
Marqués par une agriculture ancienne, les deux paysages sont dominés par des terres
arables dont le parcellaire a été agrandi au fur et à mesure par fusion de petites parcelles
et remplacement de FVS.
• À Nailloux, la surface occupée par les terres arables diminue après 1946, conséquence
de la modernisation de l’agriculture qui contraint l’abandon de la culture de certaines
parcelles situées sur des terrains peu propices à la mise en valeur agricole (forte pente
et exposition nord), à la faveur entre autre des FVS mais aussi de l’urbanisation.
• Pour Préserville, les terres augmentent constamment jusque dans les années 1990.
Cette observation peut dévoiler une activité rurale plus ancrée, mais aussi un impact
moins important de la modernisation de l’agriculture sur le parcellaire, en raison
probablement d’un relief moins accentué qui contraint moins la reparcellarisation
exigée par la mécanisation.
-
Les bois, en seconde place dans l’occupation du sol, font figure de reliques en souvenir
d’un très lointain passé où la couverture forestière dominait le paysage. Globalement, la
surface des bois diminue depuis 1834, mais les périodes intermédiaires démontrent un
usage différent entre les deux sites, avec l’évolution progressive des terres agricoles
abandonnées à Nailloux après 1993. Des conditions de terrain différentes, en relation avec
des activités influencées par des décisions personnelles, ont dicté la répartition et
l’étendue des taches boisées dans les paysages et leur évolution. Quelle que soit la
période, les taches sont réparties dans tout le paysage. Étendues sur Préserville, elles
correspondent à des fragments de taille réduite sur Nailloux. Défrichées pour satisfaire
l’aménagement du territoire, certaines taches boisées ont été transformées au cours du
temps en terre arable, vigne, zone urbanisée, pelouse ou prairie. Cette régression s’est
surtout déroulée pour les deux paysages entre 1834 et 1970, période marquée par deux
Guerres, grandes consommatrices de bois, où le morcellement et l’isolement des bois
augmentent. Parallèlement, avant 1970, la plupart des bois restant ont été exploités (tous
les 10-15 ans). Pour Nailloux, entre 1946 et 1998, des évolutions opposées (diminution,
augmentation de la surface) marquent l’état des milieux boisés, conséquence de
l’émergence et de l’expansion d’une agriculture moderne exigeant une nouvelle
organisation de l’espace. Actuellement, les bois sont peu ou pas exploités, manifestant une
ressource économique non valorisée.
110
-
Les vignes occupaient autrefois une place non négligeable dans l’espace agricole, mais
très fragmentées et dispersées dans le paysage. Elles étaient plantées sur une partie non
semée de l’exploitation agricole et assuraient l’approvisionnement en vin à l’ensemble des
occupants de l’exploitation. Elles ont vu leur surface régresser progressivement,
remplacées par des terres arables, des zones urbanisées et des FVS surtout entre 1834 et
1970, sous l’effet de plusieurs facteurs : crise phylloxérique dans les années 1880 (cf.
p.64), changement du mode d’exploitation (disparition des fermiers et autres employés qui
louaient leur service au propriétaire du domaine) et de mentalité des exploitants terriens
qui privilégient de plus en plus la culture céréalière, plus rentable et adaptée au terroir. Les
rares vignes restantes sur Nailloux témoignent plus de l’attachement de leurs propriétaires,
agriculteurs retraités, nostalgiques de l’époque d’une agriculture plus traditionnelle, que
d’une volonté de production viticole.
-
L’urbanisation est grandissante pour les deux sites, déjà plus marquée en 1834 à Nailloux,
avec un bourg assez étendu. L’urbanisation remplace toute sorte de formations. Pour les
deux sites, des constructions modernes sont apparues récemment, regroupées en
lotissement. La campagne, de moins en moins isolée de la ville grâce au développement
toujours plus poussé du réseau routier, offre des conditions d’accueil favorables à
l’installation de citadins non exploitants terriens (pour Préserville, situés plutôt sur des
pentes assez faibles). Parallèlement, les fermes d’anciennes exploitations agricoles
disparues sont démolies, remplacées par des terres arables.
-
Les pelouses regroupent sous ce terme les terres non exploitées colonisées par des plantes
herbacées de lumière, qui vont constituer un groupement dense. Leur localisation est
fortement influencée par les conditions physiques (pour Préserville, exposées surtout à
l’ouest sur des pentes relativement fortes à fortes). Elles peuvent être des vestiges
d’anciennes pâtures. L’absence d’entretien actuel entraîne leur progression vers des
formations végétales ligneuses.
• Les pelouses sont moins morcelées sur Nailloux, où leur surface est restée inchangée
jusqu’en 1946, illustrant leur fonction de zone de pâtures encore à cette date. Après
1946, les pelouses apparaissent en remplacement de terres arables et de vignes
délaissées, pour les causes précédemment énoncées (reparcellarisation lors de la
modernisation de l’agriculture contrainte par les conditions de terrain et crise du
phylloxéra). De plus, des parcelles boisées défrichées sont transformées en pelouse
entre 1834 et 1972, certainement pour satisfaire des besoins en pâtures. Après 1993,
certaines pelouses suivent une dynamique progressive par absence d’entretien, d’autres
sont transformées pour satisfaire les besoins socio-économiques (urbanisation,
expansion de l’agriculture).
• Pour Préserville, leur surface augmente entre 1834 et 1946, certainement pour satisfaire
des besoins en pâturage croissants. De plus, la crise agricole passée a entraîné
l’abandon de terrains cultivés, laissés en jachères qui ont ensuite évolué vers les
pelouses, d’après les connaissances historiques. Après 1946, certaines pelouses suivent
une dynamique progressive par absence d’entretien, d’autres sont transformées pour
satisfaire les besoins socio-économiques (urbanisation, expansion de l’agriculture).
Très peu de pelouses sont alors exposées au sud.
-
Les prairies, qui caractérisent des formations végétales herbacées sur terrain frais à
humide, entretenues par fauchage, ont fortement régressé sur les deux sites depuis le XIXe
siècle, transformées en terres arables, en relation d’une part avec la suppression de
l’emploi des animaux de trait nourris par le fourrage que fournissent les prairies et d’autre
111
part avec les conditions offertes par le milieu : sols meubles et riches, propices à une
agriculture à haut rendement. Le paysage de Préserville était représenté par une surface
double en 1834, avec des parcelles plus étendues, en raison probablement d’un relief
moins accentué.
-
Les fruticées n’apparaissent qu’après 1834, en remplacement de terres arables et de
vignes. Pour les deux sites, elles n’ont jamais occupé de grandes surfaces, correspondant à
un stade intermédiaire dans la dynamique de la végétation spontanée. Elles ont pu jouer,
au début du XXe siècle, le rôle de pâtures, peu entretenues.
-
Une étendue d’eau apparaît pour chaque site dans les années 1970. À Nailloux, cette
étendue est aménagée en réponse à une nouvelle demande de la part des résidents :
activités de loisir, contact avec la nature (projet de création d’une réserve naturelle
volontaire). À Préserville, elle correspond à un petit lac sur un terrain privé.
a- Fourré à Cornouiller, Nailloux
b- Pelouse à Brachypode, Préserville
Photo 11. a et b. Reconquête de la végétation sur des cultures abandonnées (Schwal)
Photo 12. Taillis, Préserville (Schwal)
Nous pouvons conclure que l’organisation spatiale des paysages représentés par les deux
sites et s’exprimant au niveau de l’occupation du sol, de la structure et de la distribution dans
l’espace des taches, est fortement influencée par l’activité agricole, qui va dicter la nature
et la structure des parcelles.
- Les deux paysages sont marqués par une agriculture ancienne. Le parcellaire agricole a été
agrandi au fur et à mesure par fusion de petites parcelles et remplacement de FVS (pelouses,
112
prairies, fruticées), sous l’impulsion de la modernisation agricole. La surface des bois diminue
au cours du temps, notamment entre 1834 et 1970, en raison notamment d’une demande en
bois d’œuvre et de chauffage accrue lors des périodes de Guerres et en raison de besoin de
zones de pâtures. Actuellement, les bois sont peu ou pas exploités, manifestant une ressource
économique non valorisée. Les vignes qui occupaient par le passé une place non négligeable
mais de surface réduite, exploitées pour assurer l’approvisionnement en vin à l’ensemble des
occupants de l’exploitation, ont vu leur surface se réduire de façon draconienne, sous l’effet
d’abord de la crise phylloxérique dans les années 1880 puis du changement du choix
d’exploitation et de mentalité des exploitants terriens qui privilégient de plus en plus la
culture céréalière, plus rentable et adaptée au terroir. L’urbanisation est grandissante pour les
deux sites, en remplacement de toutes sortes de parcelles. Le développement toujours plus
poussé du réseau routier favorise depuis quelques années la construction de lotissements
récents, en réponse à la demande de citadins souhaitant s’installer à la campagne. Les
pelouses servaient auparavant de zones de pâtures. La modernisation de l’agriculture dans les
années 1950 incite à leur développement par succession progressive sur des terres cultivées
abandonnées. L’absence d’entretien actuel entraîne leur progression vers des formations
végétales ligneuses. Mais certaines pelouses ont également disparu, transformées pour
satisfaire les besoins socio-économiques (urbanisation, expansion de l’agriculture). Les
prairies ont fortement régressé depuis le XIXe siècle, en raison de leur situation favorable à la
culture (terrains plats, sols meubles et riches en limons) et en raison de la suppression des
animaux de trait dans les travaux agricoles qui exigeaient la présence de prairies à fourrage
pour assurer leur alimentation. Dans les années 1970, un lac apparaît dans les deux paysages,
marquant un désir d’espaces de loisir.
- Les deux sites ne sont pas touchés de la même manière par la modernisation de l’agriculture.
Pour Nailloux, la modernisation de l’agriculture va entraîner une diminution de la surface des
terres arables en raison de la mauvaise aptitude de certains terrains (trop humides, sur des
pentes trop fortes, mal exposés) à la mise en valeur agricole, surface abandonnée sur laquelle
va pouvoir se mettre en place la succession progressive de la végétation ou qui va être
remplacée par des zones urbaines. En parallèle, entre 1946 et 1998, des FVS sont défrichées,
remplacées par des terres arables. Les taches boisées sont très fragmentées. Le paysage
d’origine représente une urbanisation plus développée marquée par un bourg assez étendu.
Les pelouses sont peu morcelées, utilisées comme pâtures jusque dans les années 1950. Pour
Préserville, la modernisation de l’agriculture n’est pas contrainte par les conditions physiques
en raison d’un relief plus modéré, avec des pentes plus faibles, exigeant moins une
reparcellisation. Les taches boisées sont peu fragmentées. Les prairies ont été par le passé
plus importantes, traduisant peut-être un élevage plus important que sur le site de Nailloux
(l’absence de données d’archives ne nous permet pas de valider cette hypothèse).
La modernisation de l’agriculture dépend fortement des conditions offertes par le milieu :
exposition, pente, sol, qui vont assurer un bon drainage, une fertilité suffisante (même si celleci est de plus en plus pallier par l’usage de fertilisants chimiques) et une accessibilité pour des
tracteurs lourds et encombrants (agrandissement des parcelles, suppression des haies et des
talus). L’artificialisation semble plus marquée par une intensification de l’espace que par une
dégradation des FVS qui est illustrée par la fragmentation et la pression exercée sur ces
formations. En effet, nous constatons une diminution du pâturage et de l’exploitation des bois,
et l’arrêt de l’entretien des FVS.
W
113
III -
Les enseignements tirés de l’organisation spatiale
de la végétation
Ce chapitre a tout d’abord démontré l’intérêt de l’analyse multi-sites et multi-dates lorsque
l’on souhaite mettre en évidence la réponse des formations végétales en terme d’organisation,
à l’artificialisation des paysages et ses conséquences au cours du temps. Elle offre en effet la
possibilité de comparer l’organisation actuelle des formations végétales et son évolution, en
relation avec les conditions physiques du terrain. La prise en compte de l’organisation spatiale
des formations végétales, organisation estimée au niveau de leur importance et de leur
répartition, autorise la comparaison entre formations anthropiques et formations à végétation
spontanée. Les analyses spatio-temporelles poursuivies ont permis d’une part de révéler les
modes d’organisation différents des formations végétales s’exprimant à travers les attributs
spatiaux des éléments constitutifs (parcelles) de chaque type de formation, dans différents
paysages touchés par l’intensification agricole, et ce, pour une période de temps illustrant le
paysage tout au long du processus d’artificialisation. D’autre part, les analyses ont permis de
démontrer les conséquences de l’artificialisation du paysage à travers une fragmentation
accrue des formations à végétation spontanée et leur régression généralisée au profit des
formations artificialisées notamment dans les milieux les plus propices à la mise en valeur
agricole, accentuées par des interventions sur le milieu dans certains cas de plus en plus
intenses. Par ailleurs, la connaissance historique de l’utilisation du paysage et des pratiques
agricoles est un aspect essentiel à prendre en compte pour apporter des éléments de réponse
aux dynamiques de l’organisation spatiale.
L’analyse synchronique des types d’occupation du sol (TOS), en réponse à des usages
différents de l’espace, nous permet d’avancer que
-
-
-
-
-
114
Des paysages appartenant à un même terroir peuvent présenter une organisation
spatiale différente, suggérant l’influence des facteurs anthropiques dans cette
organisation,
L’intensification et le morcellement ne sont pas nécessairement liés de façon
négative à la richesse et à la diversité des habitats, un paysage morcelé pouvant
être plus riche en terme de surface totale en formations à végétation spontanée
qu’un paysage moins morcelé,
La proportion de terres arables et l’importance de l’urbanisation sont inversement
corrélées à la surface consacrée aux formations à végétation spontanée,
La fragmentation d’un paysage se traduit au niveau des taches boisées par une
surface réduite, une forme irrégulière et un isolement plus grand,
La capacité d’accueil du paysage qui correspond à la combinaison des attributs
relatifs à la surface, à la distance et au voisinage, appréciés pour les taches boisées,
évolue inversement à l’artificialisation et est favorisée par une physionomie des
formations boisées hétérogène,
L’organisation spatiale est fonction des usages de l’espace, eux-mêmes dictés en
partie par les conditions de terrain et en partie par les politiques d’aménagement
locales,
Le paysage est le lieu d’expression des usages actuels et passés qui marquent leur
empreinte dans l’organisation spatiale des formations végétales
L’analyse diachronique des types d’occupation du sol, en réponse aux variations des usages
de l’espace, nous permet d’avancer que
-
-
-
-
L’intensification ne suit pas une ligne continue mais est variable dans le temps, en
rapport avec les politiques d’aménagement, avec des périodes de grandes
transformations de l’espace et des périodes de plus faibles transformations, ces
périodes étant dictées par les avancées des techniques agricoles,
Contrairement aux suppositions, la modernisation de l’agriculture peut être
accompagnée par une végétalisation du milieu (contrainte des techniques
modernes dans des paysages vallonnés),
La diversité, la qualité (superficie, forme) et l’évolution des formations à
végétation spontanée, minoritaires dans les paysages agricoles, varient selon les
conditions de terrain (pente, exposition, situation topographique), le
développement agricole et urbain, les périodes de Guerre (demande en bois
accrue), leur exploitation (coupe forestière, pâturage, fauchage),
L’espace rural joue le rôle de support de diverses activités et aménagements en
réponse à des demandes ponctuelles traduisant l’évolution des mœurs de la
société, par exemple l’aménagement d’un lac comme base de loisir, la construction
de nouveaux lotissements.
Les résultats obtenus soulèvent ainsi différents points de discussion et de réflexion que nous
allons développer ci-après.
1. La création d’une hétérogénéité du paysage en réponse à son aménagement,
2. Les conséquences de la fragmentation notamment l’effet-lisière,
3. Les activités humaines, facteurs favorables et / ou préjudiciables aux formations
végétales,
4. La mise en avant de la supplémentation et de la complémentation, dans le but de
promouvoir une capacité d’accueil d’un paysage optimale.
1-
L’hétérogénéité du paysage en réponse à son aménagement
L’aménagement particulier du paysage va entraîner une diversité des unités paysagères et une
certaine hétérogénéité, que nous avons évaluées par le nombre de types d’occupation du sol
qui composent le paysage et leur organisation spatiale. Cette hétérogénéité des unités
paysagères qui forment la mosaïque, peut exprimer une diversité des TOS mais, en contre
partie, traduire leur faible représentativité en terme de surface totale occupée. Aussi, dans le
cadre d’une gestion raisonnée de l’espace en adéquation avec une expression optimale de la
biodiversité végétale, nous pouvons nous interroger quant au bénéfice de privilégier un
paysage hétérogène et donc diversifié, au regard d’un paysage homogène mais renfermant des
formations plus étendues. L’hétérogénéité accroît la facilité de colonisation par les espèces
des taches plus dispersées dans le paysage mais contraint cette même colonisation en raison
de la capacité de dispersion des espèces limitée sur de longues distances. Cette question est
fréquemment soulevée dans la problématique de l’aire minimale utile au maintien de la
biodiversité végétale.
Nous avons vu, dans cette partie, que l’artificialisation contribuait à créer une hétérogénéité
paysagère, et si nous nous en remettons à la conception de la capacité d’accueil du paysage
115
que nous avons défini, alors nous pouvons conclure que l’hétérogénéité paysagère n’est pas
souhaitable pour l’optimisation de cette capacité. Pourtant, les auteurs avancent l’importance
de l’hétérogénéité spatiale sur la dynamique des populations de plantes (Thenail et al., 1995),
importance que nous tenterons d’estimer dans le chapitre 5. Par exemple, l’exploitation en
taillis et les éclaircies augmentent la diversité de la végétation dans le paysage et contribuent
significativement à l’accroissement de la richesse spécifique. La germination des graines est
stimulée par des trous dans la végétation qui changent les conditions d’habitat.
2-
Fragmentation des taches boisées et effet-lisière
Les paysages agricoles modernes sont caractérisés par une surface étendue et une
homogénéité des cultures qui fragmentent le paysage naturel (cf. p.42). La fragmentation, qui
s’exprime par l’isolement et la réduction au niveau des taches boisées, entraîne notamment
l’augmentation de la lisière, qui s’exprime au niveau du périmètre et de la forme. Depuis les
années 1980, de nombreuses études (cf. chapitre 1) se sont penchées sur les conséquences de
l’isolement de parcelles d’habitat, ou fragmentation. Même si l’intérieur de chaque parcelle
est intact, la fragmentation d’un territoire entraîne une perte de biodiversité végétale, car elle
agit sur le périmètre de la parcelle, écotone, zone de transition entre deux formations dont la
richesse est élevée puisqu’elle renferme des espèces propres et des espèces appartenant à
chaque formation adjacente. La disparition des habitats lors des phases de remembrement
entraîne la fragmentation des populations d’espèces, posant le problème des populations
isolées. Or, plus la perturbation sur le paysage est intense, plus la fragmentation est effective
(Hargis et al., 1998). Les paysages avec des taches de petite taille et de forme irrégulière ont
des valeurs de densité de lisière plus élevées que les paysages avec des taches étendues ou de
forme simple, pour une même intensité de perturbation. Par ailleurs, de petites taches de forêt
tendent à avoir une plus grande proportion de lisières à l’intérieur que les grandes taches et
sont plus susceptibles de contenir des espèces exotiques ou adventices (Dunn et al., 1991). La
forme de la tache peut avoir d’importantes implications à l’échelle du paysage. Les formes
complexes peuvent présenter des conditions environnementales complexes.
3-
Les activités humaines, facteurs favorables et / ou préjudiciables aux
formations végétales
Les activités humaines peuvent être perçues comme créatrices d’une mosaïque paysagère,
puisqu’elles sont initiatrices de successions végétales. Outres les perturbations d’origine
physique (modelé topographique) et naturelle (feu, inondations) qui sont insignifiantes dans
ces paysages fortement anthropisés, où les conditions naturelles sont contrôlées au maximum
(par exemple, calibrage et régulation du débit des cours d’eau pour empêcher les crues), les
activités humaines sont génératrices d’hétérogénéité. Le développement des activités
agricoles tout au long de l’Histoire a permis l’apparition de milieux non ‘climaciques’
(prairies de fauche, pelouses), qui sont connus pour être plus riches en espèces que les forêts
naturelles dont ils dérivent (cf. p.42). Les activités humaines, que nous pouvons considérer
comme des perturbations des systèmes écologiques, peuvent être un facteur d’enrichissement
de la biodiversité végétale. En défrichant ou en exploitant à des degrés d’intensité variables
différentes surfaces, les activités humaines peuvent être sources de diversité des unités
paysagères (cf. p.36) et induire une hétérogénéité temporelle, puisqu’elles s’opposent en
permanence au dynamisme naturel qui débouche sur des formations végétales finales ‘stables’
116
et initient des successions régressives ou progressives de la végétation. Si la pression de la
perturbation cesse, l’écosystème pourra ou non revenir à sont état initial, selon sa résilience
(notion évoquée dans le premier chapitre). La mise en place des mécanismes de succession
végétale, pouvant être initiés par les activités humaines (coupes forestières, abandon de
parcelles agricoles), crée une diversité de formations végétales et permet à une diversité de
cortèges floristiques de s’exprimer (Bond, 2000). Cependant, l’intensification de l’agriculture
a comme conséquences préjudiciables sur la mosaïque paysagère, la dégradation des habitats,
qui jouent pourtant un rôle fondamental pour la survie de nombreuses espèces. Les
remembrements et la mécanisation ont causé le drainage des terres humides et le défrichement
de terres boisées. Les activités humaines peuvent donc être perçues comme des facteurs
favorables et / ou préjudiciables aux formations végétales, dont l’importance sera estimée
dans le chapitre 5.
4-
Notion de supplémentation versus complémentation
Nous venons de voir que si l’hétérogénéité était importante dans la diversité des unités
paysagères, elle est aussi, a contrario, préjudiciable à la capacité d’accueil du paysage. Ce
résultat évoque deux notions opposées : la supplémentation et la complémentation. Ces
notions traduisent deux types de paysage opposés, des paysages privilégiant une diversité de
formations végétales et des paysages présentant une richesse en terme de surface de certaines
formations végétales. En rapport avec la diversité biologique présente dans les milieux
disponibles dans le paysage, l’hétérogénéité spatiale que nous avons pu révéler est essentielle
pour la survie de certaines populations requérant une diversité de milieux pour se maintenir et
qui vont pouvoir trouver plus facilement cette diversité dans des paysages hétérogènes (cas
des espèces ubiquistes, opportunistes). C’est ce que l’on nomme usuellement la
supplémentation1. D’autres espèces ont besoin de trouver facilement dans l’espace des
habitats de même nature pour assurer leur pérennité et vont pouvoir, à l’inverse des
précédentes, trouver cette surface suffisante dans des paysages relativement homogènes (cas
des espèces aux exigences écologiques strictes, comme les aquatiques, les forestières). C’est
ce que l’on nomme la complémentation2. Deux paysages, présentant l’un une diversité de
formations végétales, l’autre une richesse en terme de surface de certaines formations
végétales, ne vont vraisemblablement pas présenter la même diversité floristique. Face à la
fragmentation croissante des formations à végétation spontanée, il semble qu’un équilibre
entre supplémentation et complémentation soit à trouver pour définir des bases de gestion et
d’aménagement de l’espace en zone de grande culture, où les habitats ‘naturels’ sont de plus
en plus réduits. Cet équilibre doit être trouvé en fonction des possibilités des espèces à se
disperser et à se maintenir dans une surface minimale.
5-
Discussion sur la méthode
Même si nous avons pu démontrer la validité et l’intérêt de la méthode employée dans
l’analyse de l’organisation spatiale de la végétation, diverses remarques peuvent être émises.
1
2
Supplémentation Milieux différents qui sont indispensables à la survie de certaines populations.
Complémentation Elle augmente les surfaces disponibles par rapport à une population.
117
- D’une part, les documents utilisés, sous format papier, négligent le modelé du terrain et
biaisent les surfaces calculées sous SIG. Toutefois, nous pouvons avancer que les faibles
différences d’altitude pour les sites étudiés ne risquent pas d’entraîner de différences de
surface importantes avec les surfaces réelles.
- D’autre part, le géoréférencement est source de décalages, qui peuvent générer des surfaces
erronées voire aberrantes.
- Par ailleurs, les paysages analysés sont définis par des limites administratives, entraînant
forcément des troncatures des parcelles qui composent ces paysages et rendant les données
biaisées par des surfaces sous-estimées en limite de zone d’étude. C’est le cas notamment des
surfaces boisées qui peuvent s’étendre au-delà des frontières administratives. Le nombre de
taches représentant des formations à végétation spontanée ne nous a pas permis d’éliminer les
taches en bordure d’aire d’étude. Le travail se basant sur une comparaison de sites suivant la
même méthodologie, les erreurs reportées sur les deux sites s’annulent en quelques sortes.
- Les conclusions interprétatives sont basées sur des suppositions, non confirmées par des
analyses statistiques. Celles-ci seront développées dans le chapitre 5.
- Par ailleurs, les connectivités n’ont pas été prises en compte. Pourtant, elles sont largement
avancées comme facteurs importants dans les flux d’espèces par les auteurs.
- Enfin, la prise en compte de dates ponctuelles et leur comparaison peuvent masquer des
dynamiques intermédiaires. Toutefois, l’analyse a mis en évidence l’intérêt d’employer des
dates rapprochées pour les périodes récentes : elles permettent en effet de révéler de nouvelles
tendances de l’aménagement et de la valorisation de l’espace, qui s’opèrent depuis quelques
années.
W
En conclusion de ce chapitre, nous pouvons avancer que les activités humaines, importantes
sur les deux paysages, se comportent comme des perturbations dont le rôle est de bloquer
l’évolution du milieu par sa gestion. Le monde scientifique considère aujourd’hui les
perturbations comme bénéfiques aux systèmes écologiques, dans le sens où elles augmentent
la diversité de la mosaïque paysagère et la diversité interne (cf. chapitre 1). Les variations de
l’organisation spatiale, exprimées par un usage de l’espace et des pratiques agricoles
différents à l’échelle de la parcelle, influencent la biodiversité végétale. C’est cette variation
de la biodiversité végétale que nous envisageons d’étudier dans le prochain chapitre.
118
Chapitre 4
Variation de la flore et de la végétation en
réponse à l’artificialisation du paysage : composition et
diversité floristiques
119
Dans le contexte général de l'évaluation de l’incidence des activités humaines sur la
biodiversité végétale dans les paysages d’agriculture intensive, l’objectif de ce chapitre est de
caractériser la variation de la flore et de la végétation en réponse à des schémas d’organisation
paysagers différents, eux-mêmes dictés par des degrés d’artificialisation du paysage distincts.
Pour cela, la flore, ou plus précisément la liste floristique (nous verrons la définition des
concepts par la suite), est retenue comme élément pour évaluer la biodiversité végétale. De
par son immuabilité à l’échelle de la perception humaine, elle constitue un objet d’étude
privilégié puisqu’elle va refléter à la fois les conditions du milieu et intégrer les pressions
anthropiques, en les transcrivant dans les spécificités de la composition floristique.
Afin d’atteindre l’objectif fixé, la végétation variant d’un site à l’autre et au cours du temps de
façon plus ou moins rapide, nous étudions d’une part les aspects actuels du tapis végétal du
territoire du Lauragais dans les deux paysages présentant des schémas d’organisation
différents, et d’autre part les variations de la flore qui se sont opérées depuis plus d’un siècle.
Nous basons notre travail sur la comparaison de listes floristiques de différentes époques mais
représentant le même territoire lauragais. Les différences actuelles du tapis végétal, liées à des
contrastes paysagers, sont étudiées à travers l’analyse de listes floristiques établies à notre
époque – extrême fin du XXe siècle - simultanément dans les deux sites d’étude. Les
variations de la flore dans la durée sont révélées en comparant, à l’échelle du Lauragais, des
listes floristiques établies à des époques séparées par des intervalles de temps significatifs.
Nous prenons en compte deux considérations. Une première considération souligne
l’existence de nuances locales dans la flore actuelle du Lauragais, illustrant des degrés
d’artificialisation du paysage distincts, au niveau de la diversité floristique et de la distribution
des espèces suivant leurs caractéristiques intrinsèques. Une seconde considération suggère
une banalisation de la flore au cours du temps se manifestant par l’amoindrissement de
cortèges propres à certains types de milieux et la présence accrue d’espèces à large amplitude
écologique, conséquemment à l’homogénéisation des pratiques et de l’occupation du sol.
L’analyse prend donc en compte à la fois des caractéristiques descriptives de la flore, à savoir
les indices de biodiversité (richesse spécifique, diversité floristique) et les données relatives à
l’autécologie des espèces, en particulier leur préférence d’habitat et leurs stratégies de
dispersion des graines. Ainsi, nous pouvons chercher à formaliser, en ce qui concerne la
fréquence relative de chaque espèce, une tendance à la régression, au maintien ou à
l’expansion, en fonction de ses mécanismes propres de dispersion, de colonisation … ou
d’extinction.
La première partie de ce chapitre consiste en l’acquisition des données floristiques, et
notamment les listes floristiques, documents qui seront traités par la suite afin de mettre en
évidence la variation spatio-temporelle de la flore.
W
120
I-
Les listes floristiques, documents de base de
l’étude de la flore
Les données floristiques que nous allons manipuler correspondent aux listes floristiques,
documents de base sur lesquels se fonde notre travail, complétées par des caractéristiques
descriptives de la flore et de la végétation.
1-
La flore d’une région, élément d’évaluation de la biodiversité
La flore d’une région est la liste des plantes qui habitent de façon spontanée dans la région
concernée. Les flores déterminent des domaines plus ou moins étendus, caractérisés par la
présence d’un grand nombre de plantes. La flore du Lauragais peut ainsi être définie comme
la représentation du cortège floristique de la région Holarctique, dans le secteur aquitanien du
domaine atlantico-européen (Gaussen, 1954) ; même si, au-delà de ces considérations
biogéographiques, les études palynologiques et paléobotaniques montrent que les
communautés de végétaux varient dans le temps. À l’échelle du territoire biogéographique à
laquelle nous travaillons, l’ensemble des espèces coexistant et ayant des aires de répartition
similaires va composer le cortège floristique de ce territoire et la flore va constituer la liste des
taxons végétaux relevés. À l’échelle de l’écosystème, le cortège floristique illustre plusieurs
espèces formant un groupe caractéristique de l'écosystème et dont la présence est
conditionnée par une adaptation des différentes espèces à une amplitude plus ou moins grande
des conditions de sol et de climat. Le cortège floristique sera donc appréhendé par la
détermination des espèces et quantifié par le nombre d'individus de chaque espèce.
La connaissance des flores actuelle et passée passe par l’utilisation de listes floristiques
récentes et anciennes. L’acquisition des listes floristiques suit des méthodes différentes selon
l’époque considérée. Pour l’époque actuelle, les listes floristiques sont acquises à partir de la
réalisation de relevés de type phytosociologique. Pour l’époque ancienne, l’information est
extraite d’un ancien inventaire floristique datant de 1885 et qui représente la flore de l’époque
d’un des deux sites d’étude. L’ensemble des taxons recensés dans les listes floristiques
actuelles et passées compose une liste floristique globale, qui est complétée par la suite grâce
à des informations extraites de diverses sources (cf. p.131). Ces listes renferment les espèces
végétales présentes dans la végétation spontanée, recensées dans tous les types de milieu
quelque soit la pression anthropique qui y est exercée : en effet, il n’existe pas de milieux
naturels et non naturels, tous les milieux étant influencés par des conditions physicochimiques d’origine naturelle, et tous pouvant constituer des espaces d’accueil à la végétation
spontanée.
1. 1 -
Connaissance de la flore actuelle : l’inventaire des taxons
La connaissance de la flore actuelle est fondée sur la réalisation de relevés de la végétation
vasculaire, pour les deux sites d’étude, Nailloux et Préserville.
121
La méthode des relevés phytosociologiques1 initiée par le botaniste suisse J. Braun-Blanquet
(1884-1980) en 1915, est la plus utilisée, parmi les plus fiables et les plus reproductibles entre
les différentes méthodes d’étude de la végétation. Elle se fonde sur des critères de
composition floristique, dont l’inventaire est reconnu comme un outil de base pour évaluer la
diversité biologique (Parizeau, 1997).
Les relevés de végétation vont être effectués dans une diversité de milieux dont le choix
relève d’une méthodologie précise qui nécessite de dresser un plan d’échantillonnage et de
délimiter une aire-échantillon. Une fois la mise en place des relevés exécutée, la phase de
réalisation se déroule par l’inventaire des espèces identifiées, en vue de constituer la liste
taxonomique, enrichie par plusieurs caractéristiques descriptives de la végétation qui vont
permettre d’en préciser la physionomie.
1. 1. 1 -
Mise en place des relevés de végétation
Afin d’inventorier toutes les espèces végétales dont la présence est influencée par les
conditions du milieu, les relevés de végétation doivent représenter l’éventail des conditions
mésologiques présentes. Cet éventail est établi à partir d’un échantillonnage de toutes les
situations possibles, en fonction des données stationnelles retenues comme étant
déterminantes de la distribution et de la composition de la végétation. Dans chaque situation,
il faut alors définir une surface homogène au niveau de la physionomie de la végétation et
représentative en terme de richesse spécifique, où le relevé sera effectué. Cette surface porte
le nom d’aire-échantillon.
a-
Plan d’échantillonnage
Dans le cadre d’une étude monographique régionale, il est souvent nécessaire de stratifier
l’échantillonnage en sélectionnant à l’avance des sites représentant un échantillon aussi
complet et équilibré que possible des différentes végétations, en fonction d’une série de
critères liés à la problématique. Cette sélection est facilitée par l’élaboration préliminaire d’un
plan d’échantillonnage dont le but est de préparer et d’orienter la campagne de terrain. Les
critères doivent permettre d’échantillonner tous les types de végétation présents afin de faire
l’inventaire exhaustif des plantes présentes dans les différentes végétations. L’échantillonnage
des milieux est effectué selon l’approche phytoécologique afin que les relevés botaniques
recouvrent une diversité maximale de gradients biologiques (Baudry et al., 1996).
- Critères responsables de la distribution et de la composition de la végétation
En dehors de toute considération anthropique (influence des activités humaines), la
distribution de la végétation est fortement dépendante des conditions écologiques qui
prévalent dans les systèmes étudiés (Huetz de Lemps, 1994), les plantes ayant des exigences
écologiques spécifiques (Lévêque, 1994b). Ces conditions déterminent un type de station
auquel est associée la végétation adaptée à ces conditions (Rameau et al. 1989, Gonin 1993).
Elles peuvent être de trois types (Gaussen, 1954 ; Emberger, 1969) : physique (altitude, pente,
géologie locale, orientation), climatique (lumière, température, précipitation, vent) et
1
Phytosociologie Science qui étudie les ensembles de végétaux et cherche à les classer par des méthodes
proches de celles de la systématique, en ne se fondant que sur des critères de composition floristique.
122
édaphiques (nature du sol, constitution, teneur en eau et en air). Mais ces conditions n’influent
pas toutes de la même façon sur la végétation, notamment en raison de l’échelle du territoire
considéré. À l’échelle du territoire lauragais, les facteurs d’ordre géologique et climatique ne
présentent que de très faibles variations et peuvent être considérés comme des constantes
(Rey, 1960).
- Données stationnelles retenues
Ainsi, pour le Lauragais, territoire caractérisé par un relief vallonné, les facteurs mésologiques
retenus comme étant déterminants de la distribution et de la composition de la végétation sont
de trois types.
1. La pente qui est corrélée à l’hygrométrie du sol, par suite d’un écoulement de l’eau
croissant avec la pente, va influencer les conditions hydriques du milieu et la végétation
qui s’y installe. L’observation du relief lors des campagnes de prospection sur le terrain,
pour les deux sites d’étude, amènent à identifier trois types de terrains suivant le degré de
la pente :
-
Les terrains sur pente nulle ou faible, où l'eau ne ruisselle pas et peut s'accumuler
pour donner des terrains humides voir inondés selon la situation topographique,
Les terrains sur pente moyenne, où l'eau s'écoule modérément, le sol peut être
frais,
Les terrains sur pente forte où l'eau s'écoule facilement, avec un sol sec à très sec.
2. L'exposition dont dépend l’ensoleillement et le réchauffement, est divisée en deux
ensembles par suite de l'orientation globale des versants NO-SE du Lauragais hautgaronnais :
-
Une exposition globalement sud où les conditions caractéristiques sont un
ensoleillement fort et une évaporation élevée,
Une exposition globalement nord marquée par des températures plus basses et une
évaporation moins élevée.
3. La situation topographique est définie par la position le long du versant. D'après Gonin
(1997), quatre situations peuvent être distinguées sur les coteaux du Lauragais, corrélées à
l’hygrométrie du sol :
-
Les situations de fond de vallon avec des sols humides ou frais,
Les situations de bas de versant où les sols sont frais et siliceux,
Les situations de milieu de versant avec une hygrométrie moyenne,
Les situations de haut de versant présentant des sols secs.
La combinaison de ces trois facteurs donne 24 situations théoriques. Mais les pentes nulles
n’ont pas d’exposition définie, ce qui fait en réalité 20 situations possibles. À partir de ces
situations possibles, nous validons seulement celles qui sont associées sur le terrain à une
formation végétale retenue pour l’étude.
123
- Choix des stations
La stratégie de stratification envisagée consiste à respecter dans l’échantillonnage les
proportions relatives de chaque situation. Cette stratégie présente l’avantage d’être
directement compatible avec la technique d’échantillonnage aléatoire que nous retenons, et
d’éviter d’introduire un excès de subjectivité dans le choix des stations ; elle présente
cependant l’inconvénient de favoriser les situations les plus fréquentes par rapport aux plus
rares, ces dernières risquant de se voir sous-échantillonnées, voire ignorées. De plus, la
présence d’une espèce végétale dans une station suppose que cette espèce tolère les conditions
mésologiques de la station. Mais cela n’implique pas qu’elle ne puisse trouver ailleurs des
conditions favorables, voire meilleures. C’est donc la comparaison d’un nombre élevé de
relevés, effectués, les uns dans des stations aussi identiques que possibles, les autres dans des
stations différant par un ou plusieurs facteurs écologiques, qui permet d’apprécier la valeur
caractéristique de chaque espèce, c’est-à-dire en définitive les liens plus ou moins étroits qui
existent entre cette espèce et les conditions écologiques dans lesquelles elle se rencontre.
Des prospections préliminaires sur le terrain sont utiles pour acquérir une vue d’ensemble de
la diversité des situations. Pour chaque commune d’étude, nous nous efforcerons autant que
possible de choisir des relevés se succédant le long du versant (transects) recoupant les
différentes situations mésologiques de manière à traverser les différentes végétations
représentées localement, plutôt que de choisir des situations dispersées dans l'espace.
b-
Formations végétales analysées par relevé
Une fois les formations clairement individualisées en fonction des données stationnelles, il
convient de sélectionner celles qui feront l’objet de relevés. Nous éviterons le plus possible
les communautés fragmentaires pour des raisons spatiales (surfaces trop faibles) ou
phénologiques (période trop éloignée de leur optimum de développement saisonnier),
communautés fragmentaires qui risqueraient de ne contenir qu’une partie très limitée du
cortège floristique habituel de la communauté considérée : la comparaison ultérieure de
relevés “complets” et de relevés fragmentaires ne manquerait pas de poser de sérieux
problèmes d’interprétation (Gillet, 2000).
Pour permettre la comparaison des relevés entre eux et avec les données passées, les
formations échantillonnées sont classées en types de milieu. La classification est inspirée des
Types d’Occupation du Sol définis dans le chapitre 3 (cf. p. 76).
Culture,
Vigne,
Communauté rudérale,
Pelouse,
Prairie,
c-
Fruticée,
Bois,
Lisière,
Haie,
Eaux
Aire-échantillon du relevé
À l’intérieur de chaque formation reconnue sur le terrain et sélectionnée, il faut choisir
soigneusement les emplacements, ou aires-échantillons, où les relevés floristiques seront
exécutés. La surface de végétation inventoriée doit obligatoirement répondre à une double
124
exigence d’homogénéité (floristique et écologique) (Guinochet, 1973) et de représentativité
(cf. Figure 25) : elle doit être assez grande pour satisfaire à la seconde exigence (une surface
trop petite rendrait le relevé fragmentaire), mais suffisamment restreinte pour répondre à la
première (une surface trop grande risque de contenir une proportion trop importante d’espèces
des formations avoisinantes, par introgression topographique) (Gillet, 2000). Nous éviterons
le plus possible les zones de contact et de transition, en situant si possible chaque surface
inventoriée dans la partie centrale du fragment de formation. Nous rechercherons en priorité
les situations extrêmes et bien tranchées.
surface optimale
Représentativité
Homogénéité
surface
Figure 25. Relation théorique entre la surface du relevé, l’homogénéité et la représentativité de
l’aire-échantillon. D’après (Gillet, 2000)
La discrimination sur le terrain des formations homogènes s’appuie essentiellement sur des
critères structurels biologiques (types morphologiques végétatifs, formes biologiques,
stratification verticale, phénologie) et écologiques (microtopographie - même pente et
orientation générales - nature du substratum géologique et pédologique, microclimat) que l’on
met empiriquement en corrélation avec des variations répétitives de la composition
floristique. La discrimination d’ordre biologique concerne les trois grandes catégories
fondamentales de formations végétales : arborescentes, arbustives et herbacées (la formation
muscinale n’étant pas relevée dans notre étude). Leur définition fait intervenir l’espace vital et
donc la taille des végétaux, mais s’appuie aussi sur les types biologiques et les groupes
taxonomiques. La dénomination de ces catégories peut être assimilée au découpage en strates
qui décrit la structure verticale de la végétation. Nous distinguons ainsi :
-
La formation arborescente, ou arborée, qui se définit par la dominance d’un
peuplement mégaphanérophytique et macrophanérophytique (végétaux ligneux de
plus de 8 m de hauteur),
-
La formation arbustive qui se définit par la dominance d’une composition
nanophanérophytique et microphanérophytique (végétaux ligneux de plus de 30 cm
et de moins de 7 m1 de hauteur),
-
La formation herbacée qui se définit par un peuplement d’hémicryptophytes, de
géophytes, de thérophytes, de chaméphytes et/ou d’hydrophytes.
L’aire-échantillon doit être suffisamment étendue spatialement et temporellement pour inclure
la quasi-totalité des types de formation constituant l’ensemble taxonomique maximal de cette
végétation (Gillet et al., 1991).
1
D’après Rameau et Julve. D’autres auteurs admettent le seuil de 8 mètres.
125
d-
Aire minimale d’échantillonnage
Une fois l’aire-échantillon identifiée, il convient de délimiter l’aire minimale du relevé. La
détermination de l’échelle spatiale de mesure est un problème fondamental puisque même
dans un espace écologiquement homogène, il existe une relation croissante entre la surface
échantillonnée et le nombre d’espèces recensées, jusqu’à l’atteinte d’un plateau (Parizeau,
1997).
Selon la définition originelle, l’aire minimale est «l’espace minimum que demande une
végétation pour acquérir le développement auquel correspond l’ensemble spécifique normal »
(Braun-Blanquet et Pavillard, 1928). Un relevé n’est considéré comme représentatif de la
végétation étudiée que s’il est effectué sur une surface au moins supérieure à l’aire minimale.
Bien que la technique soit dans la pratique très rarement utilisée, l’aire minimale
d’échantillonnage d’une végétation est classiquement définie à partir de la courbe aire-espèces
(Arrhenius, 1921) (courbe d’accroissement du nombre d’espèces en fonction de la surface,
que l’on augmente par doublements successifs de placettes imbriquées), (Motomura, 1932 ;
Mac Arthur, 1957 ; Gounot, 1969) :
A=bS2
avec A l’aire, b un coefficient, S le nombre d’espèces
Par cette technique (ou par une évaluation empirique directe), on repère ainsi la surface
optimale du relevé pour chaque type de communautés. Selon Lippmaa, la surface des relevés
doit se situer autour de 20 m2 pour les formations herbacées de sous-bois (Lippmaa, 1935).
Dans la pratique, pour les formations arborescentes, l’aire minimale est de l’ordre de 100 m2
et pour les formations herbacées de l’ordre de 10 m2. Significativement, l’aire minimale
d’une communauté augmente corrélativement avec l’espace vital des organismes constitutifs.
En pratique, nous exécuterons les relevés sur une portion la plus grande possible des
formations, par extension de l’aire minimale empirique apparente, en accord avec l’attitude de
la plupart des phytosociologues, qui délimitent plus ou moins précisément une surface proche
de l’aire minimale empirique et qui complètent l’échantillonnage en dehors de ces limites
initiales (les espèces complétées figurant ou non entre parenthèses). D’autant plus que
l’expérience montre qu’un même type de formation peut présenter une aire minimale
empirique très variable selon le taux de recouvrement et la sociabilité de certaines espèces.
Toutefois, nous devons préciser que nous ne respecterons pas toujours l’aire-minimale
empirique apparente. Les relevés de la végétation des haies, bords de route, de champs sont
exécutés le long de la formation.
e-
Période d’échantillonnage
Les relevés sont effectués en tenant compte des décalages phénologiques dans le
développement des formations végétales. Nous avons prévu des campagnes de terrain au
moment de l’année où la formation est à l’optimum de son développement : les formations
arborées au printemps quand le sous-bois est en pleine végétation en raison d’un couvert
arboré non développé et les formations herbacées en été. Cette stratégie présente l’avantage
d’adapter le plan d’échantillonnage aux particularités locales ou saisonnières des milieux
étudiés. De plus, dans chaque surface de végétation délimitée, la liste des taxons peut être
complétée le cas échéant pour tenir compte de la périodicité annuelle ou pluriannuelle à partir
de nouvelles observations faites à une autre saison. Il est en effet indispensable d’inclure dans
126
le relevé la liste exhaustive des espèces reconnaissables dans l’aire-échantillon, en tenant
compte des variations saisonnières ou temporaires.
1. 1. 2 -
Réalisation des relevés de végétation
Les données d'inventaire de végétation sont récoltées sur le terrain sous la forme d'une fiche
par station. La récolte et l’informatisation des données floristiques sont réalisées à partir de la
base de données élaborée par le Conservatoire Botanique National de Midi-Pyrénées,
indexées sous Access (cf. Annexe 2). La classification des formations végétales relevées
analysées par relevé suit la typologie Corine Biotope (Bissardon et Guibal, 1991). Tous les
relevés, qu’ils soient de type linéaire (haies, bords de route, lisière de bois, fossés) ou
surfacique (pelouses, prairies, bois), sont référencés sous SIG, sur le fond scanné de la carte
topographique IGN actuelle au 1/25 000.
Lors de la phase de réalisation des relevés, nous consignons plusieurs types de données qui
serviront par la suite à analyser la flore à différents niveaux de perception (végétation et
espèce) (Lacoste et Salanon, 1969). Ces données sont maintenant décrites en détail.
a-
Caractéristiques descriptives de la végétation
Plusieurs caractéristiques descriptives de la végétation vont permettre d’en décrire la
physionomie, aspect général de la végétation constituant les formations. Cette physionomie
est imposée par la prédominance d’une ou de plusieurs espèces et résulte de la forme
biologique de ces espèces dominantes (arbres, herbes …).
-
La structure verticale de la végétation décrit l’importance des strates constituées par des
végétaux de différentes hauteurs. Les strates sont définies en s’aidant d’un découpage
indicatif en fonction des niveaux de hauteur atteints par l’appareil aérien. Il est parfois
délicat de délimiter les strates, dont les discontinuités peuvent être masquées par les
éléments de “l’ensemble de l’avenir ”. Pour déterminer le nombre et la hauteur des strates,
on s’appuie en priorité sur les espèces ayant atteint leur développement optimal (éléments
de “l’ensemble du présent”, (Oldeman, 1974)). Certaines strates peuvent manquer ou
atteindre une hauteur inhabituelle (plus réduite sur des sols superficiels par exemple). Ces
observations sont d’une importance capitale d’un point de vue écologique. Nous prenons
en compte trois strates :
-
Strate arborée de 7 m de hauteur minimum (ligneuse haute). Elle est composée des
espèces arborées dont la taille adulte dépasse 7 m.
-
Strate arbustive de 0,30cm à 7 m (ligneuse basse). Elle comprend des espèces
spéciales (arbustes), mais aussi de jeunes individus qui pourront s’élever
ultérieurement vers la strate supérieure. Certaines herbes de haute taille (Pteridium…)
pourraient figurer dans cette state, mais leur type biologique fait que nous les
rattachons à la strate suivante.
-
Strate herbacée, ou strate basse. Les herbes y prédominent, mais nous y trouvons
également présents les petits végétaux ligneux, chaméphytes et les jeunes plantules
d’arbres et d’arbustes.
127
Les strates inférieures incluent les éléments de l’ensemble de l’avenir (jeunes arbres en
croissance) et du passé (individus bloqués dans leur croissance).
- La structure horizontale de la végétation permet d’estimer le degré de recouvrement qui
est défini comme le rapport entre la surface recouverte par les espèces d’une strate donnée
et la surface totale du relevé, évalué en %. Selon le degré de recouvrement de la
végétation basse (<2m), la végétation peut être qualifiée de
-
Fermée si le recouvrement global est supérieur à 90%,
-
Ouverte1 si le degré de recouvrement est compris entre 25 et 50% laissant à nu de
larges parties du substrat,
-
Totalement ouverte dans le cas d’un recouvrement global faible ou nul (cas des
labours, des zones de décombres, etc.).
b-
Taxons inventoriés
Les taxons identifiés (espèces, sous-espèces) dans l’aire-échantillon de la formation végétale
considérée vont en constituer la liste taxonomique, qui permettra de préciser la nature de la
formation. Pour des raisons de compétence, et pour être en accord avec les données anciennes,
nous n’avons pas inventorié la strate muscinale qui regroupent les champignons, les lichens et
les mousses.
Lors des relevés, chaque taxon est affecté d’un indice semi-quantitatif (ou “coefficient ”)
d’abondance-dominance. Cet indice est une estimation globale de la densité (nombre
d’individus, ou abondance) et du taux de recouvrement (projection verticale des parties
aériennes des végétaux, ou dominance) des éléments de la formation (organismes individuels
représentant le taxon) dans l’aire-échantillon (Dajoz, 1985). Les taux de recouvrement sont
estimés en proportion de la surface effectivement recouverte par l’ensemble des végétaux de
la formation relevée (Sv) et non en proportion de la surface totale du relevé, contrairement à
l’usage classique inauguré par Braun-Blanquet (Braun-Blanquet, 1964) selon une échelle
approximative (Bournérias et al., 2001). Nous distinguons les classes suivantes :
-
1
+
1
2
3
4
5
éléments peu abondants, recouvrement inférieur à 5% de Sv, plante disséminée
éléments assez abondants, recouvrement inférieur à 5% de Sv
éléments très abondants, recouvrement inférieur à 25% de Sv
recouvrement compris entre 25 et 50% de Sv, abondance quelconque
recouvrement compris entre 50 et 75% de Sv, abondance quelconque
recouvrement supérieur à 75% de Sv, abondance quelconque (espèce dominante2).
Le sens de ces termes (fermeture, ouverture) est fréquemment élargi à la notion de la dominance de la strate
arborée dans la formation décrite. Ainsi, par extension, l’on parle fréquemment de formation ouverte une
formation dominée par la couverture herbacée et une formation fermée, une formation dominée par la couverture
arborée. Il faudrait, pour être plus juste, parler de paysage ouvert et fermé qui définit un paysage dominé par des
formations herbacées et des formations arborées. Les termes "ouvert" et "fermé" ne sont pas employés ainsi dans
notre travail.
2
La dominance désigne l’influence exercée par une espèce dans une communauté (Dajoz, 1985).
128
Dans le but de ne pas biaiser les résultats avec des espèces de jardin récemment plantées, qui
auraient été introduites dans des biotopes nouvellement créés, seules les plantes spontanées,
subspontanées ou naturalisées (cf. p.47) sont retenues dans les analyses subséquentes.
1. 1. 3 -
-
Limites de la méthode par relevés phytosociologiques
La flore d’une région géographique donnée étant en constante évolution, aucune liste
floristique ne peut avoir la prétention d’être rigoureusement complète : le prospecteur
curieux pourra être amené à découvrir des plantes non répertoriées dans la liste floristique
globale. Ainsi, alors qu’un enregistrement positif (présence de l’espèce) est pris comme
une valeur avérée, l’absence d’un enregistrement d’une espèce ne prouve pas que l’espèce
est effectivement absente : les listes d’espèces de plantes sont rarement complètes
(Peterken et al., 1984 ; Kirby et al., 1986).
Les relevés n'expliquent pas les mécanismes d'assemblage des groupes de taxons : ils ont
seulement une vocation descriptive et statique.
L’attribution des coefficients d’abondance-dominance, entièrement liée à l’appréciation
critique de l’observateur, est empreinte d’une certaine subjectivité.
Les relevés effectués dans des formations linéaires (haies, routes) ou en bord de
formations (champs, lisière de bois) ne suivent pas rigoureusement la méthode et peuvent
en ce sens porter à critique.
1. 2 -
Connaissance de la flore passée : l’inventaire floristique communal
La connaissance de la flore passée est fondée ici sur l’utilisation d’un inventaire floristique
remarquable datant de 1885 dont l’existence a dicté le choix du premier site d’étude de
Nailloux et qui va constituer le document de base dans l’analyse de la flore passée. Cet
inventaire se révèle d’une grande valeur puisqu’il dresse la liste des espèces végétales
présentes dans la végétation spontanée et cultivée, pour lesquelles sont indiqués les types de
milieux fréquentés (cf. Figure 26). Cet inventaire est extrait de la Monographie communale de
Nailloux (Haulier, 1885).
La Monographie communale de Nailloux de 1885
D’après (Haulier, 1885)
A l’occasion du Premier Centenaire de la Révolution, toutes les communes françaises ont été
chargées de réaliser une monographie communale. Très souvent, cette monographie a été
réalisée par l’instituteur de la commune qui dut suivre un canevas indiquant le contenu du
document.
L’instituteur naillousain de l’époque, désigné pour faire ce travail fut HAULIER. Il conduisit
cette monographie (aujourd’hui conservée au Centre culturel du Lauragais) en rédigeant une
première partie décrivant les données naturelles (limite, superficie, relief, sol, hydrographie,
climat, ...), les données humaines (conditions de vie, maladies), les données administratives
(nombre d’habitants, nombre de maisons, nombre de ménages, liste des élus municipaux et
maire), les données économiques (métiers exercées, services publiques, revenus), les données
agricoles (occupation du sol, cultures, bétail, pratiques culturales).
129
Une deuxième partie concerne un inventaire floristique réalisé après plusieurs années de
prospections sous la direction de TIMBAL-LAGRAVE, “ savant botaniste de Toulouse ”
comme le signale Haulier. Cet inventaire décrit la flore de Nailloux, où sont indiquées les
espèces végétales rencontrées (famille, nom scientifique, nom français, nom patois, types de
milieu fréquentés), spontanées et cultivées à l’époque. Au total, 765 espèces ont été
répertoriées.
Figure 26. Extrait de l’inventaire floristique de Haulier, 1885
L’inventaire de Haulier a été consigné dans la base de donnée du Conservatoire Botanique
National de Midi-Pyrénées. Les milieux cités sont indexés selon la nomenclature du Code
Corine.
La variété des milieux cités (144), due à une description parfois détaillée, freine la
comparaison ultérieure des données. La typologie a donc été simplifiée, par un regroupement
des milieux s’appuyant sur les espèces concernées et sur les autres milieux cités pour chaque
espèce (cf. Annexe 3). Nous disposons ainsi de 28 milieux simplifiés. Pour permettre la
comparaison entre eux et avec les données actuelles, les milieux simplifiés sont eux-mêmes
130
classés en type de milieu. La classification est inspirée des T.O.S. définis dans le chapitre 3
(cf. p.76).
Culture,
Vigne,
Communauté rudérale,
Planté,
1. 3 -
Prairie,
Pelouse,
Fruticée,
Bois,
Lisière,
Haie,
Eaux.
Liste floristique globale
Nous désignons comme ‘liste floristique global’ l’ensemble des taxons inventoriés dans les
listes floristiques, actuelle et passée (cf. Annexe 4). Cette liste illustre la flore ‘potentielle’ du
Lauragais, au sens où elle renferme l’ensemble des espèces susceptibles d’être rencontrées ou
d’avoir pu l’être, et constitue le document de base pour l’étude de la variation de la flore du
Lauragais au cours du temps.
Ces données floristiques ponctuelles sont enrichies par diverses sources d’informations
supplémentaires, datant d’époques intermédiaires, dont nous effectuons la description
maintenant.
1. 4 -
Indications bibliographiques : des sources d’information supplémentaires
Diverses listes - flores, inventaires floristiques, listes de protection - viennent enrichir la liste
floristique globale.
1. 4. 1 -
Les documents floristiques anciens
Des listes floristiques anciennes, régionales, viennent compléter la liste communale de 1885,
afin d’enrichir la connaissance de la flore passée. Les informations extraites concernent la
fréquence relative des espèces, les types de milieux fréquentés et d’éventuelles observations
jugées utiles, pour l’ensemble des taxons recensés dans la liste floristique globale. Les
informations sont extraites d’une part de flores locales, d’autre part de listes floristiques, tirées
de revues anciennes.
a-
Les flores locales
Trois flores de la région toulousaine apportent des informations supplémentaires pour la
connaissance de la variation de la flore qui nous permettront par la suite notamment d’estimer
la tendance évolutive des espèces appartenant à la flore lauragaise. Ces flores classiques pour
la région toulousaine sont la flore de Noulet datant de 1884, qui constitue un document de
comparaison avec l’inventaire communal de 1885, la flore de Sudre, 1907 et la flore de Bosc,
1961, dernière flore en date portant sur la région toulousaine (Noulet, 1884 ; Sudre, 1907 ;
Bosc, 1961). L’exploitation de ces documents est basée sur la prise en compte de la fréquence
relative et des types de milieu fréquentés, précisés pour chaque espèce faisant partie de la liste
floristique globale.
131
Les documents couvrent des territoires plus ou moins étendus autour de Toulouse et
englobent le Lauragais.
NOULET (1884)
« La circonscription adoptée a Toulouse comme centre. Cette contrée qui comprend
outre l’arrondissement de Toulouse, de Muret et de Villefranche, est composée de
vallées plus ou moins larges parcourues par des cours d’eau et de collines dont les
points les plus élevés ne dépassent guère 300 mètres d’altitude […] notre livre peut
servir de guide des limites du Gers aux bords du Tarn, et du pied des Pyrénées au
département de Tarn-et-Garonne. »
SUDRE (1907)
« Le rayon de cette florule embrasse toute la partie basse du département de la
Haute-Garonne, c’est-à-dire les arrondissements de Toulouse, de Villefranche et de
Muret. Cette région, dont l’altitude ne dépasse guère 300 mètres, est formée de
terrains appartenant aux époques tertiaire et quaternaire. Les terrains tertiaires, qui
se rencontrent sur la plupart des coteaux, sont formés de grès molasses, de sables et
d’argiles souvent accompagnées de calcaire (terres fortes). Les terrains quaternaires
occupent surtout les vallées de la Garonne, du Tarn, de l’Hers, du Girou et de
quelques autres cours d’eau de moindre importance ; ils sont constitués par des
sables ou des terres argilo-siliceuses (boulbènes) et contiennent fréquemment des
galets plus ou moins gros. »
BOSC (1961)
« […] un ouvrage portant uniquement sur les plantes de la région s’étendant de la
forêt de Bouconne à celle de Buzet, soit dans un rayon de 20 à 30 km autour de
Toulouse. »
b-
Les documents floristiques de revues départementales
Les listes floristiques anciennes sont enrichies d’observations tirées du dépouillement de
diverses revues : le Journal d’Agriculture du Sud-Ouest pour la période de temps comprise
entre 1858 et 1960, le Bulletin de la Société d’Histoire Naturelle de Toulouse pour la période
comprise entre 1867 et 1925, et le Bulletin de la Société Botanique de France pour l’année
1864.
- Journal d’Agriculture du Sud-Ouest
Les articles sur la flore traitent en particulier des plantes fourragères cultivées ou non
(graminées, légumineuses), ce qui témoigne des fortes préoccupations à l’époque de
l’alimentation des animaux d’élevage (ovin, bovin, porcin, caprin, équin), plantes broutées
dans les prairies naturelles, prairies artificielles, chaumes après moisson, bois, bords de
chemins, haies (Baillet, 1859 ; Baillet, 1860 ; Clos, 1861 ; Clos, 1876).
- Bulletin de la Société d’Histoire Naturelle de Toulouse
Les listes du BSHNT nous ont tout particulièrement servi à valider la tendance évolutive des
espèces depuis la fin du XIXe siècle. Les articles portent essentiellement sur les comptes
132
rendus d’excursions faites dans la région toulousaine, la description de plantes nouvellement
apparues ou la signalisation de plantes constatées en régression, ainsi que sur une
bibliographie de la flore de la région toulousaine (Lacaze, 1867 ; Timbal-Lagrave, 1867 ;
Timbal-Lagrave, 1868 ; Timbal-Lagrave, 1870a ; Timbal-Lagrave, 1870b ; Desjardins, 1876 ;
Desjardins, 1878 ; Clary, 1887 ; Fontès M., 1889 ; Fagot, 1895 ; Fagot, 1897 ; Lamic, 1897 ;
Lamic, 1898 ; Dop, 1907 ; Dop, 1910 ; Nicolas, 1922)
- Bulletin de la Société Botanique de France
Diverses listes floristiques du XIXe siècle sont présentées (Baillet, 1864).
1. 4. 2 -
Les documents floristiques actuels
Les listes de protection à différentes échelles administratives nous permettent de prendre en
compte le statut de protection des plantes indexées dans la liste floristique globale. Ces listes
renseignent en particulier sur la valeur patrimoniale des espèces. Nous prenons en compte par
ailleurs des listes portant sur des espèces problématiques comme les invasives.
a-
Les listes de protection
Diverses listes générales de protection, effectives ou souhaitables, apportent une information
supplémentaire pour l’ensemble des taxons recensés, concernant leur statut et leur protection
éventuelle. Cette information est utilisée pour estimer la valeur patrimoniale de chaque espèce
végétale, selon une échelle définie par la rareté établie de l’espèce aux différents niveaux
administratifs (départemental, régional, national). Notons que la région Midi-Pyrénées est la
seule région de France à ne s’être pas encore dotée d’une liste des espèces végétales
protégées.
b-
-
Livre rouge de la flore menacée de France, Tome 1, espèces prioritaires (Olivier et
al., 1995)
-
Protection nationale (Annexe I et II) in Inventaire des plantes protégées de France
(Olivier et al., 1995 ; Danton et Baffray, 1995)
-
Au niveau européen, la Directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992
concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore,
sauvages, plus communément appelé ‘Directive Habitats’
Les listes d’espèces xénophytes invasives
Nous nous basons sur une liste établie en raison de préoccupations d’invasion d’espèces
exotiques, pour le secteur méditerranéen français (Aboucaya, 1998). Cette liste identifie les
espèces invasives avérées (taxon introduit après 1500 et naturalisé, compétitif ou causant des
déséquilibres dans les écosystèmes), les espèces invasives potentielles, à surveiller
attentivement (taxon susceptible d’être tôt ou tard dans la liste d’invasion avérée), la liste
d’attente (taxon xénophyte à forte dynamique mais non présent dans les formations
spontanées).
133
1. 5 -
Harmonisation nomenclaturale
Dans un souci de faciliter la lecture et la comparaison des listes floristiques, nous avons
harmonisé la nomenclature pour les Familles, les Genres et les Espèces, à partir de l’Index
synonymique de la flore de France (Kerguelen, 1999), utilisé actuellement en France dans la
majorité des travaux botaniques.
Les taxons inventoriés dans les listes floristiques sont identifiés au niveau de l’espèce et
parfois au niveau de la sous-espèce. Nous emploierons, dans la suite de l’étude, le terme
d’espèce ou de taxon au sens « d’unité taxonomique » qui englobe à la fois l’espèce et les
rangs inférieurs à l’espèce.
2-
Les caractéristiques descriptives de la flore et de la végétation
Les différentes listes floristiques traitées - actuelle, passée et globale - sont complétées par des
données quantitatives et qualitatives qui vont permettre de caractériser la flore et de décrire la
végétation, appartenant aux époques actuelles et passées. Les données quantitatives
correspondent à divers indices de biodiversité calculés, qui caractérisent la flore d’un site à
une date donnée. Les données qualitatives sont celles de l’autécologie propres aux espèces,
elles informent sur la distribution des espèces en fonction de leurs traits de vie.
2. 1 -
Les indices de biodiversité, caractéristiques de la flore
Calculés à partir des listes floristiques établies, nous employons plusieurs indices de la
biodiversité, fréquemment utilisés par les biologistes (Barbault, 1992 ; Bornard et al., 1996)
(cf. p.30):
-
La richesse spécifique qui représente le nombre d’espèces par relevé.
-
L’indice de Shannon, H’ (Shannon, 1948)
H’ = - Σ (pi log pi)
où pi est l’abondance proportionnelle de l’espèce i dans l’échantillon.
L’avantage de cet indicateur est qu’il combine la composition en espèce et
l’importance relative de celles-ci. Deux groupements d’un même type qui ont la
même composition mais dont les espèces sont en proportion distinctes, constituent
des entités différentes qui auront des valeurs d’indice différentes.
-
134
La diversité supraspécifique, aspect de la biodiversité très négligé jusqu’à ce jour
(Lamotte, 1995), correspond à la diversité des taxons évaluée à un niveau
supérieur à l’espèce. Cet indice est important puisqu’il révèle des altérités qui
pourraient être masquées si nous ne considérions que la richesse spécifique. Par
exemple, un peuplement renfermant une centaine d’espèces est considéré comme
moins diversifié s’il est composé d’espèces appartenant toutes à un même groupe
taxonomique que si celles-ci appartiennent à des groupes très différents. D’autant
plus que des espèces très différentes les unes des autres contribuent d’avantage à la
diversité globale que des espèces proches (OCDE, 1996). Nous estimons cette
diversité supraspécifique au niveau du Genre et de la Famille.
-
La richesse patrimoniale, qui est moins fréquemment considérée, exprime, dans
notre étude, la biodiversité remarquable, c'est-à-dire le nombre d’espèces soit
bénéficiant d’un statut de protection, soit d’une rareté reconnue dans la littérature,
soit d’un habitat très spécifique (Orth et al., 1996). Nous prenons également en
compte, pour cet indice, les espèces invasives, parce que nous estimons que leur
présence même, en matière de pourcentage, diminue l’importance des espèces à
valeur patrimoniale et donc la richesse associée.
-
La fréquence, définie classiquement comme étant le pourcentage d’individus d’une
espèce par rapport au total des individus (Dajoz, 1985). La fréquence est calculée
pour les relevés regroupés par type de milieu (t), par rapport au nombre total de
types de milieu (T), selon la formule (Lemée, 1967)
c = (t x 100)/T
Pour les besoins de notre réflexion, nous qualifions les espèces de constante,
accessoires et accidentelles, selon leur fréquence. Une espèce pourra être constante
pour un type de milieu et accidentelle pour la liste globale.
2. 2 -
Les données de l’autécologie, descripteurs de la végétation
À partir des données de l’autécologie1, un grand nombre de renseignements peut être déduit
de la composition floristique de l’ensemble des milieux identifiés. En effet, l’autécologie qui
illustre les traits de vie des espèces, s’attache à définir leurs exigences écologiques vis-à-vis
des facteurs ou descripteurs écologiques fondamentaux. Elle peut donc être utilisée pour
décrire la végétation actuelle et passée, présente sur les sites d’étude et comprendre la
distribution des espèces dans les formations végétales dispersées dans le paysage morcelé, en
mettant en relation facteurs mésologiques et distribution de la végétation (cf. chapitre 5).
Chaque espèce est considérée comme un bioindicateur des conditions climatiques
(température, lumière) et édaphiques (pH, humidité) dont l’influence combinée sur les
végétaux explique la distribution de nombreuses espèces (Dajoz, 1985 ; Guigo, 1991). Pour
cela, nous prévoyons d’établir un spectre écologique qui représente la proportion des espèces
selon les données de l’autécologie.
Les données de type qualitatif sont extraites de diverses sources bibliographiques, à partir du
dépouillement d’un ensemble de documents généraux et spécialisés (dictionnaires, ouvrages,
flores, bases de donnée en ligne) (Jauzein et Montégut J., 1983 ; Da Lage et Métailié, 2000).
(Fournier, 1947 ; Rameau et al., 1989 ; Lemoine, 1990 ; Fitter et al., 1991 ; Jauzein, 1995 ;
Marmarot, 1996 ; Bournérias et et al., 1998 ; Lauber et Wagner, 2000 ; Julve, 2000 ; Prelli,
2001). Six caractéristiques écologiques ou traits de vie sont retenus, qui vont apporter des
éléments de réponse à la distribution des espèces dans les formations végétales dans les sites
et aux différentes époques étudiées. Les modalités de chaque trait de vie sont suivies de leur
abréviation entre parenthèse qui sera employée par la suite dans les graphes.
1
Autécologie Ecologie d’une espèce donnée, considérée isolément (Da Lage et Métailié, 2000).
135
-
Le groupe écologique définit les habitats naturels ou semi-naturels dans lesquels la plante
croit de manière spontanée dans le Lauragais ou s’est naturalisée, et avec lesquels elle a le
plus d’affinité. Nous distinguons neuf modalités pour cette variable, inspirées de la
légende de la flore de Suisse (Lauber et Wagner, 2000).
-
-
L’aire de répartition, d’après Fournier (1947), indique la portion de la surface de la Terre
occupée par les espèces inventoriées. Cette donnée renseigne notamment sur l’aire
d’origine des espèces afin de recenser les introduites.
-
-
Européenne (eur) à aire couvrant presque toute l’Europe,
Eurasiatique (eas) des territoires correspondant à une large partie de l’Europe et de
l’Asie,
Eurosibérienne (esi) des régions de l’Europe et de l’ouest de la Sibérie,
Atlantique (atl), dont l’aire se situe en façade ouest de l’Afrique ou de l’Europe
tempérée,
Méditerranéenne (med), des contrées du pourtour méditerranéen,
Méditerranneo-atlantique (mat), des contrées bordant la méditerranée nordoccidentale et de la façade sud-ouest de l’Europe,
Cosmopolite (cos), largement répandue à la surface terrestre,
Circumboréale (cir), des régions tempérées ou froides de l’Eurasie et de
l’Amérique du Nord,
Introduite (int), non originaire des régions tempérées européennes.
L’exigence vis-à-vis de la lumière indique les conditions préférentielles de la plante par
rapport à l’ensoleillement. Nous distinguons, au sens de Rameau (Rameau et al., 1993),
-
136
Espèce pionnière (pio), colonise les sols nus et les terrains sans végétation
(rochers, coupe forestière à blanc),
Espèce rudérale (rud), fréquente les milieux anthropisés (décombres, …),
Espèce adventice (adv), s’introduit spontanément ou est propagée
accidentellement dans les cultures (comprend les messicoles),
Espèce forestière (for), inféodée au milieu boisé (haies, bosquets, bois),
Espèce de prairie maigre (prm), sur milieux mésophiles à xériques, de type
thérophytaie,
Espèce de prairie grasse (prg), sur milieux mésohygrophiles à hygrophiles, de
type thérophytaie,
Espèce de marais (mar), sur milieux hygrophiles sujets à des inondations
fréquentes,
Espèce aquatique (aqu), pousse les pieds dans l’eau,
Espèce cultivée (cul), non spontanée, ne doit sa présence qu’à l’intervention de
l’homme, mais que l’on peut rencontrer dans des formations à végétation
spontanée, par dissémination à partir des cultures.
Les plantes héliophiles (hel), de lumière, qui sont les espèces des formations
herbacées ou de lisières et pénétrant dans les forêts ‘ouvertes’,
Les plantes photophiles (pho), de demi-ombre, ayant leur optimum en taillis sous
futaie, en forêts plus ou moins dégradées, en lisières, le long des haies et fruticées
ou au bord des chemins,
Les plantes sciaphiles (scia), d’ombre, liées aux couverts très fermés.
-
L’exigence vis-à-vis de l’humidité du sol indique les conditions préférentielles de la
plante par rapport à la teneur en eau du sol. Nous distinguons, d’après Rameau simplifié
(Rameau et al., 1993), les espèces
-
-
Le mode de dissémination est identifié selon l’attribut morphologique que les espèces ont
développé pour disperser leurs graines. Cette donnée illustre l’aptitude des plantes à se
disperser dans le paysage et leur potentiel à coloniser de nouveaux milieux. Nous
distinguons sept modalités, classées par ordre d’importance croissante de la distance
pouvant être parcourue, dans le territoire d’étude (Julve, 2000 ; Momont, com. pers.).
-
-
-
Xérophiles (xe), croissant préférentiellement sur sol très sec en permanence,
Mésoxérophiles (mx), de milieux secs, notamment l’été,
Mésophiles (me), sur sol bien drainé ou à drainage moyen,
Mésohygrophiles (mh), sur sol assez humide ou humide en permanence,
Hygrophiles (hy), sur sol inondé en permanence,
À large amplitude (la), n’ayant pas d’exigence particulière.
Espèce barochore (bar), n’ayant pas développé d’attributs de dissémination,
tombant simplement au sol. Toutefois, le vent intervient toujours, même pour ces
espèces. Remarquons que toutes les espèces peuvent être considérées comme
barochores,
Espèce autochore (aut), ayant des graines pouvant se disséminer seules par
roulement ou enfouissement,
Espèces myrmécochore (myr), cas particulier de la zoochorie, ayant des graine
transportée par les fourmis.
Espèce hydrochore (hyd), ayant des graines flottantes transportées par les eaux,
Espèce endozoochore (end), ayant des graines ingérées par les animaux
notamment les oiseaux (ornithochorie),
Espèce épizoochore (epi), ayant des graines accrochée aux animaux,
Espèce anémochore (ane), ayant des graines qui ont développé des attributs
facilitant leur dispersion par le vent (aigrette, soie …),
Le type biologique indique la durée de végétation de la plante. Pour les plantes qui
peuvent se présenter sous différents types, la forme la plus commune a été retenue. Nous
distinguons selon la classification de Raunkiaer (Julve, 2000).
-
Les mésophanérophytes (abr), végétaux ligneux de hauteur supérieur à 7mètre,
Les microphanérophytes (abu), végétaux ligneux entre 1 et 7 mètres,
Les chaméphytes, végétaux ligneux inférieurs à 0,5 mètre, suffrutescents (csu),
frutescents (cfr),
Les hémicryptophytes, végétaux herbacés vivaces visibles l’hiver, bisannuel (hbi),
cespiteux (hcs), érigés (her), rosettés (hro), ruboïdes (hru), stolonifères (hst),
Les géophytes, végétaux herbacés vivaces non visibles l’hiver, bulbeux (gbu),
rhizomateux (grh), tubuleux (gtb),
Les thérophytes, végétaux annuels, estivaux (tes) ou vernaux (tve), selon l’époque
de germination.
137
W
Le croisement des données floristiques et des caractéristiques descriptives autorise maintenant
la caractérisation de la flore et la description de la végétation, illustrées dans les différentes
listes floristiques et dont la confrontation permet la mise en évidence des nuances de la flore
actuelle du Lauragais et ses variations depuis plus d’un siècle.
II -
Mise en évidence de la variation spatio-temporelle
de la flore : estimation de la tendance évolutive des
espèces
À partir des données floristiques collectées, nous étudions successivement la composition et
la diversité de la flore actuelle, sur les deux sites d’étude. Puis l’étude de la variation de la
flore est envisagée, dont le document de référence est la flore de Haulier de 1885.
- Dans un premier temps, nous étudions, par comparaison des listes floristiques dressées sur
les deux sites d’étude, les nuances de la flore actuelle qui s’expriment au niveau de la
diversité floristique et au niveau de la distribution des espèces dans les formations végétales
relevées. Cette comparaison prend en compte diverses données écologiques, permettant de
caractériser la végétation et d’identifier les différentes formations végétales présentes, pour
les deux sites d’étude.
- Dans un deuxième temps, nous étudions les variations de la flore lauragaise depuis la fin du
XIXe siècle (1885) par comparaison de la fréquence relative (au sens général des flores) des
espèces référencées dans la liste floristique globale grâce au référencement à différentes
périodes (1884, 1885, 1907, 1960, 2001). Nous cherchons ainsi à mettre en lumière les
tendances évolutives des espèces et donc la variation de la flore lauragaise, notamment sa
banalisation supposée, dont une estimation objective sera apportée par la prise en compte et
l’estimation du poids des données de l’autécologie (cf. Chapitre 5).
Les traitements se limitent plus ou moins à une description analytique, dont l’interprétation
précise ne sera réalisée que dans le chapitre 5, afin de prendre en compte les facteurs
potentiellement explicatifs de la distribution de la végétation et de la composition de la flore.
1-
Aspects actuels de la flore et de la végétation lauragaises
Les aspects actuels de la flore sont étudiés en comparant les listes floristiques dressées par
relevé phytosociologique sur les deux sites d’étude, distincts mais représentatifs du même
territoire. Cette comparaison s’intéresse aux nuances qui s’expriment au niveau de la diversité
floristique et au niveau de la distribution des espèces dans les formations végétales, en
138
réponse à des schémas d’organisation spatiale différents et donc à des degrés
d’artificialisation du paysage distincts.
Pour cela, nous appliquons aux listes floristiques les données écologiques calculées à partir de
sources bibliographiques ou à partir de nos observations de terrain. Les indices de biodiversité
et les données de l’autécologie vont permettre de caractériser la flore et de décrire la
végétation à travers la distribution des espèces. Les caractéristiques descriptives de la
végétation et les coefficients d’abondance-dominance des espèces vont permettre de décrire
selon deux échelles la physionomie de la végétation et d’identifier les différentes formations
végétales présentes, pour les deux sites d’étude. Plus que sur l’observation des similitudes,
nous nous focaliserons surtout sur l’observation des différences, car elles retranscrivent des
processus de colonisation différents face à une organisation du paysage différente.
Finalement, cette partie consiste à étudier la flore globale actuelle et les nuances entre sites.
Après quatre années de prospection (février 1999 à août 2003), dans les différentes situations
échantillonnées, représentant des milieux anthropisés à des degrés divers, nous pouvons
dresser la liste floristique exhaustive sur les deux sites d’étude. Nous avons inventorié toutes
les espèces faisant partie des embranchements des Ptéridophytes et des Spermaphytes. Les
déterminations qui ont pu soulever un doute sur le terrain, ont été systématiquement
confirmées au laboratoire sur des échantillons prélevés et mis en herbier. L’état de certaines
plantes lors de l’herborisation (rosettes, aspect anormal de la plante) a fait qu’il ne nous a pas
toujours été possible de les déterminer. Nous les avons exclues des analyses. Les quelques
ambiguïtés d’identification qui ont pu se poser, sont résolues en limitant l’indexation de la
plante au niveau générique (exemple : Rubus), qui est alors utilisé dans les analyses.
1. 1 -
Caractérisation de la flore
La flore est caractérisée grâce à l’utilisation des indices de biodiversité, données écologiques
calculées à partir des listes floristiques. Ces indices sont la richesse spécifique, l’indice de
diversité de Shannon, la diversité supraspécifique, la richesse patrimoniale et la fréquence des
espèces dans les relevés. Ces indices sont calculés pour la flore actuelle globale (liste de
toutes les espèces recensées dans les deux sites) et pour chaque site.
1. 1. 1 -
Richesse spécifique
Nb sp
Nb relevés
Richesse
Richesse Richesse
moy/rel
min
max
463
80
16,5
5
52
Nailloux
385
74
20,1
5
60
Préserville
518
154
18
5
60
Global
Tableau 11. Nombre d’espèces, de relevés, richesse spécifique moyenne par relevé, minimale et
maximale
La flore actuelle globale est riche de 518 espèces (sous-espèces incluses), inventoriées dans
154 relevés. À l’observation de la richesse spécifique par type de milieu (cf. Figure 27), nous
constatons que les cultures représentent un nombre conséquent d’espèces, contrairement aux
139
idées préconçues. Ce sont les milieux de type vigne, fruticée et bord des eaux qui sont les plus
pauvres en espèces. À l’inverse, les milieux les plus riches sont les pelouses des coteaux et
ceux représentant les communautés rudérales (friches, habitations, décombres …).
Richesse spécifique par type de milieux, communes de
Nailloux et Préserville, 2000
250
200
150
100
50
D
U
SE
C
O
M
R
O
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PE
L
BO
LI
SI
ER
E
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H
PR
C
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IE
E
AI
X
U
EA
U
FR
VI
G
N
E
TI
C
EE
0
Figure 27. Richesse spécifique par type de milieux
Plus précisément (cf. Figure 28), le site de Nailloux renferme une richesse spécifique
supérieure pour les pelouses et les communautés rudérales, tandis que le site de Préserville
renferme une richesse spécifique supérieure pour les bords des eaux et les lisières. Notons que
le site de Préserville a une richesse nulle pour les vignes, ce type de milieu étant inexistant (cf.
Chapitre 3). La richesse des milieux boisés et des cultures est assez similaire pour les deux
sites.
Richesse spécifique par type de milieu
Nailloux
Préserville
200
180
160
140
120
100
80
60
40
20
0
Eaux
Prés Nail %
+80
Fruticée
-15
Vigne
-100
Lisière
Prairie
Cultures
Bois
+82
-13
+10
+8
Pelouse Com rud
-24
-19
Figure 28. Richesse spécifique par type de milieu et différence en pourcentage entre le site de
Préserville et de Nailloux
140
Si nous considérons la richesse spécifique par relevé, elle est très variable et maximale sur le
site de Préserville : 5 à 60 espèces par relevé (contre 5 à 52 espèces pour Nailloux) (cf.
Tableau 11).
La commune de Préserville dont la flore comporte 20% de moins d’espèces que celle de
Nailloux, mais dont la richesse spécifique moyenne par relevé (richesses significativement
différentes au seuil de 1%) est supérieure, est en moyenne floristiquement plus riche par
relevé que la commune de Nailloux, mais globalement moins riche.
1. 1. 2 -
Diversité floristique
L’indice de diversité de Shannon (valeurs moyenne et médiane), pour la flore globale, est égal
à 2,7.
H’moy
Nailloux
2,6
Préserville
2,8
Global
2,7
Tableau 12. Indice de diversité de Shannon, H’
L’indice de diversité de Shannon (valeur moyenne par relevé) est supérieur pour la commune
de Préserville (test des différences significatif au seuil de 1%). La commune de Préserville est
en moyenne floristiquement plus diversifiée que la commune de Nailloux, mais en valeur
absolue elle est moins diversifiée.
1. 1. 3 -
Diversité supraspécifique
Familles
Genres
278
Nailloux
83
75
243
Préserville
86
306
Global
Tableau 13. Nombre de Familles et de Genres
- Diversité des Familles
La diversité de familles de la flore actuelle est égale à 86. Elle est principalement composée
(33 % des espèces inventoriées) par la Famille des Poaceae, des Asteraceae et des Fabaceae,
toutes trois cosmopolites1 (cf. Figure 29). Une large gamme de Familles (67 familles),
rassemblées sous la catégorie AUTRES, est représentée par moins de 10 espèces, dont 32
Familles ne sont représentées que par une seule espèce.
1
La Famille des Poaceae est la plus importante à travers le Monde d’un point de vue écologique et économique.
Les Asteraceae et les Fabaceae sont deux des plus vastes familles de plantes à fleurs (Heywood, 1996).
141
Figure 29. Importance des Familles représentées actuellement
La diversité des Familles est supérieure à Nailloux (cf. Figure 30). La flore de Nailloux est
significativement plus riche en Scrophulariaceae et Asteraceae (anémochores) ; la flore de
Préserville est significativement plus riche en Fabaceae (prairiale).
Famille, %
Nailloux
Préserville
40
35
30
25
20
15
10
5
G
er
an
ia
ce
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TR
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0
Figure 30. Familles représentées
Il est particulièrement intéressant de se pencher sur les distinctions entre les deux sites, par la
comparaison de la liste des Familles qui sont propres à chacun d’eux. Le site de Préserville
présente moins de Familles propres que celui de Nailloux (cf. Tableau 14). Les 11 Familles
142
propres à Nailloux aussi bien que les 3 Familles propres à Préserville sont soit des
cosmopolites, soit des introduites.
Nailloux
ALISMACEAE
POTAMOGETONACEAE
Cosmopolites
aquatiques
ASPLENIACEAE
DENNSTAEDTIACEAE
OPHIOGLOSSACEAE
Cosmopolites
BUDDLEJACEAE
CANNABACEAE
CUPRESSACEAE
TILIACEAE
Régions tropicales :
Introduites ou
autochtones
Préserville
LEMNACEAE
Région tropicale :
Introduites
Cosmopolite aquatiques
MORACEAE
Tropicale: Introduites
AMARYLLIDACEAE
Plantes ornementales
introduites, ou
autochtones
Tableau 14. Familles propres à chaque site et caractéristique biogéographique des espèces
concernées, d’après (Heywood, 1996)
HYDROPHYLLACEAE
LILIACEAE
- Diversité des Genres
La diversité des Genres de la flore actuelle est égale à 306. La plupart des Genres ne sont
représentés que par une seule espèce (68%). Les Genres les plus représentés (par au moins
cinq espèces) correspondent surtout à des plantes herbacées colonisant une diversité de
milieux, et notamment les espaces rudéralisés :
Crepis, Juncus, Medicago, Prunus, Sedum 5 espèces
Carex, Poa, Rumex 6 espèces
Allium, Euphorbia 7 espèces
Geranium, Lathyrus, Trifolium, Vicia 8 espèces
Ranunculus, Veronica 9 espèces
Bromus 10 espèces
Ce sont quasiment les mêmes Genres qui sont en majorité représentés dans les deux sites (cf.
Tableau 15). Mais le Genre Veronica est bien plus représenté sur Nailloux.
Nailloux
Préserville
Veronica (9), Bromus, Ranunculus (8), Trifolium
Bromus (9), Geranium, Lathyrus, Vicia (7),
(7), Carex, Euphorbia, Geranium, Lathyrus, Poa,
Euphorbia, Ranunculus, Trifolium (6), Carex,
Vicia (6), Allium, Medicago, Prunus (5),
Medicago, Rumex (5), Allium, Juncus, Poa, Prunus,
Centaurea, Crepis, Festuca, Populus, Rumex,
Veronica (4)
Sedum, Senecio, Viola (4)
Tableau 15. Genres représentés par quatre espèces ou plus (nombre d’espèces indiquées entre
parenthèse)
143
Si nous nous penchons maintenant sur les distinctions entre les deux sites, à savoir les Genres
propres à chacun d’eux, nous observons une richesse supérieure à Nailloux. Le site de
Nailloux renferme trois fois plus de Genres qu’il ne partage pas avec le site de Préserville.
Genres propres au site de Nailloux (hors parc et jardin) : 62
Acinos, Alisma, Althaea, Anchusa, Anthyllis, Aphanes, Aquilegia, Arabidopsis, Arenaria, Arundo,
Asplenium, Avenula, Bellevalia, Bolboschoenus, Borago, Buddleja, Calendula, Cardamine, Carlina,
Centranthus, Circaea, Cymbalaria, Cyperus, Erigeron, Erodium, Gaudinia, Glyceria, Helianthemum,
Helianthus, Helichrysum, Humulus, Inula, Juniperus, Kandis, Lithospermum, Lycium, Lycopus,
Minuartia, Monerma, Onopordum, Ophioglossum, Ornithogalum, Phacelia, Pinus, Polystichum,
Potamogeton, Pteridium, Pyracantha, Roegneria, Saponaria, Schoenoplectus, Sison, Spartium,
Spergularia, Sporobolus, Teucrium, Thlaspi, Tilia, Triticum, Tussilago, Umbilicus, Valeriana
Genres propres au site de Préserville : 27
Aegilops, Apium, Asteriscus, Calluna, Carduus, Carpinus, Castanea, Consolida, Deschampsia,
Dorycnium, Eleocharis, Erica, Ficus, Filipendula, Heliotropium, Laburnum, Lemna, Lepidium, Malus,
Morus, Narcissus, Onobrychis, Silybum, Succisa, Symphytum, Syringa, Zea
1. 1. 4 -
Richesse patrimoniale
• "Messicoles, espèces à intérêt patrimonial"
D’après la liste du plan national d'action pour la conservation des plantes messicoles
(Aboucaya et al., 2000)
-
Taxons en situation précaire
Taxons communs aux 2 sites
Taxons propres
Adonis annua L.
Bromus secalinus L., Consolida ajacis (L.) Schur,
Lolium temulentum L.
Nailloux
Préserville
-
Taxons à surveiller, qui se maintiennent plus ou moins
Taxons communs aux 2 sites
Nailloux
Préserville
-
Taxons propres
Anthemis altissima L. emend Sprengel, 1826,
Anchusa arvensis (L.) M. Bieb.,
Bromus arvensis L., Calepina irregularis (Asso) Stachys annua (L.) L.
Thell., Euphorbia falcata L., Legousia speculumveneris (L.) Chaix, Ranunculus arvensis L.
Taxons considérés comme encore abondant, au moins pour certaines régions
Taxons communs aux 2 sites
Nailloux
Préserville
Aphanes arvensis L., Avena fatua L., Galium
aparine L., Papaver rhoeas L., Scandix pectenveneris L., Sinapis alba L.
Taxons propres
Lithospermum arvense L.
Nous pouvons donc avancer que les deux sites sont aussi riches en espèces messicoles, et la
plupart des taxons sont communs aux deux sites.
144
Adonis annua L.
Consolida ajacis (L.) Schur
Ranunculus arvensis L.
Photo 13. Messicoles, espèces à intérêt patrimonial (Schwal)
• "Espèces protégées en France"
D’après le Livre rouge de la flore menacée de France, Tome 1, (Annexe I et II1) (Olivier et
al., 1995 ; Danton et Baffray, 1995).
Taxons communs aux 2 sites
Nailloux
Préserville
Chaenorrhinum minus (L.) Lange ssp minus (en
danger)
Taxons propres
Bellevalia romana (L.) Reichenb.
(vulnérable) (Belhacène, 2001)
Le site de Nailloux est riche de 2 espèces protégées. Le site de Préserville est riche d’une
espèce protégée.
• "Espèces xénophytes, invasives"
Les deux flores renferment des espèces considérées comme invasives, d’après Aboucaya
pour le secteur méditerranéen français (Aboucaya, 1998),
-
Espèces invasives avérées (taxon introduit après 1500 et naturalisé, compétitif ou
causant des déséquilibres dans les écosystèmes)
Taxons communs
Nailloux
Robinia pseudacacia L.
Taxons propres
Buddleja dividii Franchet, Helianthus tuberosus L.,
Oenothera biennis L. gr., Senecio inaequidens D.C.,
Sporobolus indicus (L.) R. Br.
Préserville
-
Espèces invasives potentielles, à surveiller attentivement (taxons susceptibles
d’être tôt ou tard dans la liste d’invasion avérée)
Taxons communs
Nailloux
-
Taxons propres
Cedrus atlantica (Endl.) Carr., Pyracantha coccinea
Roemer
Préserville
1
Arrêté du 20 janvier 1982 modifié par l’arrêté du 31 août 1995, relatif à la liste des espèces végétales protégées
sur l’ensemble du territoire national (JONC du 13 mai 1982).
145
La présence de ces deux espèces, plantées pour la végétalisation de coteaux défrichés, traduit
un aménagement pas toujours regardant des préoccupations environnementales.
-
Liste d’attente (taxon xénophyte à forte dynamique mais non présent dans les
formations spontanées). Ces espèces sont présentes dans les friches et décombres.
Taxons communs
Nailloux
Préserville
Taxons propres
Melilotus albus Medik., Phacelia
Coniza canadensis (L.) Cronq., Coniza
sumatrensis (Retz.) Walker, Veronica persica tanacetifolia Benth.
Poiret.
Amaranthus retroflexus L.
Le site de Nailloux est plus sujet à des introductions intentionnelles ou accidentelles d’espèces
exotiques, considérées comme invasives.
Oenothera biennis L.
Senecio inaequidens D.C.
Sporobolus indicus (L.) R. Br.
Photo 14. Espèces xénophytes invasives (Schwal)
1. 1. 5 -
Fréquence des espèces
La fréquence exprime classiquement le nombre de relevés dans lesquels une espèce donnée a
été inventoriée. Elle peut également exprimer le nombre de types de milieux fréquentés par
une espèce donnée, la deuxième acception étant utilisée ci-après. Nous qualifions les espèces
de constantes, accessoires et accidentelles, selon la valeur de leur fréquence.
La fréquence d’une espèce n se calcule selon la formule suivante
nombre de type de milieu présentant l’espèce n x 100
nombre total de type de milieu
- Pour la flore globale, nous constatons que 6,2% des espèces (32 espèces) ont une fréquence
supérieure ou égale à 70% (inventoriées dans au moins 7 types de milieu). Ces espèces
peuvent être considérées comme banales de la flore lauragaise actuelle puisqu’elles ont la
capacité de fréquenter une grande variété de milieux écologiques :
Arrhenatherum elatius (L.) P. Beauv.
Avena barbata Link
Brachypodium pinnatum (L.) P. Beauv.
Bromus sterilis L.
146
Bryonia dioica Jacq.
Carex flacca Schreber
Clematis vitalba L.
Convolvulus arvensis L.
Conyza canadensis (L.) Cronq.
Cornus sanguinea L.
Crataegus monogyna Jacq.
Daucus carota L.
Fraxinus angustifolia Vahl ssp. oxycarpa
Galium aparine L.
Geranium dissectum L.
Holcus lanatus L.
Hypericum perforatum L.
Lathyrus pratensis L.
Leucanthemum vulgare Lam.
Picris hieracioides L.
Plantago lanceolata L.
Poa pratensis L.
Prunus spinosa L.
Ranunculus acris L.
Rosa sp
Rubus sp
Solanum dulcamara L.
Sonchus oleraceus L.
Trifolium repens L.
Ulmus minor Miller
Vicia bithynica (L.) L.
Vicia sativa L.
Nous remarquons que cette liste réunit des plantes herbacées et des ligneux. De plus, parmi
ces espèces, certaines sont des introduites comme la vergerette du Canada (Conyza canadensis
(L.) Cronq.). Toutes ces espèces sont présentes dans les deux sites d’étude, confortant leur statut
d’espèces constantes pour la flore du Lauragais.
A contrario, 37% des espèces ont une fréquence minimale (10%), étant inventoriées dans un
seul type de milieu. Ces espèces peuvent être soit des espèces accidentelles, soit des espèces
étroitement liées à un type de milieu. Il est possible de trancher en observant pour chaque
espèce le nombre de relevés dans lesquels l’espèce a été trouvée. Si ce nombre est faible (1 ou
2 relevés), nous pouvons considérer l’espèce comme accidentelle. Si ce nombre est plus
important (au moins 3 relevés), nous pouvons admettre qu’elle est inféodée au type de milieu
représenté, et ce, d’autant plus que le nombre de relevés est important (cf. Tableau 16).
Type de milieu
Bois
Espèces
Cultures
Ranunculus arvensis L. (3)
Communautés rudérales
Linaria vulgaris Miller (3)
Bords des eaux
Lythrum salicaria L. (3), Typha latifolia L. (3)
Lisières
Fragaria vesca L. (4)
Pelouses
Ophrys scolopax Cav. (5), Bituminaria bituminosa (L.) E.H. Stirton (3),
Briza media L. (3), Galium mollugo L. ssp. erectum Syme (3), Genista
tinctoria L. (3), Poa bulbosa L. (3), Pyracantha coccinea M.J. Roemer
(3), Thymus pulegioides L. (3)
Ruscus aculeatus L. (18), Lonicera xylosteum L. (6), Dryopteris filix-mas
(L.) Schott (5), Sanicula europaea L. (4), Lathraea clandestina L. (3)
Tableau 16. Espèces inféodées à un seul type de milieu, nombre de relevés ≥ 3, indiqué entre
parenthèse
Le tableau ci-dessus (cf. Tableau 16) révèle simultanément les espèces inféodées à un type de
milieu particulier et celles qui y sont relativement fréquentes. Quasiment toutes ces espèces
(hormis Pyracantha coccinea M.J. Roemer et Ophrys scolopax Cav.) sont présentes dans les deux sites
d’étude, confortant leur statut d’espèces inféodées à un type de milieu particulier pour la flore
du Lauragais actuel. De ce fait, nous pouvons qualifier ces espèces de caractéristiques1 ou
accessoires du milieu représenté. Nous remarquons par ailleurs que les pelouses sont les types
de milieu les plus riches de telles espèces.
1
Espèce caractéristique Nous employons ce terme pour les espèces possédant une fréquence élevée et qui sont
représentées dans un seul type de milieu.
147
Remarquons que d’autres espèces de la flore sont évidemment inféodées à un des types de
milieu recensés, mais le faible nombre de relevés représentés ne nous permet pas de l’affirmer
de manière objective. De plus, certaines espèces qui sont inféodées à un type de milieu
peuvent avoir été trouvées dans d’autres types, et de ce fait, nous pouvons avancer qu’elles
sont moins inféodées, c’est-à-dire qu’elles ont une plasticité écologique plus large, ce qui
revient à conclure que la fréquence des espèces dans les différents types de milieu est liée à
leur plasticité écologique.
- La comparaison des fréquences entre les deux sites (valeurs non présentées) montre que le
site de Préserville est moins représenté par des espèces ayant une fréquence minimale, c’est-àdire fréquentant un seul type de milieu (21% des espèces au lieu de 33%). Par contre, il est
plus représenté par des espèces ayant une fréquence élevée, fréquentant au moins 7 types de
milieux différents (8,5 des espèces au lieu de 7%). Ceci peut exprimer une flore dans
l’ensemble plus ubiquiste et banale sur le site de Préserville.
1. 1. 6 -
Synthèse sur la caractérisation de la flore
- Les indices utilisés permettent de caractériser la flore globale du territoire lauragais et celle
de chaque site, et de mettre en évidence des différences. La flore du Lauragais, illustrée par
les sites de Nailloux et Préserville, est riche de plusieurs centaines d’espèces qui se distribuent
principalement dans les milieux de types pelouse et communauté rudérale. C’est au contraire
dans les milieux de type vigne, fruticée et bords des eaux que la richesse floristique est la plus
faible. Les vignes sont des milieux très rares, en régression forte, les fruticées illustrent des
formations de transition, peu représentées sur les deux sites (cf. chapitre 3) et ne perdurant pas
dans le paysage, étant rapidement supplantées. Notons que les milieux de type culture ont une
richesse spécifique relativement importante, malgré une forte pression (désherbage chimique)
sur ces milieux. La flore des milieux de type pelouses et communautés rudérales est plus riche
à Nailloux, celle des bords des eaux et lisières est plus riche à Préserville. Les relevés ont une
richesse spécifique et une diversité floristique, moyennes et maximales, plus élevées à
Préserville. La flore de Préserville est donc plus riche et diversifiée à l’échelle de l’espèce que
celle de Nailloux.
- La flore globale est dominée par des Familles cosmopolites, et le tiers des Familles n’est
représenté que par une espèce. Le site de Nailloux a une diversité de Famille, supérieure à
cause notamment d’espèces anémochores. La diversité des Genres, en majorité représentés
par une seule espèce, est également supérieure à Nailloux. Pour les deux sites, les genres
principaux représentent des espèces herbacées colonisant une diversité de milieux, témoignant
d’une flore globalement assez banale. La diversité supraspécifique est supérieure pour la flore
de Nailloux.
- Concernant la richesse patrimoniale estimée par la présence des espèces messicoles ou
protégées sur le territoire national, nous pouvons dire que la richesse patrimoniale des deux
sites en terme d’espèces messicoles et protégées est égale. En contre partie, la flore de
Nailloux est plus riche en espèces invasives. Ceci peut traduire un paysage plus touché par
l’intensification agricole et dénote l’importance de la préservation d’une diversité de parcelles
de natures différentes, même petites, dans la conservation d’espèces remarquables (Bellevalia
romana (L.) Reich.). Par ailleurs, la présence de certaines espèces, plantées pour la
végétalisation de coteaux, traduit un aménagement pas toujours en accord avec les conditions
naturelles locales. Le site de Nailloux semble beaucoup plus touché par la colonisation
d’espèces invasives que Préserville, peut-être en raison d’un développement économique et
148
urbain plus grand, facilitant la colonisation par un trafic routier plus dense, ainsi qu’en raison
d’interventions anthropiques volontaires par plantation d’espèces exotiques.
- Enfin, le calcul de la fréquence des espèces permet de qualifier les espèces de la flore
lauragaise de constantes (6% constantes), d’accidentelles, d’inféodées à un type de milieu
(37%) ou d’accessoires. La moyenne des fréquences des espèces est par ailleurs sensiblement
la même pour les deux sites. Toutefois, le site de Préserville montre une proportion plus
importante d’espèces constantes, ce qui pourrait traduire une flore plus ubiquiste et banale
pour le site de Préserville.
1. 2 -
Description de la végétation
La description de la végétation est basée dans notre étude sur l’analyse de la distribution des
espèces selon leurs traits de vie (cf. p.135). Pour cela, les données de l’autécologie, collectées
à partir de sources bibliographiques, sont utilisées. La végétation est étudiée premièrement
pour la liste floristique actuelle globale et secondement pour chaque site.
1. 2. 1 -
Liste floristique globale
Concernant la liste floristique globale actuelle, fusionnant les deux sites d’étude, les données
de l’autécologie informent sur les raisons de la distribution des espèces, selon leurs
caractéristiques intrinsèques (cf. Figure 31).
− Groupe écologique : La végétation actuelle du Lauragais est surtout représentée par des
espèces dont l’habitat optimal correspond aux espaces anthropisés (rudérales et
adventices), aux bois (forestières) et aux pelouses des coteaux secs (pelouse sèche
thermophile au sens de la typologie Corine Biotope). La première catégorie illustre des
espèces à haute valence écologique qui colonisent une diversité de milieu, les autres
catégories illustrent des espèces ayant des exigences écologiques strictes, inféodées au
milieu qu’elles colonisent. La faible proportion d’espèces aquatiques et de marais, espèces
aux exigences écologiques étroites, peut témoigner soit d’une intense anthropisation
(désherbage), soit de la faible étendue de milieux auxquels elles sont liées, à savoir les
milieux aquatiques tels que les étendues d’eau, les mares, les étangs, les fossés…
− Aire de répartition : La flore actuelle est principalement représentée par des espèces
eurasiatiques, secondairement par des espèces méditerranéennes. Les espèces
d’introduction récente représentent tout de même 4% de la richesse spécifique. Dans
l’ensemble, les espèces à large aire de répartition (cosmopolites et circumboréales)
représentent 18% de la richesse et les espèces à aire de répartition européenne
(eurasiatique, méditerranéenne, européenne, méditerraneo-atlantique, atlantique)
représentent 78% de la richesse en espèces.
− Exigences des espèces vis à vis de la lumière : Une grande majorité des espèces pousse
dans des conditions de lumière fortes (64%), ce qui témoigne de la richesse d’espaces non
boisés, mais aussi de milieux boisés peu denses, en liaison avec la forte proportion de
représentants du groupe écologique des espèces forestières. Les espèces forestières, de
plus, peuvent coloniser des formations herbeuses (pelouses). Cette singularité peut
149
marquer la mise en place de la succession progressive dans les formations herbeuses à
végétation spontanée, caractérisée par des espèces forestières non sciaphiles.
− Exigences des espèces vis à vis de l’humidité du sol : Une grande majorité des espèces
demandent une humidité du sol relativement faible. Peu d’espèces sont à large amplitude.
Peu d’espèces sont hygrophiles, ce qui est à relier à la rareté des milieux aquatiques (cf.
groupe écologique). La forte proportion d’espèces à tendance xérique marque des milieux
à tendance sèche, qui prédominent en raison d’un relief vallonné, favorable au
ruissellement de l’eau.
− Mode de dissémination : La flore du Lauragais est composée surtout d’espèces sans mode
de dissémination spécialisé (barochores), ou bien se disséminant accrochées aux animaux
ou transportées par le vent (le vent est l’une des caractéristiques écologiques du
Lauragais). Peu d’espèces sont hydrochores, en accord avec les conclusions précédentes.
Les espèces myrmécochores sont surtout des forestières.
− Type biologique : La flore est surtout représentée par des plantes annuelles estivales et des
plantes herbacées vivaces (érigées, cespiteuses ou stolonifères). Les végétaux ligneux
(arbres, arbustes, chaméphytes) représentent 15% de la flore. La forte proportion
d’espèces annuelles et herbacées vivaces témoigne d’un territoire dominé par des espaces
ouverts et herbeux.
En résumé pour la liste floristique globale
La végétation actuelle du Lauragais est constituée d’espèces de répartition principalement
eurasiatique et méditerranéenne (comme déjà cité par Gregoire, 1938). Elle est marquée par
des espèces à haut pouvoir de colonisation ou limitées à une gamme étroite de milieux,
révélant majoritairement des conditions de milieu sèches (forte proportion d’espèces à
tendance xérique, liée à un relief vallonné). Des introductions ont lieu (22 espèces). La
présence d’espèces ayant des exigences écologiques étroites peut faire présumer de l’extrême
sensibilité de la flore à la fragmentation des milieux (réduction de la surface et isolement des
taches restantes, cf. p.187). La forte proportion d’espèces de lumière, annuelles et herbacées
vivaces témoigne d’un territoire dominé par des espaces ouverts et herbeux ou par des milieux
boisés peu denses. La faible proportion d’espèces aquatiques et de marais, hygrophiles,
hydrochores peut témoigner de la faible proportion de milieux aquatiques auxquels elles sont
liées, (étendues d’eau, mares, étangs, fossés…). En accord avec le caractère très venté du
Lauragais, les espèces se disséminant par le vent sont favorisées. Notons une forte proportion
d’espèces se disséminant accrochées aux animaux.
150
Figure 31. Caractéristiques écologiques ou traits de vie des espèces, liste floristique globale
actuelle. Répartition des modalités pour chaque variable considérée
151
1. 2. 2 -
Liste floristique pour chaque site
Si nous analysons comparativement la distribution des espèces selon les traits de vie pour les
deux sites, nous pouvons avancer que, globalement, les deux sites ne montrent pas de
différences frappantes (cf. Figure 32 à Figure 37). Nous analysons pour chaque trait de vie
l’ensemble des espèces composant la flore de chaque site et les espèces propres à chaque flore
pour lesquelles nous envisageons l’analyse des autres traits de vie (cf. Annexe 5). Sur chaque
figure, les pourcentages indiquent, pour Préserville et Nailloux, la part relative de chaque
modalité pour le trait de vie considéré.
− Groupe écologique
Figure 32. Groupe écologique
La végétation de Préserville comporte proportionnellement plus d’espèces forestières et
adventices, ces dernières étant par ailleurs à tendance méditerranéenne, à tendance xérophile,
disséminées par le vent ou accrochées, et trouvées dans des communautés rudérales, lisières et
formations prairiales, mais pas dans des cultures. La végétation de Préserville est caractérisée
par une proportion d’espèces cultivées, ligneuses supérieure à celle de Nailloux : il s’agit
d’arbres plantés. La végétation de Nailloux comporte plus d’espèces de prairie grasse (prairie
humide), étant par ailleurs herbacées vivaces à tendance humide, se disséminant par le vent,
l’eau ou accrochées, et trouvées notamment dans des milieux de type bois, bords des eaux et
prairies.
Pour chaque site, la végétation rudérale est constituée d’espèces qui lui sont propres. Ce sont
des héliophiles, européennes, disséminées par anémochorie et épizoochorie, trouvées dans des
milieux plutôt secs, de type communauté rudérale et haie pour Préserville, et de type
communauté rudérale, culture et vignes pour Nailloux. Ce sont des géophytes et
hémicryptophytes pour Préserville, et des géophytes, hémicryptophytes et thérophytes pour
Nailloux. Ces espèces dénotent la richesse de ce groupe d’espèces dans les espaces
anthropisés. Chaque site possède des espèces forestières particulières. Préserville héberge des
végétaux ligneux ou hémicryptophytes, disséminés par le vent, les fourmis et par ingestion,
trouvés dans des milieux de type bois, haie et lisière. Nailloux possède des végétaux ligneux,
géophytes ou hémicryptophytes, disséminés par le vent et les animaux (accrochées ou
ingérées), trouvés dans des milieux de type bois, lisière, pelouse, communauté rudérale et
bords des eaux.
152
⇒ Nous observons une diversité de la végétation rudérale et forestière sur le territoire
lauragais. La végétation adventice est plus riche sur Préserville, certainement en conséquence
de pratiques culturales moins intensives (désherbage moins pratiqué). Ces résultats sont en
accord avec ceux du chapitre 3 où nous avons démontré que le paysage de Nailloux était plus
intensifié. Plus d’arbres ont été plantés sur Préserville. Nous notons une richesse supérieure
de la végétation hygrophile prairiale sur Nailloux, ce qui sera à mettre en relation avec la
diversité des milieux prairiaux dans le chapitre 5.
− Aire de répartition
Figure 33. Aire de répartition
Il n’y a pas de différence significative entre les deux flores sauf pour les circumboréales qui
sont représentées en plus forte proportion sur Nailloux et qui sont par ailleurs des plantes
ligneuses et herbacées, héliophiles, notamment aquatiques et forestières, disséminées par le
vent ou les animaux, trouvées dans des formations herbacées, ouvertes. La végétation de
Préserville renferme plus d’espèces introduites qui lui sont propres : il s’agit d’espèces
disséminées par les animaux, à tendance xérophile, arborées ou annuelles, trouvées dans une
diversité de milieux.
⇒ La végétation de Nailloux est plus marquée par des espèces à large aire de répartition,
trouvées dans tous les types de milieu mais surtout dans les milieux de type pelouses,
communautés rudérales, lisières et bords des eaux. La végétation de Préserville est plus
touchée par les introductions d’espèces, trouvées notamment dans les milieux de type
communauté rudérale et pelouse.
153
− Exigences en lumière
Figure 34. Exigence en lumière
Les deux végétations possèdent quasiment autant d’espèces héliophiles et photophiles, qui
sont par ailleurs des espèces forestières, trouvées surtout dans les bois, les lisières mais aussi
les pelouses.
⇒ La végétation de Préserville est légèrement plus riche en espèces d’ombre ou de demiombre, forestière de milieu boisé, mais pouvant coloniser les formations prairiales.
− Exigences en humidité
Figure 35. Exigence en humidité
La végétation de Préserville possède plus d’espèces mésophiles, trouvées dans les bois,
cultures, lisières, et mésohygrophiles. La végétation de Nailloux est plus représentée par des
espèces hygrophiles (milieu humide), par ailleurs anémochores et hydrochores, herbacées
vivaces trouvées dans les bords des eaux et les prairies. La végétation de Nailloux renferme
secondairement des plantes à tendance xérophiles, notamment méditerranéennes et
eurasiatiques, disséminées par le vent ou accrochées, herbacées ou ligneuses héliophiles,
trouvées notamment dans les pelouses sèches, les communautés rudérales et les cultures.
⇒ La végétation de Nailloux est plus représentée par des espèces préférant les milieux
humides ainsi que par des espèces préférant les milieux secs, fréquentant les formations
ouvertes herbacées.
154
− Mode de dissémination
Figure 36. Mode de dissémination
La végétation de Préserville est plus représentée par des espèces épizoochores, ces espèces
étant par ailleurs des herbacées vivaces, adventices, rudérales ou prairiales à tendance
xérophile, trouvées dans une diversité de milieux. La végétation de Nailloux est plus
représentée par des espèces anémochores (vent), espèces en outre forestières, rudérales et
pionnières, ici trouvées surtout dans les communautés rudérales.
⇒ Le site de Préserville est plus sujet à une dissémination par épizoochorie. Le site de
Nailloux est plus sujet à une dissémination par anémochorie, facilitée dans les milieux
rudéraux.
− Type biologique
Figure 37. Type biologique
La végétation de Préserville est légèrement plus représentée par des espèces ligneuses (+
1,3%), notamment en chaméphytes frutescents (cfr) (présents dans les pelouses enfrichées),
forestières à tendance hygrophile, trouvées dans les bois, fruticées, lisières et pelouses. La
végétation de Préserville renferme aussi des arbustes et des arbres, cultivés ou forestiers,
disséminés par ingestion, trouvés dans les bois, haies et lisières. Celle de Nailloux est plus
155
représentée d’une part en chaméphytes suffrutescents (csu), anémochores et préférant les
milieux secs, trouvés dans les milieux de type lisières et pelouses, illustrant une végétation
des pelouses enfrichées et des lisières, plus arborée, et d’autre part en hémicryptophytes
cespiteux (hcs), par ailleurs forestiers ou prairiaux, disséminés par le vent ou accrochés, et
stolonifères (hst), par ailleurs aquatiques et de marais, préférant les milieux humides.
Globalement, la végétation de Nailloux est plus représentée par des hémicryptophytes (1,4%).
⇒ La végétation de Nailloux est plus représentée par des espèces herbacées vivaces des
milieux humides, fréquentant les formations herbacées ouvertes. Elle est aussi plus
représentée par des espèces ligneuses basses, fréquentant des formations prairiales enfrichées
et les ourlets forestiers. La végétation de Préserville est plus représentée par des ligneux,
fréquentant les formations arborées.
En résumé pour la liste floristique de chaque site
La végétation des deux sites se différencie sur plusieurs points. La végétation de Préserville
est plus représentée par des espèces forestières et adventices, photophiles, mésophiles et
mésohygrophiles, épizoochores, arborées, arbustives et chaméphytiques frutescentes. Celle de
Nailloux est plus représentée par des espèces pionnières et de prairie grasse, circumboréales,
héliophiles,
hygrophiles,
anémochores,
chaméphytiques
suffrutescentes
et
hémicryptophytiques. Il semblerait donc que la végétation de Préserville soit plus
caractéristique de celle des milieux arborés fermés, alors que la végétation de Nailloux est
plus caractéristique de celle des milieux herbacés humides comme les prairies.
1. 2. 3 -
Synthèse : des végétations disparates pour les deux sites
La végétation actuelle du Lauragais est caractérisée à la fois par des espèces à haut pouvoir de
colonisation et des espèces limitées à une gamme étroite de milieux, d’aire de répartition
principalement eurasiatique et méditerranéenne, révélant des conditions de milieu sèches. La
végétation est par ailleurs sujette à des introductions. La forte proportion d’espèces de
lumière, annuelles et herbacées vivaces, témoigne d’un territoire dominé par des espaces
ouverts et herbeux ou par des milieux boisés peu denses. La faible proportion d’espèces
aquatiques et de marais, hygrophiles, hydrochores peut témoigner de la faible surface occupée
par les milieux auxquels elles sont liées (étendues d’eau, mares, étangs, fossés…). Le nombre
important d’espèces à tendance xérique marque la présence de milieux à tendance sèche,
occasionnés par un relief vallonné où l’écoulement de l’eau est favorisé. En accord avec la
prégnance du vent, caractéristique du Lauragais, les espèces se disséminant par anémochorie
sont favorisées. Notons une forte proportion d’espèces se disséminant accrochées aux
animaux.
En se penchant plus précisément sur la végétation des deux sites, nous constatons diverses
dissemblances. La végétation rudérale et forestière sur le territoire lauragais est très
diversifiée, entraînant une composition floristique variée de la végétation des deux sites (cf.
Tableau 17).
156
Trait de vie
La végétation de Nailloux est plus
représentée par
La végétation de Préserville est plus
représentée par
Groupe
écologique
- des espèces pionnières et de prairie grasse
Avec une richesse supérieure de la végétation
hygrophile prairiale (à mettre en relation avec
la diversité des milieux prairiaux, cf. chapitre
5).
- des espèces adventices et forestières
Nous supposons que la végétation adventice
plus riche est une conséquence de pratiques
culturales moins intensives (moins de
désherbage) (cf. chapitre 3 : l’agriculture de
Nailloux est plus intensifiée).
Aire de
répartition
- des espèces circumboréales
Espèces à large aire de répartition, trouvées
surtout dans les milieux de type pelouses,
communautés rudérales, lisières et bords des
eaux.
- des espèces exotiques
La végétation est plus touchée par les
introductions d’espèces, trouvées notamment
dans les milieux de type communauté rudérale
et pelouse, avec plantation d’arbres.
Exigence en
lumière
- des espèces héliophiles
- des espèces photophiles
Ces espèces, forestières de milieu boisé,
peuvent coloniser les formations prairiales.
Exigence en
humidité
- des espèces hygrophiles, et des espèces à
- des espèces mésophiles et mésohygrophiles
tendance xérophile
Ces espèces fréquentent les formations ouvertes
herbacées.
Mode de
dissémination
- des espèces anémochores
Dissémination facilitée dans les milieux
rudéraux, herbeux où l’activité humaine est
intense.
- des espèces chaméphytiques suffrutescentes et
hémicryptophytiques
Les espèces ligneuses basses fréquentent des
formations prairiales enfrichées et les ourlets
forestiers, et les espèces herbacées vivaces des
milieux humides, les formations herbacées
ouvertes.
Type
biologique
- des espèces épizoochores
Dissémination facilitée dans les formations
herbacées à végétation spontanée.
- des espèces ligneuses hautes et
chaméphytiques frutescentes
Ces espèces ligneuses fréquentent les
formations arborées.
Tableau 17. Résumé des particularités de la flore de chaque site et explications possibles
Ainsi, nous pouvons avancer que la végétation de Préserville est plus représentative de
milieux arborés, alors que la végétation de Nailloux représente plus des milieux
herbacés, humides ou secs.
1. 3 -
Physionomie de la végétation et identification des formations végétales
La physionomie de la végétation est décrite à partir de ses caractéristiques, à savoir la
structure verticale définie par les strates de végétation et la structure horizontale définie par le
degré de recouvrement par strate, et à partir des coefficients d’abondance-dominance des
espèces, annotés lors des campagnes de relevés. L’identification des formations végétales est
basée sur l’étude de la dominance d’une forme biologique et sur les strates de végétation.
Pour les deux sites, les trois strates prises en compte ont un recouvrement compris entre 0 et
100 % (80% pour la strate arborée). Selon la strate dominante (arborée, arbustive ou
herbacée), nous pouvons identifier l’existence de trois physionomies de la végétation
157
différentes. Nous remarquons que la végétation peut recouvrir entièrement le sol, créant des
formations végétales fermées et, à l’inverse, que la végétation peut être presque totalement
absente créant des formations entièrement ouvertes (comme les labours), au moins
temporairement. Ce paragraphe énumère les formations qui seront décrites plus précisément
dans le prochain chapitre.
-
Les relevés dominés par la strate arborée sont les relevés représentant des milieux de
type bois et, dans certains cas, bords des eaux, haies, lisières. Les strates arbustives et
herbacées sont plus ou moins développées. Ces relevés illustrent des formations
arborées de type chênaies, frênaies, forêts alluviales, formations riveraines, haies et
ourlets forestiers (Code Corine Biotope). Le recouvrement de la strate arborée varie de
30% (cas d’une formation riveraine) à 80% (cas des chênaies et des ourlets forestiers).
Les espèces de la strate arborée peuvent avoir un coefficient d’A/D maximal de 3. Les
espèces du sous-bois ont un coefficient d’A/D variant de 1 à 4 (strate arbustive et
herbacée), pouvant constituer un tapis très dense. Ces deux strates peuvent être très
peu représentées (cas de plantations de peupliers ou de pins sur le site de Nailloux,
dont la pauvreté en biodiversité végétale est connue (Terrasson et al., 1995)).
-
Les relevés dominés par la strate arbustive sont ceux représentant des milieux de type
bords des eaux, fruticées, haies, lisières. Ils illustrent des formations arbustives de type
roselières et végétation de bord des eaux, fourrés arbustifs, haies, ourlets forestiers.
Le recouvrement de la strate arbustive varie de 10 (cas d’une frênaie-érablière) à 70%
(cas d’ourlets). Les espèces de la strate arbustive ont un coefficient d’A/D pouvant
atteindre une valeur de 3. Les espèces de la strate herbacée ont un coefficient variant
de 1 à 4. Le tapis peut donc être très dense, créant des végétations fermées, comme
très clairsemé.
-
Les relevés dominés par la strate herbacée sont les relevés représentant des milieux de
type culture, communauté rudérale, bords des eaux, pelouse, prairie, vigne. Ils
illustrent des formations herbacées de type culture à marge de végétation spontanée
(incluant les moissons), communautés rudérales, terrains en friche, fossés et petits
canaux, pelouses sèches calcicoles, prairies humides et prairies de fauche à fourrage,
et vignobles (seulement sur le site de Nailloux). Le recouvrement de la strate herbacée
varie de 5 (cas des labours, décombres) à 100% (cas de pelouses sèches et prairies à
fourrage). Les formations peuvent être très ouvertes ou fermées. Les espèces ont un
coefficient d’A/D pouvant être égal à 4 (cas surtout de pelouses), créant des
végétations fermées. Des cas particuliers existent, comme ceux des pelouses sèches et
des prairies à fourrage, enfrichées, marquées par la présence non dominante d’une
strate arbustive et/ou arborée.
Pour les deux sites, la végétation est représentée par les trois strates de végétation, qui peuvent
être ouvertes comme fermées et qui définissent trois types de formations végétales, plus ou
moins denses. Globalement, les deux sites sont représentés par les mêmes types de formations
végétales, illustrant la physionomie typique du paysage lauragais.
158
1. 4 -
Des nuances de la flore actuelle, sous l’influence de schémas d’organisations
spatiales différentes
L’étude des aspects actuels de la flore lauragaise, à travers la diversité floristique et la
distribution des espèces dans les formations végétales identifiées, permet de caractériser plus
précisément les nuances de la flore actuelle, qui sont sous l’influence de schémas
d’organisation spatiale différents.
- La flore lauragaise actuelle se caractérise par une diversité de formations végétales, qui
permet l’établissement d’une flore riche et diversifiée. Toutefois, cette flore ne se distribue
pas de façon homogène dans les formations : les milieux de type pelouses et communautés
rudérales manifestent une richesse spécifique supérieure aux autres, alors que les milieux de
type vigne, fruticée et bords des eaux sont les plus pauvres de ce point de vue. Nous avons vu
que cette distinction pouvait être le résultat d’une organisation spatiale différente, certains
milieux étant moins représentés que d’autres. Cette étude nous a également permis de
constater que les milieux fortement anthropisés, comme les cultures, n’étaient pas
forcément les plus pauvres floristiquement. La flore lauragaise est dominée par des
Familles cosmopolites et par des Genres représentant des espèces herbacées colonisant une
diversité de milieu. Ceci peut témoigner d’une flore globalement assez banale, la végétation
étant caractérisée notamment par des espèces à haut pouvoir de colonisation. La forte
proportion d’espèces ayant des exigences écologiques étroites évoque l’extrême sensibilité
des plantes à la fragmentation des milieux. La végétation est composée principalement
d’espèces de lumière, annuelles et herbacées vivaces, d’aire de répartition principalement
eurasiatique et méditerranéenne, à tendance xérique, témoignant d’un territoire dominé par
des espaces ouverts et herbeux ou par des milieux boisés peu denses, avec des conditions de
milieu sèches, en raison d’un relief vallonné où l’écoulement de l’eau est favorisé. La
végétation des milieux humides est peu représentée. Deux modes principaux de dissémination
sont utilisés : le vent (notamment rôle sur la dispersion des adventices (Rew et al., 1996)) et
l’accrochage. La végétation est par ailleurs sujette à des introductions. La végétation rudérale
et forestière est très diversifiée. La végétation, qui est représentée par les trois strates de
végétation, définit trois types de formations végétales, plus ou moins denses. Globalement, les
deux sites sont représentés par les mêmes types de formations végétales, illustrant une
physionomie typique du paysage lauragais.
- La comparaison de la flore des deux sites nous a permis de montrer que la flore de Nailloux
s’exprime plutôt dans les formations herbacées comme les pelouses et les communautés
rudérales, et que la flore de Préserville s’exprime plutôt dans les formations arborées. La
végétation de Préserville est plus représentative de milieux arborés, alors que la végétation de
Nailloux représente plus des milieux herbacés, humides ou secs. Selon le niveau taxonomique
envisagé, la flore peut être plus riche comme plus pauvre. Nous constatons que la flore de
Préserville est plus riche et diversifiée à l’échelle de l’espèce que celle de Nailloux mais celle
de Nailloux est plus riche et diversifiée en terme de Familles et de Genres. La flore peut
également se caractériser par la richesse patrimoniale. Si les deux sites sont aussi riches en
terme d’espèces messicoles et protégées, le site de Nailloux est plus riche en terme d’espèces
invasives, dont la présence, couplée à celle d’espèces plantées pour la végétalisation de
coteaux, peut traduire d’une part un aménagement pas toujours en accord avec les conditions
naturelles locales et d’autre part un développement économique et urbain plus intense (trafic
routier, interventions anthropiques volontaires), favorisant la colonisation par des espèces
invasives.
159
L’identification et la caractérisation exhaustive des formations végétales passent par la prise
en compte des facteurs mésologiques et anthropiques, qui n’interviennent pas avec la même
importance : leur poids sera estimé dans le chapitre 5.
W
2-
Variations de la flore et de la végétation lauragaises, depuis 1885
L’étude se base, à l’échelle du Lauragais, sur les variations des caractéristiques de la flore
depuis la fin du XIXe siècle (1885), la mise en évidence de la tendance évolutive des espèces,
appuyée par la prise en compte des données de l’autécologie. La variation de la flore
lauragaise est étudiée par la comparaison des caractéristiques floristiques entre différentes
époques. Cette dynamique s’étudie aux deux niveaux auxquels elle s’exprime - végétation et
espèce. Au niveau de la végétation, nous étudions les variations des caractéristiques de la
flore. Au niveau de l’espèce, nous observons la tendance évolutive des espèces, estimée par la
variation temporelle de leur fréquence relative. Les données de l’autécologie et les milieux
fréquentés apportent des éléments de réponse pour comprendre cette dynamique.
L’étude de la dynamique est réalisée à partir de la liste floristique globale qui rassemble les
espèces de la liste actuelle et de la liste passée datant de 1885 (nous considérons cette dernière
comme illustrative de la flore lauragaise de l’époque). La liste globale peut être considérée
comme la liste des espèces, potentielles ou effectives, présentes dans le Lauragais hautgaronnais (cf. p.131). Le lecteur pourrait s’interroger sur la pertinence de la méthode puisque
nous choisissons de comparer une liste floristique représentant une commune (Nailloux,
1885) à deux listes floristiques représentant deux communes (Préserville et Nailloux, 2001),
dont l’une des deux, Nailloux, est celle de l’inventaire de 1885. Cependant, même si nous
avons complètement conscience de ce travers, nous souhaitons que le lecteur saisisse tout
l’intérêt de l’inventaire floristique, soigné et précis, réalisé par Haulier sur Nailloux en 1885.
Ce document est exceptionnel, et c’est bien la prise en compte des disparités émanant de la
comparaison des deux communes qui nous permettra, dans le chapitre 5, de mettre en relation
les variations temporelles de la flore et les facteurs susceptibles d’intervenir. Dans les
analyses subséquentes, nous nous pencherons plus précisément sur les espèces en commun et
les espèces propres à chaque date. Auparavant, nous envisageons l’étude de la flore de 1885.
2. 1 -
Exploitation de la Flore d’Haulier, Nailloux, 1885
Il faut signaler que le catalogue de Haulier ne comporte pas d’indications d’abondance des
plantes. Nous ne disposons donc que de la présence des taxons et de l’indication systématique
des milieux fréquentés.
160
2. 1. 1 -
Caractérisation de la flore
Comme il a été fait pour la flore actuelle, la flore de 1885 est caractérisée grâce à l’utilisation
des indices de biodiversité, données écologiques calculées à partir des listes floristiques. Ces
indices sont la richesse spécifique, la diversité supraspécifique, la richesse patrimoniale et la
fréquence des espèces dans les types de milieu. Notons que l’indice de diversité de Shannon
ne peut être calculé, l’abondance des espèces n’étant pas connue.
a-
Richesse spécifique
La flore du site de Nailloux en 1885 est riche de 765 espèces, inventoriées dans 28 milieux
cités simplifiés (cf. p.129). À l’observation de la richesse spécifique par type de milieu (cf.
Figure 38), nous constatons que les types de milieu sont, en moyenne, représentés par 129
espèces. Ce sont les milieux de type ‘fruticée’, ‘vigne’ et ‘haies’ qui sont les plus pauvres en
espèces. À l’inverse, les milieux les plus riches sont ceux représentant les ‘communautés
rudérales’ (friches, habitations, décombres …), les ‘cultures’ et les ‘bois’. Notons que le type
‘planté’ est relativement riche spécifiquement.
Richesse spécifique par type de milieu, Haulier,
1885
300
250
200
150
100
50
BO
IS
LT
U
R
C
E
O
M
R
U
D
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C
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X
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VI
G
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PR é
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R
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LO
U
SE
FR
U
TI
C
EE
0
Figure 38. Richesse spécifique par type de milieux
b-
Diversité supraspécifique
Quatre vingt seize (96) Familles sont représentées dont 36% par une seule espèce. Les
principales Familles, représentées par 16 espèces ou plus, (cf. Figure 39), correspondent à des
espèces principalement herbacées. Les deux Familles les plus représentées (POACEAE et
ASTERACEAE) illustrent des espèces anémophiles ou anémochores, ce qui met le doigt sur
la caractéristique du Lauragais : le vent.
161
Figure 39. Importance des Familles représentées en 1885
Les plantes de Nailloux en 1885 se répartissent dans 406 Genres dont 65% ne sont représentés
que par une seule espèce. Les Genres les plus représentés (par plus de 8 espèces)
correspondent surtout à des plantes herbacées, vivaces ou annuelles :
Allium, Galium, Lathyrus 8 espèces
Vicia 10 espèces
Ranunculus, Veronica 11 espèces
Euphorbia 12 espèces
Carex 13 espèces
Trifolium 16 espèces
c-
Richesse patrimoniale
À la fin de ce paragraphe, nous traitons aussi des espèces invasives, parce que leur présence,
en matière de pourcentage, ne peut que diminuer l’importance relative des espèces à valeur
patrimoniale (cf. p.134).
• "Messicoles, espèces à intérêt patrimonial"
D’après la liste du plan national d'action pour la conservation des plantes messicoles
(Aboucaya et al., 2000)
-
Taxons actuellement en situation précaire (14)
Adonis annua L., Agrostemma githago L., Asperula arvensis L., Bupleurum rotundifolium L.,
Bupleurum subovatum Link ex Sprengel, Camelina sativa (L.) Crantz, Lolium temulentum L., Neslia
paniculata (L.) Desv., Nigella gallica Jordan, Orlaya grandiflora (L.) Hoffm., Polycnemum arvense L.,
Thymelaea passerina (L.) Cosson & Germ., Turgenia latifolia (L.) Hoffm., Vaccaria hispanica (Miller)
Rauschert
162
-
Taxons à surveiller, se maintient actuellement plus ou moins (14)
Ajuga chamaepitys (L.) Schreber, Anchusa arvensis (L.) M. Bieb., Bromus arvensis L., Caucalis
platycarpos L. [1753], Centaurea cyanus L., Euphorbia falcata L., Galium tricornutum Dandy, Iberis
pinnata L., Legousia speculum-veneris (L.) Chaix, Papaver argemone L., Papaver hybridum L.,
Ranunculus arvensis L., Valerianella rimosa Bast., Vicia villosa Roth ssp. varia (Host) Corb.
-
Taxons considérés comme encore abondant actuellement (9)
Aphanes arvensis L., Avena fatua L., Galium aparine L., Lithospermum arvense L., Papaver rhoeas L.,
Scandix pecten-veneris L., Scleranthus annuus L., Sinapis alba L., Spergula arvensis L. ssp. arvensis
La flore en 1885 est donc riche en espèces messicoles, témoignant de pratiques agricoles
(désherbage, tri des semences) peu intensives.
• "Espèces protégées en France"
D’après le Livre rouge de la flore menacée de France, Tome 1 (Annexe I et II1) (Olivier et al.,
1995 ; Danton et Baffray, 1995)
Anthriscus caucalis M. Bieb. (vulnérable), Brassica oleracea L. (vulnérable), Chaenorrhinum
minus (L.) Lange ssp minus (en danger), Nigella gallica Jordan (vulnérable) (Belhacène, 2002)
Ces espèces n’étaient pas forcément rares en 1885 et n’étaient pas protégées à l’époque. La
prise en compte de ces données sera surtout intéressante par la suite, quand nous les
comparerons aux données actuelles.
• "Espèces xénophytes, invasives"
La flore de 1885 renferme des espèces considérées actuellement comme invasives, d’après
Aboucaya pour le secteur méditerranéen français (Aboucaya, 1998),
-
Espèces invasives avérées (taxon introduit après 1500 et naturalisé, compétitif ou
causant des déséquilibres dans les écosystèmes)
Oenothera biennis L. gr., Robinia pseudacacia L., Xanthium strumarium gr.
-
Liste d’attente (taxon xénophyte à forte dynamique mais non présents dans les
formations spontanées)
Amaranthus retroflexus L., Coniza canadensis (L.) Cronq., Isatis tinctoria L., Melilotus albus
Medik., Veronica persica Poiret.
Ces listes attestent l’ancienneté de la présence de ces espèces, qui ont pu devenir invasives
avec le temps, après une phase de naturalisation dans le milieu colonisé. Elles évoquent par
ailleurs des sources d’invasion d’espèces, à la suite de leur possible culture (cas du pastel).
1
Arrêté du 20 janvier 1982 modifié par l’arrêté du 31 août 1995, relatif à la liste des espèces végétales protégées
sur l’ensemble du territoire national (JONC du 13 mai 1982).
163
d-
Fréquence des espèces
La fréquence est estimée à partir du nombre de types de milieux cités par espèce, calculée
selon la formule
nombre de type de milieu présentant l’espèce n x 100
nombre total de type de milieu
41% des espèces ont une fréquence minimale (9%), n’étant citées que dans un type de milieu.
Ces espèces peuvent correspondre à des espèces accidentelles comme elles peuvent
correspondre à des espèces inféodées au milieu associé. À ce stade de l’analyse et avec les
données disponibles, nous ne pouvons pas trancher.
Les espèces les plus communes (12), dont la fréquence est supérieure à 63%, citées dans 5
types de milieux et plus, sont des espèces rudérales et prairiales, européennes ou à large aire
de répartition. Nous pouvons considérer ces espèces comme les constantes de la flore
lauragaise en 1885, selon la définition retenue de ce terme. Ces espèces sont par ordre
décroissant de fréquence :
Bellis perennis L.
Cardamine flexuosa With.
Cardamine hirsuta L.
Cerastium glomeratum Thuill.
Hordeum murinum L.
Hypericum perforatum L.
2. 1. 2 -
Lotus corniculatus L.
Origanum vulgare L.
Picris hieracioides L.
Stellaria media (L.) Vill.
Trifolium repens L.
Valeriana officinalis L.
Description de la végétation
La description de la végétation est basée sur l’analyse de la répartition des espèces selon leurs
traits de vie. Pour cela, les données de l’autécologie, collectées à partir de sources
bibliographiques, sont utilisées (cf. Figure 40), (cf. Annexe 5).
-
Groupe écologique : La flore est essentiellement composée d’espèces rudérales citées
dans les communautés rudérales et les cultures, d’espèces de prairies maigres, citées dans
les communautés rudérales et les bois, d’espèces forestières, citées dans les bois, les haies
et les communautés rudérales. Nous notons une proportion assez importante de plantes de
marais.
-
Aire de répartition : La plupart des espèces ont une répartition eurasiatique et
méditerranéenne, ce qui est conforme à la notion de Dop en 1910 et de Grégoire en 1938
(« Grande abondance des végétaux méditerranéens immigrés, pour la région toulousaine »
(Dop, 1910), « Pénétration de la flore méditerranéenne dans le bassin d’Aquitaine
Orientale » (Gregoire, 1938)). À noter la présence d’espèces introduites de manière
volontaire pour l’essentiel (culture, plantation) ou pouvant s’être naturalisée à une époque
antérieure.
-
Mode de dissémination : Un tiers des espèces n’a pas développé d’attribut de
dissémination particulier (espèces barochores). Beaucoup d’espèces sont anémochores (le
164
vent étant une des caractéristiques écologiques du Lauragais) et épizoochores (dispersion
par les animaux d’élevage) (ce caractère se retrouve dans la flore actuelle, ce qui évoque
la possibilité d’installation ancienne, suivie de maintien).
-
Exigence en lumière : Plus de la moitié de la flore est représentée par des espèces
héliophiles. Les espèces sciaphiles ne représentent qu’une faible proportion de la flore en
1885 (4%).
-
Exigence en humidité : Quasiment la moitié des plantes (48%) supporte des conditions
d’humidité faibles (espèces mésoxérophiles et xérophiles) et seulement le quart supporte
des conditions d’humidité élevées (espèces mésohygrophiles et hygrophiles). Cette
distribution peut témoigner de la forte proportion d’espaces secs tels que les pâturages et
les pelouses de coteaux secs.
-
Type biologique : Cette flore comporte 15% d’essences ligneuses (même proportion que
pour la flore actuelle). La forte proportion d’espèces annuelles estivales est associée
notamment à la richesse en rudérales et témoigne d’une diversité d’espaces anthropisés.
Presque la moitié de la flore est représentée par des hémicryptophytes.
Ainsi, la végétation comprend pour l’essentiel deux groupes : des espèces à large valence
écologique et des espèces à exigence plus stricte : nettement héliophiles, de répartition médioeuropéenne et méditerranéenne. La dissémination, en dehors des espèces barochores, se fait
par le vent ou par accrochage aux toisons des animaux. Les espèces, xérophiles, sont des
plantes herbacées vivaces et annuelles. Nous remarquons que les espèces prairiales
fréquentent en majorité les bois. Ce fait sera discuté plus loin. La proportion assez importante
de plantes de marais, espèces à faible valence écologique, traduit la richesse de la végétation
aquatique. Cet ensemble de caractéristiques illustre la dominance d’une végétation herbacée,
héliophile, la richesse de la végétation aquatique et la pauvreté du couvert arboré avec des
bois exploités en taillis fréquemment coupés. De nombreuses plantes introduites pour la
culture soulèvent le problème de leur naturalisation et de leur possible invasion.
165
Figure 40. Caractéristiques écologiques ou traits de vie des espèces, flore 1885
166
2. 1. 3 -
Physionomie de la végétation et identification des formations végétales
La description de la physionomie de la végétation ainsi que l’identification des formations
végétales présentes sont délicates à réaliser puisque nous n’avons aucune indication sur les
caractéristiques descriptives de la végétation (structure verticale et horizontale), ni sur les
coefficients d’abondance-dominance des espèces. Cette reconstitution n’est possible qu’à
partir des types de milieu cités pour chaque taxon. La prise en compte du type biologique
nous permet de classer les milieux selon la strate la plus haute ainsi révélée. Si la liaison
macrophanérophytes – bois est évidente, pour d’autres types de milieu, elle l’est moins. Nous
ne faisons ici que donner les résultats bruts d’une reconstitution de la physionomie de la
végétation en 1885. Une discussion interprétative sera menée plus loin, s’appuyant sur la prise
en compte de facteurs potentiellement explicatifs (cf. chapitre 5).
-
Les milieux caractérisés par l’existence d’une strate arborée sont ceux de type
‘bois’ et ‘bords des eaux’.
Les milieux de type bois sont représentés par des espèces (213) essentiellement
forestières (93) mais aussi prairiales (78), européennes (111), anémochores,
barochores et épizoochores, héliophiles et photophiles, d’exigences en humidité
variées (= bois secs et bois humides), ligneuses hautes (15%), hémicryptophytes.
Remarquons qu’il n’y a pas d’espèces introduites citées dans les milieux de type
bois. Les espèces sciaphiles ne représentent que 15% des milieux de type bois.
Aussi, ces milieux évoquent des formations boisées bien particulières : les espèces
sciaphiles sont assez peu fréquentes et les espèces prairiales et anémochores
abondantes. Cette particularité traduit des formations boisées peu denses
facilement pénétrable par des espèces caractérisant des milieux herbeux, pourtant
ils sont exempts d’invasions par des espèces exotiques. Ces formations se situent
sur différents types de terrains, humides (ripisylves) ou secs.
Les milieux de type bords des eaux représentent des formations arborées,
ombrageant une végétation aux affinités pour les milieux humides marquées
(plantes de marais, de prairie grasse, forestière), se disséminant par le vent ou
l’eau, les espèces à large aire de répartition sont assez nombreuses. Les strates
ligneuses sont assez peu diversifiées.
-
Les milieux liés à l’existence d’une strate arbustive sont les milieux de type haie,
fruticées, lisières.
Les milieux de type haie représentent des formations arbustives peu denses
composées par une végétation spontanée d’espèces forestières, accompagnées de
rudérales et de prairiales (seulement une espèce plantée), européennes
accompagnées de méditerranéennes, se disséminant par ingestion (oiseaux) ou par
le vent, préférant des situations de demi-ombre, d’exigences en humidité variées
(variété de situations topographiques), représentées par des arbustes et de
nombreuses plantes herbacées vivaces.
Les milieux de type fruticées représentent des formations arbustives composées
par une végétation d’espèces forestières, endo et épizoochores, préférant des
situations de demi-ombre, d’exigences en humidité variées (variété de situations
topographiques). La strate arbustive est représentée par des espèces communes
pour la région (Cornus sanguinea L., Corylus avellana L., Evonymus europaeus L., Ligustrum
vulgare L., Lonicera xylosteum L.).
Les milieux de type lisière représentent des formations arbustives peu denses en
situations sèches ensoleillées, représentées quasi seulement par des espèces
167
herbacées, essentiellement prairiales, européennes et méditerranéennes,
anémochores, héliophiles, à tendance xérophile. Remarquons qu’il n’y a pas
d’espèces exotiques.
-
Les milieux caractérisés par l’existence d’une strate herbacée sont les milieux de
type culture, communauté rudérale, pelouse, prairie, vigne…..
L’utilisation ultérieure d’analyses statistiques (Chapitre 5) pourra nous permettre d’envisager
l’identification et la description des formations végétales réellement présentes à l’époque.
Nous envisageons maintenant la comparaison des données actuelles et passées, enrichies par
l’emploi de listes floristiques anciennes, pour comprendre les variations de la flore lauragaise
depuis 1885.
2. 2 -
Variations des caractéristiques floristiques
Les caractéristiques floristiques pour la liste globale actuelle et pour la liste de 1885, étudiées
séparément, sont maintenant confrontées afin de mettre en lumière les variations de la flore en
115 ans.
2. 2. 1 -
Variation de la richesse spécifique
La richesse spécifique est analysée selon trois niveaux :
a- selon la richesse globale,
b- selon les traits de vie des espèces,
c- selon les types de milieu fréquentés.
a- La biodiversité floristique potentielle du Lauragais au sens de ce travail, est au minimum
de 870 taxons. Trois dynamiques sont possibles en fonction de la présence des espèces aux
deux périodes. Premièrement, parmi les espèces citées en 1885, certaines n’ont pas été
retrouvées, elles sont supposées disparues. Deuxièmement, parmi les espèces trouvées
actuellement, certaines ne sont pas citées en 1885, elles sont supposées apparues après 1885.
Troisièmement, parmi les espèces citées en 1885, certaines ont été retrouvées actuellement,
elles sont considérées comme maintenues.
Nombre d’espèces présentes en 1885 (H)
Nombre d’espèces présentes en 2001 (P)
Perte apparente d’espèces (H-P)
765
518
247
Espèces disparues de H (D)
Espèces apparues dans P (A)
352
105
Flore globale (P+D) = (H+A)
870
Tableau 18. Évolutions de la richesse spécifique
168
Depuis 1885, la flore a perdu en valeur absolue 247 espèces. Ce chiffre est à relativiser
puisqu’il masque les apparitions qui équilibrent les disparitions. En réalité, ce sont 413
espèces qui ont été retrouvées, 105 espèces qui sont nouvellement trouvées et 352 espèces qui
n’ont pas été retrouvées.
b- Si nous nous penchons sur la richesse spécifique des modalités des traits de vie des
espèces (cf. Tableau 19), l’observation de l’évolution apparente des modalités indique un
appauvrissement pour la majorité d’entre elles, entre 1885 et 2001. Cette diminution est plus
ou moins forte. Seules quatre modalités sont concernées par un enrichissement en espèces (en
gras dans le tableau). Pour ce qui est du groupe écologique, hormis les espèces cultivées que
nous n’avons pas toujours inventoriées en 2001, nous observons une diminution de moitié de
la richesse pour les espèces aquatiques, de prairie maigre et de marais ; les espèces de prairie
grasse et les forestières diminuent assez peu. Concernant l’aire de répartition, une forte
proportion d’espèces eurosibériennes présentes en 1885 ont disparu ; remarquons que les
espèces introduites ont également diminué, ceci en raison de l’inventaire, en 1885, des
espèces cultivées et de jardin, que nous n’avons pas effectué. Pour la dissémination, une très
forte proportion des espèces hydrochores ont disparu, en relation avec la diminution du
nombre d’espèces aquatiques ; les autochores sont en plus forte proportion. Pour l’exigence
en lumière, il n’y a pas de forte diminution de la richesse ; les espèces héliophiles sont celles
qui diminuent le plus. Pour l’exigence en humidité, nous notons une très forte régression de la
richesse en espèces xérophiles (68%) ; notons une légère augmentation de la richesse des
espèces à large amplitude. Pour les types biologiques, seule la végétation ligneuse haute, la
moins mobile donc la moins apte à des flux et colonisations, et les hémicryptophytes ruboïdes
s’enrichissent.
Groupe écologique
adv
aqu
cult
for
mar
pio
prg
prm
rud
-34
-50
-61
-15
-39
-35
-13
-44
-33
Aire de répartition
atl
cir
cos
eas
esi
eur
int
mat
med
-40
-41
-20
-30
-67
-33
-12
-32
-38
Dissémination
ane
aut
bar
end
epi
hyd
myr
-29
+25
-40
-17
-26
-64
-36
Lumière
hel
pho
scia
-35
-25
-24
Humidité
xe
mx
me
mh
hy
la
-62
-33
-26
-22
-26
+8
Type biologique
abu
arb
cfr
csu
gbu
grh
gtb
hbi
hcs
her
hro
hru
hst
tes
tve
+4
0
-50
-17
-18
-33
-26
-50
-28
-31
-29
+100
-40
-39
-28
Tableau 19. Évolution de la richesse spécifique selon les traits de vie des espèces, en %.
Appauvrissement (-), enrichissement (+) ou stabilisation, entre 1885 et 2001
169
La diminution de la richesse de la flore lauragaise est apparente pour les différents traits de
vie. Ce sont surtout les espèces aquatiques hydrochores, de marais et de prairie maigre,
xérophiles, eurosibériennes qui diminuent. L’augmentation de la richesse des espèces à large
amplitude par rapport à l’humidité du milieu peut traduire une banalisation de la flore. Seule
la richesse en espèces ligneuses et de certaines hémicryptophytes augmente.
c- Hors milieux de type haie et planté, si nous considérons l’évolution de la richesse
spécifique par type de milieu (cf. Figure 41), nous observons que les milieux de type fruticée
et vigne, les plus pauvres en 1885, restent les plus pauvres actuellement. Les milieux de type
communautés rudérales, les plus riches en 1885, le restent actuellement. Par contre, les
milieux de type culture et bois, les plus riches en 1885 ne le sont plus actuellement,
supplantés par les pelouses. La comparaison pour chaque type de milieu, entre les deux
périodes, montre deux dynamiques possibles. Le type de milieu concerné s’est enrichi si la
richesse a augmenté. Le type concerné s’est appauvri si la richesse a diminué.
-60
-50
-49
-38
-25
+121
+93
Appauvrissement
+67
+23
Enrichissement
Figure 41. Évolution de la richesse spécifique par type de milieu, en %
La discussion interprétative ne sera réalisée que dans le chapitre 5.
2. 2. 2 -
Variation de la diversité supraspécifique
Nb total Famille
Disparition
Apparition
Maintien
Nb total Genre
Disparition
Apparition
Maintien
1885
96
2001
86
Évolution
-10%
306
-25%
16
6
80
406
137
37
271
Tableau 20. Évolution de la diversité supraspécifique entre 1885 et 2001, en %
170
Les familles disparues sont les
ANTHERICACEAE, ASCLEPIADACEAE, ASPARAGACEAE, BERBERIDACEAE, BUXACEAE,
CALLITRICHACEAE, COLCHICACEAE, CORIARIACEAE, GLOBULARIACEAE,
ILLECEBRACEAE, PLATANACEAE, POLYPODIACEAE, SAXIFRAGACEAE,
SPARGANIACEAE, TAXACEAE, THYMELAEACEAE
Les familles apparues sont les
AMARYLLIDACEAE, AQUIFOLIACEAE, BUDDLEJACEAE, HYDROPHYLLACEAE,
MORACEAE, OPHIOGLOSSACEAE
Le caractère surprenant de certaines apparitions ou disparitions est à relativiser : cette
question sera discutée plus loin.
2. 2. 3 -
Variation de la richesse patrimoniale
Espèces messicoles
Disparition
Apparition
Maintien
Espèces protégées
Disparition
Apparition
Maintien
Espèces invasives
Disparition
Apparition
Maintien
1885
37
2001
19
Évolution
-49%
3
-25%
14
+43%
24
5
14
4
2
1
2
8
2
8
6
Tableau 21. Evolution de la richesse patrimoniale entre 1885 et 2001, en %
−
Messicoles ‘apparues’
Bromus secalinus L., Consolida ajacis (L.) Schur, Anthemis altissima L. emend Sprengel, 1826, Calepina
irregularis (Asso) Thell., Stachys annua (L.) L.
Messicoles ‘disparues‘
Agrostemma githago L., Ajuga chamaepitys (L.) Schreber, Asperula arvensis L., Bupleurum
rotundifolium L., Bupleurum subovatum Link ex Sprengel, Camelina sativa (L.) Crantz, Caucalis
platycarpos L. [1753], Centaurea cyanus L., Galium tricornutum Dandy, Iberis pinnata L., Neslia
paniculata (L.) Desv., Nigella gallica Jordan, Orlaya grandiflora (L.) Hoffm., Papaver argemone L.,
Papaver hybridum L., Polycnemum arvense L., Scleranthus annuus L., Spergula arvensis L. ssp.
arvensis, Thymelaea passerina (L.) Cosson & Germ., Turgenia latifolia (L.) Hoffm., Vaccaria hispanica
(Miller) Rauschert, Valerianella rimosa Bast., Vicia villosa Roth ssp. varia (Host) Corb.
− Espèces protégées ‘apparues‘
Bellevalia romana (L.) Reichenb. (vulnérable)
Espèces protégées ‘disparues’
Anthriscus caucalis M. Bieb. (vulnérable), Brassica oleracea L. (vulnérable), Nigella gallica Jordan
(vulnérable)
171
−
Espèces invasives ‘apparues’
Buddleja dividii Franchet, Cedrus atlantica (Endl.) Carr., Coniza sumatrensis (Retz.) Walker, Helianthus
tuberosus L., Phacelia tanacetifolia Benth., Pyracantha coccinea Roemer, Senecio inaequidens D.C.,
Sporobolus indicus (L.) R. Br.,
Espèces invasives ‘disparues’
Isatis tinctoria L., Xanthium strumarium gr
Six espèces invasives se maintiennent depuis 1885. Nous constatons une régression globale
forte de la richesse patrimoniale, accentuée par une augmentation marquée d’espèces dites
invasives. Toutefois, l’apparition d’espèces ayant une valeur patrimoniale indique qu’une
politique de gestion conservatoire est encore possible et n’est pas en contradiction avec une
modernisation et un aménagement poussés de l’espace.
2. 2. 4 -
Variation de la fréquence
N’ayant aucune indication sur les relevés effectués en 1885, la fréquence à l’époque de
Haulier est estimée à partir du nombre de types de milieux cités par espèces, en distinguant les
espèces dites constantes et les espèces présentes dans un seul type de milieu.
a-
Espèces constantes
Trois espèces qualifiées de constantes en 1885 le sont toujours actuellement : Hypericum
perforatum L., Picris hieracioides L., Trifolium repens L. Actuellement, il y a trois fois plus
d’espèces considérées comme constantes (de 1,5% à 6,2% de la flore). Espèces prairiales et
rudérales en 1885, ce sont également actuellement des espèces forestières. Si elles étaient
majoritairement européennes ou à large aire de répartition en 1885, elles sont actuellement
seulement européennes. L’anémochorie, dissémination privilégiée autrefois, est remplacée
actuellement par l’endozoochorie et l’épizoochorie. Très dominantes en 1885, les
hémicryptophytiques sont actuellement accompagnées dans cette catégorie par les ligneuses.
Par ailleurs, un changement apparaît concernant les espèces ubiquistes. Seul trois espèces se
sont maintenues, alors que le nombre actuel des ubiquistes est supérieur : les ubiquistes sont
plus nombreuses mais ce ne sont pas les mêmes : banalisation de la flore. Les espèces les plus
communes représentaient autrefois des espaces herbacés (espèces prairiales et rudérales),
actuellement elles représentent également des espaces boisés (espèces forestières). Nous
supposons que ce changement s’explique par le changement des pratiques, notamment par
l’abandon du pâturage dans les taillis et la diminution de l’exploitation, où se développe un
sous-bois plus dense. L’anémochorie, favorisée dans des espaces herbacés, diminue,
remplacée par une dissémination par les animaux, plus avantagée dans les espaces arborés.
Ceci peut révéler aussi l’embuissonnement des milieux herbacés par abandon de l’entretien.
b-
Espèces présentes dans un seul type de milieu
Parallèlement à l’augmentation des espèces les plus communes, les espèces fréquentant un
seul type de milieu et donc susceptibles d’être inféodées à un type de milieu, ont diminué,
représentant 37% de la flore lauragaise actuelle au lieu de 41% en 1885. L’analyse des
milieux montre des variations pour certaines d’entre elles. Si la plupart des espèces n’ont pas
changé de type de milieu fréquenté (Lathraea clandestina L., Lonicera xylosteum L., Ruscus
172
aculeatus L., Sanicula europaea L., Fragaria vesca L. dans les bois, Ranunculus arvensis L.
dans les moissons, Linaria vulgaris Miller dans les lieux incultes, Lythrum salicaria L.,
Typha latifolia L. dans les bords des eaux, Thymus pulegioides L. dans les pelouses), d’autres
marquent un changement dans le type de milieu fréquenté, étant toutes actuellement inféodées
aux pelouses (Bituminaria bituminosa (L.) E.H. Stirton. cité dans les bords des champs en
1885, Briza media L. cité dans les prairies et les bois, Galium mollugo L. ssp. erectum Syme.
cité dans les prairies, les haies et les bois, Genista tinctoria L. cité dans les bois, Poa bulbosa
L. cité sur les murs). D’autres encore n’étaient pas citées en 1885 (Dryopteris filix-mas (L.)
Schott. Ophrys scolopax Cav., Pyracantha coccinea M.J. Roemer).
Les espèces marquant un changement dans le type de milieu fréquenté sont intéressantes à
plusieurs égards. Tout d’abord, elles pourraient témoigner d’une possibilité de changement
des exigences des espèces et une flexibilité de la valence écologique. Par ailleurs, elles
illustrent la contrainte pesant sur ces espèces en raison des changements de pression sur le
milieu, et caractérisent les pelouses comme des zones-refuges pour des espèces ne trouvant
plus les conditions adéquates à leur colonisation dans les milieux fréquentés à l’origine. Enfin,
elles montrent la fin d’une pression sur les pelouses qui deviennent alors des milieux
d’accueil pour la biodiversité végétale. Cependant, ces résultats sont à nuancer puisqu’ils
dépendent fortement des milieux que Haulier a choisi de citer en 1885.
Quant aux espèces constantes actuellement mais non citées en 1885, certaines sont des
espèces ‘fugaces’1 - Ophrys scolopax Cav. - qui peuvent constituer des peuplements très
visibles certaines années et d’autres années échapper à l’œil de l’observateur. Une autre Pyracantha coccinea M.J. Roemer - est une plante exotique, nouvellement introduite pour
revégétaliser des coteaux enfrichés et qui est disséminée par les oiseaux depuis les jardins.
2. 3 -
Variations de la flore : estimation de la tendance évolutive espèce par espèce
(stabilité, régression, expansion)
La compréhension des variations des caractéristiques de la flore lauragaise que nous venons
d’observer entre les deux époques va être maintenant soutenue par la prise en compte, espèce
par espèce, de la fréquence relative (fréquence au sens habituel des flores) des espèces de la
liste floristique globale telle qu’elle est donnée par les différents auteurs, à partir de listes
floristiques anciennes (Noulet 1884, Haulier 1885, Sudre 1907, Bosc 1961 et nos propres
relevés 2001). La variation de cette fréquence pour chaque espèce sera mise en regard des
données de son autécologie, des types de milieux fréquentés et de diverses données récoltées
dans la littérature départementale. Nous tenterons ainsi d’apporter un début d’éclairage sur la
tendance évolutive des espèces depuis plus d’un siècle et sur la compréhension des variations
de la flore. Pour faciliter la comparaison, les indications de fréquence relative extraites des
flores (Noulet 1884, Sudre 1907, Bosc 1961) ont été uniformisées en six niveaux :
RRR, très rare
RR, rare
R, assez rare
C, assez commun
CC, commun
CCC, très commun
1
Nous entendons par fugace, une espèce dont l’observation est difficile, en raison d’une germination aléatoire
d’une année sur l’autre (espèces annuelles) ou d’une floraison pluriannuelle (espèces vivaces).
173
A partir de la liste floristique globale (870 taxons), la comparaison de la fréquence relative ou
par défaut de la présence des espèces nous permet d’interpréter leur tendance évolutive.
Quatre cas de figure se présentent à nous :
1. Stabilité, correspond au maintien de l’espèce jusqu’à nos jours ou au minimum jusqu’à
Bosc, 1961. Il n’y a pas d’évolution apparente dans le temps. L’espèce peut être stable
si elle a toujours été abondante comme elle peut l’être si elle a toujours été rare. Dans
ce dernier cas, il est fort probable que l’espèce soit en limite d’aire de répartition.
2. En régression, correspond aux espèces dont la fréquence diminue dans le temps (la
disparition ne pouvant être certifiée à 100%).
3. En expansion, correspond aux espèces dont la fréquence augmente dans le temps
(trouvées actuellement dans au moins un des deux sites d’étude). Les espèces
apparues après 1885, par introduction ou naturalisation d’espèces cultivées ou
plantées, sont incluses dans ce type.
4. Cas particulier, dans le cas de tendance atypique. Il est possible que la plante soit
fugace, c'est-à-dire d’observation difficile. Cette observation peut être impossible si
les graines n’ont pas germé l’année de la prospection. Ce cas correspond aussi aux
expansions récentes pour les espèces non citées dans les flores de référence. Cette
catégorie regroupe également les espèces plantées ou cultivées non spontanées et/ou
parfois subspontanées. Enfin, cette catégorie inclue les sous-espèces non retenues par
les auteurs ou que nous n’avons pas déterminées jusqu’à ce rang.
Les tendances évolutives (spécifiques) vont être utilisées pour comprendre ce qui a été appelé
dans un paragraphe antérieur « Variation de la richesse spécifique de la flore » (cf. p.168),
avec trois types de dynamique (maintien, disparition, apparition). En face de chaque type de
dynamique (maintien, disparition, apparition), nous indiquons les types de milieux fréquentés
par les espèces (cf. Tableau 22). Pour les espèces retrouvées (maintien), nous comparons les
milieux cités en 1885 et les milieux représentés actuellement. Pour les espèces non retrouvées
(disparition), nous analysons les milieux cités en 1885. Pour les espèces nouvellement
trouvées (apparition), nous analysons les milieux représentés.
Types de dynamique
(d’après la présence/
absence dans Haulier et
Schwal
Principaux types de milieux
concernés et nombre d’espèces
ESPECES RETROUVEES
413
-
ESPECES NON RETROUVEES
352
ESPECES NOUVELLEMENT
TROUVEES
105
Bois (72), lieux cultivés (71),
lieux rudéralisés (59), lieux humides
(55), plantes cultivées (48),
pelouses (39)
Lieux rudéralisés (24), pelouses (18),
bois (18), lieux cultivés (14), prairies
(10), lieux humides (10), haies (4)
Types de tendance
(d’après la fréquence
relative dans Noulet,
Sudre, Bosc)
Stable
En expansion
En régression
Cas particulier
Stable
En expansion
En régression
Cas particulier
Stable
En expansion
En régression
Cas particulier
Nombre
d’espèces
392
3
1
17
208
0
86
58
67
14
3
21
Tableau 22. Dynamiques et tendances évolutives des espèces
174
L’analyse des variations de la flore sera systématiquement appuyée par la prise en compte,
pour chaque trait de vie, de l’évolution selon chaque type de dynamique (maintien,
disparition, apparition) de chaque modalité.
L’observation détaillée de l’évolution, selon chaque type de dynamique (maintien,
disparition, apparition), de la richesse spécifique pour chaque modalité de l’ensemble des
traits de vie (cf. Tableau 23) et notamment des valeurs les plus élevées (signalées en gras)
montre que les valeurs maximales et minimales concernent fréquemment les mêmes
modalités. Cette observation signifie d’une part que certaines modalités (espèces forestières et
rudérales, eurasiatiques et méditerranéennes, anémochores, barochores et épizoochores,
héliophiles, mésoxérophiles, annuelles) sont plus soumises à des flux d’espèces que d’autres
par des mécanismes de colonisation, d’extinction et de dispersion, et d’autre part que les
modifications dans l’espace et dans le temps des cortèges floristiques peuvent être masquées
par des apparitions compensant d’autant des disparitions, et ainsi n’entraînant pas forcément
des modifications de la richesse spécifique et des caractéristiques autécologiques de la
végétation.
Maintenu Disparu Apparu
Groupe écologique
adv
aqu
cult
for
mar
pio
prg
prm
rud
15
2
1
22
8
3
10
16
23
4
7
13
34
0
13
2
10
16
15
2
4
26
8
4
13
9
20
5
7
8
25
1
11
5
11
28
3
2
10
19
0
8
11
12
34
26
0
34
7
22
5
6
32
3
26
12
26
1
0
Dissémination
ane
aut
bar
end
epi
hyd
myr
25
2
27
9
27
2
9
Disparu
Apparu
65
31
4
71
25
4
63
30
7
7
36
31
18
5
3
19
37
26
12
6
0
8
35
31
14
10
2
3
4
3
1
2
7
3
8
7
13
4
0
8
34
4
9
12
1
3
4
8
4
4
8
10
1
1
5
25
7
Lumière
16
3
5
14
10
4
6
19
22
Aire de répartition
atl
cir
cos
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esi
eur
int
mat
med
Maintenu
hel
pho
scia
Humidité
xe
mx
me
mh
hy
la
Type biologique
abu
arb
cfr
csu
gbu
grh
gtb
hbi
hcs
her
hro
hru
hst
tes
tve
4
5
2
2
3
6
2
5
8
17
7
0
7
29
3
Tableau 23. Dynamiques de la richesse spécifique relative, par modalité, pour chaque trait de
vie, en %. En gras, valeurs les plus fortes
175
Pour chaque type de dynamique, un commentaire passe en revue les espèces en fonction de
leur rattachement aux traits de vie et de leur tendance évolutive estimée. Quand l’information
était disponible, nous avons indiqué certaines particularités pour les espèces citées.
1- Espèces retrouvées (maintien), 413
Parmi les espèces retrouvées, la plupart (398) colonisent les mêmes types de milieux. Par
contre, quelques-unes (15) ne fréquentent plus les mêmes milieux comme nous l’avons déjà
évoqué lors de l’étude comparée de la fréquence des espèces (cf. p.172), passées des cultures
aux pelouses et/ou prairies - Acinos arvensis (Lam.) Dandy, Anagallis arvensis L., Anchusa italica Retz.,
Bituminaria bituminosa (L.) E.H. Stirton, Calendula arvensis L, Coronilla scorpioides (L.) Koch, Gladiolus
italicus Miller, Lathyrus aphaca L., Muscari comosum (L.) Miller, Ononis spinosa L. ssp. maritima (Dumort. ex
Piré) P. Fourn., Ornithogalum umbellatum L., Trifolium scabrum L. -, ou des bois aux milieux herbacés Bromus commutatus Schrader, Genista tinctoria L., Polygala calcarea F.W. Schultz. D’autres, héliophiles
prairiales, étaient citées en plus d’autres milieux, dans les bois contrairement à aujourd’hui Agrostis capillaris L., Anacamptis pyramidalis (L.) L.C.M. Richard, Anthyllis vulneraria L., Arrhenatherum
elatius (L.) P. Beauv. ex J. & C. Presl, Briza media L., Centaurea nigra L., Hypochaeris radicata L., Luzula
campestris (Ehrh.) Lej., Odontites luteus (L.) Clairv., Origanum vulgare L., Phleum pratense L. ssp. pratense,
Plantago media L., Prunella laciniata (L.) L., Prunella vulgaris L., Senecio erucifolius L., Senecio jacobaea L.,
Trifolium angustifolium L., Trifolium pratense L.
Les espèces qui se sont maintenues depuis 1885 ont pour la plupart (95%) une tendance
stable, la fréquence relative variant de très commune à rare - Ranunculus sardous Crantz, Roegneria
canina (L.) Nevski, Veronica agrestis L. Se sont surtout des espèces rudérales, forestières et de
prairie maigre, européennes, épizoochores, barochores et anémochores, héliophiles, à
tendance xérophile, hémicryptophytiques et thérophytiques. Elles constituent le fond de la
flore lauragaise.
En expansion, introduites, naturalisées - Calamintha nepeta (L.) Savi, Oenothera biennis L. et Robinia
pseudoacacia L.
En régression, annuelle des moissons - Adonis annua L.
Les cas particuliers correspondent aux espèces qui ont toujours été cultivées dans le Lauragais
- Aesculus hippocastanum L., Allium porrum L., Dipsacus fullonum L., Juglans regia L., Prunus cerasus L.,
Prunus laurocerasus L., Syringa vulgaris L., Tilia platyphyllos Scop., Zea mays L. - et dont certaines sont
devenues subspontanées - Avena sativa L., Castanea sativa Miller, Centranthus ruber (L.) DC., Lycium
barbarum L., Medicago sativa L., Triticum aestivum L., Vitis vinifera L. - ou correspondent à des sousespèces pas forcément décrites dans les listes utilisées - Vicia sativa L. ssp. nigra (L.) Ehrh.
Le changement des milieux fréquentés peut s’expliquer par des changements des pratiques.
Ainsi, les espèces qui trouvaient des conditions adéquates en 1885 dans un type de milieu
particulier vont migrer pour retrouver les conditions nécessaires à leur développement. Le
passage des cultures aux formations prairiales illustre l’intensification opérée depuis dans les
cultures et l’installation des espèces dans des formations que nous pouvons qualifier de zonerefuges. Le passage des bois aux formations prairiales illustrent un état passé des bois
particuliers que nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer, les bois à la fin du XIXe siècle étant
soumis au pâturage et à des révolutions très écourtées par un besoin en bois contraignant.
176
Gladiolus italicus Miller
Muscari comosum (L.) Miller
Lycium barbarum L.
Photo 15. Espèces retrouvées dans de nouveaux habitats (Schwal)
2- Espèces non retrouvées (disparition), 352
Nous distinguons les espèces non retrouvées en fonction des milieux dans lesquels elles
étaient citées en 1885 et en fonction de leur tendance évolutive (espèces estimées comme
stables ou en régression à l’échelle régionale).
Des espèces étaient citées dans les milieux boisés (bois, haies, buissons).
Espèces forestières, stables - Anemone nemorosa L., Buxus sempervirens L., Carex remota L.,
Chaerophyllum temulum L., Crataegus oxyacantha L., nom. rej., Erica scoparia L., Euphorbia dulcis
L., Fragaria viridis Weston, Frangula alnus Miller, Helleborus viridis L., Hippocrepis emerus (L.) P.
Lassen, Hypericum androsaemum L., Hypericum montanum L., Lamium galeobdolon (L.) L., Lonicera
etrusca G. Santi, Luzula sylvatica (Hudson) Gaudin, Melampyrum pratense L., Mercurialis perennis L.,
Polypodium vulgare L., Potentilla sterilis (L.) Garcke, Salix caprea L., Trifolium rubens L., Viola alba
Besser ssp. alba., Viola alba Besser ssp. scotophylla (Jordan) Nyman., Viola odorata L.
En régression - Bromus ramosus Hudson, Carex sylvatica Hudson, Carex umbrosa Host, Daphne
laureola L., Erica cinerea L., Listera ovata (L.) R. Br., Oenanthe lachenalii C.C. Gmelin, Ormenis
nobilis (L.) Cosson & Germain prairiale broutée, Solidago virgaurea L., Tilia cordata Miller,
Trifolium medium L. broutée.
Des espèces prairiales ou rudérales héliophiles (73) étaient citées dans les bois.
Stables - Achillea ptarmica L., Agrostis canina L., Aira caryophyllea L., Campanula rapunculus L.,
Carex caryophyllea Latourr., Carlina corymbosa L., Chamaemelum mixtum (L.) All., Cirsium palustre
(L.) Scop., Dactylorhiza maculata (L.) Soó (pullule dans les bois du Lauragais en 1895
(Fagot, 1895)), Danthonia decumbens (L.) DC. broutée, Euphorbia villosa Kit. ex Willd., Galium
pumilum Murray, Gentiana pneumonanthe L., Koeleria pyramidata (Lam.) P. Beauv. broutée,
Melampyrum cristatum L., Moenchia erecta (L.) G. Gaertner, B. Meyer & Scherb., Orchis morio L.
(pullule dans les bois du Lauragais en 1895 (Fagot, 1895)), Pimpinella major (L.) Hudson,
Pimpinella saxifraga L., Platanthera bifolia (L.) L.C.M. Richard (pullule dans les bois du
Lauragais en 1895 (Fagot, 1895)), Potentilla argentea L., Potentilla crantzii (Crantz) G. Beck ex
Fritsch, Potentilla erecta (L.) Räuschel, Potentilla montana Brot., Primula veris L., Saxifraga
granulata L., Serapias lingua L., Silene nutans L. (espèce signalée comme non propre à la
flore toulousaine, dont les graines ont été apportées par la navigation, d’introduction
récente en 1864, (Baillet, 1864)), Spiranthes spiralis (L.) Chevall., Stellaria graminea L.,
Trifolium fragiferum L., Trifolium hybridum L. ssp. elegans (Savi) Ascherson & Graebner broutée,
Trifolium patens Schreber broutée, Veronica serpyllifolia L.
En régression - Coeloglossum viride (L.) Hartman, Ornithopus perpusillus L. broutée.
177
Des espèces étaient citées dans les lieux rudéralisés (vieux murs, décombres, bords des
chemins).
Stables - Amaranthus albus L., Anthriscus caucalis M. Bieb., Asplenium ceterach L., Carthamus
lanatus L., Centaurea calcitrapa L., Chenopodium murale L., Chenopodium opulifolium Koch & Ziz,
Chenopodium rubrum L. var. intermedium (Mert. & Koch) Jauzein, Chenopodium vulvaria L., Conium
maculatum L., Crepis capillaris (L.) Wallr., Cynoglossum creticum Miller, Diplotaxis muralis (L.)
DC., Diplotaxis tenuifolia (L.) DC., Ecballium elaterium (L.) A. Richard, Eragrostis pilosa (L.)P.
Beauv., Erysimum cheiri (L.) Crantz, Heliotropium europaeum L., Lactuca saligna L., Lamium
maculatum L., Lepidium graminifolium L., Lithospermum purpureocaeruleum L., Marrubium vulgare
L., Onopordum acanthium L., Plantago coronopus L., Reseda luteola L., Rumex pulcher L., Sagina
apetala Ard., Sagina procumbens L., Saxifraga tridactylites L., Sedum rubens L., Sisymbrium officinale
(L.) Scop., Verbascum blattaria L., Verbascum sinuatum L., Xanthium spinosum L., Xanthium
strumarium L.
Stables mais fugaces - Althaea cannabina L., Capsella rubella Reuter, Carduus nutans L.
En régression - Antirrhinum majus L., Atriplex rosea L. (disséminée par les moyens de
transport en 1877 (Clary, 1887)), Berberis vulgaris L., Coronopus squamatus (Forsskål)
Ascherson, Echium asperrimum Lam., Euphorbia stricta L., Fumana procumbens (Dunal) Gren. &
Godron, Helleborus foetidus L., Hyoscyamus niger L., Linaria repens (L.) Miller, Logfia minima (Sm.)
Dumort., Malva nicaeensis All., Scolymus hispanicus L., Sempervivum tectorum L., Sisymbrium irio L.,
Stachys germanica L., Verbascum lychnitis L., Verbascum pulverulentum Vill.
Espèces cultivées, pouvant être subspontanées - Euphorbia lathyris L., Iris germanica L.
Des espèces appartenant aux pelouses basophiles ou aux friches étaient autrefois citées dans
les lieux secs des coteaux (pelouses).
Stables - Artemisia campestris L., Asperula cynanchica L., Cerastium pumilum Curtis, Cerastium
semidecandrum L., Coriaria myrtifolia L., Dianthus carthusianorum L., Dichanthium ischaemum (L.)
Roberty broutée, Erophila verna (L.) Chevall., Erucastrum gallicum (Willd.) O.E. Schulz, Euphorbia
cyparissias L., Galium verum L., Jasione montana L., Linum tenuifolium L., Melica ciliata L. ssp.
magnolii (Godron & Grenier) K. Richter (espèce signalée comme étant broutée), Orobanche
rapum-genistae Thuill., Petrorhagia prolifera (L.) P.W. Ball & Heywood, Phleum phleoides (L.)
Karsten broutée, Scorzonera laciniata L., Stachys recta L., Teucrium chamaedrys L., Veronica
austriaca L. ssp. teucrium (L.) D.A. Webb, Vincetoxicum hirundinaria Medik., Xolantha guttata (L.)
Rafin.
En régression - Anthericum liliago L., Asparagus acutifolius L., Astragalus monspessulanus L.,
Cirsium acaule Scop., Euphrasia stricta D. Wolff ex J.F. Lehm., Genista scorpius (L.) DC., Leontodon
hispidus L., Medicago orbicularis (L.) Bartal. (espèce signalée comme étant broutée), Scilla
autumnalis L., Scrophularia canina L., Taraxacum fulvum Raunk. gr., Tragopogon dubius Scop. ssp.
major (Jacq.) Vollmann, Tragopogon pratensis L. ssp. orientalis (L.) Celak., Trigonella monspeliaca L.
(espèce signalée comme étant broutée).
En limite d’aire de répartition - Globularia bisnagarica L. méditerranéenne, fugace - Vulpia
unilateralis (L.) Stace.
Des espèces hygrophiles étaient citées dans les lieux humides (prairies humides, fossés,
mares, étangs, viviers).
Stables - Althaea officinalis L., Angelica sylvestris L., Astragalus glycyphyllos L. (rare en 1889
(Fontès M., 1889)), Barbarea vulgaris R. Br., Berula erecta (Hudson) Coville, Bidens tripartita L.,
Cardamine pratensis L., Carex distans L., Carex ovalis Good., Carex riparia Curtis, Catabrosa
aquatica (L.) P. Beauv., Cirsium tuberosum (L.) All., Equisetum hyemale L., Galium palustre L.,
Heracleum sphondylium L., Hypericum tetrapterum Fries, Juncus tenageia Ehrh in L. fil., Lythrum
hyssopifolia L., Mentha pulegium L., Moehringia trinervia (L.) Clairv., Nasturtium officinale R. Br.,
Phalaris arundinacea L., Phragmites australis (Cav.) Steudel, Polygonum amphibium L., Polygonum
178
hydropiper L., Polygonum mite Schrank, Ranunculus trichophyllus Chaix, Rhinanthus angustifolius
C.C. Gmelin, Rorippa palustris (L.) Besser, Scirpoides holoschoenus (L.) Soják, Scrophularia nodosa
L., Sparganium erectum L., Trifolium subterraneum L. (espèce signalée comme étant broutée),
Veronica anagallis-aquatica L. anagallis.
En régression – Callitriche hamulata Koch, Callitriche platycarpa Kütz. in Reichenb., Caltha
palustris L., Centaurium pulchellum (Swartz) Druce, Colchicum autumnale L. (espèce signalée
comme toxique pour le bétail), Cyperus longus L. ssp. badius (Desf.) Bonnier & Layens, Galium
uliginosum L., Groenlandia densa (L.) Fourr., Gymnadenia conopsea (L.) R. Br. in Aiton fil., Lotus
glaber Miller, Lotus maritimus L. var. maritimus (espèce signalée comme étant broutée),
Lysimachia nummularia L., Myosoton aquaticum (L.) Moench, Oenanthe peucedanifolia Pollich,
Orchis ustulata L., Pedicularis sylvatica L., Poa palustris L., Rorippa x-prostrata (J.P. Bergeret)
Schinz & Thell., Senecio erraticus Bertol., Silaum silaus (L.) Schinz & Thell.
Fugaces - Alisma lanceolatum With.
Des espèces étaient citées dans les lieux cultivés (champs, terrains sarclés, jachères, vignes).
Un nombre relativement important sont des espèces annuelles commensales des
cultures ou des friches annuelles, estimées comme stables - Ajuga chamaepitys (L.)
Schreber, Allium pallens L., Alyssum alyssoides (L.) L., Anthemis arvensis L., Bupleurum rotundifolium
L., Bupleurum subovatum Link ex Sprengel, Centaurea cyanus L., Centaurea solstitialis L., Chondrilla
juncea L., Cuscuta epithymum (L.) L., Cynosurus echinatus L., Digitaria sanguinalis (L.) Scop.,
Dipsacus laciniatus L., Eragrostis cilianensis (All.) Janchen, Filago pyramidata L., Filago vulgaris
Lam., Fumaria densiflora DC., Fumaria parviflora Lam., Galeopsis angustifolia Hoffm., Galium
parisiense L., Galium tricornutum Dandy, Gypsophila muralis L., Herniaria hirsuta L., Iberis amara
L., Leontodon saxatilis Lam. ssp. saxatilis, Linum trigynum L., Logfia gallica (L.) Cosson & Germ.,
Matricaria perforata Mérat, Mentha arvensis L., Mibora minima (L.) Desv., Myosotis discolor Pers.
ssp. discolor, Neslia paniculata (L.) Desv., Nigella gallica Jordan, Odontites vernus (Bellardi) Dumort.
ssp. serotinus (Dumort.) Corb., Orlaya grandiflora (L.) Hoffm., Orobanche ramosa L., Papaver
argemone L., Papaver dubium L., Papaver hybridum L., Petroselinum segetum (L.) Koch, Polycarpon
tetraphyllum (L.) L., Polycnemum arvense L., Pseudognaphalium luteo-album (L.) Hilliard & Burtt,
Scleranthus annuus L., Silene gallica L., Spergula arvensis L. ssp. arvensis, Stachys arvensis (L.) L.,
Torilis nodosa (L.) Gaertner, Trifolium arvense L. broutée après la moisson, Turgenia latifolia (L.)
Hoffm., Valerianella rimosa Bast., Veronica triphyllos L., Vicia tetrasperma (L.) Schreber, Vicia
villosa Roth ssp. varia (Host) Corb.
En régression - Agrostemma githago L., Aristolochia clematitis L., Asperula arvensis L., Avena
sterilis L. ssp. ludoviciana (Durieu) Nyman, Bupleurum tenuissimum L., Camelina sativa (L.) Crantz,
Cuscuta suaveolens Ser., Dittrichia graveolens (L.) W. Greuter, Gnaphalium uliginosum L., Iberis
pinnata L., Lathyrus angulatus L. (espèce signalée comme étant broutée), Lathyrus cicera L.
(espèce signalée comme étant broutée), Leontodon autumnalis L., Lolium remotum Schrank,
Thymelaea passerina (L.) Cosson & Germ., Trifolium filiforme L. (espèce signalée comme étant
broutée), Vaccaria hispanica (Miller) Rauschert
Les cas particuliers correspondent à des espèces autrefois cultivées ou plantées - Allium cepa
L., Allium sativum L., Artemisia absinthium L., Artemisia dracunculus L., Atriplex hortensis L., Beta vulgaris
L., Brassica napus L., Brassica oleracea L., Brassica rapa L. emend. Metzger, Brassica rapa L. emend.
Metzger ssp. oleifera (DC.) Metzger, Cannabis sativa L., Caucalis platycarpos L. [1753] , Cucurbita maxima
Duchesne ex Lam., Cupressus sempervirens L., Cydonia oblonga Miller, Eruca sativa Miller, Hordeum vulgare
L., Hyssopus officinalis L., Isatis tinctoria L., Juniperus sabina L., Lathyrus sativus L. fourrage, Lavandula
angustifolia Miller, Lavandula latifolia Medik., Lens culinaris Medik., Lepidium sativum L., Lycopersicon
esculentum Miller, nom. cons., Mentha spicata L., Onobrychis viciifolia Scop., Phaseolus vulgaris L., Pinus
pinea L., Pisum sativum L., Platanus orientalis L., Populus nigra L. ssp. nigra var. italica Duroi, Populus xcanadensis Moench, Prunus armeniaca L., Prunus domestica L. ssp. insititia (L.) Bonnier & Layens, Prunus
179
dulcis (Miller) D.A. Webb, Prunus persica (L.) Batsch, Pyrus communis L., Rumex patientia L., Secale cereale
L., Solanum melongena L., Solanum tuberosum L., Tanacetum parthenium (L.) Schultz Bip., Taxus baccata L.,
Thuja occidentalis L., Trifolium incarnatum L., Vicia faba L. - ou à des sous-espèces dont la statut
subspécifique entraîne une imprécision - Poa bulbosa L. ssp vivipara Koeler, Ranunculus acris L. ssp.
friesianus (Jordan) Syme, Valeriana officinalis L. ssp. sambucifolia (Mikan fil.) Celak., Vicia sativa L. ssp.
segetalis (Thuill.) Celak.
Tous les types de milieu sont concernés par la disparition d’espèces. Les milieux les plus
touchés sont les bois et les lieux cultivés, représentés surtout par des espèces rudérales et de
prairie maigre, et secondairement par des adventices, forestières, de prairie grasse et de
marais, méditerranéennes et eurasiatiques, barochores, anémochores et épizoochores, de
lumière, à tendance sèche, thérophytes estivales et hémicryptophytes. Pour les bois, si
certaines espèces sont inféodées à ce type de milieu, nous observons un nombre assez
important d’espèces qui ne le sont pas.
Si 24 % des espèces non retrouvées sont avérées en régression (le quart est considéré en limite
d’aire de répartition), nous constatons qu’un grand nombre des espèces non retrouvées sont
pourtant considérées comme stables depuis 1884. Ce sont donc des facteurs autres que
d’origine naturelle qui ont entraîné leur disparition (cf. Chapitre 5). Parmi ces espèces stables,
certaines sont des espèces en limite d’aire de répartition, ‘fugaces’, donc difficilement
observables. Un nombre important d’espèces sont des espèces qui étaient cultivées et peuvent
encore l’être mais que nous n’avons pas toujours répertoriées, comme celles de jardin. Les
introduites disparues étaient notamment des espèces cultivées.
Nous pouvons mettre en cause l’intensification des pratiques et des usages dans les lieux
cultivés et incultes (herbicides, désherbage des talus, fossés, murs, champs, tendance à la
monoculture), la régression des zones pâturées1 (plantes prairiales et rudérales,
mésoxérophiles) et la régression des formations végétales hygrophiles (prairies humides et
berges enherbées des ruisseaux et fossés). La régression des forestières peut être mise en
relation avec la régression et/ou la fragmentation des zones boisées, mettant en évidence le
lien qui existe entre la surface minimale boisée et le nombre d’espèces présentes. Nous ne
pouvons cependant exclure un défaut de prospection.
Gentiana pneumonanthe L. Silene gallica L.
Nigella gallica Jordan
Daphne laureola L.
Photo 16. Espèces non retrouvées (Schwal)
1 1
Le stade final peut contenir des éléments de stades antérieurs : reconnus, ces éléments dits relictuels peuvent
être dès lors utilisés pour acquérir des informations sur les stades antérieurs disparus (De Foucault, 2001).
180
3- Espèces dernièrement trouvées (apparitions), 105
Nous distinguons les espèces nouvellement trouvées en fonction des milieux dans lesquels
nous les avons inventoriées.
Des espèces sont trouvées dans les pelouses.
Même si certaines ont été plantées - Cedrus atlantica (Endl.) Carrière, Pinus nigra Arnold ssp.
laricio Maire, Pyracantha coccinea M.J. Roemer - la plupart ont une tendance évolutive
considérée comme stable - Asteriscus spinosus (L.) Schultz Bip., Lathyrus hirsutus L., Ophrys
scolopax Cav., Orchis militaris L., Serapias vomeracea (Burm.) Briq., Spartium junceum L., Stachys
annua (L.) L., Tragopogon pratensis L. ssp. pratensis, Vicia bithynica (L.) L. - pouvant être en
limite de répartition - Dorycnium hirsutum (L.) Ser., Helichrysum stoechas (L.) Moench.
En régression - Lathyrus nissolia L., Sinapis arvensis L.
Sous-espèces qui n’avaient été déterminé qu’au rang de l’espèce - Origanum vulgare L.
ssp. viridulum (Martrin-Donos) Nyman, Tragopogon pratensis L. ssp. minor (Miller) Wahlenb.
Nous notons qu’il n’y a pas d’espèces estimées en expansion.
Des espèces sont trouvées dans les prairies.
Si une espèce est cultivée et subspontanée - Tragopogon porrifolius L. - et une autre en
expansion introduite - Senecio inaequidens DC. - la plupart sont stables - Alopecurus
geniculatus L., Bromus racemosus L., Hordeum secalinum Schreber, Lathyrus annuus L.,
Ophioglossum vulgatum L. (peu répandu en 1897 (Fagot, 1897)), Poa trivialis L., Trifolium
dubium Sm. - ou en limite de répartition - Bellevalia romana (L.) Reichenb.
Des espèces sont trouvées dans les lieux rudéralisés.
Espèces introduites en expansion – Buddleja davidii Franchet, Conyza sumatrensis (Retz.) E.
Walker, Phacelia tanacetifolia Bentham.
Espèces stables, très commune à rare (CCC à RR) – Bromus diandrus Roth ssp. maximus
(Desf.) Soó, Bromus secalinus L. (rare et en expansion en 1876 (Desjardins, 1876)), Bromus
sterilis L., Bromus tectorum L., Calendula officinalis L., Cardamine flexuosa With., Chenopodium
polyspermum L., Crepis sancta (L.) Bornm., Cymbalaria muralis G. Gaertner (rare en 1889 (Fontès
M., 1889)), B. Meyer & Scherb, Elytrigia campestris (Godron & Gren.) Kerguélen, Erodium
malacoides (L.) L'Hérit., Medicago polymorpha L., Sedum sediforme (Jacq.) Pau, Verbascum thapsus
L. - parfois fugaces - Avenula pubescens (Hudson) Dumort., Umbilicus rupestris (Salisb.) Dandy
(rare et en expansion en 1876 (Desjardins, 1876)) - ou en limite de répartition - Thlaspi
alliaceum L.1
Des espèces cultivées peuvent devenir subspontanée - Allium neapolitanum Cyr., Allium
polyanthum Schultes & Schultes fil., Aquilegia vulgaris L., Lunaria annua L.
Des espèces sont trouvées dans les lieux cultivés.
Espèces en expansion - Amaranthus blitum L., Amaranthus hybridus L., Monerma cylindrica
(Willd.) Cosson & Durieu
Stables – Anthemis altissima L. emend Sprengel, 1826, Consolida ajacis (L.) Schur, Crepis setosa
Haller fil., Kandis perfoliata (L.) Kerguélen, Phalaris paradoxa L., Picris echioides L., Polygonum
lapathifolium L., Veronica polita Fries - ou en limite de répartition - Calepina irregularis (Asso)
Thell.
Des espèces cultivées peuvent devenir subspontanées - Helianthus tuberosus L., Morus alba
L.
1
Espèce rare et fugace, adventice en migration, en voie de naturalisation dans certains départements français
(Deschatres et al., 1994).
181
Des espèces sont trouvées dans les bois.
Espèce introduite en expansion - Prunus cerasifera Ehrh. –
Espèces cultivées, pouvant devenir subspontanées – Arundo donax L., Narcissus xmedioluteus Miller, Viburnum tinus L. –
Espèces stables – Anthriscus sylvestris (L.) Hoffm., Circaea lutetiana L., Festuca heterophylla
Lam., Fraxinus angustifolia Vahl ssp. oxycarpa (Willd.) Franco & Rocha Afonso, Geranium nodosum
L., Hypericum pulchrum L., Ilex aquifolium L., Iris foetidissima L., Oenanthe pimpinelloides L.,
Prunus avium L., Rumex sanguineus L., Sorbus torminalis (L.) Crantz - ou de répartition aléatoire
dans la région – Carpinus betulus L., Dryopteris affinis (Lowe) Fraser-Jenkins ssp. borreri
(Newman) Fraser-Jenkins, Dryopteris filix-mas (L.) Schott (incertitude spécifique sur ces deux
dernières).
Des espèces sont trouvées dans les haies.
Si une est stable – Bromus madritensis L. - et une autre en limite d’aire de répartition –
Rhamnus alaternus L. - deux ont été plantées - Laburnum anagyroides Medik., Ligustrum
ovalifolium Hassk.
Des espèces sont trouvées dans les lieux humides.
Espèces en expansion - Setaria pumila (Poiret) Roemer & Schultes - introduites - Populus canescens
(Aiton) Sm., Sporobolus indicus (L.) R. Br. - ou plantée – Ficus carica L.
Espèces stables – Eleocharis palustris (L.) Roemer & Schultes, Equisetum ramosissimum Desf., Populus
alba L., Potamogeton natans L., Salix acuminata Miller, Salix triandra L. emend. Ser. ssp. discolor (Koch)
Arcangeli.
Tous les types de milieu sont marqués par des apparitions, spécialement les lieux rudéralisés,
les pelouses et les bois. Les espèces apparues ont les caractéristiques propres suivantes :
forestières, rudérales et adventices, héliophiles, méditerranéennes et eurasiatiques ayant des
exigences limitées en eau du sol, se disséminant par anémochorie, barochorie et épizoochorie.
Pour ce qui est des forestières, leur apparition peut être liée à l’abandon du pâturage en
prairie, pelouse et sous-bois, qui permet à une flore hémicryptophytique plus spécifique de
s’installer en éliminant les espèces compétitrices à large plasticité écologique ; cet abandon
peut être accentué par une exploitation moins intense des bois et une révolution plus longue.
Concernant d’autres traits de vie (héliophiles, …), les apparitions dans les pelouses peuvent
témoigner du défrichement sur des coteaux secs, avec installation de plantes méditerranéennes
et plantations pour la végétalisation. Concernant les espèces rudérales, leur apparition peut
s’expliquer par l’augmentation des échanges et circulations qui favorisent les flux d’espèces,
notamment anémochores (la moitié sont des cosmopolites ou des introduites). Les
anémochores apparues sont en majorité des espèces forestières et rudérales ; elles colonisent
les espaces anthropisés et les lisières : elles ont des aptitudes élevées à la colonisation de
nouveaux milieux grâce à un mode de dissémination adapté à la région (forte prégnance du
vent).
Parmi les espèces apparues, certaines relèvent de la tendance évolutive "en expansion" :
introduites récemment, volontairement (plantation) ou accidentellement. Mais la plupart
relèvent de la tendance évolutive "stable". Les quelques espèces évaluées "en régression" sont
fugaces1. La tendance évolutive "cas particuliers" correspond à des espèces soit cultivées
pouvant devenir subspontanées, soit en limite d’aire de répartition, soit à des sous-espèces ;
nous y notons une forte proportion d’espèces introduites (11%), qui correspondent à des
végétaux ligneux anémochores ou endozoochores (ornithochorie), forestiers.
1
Nous touchons là les limites du nombre de données utilisées.
182
Stachys annua L.
Umbilicus rupestris Dandy
Amaranthus blitum L.
Photo 17.
Espèces dernièrement trouvées (Schwal)
Que penser de la variation de la flore mise en lumière par la tendance évolutive des espèces ?
Nous observons une dynamique générale de la flore estimée en partie par l’évolution de la
fréquence relative, avec des régressions d’espèces, des expansions et des stabilités. Les
milieux fréquentés apportent une explication à cette dynamique. Par la comparaison Haulier et
2001 (liste floristique actuelle globale), des espèces n’ont pas été retrouvées, d’autres ont été
nouvellement trouvées, certaines ont été retrouvées. Parmi ces dernières, certaines ont pu
coloniser de nouveaux milieux que nous qualifions de zones refuges. La prise en compte des
données de l’autécologie et des milieux fréquentés nous a permis d’ébaucher la
compréhension des causes de ces variations. Toutefois, cette compréhension ne peut être
complètement clarifiée en prenant en compte ces seuls facteurs. Par exemple, l’absence des
espèces stables ou l’apparition de nouvelles espèces dans la liste actuelle ne peuvent
s’expliquer que par des changements dans l’organisation spatiale ou dans les pratiques qui ont
lieu dans les milieux : diminution locale de milieux spécifiques (formations végétales
hygrophiles), apparition de pelouses en coteau, abandon de pratiques agricoles traditionnelles,
régression des zones pâturées, abandon de l’exploitation intense des bois à courte révolution,
intensification de pratiques modernes (désherbages des champs cultivés, murs, talus, fossés).
Les espèces héliophiles, prairiales citées en 1885 dans les bois illustrent à ce sujet un sousbois clair, offrant des conditions de lumière suffisantes à l’établissement d’un cortège
floristique héliophile, ces sous-bois étant entretenus par pâturage (Fagot témoigne en 1895 de
la forte présence des orchidées prairiales dans les bois du Lauragais). L’apparition des espèces
rudérales peut s’expliquer par l’augmentation des échanges et circulations qui favorisent les
flux d’espèces.
Ce travail ne prend pas en compte d’autres facteurs également explicatifs : par exemple,
l’augmentation de l’utilisation d’engrais et de produits phytosanitaires dans les cultures.
Une constatation intéressante est que, quelque soit le type de dynamique (retrouvées, non
retrouvées, nouvellement trouvées), ce sont les espèces anémochores, barochores et
épizoochores qui prédominent. Ce n’est pas forcément le résultat auquel nous aurions pu nous
attendre : il y a un flux constant et général de ces espèces quelle que soit l’époque et donc
quelle que soit l’utilisation de l’espace. De la même façon, les espèces de lumière sont celles
que nous avons le plus retrouvées et ce sont aussi celles qui sont les plus affectées par des
dynamiques de disparition et d’apparition. La prédominance de ces espèces est bien un
caractère constant de la flore lauragaise.
L’étude de la variation de la flore à l’échelle communale (Nailloux 1885, 2001), que nous ne
présentons pas dans cette étude, montre des résultats quasiment similaires à ceux
183
précédemment obtenus en prenant en compte la flore actuelle globale, confirmant le caractère
constant de la flore lauragaise.
2. 4 -
La flore lauragaise depuis 1885 : les évolutions 1885-2001, à la lumière de
l’ensemble des interprétations des données
À travers l’étude de la variation de la flore lauragaise depuis 1885, nous avons pu mettre en
évidence notamment sa banalisation qui se manifeste par la diminution de cortèges propres à
certains types de milieu (hygrophiles) et l’augmentation d’espèces à large amplitude
écologique (rudérales). L’étude de la dynamique au niveau des peuplements et de la
composition floristique nous a permis de formaliser les variations des caractéristiques et celles
de la composition de la flore.
Si la flore lauragaise, au sens de notre étude, est potentiellement riche de 870 taxons, son
inventaire instantané ne permet pas d’atteindre cette valeur. Ainsi, nous constatons une
variation de la richesse spécifique et de la diversité floristique entre 1885 et 2001. La richesse
spécifique a diminué de 31% depuis la première date d’étude, la signification de cette
diminution devant toutefois être minorée car le nombre de disparitions est compensé par un
certain nombre d’apparitions. Si des espèces se maintiennent au cours du temps, d’autres
régressent pendant que d’autres apparaissent. En parallèle, la diversité supraspécifique a
diminué.
Nous avons pu constater que les trois dynamiques possibles se déroulent de façon contrastée
dans les différents types de milieu présents sur les territoires d’étude. Alors que les milieux de
type fruticées, vignes, lisières, prairies s’enrichissent, les milieux de type bords des eaux, bois,
cultures, communautés rudérales et pelouses s’appauvrissent, expliquant la diminution des
espèces aquatiques hydrochores, de marais et xérophiles, de prairie maigre, constatée par
l’analyse de la richesse de la flore selon les traits de vie des espèces. La variation de la flore
s’exprime également au niveau de sa richesse patrimoniale, pour laquelle nous avons pu
constater une régression globale forte, accentuée par une augmentation marquée d’espèces
dites invasives (l’invasion des espèces exotiques est le deuxième agent réducteur de la
biodiversité végétale, après la destruction des habitats, cf. Chapitre 1, p.32). Toutefois,
l’apparition depuis 1885 d’espèces représentant une richesse patrimoniale démontre que les
activités humaines peuvent avoir un effet positif sur la biodiversité végétale en créant des
écosystèmes nouveaux (cf. p.32) et indique qu’une politique de gestion conservatoire est
toujours possible même dans des espaces de plus en plus intensifiés et modernisés.
L’analyse de la fréquence des espèces, estimée par le nombre de type de milieux cités, nous a
permis de constater une augmentation des espèces dites constantes de la flore c'est-à-dire que
l’on retrouve dans une diversité de types de milieu, et notamment des espèces forestières,
parallèlement à la diminution des espèces inféodées à un seul type de milieu. De plus,
l’anémochorie, favorisée dans des espaces herbacés, diminue, remplacée par une
dissémination par les animaux qui est plus avantagée dans les espaces arborés (par le gibier).
Cela indique une banalisation de la flore par augmentation des espèces les plus communes et
vraisemblablement une augmentation des milieux boisés par abandon du pâturage en sousbois, dans les pâtures, où la succession progressive peut se mettre en place, et par diminution
de l’exploitation forestière. Ceci est étayé par l’observation de l’enrichissement des milieux
de type fruticée et lisière. Comme nous l’avons évoqué dans le Chapitre 1 (cf. p.32), les
diverses transformations opérées sur le milieu plutôt défavorables à la plupart des espèces des
communautés d’origine tendent à favoriser un petit nombre d’espèces opportunistes.
184
Différentes caractéristiques écologiques (traits de vie, fréquence, milieux fréquentés) nous ont
permis de distinguer les espèces maintenues, disparues et apparues selon leur tendance
évolutive, afin de comprendre leur dynamique.
- Les espèces qui se sont maintenues depuis 1885 sont surtout des espèces ayant une tendance
stable depuis 1885, appartenant au groupe des rudérales, forestières et de prairie maigre,
européennes, épizoochores, barochores et anémochores, héliophiles, à tendance xérophile,
hémicryptophytiques et thérophytiques. Nous pouvons avancer qu’elles constituent le fond de
la flore lauragaise. L’analyse de la fréquence nous a par ailleurs indiquer que de telles espèces
étaient les plus soumises à des flux d’espèces. L’analyse des milieux fréquentés a montré pour
les espèces maintenues que certaines espèces qui trouvaient des conditions adéquates à leur
colonisation dans les lieux cultivés et boisés en 1885 ont migré depuis dans les formations
prairiales pour trouver les conditions nécessaires à leur développement optimal. Ces
changements, pour des espèces ayant une plasticité écologique étroite, déjà révélés lors de
l’analyse de la fréquence des espèces, illustrent la contrainte mise sur ces espèces en raison de
changements de pression sur le milieu et peuvent s’expliquer par des changements des
pratiques (intensification dans les cultures, abandon du pâturage dans les bois, révolution
rallongée). Les pelouses, où la pression anthropique a cessé, se comportent comme des zonesrefuges et des milieux d’accueil pour la biodiversité végétale.
- Les disparitions d’espèces depuis 1885 se sont surtout produites dans les bois et les lieux
cultivés, pour des espèces pourtant considérées comme stables. Ce sont donc des facteurs
autres que d’origine naturelle qui ont entraîné leur disparition (que nous tenterons de mettre
en évidence dans le chapitre 5). Nous pouvons mettre en cause l’intensification des pratiques
et des usages dans les lieux cultivés et incultes (herbicides, désherbage des talus, fossés, murs,
champs, tendance à la monoculture), la régression des zones pâturées et des formations
végétales hygrophiles. La régression des espèces forestières peut être mise en relation avec la
régression des zones boisées. Les espèces prairiales qui ont disparu des bois reflètent l’état
passé des bois, éclaircis par des coupes répétées et un pâturage intense. Nous avons pu
constater une diminution de la richesse des espèces cultivées, illustrant une certaine
homogénéisation des plantes cultivées et donc de la flore associée.
- Les apparitions d’espèces, autochtones comme exotiques, depuis 1885, se sont surtout
produites dans les lieux rudéralisés, les pelouses et les bois, pouvant marquer l’abandon du
pâturage en prairie, pelouse et sous-bois, l’exploitation moins intense des bois et des coupes
plus espacées dans le temps, le défrichement sur des coteaux secs, l’augmentation des
échanges et circulations qui favorisent les flux d’espèces.
Nous avons donc atteint le but de la partie qui était de mettre en évidence la variation de la
flore grâce à la tendance évolutive des espèces, et notamment de mettre en évidence la
banalisation de la flore qui se manifeste par la diminution de cortèges propres à certains types
de milieu et l’augmentation d’espèces à large amplitude écologique (rudérales, opportunistes,
ubiquistes), conséquemment à l’homogénéisation des pratiques et de l’occupation du sol. La
diversité floristique est minorée par la prépondérance actuelle de certaines espèces, cette
prépondérance était diminuée par le pâturage en 1885 (comme vu dans le chapitre 1, p.38), ce
qui est cohérent avec la richesse plus faible observée en 1885 pour les espèces constantes.
Nous avons pu remarquer que la fugacité des espèces peut parfois empêcher leur observation,
tout comme les espèces en limite d’aire de répartition. Comme nous pouvions nous y attendre
(cf. chapitre 1, p.32), les facteurs mésologiques sont les facteurs fondamentaux de la
constitution des cortèges floristiques, en raison du poids des conditions offertes par le milieu à
l’installation des espèces. Mais des facteurs extérieurs vont venir se superposer aux facteurs
mésologiques et en atténuer l’importance. Cette affirmation semble soutenue par la
prédominance d’espèces évaluées stables, non retrouvées ou nouvellement apparues, dans la
liste des espèces. De plus, ces facteurs extérieurs semblent intervenir de façon négative sur la
185
flore puisque nous constatons une érosion de la diversité biologique végétale, depuis 1885.
Finalement, l’explication de la variation de la flore nécessite la prise en compte de multiples
facteurs et l’estimation de leur poids requiert le recours à des méthodes statistiques,
envisagées dans le Chapitre 5. Une autre piste intéressante, émergeant de nos analyses de
données, serait la possibilité de construire un indicateur du degré de dégradation des
écosystèmes : par exemple en caractérisant les milieux selon leur richesse spécifique.
III -
Les enseignements tirés de la composition et de la
diversité floristiques
Les deux analyses, réalisées pour mettre en évidence la réponse de la flore à des changements
d’organisation du paysage qui s’opèrent dans le temps et dans l’espace, nous ont permis
d’avancer un certain nombre de résultats éclairant les relations entre flore et paysage.
L’analyse des aspects actuels de la flore lauragaise, mis en rapport avec des schémas
d’organisation spatiale du paysage différents
− éclaire sur l’incidence de la surface totale représentée par un type de milieu sur sa
richesse spécifique,
− réfute la relation instinctivement admise entre l’anthropisation d’un milieu et la
pauvreté de sa diversité floristique, les milieux les plus anthropisés ne se révélant pas
forcément les plus pauvres en terme de richesse floristique,
− montre que la prise en compte des caractéristiques écologiques des espèces permet de
qualifier la flore : la dominance de Familles cosmopolites et d’espèces à haut pouvoir
de colonisation permet de parler pour le Lauragais d’une flore banale,
− indique l’intérêt de l’étude de la composition floristique dans la caractérisation des
formations végétales et de paysages singuliers, comme celui du Lauragais,
− témoigne de l’influence de l’organisation spatiale du paysage et plus particulièrement
du degré d’artificialisation sur la richesse patrimoniale de la flore et sur les risques
d’invasion d’espèces.
L’analyse de la variation de la flore lauragaise depuis 1885, mise en rapport avec des
schémas d’organisation temporelle du paysage différents
− révèle une perte ou un gain de richesse spécifique de certains milieux à la suite d’une
modification des pratiques : ainsi, l’abandon du pâturage en sous-bois correspond à
une baisse de la richesse spécifique,
− réfute l’idée préconçue selon laquelle la perte de richesse patrimoniale dans des
paysages traditionnels serait irréversible,
− témoigne d’une banalisation de la flore à travers l’augmentation d’espèces
communes, dominantes, augmentation entraînée par les diverses transformations
opérées sur le milieu (abandon du pâturage, enclenchement de la succession végétale
progressive),
− permet de caractériser la flore lauragaise par une typicité remarquablement invariante
malgré les transformations opérées sur le milieu, cette invariance coexistant avec des
changements très notables de la composition floristique,
186
− illustre la capacité de certains milieux à accueillir des espèces contraintes de migrer
pour trouver les conditions requises à leur bon développement, en raison de
changements de pression sur le milieu,
− montre que l’influence des facteurs mésologiques dans la distribution des espèces au
sein des végétations est ébranlée par l’intervention de facteurs anthropiques,
apparaissant perturbateurs.
L’étude menée dans ce chapitre, grâce à la connaissance d’un inventaire communal ancien
(Haulier, 1885), nous a permis d’analyser les processus de maintien, de disparition et
d’apparition d’espèces qui s’opèrent dans l’espace et dans le temps, en relation avec une
diversité de facteurs, mésologiques et anthropiques. Ces processus en jeu, par le biais de
phénomènes d’extinction locale, de colonisation et de dispersion, affectent les espèces à des
degrés divers, en fonction des caractéristiques propres aux espèces (traits de vie). Ces
caractéristiques vont définir les capacités des espèces à coloniser une diversité de situations,
en réaction aux conditions du milieu (Gaussen, 1954). Nous avons ainsi opposé les plantes à
faible valence écologique qui vont être limitées à une faible diversité de milieux, et les plantes
à large valence écologique qui peuvent se développer dans des milieux très différents.
Cependant, les conditions mésologiques en présence n’expliquent pas en totalité la répartition
des plantes. La dynamique de la végétation a une grande importance, en relation directe avec
la pression anthropique agissant sur le milieu. Il est nécessaire de comprendre cette évolution
car ce sont les formes stables de la végétation qui vont le plus témoigner des conditions du
milieu, en minimisant l’influence des usages passés. Ce sont ces formes stables qui sont les
plus intéressantes au point de vue statistique.
Les résultats obtenus nous ont permis d’aborder différents points de discussion et de réflexion
déjà évoqués dans le premier chapitre, qui concernent
1- Le caractère autochtone des espèces et le poids à donner à ce critère dans la définition
d’un statut conservatoire,
2- L’abondance ou la rareté des espèces en rapport avec des menaces d’extinction,
3- Les flux d’espèces, très importants pour leur maintien,
4- La sensibilité des plantes à la fragmentation des milieux,
5- Le rôle des perturbations anthropiques dans l’établissement des formations végétales
et dans la construction de leur composition floristique caractéristiques.
Nous nous proposons maintenant de confronter nos résultats à la théorie et/ou aux travaux des
auteurs.
1-
Espèces autochtones versus espèces allochtones
Il est d’usage de défendre les espèces autochtones, en dévalorisant les espèces introduites,
allochtones. Les scientifiques manifestent toutefois des attitudes divergentes vis à vis des
introductions. Certains refusent toute introduction sous le prétexte de protéger la biodiversité.
D’autres mettent en avant l’impact économique très positif des introductions en agriculture ou
leur utilisation comme moyen de restauration des systèmes dégradés. D’autres encore
estiment que la mondialisation de la diversité biologique est peut-être un facteur favorable à la
diversification du vivant ! Quoi qu’il en soit, les invasions sont des processus naturels qui ont
toujours eu lieu au cours de l’Histoire de la colonisation des milieux par la flore à l’échelle
187
planétaire, où toutes (ou la plupart ?) les espèces ont été à un moment donné des allochtones
dans un territoire donné, avant d’y être naturalisées et de s’y installer de manière définitive
(cf. chapitre 1 p.47). Se pose donc la difficulté de définir ce qu’est une plante introduite.
Clément, (2002), s’agissant des plantes adventices, prend le contre-pied du mouvement
général de rejet de ces « mal-aimées ». Pour lui, il ne s’agit pas « d’envahisseuses » mais de
« vagabondes » : l’homme est le seul coupable de leur expansion, en créant continuellement
des espaces qui leur sont favorables (milieux transformés, friches, talus …), et qu’elles
colonisent grâce notamment à l’expansion des moyens de transport. Ces espèces ne
constitueraient alors qu’une réponse du vivant à l’action de l’homme. Il est certain qu’une
introduction peut engendrer à long terme simplement un enrichissement de la diversité
spécifique du système. Mais elle peut provoquer parfois un changement des équilibres
écologiques, une explosion démographique, ayant pour conséquences l’éradication d’espèces
autochtones et une augmentation du risque d’invasions ultérieures (Chapuis et al., 1995). Le
phénomène peut même s’accompagner de dégradations physiques du milieu. L’intérêt
fondamental des plantes autochtones réside au contraire clairement dans leur adaptation au
climat qui en fait les meilleurs outils dans la restauration d’écosystèmes dégradés.
Ces considérations amènent à s’interroger sur la valeur patrimoniale d’une espèce. Dans notre
étude, nous avons choisi de définir cette valeur pour des espèces particulièrement menacées
dans les zones de grandes cultures, que sont les messicoles, et pour des espèces dont la
régression et la vulnérabilité sont avérées sur l’ensemble du territoire français. Ces espèces
peuvent être qualifiées d’espèces ‘déterminantes’, en tant qu’espèces en danger, vulnérables,
rares ou remarquables, se développant dans des conditions écologiques particulières (cf.
chapitre 1 p.46). Toutefois, là encore se pose le problème de l’intérêt de la conservation,
puisque, dans le cas des messicoles, les espèces ne sont pas à l’origine naturellement
présentes dans le milieu mais introduites avec les espèces cultivées. Selon leur ancienneté, les
espèces n’ont pas la même valeur patrimoniale. Aussi, il convient de les définir selon
l’ancienneté de leur introduction et de distinguer les espèces néophytes dans le cas
d’introductions récentes (après 1500) et les archéophytes dans le cas d’introductions
anciennes (cf. chapitre 1 p.47). À titre d’exemple, au siècle dernier, des plantes envahissent
une bonne partie de l’Europe, comme l’Asiatique Veronica persica Poiret (Lambinon, 1998),
plante aujourd’hui considérée comme autochtone dans nos régions. Cité par Wilson, Lugo
estime que les espèces exotiques sont un bon moyen d’accroître la biodiversité locale
(Wilson, 1993). Tout en reconnaissant que ce type d’introduction présente des risques élevés
et qu’il est nécessaire de retirer les éléments mettant en danger la flore indigène (comme les
plantes invasives), il remarque que la plupart de ces espèces se sont acclimatées sans créer de
problèmes écologiques. En fait, Lugo constate que les espèces exotiques paraissent les mieux
réussir dans les environnements perturbés par l’Homme. Lorsqu’ils sont gérés correctement,
certains arbres exotiques croissent bien dans des habitats très dégradés, où ils contribuent à
réhabiliter les sols et rétablir les espèces indigènes. D’autant plus que Lévêque avance que les
chances de voir s’installer des espèces invasives sont plus grandes dans les écosystèmes
dégradés, là où les communautés biologiques sont déstabilisées par des perturbations et donc
moins aptes à résister à la compétition de nouvelles espèces (Lévêque, 2000). Au total
cependant, le contrôle des espèces allochtones apparaît bien comme une nécessité pour
préserver la diversité floristique sur une plus large échelle. Comme proposé par Usher, le
lancement d’un programme de contrôle d’une espèce allochtone implique auparavant de
prendre en compte trois facteurs : i) l’étendue de la zone concernée, ii) la capacité de
dispersion de la plante, iii) le stade d’implantation de l’espèce envahissante (Usher, 1989).
188
2-
Abondance, rareté de l’espèce et menaces
Les analyses menées tout au long de l’étude de la flore soulèvent la question de la menace
pesant sur des espèces estimées comme rares, qui peut paraître finalement subjective puisque
certaines espèces se maintiennent au cours du temps malgré une rareté établie. A priori, même
si la plupart des biologistes considèrent que les espèces rares sont plus susceptibles de
s’éteindre que les espèces plus abondantes (cf. chapitre 1 p.45), le caractère rare d’une espèce
ne semble pas signifier forcément que l’espèce est menacée. La rareté peut être liée aux
activités humaines qui agissent sélectivement sur le milieu naturel notamment en fragmentant
des populations autrefois plus amples et certainement plus diversifiées, mais elle peut avoir
des causes indépendantes de toute action anthropique. Souvent l’espèce est rare car les
habitats qui lui sont favorables sont eux-mêmes rares et ont toujours été rares. D’après la
théorie des métapopulations (cf. p.39), les populations composant une espèce sont
généralement petites et disparaissent fréquemment. Mais si d’autres naissent au même rythme
dans le cadre de la colonisation de nouveaux sites et si ces dernières populations sont
nombreuses, alors l’espèce en tant que tout n’est pas particulièrement en danger. La rareté
nécessite donc d’être définie à de nombreux niveaux (Wilson, 1993). Les espèces piégées par
la spécialisation et la réduction des habitats forment la plus grande classe des espèces en
danger d’extinction.
Une nouvelle interrogation émerge quant à la nécessité de maintenir des milieux de manière
volontaire pour la préservation d’espèces qui sont menacées par la régression de leur habitat
(un bon exemple est constitué par les pelouses à orchidées du Lauragais) ; nous discuterons
cette question dans un des paragraphes suivants concernant les perturbations. Ces
constatations semblent présager de l’importance de la diversité des habitats pour la
conservation d’espèces représentées par des populations de faible effectif, tout autant que de
l’importance de l’effectif lui-même.
Nous pouvons aussi nous interroger sur le rôle des espèces rares dans le fonctionnement des
écosystèmes. Au-delà de l’intérêt patrimonial qu’elles représentent, nombreux sont les
biologistes (Lévêque, 1994a) qui considèrent que les espèces rares jouent un rôle dans le
fonctionnement des systèmes écologiques : celui de doublure ou d’éléments de substitution
susceptibles de remplacer des espèces plus communes au cas où ces dernières viendraient à
disparaître en raison de l’évolution de leur environnement.
3-
Flux d’espèces et recolonisation
Nous avons montré que les flux d’espèces sont déterminants dans la colonisation des milieux,
de même que sont importantes les variations de ces flux selon les espèces. Le flux des espèces
est important puisqu’il détermine le potentiel de recolonisation des espèces dans des milieux
qui se maintiennent ou nouvellement créés, et puisque de lui dépendent les modalités de
colonisation et d’extinction. Ce potentiel de recolonisation est fonction de la banque de
graines dans le sol (que les labours peuvent enfouir comme révéler), de la présence de
l’espèce dans les surfaces voisines et de la facilité de dispersion que nous avons évalué par le
mode de dissémination (Nathan et al., 2000).
La dispersion, dont le rôle a été souligné dans le premier chapitre (cf. p.39), est la clé du
maintien des espèces dans des paysages fragmentés et décline si la distance entre les
fragments d’habitats favorables excède la capacité des organismes à atteindre un habitat ou à
traverser les trous d’habitats défavorables. Nous pouvons en conclure que les milieux peuvent
189
se comporter comme des zones favorables à la dissémination alors que d’autres peuvent
constituer de véritables barrières. À titre d’exemple, le rôle des cours d’eau est clairement
connu comme source de dispersion des plantes (cas des bords du canal du Midi (Baillet, 1859
; Marquet, 1880)). Les jachères (cf. encadré ci-dessous) peuvent également constituer des
habitats favorables, au moins de manière temporaire et transitoire, à la germination et à la
dispersion des plantes.
Les jachères
D’après (Conseil de l'Europe, 1997)
Dans les systèmes traditionnels, la jachère consistait à laisser la terre au repos afin de
restaurer sa fertilité. Désormais, la mise en jachère de certaines parcelles, incitée par réforme
de la PAC en 1992, est destinée à la retirer du circuit afin de limiter la production.
Les jachères « industrielles », qui consistent en des cultures de plantes non alimentaires (lin,
colza), se distinguent des jachères « herbeuses » et des jachères « boisées ». Les jachères
industrielles ne diffèrent pas des cultures ordinaires du point de vue de la conservation de la
biodiversité. Les jachères herbeuses sont les plus intéressantes de ce point de vue. Leurs effets
sur la flore peuvent cependant être variables. Elles peuvent être semées avec un couvert de
graminées, de légumineuses ou être laissées à la recolonisation spontanée. Dans ce cas, des
espèces végétales menacées peuvent occasionnellement réapparaître à partir des banques de
graines mais elles sont souvent rapidement détruites par des entretiens chimiques ou
mécaniques.
4-
Sensibilité des plantes à la fragmentation des milieux
Nous avons montré que la flore actuelle comporte une forte proportion d’espèces ayant des
exigences écologiques étroites. Il est bien connu par ailleurs que si les barrières à la dispersion
croissent avec la fragmentation des milieux, cet effet est bien plus déterminant pour les
plantes à exigences écologiques strictes (Collinge, 1996). De plus, lorsque la fragmentation a
pour conséquence l’existence d’habitats de trop faible étendue, elle peut menacer la
persistance d’une population de telle ou telle espèce, par érosion de la diversité génétique. La
fragmentation accentue l’éloignement, depuis une plante parent du plus proche emplacement
favorable à l’espèce, et diminue ainsi les chances de dispersion. Or, comme nous l’avons déjà
évoqué dans le premier chapitre (cf. p.39), la dispersion des graines a un profond effet sur la
structure de la végétation : elle intervient au stade de la colonisation de nouveaux habitats,
elle intervient aussi dans le maintien de la diversité. Nous avons vu lors de l’analyse de la
variation de la flore depuis 1885, que la dissémination par zoochorie était avantagée par
rapport à celle par anémochorie. Cependant, l’effet de la fragmentation va être accentué par ce
mode de dissémination puisque la dispersion des mammifères est elle-même réduite par la
fragmentation de leur habitat. Or différentes études ont montré l’importance des animaux dans
la dispersion des graines1. Des fragments d’habitat isolés peuvent ne pas être colonisés par des
espèces qui pourraient y vivre : le nombre d’espèces présentes dans les habitats fragmentés
serait donc menacé de déclin avec le temps.
1
« Removal of animal dispersers would reduce seedling species richness by 60% » (Webb et al., 2001).
190
5-
Les perturbations anthropiques, source de diversité
Les conclusions avancées tant sur les aspects actuels de la flore que sur sa variation
conduisent à penser que les activités humaines ont imposé et imposent des modifications aux
formations végétales et à leur composition floristique caractéristique. Ces modifications
peuvent se traduire par des régressions d’espèces ou des expansions. Il semble ainsi que les
activités humaines, qui le plus souvent peuvent être considérées comme des perturbations sur
le milieu, peuvent aussi être source de diversité floristique, en induisant deux hétérogénéités :
une hétérogénéité temporelle qui s’exprime à travers des successions de végétation et des
diversités d’unités paysagères, et une hétérogénéité spatiale qui s’exprime à travers le
maintien des végétations à un état d’équilibre de façon artificielle, comme les pelouses et
prairies. Il a été vu par ailleurs dans le premier chapitre (cf. p.36) que ces stades
intermédiaires de la succession végétale aboutissant finalement au stade boisé dans notre
région, étaient particulièrement riches puisqu’ils sont duaux, à la fois faisant partie d’un tout
et composés de parties, et donc renfermant des espèces qui leurs sont caractéristiques et des
espèces représentatives des stades antérieurs et postérieurs : c’est ainsi que les formations
prairiales lauragaises sont composées à la fois d’espèces forestières et pionnières.
Pour l’Écologie évolutionniste, les végétations successives sont des métaclimax (cf.
paragraphe p.36). Ces mosaïques spatiales et temporelles de végétation garantissent en
permanence la totalité des habitats nécessaires à toutes les espèces à l’échelle du paysage. Ces
métaclimax affirment donc la nécessité d’un paysage hétérogène pour le maintien de la
biodiversité végétale, grâce aux perturbations anthropiques. Les auteurs s’accordent
aujourd’hui à recommander la gestion en métapopulation, consistant à maintenir des
populations fragmentées et à maintenir ainsi une variabilité génétique sur l’ensemble (cf.
p.41) ; cette recommandation semble pertinente notamment lorsqu’il s’agit d’espèces
occupant des habitats transitoires entrant dans le cadre de successions végétales, afin de
garantir un échange d’information génétique entre populations. L’exploitation forestière qui
provoque l’établissement d’une végétation héliophile plus ou moins nitrophile, formant des
associations transitoires (Lemée, 1967), constitue ainsi, par exemple, une perturbation source
de diversité.
Comme nous l’avons évoqué dans la discussion portant sur la rareté des espèces, le rôle des
perturbations dans la création d’une diversité d’habitats soulève le problème du maintien ou
éventuellement de la création de milieux de manière volontaire, pour la préservation
d’espèces menacées par la régression de leur habitat.
6-
Discussion sur la méthode
- Les inventaires communaux exploités ne rassemblent qu’une partie de la flore du territoire
d’étude : leur représentativité peut être sujette à discussion.
- Au cours de nos analyses, nous avons préféré les termes d’espèces nouvellement trouvées et
non retrouvées aux termes d’espèces apparues et disparues. Aucune certitude n’est en effet
possible sur les extinctions et les colonisations d’espèces. Cet aspect souligne la difficulté de
constituer des inventaires les plus exhaustifs possibles.
- Par ailleurs, nous avons privilégié l’approche par relevés de végétation et l’observation
instantanée à une année donnée. Toutefois, nous avons bien conscience que cette approche ne
permet pas de tendre à une exhaustivité de l’évaluation de la biodiversité végétale, dans la
mesure où la flore varie d’une année à l’autre. L’obtention d’une évaluation exhaustive
191
nécessiterait la prise en compte d’autres mesures, comme l’analyse de la banque de graines.
Finalement, notre travail permet de mettre en évidence des tendances de la dynamique de la
biodiversité végétale.
W
La mise en évidence des "tendances évolutives" des espèces caractérisant la flore lauragaise,
depuis 1885, soulève le rôle des mécanismes d’extinction locale, de colonisation et de
dispersion des espèces dans le paysage. Ce rôle se manifeste pour chaque espèce par maintien,
régression ou expansion. La distribution des espèces dans les différents types de végétation
témoigne des conditions mésologiques offertes par la station, dont les variations créent une
diversité de végétation. Mais ces conditions n’interviennent pas avec la même importance
dans la distribution des espèces. De plus, les activités humaines se superposent à ces
conditions et peuvent se comporter comme des facteurs de dispersion autant que comme des
facteurs d’extinction. La connaissance des relations entre distribution et composition de la
végétation, conditions mésologiques et action anthropique nécessite une estimation précise de
l’importance des différents facteurs supposés intervenir dans la distribution des espèces. C’est
ce que nous envisageons d’aborder dans le prochain chapitre par des traitements statistiques.
192
Chapitre 5
Hiérarchisation des facteurs actifs
influençant la distribution de la végétation et la
composition floristique
193
Dans le contexte général de l'évaluation de l’incidence des activités humaines sur la
biodiversité végétale dans les paysages d’agriculture intensive, l’objectif de ce chapitre est
d’étudier l’influence des facteurs écologiques et anthropiques et, dans certains cas, l’influence
de leur évolution, sur la distribution et la composition de la végétation1 qui s’exprime à
travers les successions de communautés dans les différentes formations végétales présentes
dans les deux sites d’étude.
Le précédent chapitre nous a permis de mettre en évidence les variations spatiales de la flore
lauragaise en réponse à des schémas d’organisation paysagère différents et sa dynamique
depuis 1885. Nous avons pu révéler en particulier l’influence des conditions mésologiques et
constater qu’elles n’intervenaient pas avec la même importance dans la distribution des
espèces susceptibles de se trouver dans les différents types de végétation. Nous avons
également mis l’accent sur l'intervention des facteurs anthropiques. Ainsi, nous pouvons
avancer que les variations de la distribution et de la composition de la végétation, entre sites et
au cours du temps, s’expliquent par une intervention d’inégale importance de certains
facteurs. Il est essentiel d’estimer cette importance afin de révéler les facteurs prépondérants
dans la distribution et la composition de la végétation et finalement de comprendre les
processus entrant en jeu dans l’établissement et le maintien de la biodiversité végétale dans
les paysages fortement anthropisés du Lauragais haut-garonnais.
Pour cela, l’importance, ou poids, des facteurs ‘hypothético-explicatifs’ de la distribution de
la végétation et de celle des espèces au sein des facettes écologiques est estimée à l’aide de
traitements et analyses statistiques (Baudry, 1989), où la végétation, bioindicateur renfermant
des plantes ayant des besoins différents, est employée pour démontrer l’action des facteurs
mésologiques, dynamiques (naturels ou provoqués par l’homme, les animaux) et historiques
(Blandin, 1986). Étant donné la variabilité locale du sol et d’autres conditions, les espèces
prises individuellement ne peuvent pas être utilisées comme indicateurs. Ces traitements
statistiques sont menés à la fois sur la liste floristique actuelle et sur la liste floristique datant
de 1885, en se penchant notamment sur les disparités mises en évidence dans le chapitre 4,
entre les deux sites et au cours du temps. Ces traitements nous permettent de corréler les
variations spatio-temporelles de la flore aux facteurs susceptibles d’intervenir. Nous
entreprenons l’étude de la végétation à deux niveaux de la biodiversité : tout d’abord au
niveau des formations végétales identifiées par les groupements physionomiques (cf. p.157 et
167), ensuite au niveau des espèces végétales en relation avec les conditions du milieu. Au
final, grâce aux analyses statistiques, nous pourrons identifier et décrire les formations
végétales présentes actuellement et en 1885, et caractériser leur composition floristique.
Nous exposons dans un premier temps les principes et démarches du traitement statistique et
les facteurs ‘hypothético-explicatifs’ de la végétation retenus, avant de procéder aux
traitements.
W
1
En un lieu donné, nous définissons la végétation par l’ensemble des plantes présentes (Da Lage et Métailié,
2000).
194
I-
Principes et démarches des traitements
statistiques
La démarche adoptée se base sur la traduction de l’action des facteurs mésologiques, spatiaux
et biotiques (déjà décrits dans les précédents chapitres) à travers la description de la
végétation actuelle et passée. Cette description qui se base sur le regroupement des espèces en
formations végétales en rapport avec les conditions du milieu, l’identification et la
caractérisation de la végétation, permettra au final de montrer les relations qui existent entre
caractéristiques floristiques et structures paysagères. Pour cela, les listes floristiques actuelles
et passées constituent les documents de base, dont les données sont traitées de façon
statistique pour les ordonner et dégager leur significativité (Guigo, 1991).
Différents types de traitements statistiques se proposent à nous. Étant donné l’objectif
recherché qui est de décrire la végétation et de révéler les corrélations qui existent entre les
facteurs explicatifs qualitatifs et quantitatifs, les données sont traitées par l’Analyse
Factorielle des Correspondances (AFC ou CA en anglais) (Benzecri, 1973 ; Chessel et al.,
1982 ; Broyer et al., 1995 ; Orth et al., 1996 ; Bornard et al., 1996 ; Cohen et al, 1998). Cette
analyse se base sur la projection sur les axes factoriels des espèces présentes dans les relevés
pour la flore actuelle ou dans les types de milieu pour la flore de 1885. L’ordination des
variables principales (espèces, relevés ou types de milieu) permet d’identifier celles qui
participent le plus à la construction d’axes factoriels, expliquant les amplitudes écologiques
des espèces. L’AFC va ainsi nous permettre de définir les habitats écologiques des espèces
végétales et d’interpréter les facteurs d’analyse en terme de gradient écologique (Baudry et
al., 1996). Afin de comprendre la manière dont les relevés (ou types de milieu) et espèces
contribuent à la création des axes, les variables supplémentaires illustrant les facteurs
« hypothético-explicatifs » sont projetées sur les axes factoriels et leur significativité est
estimée par test inférentiel, pour établir une hiérarchie spatiale et avoir une meilleure
compréhension de la différenciation des formations végétales (Burel et al., 1990).
Une fois les corrélations avec le milieu établies (grâce aux analyses statistiques), la
reconnaissance des formations végétales fournit une expression des facteurs de ce milieu en
termes de bioindication. La démarche consiste donc à identifier les variables principales
caractéristiques de la végétation par AFC, et les variables potentiellement explicatives
(variables supplémentaires) par analyse inférentielle. La mise en relation des types
physionomiques avec les variables potentiellement explicatives permet de caractériser les
types physionomiques de la végétation, c’est-à-dire les différentes formations végétales
présentes actuellement et en 1885.
1-
Principe de l’AFC
L’AFC est une méthode d'ordination spécifiquement adaptée aux tableaux de contingence, ou
tableau de fréquence. En tant qu’analyse multivariée, elle permet de traiter simultanément
plusieurs variables. Comme son nom l'indique, l'objectif est de mettre en correspondance les
lignes avec les colonnes d'un tableau de contingence afin de réduire la complexité des
données tout en donnant le maximum d’informations possibles et accessibles. Cette analyse
est très souvent employée pour résumer la structure d'un jeu de données de distribution
d'espèces et mettre en relation les conditions écologiques des stations avec les espèces qui en
sont caractéristiques. Toutes les espèces et tous les relevés (ou types de milieu) ne participent
195
pas pour la même importance à l’AFC. L’ordination des variables principales permet
d’obtenir celles qui participent le plus à la construction des axes factoriels. L'AFC tend à
produire des axes principaux qui expliquent le mieux les amplitudes écologiques des espèces
en opposant le plus possible les optimums. Elle revient à chercher les valeurs propres et les
vecteurs propres du produit de deux tableaux de profils, c'est-à-dire la quantification optimale
des deux caractères qualitatifs (au sens où ils sont le plus corrélés). À partir des variables
principales, la description de la végétation est possible et notamment la composition
floristique des groupements végétaux, à travers la comparaison de listes d’espèces - relevés de
végétation.
Le principe de l’AFC repose sur le fait que lorsque des espèces partagent des contraintes
écologiques similaires, elles sont très proches les unes des autres. Si des végétations montrent
des relevés très similaires, les espèces auront tendance à occuper la diagonale du plan formé
par les deux végétations. Plus il y a de végétations qui partagent le même cortège d'espèces,
plus elles forment un agrégat de points "espèces" qui pointent dans la même direction. C'est
l'ensemble de ces agrégats qui donne une structure au nuage de tous les points "espèces".
L’objectif de l’AFC est d’optimiser conjointement l’ordination des espèces et des relevés. Il
s’agit donc de réorganiser le tableau de données, en affectant des coefficients aux lignes et
aux colonnes pour maximiser la corrélation canonique. Les coefficients utilisés sont portés par
un axe. La participation de chaque axe à l’explication de la structure des données initiales est
évaluée par sa valeur propre, comprise entre 0 et 1. Elle correspond au carré des coefficients
de corrélation canonique (= les variances). Cette méthode est connue comme étant la
meilleure façon de visualiser et d'interpréter les corrélations entre variables.
Remarque
L’utilisation de l’AFCVI, fréquemment utilisées dans les problématiques de la modélisation
de la distribution de la végétation et de sa composition floristique en relation avec divers
facteurs naturels et anthropiques, n’est pas justifiée dans notre étude, en raison du nombre
important de modalités présentes par variable, du caractère qualitatif des variables considérées
et parce que nous n’avons pas de contraintes à appliquer aux données en vue d’une
modélisation.
2-
Préparation de la table des données analysées
Avant de lancer l’AFC, respectivement sur la liste floristique actuelle pour les deux sites
d’étude et sur la liste floristique passée, il convient de préparer la table des données, c'est-àdire de choisir les espèces qui vont être analysées et de mettre en forme le tableau de
contingence.
2. 1 -
Choix des espèces analysées
- Pour la liste floristique actuelle, nous choisissons d’éliminer préalablement de la table des
données, les espèces présentes dans un seul relevé, que nous considérons comme trop peu
représentatives dans l’échantillon pour mettre en évidence des relations significatives. Cela
concerne 100 espèces.
- Pour la liste floristique de 1885 (Haulier), toutes les espèces sont conservées (exceptées
celles dont la synonymie n’a pu être mise à jour, c'est-à-dire 8 taxons).
196
Les relevés, les milieux et les espèces écartés des AFC seront toutefois pris en compte dans
les résultats.
2. 2 -
Mise en forme du tableau de contingence
Pour être analysées, les données d'inventaires de végétation doivent être présentées sous la
forme de tableau croisant les espèces observées dans l'ensemble des stations. Le tableau est un
tableau multivarié, dont l’analyse de la structure impose une approche multivariée car les
données sont multidimensionnelles : chaque relevé est décrit par la présence et l'absence de
plusieurs espèces qui apportent chacune une information sur les relations de ce relevé avec les
autres. Symétriquement, l'écologie de chaque espèce est décrite par la manière dont elle
occupe, elle domine ou elle est absente des relevés. Ainsi, chaque espèce ou relevé ajouté à ce
tableau représente une nouvelle source potentielle de variation. La représentation en autant de
dimensions qu’il y a de relevés (ou types de milieu) résume immédiatement la structure
écologique du tableau montrant à la fois les relations de similarité écologique entre les
espèces et la manière dont elles ont des affinités avec l'un ou l'autre des relevés (ou types de
milieu). Les espèces, relevés ou types de milieu correspondent aux point-lignes et pointcolonnes et peuvent représentés alternativement les individus principaux et les variables
principales.
2. 2. 1 -
Codage des espèces
Les cellules du tableau contiennent les valeurs de coefficient d’abondance-dominance pour la
liste actuelle et de présence/absence pour la liste de 1885, valeurs qui vont être employées
pour la projection des espèces sur les axes factoriels, lors du lancement de l’AFC. Pour la liste
actuelle, le coefficient d’abondance-dominance "+", attribué sur le terrain à certaines espèces,
est traduit par la valeur 1 dans le tableau de contingence.
2. 2. 2 -
Codage des relevés ou milieux en types de végétation
Les relevés ou milieux cités sont regroupés en types de végétation. Ce regroupement implique
une certaine simplification de la description de la végétation étudiée, mais cette simplification
est nécessaire pour construire le tableau de contingence et désigner la végétation. Onze types
de végétation sont identifiés, qui se fondent sur la prédominance d’un type biologique qui
impose une physionomie originale à la végétation (cf. Tableau 24). Ces types de végétation
sont très semblables à la typologie employée dans l’analyse floristique (cf. p.124 et 129). Le
type ‘planté’ ne concerne que la liste de 1885.
197
Type de végétation
Bois
Végétations concernées
Formations dominées par la strate arborée
Lisière
Végétation en bordure de bois
Pelouse
Végétation dominée par la strate herbacée, sur des terrains à tendance sèche
Prairie
Végétation dominée par la strate herbacée, sur des terrains à pente nulle ou
faible, fréquemment gorgés d’eau, entretenue par fauchage annuel
Fruticée
Végétation dominée par la strate arbustive frutescente
Haie
Rideaux linéaires boisés, situés le long des routes, des parcelles agricoles,
etc.
Bords des eaux
Végétation caractéristique du bord des eaux (fossés, lacs, mares, ripisylves)
Culture
Végétation présente spontanément dans les cultures et jachères
Communauté rudérale
Végétation des espaces rudéralisés (murs, endroits urbanisés)
Vigne
Végétation spontanée présente dans les parcelles de vignes
Planté
Végétation présentes dans les jardins et autres espaces cultivés
Tableau 24. Types de végétation retenus pour le codage des relevés et milieux cités
Chaque relevé ou type de milieu est affecté d’un code qui identifie le type de végétation
auquel le relevé ou le type de milieu appartient, suivi d’un numéro (i). Ce code est utilisé sur
les sorties graphiques de l’AFC :
Bois
Lisière
Pelouse
Prairie
Fruticée
Haie
Bords des eaux
Culture
Communauté rudérale
Vigne
Planté
Bi
Li
Pi
Pai
Fi
Hi
Ei
Ci
CRi
Vi
Xi
Une fois l’AFC lancée sur l’ensemble des relevés, son interprétation visuelle peut montrer une
projection atypique de certains points-lignes ou points-colonnes sur le plan factoriel, isolés du
reste du nuage des points. Il faut tout d’abord voir s’il a des justifications valables à ces cas
particuliers, en considérant des facteurs extérieurs (pratiques agricoles, connaissances de
terrain). Si c’est le cas, il faut tout simplement écarter ces points en cause du reste du nuage
pour mieux observer le nuage des points restants et recommencer l’analyse. Ils pourront être
projetés en tant que variables supplémentaires. Dans le cas où nous ne trouvons aucune
explication pour ces points atypiques, il est probable que les données d’étude ou les
conditions expérimentales ne sont pas en accord avec la méthodologie expérimentale :
- Terrain trop hétérogène ?
- Trop de traitements expérimentés ?
- …
198
3-
Étude des facteurs
Les facteurs correspondent aux axes factoriels sur lesquels sont projetés les individus
principaux. Ils apportent des renseignements sur les variables principales et supplémentaires.
Des valeurs propres (variances) sont associées aux facteurs. Pour chaque axe factoriel étudié,
nous prenons en compte
4-
-
les coordonnées, positives et négatives, de chaque point-ligne et point-colonne,
-
la contribution relative à l’inertie, expliquée par l’axe, qui permet d’identifier les
points ayant la contribution la plus forte (principaux constituants de l’axe). La
somme des contributions étant égale à 100, chaque contribution doit être comparée
au rapport 100 divisé par le nombre de lignes ou de colonnes.
Apport des variables supplémentaires
L’explication de la création des axes par les espèces et les relevés (ou types de milieu) est
apportée en prenant en compte des variables supplémentaires qui sont projetées sur les axes
factoriels. Leur significativité est validée par test inférentiel. Les variables supplémentaires
correspondent aux facteurs ‘hypothético-explicatifs’ définissant la distribution des espèces
végétales et la qualité de la richesse floristique. Le poids des variables est estimé pour pouvoir
les hiérarchiser. Ces variables sont des éléments supplémentaires à l’analyse statistique, en ce
sens où elles n’interviennent pas au moment du calcul des axes principaux de l’AFC et ne
participent pas à la construction des axes mais sont projetées sur les sorties graphiques et
confrontées aux individus actifs. Elles servent à connaître les corrélations de ces variables aux
axes afin de mettre en évidence les variables qui déterminent la répartition des relevés sur les
axes.
Les variables retenues, que nous supposons influencer la distribution de la végétation et sa
composition floristique, portent à la fois sur les unités paysagères (variables stationnelles et
spatiales), que nous avons déjà eu l’occasion d’étudier dans le chapitre 3, et sur les espèces
végétales (variables taxonomiques) étudiées dans le chapitre 4. Elles correspondent à trois
types de facteurs, chacun illustrant une composante de la biodiversité :
-
Les facteurs stationnels, caractéristiques mésologiques des terrains représentés par
les relevés floristiques, composantes écologiques des formations végétales,
-
Les facteurs spatiaux des unités paysagères, envisagés uniquement pour les relevés
de type bois, pour la liste floristique actuelle, composantes structurelles du
paysage,
-
Les facteurs taxonomiques, composantes taxonomiques de la végétation,
intrinsèques aux espèces.
Nous envisageons maintenant la description détaillée de ces trois types de facteurs, en
indiquant l’intérêt de leur emploi dans l’étude.
199
4. 1 -
Les facteurs stationnels : composantes écologiques des formations végétales
Comme nous l’avons déjà évoqué dans le premier chapitre (cf. p.32), les facteurs stationnels
agissent, avec leurs multiples interactions, sur la répartition de la flore en groupements
végétaux (Bournérias et al., 2001), par sélection au sein des espèces végétales déjà présentes
dans le milieu ou susceptibles d’y parvenir. Par le milieu, nous pouvons espérer comprendre
la formation et inversement par la formation, qu’il est très simple de voir, nous pouvons
connaître une synthèse du milieu difficile à réaliser autrement. Ces variables sont celles
notées sur le terrain, lors de la réalisation des relevés floristiques. Elles ne sont donc
disponibles que pour la liste floristique actuelle.
-
L’influence géographique. La variabilité de la végétation est en premier lieu déterminée
par l’hétérogénéité topographique (Parizeau, 1997).
-
-
L’influence édaphique qui correspond à celle de la nature du sol sur la végétation.
-
-
L’exposition,
La pente,
La situation topographique.
La texture,
L'humidité du sol (sols inondés, humides, frais…)
Le type de végétation, codé pour chaque relevé et milieu (cf. p.197).
Remarque
L’influence climatique (température, précipitation), variable écologique courante, est une
constante à notre échelle d’étude.
4. 2 -
Les facteurs spatiaux : composantes structurelles du paysage
Ces facteurs sont ceux couramment employés en Écologie du Paysage et que nous avons déjà
eu l’occasion d’étudier dans le chapitre 3 (cf. p.82). Ils se basent sur les éléments composant
la structure spatiale du paysage. Cette structure spatiale se caractérise par l’organisation
spatiale des taches d’habitat, aboutissant à une mosaïque. Cette mosaïque paysagère va
déterminer la réponse des espèces végétales en terme de maintien des populations, de
possibilité de colonisation et donc de composition spécifique (Burel et Baudry, 1999).
Selon l’hypothèse de travail selon laquelle des paysages fragmentés sont plus touchés par
l’extinction d’espèces végétales, et en nous appuyant sur la littérature (cf. p.39), nous étudions
les facteurs spatiaux au niveau des taches boisées, niveau auquel la fragmentation s’exprime.
L’influence que ces facteurs ont sur la diversité et la composition floristique illustre l’effet de
la fragmentation sur la végétation. Nous avançons que les composantes structurelles affectent
la distribution des espèces dans les unités de paysages (taches) et conséquemment la
végétation en présence. Nous supposons d’une part que la réduction en taille des fragments
forestiers augmente la probabilité d’extinction des espèces et limite leur maintien ; d’autre
part, que l’isolement des fragments limite leur colonisation par les espèces, en favorisant les
espèces à fort pouvoir de dispersion et les espèces généralistes ; enfin qu’une forme
200
irrégulière désavantage les espèces forestières en favorisant les plantes herbacées, exigeantes
en lumière et les espèces étrangères, en rendant le contact plus facile avec les habitats voisins.
Pour tester ces hypothèses, nous envisageons de tester les traits de vie des espèces déjà
employés dans l’étude (groupe écologique, type biologique, aire de répartition, mode de
dispersion, plasticité écologique, conditions optimales en lumière et en humidité).
Ces facteurs se manifestent à deux échelles, induisant chacune des composantes structurelles
spécifiques que nous allons aborder ci-après : l’unité paysagère et le paysage dans lequel
interagissent les unités. Les données qui caractérisent les composantes structurelles des taches
boisées sont extraites du SIG (cf. chapitre 3), à partir des cartes d’occupation du sol, pour les
différentes dates d’étude. Elles sont fournies directement ou dérivent de calculs.
4. 2. 1 -
Composantes structurelles intrinsèques à chaque unité paysagère
Au niveau des unités paysagères, les composantes structurelles potentiellement responsables
de la distribution des espèces dans les formations boisées correspondent aux facteurs basés sur
l’organisation spatiale et la structure morphologique des taches boisées, à savoir la surface de
la tache et sa forme en relation avec le périmètre (lisière) (Collinge, 1996).
-
La surface de la tache est la composante principale qui affecte la distribution des
espèces dans les unités du paysage, en ce sens où la fragmentation, résultant entre
autre d’une réduction de la surface des taches, peut augmenter le risque d’extinction
locale des espèces végétales dans les unités de paysage (cf. p.40).
-
La forme est le deuxième facteur structurel qui affecte la distribution des espèces dans
les taches dans le sens où elle induit deux phénomènes corrélés. Le premier est celui
nommé d’effet lisière par les Écologues du paysage. La fragmentation génère
directement une augmentation de la bordure par rapport à l’espace intérieur et permet
indirectement un contact plus important avec des habitats de types différents.
L’importance du périmètre de la tache va influer sur celle de la lisière considérée
comme espace de transition, écotone, dont la richesse spécifique est supérieure aux
deux milieux qu’elle délimite (espèces communes aux deux milieux délimités et
espèces propres à la lisière). Des taches circonvoluées auront un effet lisière plus
marqué que des taches de forme compacte. Les variations du vent, de la température
de l’air, de l’humidité de l’air et du sol, et de la radiation solaire qui pénètrent
l’intérieur d’une tache altèrent les conditions locales et l’intensité des perturbations,
lesquelles peuvent influencer la composition en espèces et la biodiversité végétale. Les
effets lisières se font sentir relativement profondément à l’intérieur de la tache.
Le second phénomène fait référence à l’importance de l’espace intérieur. L’effet
lisière est d’autant plus marqué que l’espace intérieur de la tache est réduit. Au-delà
d’une certaine surface intérieure, l’effet peut même être insignifiant (Bertomeu et al.,
2001). Ces phénomènes montrent l’intérêt de considérer le périmètre en relation à la
surface de la tache, d’où l’emploi d’un indice de forme. Nous retenons l’indice de
forme de Patton (Patton Shape Index), approprié pour les données disponibles (Patton,
1975). Il conditionne la qualité de l’intérieur de la tache en rapport avec sa marge et
donc le maintien et la colonisation d’espèces. Des petites taches contiennent en
proportion plus de lisière que des grandes taches. Cet indice sera calculé pour les
taches boisées ayant fait l’objet de relevés. Cet indice met en jeu le périmètre et la
surface selon l’équation
201
PSI = P/√(200 x π x A)
où P est le périmètre et A l’aire de la tache.
D’autres composantes, plus secondaires, sont prises en compte :
-
Le nombre de taches boisées qui conditionne la possibilité des espèces à se disperser
entre les taches.
-
La variation de la surface décrit l’évolution de la surface des fragments entre les deux
dates extrêmes (1834-1998). Elle exprime une régression (variation négative) ou une
extension (valeur positive) de la tache.
-
La variation du PSI calcule la différence du PSI entre les deux dates extrêmes (18341998). Cet attribut exprime l’évolution de la tache vers une forme plus compacte
(variation négative) ou plus irrégulière (valeur positive) au cours du temps.
-
Le type de dynamique des taches. Cette donnée apporte une indication sur les actions
anthropiques exercées sur les parcelles correspondantes au cours du temps (cultivées,
non entretenues, abandonnées), la végétation répondant par des changements
qualitatifs et quantitatifs aux fluctuations du milieu dans lequel elle vit et l’histoire de
l’écosystème étant une composante essentielle à prendre en compte quand on aborde
l’étude de la flore (cf. p.36).
4. 2. 2 -
Composantes structurelles entre les unités de paysage
Au niveau du paysage, la principale composante structurelle potentiellement responsable de la
distribution des espèces est l’isolement des taches boisées. Il traduit en partie leur
fragmentation puisqu’il conditionne la possibilité pour les taches boisées d’être colonisées par
de nouveaux individus ou de nouvelles espèces et ainsi le taux d’extinction des populations.
Cet isolement s’exprime à travers deux attributs :
-
La distance moyenne entre taches,
-
La distance minimale aux autres taches qui exprime la proximité à une ‘zone-source’
en graines.
Remarque
La connectivité entre fragments n’est pas envisagée dans cette étude, nous nous étant focalisés
que sur les interactions entre éléments surfaciques. Plusieurs études ont cependant démontré
l’importance de cet attribut, qui est supposé modéré l’effet négatif de la fragmentation
d’habitat, en facilitant l’échange de plantes (cf. p.40).
4. 3 -
Les facteurs taxonomiques : composantes taxonomiques de la végétation
Les facteurs taxonomiques expriment les caractéristiques de la flore et des espèces végétales,
et permettent d’interpréter la variation de la flore et la distribution des espèces dans la
202
végétation, afin d’éclairer les questions posées en début d’étude concernant un
appauvrissement et une banalisation de la flore. Ils sont renseignés pour l’ensemble des
espèces de la flore actuelle et de celle de 1885. Ces données correspondent à celles utilisées
dans le chapitre 4 (cf. p.135).
-
La richesse floristique, calculée pour chaque relevé ou chaque type de milieu
-
L’indice de diversité de Shannon, calculé seulement pour les relevés
-
Traits de vie des espèces
5-
-
Le groupe écologique,
-
Le type biologique. La classification est inspirée de la classification de Raunkiaer,
limitée aux formes principales (Bournérias et al., 2001) : phanérophytes,
chaméphytes, hémicryptophytes, géophytes, thérophytes,
-
L’aire de répartition,
-
Le mode de dissémination,
-
La plasticité écologique, étudiée uniquement pour les relevés de type ‘bois’. Elle
exprime l’intensité avec laquelle une espèce est inféodée à un milieu. Cinq
modalités sont définies : plasticité faible (espèce strictement inféodée à un type
d’habitat), faible-moyenne (2-3 types), moyenne (4-5 types), moyenne-forte (plus
de 5 types), forte (espèce indifférente, ubiquistes),
-
Les exigences en lumière,
-
Les exigences en humidité du sol,
-
Le ‘pH’ pour les relevés de type bois et pelouse. Elle correspond aux exigences des
plantes vis à vis du pH du sol, en distinguant les espèces basophiles, neutrophiles
et acidophiles (Julve, 2000).
Analyses inférentielles : validation de la significativité des variables et
de leurs modalités
La caractérisation par AFC des types physionomiques de la végétation s’appuie sur leur mise
en relation avec les variables potentiellement explicatives par analyse inférentielle. Ce type
d’analyse permet de hiérarchiser les contributions des différentes variables potentiellement
explicatives afin de tester la relation entre les types physionomiques de la végétation identifiés
(formations végétales) avec ces variables. Pour cela, nous validons la significativité et la
projection des variables supplémentaires aux axes étudiés, en utilisant deux tests selon la
nature de la variable, sous le logiciel Systat 8.0.
203
-
Dans le cas des variables qualitatives, la projection est validée par "l’analyse des
variances1" (procédure ANOVA). Cette analyse permet de tester si les effets des
traitements sont identiques ou non, c'est-à-dire de valider la significativité des variables et
des modalités étudiées sur les axes factoriels, par la comparaison de la moyenne des
coordonnées de chaque modalité de la variable étudiée. En termes statistiques, cela
correspond à rechercher si l’effet « traitement » est « significatif » ou non (avec un certain
risque d’erreur) (Gouet et Philippeau, 1989). Dans le cas où cet effet serait globalement
significatif, c’est-à-dire après avoir rejeter l’hypothèse nulle, H0, selon laquelle il n’y a pas
de différence statistiquement significative entre les moyennes (probabilité inférieure au
risque α choisi), il est utile de poursuivre l’analyse en cherchant à connaître les
traitements (modalités) qui ont des effets différents (quelles moyennes sont différentes et
lesquelles ne le sont pas ?). Parmi les nombreux tests existants, nous choisissons d’utiliser
le Test de Bonferroni, appelé aussi « test du t-corrigé », qui se base sur la recherche de
groupes de traitements ‘homogènes’, afin de classer les modalités. Ce test permet de
réaliser toutes les comparaisons 2 à 2 des moyennes en respectant globalement le risque
retenu de 5%.
-
Dans le cas des variables quantitatives (richesse spécifique et diversité floristique), les
relations sont testées par leur corrélation aux facteurs en estimant le coefficient de
corrélation de Pearson.
Pour les deux cas de figure, la probabilité de l’hypothèse nulle évalue un degré de
signification des relations testées. Cette probabilité est codée comme suit
P<0,05 : * , P <0,01 : ** , P<0,001 : ***
Pour les variables qualitatives, nous indiquerons seulement la valeur de la significativité ;
pour les variables quantitatives, nous indiquerons le coefficient de corrélation. Les relations
faiblement significatives (P<0,05) ne sont pas systématiquement reportées. Il est préférable de
discuter sur les relations les plus significatives dont nous pouvons supposer qu’elles ne
résultent pas d’une particularité de l’échantillon, suivi de la probabilité sous forme codée.
Pour chaque axe étudié, nous présentons les variables principales (espèces, relevés et milieux)
et supplémentaires, caractéristiques, ainsi que les modalités pour les variables
supplémentaires significatives. Pour les deux listes floristiques, les résultats de la comparaison
des variances des modalités, prises deux à deux, sont présentés sous forme de tableaux de
valeurs, pour chaque axe étudié.
6-
Identification des formations végétales
Une fois les facteurs principaux et supplémentaires ayant la plus forte contribution identifiés,
l’AFC nous permet le regroupement des relevés (ou types de milieu) en types de formations
végétales selon leur composante floristique, de les identifier et de caractériser la végétation
par les espèces dominantes et le cortège floristique. Il convient notamment de révéler les
particularités des espèces au sein des formations végétales.
1
Analyse des variances Outil statistique qui permet de mesurer la dispersion d’une variable par rapport à sa
moyenne. Elle est égale à la somme des carrés des écarts à la moyenne pondérée par leur probabilité
d’occurrence.
204
La caractérisation des cortèges floristiques s’appuie sur la prise en compte de la physionomie
uniforme des formations végétales (associations des phytosociologues), qui sont définies par
une composition floristique originale contenant une série d’espèces caractéristiques, ou
constantes1, strictement ou préférentiellement localisées dans une formation végétale
déterminée (constante sociale de Gaussen (Gaussen, 1954)), un cortège d'espèces
accompagnantes, ou compagnes, et une liste d'espèces occasionnelles. La coexistence répétée
de certaines plantes, même non caractéristiques, peut posséder une valeur indicatrice. Ces
ensembles caractéristiques d’espèces même banales et d’amplitude écologique assez grande
pour certains facteurs, constituent des groupes écologiques indicateurs que nous prendrons le
soin de mettre en évidence. Les espèces compagnes pourront être qualifiées de différentielles
quand elles se trouvent cantonnées plus ou moins dans l’une de deux ou plusieurs formations
affines et d’ubiquistes ou indifférentes quand elles croissent dans plusieurs groupements
(Dajoz, 1985). Il pourra être particulièrement intéressant de faire remarquer la présence
d’espèces accessoires quand elles présentent des particularités d’ordre biogéographique ou
biologique, ou qu’elles fournissent des indications complémentaires. Ainsi, certaines espèces
permettent de nuancer l’idée que l’on peut se faire des conditions écologiques d’une station2.
Certaines espèces reliques témoignent d’un état antérieur de la végétation. D’autres,
pionnières, indiquent dans quelle direction la végétation pourrait évoluer en dehors de toute
intervention perturbatrice (notamment humaine). Les espèces étrangères ou accidentelles
seront celles qui se trouvent accidentellement dans le groupement auquel elles n’appartiennent
pas. La description de la végétation s’appuiera, par ailleurs, sur la prise en compte des
événements historiques.
À partir des formes biologiques dominantes dans chaque végétation, des formations végétales
se dégagent, définies comme les ensembles de végétaux qui présentent des caractères
convergents dans leurs formes (Emberger, 1969). Plus généralement, nous qualifierons de
groupement végétal, le regroupement des espèces au sein d’un même type de végétation, dans
des conditions stationnelles sensiblement analogues (Lacoste et Salanon, 1969). Ces notions
peuvent s’appliquer à des milieux anthropisés ou non. Lorsque la végétation n'est plus
soumise aux effets des activités humaines, elle peut s'insérer spontanément dans un nouvel
équilibre et évoluer vers une végétation naturelle potentielle qui correspond à l’état naturel
supposé de la végétation (Tüxen, 1956).
II -
Étude des facteurs potentiels influençant la
végétation
Nous envisageons maintenant l’étude des facteurs que nous supposons influencer la
végétation grâce à l’analyse statistique dont nous venons de présenter l’intérêt et les principes.
Cette étude concerne aussi bien la végétation actuelle, caractérisée par les espèces présentes
dans nos propres relevés, que la végétation passée, caractérisée par les espèces présentes dans
l’inventaire de 1885.
1
Faire référence au chapitre 4 pour l’usage de ces termes.
2 La notion de station la plus couramment admise est celle du Secrétariat Faune et Flore, du Muséum National
d’Histoire Naturelle (Paris). Cet organisme considère comme une station tout lieu où se localise un effectif plus
ou moins grand d’individus d’un taxon étudié, effectif spatialement isolé d’au moins une cinquantaine de mètres
d’un autre effectif du même taxon.
205
Les AFC, réalisées sous le logiciel de statistique Statlab 3.0, sont présentées sous forme
graphique, après application du critère de qualification "contribution supérieure à un seuil",
où seuls les points dont la contribution est supérieure au seuil de 5%, sont conservés.
1-
Facteurs influençant la végétation actuelle
L’analyse des facteurs influençant la végétation actuelle permet de décrire les différentes
formations végétales présentes actuellement. Comme dans une AFC les lignes et les colonnes
jouent le même rôle, nous allons successivement considérer les lignes et les colonnes comme
les individus de l’AFC, les espèces et les relevés étant successivement les variables (Dervin,
1990).
1. 1 -
Valeurs propres
L’AFC a été réalisée sur un tableau composé des 419 observations (espèces) en ligne et des
150 modalités de variables actives (relevés) en colonne. Les similitudes et différences existant
entre les relevés sont mises en évidence à partir du tableau de données croisant les relevés et
les espèces, la projection des espèces sur le plan factoriel se faisant selon leur coefficient
d’abondance-dominance.
L’observation de l’histogramme des valeurs propres (cf. Tableau 25) montre un saut
important entre l’axe 1 et l’axe 2, et entre l’axe 3 et l’axe 4, qui témoigne d’une information
originale et particulière pour ces deux couples factoriels. Ce sont donc ces couples que nous
allons étudier en détail.
n
1
2
3
4
5
6
7
8
9
Valeur PourcentCumul
0.7039
3.13 3.13
0.6130
2.73 5.86
0.5744
2.56 8.42
0.4856
2.16 10.58
0.4776
2.13 12.71
0.4262
1.90 14.61
0.4092
1.82 16.43
0.3995
1.78 18.21
0.3859
1.72 19.93
0
0.7039
Tableau 25. Histogramme des valeurs propres des premiers axes de l’AFC
Nous notons que la part relative obtenue des valeurs propres est faible, en raison du nombre
élevé de relevés. À eux seuls, les quatre premiers facteurs, que nous retenons dans l’analyse,
rendent compte d’environ 11% de la variance totale du nuage des points. Les valeurs propres
associées sont respectivement de 0,704 ; 0,613 ; 0,574 ; 0,486.
Un premier coup d’œil sur la projection des relevés et des espèces dans les plans factoriels
(présenté plus loin, cf. p.213) montre une répartition des points-lignes et points-colonnes en
groupe distincts, que nous allons caractériser maintenant selon les espèces et les relevés qui
constituent ces sous-populations.
206
1. 2 -
Étude des axes factoriels
Pour chaque axe factoriel retenu (1, 2, 3 et 4), nous prenons en compte les coordonnées de
chaque point-ligne et point-colonne sur les axes et les contributions relatives des points à la
variance (cf. Annexe 9). Nous retenons les points dont la contribution est supérieure au seuil
de significativité (cf. p.204) en tant qu’éléments les plus explicatifs pour chaque axe
considéré. La liste des espèces et relevés caractéristiques nous permet de caractériser chaque
axe factoriel en nous appuyant sur les connaissances acquises, collectées des caractéristiques
écologiques des espèces, en opposant les coordonnées négatives et positives (cf. Tableau 26).
Axe Observations
1 Opposition selon le type biologique
de l’espèce et la strate de
végétation dominante
Interprétation de l’axe
Des espèces herbacées des formations herbeuses
artificialisées, aux espèces ligneuses des formations
boisées
2
Opposition selon les exigences en
humidité du sol
Des espèces hygrophiles aux espèces xérophiles
représentées par des formations de type prairial
3
Opposition des espèces colonisant
les bords des eaux à des espèces de
cultures colonisant des formations
artificialisées ou boisées
Des espèces des bords des eaux aux espèces adventices
des cultures
Opposition des espèces forestières
Des espèces de coupes forestières aux espèces d’espace
et de prairies maigres aux espèces
non exploités
adventices ou de bord des eaux
Tableau 26. Interprétation des axes, d’après les variables principales significatives
4
Les variables supplémentaires sont maintenant testées, d’une part pour l’ensemble des relevés
(variables stationnelles et taxonomiques) et d’autre part pour les relevés de type bois
(variables spatiales).
1. 3 -
Apport des variables supplémentaires, stationnelles et taxonomiques
Les variables supplémentaires retenues (cf. p.199) ne présentent pas toutes la même
significativité. Seule les variables significatives sont considérées comme influençant la
végétation et leurs modalités sont étudiées.
1. 3. 1 -
Significativité des variables supplémentaires
La significativité des variables supplémentaires est testée pour les quatre premiers axes
factoriels sous Statlab 3.0.
Données stationnelles
Variable
Exposition
Pente
Topographie
AXE1
0.000***
0.003**
0.128
AXE2
0.000***
0.000***
0.009**
AXE 3
0.684
0.111
0.008**
AXE4
0.024*
0.414
0.219
207
Texture
Hydrique
Code relevé
Données taxonomiques Gp écologique
Aire répartition
Dissémination
Lumière
Humidité
Type biologique
Richesse
Diversité H’
0.008**
0.285
0.000***
0.000***
0.000***
0.000***
0.000***
0.000***
0.000***
-0.154
-0.248**
0.297
0.000***
0.000***
0.000***
0.000***
0.355
0.052
0.000***
0.000***
-0.337***
-0.347***
0.424
0.000***
0.000***
0.000***
0.180
0.046*
0.723
0.000***
0.000***
-0.117
-0.130
0.247
0.039*
0.001***
0.001***
0.059
0.212
0.510
0.000***
0.000***
-0.079
-0.061
* P<0.05, ** P<0.01, *** P<0.001. En gras, valeurs significatives < à 0,05
Pour les variables qualitatives (richesse et diversité H’), la valeur de corrélation est indiquée.
Tableau 27. Significativité de la contribution des variables aux quatre premiers axes
D’après l’analyse inférentielle (cf. Tableau 27), nous constatons que seules certaines variables
supplémentaires ont une contribution significative aux axes considérés. Les modalités pour
ces variables sont testées par la suite. Par ailleurs, l’observation de la fréquence de chaque
modalité pour les variables qualitatives traitées (cf. Tableau 28 et Tableau 29) montre que
toutes les modalités des variables ne sont pas représentées avec la même fréquence. Or, les
modalités ayant une faible fréquence (marquées en gras dans les tableaux) peuvent se
comporter comme des artefacts et entraîner des erreurs dans les comparaisons des variances,
en se révélant significatives et en s’individualisant par rapport à toutes les autres modalités
dans l’analyse des modalités. Aussi, nous les écartons de l’analyse des modalités.
Gp écolog
aqu 4
pio 5
cul 6
mar 26
prg 44
adv 58
prm 65
rud 88
for 123
Aire répartition
5
eurosi
12
intro
14
atlant
circum 24
méd-atl 43
51
cosmo
53
europ
90
médit
127
euras
Dissémination
5
hydroch
5
autoch
32
myrméco
68
endozoo
101
épizoo
103
baroch
105
anémoch
Lumière
scia
20
phot
126
hélio
273
Humidité
hygro
17
xéro
21
large amplit
26
mésohygro
81
méso
134
mésoxéro
140
Typ biologique
chaméph
17
arbre
41
géoph
41
arbust
44
théroph
118
hémicrypto
158
Tableau 28. Tableau des fréquences des modalités des variables ‘traits de vie’
Exposition
1
ENE
3
NO
Ouest 4
5
ESE
5
Nord
12
SO
12
Est
12
Sud
16
SE
20
NE
60
plat
Pente
>27°
132
< 6°
848
6-27° 61
plat
0
Topographie
vallon
18
bas versant 33
milieu vers. 54
haut versant 45
Hydrique
inondé 1
humide 11
sec
36
frais
41
moyen
55
Texture
argileux
12
sableux
21
limoneux
24
équilibré
64
Code relevé
vigne
3
fruticée
3
haie
8
praririe
8
eaux
10
lisière
15
culture
17
pelouse
25
bois
28
com. rud. 33
Tableau 29. Tableau des fréquences des modalités des variables stationnelles
208
1. 3. 2 -
Étude des modalités pour les variables supplémentaires significatives
Pour chaque axe, nous étudions la variance des modalités pour les variables supplémentaires
significatives (hors modalités peu représentées, cf. p.203). Les valeurs indiquées entre
parenthèse correspondent aux coordonnées moyennes des modalités sur l’axe étudié.
Axe 1
Exposition
Pente
Texture
Code relevé
Groupe
écologique
Aire de
répartition
Dissémination
Lumière
Exigences en
humidité
Type
biologique
Diversité
spécifique
L’exposition nord-est (0.613) s’oppose aux sols plats (-0.461) et à l’exposition sud-ouest (-0.426)
Les terrains sur sol plat (-0.411) s’opposent aux terrains sur pentes moyennes (0.194)
Les sols sableux (-0.640) s’opposent aux sols équilibrés (-0.026) et aux sols limoneux (0.181)
Les bois (1.183) sont des formations qui s’opposent significativement aux autres types. Les cultures
(-0.983) s’opposent aux fruticées (0.205), aux haies (0.146), aux lisières (0.582) et aux pelouses (0.313). Les bords des eaux (-0.579), aux haies et aux lisières. Les rudérales (-0.856), aux fruticées,
aux haies, aux lisières et aux pelouses. Les vignes (-0.711), aux lisières
Trois modalités diffèrent statistiquement des autres par leurs coordonnées sur l’axe. Ce sont les
adventices (-1.039), les rudérales (-0.732) et les forestières (0.818). Les modalités adventices,
rudérales et forestières sont donc strictement bien définies par le fait qu’elles ont des coordonnées
en moyenne plus fortes (en valeur absolue) que toutes les autres modalités, ce qui veut dire que
l’axe 1 oppose les adventices aux forestières et aux rudérales
Les espèces cosmopolites (-0.749) s’opposent à tout sauf aux circumboréales (-0.353). Ce sont deux
modalités qui représentent des espèces se répartissant largement à la surface du globe
Les espèces endozoochores (0.804) sont statistiquement indépendantes des autres modalités.
Les trois modalités, héliophiles (-0.456), photophiles (0.331) et sciaphiles (1.257), sont
statistiquement indépendantes les unes des autres, sur l’axe 1.
La modalité « large amplitude » (1.061) est indépendante de toutes les autres modalités, avec des
coordonnées moyennes qui lui sont propres sur l’axe 1. La modalité « mésoxérophile » (-0.446)
n’est liée qu’à la modalité « hygrophile » (-0.291).
La modalité « thérophyte » (-0.857) diffère de toutes les autres, sur l’axe 1. Les modalités
« arbuste » (0.694) et « arbre » (0.725) sont liées entre elles et à la modalité « chaméphyte » (0.287)
mais sont indépendantes de toutes les autres. Ce résultat est en accord avec le précédent qui montre
une relation sur l’axe 1 de la physionomie de la végétation, des formations herbacées aux formations
arborées, en passant par les formations arbustives
La diversité spécifique est significative sur l’axe 1, avec une diversité maximale pour les
coordonnées négatives
Axe 2
Exposition
Pente
Topographie
Hydrique
Code relevé
Groupe
écologique
Aire de
répartition
Exigences en
humidité
Type
biologique
Diversité
spécifique
Les terrains plats (-0.710) s’opposent aux terrains avec une exposition sauf à ceux exposés au nordest (-0.259)
Les terrains plats (-0.702) s’opposent aux terrains sur pente. Les pentes faibles (-0.264), aux pentes
moyennes (0.282) et fortes (0.436)
Les situations en fond de vallon (-0.777) s’opposent aux terrains sur milieu (-0.024) ou haut (-0.185)
de versant (ce sont par ailleurs des terrains drainés, donc plus secs)
Les terrains secs (0.375) s’opposent aux autres modalités
Les pelouses (1.012) s’opposent à tous sauf aux fruticées (0.362) (faible fréquence) et aux prairies
(0.382)
Les espèces de prairie maigre (0.823) s’opposent aux espèces ayant un autre groupe écologique. Les
espèces adventices (-0.795) s’opposent à tout sauf aux espèces de marais (-0.502). Les espèces de
prairie grasse (0.134) s’opposent à tout sauf aux espèces forestières (-0.177)
Les cosmopolites (-0.810) s’opposent aux autres modalités sauf aux circumboréales (-0.229), deux
modalités à large répartition
Les plantes hygrophiles (-1.229) sont significativement différentes de toutes les autres. Les
xérophytes (0.586) s’opposent à toutes les autres excepté les mésoxérophytes (0.030)
Seules les thérophytes (-0.483) sont significativement différentes des arbustes (0.016), des
chaméphytes (0.470) et des hémicryptophytes (-0.013), c’est-à-dire des ligneux bas et des herbacées
vivaces
La diversité spécifique est significative sur l’axe 2, avec une diversité maximale pour les
coordonnées positives
209
Axe 3
Topographie
Hydrique
Code relevé
Groupe
écologique
Dissémination
Exigences en
humidité
Type
biologique
Axe 4
Exposition
Hydrique
Code relevé
Groupe
écologique
Exigences en
humidité
Type
biologique
1. 3. 3 -
Les relevés en situation de vallon (-0.780) s’opposent aux relevés en situation milieu (0.022) et haut
(0.088) de versant
Les situations humides (-1.520) s’opposent à toutes les autres
La végétation de bords des eaux (-1.835) est un type qui s’oppose à tous les autres
Les plantes de marais (-1.660) s’opposent à tous les autres groupes écologiques. Les adventices
(0.461) s’opposent à toutes sauf aux rudérales (0.112)
Les espèces anémochores (-0.402) s’opposent aux endozoochores (0.096)
Les plantes hygrophiles (-3.438) sont significativement différentes de toutes les autres
Les géophytes (-0.652) s’opposent aux arbres (0.089), et les thérophytes (0.332) aux
hémicryptophytes (-0.427)
Les terrains exposés au SO (0.641) s’opposent à ceux exposés au sud (-0.773)
Les terrains secs (-0.507) s’opposent aux terrains frais (0.076)
Les lisières (-1.264) s’opposent quasiment à toutes les autres modalités, sauf aux fruticées (0.319),
aux prairies (0.048) et aux vignes (-0.080)
Les plantes de marais (0.434) s’opposent aux forestières (-0.250) et aux plantes de prairie maigre (0.435)
Les mésoxérophiles (-0.355) et les mésophiles (-0.287) s’opposent aux mésohygrophiles (0.167) et
aux hygrophiles (0.839)
Les chaméphytes (-1.068) s’opposent à toutes les autres modalités sauf aux hémicryptophytes (0.327)
Interprétation des axes d’après les variables supplémentaires
L’étude des facteurs ainsi que celle de la contribution des variables supplémentaires permet de
dégager la spécificité de chaque axe.
- L’axe 1 oppose les relevés selon les conditions de la station - exposition, pente, texture et
type de végétation - et les caractéristiques intrinsèques des espèces en présence - groupe
écologique, exigences en lumière, en humidité, mode de dissémination et type biologique.
Dans ses coordonnées positives, l’axe 1 est associé à une végétation boisée, sur pente
moyenne, en exposition NE, sur sol limoneux ou équilibré, colonisée par des espèces
forestières, préférant des situations d’ombre, peu exigeantes vis à vis des conditions
d’humidité du sol et se disséminant préférentiellement par endozoochorie. La diversité
floristique est faible à assez forte.
Dans ses coordonnées négatives, l’axe 1 caractérise une végétation herbacée, sur terrain plat
ou de faible pente, sans exposition ou d’exposition SO, sur sols sableux, avec présence
d’espèces adventices ou rudérales, de type biologique thérophytique, ayant des exigences de
pleine lumière et possédant une large aire de répartition. La diversité floristique peut être
faible ou forte.
- L’axe 2 oppose les relevés selon les conditions de station - exposition, pente, situation
topographique, humidité du sol, type de végétation - et selon les caractéristiques intrinsèques
des espèces présentes - groupe écologique, exigences en humidité, aire de répartition et type
biologique. Des coordonnées négatives aux positives, les relevés se distribuent selon un
gradient de situation :
210
- Des formations végétales sur pentes nulles ou faibles, exposées au Nord-Est sur sols
humides, en fond de vallon, de type arboré1, boisé2 (bois, haie, lisière) ou herbacé (bords des
eaux, espaces rudéraux, vignes, cultures). Les espèces associées sont des espèces inféodées à
des espaces cultivés ou de marais, poussant sur des sols humides, de type herbacé annuel et
ayant une large aire de répartition. Ces relevés illustrent une végétation herbacée ou ligneuse,
de bas de versant, sur sol hydromorphe, avec un cortège floristique associé caractéristique. La
diversité spécifique peut être faible ou forte.
- Des formations végétales sur pentes moyennes à fortes, ou faibles, d’exposition diverse, le
long du versant (milieu et haut), sur sol à tendance sèche, caractérisées par une végétation de
type prairial (pelouse, prairie, fruticée). Les espèces associées sont des espèces de formations
prairiales, forestières et de prairie grasse, ou de prairie maigre. Les espèces ont des affinités
pour les sols xérophytiques. Ces relevés illustrent des formations prairiales des coteaux, avec
la présence d’espèces forestières, qui témoignent probablement d’une dynamique progressive
de la végétation, non exploitée. La diversité spécifique de ces types de végétation est
relativement forte.
- L’axe 3 discrimine de façon claire,
En coordonnées négatives, les relevés localisés en fond de vallon et bas de versant, aux
conditions hydriques élevées, caractérisés par une végétation des bords des eaux. Les plantes
présentes sont des plantes de marais ou aquatiques, hygrophiles, se disséminant
préférentiellement par hydrochorie et anémochorie. Ces relevés sont représentatifs de la
végétation des bords des eaux, en fond de vallon humide, avec une flore associée
caractéristique.
Vers les coordonnées positives se situent les relevés sur le versant (milieu et haut), sur sol non
humide (de frais à sec), représentant les autres types de végétation. La diversité des types de
végétation en présence fait que l’on a également une diversité d’espèces du point de vue des
données autécologiques. Toutefois, nous pouvons signaler que les espèces adventices et les
rudérales se distinguent des espèces appartenant aux autres groupes écologiques. Nous avons
vu sur le plan factoriel 1-2 qu’elles étaient inféodées aux végétations de type culture et
espaces rudéraux. Elles s’opposent en ce sens à la végétation des bords des eaux des
coordonnées négatives (espèces de marais et aquatiques). Ces relevés illustrent la diversité de
types de milieu et de végétation, qui existent le long des versants des coteaux, sur sols plus ou
moins drainés et secs.
- L’axe 4 oppose aux autres relevés, les relevés exposés au sud, sur sol sec, représentant une
végétation de type lisière.
Dans ses coordonnées négatives, cette végétation, dans des conditions de milieu sèches et
ensoleillées, se caractérise par des espèces forestières et de prairie maigre, mésophiles à
mésoxérophiles, de types biologiques chaméphytique et hémicryptophytique. Les relevés
illustrent une végétation de lisière, avec des espèces caractéristiques, ligneuses et herbacées
vivaces, ayant des affinités pour les conditions mésologiques sèches. Ces lisières sont liées
aux végétations de type prairie, fruticée et vigne (probablement à cause du faible nombre de
relevés pour les 2 derniers types cités).
Vers les coordonnées positives, les autres types de végétation illustrent des situations moins
ensoleillées et sur sol moins sec, avec des plantes supportant plus des conditions de milieu
mésophiles à hygrophiles, notamment des plantes de marais.
Ces relevés illustrent une opposition entre la végétation des lisières et celle des marais.
1
2
Arboré Se dit d’une formation végétale comportant des arbres épars.
Boisé Se dit d’un couvert végétal caractérisé par des arbres groupés.
211
1. 3. 4 -
Interprétation des plans factoriels
À partir de l’interprétation des axes factoriels, nous pouvons réaliser celle des deux plans
factoriels. Cette interprétation éclaire sur la signification des nuages de points distribués sur
l’AFC. Ces nuages correspondent à des groupements végétaux particuliers.
Figure 42. Projection des relevés sur le plan factoriel 1-2. La taille des symboles est
proportionnelle à la contribution des variables aux axes
Pour des raisons de clarté, les espèces ne sont pas projetées sur le plan.
Figure 43. Projection des relevés (en rouge) et des espèces (en vert) sur le plan factoriel 3-4. La
taille des symboles est proportionnelle à la contribution des variables aux axes
212
a-
Plan factoriel 1-2
Interprétation de l’axe1,
- Coordonnées négatives : espaces anthropisés, propices à l’agriculture et/ou à
l’aménagement urbain
- Coordonnées positives : des formations boisées sur des terrains peu propices à
l’exploitation agricole
Interprétation de l’axe2,
- Coordonnées négatives : formations de bas de versant, sur sol à tendance
hydromorphe.
- Coordonnées positives : formations prairiales des coteaux secs, colonisées
progressivement par des espèces forestières
L’analyse conjointe des axes 1 et 2 permet de caractériser la végétation, sa distribution et sa
composition spécifique, en fonction des conditions naturelles du milieu dans la mosaïque
paysagère et des traits de vie des espèces. Nous pouvons ainsi identifier les bois, les cultures
et espaces rudéralisés, les végétations des bords des eaux, les prairies maigres et grasses.
b-
Plan factoriel 3-4
Interprétation de l’axe3,
- Coordonnées négatives : végétation de fond de vallon humide, avec une flore associée
caractéristique
- Coordonnées positives : diversité de types de milieu et de végétation, le long des
versants. Flore des cultures, des espaces rudéraux et des bois, non hygrophile.
Interprétation de l’axe4,
- Coordonnées négatives : situations à tendance xérophile et ensoleillées, espèces
ligneuses et herbacées vivaces, avec des affinités pour les conditions mésologiques
sèches.
- Coordonnées positives : végétations moins exposées et dans des situations à tendance
mésohygrophile, notamment espèces de marais hygrophiles.
Le plan factoriel 3-4 oppose la végétation de type ‘bord des eaux’, ‘lisières’ et une variété de
type de végétation en situation humide et en situation sèche
1. 4 -
Apport des facteurs spatiaux : le cas des taches boisées
Les facteurs spatiaux permettent d’interpréter l’influence de l’organisation spatiale des
fragments boisés sur leur diversité et composition floristique. Leur étude constitue donc un
champ d’investigation dans la compréhension de l’effet de la fragmentation du paysage sur la
flore. Les variables supplémentaires retenues sont d’ordre spatial, mais aussi stationnel et
taxonomique (cf. p.199).
Vingt quatre (24) relevés de 100 m2 ont été réalisés dans 12 taches boisées, pour les deux
sites d’étude confondus, et référençant 126 espèces. Les facteurs, pour les relevés et les
espèces, sont étudiés pour les 2 premiers axes de l’AFC (valeurs propres : 0.3937 et 0.3427).
213
Pour chaque axe factoriel, nous retenons les points dont la contribution est supérieure au seuil
de significativité 5%, en tant qu’éléments les plus explicatifs pour chaque axe considéré (cf.
Annexe 7).
Variables
Exposition
Pente
Topographie
Hydrique
Texture
AXE 1
0,03*
0,22
0,22
0,02*
0,05*
AXE 2
0,02*
0,03*
0,08
0,01**
0,40
Données spatiales
Surface
Périmètre
Distance moyenne
Distance minimale
PSI
Type de dynamique
Variation de l’aire
Variation du PSI
0,61**
0,31
-0,42*
-0,51**
-0,12
0,71
-0,11
0,17
0,03
0,43*
-0,32
0,07
0,56**
0,29
0,47*
0,25
Données taxonomiques
Capacité de dissémination
Plasticité écologique
Groupe écologique
Aire répartition
Exigence en lumière
Exigence en humidité du sol
Type biologique
Recouvrement strate herbacée
Recouvrement strate arbustive
Recouvrement strate arborée
Richesse spécifique
Richesse en sp. forestières
Indice de Shannon
0,21
0,85
0,01**
0,72
0,13
0,04*
0,16
-0,23
0,27
0,11
-0,28
-0,29
-0,33
0,86
0,19
0,05
0,71
0,33
0,33
0,76
0,14
0,05
-0,10
-0,51**
-0,46*
-0,51**
Données stationnelles
Tableau 30. Significativité des variables supplémentaires aux axes 1-2 de l’AFC, en gras valeurs
significatives, < à 0,05
La distance minimale est estimée en considérant toutes les taches boisées, échantillonnées
ou non, puisque toutes représentent des réservoirs potentiels de diversité floristique.
Pour les variations de l’aire et du PSI, les relevés non présents en 1834 sont exclus (6
relevés).
Pour les variables qualitatives, la valeur de corrélation est indiquée.
***P<0.005
** P<0.01
*P<0.05
D’après la significativité des variables supplémentaires aux deux premiers axes (cf. Tableau
30), les deux axes peuvent être expliqués principalement par les variables suivantes :
Axe 1
Axe 2
Exposition
Exposition
Humidité du sol
Humidité du sol
Pente
Surface des taches
Indice de forme
Distance minimale aux autres taches
Richesse spécifique
Groupe écologique de l’espèce
Richesse en espèces forestières
Exigence des espèces en humidité du sol
Tableau 31. Variables significatives pour les axes 1 et 2
214
D’après le test inférentiel qui permet de valider les modalités de chaque variable significative
(cf. p.203), nous caractérisons chaque axe dans ses coordonnées positives et négatives.
- L’axe 1 est caractérisé par,
Dans ses coordonnées négatives, des taches boisées exposées au NE, sur sol plutôt frais, de
petite surface, éloignées des autres taches, composées d’espèces forestières et adventices, à
tendance hygrophile,
Dans ses coordonnées positives, des taches exposées au SE, sur sol sec, de grande surface,
proches d’une autre tache, composées d’espèces de prairie maigre et rudérales, à tendance
xérophile.
- L’axe 2 est caractérisé par,
Dans ses coordonnées négatives, des taches boisées exposées globalement au N (NE, E, N),
sur pente faible, sur sol plutôt sec, avec un PSI faible (forme compacte), une richesse et une
diversité spécifique élevée, conjointement à un nombre en espèces forestières élevé,
Dans ses coordonnées positives, des taches boisées sur terrain plat, sur sol humide, avec un
PSI élevé (forme irrégulière), une richesse et une diversité spécifique faible, conjointement à
un nombre en espèces forestières faible.
Figure 44. Distribution des relevés de type ‘bois’ sur les deux premiers axes factoriels et
caractérisation des axes par les variables supplémentaires significatives
L’AFC lancée sur les relevés de type ‘bois’ pour la flore actuelle globale (cf. Figure 44) a
permis de mettre en évidence l’intervention des facteurs spatiaux. Nous pouvons ainsi établir
des relations entre structure spatiale et composition floristique. Aux vues de l’étude du plan
factoriel 1-2, il semble que la structure spatiale des taches intervient pour partie dans la
détermination de la composition floristique.
215
- D’après l’axe 1, et contrairement aux prédictions (Dunn et al., 1991)1, les taches de grande
étendue et rapprochées ne sont pas celles qui sont les plus riches en espèces forestières. Ces
facteurs (surface, distance minimale) ne semblent donc pas être déterminants pour la présence
d’espèces forestières et n’influencent pas, dans notre exemple, de manière significative le flux
et le maintien des espèces forestières. Cette observation suggère l’intervention d’autres
facteurs, non pris en compte. Elle peut également être reliée à celles des chapitres 2 et 3 où
nous avons pu montrer la relativement faible richesse spécifique des milieux de type ‘bois’
dans le paysage lauragais (cf. p.139). Cela confirme également la conclusion d’une flore
banale, dominée par des espèces d’espace herbeux. Ce constat peut également être le résultat
d’un jeu de données trop pauvre. La présence d’espèces propres au cortège des pelouses
sèches (groupe écologique des ‘prairies maigres’ et ‘rudérales’, espèces à tendance xérophile)
dans des taches de grande surface peut s’expliquer par plus de lisière, écotone connu pour
offrir des conditions de lumière élevées et des situations sèches, et pour favoriser la
colonisation d’espèces héliophiles (Collinge, 1996)2.
- D’après l’axe 2, les taches aux formes compactes sont celles présentant une richesse et une
diversité spécifique ainsi qu’une richesse en espèces forestières la plus élevée. Ces deux
observations, en accord avec les prévisions, illustrent l’importance de l’effet lisière et de
l’espace intérieur disponible pour le maintien des espèces et notamment forestières, et donc
pour le maintien de la diversité floristique des fragments boisés, dans des paysages
anthropisés.
L’étude des deux axes a révélé l’intervention significative des conditions environnementales
dans la caractérisation des taches boisées, notamment les conditions en eau du sol,
déterminées par l’exposition et la pente. Ces facteurs vont influencer la distribution des
espèces selon leur exigence en eau du sol. En conclusion, même s’il nous paraît difficile, avec
le jeu de données disponible, de mettre clairement en lumière la contribution des facteurs
spatiaux dans la composition floristique, cette analyse nous permet de confirmer l’importance
de la structure d’habitat dans la diversité forestière. Cette analyse a surtout montré la
complexité des mécanismes mis en jeu, révélant une structure où les systèmes sont emboîtés
et où les facteurs d’ordre divers se combinent. Par ailleurs, contrairement aux hypothèses de
départ, les caractéristiques propres aux espèces (traits de vie) ne semblent pas jouer un rôle
significatif dans la composition floristique de taches boisées fragmentées.
1. 5 -
Description des groupements végétaux : Interprétation de l’AFC
Grâce aux résultats de l’AFC, nous pouvons individualiser neuf groupements végétaux à
partir de la physionomie de la végétation, caractérisant les formations végétales. Ces
groupements illustrent trois physionomies, que nous avons identifiées dans le chapitre 4 (cf.
p.157). D’une manière générale, les différents résultats révèlent une distribution typique des
espèces végétales dans les différents types de végétation. Toutefois, certaines espèces et
certains relevés présentent une distribution plus atypique qu’il est particulièrement intéressant
d’analyser.
1
Ces auteurs avancent l’importance de la proximité des taches boisées à une zone source pour la régénération
des espèces forestières, selon leur capacité de dispersion, et opposent deux types de taches, selon leur distance à
une source en graine : « proximal seed source » et « isolated seed source ».
2
D’après cet auteur, les lisières des bois contiennent plus d’espèces pionnières et xériques que l’intérieur, une
richesse spécifique plus élevée que l’intérieur, sont plus sujettes à une invasion d’espèces de plantes exotiques.
216
La liste ci-après indique, pour les 12 variables « hypothético-explicatives » testées sur les axes
1 à 4, le nombre de fois qu’elles se sont révélées significativement corrélées aux axes.
-
Groupe écologique
Exigences en humidité du sol
Type biologique
Code relevé
État hydrique du sol
Exposition
Aire de répartition
Dissémination
Pente
Topographie
Texture
Exigences en lumière
4
4
4
4
3
3
2
2
2
2
1
1
Il en ressort que certaines variables participent plus que d’autres à l’explication de la
distribution des relevés et des espèces sur les plans factoriels, et donc à l’explication de la
distribution de la végétation et de sa composition floristique sur les territoires d’étude. En ce
qui concerne les variables mésologiques, l’état hydrique du sol est la variable qui conditionne
le plus la répartition de la végétation et donc le type de végétation pour un terrain donné.
Cette singularité illustre les caractéristiques du territoire d’étude, paysage au relief vallonné,
avec un drainage efficace sur la pente et une accumulation en bas de pente1, et un climat à fort
contraste saisonnier (sécheresse d’été, vent d’autant). En ce qui concerne les variables
autécologiques, la composition floristique de chaque type de végétation est essentiellement
liée à trois caractéristiques : le groupe écologique des espèces qui est lui-même en rapport
avec le type de végétation, l’exigence des espèces vis à vis des conditions d’humidité du sol et
le type biologique.
Les AFC effectuées sur les espèces et les relevés, représentatifs de la végétation actuelle pour
les deux sites d’étude révèlent une influence forte des conditions de milieu (état hydrique du
sol) sur le type de végétation et la flore en présence (habitat optimal de l’espèce, type
biologique, exigence en humidité du sol).
1. 5. 1 -
Flore des groupements végétaux
Les informations apportées par les deux plans factoriels analysés (1-2 et 3-4) permettent de
discriminer neuf groupements végétaux et de caractériser leur cortège floristique.
1234567-
La végétation des cultures et des espaces rudéralisés,
La végétation des bords de route,
La végétation des formations prairiales herbacées sèches,
La végétation de bord des eaux,
La végétation des formations prairiales permanentes fauchées,
La végétation des formations boisées,
La végétation des haies,
1
La température et l’humidité sont les facteurs écologiques essentiels sur les végétaux, dont l’influence
combinée explique la répartition de nombreuses espèces (Dajoz, 1985).
217
89-
La végétation des fourrés arbustifs, ou fruticées,
La végétation occasionnelle des groupements spontanés.
La description des groupements végétaux s’appuie sur les résultats obtenus dans l’analyse
spatiale en prenant en compte notamment les pratiques agricoles suivies (cf. chapitre 3). Pour
chaque groupement, différents types de végétation sont décrits, inspirés de ceux cités par
Bournérias (Bournérias et al., 2001). Pour chacun de ces types, nous désignons les espèces
selon leur affinité pour la formation végétale correspondante (cf. p.204). Les espèces
caractéristiques - indicatrices de la végétation et des conditions mésologiques en présence - et
compagnes ont été mises en évidence par l’AFC ; elles correspondent aux variables
principales significatives, révélées par l’étude des facteurs. Nous désignons comme
occasionnelles, les espèces non mises en évidence dans l’AFC ou non prises en compte dans
le cas où elles étaient trop peu représentées dans les relevés de végétation (présence égale à
1). Leur présence dans les relevés de végétation peut être due à une valence écologique large
ou à leur caractère ‘fugace’. Les types d’habitat pouvant être cités correspondent à l’habitat
optimal dans lequel pousse la plante, défini d’après Julve (2000). Autant que possible, les
résultats de l’AFC seront mis en relation avec ceux obtenus dans le chapitre 4.
Pour chaque groupement, nous présentons, à la suite de sa description, un schéma synthétique
qui résume ses caractéristiques et les interactions possibles avec les autres groupements (cf.
Figure 45). Tous les schémas sont organisés selon une base commune : ils décrivent les
facteurs apparents qui induisent le type de formation végétale, les conditions locales
influençant la végétation ; le descriptif de la végétation associée à la formation végétale
identifiée ; les éventuelles formations associées ; les menaces possibles sur le maintien de la
formation et du cortège floristique ; les échanges avec les milieux environnants. Les facteurs
et conditions correspondent aux variables descriptives analysées. Les menaces indiquées en
rapport avec la formation décrite ne supposent pas forcément une menace pour la diversité
floristique dans sa globalité. Le nombre entre parenthèse indiquant le nombre d’espèces
caractéristiques et compagnes donne une estimation de la typicité de la végétation décrite.
218
Figure 45. Modèle de schémas synthétique des groupements végétaux décrits
Les résultats des différentes analyses statistiques révèlent une zonation de l’utilisation de
l’espace en fonction des aptitudes des terrains à l’exploitation agricole. Ainsi, nous
distinguons les terrains propices à la mise en valeur agricole et les terrains non propices. Les
terrains propices, d’exposition globale sud, situés sur des terrains plats ou de faible pente,
relativement bien drainant, sur un substrat sableux, sont représentés majoritairement par une
végétation de type culture. S’y rencontre également, dans les espaces marginalisés, la
végétation des espaces rudéralisés et de bord des eaux. Les terrains non propices sont
représentés par une végétation spontanée, herbacée, arbustive ou arborée.
1- La végétation des cultures et des espaces rudéralisés
Elle correspond aux groupements anthropiques. Elle est surtout située sur des terrains
propices à l’agriculture et/ou à l’aménagement urbain : faible pente, faible humidité, fort
ensoleillement. La diversité spécifique est très variable, de faible à forte. Bien que nous
fassions la distinction entre la végétation “adventice” des lieux cultivés et la végétation des
endroits incultes, la flore de ces deux types de végétation s’imbrique, avec un cortège
floristique commun d’espèces à large aire de répartition.
219
La végétation “adventice” des lieux cultivés est occupée principalement par une plante
cultivée, semée ou plantée, accompagnée d’une flore composée d’adventices de cultures.
Cette flore est principalement située en marge des cultures, là où les produits phytosanitaires
sont moins répandus. Ces groupements d’adventices rassemblent les groupements associés
aux cultures céréalières (annuelles commensales des cultures -Anagallis arvensis L., Capsella
bursa-pastoris (L.) Medik., Fallopia convolvulus (L.) 'A. Löve, Fumaria officinalis L., Mercurialis annua L.,
Papaver rhoeas L., Polygonum aviculare L., Ranunculus arvensis L., Rapistrum rugosum (L.) All. [1785],
Reseda phyteuma L., Senecio vulgaris L., Setaria viridis (L.) P. Beauv. ssp. viridis, Sinapis alba L., Solanum
nigrum L., Sonchus oleraceus L., Veronica persica Poiret, Viola arvensis Murray ssp. arvensis- et annuelles
commensales des moissons (messicoles) -Alopecurus myosuroides Hudson., Anagallis foemina Miller,
Anthemis altissima L. emend Sprengel, Chaenorrhinum minus (L.) Lange, Euphorbia falcata L., Kickxia elatine
(L.) Dumort, Kickxia spuria (L.) Dumort., Legousia speculum-veneris (L.) Chaix), les groupements
associés aux cultures sarclées et aux plantations fruitières permanentes (vignes, vergers… Althaea hirsuta L., Amaranthus hybridus L., Bromus sterilis L., Chenopodium polyspermum L., Echinochloa
crus-galli (L.) P. Beauv., Euphorbia helioscopia L., Geranium dissectum L., Lamium purpureum L., Polygonum
lapathifolium L., Polygonum persicaria L., Setaria verticillata (L.) P. Beauv., Sonchus asper (L.) Hill, Veronica
polita Fries), les groupements associés aux cultures denses non sarclées (prairies artificielles,
luzernières… - Anthemis cotula L., Arenaria serpyllifolia L., Calepina irregularis (Asso) Thell.,
Chenopodium album L., Valerianella locusta (L.) Laterrade).
Les « adventices » s.l. sont à la fois des espèces spontanées qui vivraient aussi bien sur un tel
sol dénudé, même si ce sol n’était pas cultivé et qui bénéficient des façons culturales qui leur
offrent des places libres et parce que l’agriculteur apporte au sol des engrais ou d’autres
substances (désherbants sélectifs) agissant de façon diverse sur la flore adventice (en
éliminant certaines espèces mais parfois en en favorisant d’autres), et des espèces étrangères,
adventices au sens strict, introduites avec la culture. L’utilisation par l’agriculteur de
semences sélectionnées limite leur introduction. La rotation des cultures sarclées et céréalières
et les méthodes de l’agriculture moderne ont contribué à une quasi-uniformité des
groupements d’adventices de culture, comme en témoigne la richesse quasi équivalente du
groupement des annuelles commensales des moissons (messicoles), pour les deux sites (cf.
p.144).
La végétation des endroits incultes anthropiques qui sont parmi les plus riches floristiquement
de la flore lauragaise actuelle (cf. chapitre 4), est celle des stations dont la végétation naturelle
a été détruite ou fortement perturbée par l’Homme : cultures temporaires ou définitivement
abandonnées, voisinage des habitations, des voies de communication… Leur flore particulière
est liée aux actions humaines qu’elles soient périodiques (groupements artificiellement
stabilisés comme les bords de route) ou récemment interrompues (groupements en cours de
dynamique progressive comme les parcelles de culture abandonnées). La flore des lieux
incultes comporte i) des espèces spontanées de stations ouvertes qui bénéficient des actions
anthropiques -Artemisia vulgaris L., Atriplex prostrata DC., Brassica nigra (L.) Koch, Cardaria draba (L.)
Desv., Cirsium arvense (L.) Scop., Convolvulus arvensis L., Cynodon dactylon (L.) Pers., Daucus carota L.,
Elytrigia repens (L.) Desv. ex Nevski, Equisetum arvense L., Galactites elegans (All.) Nyman ex Soldano,
Lapsana communis L., Lolium perenne L., Phalaris paradoxa L., Picris hieracioides L., Silybum marianum (L.)
Gaertner- ii) des espèces nitrophiles qui bénéficient d’apports azotés -Ammi majus L., Avena
barbata Link, Bromus sterilis L., Lactuca serriola L., Picris echioides L.- iii) des espèces étrangères,
favorisées par une dissémination anémochore, présentes sur les deux sites (cf. chapitre 4,
p.144) - Conyza canadensis (L.) Cronq., Conyza sumatrensis (Retz.) E. Walker., Lactuca virosa L. Certaines
étaient autrefois cultivées et se sont maintenues au voisinage de leurs anciens lieux de
culture -Helianthus tuberosus L., Malva sylvestris L., Verbena officinalis L. Parfois s’y adjoignent des
plantes encore actuellement cultivées, généralement ‘fugaces’ -Medicago sativa L. Ces lieux
peuvent être colonisés par des espèces de formations spontanées, prairiales (espèces
220
compagnes) -Bromus tectorum L., Calystegia sepium (L.) R. Br., Lolium multiflorum Lam., Pulicaria
dysenterica (L.) Bernh.
La végétation des lieux cultivés et incultes est colonisée par une très grande diversité
d’espèces occasionnelles, ‘fugaces’,
i) annuelles commensales des cultures -Adonis annua L., Aphanes arvensis L., Avena fatua L.,
Bromus arvensis L., Bromus commutatus Schrader, Bromus secalinus L., Cerastium glomeratum
Thuill., Consolida ajacis (L.) Schur, Erodium malacoides (L.) L'Hérit., Euphorbia peplus L.,
Raphanus raphanistrum L., Stellaria media (L.) Vill, Thlaspi alliaceum L., Torilis arvensis (Hudson)
Link, Veronica agrestis L., Veronica arvensis L., Veronica hederifolia L., Vicia hirsuta (L.) S.F.
Gray, Vicia sativa L. subsp. nigra (L.) Ehrh.
ii) des friches annuelles -Aegilops ovata L., Amaranthus retroflexus L., Avena sativa L., Bromus
diandrus Roth subsp. maximus (Desf.) Soo, Bromus madritensis L., Crepis setosa Haller fil.,
Hordeum murinum L., Myosotis arvensis Hill, Zea mays L.
iii) des friches vivaces -Ballota nigra L. ssp. meridionalis (Béguinot) Béguinot [1909], Dipsacus
fullonum L., Linaria vulgaris Miller, Saponaria officinalis L., Taraxacum officinale Weber,
Verbascum phlomoides L.
iv) des tonsures -Geranium columbinum L., Hainardia cylindrica (Willd.) W. Greuter, Hypericum
humifusum L., Medicago polymorpha L., Poa annua L., Ranunculus sardous Crantz, Valerianella
eriocarpa Desv.
v) des dalles héliophiles -Sedum sediforme (Jacq.) Pau
vi) des pelouses et prairies -Allium paniculatum L., Hypochaeris radicata L., Rumex acetosella L.
vii) des bois et ourlets -Aquilegia vulgaris L., Chelidonium majus L., Geranium pusillum L.,
Lunaria annua L., Poa nemoralis L.
Cette diversité d’espèces peut illustrer le rôle des lieux anthropisés dans la conservation, au
moins temporaire, d’espèces, se comportant comme des ‘zone-puits’ de biodiversité.
La végétation des vignobles traditionnels est particulière et assez peu diversifiée -Alopecurus
pratensis L., Amaranthus blitum L., Amaranthus graecizans L. subsp. silvestris (Vill.) Brenan, Borago
officinalis L., Calendula officinalis L, Cerastium glutinosum Fries, Crepis vesicaria L. subsp. taraxacifolia
(Thuill.) Thell. ex Schinz & R. Keller, Erodium cicutarium (L.) L'Hérit., Medicago arabica (L.) Hudson,
Triticum aestivum L., Valerianella carinata Loisel. D’après les résultats du chapitre 4 (cf. p.139), les
vignobles sont parmi les milieux les plus pauvres en espèces végétales de la flore lauragaise
actuelle. En concordance avec les résultats obtenus dans le chapitre 3, cette faible richesse
semble être en relation avec d’une part la surface disponible et d’autre part l’intensité des
pratiques.
La végétation des murs de village montre un cortège floristique typique assez diversifiée Arabidopsis thaliana (L.) Heynh., Arenaria leptoclados (Reichenb.) Guss., Asplenium trichomanes L., Buddleja
davidii Franchet, Centranthus ruber (L.) DC., Cymbalaria muralis G. Gaertner, B. Meyer & Scherb., Lamium
amplexicaule L., Minuartia hybrida (Vill.) Schischkin subsp. tenuifolia (L.) Kerguélen, Oxalis corniculata L.,
Parietaria judaica L., Sedum album L., Umbilicus rupestris (Salisb.) Dandy, Viola hirta L.
221
Photo 18. Flore des lieux cultivés (Schwal)
Adonis annua L.
Anthemis altissima L. Fumaria officinalis L.
Kickxia spuria (L.) Dum.
Viola arvensis Mur. Amaranthus hybridus L. Legousia speculum-veneris Chaix Anthemis cotula L.
Face aux cultures désherbées (tournesol), les bords de champs constituent des zones d’accueil
de la flore adventice, Nailloux
Jachère, Préserville
Senecio inaequidens D.C.
222
Photo 19. Flore des vignobles (Schwal)
Vigne, Nailloux
Borago officinalis L.Erodium cicutarium L'Hérit
Photo 20. Flore des endroits incultes anthropiques (Schwal)
Daucus carota L.
Malva sylvestris L. Euphorbia helioscopia L. Picris hieracioides L.
Photo 21. Flore des murs (Schwal)
Asplenium trichomanes L.
Centranthus ruber (L.) DC. Cymbalaria muralis G. Gaertner
223
En résumé pour la végétation actuelle des cultures et des espaces rudéralisés
Figure 47-a. Schéma synthétique pour la végétation actuelle des cultures et des espaces
rudéralisés
La végétation des lieux cultivés et incultes est fortement liée à l’intervention anthropique sur
le milieu en créant des espaces libres et ouverts, que des espèces de plantes herbacées, à large
aire de répartition vont pouvoir coloniser. Cette végétation renferme une valeur patrimoniale
d’autant plus remarquable qu’elle est menacée par des activités anthropiques de plus en plus
soutenues (disparition d’habitats comme les vignes, intensification des pratiques comme
l’emploi des herbicides, la monoculture, le désherbage des murs de village ou de bord de
champs, etc.).
224
2- La végétation des bords de route
Elle constitue une catégorie particulière de la végétation des espaces rudéralisés. En raison de
sa physionomie (dominance de la strate herbacée) et des conditions locales de station
(fréquemment sur talus, donc sur des sols drainés), la végétation des bords de route montre
des similitudes avec celle des pelouses -Brachypodium pinnatum (L.) P. Beauv., Calamintha nepeta (L.)
Savi, Carex flacca Schreber- des prairies -Achillea millefolium L., Arrhenatherum elatius (L.) P. Beauv. ex J.
& C. Presl, Festuca arundinacea Schreber, Foeniculum vulgare Miller, Linum bienne Miller.- des bords des
eaux, lorsque sont présents des fossés plus ou moins inondés -Alopecurus myosuroides Hudson.,
Mentha suaveolens Ehrh. Par ailleurs, selon sa localisation, elle peut être enrichie par la
végétation des cultures -Anagallis arvensis L., Anthemis cotula L., Bromus sterilis L., Kickxia spuria (L.)
Dumort., Legousia speculum-veneris (L.) Chaix, Papaver rhoeas L., Sonchus asper (L.) Hill.
Belhacène caractérise les talus de bord de route comme des « melting-pots » du cortège
prairial, rudéral et agricole (Belhacène, 2002). La végétation des bords de route se présente
comme une zone d’accueil pour une variété d’espèces spécialisées ainsi que d’orchidées Aceras anthropophorum (L.) Aiton fil., Anacamptis pyramidalis (L.) L.C.M. Richard, Himantoglossum
hircinum (L.) Sprengel, Orchis purpurea Hudson. Elle renferme plus spécifiquement Allium
neapolitanum Cyr., Allium polyanthum Schultes & Schultes fil., Allium vineale L., Anchusa arvensis (L.) M.
Bieb., Arctium minus (Hill) Bernh., Aristolochia rotunda L., Atriplex patula L., Avenula pubescens (Hudson)
Dumort., Cardamine flexuosa With., Geranium sanguineum L., Lepidium campestre (L.) R. Br., Linaria supina
(L.) Chazelles, Lolium temulentum L., Melilotus albus Medik., Melilotus altissimus Thuill., Plantago media L.,
Ranunculus parviflorus L., Salvia verbenaca L., Scandix pecten-veneris L., Verbascum thapsus L., Vicia
cracca L., Vinca major L., Xeranthemum cylindraceum Sm. Ces espaces herbacés sont pénétrés par des
espèces d’introductions récentes, dont le transport est assuré par le trafic routier, des
espèces des cultures et des végétations naturelles extérieures (CERA-Environnement, 1998) Conyza sumatrensis (Retz.) E. Walker., Oenothera biennis L., Phacelia tanacetifolia Bentham. Ces deux
dernières espèces ne sont signalées que sur le site de Nailloux, que nous avons caractérisé
comme étant plus urbanisé que le site de Préserville. Ceci pourrait expliquer une présence
plus élevée de xénophytes.
Les bords de route sont généralement entretenus par fauchage à l’épareuse, sous peine
d’enfrichement par une variété de ligneux selon les conditions locales de sol (humidité,
acidité) -Cornus sanguinea L., Crataegus monogyna Jacq., Prunus avium L., Prunus spinosa L., Quercus
humilis Miller, Robinia pseudoacacia L., Ulmus minor Miller.
225
Photo 22. Flore des bords de route (Schwal)
Melilotus altissimus Thuill Xeranthemum cylindraceum Sm Aceras anthropophorum Aiton
Orchis purpurea Hudson Anacamptis pyramidalis Rich.
Talus de bord de route, exposition sud, Nailloux
226
En résumé pour la végétation actuelle des bords de route
Figure 47-b.
Schéma synthétique pour la végétation actuelle des bords de route
La végétation des bords de routes est une végétation particulière des lieux incultes
anthropiques, représentée uniquement par la strate herbacée, enrichie d’espèces d’une
diversité de milieux. Cette végétation s’installe sur les espaces ouverts, en bord de route. Son
existence est conditionnée par un entretien fréquent par fauchage, sous peine d’enfrichement
par divers ligneux des haies et des bois. Le trafic routier modifie le cortège floristique de cette
végétation en favorisant l’installation d’espèces étrangères. Ces formations peuvent être
perçues comme des lieux d’échange et de flux (corridors végétaux) pour des espèces
végétales transitant d’une parcelle à une autre de même nature.
227
3- Les formations prairiales herbacées sèches
Elles sont représentées par la végétation des pelouses héliophiles calcaricoles denses du
Mesobromion erecti. Elles sont relativement homogènes d’un point de vue du cortège
floristique. Ce sont de hautes pelouses, sur des pentes assez fortes à fortes, situées en milieu et
haut de versant, sur des sols secs, de diversité spécifique faible à forte C’est une des
végétations les plus riches en espèces de la flore lauragaise, d’après les résultats du chapitre 4.
L’ensemble caractéristique rassemble des espèces relativement communes pour la région Acinos arvensis (Lam.) Dandy, Bituminaria bituminosa (L.) E.H. Stirton, Brachypodium pinnatum (L.) P.
Beauv., Clinopodium vulgare L., Eryngium campestre L., Galium mollugo L. ssp. erectum Syme, Genista
tinctoria L., Hypericum perforatum L., Lotus corniculatus L., Medicago minima (L.) L., Ononis spinosa L. ssp.
maritima (Dumort. ex Piré) P. Fourn., Origanum vulgare L., Sanguisorba minor Scop., Seseli montanum L.,
Thymus pulegioides L., Trifolium angustifolium L., Trifolium campestre Schreber. Les orchidées sont
fréquentes -Aceras anthropophorum (L.) Aiton fil., Anacamptis pyramidalis (L.) L.C.M. Richard, Ophrys
apifera Hudson, Ophrys scolopax Cav., Ophrys sphegodes Miller, Orchis militaris L., Orchis purpurea Hudson.
Le Brachypode penné est dominant dans ce groupement, correspondant à la forme pauvre et
dégradée du Mesobromion, et peut témoigner de défrichements récents (les relevés
représentant des formations apparues récemment (cf. chapitre 3) sont ceux où le brachypode a
des coefficients d’abondance les plus grands), ou de l’action intensive de lapins (Bournérias et
al., 2001).
Le Mesobromion est en outre fréquemment colonisé par des plantes associées à une diversité
de milieux (cultures, lieux incultes, pelouses, prairies, lisières…) et des plantes banales (cf.
p.254), en raison de leur caractère ‘fugace’ et de la facilité de pénétration dans ces types de
végétation -Catapodium rigidum (L.) C.E. Hubbard, Cichorium intybus L., Crepis sancta (L.) Bornm., Daucus
carota L., Euphorbia exigua L., Euphorbia flavicoma DC. ssp. verrucosa (Fiori) Pignatti, Picris hieracioides L.,
Rumex obtusifolius L., Trifolium repens L., Vicia bithynica (L.) L., Vicia sativa L.
Ces pelouses renferment, de manière exclusive, des espèces rudérales et adventices -Coronilla
scorpioides (L.) Koch, Echium vulgare L., Gladiolus italicus Miller, Syringa vulgaris L. (introduite),
Tragopogon pratensis L. subsp. minor (Miller) Hartman, Urospermum dalechampii (L.) Scop. ex F.W. Schmidt,
Vicia lutea L.- signifiant que leur présence n’est pas le résultat d’une colonisation à partir d’une
source proche puisqu’elles ne sont pas présentes dans leur habitat optimal (lieux cultivés et
incultes). Nous pensons qu’elles témoignent d’un état passé cultivé de la parcelle et se
seraient maintenues après abandon de la culture (83% des pelouses actuelles correspondent à
d’anciennes parcelles cultivées d’après les données du chapitre 3 ; la plupart des espèces sont
citées dans les milieux cultivés, en 1885, d’après les données du chapitre 4). Toutefois, il est
vraisemblable que ces espèces ne se maintiendront pas si le milieu évolue vers des stades plus
avancés de la dynamique progressive de la végétation.
Les variations locales de station, notamment une pente forte, génèrent par endroit des
substrats siliceux décalcifiés (la topographie est un facteur essentiel dans la disponibilité de
calcium dans le sol (Lemée, 1967)) et permettent ainsi l’installation de plantes acidophiles Cytisus scoparius (L.) Link, Hieracium pilosella L., Lolium perenne L., Myosotis ramosissima Rochel, Serapias
vomeracea (Burm.) Briq, Vicia sativa L. subsp. nigra (L.) Ehrh., Vulpia bromoides (L.) S.F. Gray, Vulpia
ciliata Dumort.Vulpia myuros (L.) C.C. Gmelin.
Notons la présence d’une diversité d’espèces occasionnelles ayant pour la plupart leur
optimum dans les pelouses basophiles -Allium sphaerocephalon L., Anchusa italica Retz., Anthyllis
vulneraria L., Asteriscus spinosus (L.) Schultz Bip., Briza media L., Bromus erectus Hudson, Calamintha
nepeta (L.) Savi, Carlina vulgaris L., Centaurea scabiosa L., Cirsium eriophorum (L.) Scop., Crepis pulchra
L., Dianthus armeria L., Erigeron acer L., Galium aparine L., Galium mollugo L., Helichrysum stoechas (L.)
Moench, Himantoglossum hircinum (L.) Sprengel, Juncus bufonius L., Medicago lupulina L., Orobanche minor
Sm. in Sowerby, Phleum pratense L. ssp. pratense, Poa bulbosa L., Poa humilis Ehrh. ex Hoffm., Poa trivialis
228
L., Prunella vulgaris L., Salvia pratensis L., Scabiosa columbaria L., Sinapis arvensis L., Sixalix atropurpurea
(L.) Greuter & Burdet ssp. maritima (L.) Greuter & Burdet, Trifolium scabrum L. Des plantations de
ligneux ont été effectuées pour accélérer la végétalisation des terres arables récemment
abandonnées -Pinus nigra Arnold ssp. laricio Maire, Pyracantha coccinea M.J. Roemer. (cf. chapitre 4,
p.144). Des situations locales plus fraîches accueillent occasionnellement la végétation
caractéristique et compagne des groupements des Prairies de fauches mésophiles de
l’Arrhenatherion elatioris (cf. p.236) et des Saulaies ripariales (cf. p.233). Les pelouses sont
progressivement pénétrées d’assez nombreux buissons dispersés et de plantes pionnières du
pré-bois, et des ourlets et clairières, indiquant une tendance au boisement (après une phase de
dégradation anthropique) -Agrimonia eupatoria L., Genista tinctoria L., Roegneria canina (L.) Nevski.,
Rosa canina L., Ulmus minor Miller.- occasionnellement Centaurea jacea L., Cistus salviifolius L.,
Helianthemum grandiflorum (Scop.) DC. in Lam. & DC. ssp. grandiflorum, Luzula campestris (Ehrh.) Lej.,
Polygala calcarea F.W. Schultz, Prunella laciniata (L.) L. Les pelouses sont embroussaillées à cause
des changements dans l’utilisation des milieux ruraux (abandon du pâturage, de l’entretien) et
peuvent évoluer rapidement vers la chênaie neutrophile.
Les situations siliceuses décalcifiées favorisent des espèces caractéristiques des formations
prairiales et arborées acides (pelouses, ourlets, coupes forestières et bois) -Anthoxanthum
odoratum L., Cytisus scoparius (L.) Link, Festuca rubra L., Hieracium pilosella L., Polygala vulgaris L.,
Pteridium aquilinum (L.) Kuhn, Rubus sp, Spartium junceum L., Thymus pulegioides L. subsp. chamaedrys
(Fries) Litard- marquant l’évolution de la végétation vers la chênaie oligotrophe acidophile.
Cette dynamique est illustrée par trois relevés (P21, 22 et 23), effectués sur une pelouse
dérivant d’une parcelle agricole abandonnée, située à proximité d’un bois caractérisé par la
végétation de la chênaie oligotrophe. Il ne semble pas que ce bois voisin se comporte comme
une zone-source puisque l’on ne trouve pas d’espèces forestières acidophiles dans la pelouse,
ceci en raison vraisemblablement de l’âge récent de la pelouse apparue après 1993 (d’après le
chapitre 3), qui n’offre pas de condition de lumière suffisamment faible pour permettre à des
espèces forestières de s’installer. Des espèces occasionnelles indiquent la tendance au
boisement : espèces ayant leur optimum dans les fourrés et ourlets -Centaurea thuillieri J.
Duvigneaud & J. Lambinon, Clematis vitalba L., Juniperus communis L., Vicia sepium L.- et espèces
caractéristiques des chênaies -Acer campestre L., Cornus sanguinea L., Crataegus monogyna Jacq.,
Fraxinus angustifolia Vahl ssp. oxycarpa (Willd.) Franco & Rocha Afonso, Geum urbanum L., Ligustrum
vulgare L., Prunus avium L., Prunus spinosa L., Quercus humilis Miller, Quercus robur L.
La végétation des pelouses héliophiles denses du Mesobromion erecti est menacée en raison
de ses caractères évolutifs et des multiples aspects de l’impact humain. Ses sols relativement
profonds et ses pentes modérées sont favorables aux plantations (plantation de Pins noirs sur
la commune de Nailloux) et aux cultures après défrichement (peu le cas dans nos sites, seul un
relevé mis en culture après 1946). Leur situation topographique en fait une position attractive
pour la construction avec « vue imprenable » (comme l’aménagement d’un lac à Nailloux).
Les pelouses mésoxérophiles à flore particulièrement riche méritent protection.
229
Photo 23. Flore des formations prairiales herbacées sèches (Schwal)
Pelouse à Brachypode, Nailloux
Anacamptis pyramidalis Rich.
Asteriscus spinosus Schultz.
Euphorbia flavicoma DC. Echium vulgare L
Euphorbia exigua L. . Genista tinctoria L.
230
Ophrys sphegodes Miller Serapias vomeracea Briq
Ophrys scolopax Cav.
Certaines espèces - Anthyllis vulneraria L. - peuvent former des peuplements très denses
(Nailloux, parcelle aujourd’hui convertie en zone urbaine).
Pelouse en cours d’enfrichement, Nailloux
231
En résumé pour la végétation actuelle des formations prairiales herbacées sèches
Figure 47-c. Schéma synthétique pour la végétation actuelle des formations prairiales
herbacées sèches
Les pelouses héliophiles calcaricoles denses du Mesobromion erecti sont des formations
typiques d’un point de vue de leur cortège floristique qui est sous l’influence de conditions
d’humidité de sol faibles. Ces conditions sont générées par une situation sur des pentes
relativement fortes et en position intermédiaire et supérieure le long du versant, ce qui
favorise le ruissellement de l’eau. L’intervention anthropique, passée et/ou actuelle, est
perceptible dans ces formations : plantation d’espèces, entretien par fauchage, pâturage. Ces
formations sont assez récentes. Certaines ont vu le jour suite à des défrichements de
formations boisées, ou à l’abandon de terres cultivées inadaptées aux conditions nouvelles
d’une agriculture modernisée.
Les pelouses denses du Mesobromion erecti, qui ne sont pas dans notre région des formations
climaciques, sont actuellement menacées d’enfrichement en raison de l’abandon de leur
entretien (fauchage, pâturage), témoignant de la nécessité de l’intervention anthropique dans
le maintien de ces formations riches en espèces végétales, notamment en orchidées.
232
4- La végétation de bord des eaux
Elle correspond à la végétation des Saulaies ripariales, localisée dans les fonds de vallon
humides, en marge des lacs, rivières, ruisseaux et fossés à écoulement permanent ou
temporaire. Dans les cas où la strate arborée est dominante le long d’un cours d’eau, ces
saulaies correspondent aux ripisylves. Le cortège floristique typique de la végétation des
Saulaies ripariales est peu diversifié d’un point de vue taxonomique. Les analyses du chapitre
4 ont révélé que les milieux de type bords des eaux étaient parmi les plus pauvres
floristiquement, de la flore actuelle, ceci probablement en raison d’une forte pression
anthropique (fauchage, élagage, désherbage). Ce cortège est composé d’espèces se
disséminant préférentiellement par le vent -Alopecurus myosuroides Hudson., Bolboschoenus
maritimus (L.) Palla, Carex cuprina (Sandor ex Heuffel) Nendtwich ex A. Kern, Carex hirta L., Chenopodium
album L., Cynosurus cristatus L., Epilobium hirsutum L., Epilobium tetragonum L., Equisetum telmateia Ehrh.,
Eupatorium cannabinum L., Glyceria fluitans (L.) R. Br., Lycopus europaeus L., Mentha aquatica L., Picris
echioides L., Rumex obtusifolius L., Scrophularia auriculata L., Silybum marianum (L.) Gaertner, Trisetum
flavescens (L.) P. Beauv., Typha angustifolia L., Typha latifolia L., Veronica beccabunga L. Plus
occasionnellement sont présentes Alisma plantago-aquatica L., Apium nodiflorum (L.) Lag., Cyperus
longus L., Eleocharis palustris (L.) Roemer & Schultes, Epilobium parviflorum Schreber, Myosotis scorpioides
L., Schoenoplectus lacustris (L.) Palla.
En bord de lac et pour certains fossés, ces formations sont caractérisées par des strates
arbustive et arborée, peu denses, composées d’arbres à bois tendre -Robinia pseudoacacia L., Salix
acuminata Miller, Salix triandra L. emend. Ser. ssp. discolor (Koch) Arcangeli, Sambucus ebulus L., Sambucus
nigra L.- et plus occasionnellement Alnus glutinosa (L.) Gaertner, Populus alba L., Populus canescens
(Aiton) Sm., Populus nigra L., Populus tremula L., Salix alba L. Les deux lacs herborisés sont récents
(lacs artificiels à vocation de loisir, aspect évoqué dans le chapitre 3). La présence d’espèces
de formations prairiales témoigne de l’occupation passée de la parcelle (ancienne prairie).
La faible densité de couvert et le côtoiement fréquent de cultures et de bois permettent la
présence d’espèces compagnes variées -Lathyrus latifolius L., Luzula campestris (Ehrh.) Lej., Plantago
major L., Prunella hastifolia Brot., Senecio inaequidens DC., Solanum dulcamara L., Stachys sylvatica L.,
Urtica dioica L.- ainsi que d’une diversité d’espèces occasionnelles -Brassica nigra (L.) Koch,
Bromus sterilis L., Bryonia dioica Jacq., Cirsium vulgare (Savi) Ten., Equisetum arvense L., Equisetum
ramosissimum Desf., Lolium multiflorum Lam, Luzula multiflora (Ehrh.) Lej., Phalaris paradoxa L., Sedum
rupestre L., Setaria pumila (Poiret) Roemer & Schultes, Spergularia rubra (L.) J. & C. Presl, Sporobolus
indicus (L.) R. Br. (introduite), Torilis japonica (Houtt.) DC., Trifolium striatum L.
Quand les fossés sont à écoulement temporaire, la végétation correspond à une forme
dégradée de celle des Saulaies ripariales, avec pénétration par des espèces des formations
prairiales, ce qui dénote des conditions plus sèches de station. Le groupement est bien
représenté le long des cours d’eau quand les berges des rivières n’ont pas été déboisées
(Guiavarc'h, 2002). Par contre, nous notons une grande pauvreté en marge des fossés
parcourant les champs humides. L’entretien de la strate arborée des saulaies ripariales varie
d’un entretien nul à un entretien en têtard1.
1
La taille en têtard, qui s’applique surtout aux saules et aux frênes, procure en plus du fourrage et du bois de
chauffage, des perches et échalas ou des branches qui servent à réaliser des treillages et des claies. Les rameaux
fins de saules servaient autrefois pour palisser les vignes (Le Renard et al., 1998).
233
Photo 24. Flore des bords des eaux (Schwal)
Saulaie ripariale, Salix alba L.
Lac artificiel, Préserville
Typha latifolia L.
Scrophularia auriculata L. Equisetum telmateia Ehrh.
Vallée de la Hyse, Nailloux
Vallée de la Marcaissonne, Préserville
234
En résumé pour la végétation actuelle des bords des eaux
Figure 47-d.
Schéma synthétique pour la végétation actuelle des bords des eaux
La végétation des bords des eaux se développe dans des espaces marginaux, délaissés. Elle est
conditionnée par l’humidité du sol. Secondairement, la densité de couvert arboré, la nature
des parcelles concomitantes et leur nature passée, dans le cas des plans d’eau, sont des
facteurs qui interviennent clairement dans la composition floristique de cette végétation. La
végétation typique est celle de la Saulaie ripariale, caractérisée par des espèces hygrophiles
anémochores. Cette végétation est intéressante de par sa typicité.
235
5- Les formations prairiales permanentes fauchées
Les prairies1 dites « naturelles » ou « permanentes2 » sont, dans notre région à climax
forestier, des groupements végétaux étroitement dépendants de l’Homme et de ses troupeaux.
Le classement des principaux types de prairie permanente est assez difficile (Bournérias et al.,
2001). Les « glissements écologiques »3 et l’importance des actions humaines tendent à
uniformiser les sols vers un type moyen, mésophile et mésotrophe. Les prairies actuellement
présentes (cf. carte d’occupation du sol de 1998, p.86) sur les deux sites d’étude sont des
prairies permanentes annuellement fauchées. Cette action est indispensable à leur maintien et
à la conservation de leur équilibre dynamique. En l’absence de cette pratique, les prairies sont
rapidement envahies par divers ligneux (voir ci-après). Le cortège floristique appartient à
l’alliance de l’Arrhenatherion elatioris. Toutes ces prairies sont localisées en bas de versant,
sur des terrains en pente faible, sur sol moyen à frais, avec une diversité spécifique forte.
Toutes les parcelles herborisées correspondent à d’anciennes terres cultivées (92% de
l’ensemble des prairies actuelles étaient cultivées en 1834), abandonnées depuis plus ou
moins longtemps. L’arrhénathéraie proprement dite est caractérisée par un cortège floristique
d’hémicryptophytes vivaces héliophiles -Arrhenatherum elatius (L.) P. Beauv. ex J. & C. Presl, Dactylis
glomerata L., Plantago lanceolata L.- accompagnées par Achillea millefolium L., Bellis perennis L.,
Calystegia sepium (L.) R. Br., Centaurium erythraea Rafn, Festuca arundinacea Schreber, Leucanthemum
vulgare Lam., Linum bienne Miller., Poa pratensis L., Potentilla reptans L., et par des espèces
occasionnelles -Centaurea jacea L., Convolvulus arvensis L., Geranium dissectum L., Muscari comosum (L.)
Miller, Orchis purpurea Hudson, Poa trivialis L., Ranunculus bulbosus L., Ranunculus repens L., Senecio
jacobaea L., Sherardia arvensis L., Trifolium pratense L., Trisetum flavescens (L.) P. Beauv. , Vicia bithynica
(L.) L., Vicia sativa L. La végétation des prairies de fauche est colonisée par des espèces
caractéristiques des prairies pacagées (cf. chapitre 4). Dans les prairies mésophiles, citons
Cerastium fontanum Baumg. subsp. vulgare (Hartman) Greuter & Burdet, Eryngium campestre L., Hypericum
perforatum L., Hypochaeris radicata L., Origanum vulgare L., Trifolium campestre Schreber., et dans les
prairies mésohygrophiles, Anthoxanthum odoratum L., Bromus hordeaceus L. ssp. hordeaceus, Rumex
crispus L., Silene flos-cuculi (L.) Greuter & Burdet. Nous pensons que ces espèces sont les témoins
d’un usage passé. En fonction de la teneur en eau du sol, nous distinguons les prairies
mésophiles, mésohygrophiles et hygrophiles.
- Les prairies mésophiles sont localisées sur des substrats frais. Elles sont plus
particulièrement dominées par Brachypodium pinnatum (L.) P. Beauv. et Festuca arundinacea Schreber.
La végétation occasionnelle, complémentaire à celle déjà citée et spécifique à ce groupement
dans nos sites d’étude, est relativement variée -Conyza canadensis (L.) Cronq., Coronilla scorpioides
(L.) Koch, Crepis foetida L., Foeniculum vulgare Miller, Inula conyza DC., Lathyrus annuus L, Lathyrus
aphaca L., Sanguisorba minor Scop., Tragopogon porrifolius L., Trifolium dubium Sibth., Vicia lutea L. En
raison des glissements écologiques déjà évoqués, et dans les cas où les terrains sont bien
exposés ou suffisamment inclinés, ce groupement peut s’enrichir de xérophytes et tendre vers
la pelouse à Carex glauque -Carex flacca Schreber- et Chlore perfoliée -Blackstonia perfoliata (L.)
Hudson- représentée par l’alliance du Mesobromion erecti avec la présence occasionnelle
d’Anacamptis pyramidalis (L.) L.C.M. Richard, Asteriscus spinosus (L.) Schultz Bip., Echium vulgare L.,
Hieracium pilosella L., Myosotis ramosissima Rochel, Ononis spinosa L. ssp. maritima (Dumort. ex Piré) P.
1
Prairies Formations végétales constituées de plantes herbacées formant des peuplements hauts et denses, au
moins durant une partie de l’année, continus (fermés) (Bournérias et al., 2001).
2
Les prairies permanentes s’opposent aux prairies temporaires, semées pour quelques années avant d’être
retournées, et aux prairies artificielles qui sont en général, des cultures de Légumineuses (Bournérias et al.,
2001).
3
Certaines plantes, en réaction aux conditions particulières de la teneur en eau du sol dans une station donnée,
peuvent se localiser anormalement, par rapport à leurs exigences climatiques (lumière, humidité, température).
De telles anomalies sont désignées sous le terme de « glissements écologiques » (Bournérias et al., 2001).
236
Fourn., Serapias vomeracea (Burm.) Briq, Trifolium angustifolium L., Urospermum dalechampii (L.) Scop. ex
F.W. Schmidt., Vulpia myuros (L.) C.C. Gmelin.
- Les prairies mésohygrophiles sont localisées sur des substrats frais à humides, assez bien
drainées, étant sur des terrains plats de bas de versant. En plus des espèces précédemment
citées, la végétation est plus particulièrement caractérisée par Lotus pedunculatus Cav., Tragopogon
pratensis L. ssp. pratensis., enrichie occasionnellement par Ajuga reptans L., Epilobium tetragonum L.,
Galium aparine L., Holcus lanatus L., Rumex acetosa L.
Les prairies hygrophiles sont localisées sur des substrats humides, enrichis par les limons
d’inondation (crues hivernales et assèchement temporaire estival). Seule une parcelle
représente cette formation, sur le site de Nailloux. Cette observation est en accord avec
l’étude comparée de la flore lauragaise actuelle, où nous avons observé que le site de Nailloux
est plus représenté en milieux herbacés humides tels que les prairies hygrophiles, et plus riche
en espèces de prairie grasse, hygrophiles (cf. p.156). La prairie concernée est située dans le lit
majeur d’un cours d’eau (vallée de la Hyse). La végétation présente des similarités avec celle
des prairies inondées caractérisées par l’alliance du Bromion racemosi. La prairie humide
herborisée, fauchée en juin, a une végétation particulièrement originale, riche en espèces qui
lui sont spécifiques dans nos sites d’étude -Alopecurus geniculatus L., Bromus racemosus L., Hordeum
secalinum Schreber, Juncus inflexus L., Lathyrus pratensis L. Les espèces occasionnelles sont Bellevalia
romana (L.) Reichenb., Carex hirta L., Carex spicata Hudson, Evonymus europaeus L., Juncus acutiflorus
Enrh. ex Hoffm., Lycopus europaeus L., Mentha suaveolens Ehrh., Ophioglossum vulgatum L., Ophrys apifera
Hudson, Orchis laxiflora Lam., Pulicaria dysenterica (L.) Bernh., Ranunculus acris L., Senecio erucifolius L.,
Ornithogalum umbellatum L.
-
En dépit de leur origine artificielle, les prairies de fauche peuvent constituer des biocénoses
remarquables, comme l’illustre la présence de Bellevalia romana (L.) Reichenb., plante référencée
en Annexe I de l’arrêté ministériel du 20 janvier 1982 (cf. chapitre 4, p.144). La typicité de
cette végétation ne doit pas nous faire oublier que les prairies humides sont menacées à cause
de la régularisation du débit du cours d’eau avec suppression des crues hivernales, de
l’abandon de la fauche au profit de la céréaliculture (Belhacène, 2001). Leur protection ne
peut se faire qu’avec la participation volontaire des propriétaires.
La végétation des prairies permanentes de fauche est menacée de disparition en raison :
-
de ses caractères évolutifs : risque d’enfrichement si la pratique de fauche n’est pas
maintenue, par des broussailles et arbustes -Fraxinus angustifolia Vahl ssp. oxycarpa (Willd.)
Franco & Rocha Afonso, Fraxinus excelsior L., Ulmus minor Miller- et occasionnellement Clematis
vitalba L., Cornus sanguinea L., Crataegus monogyna Jacq., Rosa canina L., Rubus sp, peuplements
transitoires, précédant la reconquête par la forêt,
- des multiples aspects de l’impact humain : défrichement et retournement pour la culture
du blé, incités par des sols relativement profonds et des pentes nulles.
237
Photo 25. Flore des prairies (Schwal)
Prairie mésophile, Préserville, Serapias vomeracea Briq Senecio jacobaea L. Lathyrus aphaca L.
Prairie méso-hygrophile, Préserville
Prairie hygrophile, Nailloux
Ranunculus repens L.
Ophioglossum vulgatum L. Orchis laxiflora Lam.
Les crues annuelles enrichissent les prairies en limons, prairie hygrophile, Nailloux
238
En résumé pour la végétation actuelle des formations prairiales permanentes fauchées
Figure 47-e. Schéma synthétique pour la végétation actuelle des formations prairiales
permanentes fauchées
Les prairies permanentes de fauche existent dans des situations topographiques particulières
et sont maintenues par un entretien régulier. Le cortège floristique, caractérisé par une strate
herbacée vivace et accompagné d’espèces associées aux prairies pacagées, nécessite des
conditions d’humidité de sol suffisantes pour se développer. Ce sont des écosystèmes créés
par la main de l’Homme. Selon le niveau hydrique du milieu et l’existence de crues, le
cortège floristique s’enrichit d’espèces particulières.
Malgré leur origine anthropique, ces formations se révèlent être des réservoirs d’une flore
riche et variée, pouvant renfermer des espèces à haute valeur patrimoniale, et méritent à cet
égard d’être maintenues. Pourtant, les opérations d’aménagement territorial (restructurations
parcellaires, recalibrage des cours d’eau) et les changements des pratiques agricoles
(disparition des troupeaux) entraînent depuis plusieurs années la disparition générale de cette
végétation dans le Lauragais.
239
6- La végétation des formations boisées
Les parcelles boisées sont actuellement, tout comme de par le passé, exploitées sous forme de
taillis. La diversité spécifique des parcelles herborisées est variable, pouvant être faible à
moyennement forte. D’après l’AFC réalisée en ne prenant en compte que les relevés de type
bois, appuyée par le test de la variable pH, l’axe 1 montre une opposition des relevés selon la
texture du sol, avec un gradient des sols limoneux (coord. positives) aux sols équilibrés et
sableux, et une opposition des espèces selon leur affinité pour le pH du sol, les espèces
basophiles et neutrophiles s’opposant aux espèces acidophiles en coordonnées positives.
Même si la région d’étude est caractérisée par un sol argilo-calcaire neutre (pH autour de 6,5,
(Gaussen et Rey, 1946)), les variations locales de station (humidité plus importante,
ensoleillement moins fort) peuvent engendrer une décalcification et une légère acidification
des sols. Ces variations influencent la distribution des espèces végétales selon leur exigence
vis à vis des conditions de pH du sol. Nous différencions ainsi deux types de végétation
boisée : la végétation des chênaies neutrophiles sur sols équilibrés et la végétation des
chênaies acidophiles oligotrophes.
La végétation des chênaies neutrophiles sur sol équilibré du Quercion humilis caractérise des
parcelles boisées situées le long du versant, de texture équilibrée, sur sol neutre. Le cortège
floristique caractéristique rassemble des espèces indifférentes au pH du sol ou basophiles,
avec une variété de végétaux ligneux -Fraxinus angustifolia Vahl ssp. oxycarpa (Willd.) Franco & Rocha
Afonso, Quercus humilis Miller dans les conditions sèches et ensoleillées (marque l’influence
méditerranéenne au sens large) qui peut se mélanger à Quercus petraea (Mattuschka) Liebl. dans les
situations plus fraîches, Sorbus torminalis (L.) Crantz., Ulmus minor Miller- dont des arbustes
notamment à fruits charnus disséminés par l’avifaune -Acer campestre L., Cornus sanguinea L.,
Corylus avellana L., Crataegus monogyna Jacq., Ligustrum vulgare L., Lonicera xylosteum L., Prunus avium
L., Prunus spinosa L., Ruscus aculeatus L., Sambucus nigra L.- et des lianes -Clematis vitalba L., Hedera
helix L., Rubia peregrina L., Tamus communis L. A ces ligneux se mêle un éventail de plantes
herbacées vivaces -Brachypodium sylvaticum (Hudson) P. Beauv., Euphorbia amygdaloides L., Galium
aparine L., Ranunculus ficaria L., Urtica dioica L., Vinca minor L., Viola reichenbachiana Jordan ex Boreau.
Les situations sur des sols relativement humides favorisent l’installation d’espèces à tendance
hygrophile -Alliaria petiolata (M. Bieb.) Cavara & Grande, Arum italicum Miller, Carex pendula Hudson,
Geum urbanum L., Sanicula europaea L., Symphytum tuberosum L. Ce cortège floristique est
accompagné d’espèces non-forestières colonisant les groupements forestiers, en raison de leur
affinité pour des conditions de lumière faibles et des sols frais -Glechoma hederacea L., Serratula
tinctoria L., Veronica chamaedrys L. Notons la présence occasionnelle d’une diversité d’espèces Arundo donax L., Carpinus betulus L., Festuca heterophylla Lam., Geranium nodosum L., Geranium
robertianum L., Iris pseudacorus L., Lathyrus niger (L.) Bernh., Narcissus x-medioluteus Miller, Muscari
neglectum Guss. ex Ten., Ranunculus tuberosus Lapeyr., Rumex sanguineus L., Silene vulgaris (Moench)
Garcke, Tordylium maximum L.
La végétation des ourlets forestiers neutrophiles est caractérisée, en conditions sèches, par un
mélange d’espèces forestières ou de prairie maigre -Campanula glomerata L., Campanula patula L.,
Carex divulsa Stokes, Euphorbia amygdaloides L., Filipendula vulgaris Moench, Fragaria vesca L.,
Helianthemum grandiflorum (Scop.) DC. in Lam. & DC. ssp. grandiflorum, Polygala calcarea F.W. Schultz,
Stachys officinalis (L.) Trévisan, Trifolium ochroleucon Hudson. Les conditions plus fraîches favorisent
l’installation d’espèces compagnes ou occasionnelles telles que Anthriscus sylvestris (L.) Hoffm.,
Aristolochia rotunda L., Asplenium adiantum-nigrum L., Centaurea thuillieri J. Duvigneaud & J. Lambinon,
Chelidonium majus L., Circaea lutetiana L., Crepis sancta (L.) Bornm., Cruciata laevipes Opiz, Iris
foetidissima L., Juncus conglomeratus L., Juncus effusus L., Lathraea clandestina L., Lythrum salicaria L.,
Melissa officinalis L., Peucedanum cervaria (L.) Lapeyr., Rumex conglomeratus Murray, Serratula tinctoria L.,
Sison amomum L., Valeriana officinalis L. De par leur faible densité de couvert et leur situation, les
240
ourlets forestiers forment une zone de transition (écotone) et d’échange d’espèces entre les
bois et les groupements anthropiques (friches, champs) ou anthropozoogènes (prairies,
pelouses…) voisins, favorisant leur colonisation par des espèces de types d’habitat variés et
permettant la pénétration d’espèces rudérales et adventices -Kandis perfoliata (L.) Kerguélen,
Senecio inaequidens DC., Silybum marianum (L.) Gaertner, Solanum nigrum L.
La végétation des chênaies oligotrophes acidophiles est caractérisée par l’alliance du
Quercion robori-petraeae. Elle se développe sur des terrains siliceux oligotrophes, plats ou
exposés au Sud, à texture limoneuse. Les espèces indicatrices des strates arborée et arbustive
sont Ilex aquifolium L., Lonicera periclymenum L., Quercus robur L (prédilection pour les fonds de
vallon frais, formés d’alluvions à réaction plus ou moins acide, (Gaussen et Rey, 1946)), Rubus
sp. Le sous-bois est plus particulièrement représenté par Dryopteris filix-mas (L.) Schott, Pulmonaria
affinis Jordan in F.W. Schultz, Stellaria holostea L. Les espèces compagnes rencontrées sont
spécifiques des bois caducifoliés acidophiles -Agrostis capillaris L., Castanea sativa Miller, Dryopteris
affinis (Lowe) Fraser-Jenkins ssp. borreri (Newman) Fraser-Jenkins, Festuca rubra L., Polystichum setiferum
(Forsskål) Woynar, Viola riviniana Reichenb. Notons la présence d’espèces occasionnelles -Mespilus
germanica L. Prunus cerasifera Ehrh., Ranunculus auricomus L., Sedum telephium L., Succisa pratensis
Moench.
La végétation des ourlets des forêts acidophiles est caractérisée en strate arbustive par Cistus
salviifolius L., Cytisus scoparius (L.) Link, Spartium junceum L., Ulex europaeus L. et en strate herbacée
par Lathyrus linifolius (Reichard) Bässler ssp. montanus (Bernh.) Bäss, Luzula campestris (Ehrh.) Lej., Luzula
forsteri (Sm.) DC., Myosotis ramosissima Rochel, Polygala vulgaris L., Sedum cepaea L. accompagnées
d’espèces typiques des ourlets acidophiles -Hypericum pulchrum L., Teucrium scorodonia L., Veronica
officinalis L., Vicia orobus DC.- mais aussi d’espèces basophiles -Evonymus europaeus L., Hypericum
hirsutum L., Lathyrus latifolius L., Prunella hastifolia Brot., Prunella laciniata (L.) L. Plus
occasionnellement, l’on rencontre dans les ourlets acidophiles Centaurea nigra L, Cucubalus
baccifer L., Hieracium sabaudum L., Humulus lupulus L., Lithospermum officinale L.
La végétation des coupes des forêts acidophiles, observée sur le site de Préserville (bois
présent depuis 1834), montre des affinités avec celle des lisières. Nous observons la présence
de souches avec cépées et de chênes porte-graines -Quercus petraea (Mattuschka) Liebl. Les coupes
répétées (cf. chapitre 3) favorisent l’installation d’espèces caractéristiques des chênaies
oligotrophes acidophiles, notamment Calluna vulgaris (L.) Hull, qui témoignent de coupes
répétées avec mauvaise régénération (Timbal-Lagrave et al., 1864 ; Bournérias et al., 2001).
Sont également présentes des espèces des chênaies neutrophiles -Quercus humilis Miller, Ruscus
aculeatus L., Sorbus torminalis (L.) Crantz. Ces espèces forestières sont endozoochores, disséminées
par les oiseaux. Nous trouvons également dans ces coupes des espèces non-forestières aux
modes de dissémination variés (notamment vent et animaux) -Ajuga reptans L., Anthoxanthum
odoratum L., Conyza canadensis (L.) Cronq., Poa pratensis L., Polygala vulgaris L., Serratula tinctoria L. Ces
espèces ne sont pas présentes après régénération de la forêt acidophile. Il semble que les
espèces non-forestières colonisant les coupes de taillis grâce à une dissémination efficace
(vent et animaux) ne se maintiennent pas dans les stades matures du taillis, supplantées par
des espèces plus adaptées à des conditions de lumière faible. Signalons la présence
occasionnelle de la fougère aigle - Pteridium aquilinum (L.) Kuhn - qui colonise également des
formations prairiales récentes (cf. p.225).
Un autre type de groupement forestier que l’on rencontre est celui illustré par la végétation du
pré-bois thermophile telle que définie par les auteurs, (Bournérias et al., 2001), sur le site de
Préserville. Comme illustré par la parcelle qui représente ce type de végétation, le pré-bois
correspond à un groupement de transition entre les pelouses et les forêts. La parcelle dérive
d’un taillis de chêne pubescent -Quercus humilis Miller- évolué en futaie dispersée très claire,
située en haut de versant sur terrain plat. Le sous-bois comporte peu d’espèces spécialisées et
241
se limite à une formation herbeuse tondue ayant l’aspect d’un pré. Cette physionomie
particulière permet à un cortège d’espèces héliophiles et semi-héliophiles de s’installer Agrostis capillaris L., Centaurea jacea L., Holcus lanatus L., Lotus corniculatus L., Oenanthe pimpinelloides
L., Ranunculus bulbosus L., Rumex acetosa L., Serratula tinctoria L. Certaines sont caractéristiques des
ourlets des forêts acidophiles -Cistus salviifolius L., Luzula campestris (Ehrh.) Lej., Prunella hastifolia
Brot.
Le Robinier, Robinia pseudoacacia L., essence américaine introduite au début du XVIIe siècle,
est devenu abondant dans certains bois, pour les deux sites. Il caractérise la végétation des
bois anthropiques sur sols nitratés. Ce groupement est typique des forêts dégradées (nous
trouvons des bois non exploités depuis plus de 30 ans) ou en reconstitution (nous trouvons des
bois avec une dynamique progressive de type Vigne-Culture-Fruticée-Bois-Bois, d’après le
chapitre 3).
Des espèces arbustives forestières, banales -Crataegus monogyna Jacq., Cornus sanguinea L., Prunus
spinosa L., Rosa canina L.– se rencontrent fréquemment dans des formations peu ou pas
représentées par la strate arborée, formations ‘ouvertes’ telles que les pelouses et les fruticées.
Ce sont des espèces à haute valence écologique, caractéristiques de la dynamique progressive
de la végétation spontanée (pelouse/prairie – fruticée – bois), qui colonisent les formations
herbeuses non entretenues, disséminées par l’avifaune. Les espèces suivantes, que nous
trouvons simultanément dans les pelouses, prairies et fruticées, caractérisent cette dynamique
-Anacamptis pyramidalis (L.) L.C.M. Richard, Blackstonia perfoliata (L.) Hudson, Brachypodium pinnatum (L.)
P. Beauv., Carex flacca Schreber, Centaurium erythraea Rafn, Clinopodium vulgare L., Dactylis glomerata L.,
Dorycnium hirsutum (L.) Ser., Echium vulgare L., Euphorbia flavicoma DC. 2, 3, 4, 5 ssp. verrucosa (Fiori)
Pignatti, Evonymus europaeus L., Festuca arundinacea Schreber, Festuca rubra L., Foeniculum vulgare Miller,
Fraxinus angustifolia Vahl ssp. oxycarpa (Willd.) Franco & Rocha Afonso, Hypericum perforatum L., Lathyrus
aphaca L., Leucanthemum vulgare Lam., Ligustrum vulgare L., Lotus corniculatus L., Medicago lupulina L.,
Odontites luteus (L.) Clairv, Ononis spinosa L. ssp. maritima (Dumort. ex Piré) P. Fourn., Orchis purpurea
Hudson, Origanum vulgare L., Poa pratensis L., Potentilla reptans L., Ranunculus bulbosus L., Rubus sp.,
Rumex acetosa L., Sanguisorba minor Scop., Vicia hirsuta (L.) S.F. Gray.
L’analyse de la situation topographique des bois (cf. chapitre 3) révèle une tendance générale
de la localisation des bois sur les versants exposés au nord ou dans des situations de fond de
vallon sans exposition définie. Dans ces conditions locales de station, les terrains sont
fréquemment gorgés d’eau et/ou peu ensoleillés, ce qui les rend peu propices à l’exploitation
agricole. Ainsi, 63% des bois présents en 1998 existaient déjà en 1834, traduisant une
continuité biologique d’existence. Notons que certaines formations boisées, situées sur des
pentes relativement fortes, se sont développées par suite de l’abandon des pratiques culturales
sur les parcelles dans les années 1940-50 (cf. chapitre 3). Cette dynamique est une des
conséquences de la modernisation de l’agriculture durant cette période, la pente jouant un rôle
déterminant car, au-delà d’un certain seuil, elle créé une difficulté pour la mise en valeur
agricole et l’entretien mécanisé des parcelles (Brossard et al., 1996).
La présence d’espèces non-forestières dans les groupements forestiers pourrait marquer une
banalisation de la flore des bois. Cependant, les analyses du chapitre 4 indiquent déjà une
forte proportion de telles espèces dans les bois en 1885. Leur présence pourrait plutôt être le
témoin d’un usage ou d’une physionomie passés particuliers du bois - pâturage en sous-bois,
ou exploitation forestière sous forme de taillis avec passage aux stades de taillis jeune et clair,
favorables aux espèces de formations herbacées, ou dynamique progressive d’une parcelle
non-boisée abandonnée. Ces états passés ont été clairement mis en lumière dans le chapitre 3.
La présence de ces espèces peut également témoigner d’une colonisation plus récente avec
242
pénétration facilitée par un sous-bois clair -Arctium minus (Hill) Bernh. espèce des bords de routeou par un bois fragmenté (cf. chapitre 3, importance de l’effet lisière et de l’intérieur des
taches), d’où l’importance de prendre en compte les attributs spatiaux quand l’on cherche à
comprendre la composition floristique dans les taches boisées. L’analyse statistique a révélé
l’influence de deux facteurs spatiaux sur la végétation des bois : effet lisière et formes des
taches. L’effet lisière favorise les espèces héliophiles, xérophiles. Les formes compactes
favorisent la richesse spécifique et la richesse en espèces forestières (cf. chapitres 1 et 3).
Photo 26. Flore des chênaies neutrophiles sur sol équilibré (Schwal)
Narcissus x-medioluteus Miller
Symphytum tuberosum L.
Vinca minor L.
Photo 27. Flore des chênaies oligotrophes acidophile (Schwal)
Taillis clair : frênaie-érablière, Préserville
Lonicera periclymenum L. Lathraea clandestina L.
Frênaie, Nailloux. Dynamique progressive, après abandon d’une culture
243
Pré-bois thermophile, Préserville
Bois de robinier, Préserville
Coupe de taillis, Préserville
Cytisus scoparius (L.) Link Cistus salviifolius L.
244
En résumé pour la végétation actuelle boisée
Figure 47-f.
Schéma synthétique pour la végétation actuelle boisée
Dans une région vallonnée et au sol argilo-calcaire dominant, les facteurs principaux qui
induisent la présence d’une couverture boisée sont liés à l’activité agricole, qui conditionne
les terrains exploités sous forme de taillis. Ces facteurs sont en relation avec l’humidité du sol,
l’ensoleillement et la pente. Plus localement, les conditions de station (topographie, texture,
acidité) et secondairement les conditions de lumière et d’humidité vont influencer la
végétation boisée et la répartition des espèces.
245
7- La végétation des haies
Ce groupement végétal n’est pas caractéristique de la végétation des sites d’étude (relevés non
significatifs d’après l’analyse statistique). Les haies peuvent être aménagées sur un talus,
parfois accompagnées d’un fossé plus ou moins inondé. Leur physionomie est variée,
représentée par les strates herbacées, arbustives et arborées. En raison de la fonction des haies
comme séparateur de parcelles, cultivées ou non, leur végétation est composée d’un ensemble
de plantes, caractéristiques des pelouses et prairies -Achillea millefolium L., Bellis perennis L., Carex
flacca Schreber, Lathyrus pratensis L., Salvia pratensis L., Vicia sativa L.- des cultures et espaces
rudéralisés -Calystegia sepium (L.) R. Br., Cirsium vulgare (Savi) Ten.- des lisières et fourrés arbustifs
-Clematis vitalba L., Corylus avellana L., Cruciata laevipes Opiz,, Ulmus minor Miller, Urtica dioica L. Les
haies renferment par ailleurs des espèces qui leur sont spécifiques dans nos sites d’étude Allium oleraceum L., Bromus madritensis L., Carduus tenuiflorus Curtis, Elytrigia campestris (Godron & Gren.)
Kerguélen, Lithospermum arvense L., Lunaria annua L., Lycium barbarum L., Malus sylvestris Miller.,
Rhamnus alaternus L.
Ces haies ont toutes une origine anthropique, plantées il y a plus ou moins longtemps, voire
récemment (depuis moins de dix ans). L’AFC lancée sur les relevés de type ‘haies’ révèle sur
l’axe 2 une opposition des haies selon leur ancienneté, qui est en relation directe avec la strate
de végétation (haie ancienne avec une strate arborée plus développée), entraînant une
différence dans la composition floristique. Ainsi, les haies les plus anciennes, existant avant
1970 (Guiavarc'h, 2002), ayant des strates supérieures (arbustive et arborée) bien
développées, sont caractérisées par des espèces forestières, endozoochores -Cornus sanguinea L.,
Crataegus monogyna Jacq., Hedera helix L., Ligustrum vulgare L., Prunus avium L., Quercus humilis Miller,
Rosa canina L., Rubia peregrina L., Sorbus torminalis (L.) Crantz.- alors que les haies apparues après
1970, où les ligneux n’ont pas atteint leur taille optimale (présents dans les strates herbacée et
arbustive), sont caractérisées par des espèces prairiales épizoochores -Arrhenatherum elatius (L.)
P. Beauv. ex J. & C. Presl, Centaurea jacea L., Holcus lanatus L., Myosotis arvensis Hill, Trifolium campestre
Schreber.
Parmi les haies anciennes, l’axe 1 révèle une opposition des espèces selon leurs exigences vis
à vis des conditions d’humidité et d’acidité du sol. Ainsi, nous distinguons les haies
caractérisées par des espèces mésohygrophiles, à tendance acidophile -Cerastium glomeratum
Thuill., Rubus sp., Stellaria holostea L., Viola riviniana Reichenb.- des haies caractérisées par des
espèces mésoxérophiles sur sol à tendance basophile ou indifférentes -Acer campestre L.,
Brachypodium pinnatum (L.) P. Beauv., Medicago minima (L.) L., Plantago lanceolata L., Poa annua L.,
Prunus spinosa L., Silene latifolia Poiret subsp. alba (Miller) Greuter & Burdet, Sinapis alba L. Belhacène
distingue deux types de haies, selon leur âge : haies anciennes composées de vieux arbres et
d’un cortège floristique assez riche et diversifié : « les graminées et autres plantes herbacées
se faufilent au grès des trouées laissées par la végétation ligneuse. Nous y observons les
plantes des talus avec celles des sous-bois, plus quelques annuelles des champs qui y trouvent
refuge comme Althaea hirsuta L.», et haies nouvelles replantées depuis peu, souvent véritables
déserts écologiques : « de plus en plus, les espèces écologiques plantées respectent les
conditions écologiques du Lauragais. Il n’empêche que ces haies ne sont pas très larges,
puisqu’une seule épaisseur de végétaux est plantée. Il faudra attendre certainement quelques
décennies pour que ces haies finissent par devenir de véritables écosystèmes » (Belhacène,
2002).
Notons la présence d’espèces introduites par la main de l’Homme -Cedrus atlantica (Endl.)
Carrière, Laburnum anagyroides Medik., Ligustrum ovalifolium Hassk., Prunus cerasus L., Robinia
pseudoacacia L., Vitis vinifera L., reflétant l’origine anthropique des haies.
246
Photo 28. Flore des haies (Schwal)
Achillea millefolium L. Salvia pratensis L. Carduus tenuiflorus Curt.
Crataegus monogyna Jacq
Sorbus torminalis (L.) Crantz
Sinapis alba L.
Haie ancienne, claire, Préserville
Laburnum anagyroides Medik.
Haie récente, dense, Préserville
247
En résumé pour la végétation actuelle des haies
Figure 47-g.
Schéma synthétique pour la végétation actuelle des haies
Les haies sont des écosystèmes d’origine anthropique, qui peuvent devenir, après une phase
de colonisation assez longue, des réservoirs de biodiversité et dont le cortège floristique
s’enrichit à partir des milieux environnants. Mais elles peuvent également être des points de
départ d’invasions d’espèces exotiques, quand les choix de plantation ne sont pas faits en
accord avec les conditions naturelles de la région.
Les résultats montrent l’importance d’une part des caractéristiques intrinsèques de la haie
(ancienneté, représentation des strates de végétation) et d’autres part des conditions
mésologiques (humidité, acidité du sol) dans la composition du cortège floristique et dans la
distribution des espèces au sein de ce type de végétation.
248
8- La végétation des fourrés arbustifs, ou fruticées
La végétation n’est pas caractéristique de la flore de la région d’étude (non révélée par AFC).
Ceci peut s’expliquer par le fait qu’elle correspond à un stade de transition de la série
progressive de la forêt et qu’il n’y a pas de cortèges floristiques spécifiques aux fruticées dans
nos sites d’étude, toutes les espèces étant présentes dans les autres types de végétation. Cette
dernière observation pourrait expliquer les résultats du chapitre 4, qui ont révélé que ces
milieux étaient parmi les plus pauvres en espèces. L’absence d’interventions anthropiques
entraîne un développement dense de cette végétation, caractérisée par une variété de végétaux
ligneux notamment d’arbustes à baie, transportés par ornithochorie, ce qui explique sa
désignation courante de fruticée -Cornus sanguinea L., Crataegus monogyna Jacq., Evonymus europaeus
L., Fraxinus angustifolia Vahl ssp. oxycarpa (Willd.) Franco & Rocha Afonso, Hedera helix L., Prunus spinosa
L., Rosa canina L., Sambucus nigra L., Ulmus minor Miller, Viburnum lantana L.
Suivant la nature passée de la parcelle dont dérivent les trois fruticées relevées (F1, F2 et F3),
la composition floristique montre des variations. La formation apparue suite à l’abandon
d’une culture dans les années 70 (d’après le chapitre 3) en relation avec l’aménagement du lac
et de ses abords (F1) est caractérisée par des espèces forestières de demi-ombre, disséminées
par endozoochorie - Bryonia dioica Jacq., Cornus sanguinea L., Crataegus monogyna Jacq., Hedera helix
L., Prunus spinosa L., Rosa canina L., Sambucus nigra L., Solanum dulcamara L., Viburnum lantana L.- alors
que les deux formations dérivant d’anciennes pelouses (F2 et F3, apparues respectivement
après 1970 et 1993) sont caractérisées par des espèces héliophiles, forestières et prairiales, aux
modes de dissémination variés -Arrhenatherum elatius (L.) P. Beauv. ex J. & C. Presl, Centaurium
erythraea Rafn, Clematis vitalba L., Dorycnium hirsutum (L.) Ser., Festuca arundinacea Schreber, Festuca
pratensis Hudson, Ligustrum vulgare L., Rumex acetosa L., Vicia hirsuta (L.) S.F. Gray. La dominance des
espèces forestières dans la première formation nous laisse supposer que, lorsque la fruticée
résulte de l’abandon de terres cultivées, les parcelles sont rapidement colonisées par des
arbustes après une phase de colonisation par des espèces pionnières, laissant peu de temps et
de place aux espèces prairiales de s’installer, étouffées et supplantées par une végétation
dense. Une autre hypothèse est que les espèces prairiales qui ont dû s’installer dans les stades
jeunes de colonisation, ne se seraient pas maintenues après l’évolution de la dynamique de la
végétation et le recouvrement par les arbustes. L’analyse du plan factoriel 1-2 montre le
rapprochement de la première formation (F1) avec les relevés de type bois confirmant
l’analyse de la composition floristique, le rapprochement de la deuxième formation avec les
relevés de type pelouse (F2) et une position intermédiaire pour la troisième (F3). La
comparaison de la position des deux dernières formations sur le plan factoriel nous permet de
déduire que la dynamique de la végétation ne suit pas le même rythme selon les situations,
puisque la végétation représentée par la troisième formation, plus récente, est pourtant plus
proche des relevés de type bois, c’est-à-dire qu’elle a été plus rapidement colonisée par des
espèces forestières. Nous pensons que cette différence provient de la situation topographique
des deux parcelles concernées. En effet, la parcelle correspondant au relevé F3 est située en
bas de versant, sur un terrain frais, favorable à la colonisation des arbustes. La parcelle
correspondant au relevé F2 est située en milieu de versant sur une pente assez forte présentant
un sol plus sec et drainé. La formation est représentée par un cortège d’espèces
mésoxérophiles caractéristiques des pelouses du Mesobromion erecti -Anacamptis pyramidalis (L.)
L.C.M. Richard, Brachypodium pinnatum (L.) P. Beauv., Bromus erectus Hudson, Echium vulgare L.,
Foeniculum vulgare Miller, Ononis spinosa L. ssp. maritima (Dumort. ex Piré) P. Fourn., Poa pratensis L.,
Sanguisorba minor Scop.- contraignant la germination des graines et la croissance des arbustes.
Ce postulat est validé par les travaux de Dutoit, qui avance qu’il existe une plus ou moins
grande stabilité de certaines communautés herbacées face à la colonisation arborée (Dutoit,
1996). Les pelouses mésophiles occupant les pentes douces se boisent rapidement,
contrairement aux pelouses xériques recouvrant les pentes plus abruptes.
249
Photo 29. Flore des fourrés arbustifs (Schwal)
Fourré à cornouiller sanguin, Nailloux
Evonymus europaeus L.
Ononis spinosa L.
Viburnum lantana L.
Clematis vitalba L.
Sanguisorba minor Scop
Fourré sur forte pente, Préserville
250
En résumé pour la végétation actuelle des fourrés arbustifs
Figure 47-h.
Schéma synthétique pour la végétation actuelle des fourrés arbustifs
Les fruticées correspondent à des stades intermédiaires dans la dynamique progressive
aboutissant, si aucune intervention anthropique n’est effectuée, à la mise en place de la forêt
caducifoliée. Cette végétation est indirectement liée à l’activité anthropique, puisque c’est
l’absence d’entretien des formations prairiales qui permet son existence. La composition
floristique de cette végétation correspond à un mélange d’espèces présentes dans les autres
types de végétation existants dans la région d’étude. Elle est conditionnée par la nature de la
parcelle dont dérive la fruticée et secondairement par l’état hydrique du sol. Ainsi, dans le cas
d’une ancienne culture, l’embuissonnement est rapide, l’installation des arbustes étant
favorisée par un espace ouvert, limitant les possibilités pour des espèces prairiales héliophiles
vivaces de s’installer. Dans le cas d’une ancienne pelouse maintenue par fauchage ou
pâturage, les plantes herbacées déjà en place et couvrant densément le terrain freinent la
germination des graines des plantes arbustives, d’où un cortège prairial persistant et un
embuissonnement plus lent. Il le sera d’autant plus que la station présente des conditions
hydriques de sol déficientes.
Ces formations n’ont pas d’intérêt botanique élevé dans le sens où elles ne présentent pas
d’espèces qui leur sont spécifiques ou de valeur patrimoniale élevée. En ce sens, leur gestion
conservatoire ne nous semble pas prioritaire.
251
9- La végétation occasionnelle, adventice et rudérale, des groupements spontanés
Les formations spontanées de type pelouse, prairie, qui évoluent vers la fruticée et les bois
lorsque aucune intervention anthropique n’est réalisée, sont occasionnellement colonisées par
des espèces des lieux cultivées, notamment les annuelles commensales des cultures, et des
lieux incultes, notamment des friches annuelles et vivaces. Deux conditions peuvent expliquer
leur présence : tout d’abord la présence actuelle ou non de ces plantes dans les formations
artificialisées (lieux cultivés et incultes). Deux cas de figure se présentent. Le premier cas
correspond aux espèces adventices et rudérales présentes actuellement à la fois dans les lieux
cultivés et incultes, et dans les formations spontanées. Le second cas correspond à des espèces
adventices et rudérales actuellement présentes uniquement dans les formations spontanées. La
deuxième condition retenue est celle de l’ancienneté de la formation végétale. Nous
distinguons les formations anciennes et récentes. Nous considérons la formation ancienne si
elle était déjà présente en 1970 (d’après la carte d’occupation du sol) et la formation récente si
elle était encore en culture en 1970. Nous pensons que la présence de ces plantes dans des
formations spontanées anciennes est probablement le résultat de récentes colonisations par
dissémination des graines, alors que leur présence dans des formations spontanées récentes
peut témoigner de leur maintien après évolution du milieu (abandon d’une culture).
- Dans le cas des espèces actuellement présentes à la fois dans les lieux cultivés et incultes, et
dans les formations spontanées, et pour les formations considérées comme anciennes (déjà
existante en 1970), nous supposons que la présence de ces espèces est certainement la
conséquence d’une colonisation à partir des milieux environnants (zone-source) -Alopecurus
myosuroides Hudson., Anthemis cotula L., Cerastium glomeratum Thuill., Muscari neglectum Guss. ex Ten.,
Pastinaca sativa L. subsp. sylvestris (Miller) Rouy & E.G. Camus, Sherardia arvensis L., Veronica persica
Poiret, Vicia bithynica (L.) L. Pour les formations considérées comme récentes (parcelle encore en
culture en 1970), il est plus probable que la présence de ces espèces résulte de leur maintien
après évolution de la parcelle abandonnée -Anagallis arvensis L., Anagallis foemina Miller, Cardaria
draba (L.) Desv.Geranium dissectum L., Geranium molle L., Lamium purpureum L., Legousia speculumveneris (L.) Chaix, Myosotis arvensis Hill, Papaver rhoeas L., Senecio vulgaris L., Sonchus asper (L.) Hill,
Sonchus oleraceus L., Valerianella locusta (L.) Laterrade, Veronica arvensis L., Veronica polita Fries, Vicia
bithynica (L.) L., Vicia hirsuta (L.) S.F. Gray, Vicia sativa L. ssp. nigra (L.) Ehrh. Dans le cas des espèces
présentes à la fois dans des formations récentes et anciennes, du fait de leur présence dans des
formations anciennes, nous supposons la possibilité pour elles de coloniser actuellement ces
milieux, d’où leur indexation dans cette catégorie.
- Dans le cas des espèces actuellement présentes uniquement dans les formations spontanées,
et pour les formations anciennes -Euphorbia platyphyllos L., Lathyrus hirsutus L., Lathyrus nissolia L,
Linum strictum L., Stachys annua (L.) L., leur présence peut être possible soit à partir de la banque
de graines, soit par dissémination à partir de milieux hors de la zone d’étude. Il est difficile de
trancher. Il faudrait pour cela connaître la longévité des graines et la distance qu’elles sont
capables de parcourir. Pour les formations récentes, leur présence indique certainement
qu’elles existaient déjà quand la parcelle était encore cultivée -Calendula arvensis L., Gaudinia
fragilis (L.) P. Beauv.
Le cas particulier de la vigne, Vitis vinifera L., témoigne de l’état passé des parcelles concernées
actuellement sous forme de pelouse et bois, et autrefois sous forme de vignes. Ces espèces
adaptées aux conditions des formations herbacées (forte luminosité) ont peu de chance a
priori de se maintenir avec l’évolution de la formation vers les stades arborés (fruticée et
bois). Toutefois, l’analyse de la composition floristique de certains bois dont la dynamique
montre un état anciennement cultivé, révèle la présence d’espèces adventices et rudérales, qui
sont actuellement présentes dans les cultures, par exemple les deux annuelles pionnières des
clairières et lisières, Cardamine hirsuta L., Geranium rotundifolium L.
252
En résumé pour la végétation actuelle occasionnelle des groupements spontanés
Figure 47-i.
Schéma synthétique pour la végétation actuelle occasionnelle des groupements
spontanés
Les formations spontanées herbacées, telles que les pelouses et les prairies, sont le siège de
colonisations par la flore des lieux cultivés et incultes (adventices et rudérales). Ces
colonisations peuvent résulter soit de la dissémination actuelle des graines à partir de parcelles
cultivées plus ou moins proches, soit du maintien des plantes dans le cas d’un abandon récent
d’une parcelle cultivée, soit de la germination actuelle des graines stockées après une phase
de dormance suite à l’abandon ancien d’une parcelle cultivée.
De ce fait, les formations spontanées peuvent jouer le rôle, au moins temporaire, de réservoirs
de la flore des cultures, rôle qui peut paraître essentiel à l’heure de l’utilisation intensive des
herbicides dans les parcelles agricoles et de la disparition progressive de la flore adventice des
cultures.
253
1. 5. 2 -
Cas particuliers
Ils concernent les espèces banales présentes dans une diversité de types de milieu et les
espèces exotiques, plantées et/ou naturalisées.
1- Espèces banales
Ces espèces, présentes dans une diversité de milieu, peuvent être définies comme banales,
étant les plus communes actuellement sur nos sites d’étude. Malgré leur caractère banal, elles
peuvent caractériser certains types de végétation :
- Des formations boisées -Clematis vitalba L., Cornus sanguinea L., Crataegus monogyna Jacq.,
Fraxinus angustifolia Vahl ssp. oxycarpa (Willd.) Franco & Rocha Afonso, Galium aparine L., Prunus
spinosa L., Ulmus minor Miller.
- Des bords des eaux -Solanum dulcamara L.
- Des cultures et espaces rudéralisés -Avena barbata Link, Bromus sterilis L., Convolvulus
arvensis L., Conyza canadensis (L.) Cronq., Daucus carota L., Geranium dissectum L., Picris
hieracioides L., Sonchus oleraceus L.
- Des pelouses des coteaux secs -Brachypodium pinnatum (L.) P. Beauv., Hypericum perforatum
L., Rosa canina L., Trifolium repens L., Vicia bithynica (L.) L., Vicia sativa L.
- Des prairies, mésophile et mésohygrophile -Arrhenatherum elatius (L.) P. Beauv. ex J. & C.
Presl, Carex flacca Schreber, Lathyrus pratensis L., Leucanthemum vulgare Lam., Plantago lanceolata
L., Poa pratensis L.
- Ne caractérisant pas de végétation -Bryonia dioica Jacq., Holcus lanatus L., Ranunculus acris L.
Ces espèces correspondent en partie à celles identifiées comme constantes de la flore
lauragaise actuelle (cf. étude de la fréquence, chapitre 4, p.146). Le fait que ces espèces, qui
colonisent une variété de milieux, peuvent être caractéristiques de végétations spontanées,
éclaire sur les flux d’espèces ayant lieu dans des paysages fragmentés.
2- Espèces étrangères, plantées
Ces espèces, non spontanées dans la région, sont plantées dans les villages, haies, vignes Aesculus hippocastanum L., Juglans regia L., Morus alba L., Tilia platyphyllos Scop.
3- Espèces étrangères, naturalisées
Nous les trouvons dans les formations spontanées (pelouse, fruticée, bois), fréquemment
disséminées par ornithochorie : Prunus cerasus L., Prunus laurocerasus L., Viburnum tinus L.
1. 6 -
Relations entre groupements végétaux
La description de chaque groupement végétal nous a permis de hiérarchiser les facteurs,
naturels et anthropiques, qui influencent la distribution de la végétation et sa composition
floristique. Nous observons ainsi que certains de ces facteurs sont plus prépondérants que
d’autres. Ils permettent de dégager des relations entre groupements végétaux que nous
décrivons maintenant (cf. Figure 47). L’analyse du poids des facteurs nous amène ainsi à
distinguer deux types de terrain : les terrains non propices à la mise en valeur agricole et les
terrains propices.
254
- Les terrains non propices à la mise en valeur agricole sont sous l’effet de la conquête de la
végétation spontanée, aboutissant au final à la chênaie caducifoliée. Les facteurs explicatifs de
cette évolution sont d’ordre naturel. En effet, les conditions naturelles de station déterminent,
de manière directe ou indirecte, la possibilité de mise en valeur agricole. De manière directe,
les terrains situés en fond de vallon avec des sols détrempés ou en exposition globalement
Nord, offrant peu d’ensoleillement, sont contraignants pour la mise en culture. De manière
indirecte, les terrains sur des pentes fortes ou détrempés empêchent le travail des lourds
tracteurs, apparus avec la modernisation des pratiques agricoles dans les années 50. Cette
évolution dans l’utilisation du sol a entraîné la mise en place de la dynamique progressive de
la végétation, avec passage par les différents stades intermédiaires - friche, pelouse/prairie,
fruticée (cf. Figure 46). La dynamique peut prendre deux chemins, selon les conditions
hydriques du sol.
Sur les terrains secs (occasionnés notamment, comme nous l’avons vu, par une forte pente),
les formations boisées appartiennent à la Chênaie neutrophile sur sol équilibré avec l’alliance
du Quercion pubescenti. Les formations herbacées intermédiaires correspondent à une forme
dégradée dense du Mesobromion erecti. L’absence d’entretien permet l’embuissonement de la
formation, lent car freiné par une végétation herbacée dense, qui amène à la phase de la
fruticée (fourrés).
Sur les terrains détrempés (occasionnés notamment dans les fonds de vallon), les formations
boisées qui s’y développent, appartiennent à la Chênaie oligotrophe acidophile avec l’alliance
du Quercion robori-petraeae. Les formations herbacées intermédiaires correspondent à des
prairies avec l’alliance de l’Arrhenatherion elatioris. La phase suivante sera celle de la
fruticée, qui apparaît assez rapidement sans intervention anthropique, grâce à des conditions
hydriques satisfaisantes. Dans certains cas, les groupements herbacés, prairiaux,
intermédiaires ont pu se maintenir sur une période de temps relativement longue, grâce à une
intervention anthropique - fauchage, pâturage.
Figure 46. Schéma de la dynamique progressive de la végétation en Lauragais, après abandon
de terres cultivées
Le schéma ci-dessus montre notamment l’importance du vent et des animaux, comme facteurs
de transport des graines et de colonisation de la végétation, importance déjà mise en évidence
dans le chapitre 4.
255
- Les terrains propices à la mise en valeur agricole, généralement d’exposition globale sud,
situés sur des terrains plats ou de faible pente, relativement bien drainant, sont dominés par
l’activité anthropique. La dominance des terres agricoles sur les sites d’étude explique la
représentation majoritaire de ces terrains par une végétation spécifique, adventice. S’y
rencontre secondairement, dans les espaces marginalisés, la végétation des espaces rudéralisés
et de bord des eaux, ainsi que la végétation des haies. Ces terrains sont également utilisés pour
l’aménagement urbain (lac collinaire, village). La flore spontanée qui y croît est caractérisée
par des espèces héliophiles, à large aire de répartition, adventices et rudérales (cf. chapitre 4).
S’y adjoignent des espèces des formations végétales spontanées, révélant le rôle que peuvent
jouer les espaces anthropiques comme zone d’échange et de flux de graines. Les milieux
anthropiques sont le siège d’installations d’espèces allochtones, notamment les bords de route,
installations favorisées par une circulation automobile de plus en plus intense (cf. chapitre 4).
Les différentes formations aquatiques associées à ces espaces anthropisés (fossés, mare,
étang, lac) regroupent une végétation typique des bords des eaux (espèces hygrophiles
anémochores) qui peut s’enrichir, à partir des parcelles environnantes mais aussi à partir de la
nature passée de la parcelle, d’espèces prairiales, forestières, adventices et rudérales,
témoignant des échanges d’espèces qui s’opèrent dans l’espace et dans le temps. Enfin, les
espaces anthropisés peuvent être complétés de haies, renfermant une flore variée, plus ou
moins arborée selon son ancienneté.
Figure 47. Schéma de l’organisation et de l’utilisation de l’espace en 2001
256
Conclusion sur la flore actuelle lauragaise
La composition floristique est déterminée par différents facteurs, naturels et anthropiques. Les
facteurs naturels prédominants s’avèrent être l’humidité du sol, la pente, la topographie. Les
pratiques agricoles - culture, pâturage, fauchage - actuelles ou passées sont déterminantes
dans ces espaces fortement anthropisés. Interviennent également certaines caractéristiques
intrinsèques aux espèces, à savoir le mode de dissémination, l’affinité pour la lumière, pour
l’humidité du sol et l’acidité du sol. Tous ces facteurs interagissent entre eux, dans l’espace et
dans le temps, déterminant l’installation et les flux d’espèces à l’intérieur et entre les
formations végétales (cf. Figure 48).
L’étude des différents types de végétation, à travers l’AFC, révèle les liens qui existent entre
eux. Chaque groupement végétal n’est pas une entité isolée ; il est lié par des relations
multiples avec les groupements voisins. Par voisins, nous entendons « contigus », c’est-à-dire
liés par des relations spatiales, mais aussi liés temporellement dans les cas où ils se succèdent
les uns aux autres au cours du temps dans une même station. Ils sont donc en relations
dynamiques, comme décrites par Bournérias, (Bournérias et al., 2001). Ainsi, les pelouses ou
prairies, les fruticées et les bois entretiennent des relations dynamiques, formées par des
espèces qui leurs sont spécifiques et des espèces qui témoignent de la transition entre deux
stades de la dynamique1. Les espaces laissés à l’abandon et écartés de toutes interventions
anthropiques évoluent dans le sens d’une dynamique progressive. Les lieux anciennement
cultivés font place à une végétation herbacée héliophile, rudérale, puis progressivement des
espèces prairiales s’installent2. Suivant les conditions du milieu (pente, exposition), ces
espèces seront plutôt à tendance xérophile ou plutôt à tendance hygrophile. Nous avons vu
que les formations spontanées pouvaient être composées d’espèces caractéristiques des lieux
incultes rudéralisés. Cet état de fait peut illustrer l’évolution de la végétation d’une parcelle,
suite à un changement de l’occupation du sol. Si ce changement peut s’opérer en un temps
relativement court, la flore en place réagit de manière différée et les espèces présentes peuvent
persister longtemps même si les conditions optimales ne sont plus assurées. Aussi, ces
formations marquées par une dynamique naturelle peuvent être considérées comme des
réservoirs temporaires d’une végétation relique qui ne trouve plus les milieux auxquelles elle
est inféodée pour prospérer. C’est le cas des adventices et rudérales dans les pelouses, citées
dans les flores passées, présentes dans les cultures. Exemple aussi du cas remarquable de
Bellevalia romana, citée autrefois dans les cultures et prés, et présente aujourd’hui strictement
dans les prairies du Lauragais (cf. chapitre 4). La prairie concernée était en culture avant
1948, d’après les données du chapitre 3. Nous pouvons donc nous demander si cette plante
était présente en 1885 dans la parcelle encore en culture.
1
Voir à ce sujet le processus successionnel après une perturbation, décrit par Blondel (Blondel, 1995a).
À partir de l’observation de la flore d’une jachère permanente, non cultivée depuis 7 ans, fauchée et parfois
sarclée, non désherbée, non labourée, dans la région toulousaine (Belhacène, 2002), il est intéressant de constater
que nous avons trouvé la plupart des espèces adventices et rudérales citées, dans les formations prairiales.
Ceci révèle d’une part le maintien de ces espèces durant les phases successives de la dynamique progressive, et
d’autre part la colonisation progressive des espaces anthropisés abandonnés par un cortège d’espèces prairiales 2
Agrostis capillaris L., Ajuga reptans L., Artemisia vulgaris L., Bituminaria bituminosa (L.) E.H. Stirton, Blackstonia
perfoliata (L.) Hudson, Bromus diandrus Roth, Bromus hordeaceus L., Capsella bursa-pastoris (L.) Medik., Crepis
capillaris (L.) Wallr., Crepis sancta (L.) Bornm., Datura stramonium L., Daucus carota L., Dipsacus fullonum L., Geranium
molle L., Gladiolus italicus Miller, Hypericum perforatum L., Lactuca serriola L., Lactuca virosa L., Lathyrus hirsutus L.,
Lotus corniculatus L., Medicago lupulina L., Odontites vernus (Bellardi) Dumort. ssp. serotinus (Dumort.) Corb., Orchis
purpurea Hudson, Prunella laciniata (L.) L., Prunella vulgaris L., Ranunculus acris L., Rubus sp, Sixalix atropurpurea (L.)
Greuter & Burdet ssp. maritima (L.) Greuter & Burdet, Tragopogon pratensis L., Vicia lutea L., Vicia sativa L.
257
Figure 48. Schéma synthétique des relations actuelles entre groupements végétaux et mise en
évidence des flux majeurs d’espèces entre formations végétales
258
2-
Facteurs influençant la végétation passée
De la même manière que nous avons procédé pour la liste floristique actuelle, l’analyse de la
végétation passée est effectuée par la description des différentes formations végétales
présentes. Pour cela, nous testons, par AFC, la liste floristique de 1885 selon la présence /
absence de chaque espèce recensée dans les différents types de milieux (cf. chapitre 4, p.129)
référencés par l’auteur (cf. Tableau 32).
bois
bois humide
bois siliceux
buissons
chemins
clairières
coteaux secs
cours d'eau
cultivé
cultures
décombres
étendue d'eau
fossés
friches
habitations
haies
jardins
lieux meubles
lieux sec sablonneux
lieux vagues
moissons
murs
pâturages
pelouses
planté
prairie
talus
vignes
Tableau 32. Milieux simplifiés (28), citées en 1885
Dans une volonté d’harmonisation des différentes données analysées (actuelles et passées), les
milieux de type ‘cultivées’, ‘plantées’ ou ‘jardins’ et les espèces associées (58), cités en 1885,
sont enlevés du tableau de données avant de lancer l’AFC. Ces milieux et espèces feront
l’objet d’une analyse à part dans les cas qui soulèvent la réflexion (par exemple, espèce
naturalisée ou subspontanée). Dans le cas des espèces cultivées qui sont citées dans les
formations spontanées, elles sont maintenues dans le tableau de données. Par ailleurs, le
milieu de type ‘bois siliceux’ est exclu de l’AFC, car se différenciant nettement de tous les
autres types et limitant les possibilités de discrimination des autres types de formation. Il sera
analysé de manière indépendante. L’AFC est en définitive lancée sur un tableau composé des
699 observations (espèces) en ligne et des 24 modalités de variables (milieux) en colonne.
2. 1 -
Valeurs propres
Tableau 33. Histogramme des valeurs propres
Aux vues de l’allure de l’histogramme des valeurs propres (cf. Tableau 33), nous choisissons
d’examiner en détail les quatre premiers facteurs. Ils restituent quasiment 26 % de la variance
totale. Les AFC sont présentées après application du critère de qualification (contribution
supérieure au seuil de 5%). Un premier coup d’œil sur la projection des relevés et des espèces
dans les plans factoriels montre une répartition des points-lignes et points-colonnes en
groupes distincts, que nous allons caractériser maintenant selon les espèces et les relevés qui
constituent ces sous-populations.
259
2. 2 -
Étude des axes factoriels
Pour chaque axe factoriel retenu (1, 2, 3 et 4), nous prenons en compte les coordonnées de
chaque point-ligne et point-colonne sur les axes et les contributions relatives des points à la
variance (cf. Annexe 9). Nous retenons les points dont la contribution est supérieure au seuil
de significativité (cf. p199), en tant qu’éléments les plus explicatifs pour chaque axe
considéré. Nous considérons la liste des espèces et relevés caractéristiques, en opposant les
coordonnées négatives et positives.
Axe Observations
1 Opposition selon les conditions
hydriques du sol, mais aussi selon
le degré d’anthropisation
Interprétation de l’axe
Des milieux colonisés par une végétation herbacée et
représentant des espaces anthropisés aux milieux
hydriques
2
Opposition selon la strate
dominante
Des formations représentées par une strate arborée
dominante aux autres formations dominées par la strate
herbacée
3
Opposition selon le degré de
rudéralisation
Des formations de type moisson aux formations
rudéralisées
4
Opposition selon la strate
représentée et les exigences en
humidité de sol
Des formations boisées humides aux formations
herbacées sèches
2. 3 -
Apport des variables supplémentaires, taxonomiques
Seules les variables taxonomiques sont connues et peuvent être utilisées (cf. p.202). Elles ne
présentent pas toutes la même significativité. Seule les variables significatives sont
considérées comme influençant la végétation et leurs modalités sont étudiées.
2. 3. 1 -
Significativité des variables supplémentaires
La significativité des variables est testée pour les quatre premiers facteurs.
Variable
Gp écologique
Aire répartition
Dissémination
Lumière
Humidité
Type biologique
Richesse
Axe1
0.000***
0.000***
0.000***
0.000***
0.000***
0.000***
-0.052
Axe2
0.000***
0.000***
0.000***
0.000***
0.000***
0.000***
0.006
Axe 3
0.000***
0.075
0.168
0.000***
0.025*
0.659
-0.066
Axe4
0.000***
0.014*
0.001***
0.000***
0.000***
0.371***
-0.276
P<0.05, ** P<0.01, *** P<0.001. En gras, valeurs significatives < à 0,05
Pour la variable qualitative (richesse), la valeur de corrélation est indiquée.
Tableau 34. Significativité de la contribution des variables aux quatre premiers axes
260
D’après l’analyse inférentielle (cf. Tableau 34), nous constatons des contributions différentes
des variables supplémentaires aux axes considérés. Les modalités des variables significatives
sont testées par la suite, pour chaque axe considéré. Toutefois, avant de lancer l’analyse des
modalités pour les variables significatives, nous observons la fréquence de chaque modalité
pour les variables qualitatives traitées (cf. Tableau 35). L’observation montre que toutes les
modalités des variables ne sont pas représentées avec la même fréquence. Or, les modalités
ayant une faible fréquence (marquées en gras dans les tableaux) peuvent se comporter comme
des artefacts et entraîner des erreurs dans les comparaisons des variances, en se révélant
comme significatives et en s’individualisant par rapport à toutes les autres modalités dans
l’analyse des modalités. Aussi, nous les écartons de l’analyse des modalités.
Gp écolog
aqu 18
cul 23
Pio 25
prg 61
mar 66
adv 120
prm 133
for 135
rud 176
Aire répartition
Eurosi
6
25
Intro
35
Atlant
Circum 50
Méd-atl 78
Cosmo 80
90
Europ
166
Médit
227
Euras
Dissémination
8
Autoch
28
Hydroch
56
Myrméco
57
Endozoo
186
Épizoo
192
anémoch
230
Baroch
Lumière
Scia
33
211
Phot
hélio
513
Humidité
Larg ampl
12
Hygro
43
Xéro
95
Mésohygro
113
220
Méso
mésoxéro
274
Typ biologique
Arbre
25
Chaméph
28
Arbust
33
Géoph
86
267
Théroph
hémicrypto
318
Tableau 35. Tableau des fréquences des modalités des variables ‘traits de vie’
2. 3. 2 -
Étude des modalités pour les variables supplémentaires significatives
Pour chaque axe, nous étudions la variance des modalités, sans les modalités peu représentées
(cf. p.203). Les valeurs indiquées entre parenthèse correspondent aux coordonnées moyennes
des modalités sur l’axe étudié.
Axe 1
Groupe
écologique
Aire de
répartition
Dissémination
Exigences en
lumière
Exigences en
humidité
Type
biologique
Les groupes écologiques ‘aquatiques’ (2.099) et ‘marais‘ (1.495) s’opposent à tous les autres
groupes écologiques. Les adventices (-0.818) s’opposent à tout sauf aux cultivées (-0.813) et aux
pionnières (-0.478). Les forestières (0.366) et les prairies grasses (0.271) s’opposent à tout sauf
entre elles. Les prairies maigres (-0.181) s’opposent à tout sauf aux pionnières et aux cultivées. Les
rudérales (-0.455) s’opposent à tout sauf aux cultivées et aux pionnières.
Remarque : Les pionnières et les cultivées sont en fait assez peu représentées, et elles le sont encore
moins après application d’un critère de qualification. Les autres groupes écologiques qui sont
uniquement associés à ces deux groupes -adventices, prairies maigres, rudérales- sont finalement
indépendants de toutes les autres modalités
Les espèces méditerranéennes (-0.369) s’opposent aux espèces atlantiques (0.303), circumboréales
(0.469), eurasiatiques (0.166), et méditerraneo-atlantiques (0.085). Les circumboréales s’opposent
aux cosmopolites (-0.249), aux européennes (-0.154) et aux méditerranéennes. Mais il n’y pas
clairement de modalités indépendantes des autres
Le mode de dissémination ‘hydrochore’ (1.762) s’oppose significativement aux autres modes
La modalité ‘héliophiles’ (-0.181) s’oppose aux modalités photophiles (0.324) et sciaphiles (0.441)
Les modalités ‘hygrophile’ (1.988), ‘mésophile’ (-0.046) et ‘mésohygrophile’ (0.622)
s’individualisent sur l’axe 1, vis à vis des exigences des espèces en humidité du sol
La modalité ‘thérophyte’ (-0.557) s’opposent à tout sauf à ‘chaméphyte’ (-0.253) qui s’oppose ellemême à ‘géophyte’ (0.526)
261
Axe 2
Groupe
écologique
Aire de
répartition
Dissémination
Exigences en
lumière
Exigences en
humidité
Type
biologique
Axe 3
Groupe
écologique
Exigences en
lumière
Exigences en
humidité
Axe 4
Groupe
écologique
Aire de
répartition
Dissémination
Exigences en
lumière
Exigences en
humidité
2. 3. 3 -
Les modalités ‘adventice’ (0.852), ‘aquatique’ (1.060) et ‘cultivée’ (0.619) forment un ensemble qui
s’oppose aux autres groupes écologiques. Il en est de même pour l’ensemble constitué par les
modalités ‘prairie maigre’ (-0.514), ‘forestière’ (-0.770) et ‘prairie grasse’ (-0.480)
La modalité ‘cosmopolite’ (0.553) s’oppose aux modalités ‘atlantique’ (-0.122), ‘eurasiatique’ (0.119), ‘européenne’ (-0.075) et ‘méditérranéo-atlantique’ (-0.257). La modalité ‘introduite’ (0.995)
s’oppose aux modalités ‘eurasiatique’ et ‘méditérranéo-atlantique’. La modalité ‘méditérranéoatlantique’ à la modalité ‘méditerranéenne’ (0.162)
La modalité ‘hydrochore’ (0.840) s’oppose aux autres modalités. La modalité ‘endozoochore’ (0.719) s’oppose aux modalités ‘anémochore’ (0.027) et ‘barochore’ (0.155). La modalité
‘myrmécochore’ (-0.331) à la modalité ‘barochore’
La modalité ‘héliophile’ (0.140) s’oppose aux modalités photophile (-0.153) et sciaphile (-0.561)
La modalité ‘hygrophile’ (0.922) s’oppose aux autres modalités
La modalité ‘thérophyte’ (0.514) s’oppose aux autres modalités. La modalité ‘arbuste’ (-0.869)
s’opposent aux modalités désignant des plantes herbacées
Les adventices (0.552) s’opposent à tout sauf aux forestières (0.293) et aux prairies grasses (0.264).
Les pionnières (-1.043) s’opposent à tout sauf aux aquatiques (-0.247) et aux cultivées (-0.797). Les
rudérales (-0.276) s’opposent aux adventices, aux forestières, aux pionnières et aux prairies grasses
Les héliophiles (-0.062) s’opposent aux photophiles (0.296) et aux sciaphiles (0.121)
Les plantes xérophiles (-0.227) s’opposent aux mésoxérophiles (0.122) et probablement aux
mésohygrophiles (0.156)
Les forestières (0.410) s’opposent à tout sauf aux pionnières (0.766), aux cultivées (0.551) et aux
prairies grasses (0.373). Les pionnières s’opposent à tout sauf aux cultivées et aux prairies grasses.
Les prairies maigres (-0.398) s’opposent à tout sauf aux aquatiques (-0.581), aux cultivées et aux
plantes de marais (-0.116)
Nous n’observons pas de différence significative entre les modalités, malgré la significativité de la
variable sur l’axe 4
Les hydrochores (-0.503) s’opposent aux anémochores (0.169), aux endozoochores (0.213) et aux
myrmécochores (0.288)
Les héliophiles (-0.057) s’opposent aux photophiles (0.210) et aux sciaphiles (0.437)
Les hygrophiles (-0.424) s’opposent aux mésophiles (0.282), aux mésohygrophiles (0.206) et aux
xérophiles (-0.193). Ces dernières s’opposent aux mésohygrophiles (0.206). Les mésophiles
s’opposent aux hygrophiles, aux xérophiles et aux mésoxérophiles (-0.057)
Interprétation des axes d’après les variables supplémentaires
L’étude des facteurs ainsi que celle de la contribution des variables supplémentaires permet de
dégager la spécificité de chaque axe.
- L’axe 1 semble être un gradient opposant les formations selon les conditions hydriques du
sol, mais aussi selon le degré d’anthropisation.
Les coordonnées positives correspondent à des formations aquatiques à végétation spontanée,
tels que les étendues d’eau et les cours d’eau, caractérisées par des espèces photophiles et
sciaphiles, hygrophiles ou mésohygrophiles, et géophytiques. La végétation est une végétation
262
naturelle, peu empreinte par l’action anthropique. Nous pouvons distinguer deux types de
végétation selon un gradient d’exigence des espèces en humidité du sol.
- Une végétation rassemblant des plantes de marais et aquatiques, hygrophiles. Les
espèces se disséminent notamment par hydrochorie. La végétation révélée est celle des
cours d’eau et étendues d’eau (bords des ruisseaux, fossés à écoulement permanent,
fossés à écoulement temporaire, bord de mare, étangs).
- Une végétation rassemblant des espèces forestières et de prairies grasses,
mésohygrophiles ou mésophiles. La végétation révélée est celle des bois et prairies,
humides.
Les coordonnées négatives sont caractérisées par une végétation herbacée, représentant des
lieux cultivés et incultes, anthropisés tels que les cultures, les moissons, les murs, les
habitations, avec un cortège floristique caractérisé par des espèces héliophiles, mésophiles ou
mésoxérophiles et xérophiles, et thérophytiques et chaméphytiques. Nous distinguons
plusieurs groupements végétaux :
- Le groupement des espèces adventices, messicoles. Ce groupement correspond aux
relevés de type cultures et moissons.
- Le groupement des espèces rudérales. Ce groupement correspond aux relevés de type
murs et habitations.
- Le groupement des plantes de prairie maigre. Ce groupement correspond aux relevés
de type coteaux secs.
- L’axe 2 oppose les milieux selon la nature de la strate végétative dominante, induisant une
végétation arborée ou herbacée.
Les coordonnées négatives correspondent à des formations boisées - bois, haies, buissons caractérisée par des espèces des bois, prairie maigre et prairie grasse. Nous y trouvons des
espèces à aire de répartition européenne - atlantique, eurasiatique, européenne, méditerranéoatlantique - non hydrochores, notamment endozoochores et myrmécochores, sciaphiles ou
photophiles, non hygrophiles, arbustives.
Les coordonnées positives correspondent à des formations herbacées - moissons, cultures,
cours d’eau, étendue d’eau - caractérisées par des espèces adventices, aquatiques et cultivées.
La plupart sont à large aire de répartition – cosmopolites - introduites ou méditerranéennes,
hydrochores, anémochores ou barochores, héliophiles, hygrophiles, thérophytiques.
- L’axe 3 oppose les lieux anthropisés, cultivés, aux lieux incultes.
Les coordonnées négatives sont caractérisées par des formations rudéralisées et herbeuses murs, habitations, décombres, lieux vagues, lieux secs. Les espèces associées à cet axe sont
des plantes pionnières et des plantes rudérales, préférentiellement héliophiles, xérophiles.
Les coordonnées positives sont caractérisées par les formations de type moisson. Les plantes
associées à cet axe sont des adventices. Elles sont surtout photophiles, mésoxérophiles et
mésohygrophiles.
- L’axe 4 oppose les formations boisées humides aux formations herbacées plus ou moins
xériques.
Les coordonnées négatives caractérisent des formations herbacées, fraîches ou sèches coteaux secs, cours d’eau. Les espèces associées sont des espèces des prairies maigres
accompagnées par des aquatiques, des cultivées et des plantes de marais. La dissémination des
espèces est caractérisée par l’hydrochorie. Les espèces sont des héliophiles. Elles poussent
dans des conditions hydriques variables : elles sont soit hygrophiles, soit xérophiles. On
trouve notamment des méditerranéennes.
Les coordonnées positives caractérisent des formations boisées et herbacées humides - bois
humides, murs, prairies. Les espèces associées sont des forestières, accompagnées d’espèces
263
pionnières, cultivées et des prairies grasses. Les espèces se disséminent préférentiellement par
anémochorie, endozoochorie et myrmécochorie. Les espèces sont photophiles et sciaphiles et
poussent dans des conditions hydriques variables : espèces mésohygrophiles et mésophiles.
2. 3. 4 -
Interprétation des plans factoriels
À partir de l’interprétation des axes factoriels, nous pouvons réaliser celle des deux plans
factoriels. Cette interprétation éclaire sur la signification des nuages de points distribués sur
l’AFC. Ces nuages correspondent à des groupements végétaux particuliers que nous décrivons
par la suite.
Figure 49. Projection des types de milieu (en rouge) et des espèces (en vert) sur le plan factoriel
1-2. La taille des symboles est proportionnelle à la contribution des variables aux axes
Figure 50. Projection des types de milieu (en rouge) et des espèces (en vert) sur le plan factoriel
3-4. La taille des symboles est proportionnelle à la contribution des variables aux axes
264
a-
Plan factoriel 1-2
Interprétation de l’axe1,
- Coordonnées négatives : formations artificialisées, herbeuses, à tendance xérophile
- Coordonnées positives : formations aquatiques ou humides, à végétation spontanée
Interprétation de l’axe2,
- Coordonnées négatives : formations arborées
- Coordonnées positives : formations herbacées
L’analyse conjointe des axes 1 et 2 permet de caractériser plus finement la végétation, sa
distribution et sa composition spécifique, en fonction des traits de vie des espèces. Nous
pouvons ainsi identifier les formations herbeuses cultivées, les formations aquatiques et les
formations arborées.
b-
Plan factoriel 3-4
Interprétation de l’axe 3,
- Coordonnées négatives : formations rudéralisées et herbeuses
- Coordonnées positives : formations de type moisson.
Interprétation de l’axe 4,
- Coordonnées négatives : formations herbacées fraîches ou sèches
- Coordonnées positives : formations boisées et herbacées humides
Les informations apportées par la projection des observations et des variables supplémentaires
sur les axes permettent de caractériser les ensembles qui s’individualisent sur le plan factoriel
3-4 : les moissons, les formations humides, boisées et herbacées, les formations herbeuses,
fraîches ou sèches, les formations herbeuses rudéralisées.
2. 3. 5 -
Formations non caractéristiques des plans factoriels
Les formations non caractéristiques sur les plans factoriels 1-2 et 3-4, ainsi que les espèces
associées, sont annotées (cf. Annexe 8). Elles permettent d’étudier les formations végétales
non caractéristiques de la flore de Nailloux en 1885 ainsi que les espèces occasionnelles des
formations végétales caractéristiques. Les milieux non mis en évidence dans les AFC sont :
-
les chemins
les clairières
les fossés
les friches
les lieux meubles
-
les pâturages
les pelouses
les talus
les vignes
Les caractéristiques écologiques (traits d’histoire de vie) des espèces des formations non
caractéristiques permettent d’affiner la description de la végétation des différents
groupements végétaux mis en évidence. La plupart de ces formations appartiennent à un
groupement végétal plus large mis en évidence précédemment. Ainsi, les ‘vignes’ renferment
une végétation particulière qui est à rattacher à celle des ‘cultures’. De la même manière, les
‘friches’ en tant qu’ancien lieu cultivé, abandonné et colonisé par la végétation spontanée, est
265
rattaché aux ‘cultures’. Les ‘lieux meubles’ illustrent des conditions particulières de station
des formations herbeuses rudéralisées (murs, habitations, décombres). Les ‘talus’ et les
‘chemins’ sont rattachés aux formations herbeuses rudéralisées, correspondant à des lieux
incultes anthropisés. Les ‘fossés’ sont rattachés aux formations aquatiques (étendues d’eau et
cours d’eau). Les ‘clairières’ sont une formation associée aux ‘bois’. Les ‘pâturages’ et les
‘pelouses’ sont rattachés aux ‘coteaux secs’.
2. 4 -
Description des groupements végétaux : Interprétation de l’AFC
A partir de l’AFC, la typologie a permis d’individualiser trois groupements végétaux à partir
de la physionomie de la végétation, caractérisant douze formations végétales. Ces
groupements illustrent trois physionomies, que nous avons identifiées dans le chapitre 4 (cf.
p.167). La liste ci-après indique, pour les 7 variables « hypothético-explicatives » testées sur
les axes 1 à 4, le nombre de fois qu’elles se sont révélées significativement corrélées aux axes.
-
Groupe écologique
Exigences en humidité du sol
Exigence en lumière
Type biologique
Aire de répartition
Dissémination
4
4
4
3
3
3
Il en ressort que certaines variables participent plus que d’autres à l’explication de la
distribution des milieux et des espèces sur les plans factoriels, et donc à l’explication de la
distribution de la végétation et de sa composition floristique sur le territoire d’étude. Les
variables autécologiques étant les seules étudiées, la composition floristique de chaque type
de végétation est essentiellement liée à trois caractéristiques : le groupe écologique des
espèces, l’exigence des espèces vis à vis des conditions d’humidité du sol et de lumière.
Les AFC effectuées sur les espèces et les milieux, représentatifs de la végétation de 1885 pour
le site de Nailloux, révèlent l’importance du type de végétation et des conditions des milieux
sur la flore (habitat optimal de l’espèce, exigence en humidité du sol et en lumière).
2. 4. 1 -
Flore des groupements végétaux
L’analyse des plans factoriels 1-2 et 3-4 nous permet de mettre en évidence trois grands
groupements végétaux, composés de sous-groupements. Chacun de ces groupements regroupe
les formations citées par Haulier, certaines étant caractéristiques, d’autres occasionnelles.
a- Les formations herbeuses xériques
− Les lieux cultivés, caractérisés par les formations de type
1- ‘cultures’ et occasionnellement les ‘vignes’ et les ‘friches’
2- ‘moissons’
− Les lieux incultes rudéralisés, caractérisés par les formations de type
266
3- ‘murs’, ‘habitation’, ‘décombres’, ‘lieux vagues’ et ‘lieux secs
sablonneux’ et occasionnellement les ‘lieux meubles’, les ‘talus’ et
les ‘chemins’
− Les lieux herbeux incultes, caractérisés par les formations de type
4- ‘coteaux secs’
5- occasionnellement les ‘pelouses’ et les ‘pâturages’
b- Les formations aquatiques
− Les bords des eaux, caractérisés par les formations de type
6- ‘étendues d’eau’
7- ‘cours d’eau’ et occasionnellement les ‘fossés’
− Les milieux humides, caractérisés par les formations de type
8- ‘prairies humides’
9- ‘bois humides’
c- Les formations arborées non aquatiques, caractérisés par les formations de type
10- ‘bois’ et formations associées
occasionnellement les ‘clairières’
11- ‘haies’
12- ‘buissons’
-
coupes,
lisières
-
et
La description des groupements végétaux s’appuie sur les résultats obtenus dans l’analyse
spatiale, en prenant en compte notamment les pratiques agricoles suivies (cf. chapitre 3).
Comme pour la description des groupements végétaux actuels, les différents types de
végétation décrits pour chaque groupement sont inspirés de ceux cités par Bournérias (2001)
et, pour chacun de ces types, les espèces sont désignées selon leur affinité pour la formation
végétale correspondante (espèces caractéristiques -indicatrices de la végétation et des
conditions mésologiques en présence- compagnes, occasionnelles). Les types d’habitat,
pouvant être cités pour une espèce décrite, correspondent à l’habitat optimal dans lequel
pousse la plante, défini d’après Julve (2000). Nous décrivons maintenant chacun de ces trois
groupements et les douze types de formations végétales qu’ils renferment. Pour chaque
groupement, nous présentons, à la suite de sa description, un schéma synthétique qui résume
ses caractéristiques et les interactions possibles avec les autres groupements. Ces schémas
suivent le même modèle que celui employé pour la végétation actuelle (cf. Figure 45, p.219).
a- Les formations herbeuses xériques
Elles sont caractérisées par un cortège d’espèces héliophiles, mésophiles, ou mésoxérophiles
et xérophiles, thérophytiques et chaméphytiques. Trois sous-groupements se distinguent selon
le degré d’artificialisation :
-
les lieux cultivés - culture et moisson - fortement artificialisés,
les lieux incultes rudéralisés (murs, habitation, décombres, lieux vagues et lieux
secs sablonneux), moyennement artificialisés,
les lieux herbeux incultes à végétation spontanée (coteaux secs), faiblement
artificialisés.
267
- Les lieux cultivés correspondent aux formations de type ‘culture’ et ‘moisson’, caractérisés
par des espèces annuelles, héliophiles, à tendance xérophile, adventices et rudérales, dont les
graines sont disséminées par anémochorie, épizoochorie et barochorie. D’après les traits de
vie des espèces (affinité vis à vis des conditions d’humidité de sol), nous pouvons dire que les
lieux cultivés se situent sur des terrains bien drainés, le long des versants. Les cultures et
moissons présentent un cortège floristique commun, composé d’espèces messicoles et
rudérales -Ajuga chamaepitys (L.) Schreber, Anchusa arvensis (L.) M. Bieb., Anthemis cotula L. Avena sativa
L. (anciennement cultivée, considérée actuellement comme adventice), Bromus arvensis L.,
Cynosurus echinatus L., Hypericum humifusum L., Kickxia spuria (L.) Dumort., Lathyrus angulatus L.,
Leontodon saxatilis Lam. ssp. saxatilis, Lithospermum arvense L., Scandix pecten-veneris L., Torilis arvensis
(Hudson) Link ssp. arvensis, Vicia tetrasperma (L.) Schreber. La présence d’espèces rudérales marque
la dynamique progressive qui se met rapidement en place sans intervention anthropique. Les
‘vignes’ et les ‘friches’ sont associées aux lieux cultivés et sont décrites par la suite.
1- les cultures
La végétation “adventice” des lieux cultivés est plus spécifiquement caractérisée par un
cortège d’espèces adventices à tendance xérophile. Ce groupement d’adventices rassemble les
groupements associés aux cultures céréalières (annuelles commensales des cultures - Aphanes
arvensis L., Brassica rapa L. emend. Metzger ssp. oleifera (DC.) Metzger, Calendula arvensis L., Camelina
sativa (L.) Crantz, Capsella bursa-pastoris (L.) Medik., Chenopodium album L., Fumaria parviflora Lam.,
Herniaria hirsuta L., Medicago arabica (L.) Hudson, Papaver hybridum L., Papaver rhoeas L., Polycnemum
arvense L., Raphanus raphanistrum L., Reseda phyteuma L., Sinapis alba L., Veronica arvensis L., Veronica
triphyllos L.- et plus occasionnellement -Anagallis arvensis L., Anthemis arvensis L., Centaurea cyanus
L., Digitaria sanguinalis (L.) Scop., Fallopia convolvulus (L.) 'A. Löve, Galium tricornutum Dandy, Geranium
dissectum L., Lolium remotum Schrank (champs de lin), Lolium temulentum L., Mercurialis annua L.,
Myosotis discolor Pers. ssp. discolor, Papaver argemone L., Papaver dubium L., Rapistrum rugosum (L.) All.
[1785], Scleranthus annuus L., Senecio vulgaris L., Setaria verticillata (L.) P. Beauv., Setaria viridis (L.) P.
Beauv. ssp. viridis, Sonchus oleraceus L., Stachys arvensis (L.) L., Thymelaea passerina (L.) Cosson & Germ.,
Trifolium arvense L., Veronica hederifolia L., Vicia sativa L. ssp. nigra (L.) Ehrh., - et annuelles
commensales des moissons (messicoles) -Eruca sativa Miller, Fumaria densiflora DC., Iberis amara
L., Orlaya grandiflora (L.) Hoffm.- et plus occasionnellement -Alopecurus myosuroides Hudson.,
Anagallis foemina Miller, Gypsophila muralis L., Lathyrus aphaca L., Sherardia arvensis L., Vaccaria
hispanica (Miller) Rauschert, Valerianella rimosa Bast.) et les groupements associés aux cultures
sarclées et aux plantations fruitières permanentes (vignes, vergers… - Bupleurum subovatum Link
ex Sprengel, Diplotaxis muralis (L.) DC., Euphorbia helioscopia L., Euphorbia platyphyllos L., Fumaria
officinalis L., Lamium amplexicaule L., Veronica agrestis L., Veronica persica Poiret- et plus
occasionnellement -Crepis pulchra L., Eragrostis cilianensis (All.) Janchen, Euphorbia peplus L., Lepidium
campestre (L.) R. Br., Sonchus asper (L.) Hill, ). Les groupements associés aux cultures denses non
sarclées ne possèdent pas d’espèces caractéristiques (prairies artificielles, luzernières…
occasionnellement - Crepis vesicaria L. ssp. taraxacifolia (Thuill.) Schinz & R. Keller, Galeopsis
angustifolia Hoffm., Iberis pinnata L., Odontites vernus (Bellardi) Dumort. ssp. serotinus (Dumort.) Corb., ).
La végétation spontanée est donc présente dans deux grands types de cultures : les cultures
céréalières et les cultures sarclées.
Les variations locales de station permettent l’installation d’espèces mésophiles et
mésohygrophiles, ces espèces ayant une valence écologique large -Brassica nigra (L.) Koch,
Lamium purpureum L., Matricaria perforata Mérat, Poa annua L., Solanum nigrum L., Urtica dioica L., Urtica
urens L.
Les cultures sont accompagnées d’une diversité d’espèces rudérales, des tonsures annuelles Bupleurum tenuissimum L., Catapodium rigidum (L.) C.E. Hubbard, Cerastium glutinosum Fries, Coronilla
268
scorpioides (L.) Koch, Erodium cicutarium (L.) L'Hérit., Euphorbia exigua L., Filago pyramidata L., Filago
vulgaris Lam., Galium parisiense L., Geranium columbinum L., Linum trigynum L., Logfia gallica (L.) Cosson
& Germ., Myosotis ramosissima Rochel, Polycarpon tetraphyllum (L.) L., Pseudognaphalium luteo-album (L.)
Hilliard & Burtt, Ranunculus sardous Crantz, Sagina apetala Ard., Silene gallica L., Trifolium campestre
Schreber, Valerianella eriocarpa Desv., Xeranthemum cylindraceum Sibth. & Sm.- annuelles pionnières
des clairières et lisières -Arabidopsis thaliana (L.) Heynh., Cardamine hirsuta L., Lapsana communis L.,
Ranunculus parviflorus L., Valerianella carinata Loisel., Valerianella locusta (L.) Laterrade- des friches
annuelles -Amaranthus graecizans L. ssp. silvestris (Vill.) Brenan, Ammi majus L., Borago officinalis L.,
Chenopodium vulvaria L., Crepis foetida L., Myosotis arvensis Hill, Pisum sativum L. (cité dans les blès),
Pulicaria vulgaris Gaertn., Xanthium spinosum L.- des friches vivaces -Allium pallens L., Allium vineale L.,
Anchusa italica Retz., Aristolochia clematitis L., Elytrigia repens (L.) Desv. ex Nevski, Foeniculum vulgare
Miller, Lactuca saligna L., Linaria vulgaris Miller., Muscari neglectum Guss. ex Ten., Ornithogalum
umbellatum L., Reseda luteola L., Rumex obtusifolius L., Senecio jacobaea L., Silene latifolia Poiret ssp. alba
(Miller) Greuter & Burdet, Tussilago farfara L.
Plus occasionnellement, se trouvent -Cardaria draba (L.) Desv., Carduus nutans L., Centaurea
solstitialis L., Chondrilla juncea L., Cichorium intybus L., Cirsium arvense (L.) Scop., Cirsium eriophorum (L.)
Scop., Cirsium vulgare (Savi) Ten., Convolvulus arvensis L., Cynoglossum creticum Miller, Dipsacus laciniatus
L., Echinochloa crus-galli (L.) P. Beauv., Equisetum arvense L., Euphorbia stricta L., Gnaphalium uliginosum
L. Certaines de ces espèces sont également citées dans les jachères -Alyssum alyssoides (L.) L.,
Anchusa italica Retz., Aristolochia clematitis L., Coronilla scorpioides (L.) Koch, Erodium cicutarium (L.)
L'Hérit., Fumaria densiflora DC., Fumaria parviflora Lam., Iberis amara L., Leontodon saxatilis Lam. ssp.
saxatilis, Lotus glaber Miller, Nigella gallica Jordan, Raphanus raphanistrum L., Viola arvensis Murray ssp.
arvensis.
Cette diversité d’espèces rudérales peut illustrer deux phénomènes : d’une part, l’apparition
courante de jachères, où s’installent des espèces rudérales lorsque les terres ne sont pas
labourées pendant un certain temps, et correspondant à la première phase de colonisation de la
dynamique progressive de la végétation spontanée ; d’autre part, un entretien rationnel par
désherbage, avec des techniques traditionnelles relativement peu destructrices.
Des espèces de végétations spontanées, caractéristiques des formations boisés humides -Poa
nemoralis L.- et caractéristiques des coteaux secs -Cirsium acaule Scop., Helleborus foetidus L.colonisent les cultures. Sont également présentes des espèces prairiales -Acinos arvensis (Lam.)
Dandy, Agrimonia eupatoria L., Allium oleraceum L., Alyssum alyssoides (L.) L., Bituminaria bituminosa (L.)
E.H. Stirton, Brassica oleracea L., Cerastium fontanum Baumg. ssp. vulgare (Hartm.) Greuter & Burdet,
Dactylis glomerata L., Eryngium campestre L., Euphorbia flavicoma DC. 2, 3, 4, 5 ssp. verrucosa (Fiori)
Pignatti, Festuca rubra L., Filipendula vulgaris Moench, Leontodon autumnalis L., Leucanthemum vulgare
Lam., Lolium multiflorum Lam., Lotus glaber Miller, Ononis natrix L., Ononis spinosa L. ssp. maritima
(Dumort. ex Piré) P. Fourn., Potentilla reptans L., Ranunculus bulbosus L., Salvia pratensis L., Salvia
verbenaca L., Solanum dulcamara L., Trifolium filiforme L., Trifolium scabrum L., Verbascum lychnitis L.,
Veronica serpyllifolia L.- des espèces des formations boisés (ourlets, buissons, bois, clairières) Cydonia oblonga Miller, Muscari comosum (L.) Miller, Ranunculus ficaria L., Sambucus ebulus L. Leur
présence peut être due à des conditions de lumière favorables et surtout peut illustrer
l’apparition de friches, avec colonisation à partir de zones-sources, grâce à des modes de
dissémination efficaces (épizoochorie et anémochorie).
La végétation des vignobles traditionnels renferme une flore commune à une diversité de
formations. L’on y trouve des espèces compagnes des cultures -Myosotis ramosissima Rochel-, des
formations herbeuses rudéralisées, à haute valence écologique -Bellis perennis L., Conyza
canadensis (L.) Cronq., Mibora minima (L.) Desv., Picris hieracioides L.-, des bois et formations
associées (clairières) -Agrimonia eupatoria L., Cardamine flexuosa With.-, et des coteaux secs Helleborus foetidus L., Melilotus albus Medik., Orchis purpurea Hudson. Plus occasionnellement -Allium
pallens L., Allium paniculatum L., Allium vineale L., Aristolochia clematitis L., Calendula arvensis L.,
269
Elytrigia repens (L.) Desv. ex Nevski, Fumaria officinalis L., Odontites luteus (L.) Clairv., Oxalis corniculata
L., Reseda phyteuma L., Salix caprea L., Sedum rupestre L., Silene gallica L., Trifolium filiforme L., Trifolium
hybridum L. ssp. elegans (Savi) Ascherson & Graebner, Valerianella carinata Loisel.
La végétation des friches se développe sur des terres agricoles abandonnées, caractérisée par
une végétation des lieux incultes (formations herbeuses rudéralisées) -Cerastium glomeratum
Thuill., Conyza canadensis (L.) Cronq., Minuartia hybrida (Vill.) Schischkin ssp. tenuifolia (L.) Kerguélen,
Picris hieracioides L., Stellaria media (L.) Vill., Torilis nodosa (L.) Gaertner., Urospermum dalechampii (L.)
Scop. ex F.W. Schmidt. Y sont encore présentes des espèces caractéristiques des cultures et des
moissons -Acinos arvensis (Lam.) Dandy, Alyssum alyssoides (L.) L., Cardamine hirsuta L., Fallopia
convolvulus (L.) 'A. Löve, Leontodon saxatilis Lam. ssp. saxatilis, Nigella gallica Jordan., Solanum nigrum L.,
Veronica arvensis L. Progressivement, cette végétation est colonisée par des espèces,
caractéristiques ou non, des formations spontanées, des coteaux secs -Thymus pulegioides L.,
Veronica austriaca L. ssp. teucrium (L.) D.A. Webb.- et des formations boisées (bois, ourlets) -Carex
sylvatica Hudson, Clinopodium vulgare L., Coriaria myrtifolia L., Genista scorpius (L.) DC., Lithospermum
purpureocaeruleum L., Origanum vulgare L., Stachys officinalis (L.) Trévisan, Teucrium scorodonia L., Ulmus
minor Miller- plus occasionnellement, -Aceras anthropophorum (L.) Aiton fil., Blackstonia perfoliata (L.)
Hudson. La plupart de ces espèces se disséminent par anémochorie (favorisée par un milieu
ouvert) et épizoochorie (animaux d’élevage ?). Les friches1 illustrent la première phase de
colonisation de la végétation spontanée sur des terres agricoles abandonnées, faisant suite à la
jachère, qui peut se résumer à une friche temporaire.
2- les moissons
La végétation des moissons correspond aux parcelles cultivées, après fauchage de la céréale et
regroupe des espèces particulières en plus de celles en commun avec les cultures,
mésoxérophiles et mésohygrophiles, annuelles commensales des moissons (messicoles) à
tendance xérophile -Adonis annua L., Agrostemma githago L., Bupleurum rotundifolium L., Legousia
speculum-veneris (L.) Chaix, Turgenia latifolia (L.) Hoffm.- dont certaines méditerranéennes -Asperula
arvensis L., Euphorbia falcata L., Neslia paniculata (L.) Desv., Nigella gallica Jordan, Ranunculus arvensis L.,
Vicia villosa Roth ssp. varia (Host) Corb.- et certaines hygrophyles, suivant les variations locales de
station -Dittrichia graveolens (L.) W. Greuter, Vicia sativa L. ssp. segetalis (Thuill.) Celak. Des rudérales Avena sterilis L. ssp. ludoviciana (Durieu) Nyman, Gladiolus italicus Miller, Mentha arvensis L., Petroselinum
segetum (L.) Koch. La présence d’espèces rudérales marque la dynamique progressive qui se met
rapidement en place sans intervention anthropique. Plus occasionnellement, l’on trouve Ajuga
chamaepitys (L.) Schreber, Anchusa arvensis (L.) M. Bieb., Anthemis cotula L., Bromus arvensis L.,
Chaenorrhinum minus (L.) Lange, Kickxia spuria (L.) Dumort.
1
Pour Lieutaghi, (1986), il y a une distinction à faire entre la jachère et la friche au niveau du cortège
floristique. La jachère, milieu de brève transition, héberge des plantes annuelles ou bisannuelles capables de
fleurir et de fructifier entre deux labours, alors que la friche, témoin d’un abandon d’au moins deux ans, voit la
progression rapide des vivaces.
270
Photo 30. Flore des cultures
Camelina sativa Crantz Veronica triphyllos L. Scleranthus annuus L. Bupleurum subovatum Link
Photo 31. Flore des moissons
Agrostemma githago L
Asperula arvensis L.
Neslia paniculata (L.) Desv. Dittrichia graveolens
Photo 32. Flore des vignobles
Mibora minima (L.) Desv.
Helleborus foetidus L. Allium vineale L. Aristolochia clematitis L.
271
En résumé pour la végétation passée des lieux cultivés
Figure 47-j.
Schéma synthétique pour la végétation passée des lieux cultivés
Les ‘cultures’ et les ‘moissons’ sont des formations présentes sur des sols bien drainés, non
gorgés d’eau, le long du versant.
272
Pour les cultures, la flore associée à la plante cultivée colonise deux grands types de cultures :
les cultures céréalières et les cultures sarclées, les cultures denses non sarclées n’ayant pas
d’espèces caractéristiques.
Les terres temporairement non cultivées laissent la place à la ‘jachère’ ou à la ‘friche’ dans
lesquelles s’installent un cortège diversifié de plantes rudérales, accompagnées de plantes des
formations prairiales, révélant soit un flux d’espèces efficace entre groupements végétaux
(favorisé par une forte proportion de corridors végétaux à l’époque ?), soit le maintien des
espèces (surtout pour les rudérales) dans le sol sous forme de graines, entrées en dormance
pendant la mise en culture (révélant un non-désherbage des cultures et un labour peu profond
non destructeur des bulbes dans le cas des géophytes). Le cortège floristique des friches
illustre la première phase de colonisation des espaces non entrenus, de la dynamique
progressive.
La végétation des ‘moissons’ apparaissant après le fauchage de la céréale cultivée est
représentée par une diversité d’espèces messicoles, considérées comme ayant actuellement
une valeur patrimoniale élevée. Cette diversité révèle des pratiques agricoles non intensives
(au niveau de l’utilisation d’herbicides, du tri de semences, du sarclage).
273
3- Les lieux incultes rudéralisés
Ils correspondent à des formations herbeuses de type ‘murs’, ‘habitations’ et ‘décombres’,
caractérisant la végétation des lieux incultes anthropisés. Ils rassemblent par ailleurs les ‘lieux
secs sablonneux’, les ‘lieux vagues’ et les ‘lieux meubles’, ces derniers n’étant pas
caractéristiques des plans factoriels étudiés (cf. p.265). Les ‘talus’ et les ‘chemins’ font
également partie des formations herbeuses xériques rudéralisées.
La végétation des lieux incultes anthropisés a la particularité d’être colonisée par des espèces
préférentiellement héliophiles, xérophiles thérophytes, des espaces anthropisés ‘ouverts’
(plantes pionnières et rudérales), se disséminant préférentiellement par anémochorie et
épizoochorie. La majorité des espèces sont soit à large aire de répartition (cosmopolites,
circumboréales), soit méditerranéennes. Certaines sont caractéristiques de la végétation des
cultures (signalées en gras). Le cortège floristique est composé d’espèces rudérales,
- des tonsures et friches annuelles - Atriplex patula L., Atriplex prostrata DC., Brassica nigra (L.)
Koch, Catapodium rigidum (L.) C.E. Hubbard, Cerastium glutinosum Fries, Chenopodium rubrum L. var.
intermedium (Mert. & Koch) Jauzein, Erophila verna (L.) Chevall., Hyoscyamus niger L., Logfia minima
(Sm.) Dumort., Mibora minima (L.) Desv., Minuartia hybrida (Vill.) Schischkin ssp. tenuifolia (L.)
Kerguéle, Vulpia ciliata Dumort., Vulpia myuros (L.) C.C. Gmelin.
- des friches vivaces -Conium maculatum L., Euphorbia lathyris L., Isatis tinctoria L., Lepidium
graminifolium L., Malva sylvestris L., Urtica dioica L.
- des lieux piétinés -Chelidonium majus L., Poa annua L., Sagina apetala Ard., Sagina procumbens L.
- nitrophiles -Borago officinalis L., Carduus tenuiflorus Curtis, Chenopodium murale L., Chenopodium
opulifolium Koch & Ziz, Hordeum murinum L., Malva nicaeensis All., Sisymbrium irio L., Sisymbrium
officinale (L.) Scop., Urtica urens L.
Les ‘lieux secs sablonneux’ rassemblent plus particulièrement des espèces caractéristiques des
coteaux secs -Allium sphaerocephalon L., Artemisia campestris L., Euphorbia cyparissias L., - et des
milieux humides -Valeriana officinalis L.- et occasionnellement -Bromus erectus Hudson, Jasione
montana L., Linaria supina (L.) Chaz., Rumex acetosella L.
Les ‘lieux vagues’ rassemblent plus particulièrement des espèces communes aux chemins Arctium minus (J. Hill) Bernh., Carthamus lanatus L.- et occasionnellement -Reseda luteola L.
Les ‘lieux meubles’ renferment occasionnellement - Achillea millefolium L.
Les formations herbeuses rudéralisées sont aussi colonisées par des espèces pionnières Antirrhinum majus L., Asplenium ceterach L., Asplenium trichomanes L., Centranthus ruber (L.) DC.,
Geranium robertianum L., Iris germanica L., Parietaria judaica L., Saxifraga tridactylites L., Sedum rupestre
L. Quelques espèces ligneuses, de hauteur faible à moyenne, sont présentes - Erysimum cheiri
(L.) Crantz, Hedera helix L., Lycium barbarum L., Prunus laurocerasus L., Sempervivum tectorum L. Ces
formations sont également colonisées par des espèces adventices trouvant des conditions
locales appropriées (tendance à la xérophilie) -Anthriscus caucalis M. Bieb., Arenaria leptoclados
(Reichenb.) Guss., Arenaria serpyllifolia L., Atriplex rosea L., Capsella bursa-pastoris (L.) Medik., Cerastium
glomeratum Thuill., Diplotaxis muralis (L.) DC., Eruca sativa Miller, Heliotropium europaeum L., Stellaria
media (L.) Vill., Veronica agrestis L., Veronica arvensis L. Ces espaces ouverts sont le siège de
colonisation par des espèces cultivées ou introduites -Amaranthus albus L., Conyza canadensis (L.)
Cronq. Des espèces de prairie, à haute valence écologique, trouvent des conditions favorables à
leur installation -Bellis perennis L., Picris hieracioides L., Poa bulbosa L.
Le groupement des formations herbeuses rudéralisées peut s’enrichir occasionnellement par
une diversité d’espèces -Artemisia vulgaris L., Avena barbata Link, Ballota nigra L. ssp. meridionalis
(Béguinot) Béguinot [1909], Calamintha nepeta (L.) Savi, Carlina corymbosa L., Cerastium pumilum Curtis,
Cerastium semidecandrum L., Cirsium vulgare (Savi) Ten., Crepis capillaris (L.) Wallr., Cynodon dactylon (L.)
Pers., Echium vulgare L., Filago vulgaris Lam., Fumana procumbens (Dunal) Gren. & Godron, Galactites
elegans (All.) Nyman ex Soldano, Geranium molle L., Geranium pusillum L., Geranium rotundifolium L.,
274
Knautia arvensis (L.) Coulter, Lamium maculatum L., Leontodon autumnalis L., Linum trigynum L., Medicago
minima (L.) L., Medicago orbicularis (L.) Bartal., Onopordum acanthium L., Ornithopus perpusillus L.,
Petrorhagia prolifera (L.) P.W. Ball & Heywood, Plantago coronopus L., Plantago major L., Potentilla
reptans L., Salvia verbenaca L., Saponaria officinalis L., Sedum rubens L., Silybum marianum (L.) Gaertner,
Solanum dulcamara L., Spergularia rubra (L.) J. & C. Presl, Tanacetum parthenium (L.) Schultz Bip., Torilis
nodosa (L.) Gaertner, Verbascum blattaria L., Verbena officinalis L., Xanthium strumarium L.- certaines
caractéristiques des cultures - Acinos arvensis (Lam.) Dandy, Alyssum alyssoides (L.) L., Amaranthus
graecizans L. ssp. silvestris (Vill.) Brenan, Ammi majus L., Anthemis arvensis L., Cardamine hirsuta L.,
Euphorbia exigua L., Lamium amplexicaule L., Lamium purpureum L., Matricaria perforata Mérat., Myosotis
ramosissima Rochel, Orlaya grandiflora (L.) Hoffm., Papaver hybridum L., Solanum nigrum L., Spergula
arvensis L. ssp. arvensis.
La végétation des talus est colonisée par une diversité d’espèces occasionnelles -Erigeron acer
L., Hieracium lactucella Wallr., Himantoglossum hircinum (L.) Sprengel, Lactuca saligna L., Lactuca serriola
L., Lathyrus latifolius L., Lepidium campestre (L.) R. Br., Leucanthemum vulgare Lam., Linum trigynum L.,
Lotus corniculatus L., Muscari neglectum Guss. ex Ten., Polycarpon tetraphyllum (L.) L., Ranunculus
parviflorus L., Sambucus ebulus L., Tordylium maximum L., Torilis japonica (Houtt.) DC., Tussilago farfara
L., Xeranthemum cylindraceum Sibth. & Sm.- dont certaines caractéristiques des coteaux secs Hypericum perforatum L., Inula conyza DC., Potentilla crantzii (Crantz) G. Beck ex Fritsch - et d’autres, des
formations herbeuses xériques -Bellis perennis L., Cardamine hirsuta L., Carthamus lanatus L.,
Cerastium glomeratum Thuill., Diplotaxis muralis (L.) DC., Isatis tinctoria L. S’y trouvent également des
espèces caractéristiques des formations boisées et herbacées humides -Lactuca virosa L.
La végétation des chemins est composée d’espèces, caractéristiques ou non, des formations
herbeuses rudéralisées -Arctium minus (J. Hill) Bernh., Carthamus lanatus L., Chondrilla juncea L.,
Cichorium intybus L., Cynoglossum creticum Miller, Filago pyramidata L., Xanthium spinosum L.- des
formations herbeuses à végétation spontanée, sur sol frais (cours d’eau) ou sec (pelouses des
coteaux secs) -Bothriochloa ischaemum (L.) Keng, Eryngium campestre L., Hypericum perforatum L.,
Mentha aquatica L., Phleum phleoides (L.) Karsten, Thymus pulegioides L.- et caractéristiques des
moissons -Mentha arvensis L. Plus occasionnellement, des espèces herbacées, rudérales ou
prairiales, qui trouvent des conditions de milieu adaptées à leur colonisation et à leur
établissement -Achillea millefolium L., Aegilops ovata L., Althaea cannabina L., Anacamptis pyramidalis
(L.) L.C.M. Richard, Brachypodium pinnatum (L.) P. Beauv., Campanula rapunculus L., Capsella rubella
Reuter, Centaurea calcitrapa L., Cerastium fontanum Baumg. ssp. vulgare (Hartm.) Greuter & Burdet,
Coronopus squamatus (Forsskål) Ascherson, Dactylis glomerata L., Diplotaxis tenuifolia (L.) DC., Dipsacus
fullonum L., Echium asperrimum Lam., Euphorbia stricta L., Galium verum L., Gaudinia fragilis (L.) P.
Beauv., Geranium columbinum L., Geranium dissectum L., Lactuca serriola L., Leontodon hispidus L., Linaria
repens (L.) Miller, Linum bienne Miller, Lolium multiflorum Lam., Marrubium vulgare L., Ononis natrix L.,
Oxalis corniculata L., Pimpinella saxifraga L., Potentilla argentea L., Rumex crispus L., Rumex pulcher L.,
Scolymus hispanicus L., Scorzonera laciniata L., Sixalix atropurpurea (L.) Greuter & Burdet ssp. maritima (L.)
Greuter & Burdet, Stachys germanica L., Taraxacum fulvum Raunk. gr., Taraxacum officinale Weber,
Tordylium maximum L., Trifolium fragiferum L., Verbascum phlomoides L., Verbascum pulverulentum Vill.,
Verbascum sinuatum L. Nous trouvons aussi des espèces plantées - Aesculus hippocastanum L.,
Platanus orientalis L., Prunella vulgaris L. (prairie pâturée).
275
En résumé pour la végétation passée des lieux incultes rudéralisés
Figure 47-k.
Schéma synthétique pour la végétation passée des lieux incultes rudéralisés
Les formations herbeuses rudéralisées correspondent aux lieux incultes anthropisés – murs,
habitations, décombres, lieux secs sablonneux et lieux vagues - où une diversité d’espèces,
rudérales, nitrophiles et à haute valence écologique, vont pouvoir s’installer. La richesse
spécifique élevée montre le faible entretien qui est pratiqué dans ces formations et la facilité
de pénétration des espèces dans des espaces ouverts, exposés au vent et à la circulation
routière.
Les ‘talus’ désignent des espaces herbeux souvent en bord de culture et de route, offrant des
conditions xériques, colonisés par une diversité d’espèces herbacées héliophiles.
Les ‘chemins’ renferment une grande diversité d’espèces végétales.
276
- Les lieux herbeux incultes à végétation spontanée - ‘coteaux secs’ - représentent des
formations composées par un cortège d’espèces héliophiles, xérophiles. En rapprochement à
ces formations, nous décrivons ci-après la végétation des ‘pelouses’ et des ‘pâturages’.
4- Les coteaux secs
La végétation des coteaux secs correspond à une formation herbeuse inculte xérique, à
végétation spontanée. Elle est caractérisée par des espèces ayant une aire de répartition
essentiellement méditerranéenne, herbacées vivaces, mésoxérophiles, de prairie maigre
(certaines communes aux pelouses et aux formations boisées - bois, haies, buissons) -Anthyllis
vulneraria L., Bothriochloa ischaemum (L.) Keng, Campanula glomerata L., Cirsium acaule Scop., Dianthus
carthusianorum L., Hypericum perforatum L., Inula conyza DC., Orchis purpurea Hudson, Potentilla crantzii
(Crantz) G. Beck ex Fritsch, Prunella laciniata (L.) L., Scabiosa columbaria L., Scilla autumnalis L., Seseli
montanum L., Veronica austriaca L. ssp. teucrium (L.) D.A. Webb, Vincetoxicum hirundinaria Medik.- dont
des xérophiles -Allium sphaerocephalon L., Anthericum liliago L., Artemisia campestris L., Asperula
cynanchica L., Globularia bisnagarica L., Linum strictum L., Linum tenuifolium L., Melica ciliata L. ssp.
magnolii (Godron & Grenier) K. Richter, Stachys recta L., Trigonella monspeliaca L. Occasionnellement Carlina vulgaris L., Centaurea scabiosa L., Pimpinella saxifraga L.
Des chaméphytes sont présents dans cette végétation -Asparagus acutifolius L., Helianthemum
grandiflorum (Scop.) DC. in Lam. & DC. ssp. grandiflorum, Teucrium chamaedrys L., Thymus pulegioides L.
D’après la position des espèces, sur le plan factoriel 1-2, nous observons un rapprochement de
la végétation des ‘coteaux secs’ avec celle des ‘pelouses’ d’une part et celle des ‘bois’ d’autre
part. Ce dernier cas illustre les interactions qui ont lieu entre pelouses et bois lors des phases
de colonisation des pelouses qui évoluent vers le stade boisé. La présence d’espèces poussant
en général dans les espaces anthropisés, rudérales, adventices, pionnières - Althaea hirsuta L.,
Cerastium pumilum Curtis, Cerastium semidecandrum L., Erophila verna (L.) Chevall., Erucastrum gallicum
(Willd.) O.E. Schulz, Kickxia elatine (L.) Dumort., Melilotus albus Medik., Papaver rhoeas L, Phleum
phleoides (L.) Karsten, Scrophularia canina L., Vulpia unilateralis (L.) Stace- témoigne soit de leur
colonisation à partir des milieux environnants (cas possible des espèces anémochores et
épizoochores, ces dernières pouvant être disséminées par les troupeaux), soit d’un maintien
après évolution d’une parcelle cultivée abandonnée (cas probable des espèces barochores). Le
cortège caractéristique est accompagné d’espèces sciaphiles, de formations boisées (bois,
ourlets) -Arum italicum Miller, Clinopodium vulgare L., Helleborus foetidus L., Peucedanum cervaria (L.)
Lapeyr. Ces espèces témoignent de la dynamique progressive qui se met en place rapidement,
si l’entretien du milieu est interrompu.
Photo 33. Flore des coteaux secs
Dianthus carthusianorum L. Vincetoxicum hirundinaria Me. Scilla autumnalis L.
Globularia bisnagarica L.
277
En résumé pour la végétation passée des coteaux secs
Figure 47-l.
Schéma synthétique pour la végétation passée des coteaux secs
Les ‘coteaux secs’ sont caractérisés par la végétation des pelouses herbacées denses, à
tendance xérophile, témoignant de leur situation sur des terrains à pentes fortes, bien drainés
et bien exposés. La présence d’espèces des lieux anthropisés peut témoigner de la dispersion
des graines par les troupeaux et de l’état passé de la parcelle sous forme de culture. La
présence d’espèces de formations arborées peut témoigner de la dynamique de la végétation
qui se met en place, évoluant vers des physionomies arborées sans intervention anthropique
directe (fauchage, feu) ou indirecte (pâturage).
278
5- Les pelouses
La végétation des pelouses ne caractérise pas la flore de Nailloux (non mise en évidence par
AFC). Elle est représentée par une diversité d’espèces à tendance mésoxérophile,
caractéristiques des coteaux secs -Anthyllis vulneraria L., Campanula glomerata L., Dianthus
carthusianorum L., Helianthemum grandiflorum (Scop.) DC. in Lam. & DC. ssp. grandiflorum, Hypericum
perforatum L., Potentilla crantzii (Crantz) G. Beck ex Fritsch, Prunella laciniata (L.) L., Scabiosa columbaria
L., Scilla autumnalis L., Thymus pulegioides L.- et d’espèces prairiales, communes aux formations
boisées (bois, haies, buissons) -Agrostis capillaris L., Arrhenatherum elatius (L.) P. Beauv. ex J. & C.
Presl, Campanula patula L., Carex caryophyllea Latourr., Cardamine flexuosa With., Cucubalus baccifer L.,
Euphrasia stricta D. Wolff ex J.F. Lehm., Hieracium lactucella Wallr., Holcus lanatus L., Hypochaeris
radicata L., Koeleria pyramidata (Lam.) P. Beauv., Leontodon hispidus L., Lotus corniculatus L., Luzula
campestris (Ehrh.) Lej., Luzula forsteri (Sm.) DC., Luzula multiflora (Ehrh.) Lej., Origanum vulgare L., Poa
pratensis L., Prunella hastifolia Brot., Saxifraga granulata L., Spiranthes spiralis (L.) Chevall., Veronica
chamaedrys L. Les espèces occasionnelles appartiennent à la végétation des formations boisées
(ourlets) - Vicia cracca L. ssp. cracca-, des formations herbeuses rudéralisées - Aegilops ovata L.,
Bellis perennis L., Cerastium glomeratum Thuill., Equisetum arvense L., Erophila verna (L.) Chevall., Gaudinia
fragilis (L.) P. Beauv., Geranium molle L., Geranium pusillum L., Melilotus altissimus Thuill., Myosotis
arvensis Hill, Picris hieracioides L., Trifolium campestre Schreber-, des formations aquatiques
herbeuses (cours d’eau et étendue d’eau) -Carex distans L., Festuca arundinacea Schreber.- et des
cultures et moissons -Cardamine hirsuta L., Cerastium glutinosum Fries, Sherardia arvensis L., Vicia lutea
L., Vicia sativa L. ssp. segetalis (Thuill.) Celak.
Des espèces colonisant les prairies maigres ou grasses sont présentes -Aceras anthropophorum (L.)
Aiton fil., Anacamptis pyramidalis (L.) L.C.M. Richard, Brachypodium pinnatum (L.) P. Beauv., Carex hirta
L., Erigeron acer L., Festuca pratensis Hudson, Knautia arvensis (L.) Coulter, Orchis morio L., Orchis ustulata
L., Phleum pratense L. (prairie pâturée), Plantago lanceolata L., Plantago media L., Prunella vulgaris L.
(prairie pâturée), Rumex acetosella L., Salvia pratensis L., Sanguisorba minor Scop., Scorzonera laciniata L.,
Taraxacum fulvum Raunk. gr., Taraxacum officinale Weber, Trisetum flavescens (L.) P. Beauv., Xolantha
guttata (L.) Rafin. Des espèces communes aux clairières sont également présentes -Dianthus
armeria L., Ophrys apifera Hudson, Ophrys sphegodes Miller, Trifolium repens L. Le résumé de cette
végétation est réalisée plus loin (cf. p. 285).
La végétation des pâturages est pauvre, non représentative de la flore - Alopecurus pratensis L.,
Anthoxanthum odoratum L., Trifolium patens Schreber.
279
b- Les formations aquatiques
Elles ont la particularité d’être situées sur des terrains gorgés d’eau, inondés ou humides, et
composées d’espèces photophiles ou sciaphiles, à tendance hygrophile. Selon un gradient
d’exigence des espèces en humidité du sol, la végétation des bords des eaux de type ‘étendues
d’eau’ et ‘cours d’eau’, représentée par des espèces hygrophiles, se distingue de la végétation
des formations humides, de type ‘prairies’ et ‘bois’ (ripisylves, végétation abordée avec les
formations boisées), représentée par des espèces mésohygrophiles ou mésophiles. Les
‘fossés’, milieux non caractéristiques de la flore de Nailloux d’après l’analyse statistique, sont
représentés par une végétation typique des milieux aquatiques. Nous aborderons l’étude de
leur végétation à la suite de celle des bords des eaux (étendues d’eau et cours d’eau).
La végétation des bords des eaux - ‘étendues d’eau’ et ‘cours d’eau’ - renferme un cortège
floristique commun, caractérisé par des espèces vivaces, héliophiles, européennes, aquatiques
et de marais, hygrophiles -Bidens tripartita L., Bolboschoenus maritimus (L.) Palla, Eupatorium
cannabinum L., Glyceria fluitans (L.) R. Br., Juncus effusus L., Juncus inflexus L., Lycopus europaeus L.,
Mentha pulegium L., Myosotis scorpioides L., Myosoton aquaticum (L.) Moench, Phragmites australis (Cav.)
Steudel, Scrophularia auriculata L., Senecio erucifolius L., Valeriana officinalis L., Veronica beccabunga L.,
dont certaines se disséminant par hydrochorie -Berula erecta (Hudson) Coville, Callitriche hamulata
Koch, Callitriche platycarpa Kütz. in Reichenb., Carex distans L., Carex riparia Curtis, Iris pseudacorus L.,
Lythrum salicaria L., Mentha aquatica L., Phalaris arundinacea L., Schoenoplectus lacustris (L.) Palla. Sont
également caractéristiques de ces formations des espèces rudérales -Barbarea vulgaris R. Br.,
Polygonum mite Schrank, Polygonum persicaria L., et des forestières sciaphiles -Carex pendula Hudson,
Symphytum tuberosum L., qui trouvent des conditions de station (humidité, lumière) satisfaisantes
à leur colonisation. La présence des espèces d’autres formations peut illustrer la faible densité
de couvert arboré, qui facilite leur pénétration à partir des milieux environnants.
6- Les étendues d’eau
La végétation des étendues d’eau est caractérisée par des espèces aquatiques à large aire de
répartition, herbacées et des plantes de marais pour la plupart européennes. L’on trouve, en
plus des espèces en commun avec les cours d’eau -Althaea officinalis L., Carex ovalis Good.,
Catabrosa aquatica (L.) P. Beauv., Epilobium parviflorum Schreber, Equisetum telmateia Ehrh., Galium
palustre L., Galium uliginosum L., Groenlandia densa (L.) Fourr., Hypericum tetrapterum Fries, Juncus
acutiflorus Enrh. ex Hoffm., Juncus tenageia Ehrh in L. fil., Lemna minor L., Lotus pedunculatus Cav.,
Lythrum hyssopifolia L., Mentha suaveolens Ehrh., Oenanthe peucedanifolia Pollich, Poa palustris L.,
Polygonum amphibium L., Pulicaria dysenterica (L.) Bernh., Scirpoides holoschoenus (L.) Soják., Typha
angustifolia L., Veronica anagallis-aquatica L. anagallis. Ces formations sont caractérisées par des
espèces à tendance hygrophile, forestières sciaphiles -Alnus glutinosa (L.) Gaertn., Equisetum
hyemale L., Scrophularia nodosa L.- de prairie grasse -Festuca arundinacea Schreber, Lotus maritimus L.
var. maritimus, Pastinaca sativa L. ssp. sylvestris (Miller) Rouy & Camus.- et rudérales -Melilotus altissimus
Thuill., Polygonum hydropiper L. Leur présence illustre la densité de couvert arboré, qui offre des
conditions de milieu favorables à ces espèces. Occasionnellement, cette végétation est
enrichie d’espèces caractéristiques des cours d’eau - Juncus conglomeratus L.- des formations
humides, boisées et herbacées - Euphorbia amygdaloides L., Poa nemoralis L.- et des formations
herbeuses rudéralisées -Geranium robertianum L. – prairiales - Senecio erraticus Bertol.
280
7- Les cours d’eau
La végétation des cours d’eau est caractérisée, en plus des espèces en commun avec les
étendues d’eau, par une diversité de plantes herbacées, vivaces, héliophiles ou photophiles,
européennes ou à large aire de répartition, de marais et aquatiques, hydrochores -Angelica
sylvestris L., Apium nodiflorum (L.) Lag., Caltha palustris L., Cirsium palustre (L.) Scop., Cyperus longus L.,
Cyperus longus L. ssp. badius (Desf.) Bonnier & Layens, Juncus bufonius L., Juncus conglomeratus L.,
Nasturtium officinale R. Br., Sparganium erectum L.- et occasionnellement - Valeriana officinalis L. ssp.
sambucifolia (Mikan fil.) Celak. Les cours d’eau sont accompagnés d’espèces forestières -Berberis
vulgaris L.- et de prairie grasse -Cardamine pratensis L. Tout comme les étendues d’eau, leur
présence illustre la densité de couvert arboré, qui offre des conditions de milieu favorables à
ces espèces.
La végétation des fossés dépend des conditions d’écoulement en eau, qui peuvent être
temporaires ou permanentes. Elle est composée d’espèces caractéristiques :
- de la végétation des formations aquatiques (étendue d’eau et cours d’eau) -Glyceria
fluitans (L.) R. Br., Lythrum salicaria L., Mentha pulegium L., Myosoton aquaticum (L.) Moench,
Polygonum mite Schrank, Senecio erucifolius L., Symphytum tuberosum L.
- de la végétation des étendues d’eau -Equisetum telmateia Ehrh., Festuca arundinacea Schreber,
Galium palustre L., Hypericum tetrapterum Fries, Juncus acutiflorus Enrh. ex Hoffm., Mentha
suaveolens Ehrh., Pastinaca sativa L. ssp. sylvestris (Miller) Rouy & Camus, Polygonum hydropiper
L., Pulicaria dysenterica (L.) Bernh., Scrophularia nodosa L., Typha angustifolia L., Veronica
anagallis-aquatica L. anagallis.
- et de la végétation des cours d’eau -Juncus conglomeratus L., Juncus inflexus L., Lycopus
europaeus L., Nasturtium officinale R. Br.
Occasionnellement la végétation est colonisée par des espèces caractéristiques, compagnes ou
occasionnelles, des formations boisées (bois, ourlets) - Acer campestre L., Agrimonia eupatoria L.,
Arum italicum Miller, Carex divulsa Stokes, Centaurea nigra L., Coriaria myrtifolia L., Glechoma hederacea
L., Melissa officinalis L., Pulmonaria affinis Jordan in F.W. Schultz, Salix alba L., Salix caprea L., Sambucus
ebulus L., Stachys sylvatica L., Stellaria holostea L., Vicia cracca L. ssp. cracca, Vinca major L.- des espèces
caractéristiques ou occasionnelles des cultures et moissons -Carduus nutans L., Eragrostis pilosa
(L.)P. Beauv., Euphorbia platyphyllos L., Mentha arvensis L.- et des espèces caractéristiques ou
occasionnelles des formations herbeuses rudéralisées -Amaranthus albus L., Calamintha nepeta (L.)
Savi, Cirsium arvense (L.) Scop., Cirsium vulgare (Savi) Ten., Conium maculatum L., Daucus carota L.,
Ecballium elaterium (L.) A. Richard, Erucastrum gallicum (Willd.) O.E. Schulz, Galactites elegans (All.)
Nyman ex Soldano, Heliotropium europaeum L., Lactuca saligna L., Reseda luteola L., Rumex obtusifolius L.,
Rumex pulcher L., Scolymus hispanicus L., Silene latifolia Poiret ssp. alba (Miller) Greuter & Burdet,
Urospermum dalechampii (L.) Scop. ex F.W. Schmidt, Verbascum blattaria L. Des espèces prairiales Carex cuprina (Sandor ex Heuffel) Nendtwich ex A. Kern, Carex spicata Hudson, Centaurea jacea L.,
Centaurea thuillieri J. Duvigneaud & J. Lambinon, Dipsacus fullonum L., Epilobium hirsutum L., Festuca
pratensis Hudson, Galium verum L., Leucanthemum vulgare Lam., Linum bienne Miller, Lolium multiflorum
Lam., Ranunculus bulbosus L., Ranunculus repens L., Ranunculus sardous Crantz, Rorippa x-prostrata (J.P.
Bergeret) Schinz & Thell. (fossé sans eau), Rumex crispus L., Senecio erraticus Bertol.
281
Photo 34. Flore des bords des eaux
Althaea officinalis L.
Lythrum salicaria L. Bidens tripartita L.
Carex riparia Curtis
Barbarea vulgaris R. Br. Polygonum mite Schrank Sparganium erectum L.
282
En résumé pour la végétation passée des bords des eaux
Figure 47-m. Schéma synthétique pour la végétation passée des bords des eaux
Les ‘étendues d’eau’ correspondent aux bords de mares, d’étang, de lac. La végétation
typique de ces formations est enrichie d’espèces des milieux environnants qui trouvent des
conditions stationnelles adaptées pour permettre leur colonisation grâce à une strate arborée
bien développée, dense.
La végétation des ‘cours d’eau’ représente une flore typique et diversifiée, qui se développe le
long des berges des ruisseaux et des fossés à écoulement permanent. La présence des strates
ligneuses permet la pénétration d’espèces des milieux environnants qui trouvent des
conditions stationnelles satisfaisantes à leur installation.
La végétation des ‘fossés’ est représentée par des espèces herbacées, des formations humides,
accompagnées d’espèces ligneuses. Les fossés délimitant fréquemment les cultures sont
également colonisés par des espèces des lieux cultivés. La faible densité de couvert arboré
facilite la colonisation et l’établissement plus ou moins temporaire d’espèces rudérales et
prairiales.
283
La végétation des milieux humides - ‘bois’, ‘prairies’ - est caractérisée par des espèces
vivaces, photophiles ou héliophiles, à tendance mésohygrophile. Les espèces communes sont
Carex ovalis Good, Coeloglossum viride (L.) Hartman, Heracleum sphondylium L., Ligustrum ovalifolium
Hassk., Poa nemoralis L., Viola odorata L. Les bois humides sont décrits plus loin, avec le
groupement des formations arborées.
8- Les prairies humides
La végétation des prairies humides correspond à la végétation des prairies mésohygrophiles,
pacagées, avec l’alliance du Cynosurion cristati. Le cortège typique est diversifié avec, en
plus des espèces communes aux bois humides, des espèces à tendance mésohygrophile, à
dissémination anémochore et épizoochore -Ajuga reptans L., Blackstonia perfoliata (L.) Hudson,
Bromus hordeaceus L. ssp. hordeaceus, Centaurium pulchellum (Swartz) Druce, Cirsium tuberosum (L.) All.,
Colchicum autumnale L., Cynosurus cristatus L., Lysimachia nummularia L., Orchis laxiflora Lam.,
Pedicularis sylvatica L., Poa pratensis L., Ranunculus acris L., Ranunculus acris L. ssp. friesianus (Jordan)
Syme, Rhinanthus angustifolius C. Gmelin, Rorippa palustris (L.) Besser, Silaum silaus (L.) Schinz & Thell.,
Silene flos-cuculi (L.) Greuter & Burdet, Tragopogon porrifolius L. Ces espèces sont accompagnées
d’espèces aquatiques, hydrochores -Ranunculus trichophyllus Chaix.- et de forestières herbacées,
myrmécochores et endozoochores -Astragalus glycyphyllos L., Ranunculus auricomus L., Viola hirta L.,
Viola reichenbachiana Jordan ex Boreau. Les variations locales d’humidité permettent l’installation
d’espèces de prairie maigre -Serapias lingua L. Occasionnellement, des espèces caractéristiques
des étendues d’eau et des cours d’eau peuvent s’installer -Cardamine pratensis L., Catabrosa
aquatica (L.) P. Beauv., Lotus maritimus L. var. maritimus, Mentha pulegium L., Myosotis scorpioides L.,
Oenanthe peucedanifolia Pollich, Pastinaca sativa L. ssp. sylvestris (Miller) Rouy & Camus, Scrophularia
nodosa L.- des espèces des formations boisées (bois, ourlets) - Lathyrus pratensis L., Listera ovata
(L.) R. Br., - ainsi que des espèces prairiales - Briza media L., Centaurea jacea L., Centaurea thuillieri J.
Duvigneaud & J. Lambinon, Dactylorhiza maculata (L.) Soó, Euphorbia flavicoma DC. 2, 3, 4, 5 ssp. verrucosa
(Fiori) Pignatti, Galium verum L., Gymnadenia conopsea (L.) R. Br. in Aiton fil., Leucanthemum vulgare Lam.,
Plantago lanceolata L., Rhinanthus angustifolius C.C. Gmelin, Rumex conglomeratus Murray, Tragopogon
pratensis L. ssp. orientalis (L.) Celak., Trisetum flavescens (L.) P. Beauv., Veronica serpyllifolia L.
(caractéristique des prairies pâturées). La présence d’espèces adventices et rudérales,
xérophiles -Avena sterilis L. ssp. ludoviciana (Durieu) Nyman, Chelidonium majus L., Tragopogon dubius
Scop. ssp. major (Jacq.) Vollmann, Trifolium incarnatum L.- peut témoigner d’une colonisation facilitée
par un couvert arboré quasi inexistant, à partir des milieux environnants, et de leur transport
par les troupeaux.
Photo 35. Flore des prairies humides
Colchicum autumnale L. Lysimachia nummularia L. Pedicularis sylvatica L. Rhinanthus angustifolius Gmelin
284
En résumé pour la végétation passée des prairies humides
Figure 47-n.
Schéma synthétique pour la végétation passée des prairies humides
La présence du fromental élevé - Arrhenatherum elatius (L.) P. Beauv. ex J. & C. Presl- et de la
fétuque fenasse - Festuca arundinacea Schreber.- permet de caractériser la végétation des
‘pelouses’, qui correspond à la prairie fauchée mésophile du Mesobromion. C’est une
végétation herbacée, colonisée par une diversité d’espèces du point de vue des habitats
représentés.
Les ‘prairies humides’ sont des prairies pacagées, représentées par un cortège floristique
typique, où les espèces peuvent être disséminées par les troupeaux. La présence d’une
diversité d’espèces forestières peut illustrer le transport des espèces par les troupeaux et
l’enfrichement rapide sans intervention anthropique.
285
c- Les formations arborées, non aquatiques
Identifiées à partir de l’AFC, elles regroupent les formations végétales de type ‘bois’,
‘buissons’, ‘haies’. La particularité commune à ces trois types de formation est qu’ils sont
caractérisés par des espèces forestières, ligneuses, à tendance sciaphile, myrmécochores et
endozoochores, européennes. Nous abordons tout d’abord la végétation des ‘bois humides’,
mise en évidence avec le groupement des milieux aquatiques.
9- Les bois humides
La végétation des bois humides qui correspondent aux ripisylves, est caractérisée, en plus des
espèces communes aux prairies humides, par des espèces forestières, hémicryptophytes,
photophiles ou sciaphiles, à tendance hygrophile -Alliaria petiolata (M. Bieb.) Cavara & Grande,
Euphorbia amygdaloides L., Hypericum hirsutum L., Lathraea clandestina L., Mercurialis perennis L.,
Polystichum setiferum (Forsskål) Woynar, Potentilla sterilis (L.) Garcke, Vicia sepium L. Les espèces se
disséminent préférentiellement par anémochorie, pouvant témoigner des conditions de couvert
arboré faibles. Cette hypothèse est appuyée par la présence d’espèces pionnières -Sedum
telephium L.- qui témoigne d’une pénétration facilitée par dissémination anémochore. Les
conditions d’humidité en présence entraînent des similitudes au niveau du cortège floristique,
avec la végétation des étendues d’eau -Carex ovalis Good., Hypericum tetrapterum Fries, Juncus
tenageia Ehrh in L. fil., Valeriana officinalis L. Les variations locales d’humidité permettent la
présence d’espèces de prairies maigres - Polygala calcarea F.W. Schultz. Les strates ligneuses sont
caractérisées par Frangula alnus Miller et Ligustrum ovalifolium Hassk. Occasionnellement - Valeriana
officinalis L. ssp. sambucifolia (Mikan fil.) Celak.
En résumé pour les bois humides
Les ‘bois humides’, ou ripisylves, sont les formations végétales boisées qui se développent en
marge des cours d’eau. La végétation, caractéristique des lieux humides, est peu diversifiée.
La présence d’espèces se disséminant par anémochorie témoigne de l’état du couvert arboré,
peu dense qui favorise leur installation (cf. p.292).
Les formations arborées de type ‘bois’, ‘buissons’, ‘haies’ se différencient des bois humides,
d’après le niveau hydrique du sol. Ce sont des formations développées sur un sol plus drainé
et moins humide. Ces trois types de végétation sont caractérisés par des espèces des bois,
prairie maigre et prairie grasse, à aire de répartition européenne (atlantique, eurasiatique,
européenne, méditerranéo-atlantique), non hydrochores, notamment endozoochores et
myrmécochores, sciaphiles ou photophiles, non-hygrophiles, arbustives. Ils renferment des
espèces communes -Aristolochia rotunda L., Cornus sanguinea L., Corylus avellana L., Evonymus
europaeus L., Geum urbanum L., Lolium perenne L., Lonicera xylosteum L., Vicia hirsuta (L.) S.F. Gray.
10- Les bois et formations associées
La végétation boisée est représentée par deux types, qui se distinguent l’un de l’autre d’après
les conditions d’acidité du sol, révélées par les exigences des espèces à cette variable. Nous
identifions la végétation des chênaies neutrophiles sur sols équilibrés et la végétation des
chênaies acidophiles oligotrophes.
286
La végétation des chênaies neutrophiles sur sols équilibrés du Quercion pubescentis montre
un sous-bois caractérisé par des espèces forestières courantes, indifférentes au pH du sol ou
basophiles, -Anemone nemorosa L., Aristolochia rotunda L., Arum italicum Miller, Brachypodium sylvaticum
(Hudson) P. Beauv., Cornus sanguinea L., Corylus avellana L., Crataegus monogyna Jacq., Crataegus
oxyacantha L., nom. rej., Daphne laureola L., Euphorbia dulcis L. sensu auct. Fl. Fr., Evonymus europaeus L.,
Helleborus viridis L., Hippocrepis emerus (L.) P. Lassen, Lamium galeobdolon (L.) L., Lonicera etrusca G.
Santi, Lonicera xylosteum L., Poa trivialis L., Prunus spinosa L., Quercus humilis Miller., (conditions
sèches et ensoleillées), Quercus petraea (Mattuschka) Liebl. (dans les situations plus fraîches),
Quercus robur L., Ruscus aculeatus L., Sambucus nigra L., Sanicula europaea L., Tamus communis L., Tilia
cordata Miller, Tilia platyphyllos Scop., Viburnum lantana L., Vinca minor L., Vitis vinifera L. Certaines ne
sont présentes que de manière occasionnelle -Acer campestre L., Briza media L., Carex sylvatica
Hudson, Juniperus communis L., Lonicera periclymenum L., Malus sylvestris Miller.
Une diversité d’espèces basophiles, dont certaines caractéristiques des coteaux secs,
accompagnent le cortège floristique des bois basophiles -Anacamptis pyramidalis (L.) L.C.M.
Richard, Anthyllis vulneraria L., Calamintha nepeta (L.) Savi, Carex caryophyllea Latourr., Carlina corymbosa
L., Carlina vulgaris L., Euphrasia stricta D. Wolff ex J.F. Lehm., Galium verum L., Hypericum perforatum L.,
Koeleria pyramidata (Lam.) P. Beauv., Melampyrum cristatum L., Odontites luteus (L.) Clairv., Orchis ustulata
L., Pimpinella saxifraga L., Plantago media L., Potentilla crantzii (Crantz) G. Beck, Potentilla montana Brot.,
Primula veris L., Prunella hastifolia Brot., Prunella laciniata (L.) L., Saxifraga granulata L., Spiranthes
spiralis (L.) Chevall., Stachys recta L., Trifolium angustifolium L., Trifolium ochroleucon Hudson, Veronica
austriaca L. ssp. teucrium (L.) D.A. Webb., Vincetoxicum hirundinaria Medik. Ces espèces à tendance
xérophile témoignent des conditions de sol sèches. Par ailleurs, leur présence peut rendre
compte d’une physionomie particulière des bois, hypothèse étayée par une diversité assez
faible de végétaux arbustifs (espèces en commun avec les haies et buissons) : coupes de
taillis, sous-bois éclairci (ramassage du petit bois, pâturage). Il est également possible que ces
espèces soient présentes dans les ourlets forestiers. Plus occasionnellement, les bois
renferment des espèces de la végétation des formations herbeuses rudéralisées -Asplenium
trichomanes L., Cirsium eriophorum (L.) Scop., Geranium robertianum L., Hedera helix L., Lapsana communis
L., Logfia minima (Sm.) Dumort.- et des prairies grasses - Achillea millefolium L., Dactylorhiza maculata
(L.) Soó, Filipendula vulgaris Moench, Gymnadenia conopsea (L.) R. Br. in Aiton fil.
La végétation des ourlets forestiers neutrophiles, mise en évidence d’après l’habitat optimal
de l’espèce mentionné par Julve (2000), est composée d’espèces à tendance xérophile,
caractéristiques et occasionnelles - Campanula rapunculus L., Carex divulsa Stokes, Centaurea thuillieri
J. Duvigneaud & J. Lambinon, Clinopodium vulgare L., Fragaria vesca L., Fragaria viridis Weston, Galium
mollugo L. ssp. erectum Syme, Geranium sanguineum L., Himantoglossum hircinum (L.) Sprengel, Hypericum
montanum L., Lathyrus latifolius L., Lathyrus niger (L.) Bernh., Lathyrus pratensis L., Lithospermum officinale
L., Lithospermum purpureocaeruleum L., Origanum vulgare L., Rubia peregrina L., Stachys officinalis (L.)
Trévisan, Trifolium medium L., Trifolium rubens L., Vinca major L., Viola alba Besser ssp. alba, Viola alba
Besser ssp. scotophylla (Jordan) Nyman.
La végétation des chênaies acidophiles oligotrophes est représentée par un cortège floristique
caractéristique dont certaines espèces sont communes aux formations herbacées humides Carex remota L., Carex umbrosa Host, Geum urbanum L., Hypericum androsaemum L., Juncus conglomeratus
L., Luzula forsteri (Sm.) DC, Luzula sylvatica (Hudson) Gaudin, Mespilus germanica L., Quercus petraea
(Mattuschka) Liebl., Quercus robur L., Stachys sylvatica L., Viola riviniana Reichenb. Certaines espèces ne
sont présentes que de manière occasionnelle -Festuca rubra L., Populus tremula L., Potentilla
argentea L., Pulmonaria affinis Jordan in F.W. Schultz.
La végétation des ourlets des forêts acidophiles, mise en évidence d’après l’habitat optimal de
l’espèce mentionné par Julve (2000), est caractérisée par Glechoma hederacea L., Hieracium
sabaudum L., Lathyrus linifolius (Reichard) Bässler ssp. montanus (Bernh.) Bäss, Melampyrum pratense L.,
287
Roegneria canina (L.) Nevski, Solidago virgaurea L., Stellaria holostea L., Teucrium scorodonia L., Ulex
europaeus L., Veronica officinalis L. Des espèces de prairie maigre, héliophiles, acidophiles
colonisent, de façon plus ou moins occasionnelle, la végétation boisée - Centaurea nigra L.,
Hieracium lactucella Wallr., Hieracium lactucella Wallr., Luzula campestris (Ehrh.) Lej., Luzula multiflora
(Ehrh.) Lej., Orchis morio L., Ornithopus perpusillus L., Polygala vulgaris L., Potentilla erecta (L.) Räuschel,
Silene nutans L., Stellaria graminea L., Trifolium striatum L. A l’instar de la végétation des chênaies
neutrophiles, nous supposons que leur présence peut illustrer la colonisation des ourlets
forestiers à partir des milieux environnants, elle peut aussi rendre compte d’une physionomie
particulière des bois : coupe, pâturage.
Pour les deux types de végétation boisée, plusieurs groupes floristiques sont particulièrement
intéressants à analyser.
- La strate arbustive est représentée par des végétaux ligneux bas, non sciaphiles, à feuille
coriace ou à épine, non appétents pour le bétail, et dont l’habitat optimal est celui des
fourrés arbustifs -Buxus sempervirens L., Cytisus scoparius (L.) Link, Erica scoparia L., Genista
tinctoria L., Juniperus communis L. La représentativité de la strate arbustive par ces végétaux
met l’accent sur le caractère particulier du sous-bois des formations boisées identifiées.
Nous supposons que la présence dans le sous-bois de ce type d’arbustes témoigne d’un
sous-bois éclairci, entretenu par le pâturage (taillis pâturés dans le Lauragais à cette
époque, cf. chapitre 2). Ces végétaux peuvent également illustrer la végétation de coupes
forestières (Cytisus scoparius (L.) Link présent dans les clairières et coupes de taillis très
fréquentes (Timbal-Lagrave et al., 1864)). Dans ce cas, ils pourraient se maintenir
jusqu’au stade de taillis mature et être temporairement présents dans le sous-bois. Enfin,
ces espèces peuvent caractériser la flore des ourlets forestiers. Dans ce cas, leur présence
est en accord avec les conditions mésologiques locales spécifiques (sol sec, lumière
relativement forte).
- Des plantes de prairie grasse, à tendance héliophile et mésophile, colonisent les
formations boisées -Achillea ptarmica L., Agrostis capillaris L., Anthoxanthum odoratum L.,
Arrhenatherum elatius (L.) P. Beauv. ex J. & C. Presl, Danthonia decumbens (L.) DC., Gentiana
pneumonanthe L., Holcus lanatus L., Hypochaeris radicata L., Leontodon hispidus L., Lolium perenne L.,
Pimpinella major (L.) Hudson, Tragopogon pratensis L. ssp. pratensis, Trifolium patens Schreber,
Trifolium pratense L., Veronica chamaedrys L. La présence de telles espèces, de formations
herbacées, illustre un bois peu dense, avec une strate arbustive pauvre et semble confirmer
l’hypothèse d’un sous-bois pâturé, dont la faible densité de couvert arbustif et/ou arboré
pourrait être accentuée par une exploitation intense du taillis, avec des rotations courtes
(cf. chapitre 2). Ceci semble confirmé par la présence occasionnelle de Phleum pratense L.,
Prunella vulgaris L., Veronica serpyllifolia L.- espèces caracéristiques de prairie pâturée.
- Des plantes mésohygrophiles héliophiles s’installent quand les variations locales du
milieu offrent un sol détrempé -Agrostis canina L., Cardamine flexuosa With., Centaurium erythraea
Rafn, Euphorbia villosa Kit. ex Willd., Oenanthe lachenalii C.C. Gmelin, Platanthera bifolia (L.) L.C.M.
Richard, Serratula tinctoria L., Succisa pratensis Moench.- et occasionnellement -Carex ovalis Good.,
Lactuca virosa L., Listera ovata (L.) R. Br., Odontites vernus (Bellardi) Dumort. ssp. serotinus (Dumort.)
Corb., Potentilla reptans L., Rumex conglomeratus Murray, Rumex crispus L., Salix caprea L., Trifolium
fragiferum L., Trifolium hybridum L. ssp. elegans (Savi) Ascherson & Graebner. Elles peuvent
également témoigner d’un sous-bois peu dense.
- La présence de plantes représentant les lieux anthropisés, pionnières, adventices et
rudérales, anémochores -Asplenium adiantum-nigrum L., Bromus commutatus Schrader, Euphorbia
stricta L., Melilotus altissimus Thuill., Myosotis arvensis Hill, Polypodium vulgare L., Senecio jacobaea L.,
Silene latifolia Poiret ssp. alba (Miller) Greuter & Burdet, Sison amomum L., Trifolium arvense L.,
Trifolium incarnatum L., Verbascum phlomoides L., Verbascum sinuatum L., Vicia hirsuta (L.) S.F. Gray.témoigne d’une pénétration et d’une installation des graines anémophiles à partir des
288
milieux environnants, colonisation possible soit par l’existence d’un sous-bois peu dense,
soit par le passage provisoire à des coupes forestières ; la première possibilité confirme le
pâturage opéré en sous-bois ; la deuxième illustre l’exploitation forestière avec passage
par des stades herbacés.
La végétation des bois siliceux, dont nous avons fait abstraction dans les AFC (cf. p.259), est
très particulière, caractérisée par des espèces acidophiles, forestières et de prairie maigre,
héliophiles, à tendance xérophile -Calluna vulgaris (L.) Hull, Castanea sativa Miller, Chamaemelum
mixtum (L.) All., Cistus salviifolius L., Deschampsia flexuosa (L.) Trin., Erica cinerea L., Galium pumilum
Murray, Moenchia erecta (L.) G. Gaertner, B. Meyer & Scherb., Ormenis nobilis (L.) Cosson & Germain,
Ornithopus perpusillus L., Pteridium aquilinum (L.) Kuhn, Ranunculus tuberosus Lapeyr., Serapias lingua L.
Elle se rapproche en ce sens de la végétation des chênaies oligotrophes acidophiles. La
distinction entre ces deux types de végétation boisée se base sur les conditions d’humidité de
sol. Alors que la végétation des chênaies oligotrophes occupe des sols frais, la végétation des
bois siliceux s’installe sur des sols secs.
La végétation des clairières, formations non caractéristiques de la flore de Nailloux en 1885
(milieux non significatifs dans l’AFC), représentant des percées dans les formations boisées,
est caractérisée par un faible nombre d’espèces -Bromus ramosus Hudson, Moehringia trinervia (L.)
Clairv., Trifolium subterraneum L. Les espèces compagnes sont caractéristiques des formations
boisées (bois, ourlets) -Brachypodium sylvaticum (Hudson) P. Beauv., Bromus commutatus Schrader,
Cardamine flexuosa With., Danthonia decumbens (L.) DC., Euphorbia dulcis L. sensu auct. Fl. Fr., Fragaria
viridis Weston, Poa trivialis L., Stachys officinalis (L.) Trévisan, Teucrium scorodonia L., Trifolium
angustifolium L., Trifolium ochroleucon Hudson, Trifolium patens Schreber. D’autres appartiennent aux
formations humides (prairies et bois) -Astragalus glycyphyllos L., Lotus glaber Miller, Lysimachia
nummularia L., Mercurialis perennis L.
Occasionnellement, les clairières sont colonisées par des espèces herbacées héliophiles Dianthus armeria L., Ophrys apifera Hudson, Ophrys sphegodes Miller, Trifolium repens L., Ranunculus ficaria
L., - et arborées - Populus tremula L.
Photo 36. Flore des chênaies neutrophiles sur sols équilibrés
Anemone nemorosa L. Lonicera etrusca Santi Sanicula europaea L. Euphrasia stricta Wolff
289
Photo 37. Flore des chênaies acidophiles oligotrophes
Hypericum androsaemum L. Luzula sylvatica Gaudin Potentilla argentea L.
Mespilus germanica L.
11- Les haies
La végétation des haies est caractérisée par un mélange d’espèces, forestières supportant des
conditions de lumière importantes - Chaerophyllum temulum L., Clematis vitalba L., Cruciata laevipes
Opiz, Cucubalus baccifer L., Humulus lupulus L., Ligustrum vulgare L., Lonicera periclymenum L., Melissa
officinalis L.,- de prairie maigre caractéristiques de la végétation des coteaux secs, à tendance
xérophile -Asparagus acutifolius L., Astragalus monspessulanus L., Melica ciliata L. ssp. magnolii (Godron
& Grenier) K. Richter.- et plus occasionnellement des espèces de prairie grasse, caractéristiques
de la végétation des milieux humides -Poa pratensis L., Valeriana officinalis L., Vicia sepium L. Des
plantes des lieux herbeux anthropisés, rudérales, cultivées et pionnières - Bryonia dioica Jacq.,
Dipsacus fullonum L., Galium aparine L., Linaria vulgaris Miller, Prunus domestica L. ssp. insititia (L.)
Bonnier & Layens, Sedum cepaea L., Torilis japonica (Houtt.) DC.- témoignent d’une colonisation
facilitée par une densité de couvert faible, la proximité fréquente à des terres arables et le
caractère artificiel de la haie avec la plantation d’espèces allochtones. Les espèces communes
avec la végétation des bois et formations associées sont des forestières à tendance sciaphile Aristolochia rotunda L., Campanula patula L., Clinopodium vulgare L., Cornus sanguinea L., Corylus avellana
L., Evonymus europaeus L., Galium mollugo L. ssp. erectum Syme, Geum urbanum L., Hippocrepis emerus (L.)
P. Lassen, Lolium perenne L., Lonicera xylosteum L., Roegneria canina (L.) Nevski, Stachys sylvatica L., Vinca
major L., Vinca minor L.- dont certaines endozoochores -Arum italicum Miller, Crataegus monogyna
Jacq., Crataegus oxyacantha L., nom. rej., Lonicera etrusca G. Santi, Mespilus germanica L., Prunus spinosa
L., Sambucus nigra L., Viburnum lantana L., Vitis vinifera L.- ainsi que des espèces prairiales -Glechoma
hederacea L., Origanum vulgare L., Stellaria graminea L., Vicia hirsuta (L.) S.F. Gray. Occasionnellement,
les haies sont colonisées par des espèces des formations boisées (ourlets, bois) - Ulmus minor
Miller, Vicia cracca L. ssp. cracca - des espèces caractéristiques ou occasionnelles des formations
herbeuses rudéralisées - Ballota nigra L. ssp. meridionalis (Béguinot) Béguinot [1909], Geranium
rotundifolium L., Lamium maculatum L., Lycium barbarum L., Saponaria officinalis L.
Photo 38. Flore des haies
Chaerophyllum temulum L. Ligustrum vulgare L. Asparagus acutifolius L. Astragalus monspessulanus L.
290
12- Les buissons
La végétation des buissons n’est pas constituée d’espèces qui lui sont spécifiques. Les espèces
caractérisant la végétation des buissons sont également compagnes de la végétation des bois, à
tendance héliophile et xérophile -Centaurea nigra L., Centaurium erythraea Rafn, Erica cinerea L.,
Fragaria viridis Weston, Hypericum perforatum L., Lithospermum officinale L.- des haies, photophiles, à
tendance hygrophile -Bryonia dioica Jacq., Chaerophyllum temulum L., Cruciata laevipes Opiz, Humulus
lupulus L., Linaria vulgaris Miller, Torilis japonica (Houtt.) DC. et des espèces communes aux bois et
aux haies - Aristolochia rotunda L., Cornus sanguinea L., Corylus avellana L., Evonymus europaeus L.,
Geum urbanum L., Ligustrum vulgare L., Lolium perenne L., Lonicera xylosteum L., Vicia hirsuta (L.) S.F.
Gray. Nous trouvons aussi une plante de prairie maigre -Lotus corniculatus L. et une plante de
marais -Calystegia sepium (L.) R. Br. Occasionnellement, Solanum dulcamara L.
291
En résumé pour la végétation passée des formations arborées
Figure 47-o.
Schéma synthétique pour la végétation passée des formations arborées
Les ‘bois’ se développent sur les différents types de terrains présents sur la commune.
Certains terrains sont relativement secs (position sur le versant, sur pente relativement forte),
avec des variations locales plus humides, rendues possibles lorsqu’un cours d’eau ou une
source sont présents, d’autres sont relativement humides (position en bas de versant, en fond
de vallon), décalcifiés. La variabilité des conditions de sol entraîne la distinction de deux
292
types de végétation boisée, représentées respectivement par la série du chêne pubescent et par
la série des chênes sessile et pédonculé. La végétation typique pour chacun est diversifiée. La
caractérisation du sous-bois par des espèces non-forestières, anémochores ou héliophiles
semble témoigner d’un couvert forestier peu dense en raison d’un pâturage en sous-bois, et/ou
d’une exploitation intense des taillis, avec passage par la coupe héliophile, souvent à tendance
sèche. Ces espèces pénètrent dans le sous-bois par l’intermédiaire de l’ourlet. Un troisième
type de formation boisée est celui des bois cités comme ‘siliceux’ par Haulier, se rapprochant
des bois acidophiles, sur sol sec.
La végétation des ‘haies’ reflète leur position sur des talus, créant des conditions de sol
sèches, dont témoigne la présence d’espèces à tendance xérophile. Les haies sont d’origine
anthropique avec plantation d’espèces cultivées pour les fruits qu’elles fournissent. Notons le
cortège floristique commun aux bois. Peu d’espèces allochtones sont présentes à l’opposé de
la végétation actuelle des haies.
La végétation des ‘buissons’ représente des situations diverses, sur des terrains secs ou frais.
Le fait que les espèces qui la caractérisent sont communes notamment aux bois, révèle la
particularité des buissons comme stade intermédiaire dans la dynamique progressive. Nous
pouvons les assimiler aux fourrés arbustifs décrits pour la végétation actuelle. La diversité
d’espèces herbacées, héliophiles, témoigne de la faible densité de la strate arbustive.
2. 4. 2 -
Cas particuliers
Ils concernent les espèces banales présentes dans une diversité de milieux, les espèces
exotiques, plantées et/ou naturalisées et les espèces parasites.
1- Espèces banales
Certaines espèces sont citées comme étant présentes partout ou très répandues. Ce sont des
espèces héliophiles, herbacées, rudérales et prairiales -Bellis perennis L., Cardamine hirsuta L.,
Carex flacca Schreber, Cerastium glomeratum Thuill., Cerastium glutinosum Fries, Hordeum murinum L.,
Hypericum perforatum L., Lotus corniculatus L., Medicago arabica (L.) Hudson, Medicago lupulina L.,
Mentha suaveolens Ehrh., Picris hieracioides L., Poa pratensis L., Sinapis alba L., Stellaria media (L.)
Vill.,Trifolium repens L.
2- Échappée des jardins
Centranthus ruber (L.) DC., Lepidium sativum L.
3- Espèces cultivées ou plantées, en 1885
Certaines espèces sont cultivées comme plantes céréalières, fourragères ou aux propriétés
textiles -Avena fatua L., Cannabis sativa L., Hordeum vulgare L., Lathyrus sativus LLinum bienne Miller,
Lolium multiflorum Lam., Medicago sativa L., Onobrychis viciifolia Scop., Secale cereale L., Triticum aestivum
L., Vicia sativa L., Zea mays L. Ces espèces rendent compte de la diversité des plantes cultivées en
1885 et ainsi que de la diversité de l’activité agricole. Certaines espèces sont cultivées pour la
production de fruits, légumes et aromates - Allium cepa L., Allium porrum L., Allium sativum L.,
Artemisia absinthium L., Artemisia dracunculus L., Beta vulgaris L., Brassica napus L., Brassica rapa L.
emend. Metzger, Caucalis platycarpos L. [1753], Cucurbita maxima Duchesne ex Lam., Lathyrus cicera L.,
Lens culinaris Medik., Lycopersicon esculentum Miller, nom. cons., Oenothera biennis L., Phaseolus vulgaris
L., Pisum sativum L., Rumex acetosa L., Solanum melongena L., Solanum tuberosum L., Vicia faba L. Des
espèces ligneuses sont cultivées pour le bois de chauffage et d’œuvre - Fraxinus excelsior L.,
Pinus pinea L., Populus nigra L., Populus nigra L. ssp. nigra var. italica Duroi, Populus x-canadensis Moench,
Robinia pseudoacacia L., Ulmus minor Miller- d’autres pour la production de fruits - Juglans regia L.,
293
Prunus cerasus L., Prunus dulcis (Miller) D.A. Webb, Pyrus communis L. Enfin, d’autres espèces sont
utilisées comme plantes d’agréments, dans les cimetières, jardins et parcs -Cupressus
sempervirens L., Hyssopus officinalis L., Juniperus sabina L., Lavandula angustifolia Miller, Lavandula
latifolia Medik., Mentha spicata L., Prunus armeniaca L., Prunus persica (L.) Batsch, Rumex patientia L.,
Syringa vulgaris L., Taxus baccata L.
4- Espèces parasites
Cuscuta epithymum (L.) L. sur trèfle, Cuscuta suaveolens Ser. sur luzerne, Orobanche gracilis Sm. sur
plusieurs légumineuses, Orobanche minor Sm. in Sowerby sur les trèfles, Orobanche ramosa L. sur les
racines du chanvre, Orobanche rapum-genistae Thuill. sur les genêts à balais.
2. 5 -
Relations entre groupements végétaux
Les plans factoriels étudiés, 1-2 et 3-4, ainsi que l’analyse des facteurs et des modalités,
significatifs, ont permis de révéler les groupements végétaux dominants et caractéristiques sur
la commune de Nailloux en 1885, de décrire l’assemblage des espèces végétales au sein de
ces groupements et de caractériser la végétation en place (cf. Figure 51). Ces groupements se
différencient selon les facteurs mésologiques et anthropiques, mis en évidence grâce aux traits
de vie des espèces, et grâce aux connaissances que nous avons des usages de l’espace à cette
époque (cf. chapitre 2). Nous avons ainsi distingué les formations herbeuses artificialisées et à
végétation spontanée, les formations aquatiques et les formations arborées.
− Les formations herbeuses xériques artificialisées
Les ‘cultures’ et les ‘moissons’ sont des formations floristiquement riches, dont la variabilité
des exigences en humidité du sol des espèces peut témoigner de la diversité de situation sur
des terrains plus ou moins drainant et où peuvent s’installer, pour une période de temps
limitée, des espèces de la végétation spontanée, représentatives des stades de la dynamique
progressive de la végétation. Ces espaces agricoles sont également colonisés par des espèces
de formations non-rudéralisées et des espèces allochtones. Les ‘friches’, parcelles agricoles
abandonnées, colonisées par des espèces de formations artificialisées et à végétation
spontanée, illustrent la dynamique qui se met en place après abandon d’espaces cultivés. Les
‘vignes’ sont caractérisées par un faible nombre d’espèces, qui sont spécifiques des
formations herbeuses rudéralisées et des coteaux secs.
D’autres types de végétation, formations herbeuses rudéralisées, se rapprochent des cultures et
des moissons de par leur cortège floristique. Les ‘lieux meubles’, les ‘décombres’, les ‘lieux
vagues’, les ‘chemins’ et les ‘murs’ sont des formations semblables en terme de cortège
floristique, représentant des milieux fortement anthropisés, caractérisés par des plantes des
espaces rudéralisés, ouverts, marginalisés, propices à l’installation de plantes appartenant à
une diversité de groupes écologiques, dont des espèces cultivées ou introduites. Les ‘talus’
correspondent à des zones de séparation entre les bois et les formations herbeuses
rudéralisées, (tertres et bords des bois) sur pente, drainant, ayant des similarités floristiques
avec les coteaux secs.
− Les formations herbeuses xériques à végétation spontanée
Les ‘coteaux secs’ illustrent des formations prairiales buissonnantes à tendance xérophile, sur
sol drainant, entretenus par pâturage et évoluant naturellement vers la forêt si l’entretien est
arrêté. Ces formations sont proches des pelouses et des formations boisées, correspondant aux
stades herbacés dans la succession végétale de la forêt. Les ‘pelouses’ sont des formations
représentées par une flore héliophile herbacée diversifiée, sur sol à tendance fraîche. Les
294
pelouses définies telles quelles ne désignent pas les formations prairiales à tendance xérophile
classiquement décrites, mais les espaces herbeux des habitations et bords de route. Les
‘pâturages’ rassemblent trop peu d’espèces pour les caractériser précisément.
− Les formations aquatiques
Les ‘étendues d’eau’ et les ‘cours d’eau’ sont caractérisés par une flore typique et colonisés
par des espèces d’autres types de végétation, illustrant les échanges existants entre végétations
(cours d’eau, bois, prairie et espaces rudéralisés). Les ‘étendues d’eau’, riches d’un point de
vue floristique, correspondent aux formations végétales à eaux calmes, de type lieux humides
marécageux, marais, mares, étangs, et les ‘cours d’eau’ aux formations à eaux mouvantes de
type ruisseaux. Les ‘fossés’ correspondent à des zones de séparation entre les cultures et les
bois, plus ou moins inondés. Les ‘prairies’ sont caractérisées par une végétation des prairies
mésohygrophiles pacagées, inondées au moins une partie de l’année, avec l’alliance du
Cynosurion cristati (Bournérias et al., 2001). La situation géographique de ces prairies en
fond de vallon explique leur rapprochement dans l’AFC avec les bois humides.
− Les formations arborées
Les ‘bois humides’ correspondent aux ripisylves, colonisés par des espèces prairiales et
pionnières. Les ‘bois’ sont colonisés par des espèces non-forestières, anémochores, illustrant
des espaces ouverts, ce qui semble traduire l’existence d’un sous-bois pauvre en 1885,
supposition confirmée par la présence d’une diversité d’espèces prairiales héliophiles. Les
‘clairières’ peuvent être apparentées à des espaces de transition entre des formations boisées
et herbeuses prairiales, et considérées comme des formations présentant un intérêt signifiant,
en augmentant notamment l’hétérogénéité paysagère. Les ‘haies’ offrent, de par une épaisseur
de végétation relativement faible, des conditions de lumière suffisamment importantes pour
permettre l’installation d’espèces des parcelles environnantes. La présence d’un cortège de
plantes prairiales à tendance xérophile illustrent la présence courante des haies sur des talus,
créant des conditions d’humidité de sol faibles. La présence d’espèces représentant des
espaces rudéralisés marque la proximité des haies avec les parcelles agricoles, témoignant de
leur rôle comme limite de parcelles agricoles en 1885. Les ‘buissons’ (assimilés aux fourrés
arbustifs) ne sont composés quasiment que par des espèces communes aux bois et aux haies.
Ils représentent le stade intermédiaire de la dynamique progressive de la végétation.
295
Figure 51. Schéma de l’organisation et de l’utilisation de l’espace en 1885
W
III -
Les enseignements tirés de la hiérarchisation des
facteurs influençant la distribution de la végétation et la
composition floristique
À travers l’analyse statistique, nous avons pu étudier, dans ce chapitre, l’influence des
facteurs écologiques et anthropiques, sur la distribution et la composition de la végétation qui
s’exprime dans les formations végétales en présence, et ce, pour des paysages fortement
anthropisés. Nos résultats démontrent le rôle primordial des pratiques locales, conjointement
au type de paysage, dont l’importance a déjà été soulignée par les auteurs (Baudry et al.,
2000). L’hétérogénéité spatiale est la composante essentielle dans la compréhension de la
biodiversité végétale et de sa dynamique, dans les paysages agricoles. Comme d’autres études
l’avancent, cette hétérogénéité est liée au nombre de types d’éléments qui composent le
paysage, et à l’organisation spatiale de ces éléments. La végétation se distribue en réponse,
tout d’abord, aux conditions du milieu en rapport avec les exigences écologiques des espèces
végétales. Les activités humaines et leur évolution interviennent en second lieu, parfois de
manière déterminante. Ces aspects soulèvent différents points de réflexion :
296
1- Le rôle des facteurs mésologiques face aux exigences des plantes,
2- Le rôle des composantes structurelles sur la composition floristique, (cas des
taches boisées),
3- Les conséquences de l’intensification de l’agriculture sur l’écosystème,
Ces points de discussion sont maintenant développés en s’appuyant sur la littérature et sont
illustrés pour chaque type de formation décrit, en prenant le soin d’apporter autant d’éléments
de réponse que possible aux différences constatées entre sites et entre dates, dans les
précédentes analyses.
1-
Le rôle des facteurs mésologiques, face aux exigences des plantes
Les facteurs mésologiques déterminants se sont révélés être les conditions d’humidité du sol,
qui sont conditionnées par l’exposition, la pente et la situation topographique. Le rôle de
facteurs mésologiques sur la distribution de la végétation peut s’exprimer de façon directe en
réponse aux exigences écologiques des plantes, mais aussi de façon indirecte en conditionnant
d’autres facteurs qui eux-mêmes vont imposer une orientation à la distribution de la
végétation.
- De façon directe, les espèces, de par des exigences écologiques plus ou moins strictes,
répondent aux variations des conditions du milieu. En accord avec les résultats de l’analyse
statistique (caractéristiques intrinsèques aux espèces, significatives : mode de dissémination,
affinité pour la lumière et l’humidité du sol, et acidité du sol), nous avons démontré la
répartition typique des formations prairiales sèches sur les coteaux et des formations
hygrophiles en bas de versant, sur des terrains hydromorphes. Par ailleurs, pour une même
formation, des variations plus locales du substrat entraînent un cortège floristique différent
(situations siliceuses décalcifiées pour les pelouses et les bois). Si certaines espèces ne sont
pas perturbées par des modifications du milieu, d’autres sont plus sensibles et peuvent
disparaître si le milieu subit des perturbations (cas des prairies humides avec le drainage). À
l’exception de quelques plantes à vaste amplitude écologique, toutes les espèces d’une station
méritent attention, et les plus communes ne doivent pas être négligées au profit des raretés. Il
a été montré, pour des végétations en alpage, que lorsque les conditions écologiques
stationnelles sont particulièrement contraignantes, des espèces spécialisées dominent les
peuplements ce qui se traduit par une diminution de la diversité (Bornard et al., 1996).
Ces variations d’exigence des espèces vont pouvoir initier des successions végétales. En effet,
les stades se succédant sur une surface donnée résultent essentiellement de changements dans
les exigences du milieu et d'acquisitions successives des espèces colonisatrices (Polunin,
1967), les plantes des divers stades ayant des exigences d’habitat différentes (Cauderon et al.,
1995).
- De façon indirecte, les conditions du milieu dictent l’occupation du sol, qui influence la
distribution de la végétation. Les résultats des analyses du chapitre 5 indiquent que certains
espaces sont définis comme propices à l’agriculture et/ou à l’aménagement urbain (avec une
exposition et une pente particulière), laissant les espaces identifiés comme peu propices, libres
pour les formations à végétation spontanée, qui évoluent au final vers le bois. Par ailleurs, les
contraintes de l’époque conditionnent les caractéristiques physiques de ces espaces. Alors
qu’au XIXe siècle, les terrains propices étaient ceux situés le long des versants pour assurer
un drainage suffisant des terres, contraint par l’emploi des animaux de traits, les contraintes
297
actuelles de culture (machines lourdes) définissent les terrains propices comme ceux situés sur
des pentes faibles, pas trop accentuées.
Ces observations soulignent l’importance de prendre en compte les caractéristiques du
territoire, en parallèle aux objectifs et moyens de production, quand l’on souhaite définir des
bases de gestion de l’espace. C’est ce que nous présenterons dans le chapitre 6.
2-
Le rôle des composantes structurelles sur le cortège floristique boisé
Selon l’hypothèse émise au départ, il a été établi le rôle des composantes structurelles sur le
cortège floristique, à travers l’exemple des taches boisées. D’après les résultats de l’étude,
plusieurs facteurs peuvent être mis en avant comme influençant la biodiversité forestière.
Tout d’abord, nous avons montré qu’une forme irrégulière désavantage les espèces forestières
en favorisant les plantes herbacées, exigeantes en lumière. Ceci s’explique par le fait que des
formes plus irrégulières augmentent la bordure par rapport à l’espace intérieur et permettent
indirectement un contact plus important avec des habitats de types différents (Blondel,
1995b). En élargissant ce résultat, nous pouvons avancer que des formes irrégulières
favorisent les espèces étrangères, en rendant le contact plus facile avec les habitats voisins
(Ramade, 1999). Toutefois, cet aspect n’a pas été mis en évidence dans nos analyses. Il est
donc prioritaire de privilégier les formes compactes car elles minorent le rapport
périmètre/superficie, et donc les effets de lisière, accrus par la fragmentation. Des études
avancent que l’effet lisière est d’autant plus marqué que l’espace intérieur de la tache est
réduit, c'est-à-dire que la tache est petite. À l’opposé, au-delà d’une certaine surface
intérieure, l’effet lisière peut être insignifiant (cf. p.201). Néanmoins, nous n’avons pas
validé, à partir de nos analyses, l’hypothèse selon laquelle la réduction en taille des fragments
forestiers augmente la probabilité d’extinction des espèces et limite leur maintien. Pas plus
que l’hypothèse selon laquelle l’isolement des fragments limite leur colonisation par les
espèces, en favorisant les espèces à fort pouvoir de dispersion et les espèces généralistes.
La présence actuelle d’espèces non forestières héliophiles dans les sous-bois peut s’expliquer
par une fragmentation accrue des taches, qui facilite leur pénétration. Les résultats du chapitre
3 ont démontré que la forme des taches était associée à la fragmentation, la fragmentation
générant des taches aux formes irrégulières. Certains auteurs, (Pain et al., 2000), définissent
un niveau d’accessibilité des habitats pour les espèces, niveau perçu comme un facteur
limitant de l’utilisation des espaces par les individus qui ont à se déplacer entre les éléments
du paysage, les déplacements d’individus étant importants dans le maintien des populations
subdivisées par la fragmentation selon la théorie de la biogéographie insulaire (cf. chapitre 1).
Une tache d’habitat sera définie comme favorable si les autres habitats complémentaires sont
accessibles à l’espèce (Sih et al., 2000). D’après les auteurs, il est possible de limiter les effets
de la fragmentation sur l’extinction d’espèces, en laissant l’habitat favorable en groupe plutôt
qu’en tache d’habitats isolés, pour favoriser la dispersion entre taches ; d’autant plus que de
nombreuses espèces sont disséminées par les fourmis sur de courtes distances (GrashofBokdam, 1997). Par ailleurs, plusieurs études empiriques ont montré que plusieurs petits
fragments de forêt contiennent plus d’espèces qu’un seul large fragment de la même taille
(Wilcox, 1980 ; Honnay et al., 1999). La distance entre les taches doit être aussi courte que
possible et des corridors de dispersion doivent être présents pour faciliter les échanges entre
taches (Blondel, 1995b).
298
Les résultats démontrent le rôle écologique essentiel des formations boisées, au sein des
paysages ruraux. Elles participent de façon prépondérante à la biodiversité des paysages,
influencent leurs qualités esthétiques (Balent, 1996). Dans des paysages ruraux banalisés et
uniformisés par la modernisation des structures de production agricole au cours des dernières
décennies, les formations boisées apparaissent souvent comme les derniers refuges d’une vie
sauvage, et comme des éléments essentiels au maintien de la biodiversité résiduelle (Girard et
al., 1996 ; Balent, 1996). Finalement, les paysages d’openfield, habituellement associés à une
agriculture intensive et évoquant des milieux biologiquement très appauvris, peuvent être
grâce aux îlots forestiers des paysages riches et remarquables. Toutefois, l’on peut se
demander si les fragments d’habitat subsistants sont assez grands pour permettre d’entretenir
indéfiniment les populations. Pour aider à répondre aux questions plus vastes soulevées par la
pratique de la conservation, Wilson propose d’identifier ce qu’il nomme la « détection des
brèches » qui s’applique à la biodiversité et aux espèces en danger (Wilson, 1993).
3-
Conséquences de l’action anthropique et de son évolution sur la
végétation
Si la modernisation agricole, synonyme de mécanisation et d’intensification, a causé dans son
ensemble une destruction brutale des paysages agraires, nous avons pu révéler, dans certains
cas, son action bénéfique sur la biodiversité végétale, en initiant notamment une dynamique
progressive de la végétation.
- La modernisation agricole défavorise la biodiversité végétale dans les paysages
ruraux puisqu’elle agit sur différentes composantes de l’écosystème (cf. chapitre 1, p.42). Le
développement de pratiques agricoles intensives (monoculture, monosuccession, champs
homogènes sans marge de végétation, champs ouverts sans haies, paysage simplifié) a
homogénéisé et ouvert les paysages, et réduit la diversité biologique ; il a diminué le nombre
d’espèces en culture, faisant peser une menace sur un potentiel génétique inestimable (Conseil
de l'Europe et al, 2002a). Il est clair que la diversité des espèces sauvages a parallèlement été
considérablement réduite par les herbicides, les engrais, l’utilisation de semences
sélectionnées (Chauvet et Olivier, 1993 ; Cauderon et al., 1995). Environ 300 espèces
présentes dans les champs cultivés de France sont aujourd’hui menacées ; plus d’une centaine
approche de l’extinction (Jauzein, 1995). D’autant plus que, comme montré par les auteurs1,
la plupart des mauvaises herbes des cultures ont une faible occurrence (Dessaint et al., 2001).
L’inconvénients des mauvaises herbes
D’après (Polunin, 1967)
Les mauvaises herbes nuisent à l’agriculture
- en soustrayant aux cultures l’eau et les aliments nécessaires,
- en les empêchant de se développer par la concurrence de leurs racines,
- en les étouffant et en les rabattant s’il s’agit de plantes grimpantes.
1
Les auteurs ont montré que plus de la moitié des espèces ont une occurrence inférieure à 5%, et que seuls neuf
espèces sur les deux cent dix répertoriées sont présentes sur plus de la moitié des stations.
299
Parfois parasites, elles peuvent avoir des graines ou des fruits si semblables à ceux de la
plante cultivée qu’il est difficile de les séparer et que les graines de culture se trouvent par
suite frelatées et perdent de leur valeur. Elles peuvent donner asile à des insectes nuisibles ou
à des maladies végétales, se montrer sur le cheptel, vénéneuse ou nuisible.
Le développement agricole a entraîné le remplacement de larges parties de l’écosystème
naturel par une matrice de parcelles (Paoletti, 2001). Les fragments de végétation naturelle
sont devenus une composante des paysages agricoles français, rendant les espèces qui vivaient
au sein d’écosystèmes continus particulièrement vulnérables (cf. chapitre 1, p.34). Par
ailleurs, la réduction du nombre d’espèces sauvages locales peut être préoccupante pour la
sélection de plantes cultivées (Barbault, 1997). A partir du XIXe siècle, les pratiques de
sélection, privilégiant les cultivars à haut rendement, menacent les variétés locales plus
adaptées, phénomène accéléré par l’emploi intensif d’herbicides, éliminant nombre de parents
sauvages.
La forte pression anthropique exercée sur les formations de bord des eaux étudiées (fauchage,
élagage, désherbage) freine l’établissement d’un cortège floristique riche. De même, le
recalibrage des cours d’eau et le contrôle des crues empêchent l’apport de limons dans les
prairies et menacent à terme leur richesse floristique. Les prairies humides sont des milieux
naturels, fragiles et menacés par les drainages (Orth et al., 1996) et leur conversion en terres
cultivées. Dans l’Union Européenne, 11% des prairies permanentes ont été transformées en
culture depuis 20 ans (European Commission 1999, in Condé, 2000)). Avec l’évolution des
techniques d’élevage et la dégradation du revenu de cette profession, les prairies de fauche,
jadis bien représentées du fait de la valeur vénale du foin, sont devenues aujourd’hui
extrêmement rares, les pratiques actuelles étant orientées vers la fauche exclusive
(suppression du pâturage). D’après des études, il existe une cohérence entre le niveau
d’intensité d’exploitation et la richesse spécifique, notamment la richesse patrimoniale
(Chaïb, 1999). Ainsi, des pratiques à niveau d’intensification faible à moyen et la fauche
tardive favorisent la présence d’espèces patrimoniales ; alors que cette richesse patrimoniale
est appauvrie par l’envahissement des prairies par des espèces sociales à forte capacité
compétitive (rudérales), et que la richesse spécifique est appauvrie par l’envahissement par
des espèces de grande taille. Par ailleurs, il a été démontré dans des études antérieures que la
fertilisation par apports azotés, qui entraîne le doublement de la contribution relative des
graminées bonnes fourragères, diminue la richesse floristique (Broyer et al., 1995). Pourtant,
nous avons vu à quel point la flore des prairies naturelles, de fond de vallées devenues rares,
peut être exceptionnelle.
L’abandon de pratiques traditionnelles met en péril certains milieux, qui sont souvent perçus
comme inutiles (Chauvet et Olivier, 1993). Pourtant, la disparition des haies peut avoir une
incidence importante sur les espèces et leur dispersion. Au Royaume-Uni, entre 1978 et 1990,
on estime que la disparition des haies a entraîné une perte de 8% de la diversité biologique
végétale (source HMSO, 1994 in OCDE, 1996). La haie, de part sa structure, se présente sous
la forme d’une double lisière (écotone), contribuant à augmenter la richesse floristique des
milieux limitrophes. De plus, la diversité floristique de la haie est d’autant plus importante
que la haie a une structure changeante dans le temps et dans l’espace (Baudry et al., 1988).
Depuis quelques années, les haies sont replantées, mais elles contiennent des espèces
horticoles, qui impliquent un risque de prolifération et de compétition avec les espèces
autochtones.
300
L’embroussaillement est déterminé par l’histoire de l’utilisation du sol (Cohen et al, 1998).
Les avancées technologiques ont contraint l’abandon de certaines terres cultivées et leur
enfrichement. Aussi, en plus de leur intérêt floristique peu notable, les fruticées peuvent
refléter une crise profonde. L’apparition des formations buissonnantes, depuis 1834, soulève
le problème de l’embroussaillement puisqu’il entraîne une dévalorisation du paysage original
à travers une perte de la valeur esthétique, un risque de dégradation de l’attraction touristique
et un risque de la régression de la biodiversité végétale (Cohen et al, 1998). Ces fourrés sont
inquiétants en raison de ce qu’ils signifient dans l’évaluation de nos sociétés : la séparation de
l’homme et de la nature (Terrasson, 1996) et l’échec du tout productivisme.
Dans un tout autre ordre d’idée, nous avons vu que l’arrêt de l’action anthropique provoque
l’enfrichement des formations herbeuses telles que les pelouses de coteaux secs, par
suppression du pâturage. Or, ces milieux se sont avérés intéressants de part une richesse
floristique importante notamment en Orchidées.
- Toutefois, les contraintes imposées par cette modernisation, ont également favorisé la
biodiversité végétale. En effet, certaines activités anthropiques induisent une dynamique
progressive de la végétation spontanée. D’autres favorisent la dispersion des espèces au sein
des formations végétales. De nouvelles formations végétales sont apparues, en particulier, sur
des parcelles agricoles abandonnées, en raison d’une pente trop forte (dans les années 194050, augmentation des formations boisées). L’arrêt du pâturage dans les prairies peut entraîner
leur évolution vers la forêt par enfrichement. De plus, nous avons souligné le rôle de
l’exploitation forestière dans la création d’une hétérogénéité paysagère, favorable à la
biodiversité végétale. Malgré une forte pression anthropique, nous avons vu que les milieux
anthropisés, tels que les lieux incultes, pouvaient constituer des habitats favorables à la
biodiversité végétale en créant des espaces libres et ouverts. Les marges de culture peuvent
renfermer une flore riche. Les bords de route peuvent constituer des ‘micro-habitats’ et des
lieux d’échange (corridors végétaux). Les murs, les vignobles renferment une flore
particulière.
Nous avons confirmé l’importance, largement mis en évidence par les auteurs, de l’action
anthropique, notamment celle des animaux d’élevage, dans la dispersion des graines et leur
colonisation dans de nouvelles formations végétales (Clausen et al., 2002 ; Figuerola et al.,
2002). Il a été prouvé que les moutons, qui étaient présents en 1885, jouent un rôle important
dans le transport de graines de la plupart des espèces caractéristiques des pelouses des coteaux
secs (Bakker et al., 1999). La dispersion, ou « pouvoir colonisateur de la plante », est une
phase critique dans la dynamique des communautés de plante et est fondamentale pour le
maintien d’une diversité en espèces, dans des paysages de plus en plus anthropisés
(Thompson, 1993a). La dispersion par le vent, qui est un des modes les plus communs de la
dispersion des graines, est privilégiée dans le Lauragais. Nous avons mis le doigt, à ce sujet,
sur le rôle amplificateur de la multiplication des échanges. D’après les résultats d’une étude
comparant deux types de communauté (Schulz et al., 1990), il semble que les espèces
fugitives des habitats temporaires et successionnels (par exemple une végétation rudérale,
instable) ont plus de dispersion par le vent efficace que les espèces des communautés de
plantes plus stables et permanentes (par exemple, une prairie de fauche). Ceci pourrait
expliquer la richesse observée en espèces anémochores dans les formations prairiales et
confirmer le pâturage dans les bois en 1885, qui éclaircit le sous-bois et favorise un cortège
d’espèces héliophiles anémochores. Par ailleurs, la dispersion des graines et leur
établissement sont fortement corrélés à leur taille, dont les réserves assurent les possibilités de
301
germination (Hodgson et al., 1993 ; Berg, 2000)1, ainsi qu’à leur durée de vie. Les auteurs
avancent que, parmi les trois catégories de graines classées selon un gradient de durée de vie transitoire, courte, longue - seules les graines à longue durée de vie (persistance dans le sol
pendant au moins 5 ans) peuvent contribuer à la régénération de communautés de plantes
détruites ou dégradées (Thompson, 1993b). Par ailleurs, ces graines persistantes sont
fréquemment associées à de petites tailles. Cette banque de graine contribue en partie au
maintien de la biodiversité végétale. D’après les auteurs, seulement la moitié des espèces
présentes dans les pelouses constituent la banque de graine (Bakker et al., 1999). Ces
connaissances sont essentielles à prendre en compte quand l’on souhaite restaurer des
écosystèmes dégradés, dans une démarche de gestion conservatoire (cf. chapitre 6).
Finalement, dans le Lauragais, les principaux agents de dispersion entrant en jeu sont, par
ordre d’importance décroissant :
-
le vent,
les animaux,
l’action de l’Homme, volontaire ou non,
l’eau.
Toutefois, d’après les auteurs, (Ronce, 2001), les pratiques d’usage de l’espace combinées à
d’autres vecteurs, tels que la banque de graine ou l’organisation spatiale des taches d’habitat,
sont plus importantes pour la dispersion des espèces que leur propre capacité de dispersion, et
constituent la clé pour comprendre les migrations passées et futures des plantes (Poschlod et
al., 1998). Ceci peut expliquer la présence de plantes ayant des exigences écologiques
différentes des formations dans lesquelles elles ont été trouvées. Ces espèces « reliques »
témoignent donc d’un état antérieur différent de la végétation (exemple de la végétation des
bords des eaux, anciennes prairies, ou de la végétation des pelouses, anciennes cultures). Elles
peuvent également témoigner de pratiques passées différentes pour une même formation
(exemple des prairies de fauche avec présence d’espèces caractéristiques des prairies
pacagées, ou des bois avec présence d’espèces héliophiles, prairiales témoignant d’un sousbois plus clair car pâturé ou témoignant d’exploitations plus intenses) (Peterken, 1996).
D’autres espèces, comme les espèces pionnières ou les essences forestières dans le cas des
formations prairiales, indiquent dans quelle direction la végétation pourrait évoluer en dehors
de toute intervention perturbatrice. La composition floristique peut donc être employée
comme le témoin de pratiques passées ou d’évolution future.
Nous avons révélé l’importance de l’hétérogénéité des fragments forestiers sur la biodiversité
végétale. Cette hétérogénéité peut être initiée par l’exploitation forestière. La gestion des
parcelles boisées peut influer pendant longtemps sur la diversité floristique (Peterken, 1993).
Dans le même ordre d’idée, il est profitable à la biodiversité de laisser vieillir des fragments
de forêts, les forêts anciennes figurant parmi les écosystèmes terrestres les plus riches en
diversité biologique (OCDE, 1999).
Il est donc essentiel de prendre en compte cette diversité de facteurs pour créer une
hétérogénéité de facettes végétales, dans l’optique d’une gestion conservatoire des espaces
ruraux. Ce que nous nous attacherons à faire dans le chapitre 6.
1
Selon les auteurs, les graines de petite taille sont préférentiellement présentes dans les habitats ouverts, les
graines de taille moyenne dans les habitats fermés de type pelouse, et les graines de plus grande taille dans les
habitats fermés arborés de type bois.
302
- Si les activités humaines se révèlent être bénéfiques ou préjudiciables à la biodiversité
végétale, certains aspects semblent plus mitigés dans leurs effets. Certaines activités, comme
le pâturage ou le fauchage, peuvent bloquer tout processus de dynamique. Or, les résultats de
nos analyses ont révélé la remarquable richesse floristique des formations prairiales. Dans le
même ordre d’idée, l’effet des herbivores sur la végétation peut être perçu comme positif ou
négatif. Les herbivores sont généralement considérés comme influençant la biodiversité
végétale par leur consommation directe des plantes dominantes et par leurs effets indirects sur
la compétition des plantes (Crawley, 1997), cette action dépendant, en premier lieu, de la
taille et de l’abondance des espèces d’herbivores (Olff et al., 1998). Par ailleurs, la richesse
spécifique des pâturages étant maintenue par un équilibre dynamique entre les colonisations
locales (par dispersion) à partir du pool d’espèces sur des échelles spatiales grandes et des
extinctions locales, Olff et Ritchie avancent que les herbivores influencent la diversité des
pelouses à travers les mécanismes de colonisation et d’extinction des espèces (Olff et al.,
1998). Par ailleurs, des études ont démontré l’adaptation des espèces végétales à
l’abroutissement, grâce à leur plasticité phénotypique (Karban et al., 1999).
4-
Discussion sur la méthode et sur les données analysées
- Dans toute étude adoptant une démarche statistique, le nombre de données doit être suffisant
pour garantir la validité des résultats et mettre clairement en lumière les phénomènes en jeu.
- Pour permettre une comparaison optimale des listes floristiques, actuelle et passée, il
faudrait construire un tableau fondé sur la même structure, en remaniant les deux listes, par
regroupement des relevés et milieux cités en type de végétation, et codage des espèces selon
leur présence/absence dans les types de végétation.
- L’AFC nous a permis de décrire la végétation passée, et d’harmoniser les indications
typologiques disponibles (milieux cités), qui se sont avérées hétérogènes et parfois ambiguës.
- Nous avons considéré la flore de 1885 comme un état de référence avant l’intensification des
pratiques agricoles. Pourtant, la végétation au XIXe siècle était déjà perturbée par les activités
humaines de l’époque et était déjà bien diminué dans les contrées du Lauragais, comme en
témoigne un texte de 1864 relatant d’herborisations faites dans la région toulousaine « […]
quelques coins oubliés […] quelques espèces. Les berges des rivières, les coteaux aux pentes
escarpées et les bois sont les derniers refuges de la flore locale » (Timbal-Lagrave et al.,
1864).
W
303
IV -
Dynamique de la végétation et de la composition
floristique en réponse aux changements d’usage de
l’espace agricole
La confrontation des différents résultats, tirés des chapitres précédents (2, 3) et du présent
chapitre, nous permet de tenter d’apporter des éléments d’explication à la variation constatée
de la flore entre sites et entre dates, en relation avec des organisations spatiales changeantes.
- L’étude comparative de la flore actuelle entre deux sites nous permet d’avancer que la
biodiversité végétale du site de Nailloux est globalement plus élevée, malgré une
artificialisation observée comme étant plus forte. Le paysage de Nailloux peut être qualifié
d’ouvert, caractérisé par une flore héliophile, herbacée vivace ou ligneuse basse, anémochore,
tandis que le paysage de Préserville semble plus fermé, caractérisé par une flore photophile,
ligneuse haute, épizoochore. Il semble donc que la biodiversité végétale soit favorisée par
une ouverture du paysage ; les formations herbacées, stade intermédiaire de la dynamique
naturelle, sont connues pour renfermer une flore plus riche que les formations forestières
stables dont elles dérivent. En effet, durant le processus de succession d’une communauté de
plantes de lumière à une communauté de plantes d’ombre, le niveau de transition peut
contenir les espèces d’arbres des deux communautés et avoir un nombre d’espèces plus haut
que les deux communautés, pionnière et climacique (Fralish, 1997). Pourtant, les actions en
faveur de la biodiversité végétale sollicitent souvent le maintien ou la restauration des
écosystèmes naturels, climaciques, forestiers.
Les conditions mésologiques sont déterminantes pour la composition floristique de la
végétation : le paysage de Nailloux, au relief plus vallonné et donc plus drainant, et aux
expositions plus marquées, présente une flore plus contrastée, hygrophile ou xérophile.
- L’étude comparative de la variation de la flore (1885 – 2001) nous permet d’avancer que
l’érosion de la biodiversité végétale constatée est en partie due à une régression de
certaines formations à végétation spontanée (milieux aquatiques) et à une augmentation
de la fragmentation des formations à végétation spontanée (bois).
Nous constatons malgré tout plusieurs caractéristiques constantes de la flore lauragaise depuis
1885 :
- constance des espèces héliophiles, anémochores et épizoochores,
- constance des espèces eurasiatiques et méditerranéennes,
- constance des espèces à haut pouvoir de colonisation et des espèces inféodées à un
type de végétation.
Les changements de pratique et d’utilisation de l’espace (comme le pâturage, le fauchage)
semblent plus déterminants dans l’évolution de la flore que les variations de l’organisation
spatiale (‘pattern’ paysager). L’érosion de la biodiversité végétale dans des paysages du
Lauragais est en particulier marquée par la diminution de trois cortèges floristiques :
1- du cortège de plantes hygrophiles, aquatiques et de marais, causée par une
régression forte des surfaces représentées par les milieux aquatiques,
2- du cortège de plantes messicoles, causée par une modification des pratiques
agricoles (désherbage chimique),
3- du cortège d’espèces mésoxérophiles et xérophiles, causée par une modification de
l’utilisation de l’espace (urbanisation, disparition des pâtures).
304
Nous pouvons conclure que deux types de processus affectent la biodiversité végétale dans les
paysages ruraux soumis à l’agriculture intensive :
-
l’organisation des structures spatiales,
les pratiques et utilisations de l’espace.
Par ailleurs, nous avons constaté une augmentation notable des espèces constantes de la flore
lauragaise qui correspond à une banalisation de la flore avec une proportion accrue en
espèces fréquentant une diversité de milieux, notamment des forestières. La généralisation des
espèces forestières dans de multiples habitats illustre l’abandon de l’entretien des milieux
herbacés et souligne l’importance des pratiques humaines dans le maintien de la biodiversité
végétale en bloquant le dynamisme de la végétation.
Nous envisageons maintenant une description synthétique de la variation de la flore pour
chaque groupement végétal étudié, avec la confrontation des résultats des chapitres 3, 4 et 5,
entre sites et entre dates.
1-
Les cultures
Nous n’avons pas observé de grandes variations de surfaces depuis 1834. Cette faible
variation pourrait expliquer la faible variation de la diversité spécifique. Une cause évidente
de la diminution de la richesse spécifique constatée correspond à l’intensification des
pratiques (désherbage chimique, labour profond, rotation des cultures, jachères moins
fréquentes) depuis 1834, accentuée par la fusion des parcelles et la diminution du
morcellement qui entraînent une proportion moindre des marges de culture, sachant que la
végétation spontanée est surtout présente en marges des cultures. Une autre cause également
apparue correspond à la réduction de la diversité des plantes cultivées, avec leur cortège
floristique associé (exemple des cultures de lin).
La richesse en espèces des cultures sur le site de Préserville est supérieure, malgré des
surfaces aussi grandes que sur le site de Nailloux. Cette différence de richesse semble être due
à des pratiques moins intensives sur Préserville comme nous l’avons avancé dans le chapitre
3. La différence de composition floristique entre sites (Préserville plus riche en espèces
hygrophiles, Nailloux plus riche en espèces xérophiles) peut s’expliquer par un relief plus
prononcé sur le site de Nailloux, et donc plus drainant. Nous avons d’ailleurs vu que
l’humidité et l’exposition étaient deux facteurs significativement déterminants pour la
composition floristique (cf. chapitre 5).
2-
Les vignes
Les vignes représentent des milieux, de tout temps, assez pauvres en espèces. Nous constatons
une augmentation de la richesse spécifique malgré une disparition presque totale des surfaces
depuis 1834. Cette apparente opposition s’explique par la destruction de l’ensemble du
vignoble en 1885 dans le Lauragais sous l’impact du phylloxéra (cf. chapitre 2).
305
3-
Les lieux incultes anthropisés
Malgré une surface grandissante depuis 1834 (d’après l’évolution de la zone urbanisée du
chapitre 3), nous constatons une diminution de la richesse spécifique globale depuis 1885
(résultats du chapitre 4). Ce constat est le résultat de l’intensification des pratiques,
notamment du désherbage (talus, murs, fossés, bords de route), et de l’évolution de certains de
ces milieux (goudronnage des routes, suppression des murets interchamps, des talus). Le site
de Nailloux qui montre depuis 1834 des surfaces disponibles supérieures au site de
Préserville, a la plus forte richesse spécifique. La flore a toujours été diversifiée, préfigurant le
rôle de ces milieux comme zone d’accueil pour une diversité d’espèces et expliquant
certainement qu’il n’y a pas de différence marquante de composition floristique entre les deux
sites. Aujourd’hui, la flore est surtout représentée par des espèces rudérales. Il semble que la
composition floristique se soit banalisée depuis 1885. Nous avons décrit à cette époque une
végétation typique et variée, en particulier riche en espèces annuelles estivales. La flore des
zones urbaines est une des plus riches quelle que soit l’époque (1885, 2001). Ceci illustre la
colonisation par une diversité d’espèces, facilitée par une physionomie ‘ouverte’, non arborée.
4-
Les bords des eaux
Actuellement, la végétation est faiblement représentée par des espèces typiques de la
formation (hygrophiles, aquatiques, de marais, hydrochores), d’après le chapitre 4. La
richesse spécifique y est faible. Ces aspects illustrent des formations artificialisées, avec une
végétation diversifiée, non typique, et dégradées (gyrobroyage, fauchage) par un entretien
soutenu. La végétation sur le site de Préserville possède une richesse spécifique supérieure
mais montre moins de typicité que sur le site de Nailloux. Ces observations indiquent d’une
part une plus grande colonisation à partir des milieux environnants sur le site de Préserville,
favorisée probablement par des formations plus dégradées et donc plus ouvertes que sur
Nailloux, et d’autre part une surface disponible plus étendue sur Nailloux (lac). La flore de
ces milieux s’est banalisée depuis 1885, et a diminué. La proportion d’espèces typiques a
fortement régressé (aquatiques, de marais, hydrochores). Si les grandes étendues d’eau
actuelles n’étaient pas présentes à l’époque, nous avons vu que de nombreuses mares et autres
petites étendues d’eau étaient dispersées dans le paysage du XIXe siècle. C’est donc la
combinaison de la disparition d’un grand nombre de petites mares et la dégradation de la
formation (drainage, calibrage des cours d’eau, gyrobroyage) qui a entraîné la variation
observée de la flore et de sa composition floristique.
5-
Les prairies
Les prairies sont des formations assez peu représentées dans le paysage actuellement, sur les
deux sites. Elles renferment une richesse en espèces modérée. La forte proportion d’espèces
forestières héliophiles, constatée dans les prairies actuelles, évoque la nécessité d’un
entretien régulier pour leur maintien. Nous ne pouvons pas, avec les données traitées, établir
de relations claires entre les résultats obtenus dans les différents chapitres : le chapitre 3
indique des surfaces supérieures sur le site de Préserville (totale, par tache, maximale), et ce,
depuis 1834 ; le chapitre 4 indique une richesse spécifique légèrement supérieure sur le site de
Nailloux. Il est probable que d’autres facteurs, de type humidité du sol, pente, situation
topographique, sont plus déterminants, que les attributs spatiaux, ayant constaté une
proportion supérieure d’espèces hygrophiles sur le site de Nailloux. Il serait donc intéressant,
306
dans l’optique d’une poursuite de cette recherche, d’analyser de façon indépendante, les
relevés de type "prairie" par le procédé statistique et de prendre en compte d’autres facteurs
tels que, par exemple, l’intensité de fertilisation.
Malgré une forte diminution des surfaces depuis 1834, la richesse spécifique augmente depuis
1885. Ceci révèle deux phénomènes. D’une part, l’abandon du pâturage entraîne moins de
pressions sur les plantes, et notamment freine la dominance de certaines plantes (Marino et
al., 1997). D’autre part, de petites surfaces peuvent contenir une diversité élevée en espèces.
Cette conclusion met l’accent sur la nécessité de conserver une diversité de surfaces, dans
une optique de gestion conservatoire des espaces ruraux (cf. chapitre 6).
6-
Les pelouses
Les facteurs influençant la végétation et sa composition, révélés dans le chapitre 5, expliquent
la composition typique des pelouses : espèces de prairie maigre et xérophiles, et illustrent la
mise en relation des facteurs :
-
type de végétation – groupe écologique des espèces
humidité du sol – exigence en humidité du sol des espèces
La présence d’espèces forestières, ligneuses basses, illustrant la mise en place de la succession
de végétation, éclaire sur l’importance de prendre en compte un autre facteur : l’intensité de
l’intervention anthropique sur le milieu. Des résultats paraissent contradictoires : les pelouses
sur le site de Nailloux sont plus riches en espèces ligneuses basses, colonisatrices ce qui laisse
supposer d’un abandon de l’entretien plus ancien. Or d’après les analyses comparatives du
chapitre 3, les pelouses présentes sur le site de Nailloux ont été abandonnées de tout entretien
bien après celles du site de Préserville (respectivement après 1993, et entre 1946 et 1972), ce
qui laisserait supposer a priori un embuissonnement plus ancien et plus important pour les
pelouses de Préserville et donc une présence en espèces ligneuses plus importante. Cette
apparente contradiction peut s’expliquer par une évolution des pelouses, plus anciennement
abandonnées, en fruticées sur le site de Préserville entraînant une plus faible proportion de
pelouses actuellement.
La comparaison entre sites montre une richesse spécifique et une richesse en espèces
xérophiles, héliophiles supérieures sur le site de Nailloux. Par ailleurs, les résultats du
chapitre 3 indiquent une surface en pelouses trois fois supérieure sur Nailloux, un nombre de
taches plus grand, avec des surfaces plus grandes. De plus, l’évolution de l’organisation
spatiale montre que les surfaces en pelouse ont augmenté sur Nailloux et diminué sur
Préserville (ayant évolué plus précocement vers la fruticée). Il semble donc que la richesse
spécifique et la composition typique des pelouses sont liées à la surface disponible. Cette
hypothèse serait à mettre clairement en lumière dans une étude future, par analyse statistique
des caractéristiques structurelles des taches en pelouse.
L’analyse de la variation de la flore depuis 1885 a révélé une diminution de la richesse et du
cortège typique des pelouses (diminution des espèces de prairie maigre et xérophiles). Aux
vues des résultats du chapitre 3 qui indiquent une augmentation de la surface des pelouses sur
le site de Nailloux, il est difficile d’apporter des éléments de réponse clairs à cette variation.
Peut-être, l’abandon du pâturage, qui favorise les espèces héliophiles et l’embuissonnement
de la végétation, sont deux facteurs explicatifs possibles. La richesse d’espèces des lieux
307
anthropisés (rudérales et adventices) en 1885 a d’ailleurs témoigné de la dispersion des
graines par les troupeaux. L’arasement des talus et l’urbanisation peuvent aussi constituer des
éléments de réponse.
7-
Les fruticées
Les analyses du chapitre 3 indiquent que cette formation a toujours été peu représentée, en
terme de surface, dans les deux paysages, depuis 1834. Cette particularité semblerait
expliquer sa faible richesse floristique, depuis 1885, révélée dans le chapitre 4. D’autant plus
que cette formation se maintient assez peu de temps, constituant un stade de la dynamique
naturelle de la végétation, et limitant ainsi la colonisation d’espèces. Un caractère floristique
dominant de cette formation est d’ailleurs la forte proportion d’espèces forestières héliophiles.
L’augmentation de la richesse floristique de ces milieux entre 1885 et 2001 s’explique par
leur apparition entre 1834 et 1946 (cf. chapitre 3), entre autre à la suite de l’évolution de
formations prairiales non entretenues. Il semble donc que leur apparition se soit déroulée plus
précisément entre 1885 et 1946, apparition que nous présumons liée à la disparition des
troupeaux. Nous n’avons pas observé de différences marquantes au niveau de la richesse
spécifique entre les deux sites, qui ont par ailleurs des surfaces totales globalement égales.
Actuellement, le cortège est peu diversifiée, non caractéristique de la flore lauragaise.
8-
Les bois
L’analyse statistique menée sur les caractéristiques structurelles et physiques des taches
boisées dans le chapitre 5, nous a permis de révéler l’importance de la forme de la tache
(lisière et espace intérieur) sur la composition floristique. Ainsi, des formes compactes
présentent une richesse spécifique et une richesse en espèces forestières plus grandes que des
formes irrégulières (augmentation des conditions de lumière). Or, les analyses du chapitre 3
ont révélé des taches plus fragmentées sur le site de Nailloux (formes plus irrégulières, taches
plus isolées). Cette fragmentation s’est accentuée dans le temps depuis 1834, alors qu’elle a
diminué sur le site de Préserville. Cette différence dans l’organisation spatiale des taches
boisées sur les deux sites explique une richesse spécifique ainsi qu’une richesse en espèces
forestières des taches boisées plus faibles à Nailloux, révélées par les analyses du chapitre 4.
Par contre, il peut paraître surprenant que la richesse spécifique actuelle des lisières soit
supérieure pour Préserville alors que les taches ont une forme de plus en plus compacte, et de
plus en plus irrégulières pour Nailloux. Ceci révèle la difficulté de mettre en évidence
l’intervention des facteurs pris un par un, et de la complexité des systèmes, avec imbrication
de différents facteurs (distance, forme, surface). Nous pouvons conclure que les facteurs mis
en évidence dans les analyses statistiques expliquent, en partie, les différences de composition
floristique des taches boisées pour les deux sites.
Le chapitre 3 a montré une diminution de l’exploitation forestière par taillis (or, nous avons
démontré son rôle dans l’augmentation de la richesse spécifique1), et une augmentation de
l’isolement et du morcellement des taches depuis 1834. Par ailleurs, le chapitre 4 a montré
une diminution de la richesse spécifique des bois et une augmentation de celle des lisières,
depuis 1885. D’après les résultats du chapitre 5, la variation temporelle de la flore s’explique
1
Le taillis impose à la végétation forestière et notamment aux strates inférieures, de fréquentes variations de
l’humidité du sol, l’alternance d’éclairement faible et d’ensoleillement intense. L’effet temporaire de la coupe
sur la flore s’accompagne par l’envahissement par des espèces sociales (Bournérias et al., 2001).
308
donc par une atténuation de l’exploitation forestière (coupe, pâturage, ramassage du mortbois) qui entraîne la disparition des espèces prairiales et une proportion de lisière plus
importante en rapport à l’espace intérieur, qui permet l’établissement d’un cortège d’espèces
héliophiles, xérophiles plus important.
Les analyses du chapitre 5 ne nous permettent pas de répondre clairement aux prédictions
faites dans le chapitre 3, que les taches boisées de petites tailles sont plus susceptibles de
contenir des espèces exotiques ou adventices. La littérature indique que la disponibilité en
lumière faible dans l’intérieur du bois est le plus important des facteurs qui limitent l’invasion
des fragments de forêt par des espèces non indigènes et que les forêts matures sont plus
résistantes aux invasions que les sites de succession jeune (Luken, 1997).
9-
Les haies
Les haies ont toujours été des écosystèmes d’origine anthropique. Nous avons démontré
l’importance de l’âge et des conditions mésologiques dans la composition floristique de la
haie. Nous constatons une augmentation des espèces allochtones dans les haies, en raison de
plantations récentes d’espèces horticoles. Les haies en 1885, positionnées sur les talus, sont
caractérisées par un cortège de plantes xérophiles. Elles sont plantées, notamment en espèces
fruitières. Les haies qui assuraient de multiples fonctions au XIXe siècle (production de fruits,
de fourrage, limite de champs), ont été considérablement détruites lors des remembrements,
dès les années 1940-50.
309
Synthèse conclusive des résultats : régression de
la biodiversité végétale et variation de la
composition floristique, en réponse à des
organisations spatiales changeantes
Les résultats obtenus des analyses menées sur l’indicateur floristique (chapitre 4) et son
approche spatiale (chapitre 3), et de la hiérarchisation des facteurs actifs de la distribution et
de la composition de la végétation (chapitre 5), nous permettent de valider les hypothèses
formulées et de répondre aux questions que nous nous étions posées. Notre objectif de départ,
qui était de mettre en lumière l’évolution de la biodiversité végétale et de comprendre les
processus entrant en jeu dans son établissement, dans des paysages soumis à l’agriculture
intensive, a été atteint.
La richesse des résultats, obtenus par une étude analytique poussée, nous a permis de dégager
les grands traits d’évolution de la biodiversité végétale et les principaux facteurs déterminants,
en réponse à des changements spatio-temporels des structures paysagères, et des pratiques et
utilisation de l’espace. Nous avons observé une régression globale de la biodiversité
végétale depuis 1885, ainsi qu’une banalisation de la flore, malgré une typicité constante
de la physionomie de la végétation, caractérisée par les trois strates de végétation. La liste, qui
a été établie, d’espèces constantes de la flore lauragaise s’est enrichie depuis 1885.
Contrairement à ce qui était présagé, les milieux fortement anthropisés, comme les cultures,
ne sont pas forcément les plus pauvres floristiquement. Si nous avons observé une régression
globale de la biodiversité végétale depuis 1885, une autre variation de la flore s’opère au
niveau de la composition floristique. Les cortèges floristiques changent en réponse à une
nouvelle organisation du paysage. Certaines espèces régressent tandis que d’autres
apparaissent et/ou prospèrent, pouvant feindre parfois une constance de la biodiversité
végétale.
L’exemple pris du Lauragais, territoire marqué par une emprise humaine ancienne, montre
que de tels territoires peuvent renfermer une diversité floristique remarquable. Comme nous
nous y attendions, les formations à végétation spontanée se sont révélées des réservoirs de
biodiversité. Plus inattendu, les résultats ont clairement montré le rôle de certains milieux
anthropisés comme réservoirs de biodiversité, au moins temporairement. Nous avons
démontré que la diversité de formations végétales permettait l’établissement d’une flore riche
et diversifiée. Toutefois, cette flore ne se distribue pas de façon homogène dans les
formations : certaines formations (de type pelouses et communautés rudérales) manifestent
une richesse spécifique supérieure aux autres (notamment de type vigne, fruticée). Nous
avons vu que cette distinction est en particulier le résultat d’une organisation spatiale
différente, certains milieux étant moins représentés que d’autres.
Les deux sites d’étude, présentant un degré de pression anthropique différent et traduisant une
organisation spatiale différente, se sont révélés comme deux exemples appropriés pour mettre
en évidence les facteurs locaux, actuels et passés, qui influencent la distribution de la
végétation et sa composition floristique. L’hétérogénéité paysagère, qui s’exprime notamment
au niveau de la physionomie des taches boisées, s’est avérée essentielle pour favoriser la
biodiversité végétale. Le développement de pratiques agricoles intensives et la fragmentation
des habitats ‘naturels’, qui illustrent une artificialisation du paysage, ont homogénéisé les
310
paysages et réduit la diversité biologique associée aux formations végétales, naturelles ou
artificialisées (Cauderon et al., 1995). Le paysage de Nailloux que nous avons observé comme
plus sujet au cours du temps à des transformations de l’occupation du sol, présente une plus
grande diversité paysagère et une plus grande richesse spécifique. À l’inverse, le paysage de
Préserville, pour lequel nous avons observé une diminution de l’hétérogénéité paysagère au
cours du temps, montre une diminution de la disponibilité d’habitat pour la biodiversité
végétale, défavorisant la richesse spécifique. Nous avons pu mettre en évidence l’incidence
déterminante de l’évolution des structures sur la richesse et la diversité des paysages, comme
avancée par Lefort (1997), ainsi que celle des pratiques humaines, que les trois points suivants
illustrent. Ces facteurs se manifestent à deux niveaux d’échelle spatiale : la parcelle et le
paysage.
- Premièrement, la mutation des pratiques agricoles (tracteurs, choix des agriculteurs,
développement urbain), dictée par le modelé topographique (pente, exposition, humidité),
détermine la distribution des formations végétales (pelouses, bois, prairie) selon l’aptitude des
terrains à la mise en valeur agricole : les cultures sur les fortes pentes et les versants exposés
au nord ont été délaissées, au profit de l’installation d’une végétation sauvage, riche et
diversifiée.
- Deuxièmement, les activités humaines sont en général préjudiciables aux habitats (drainage,
défrichement, conversion), d’autant plus qu’elles sont intensifiées. Elles peuvent aussi avoir
un effet positif sur la biodiversité végétale en créant des écosystèmes nouveaux. Les pratiques
du XIXe siècle ont pu s’avérer, dans certains cas, bénéfiques à la biodiversité végétale
(pâturage en sous-bois favorisant les espèces prairiales, élevage important qui demande des
surfaces suffisantes en prairie de fauche ou pâtures), comme dans d’autres cas, néfastes
(pâturage en sous-bois et révolutions courtes défavorisant les espèces forestières, exploitation
intensive des bois). De même, les pratiques et usages actuels, contraints par des techniques
modernes, peuvent favoriser la diversité des habitats dans la mosaïque paysagère et la
biodiversité végétale en initiant des successions végétales (abandon du pâturage dans les
pelouses, défrichement, pâturage, coupe forestière). Mais elles peuvent aussi la réduire
(réduction des plantes cultivées avec les adventices associées, disparition des prairies de
fauche). Les plantes cultivées au XIXe siècle ont pu devenir subspontanées et peuvent
désormais appartenir au cortège floristique lauragais. Cette évolution soulève le problème de
leur possible invasion. Toutefois, les discussions soulevées dans l’étude ont révélé que les
espèces exotiques sont celles qui réussissent le mieux dans les environnements perturbés par
l’Homme. Nous avons pu démontrer l’influence de la multiplication des échanges et du
développement de l’économie et de l’urbanisation dans la colonisation par des espèces
allochtones, pouvant être invasives. L’enrichissement de la biodiversité végétale depuis 1885,
traduit par l’apparition de certains groupes d’espèces, est notamment dû à une importante
période de végétalisation observée entre 1946 et 1972, induit par la modernisation des
pratiques agricoles.
- Troisièmement, l’exemple des taches boisées a démontré l’importance de la structure
d’habitat dans la diversité forestière et la complexité des mécanismes mis en jeu, où des
facteurs d’ordre divers s’imbriquent. Nous pouvons valider notre hypothèse de départ qui était
qu’un excès de fragmentation peut nuire à la biodiversité végétale lorsque la superficie des
unités paysagères est trop faible. Par contre, notre hypothèse selon laquelle les formes
complexes qui présentent le plus de lisière, sont celles qui présentent la plus grande
biodiversité végétale, est infirmée, ayant démontré une plus grande biodiversité végétale à
l’intérieur des taches de forme compacte. L’influence de la distance entre taches boisées,
facteur que nous avions présumé comme déterminant dans les flux d’espèces, n’a pu être mise
311
en évidence de manière significative. Il en est de même pour le voisinage, le nombre de taches
dans la mosaïque et la dynamique de la parcelle correspondante. Nous pouvons conclure que
certaines composantes structurelles (forme, lisière des taches) affectent de manière
significative, la distribution des espèces dans les paysages étudiés du Lauragais, et révèlent en
partie l’effet de la fragmentation du paysage sur la flore. De plus, l’organisation spatiale,
caractérisée par un morcellement et une fragmentation des formations végétales, favorise les
espèces anémochores et épizoochores.
Les analyses menées permettent de discuter de l’importance de l’hétérogénéité paysagère sur
la diversité floristique. Un de nos postulats de départ était que les plantes ont plus de chance
de trouver la combinaison adéquate dans une mosaïque paysagère que dans un paysage
uniforme (supplémentation versus complémentation). En fait, il s’est avérer que ces deux
types de paysages évoqués accueillent des cortèges floristiques particuliers. Un site présentant
une diversité de formations végétales, tel que celui de Nailloux, va favoriser des espèces
ubiquistes, opportunistes. Un site présentant une richesse en terme de surface de certaines
formations, tel que celui de Préserville, va favoriser des espèces spécialisées. Cette variation
de l’organisation spatiale (diversité et disponibilité des formations végétales) peut expliquer la
différence de composition floristique et de richesse, constatée entre les deux sites.
La présence d’espèces possédant une valeur patrimoniale remarquable montre l’importance de
préserver une diversité de parcelles de nature différente, même petites, dans une optique de
conservation. De plus, leur présence indique qu’une politique de gestion conservatoire est
encore possible et n’est pas en contradiction avec une modernisation et un aménagement
poussé de l’espace, gestion d’autant plus nécessaire que nous avons observé une régression
globale forte de ces espèces depuis 1885. Une interrogation proche de celle-ci et
fondamentale quand l’on souhaite établir des bases de gestion conservatoire est le maintien
des habitats de manière volontaire pour la préservation d’espèces qui sont menacées par la
régression de leur habitat.
Au final, il apparaît essentiel de privilégier une capacité d’accueil du paysage optimale,
pour favoriser la biodiversité végétale. Nous avons montré que cette capacité, appréciée pour
les taches boisées, évolue inversement à l’artificialisation et est favorisée par une
physionomie des formations boisées hétérogène. De l’ensemble des résultats, nous pouvons
conclure qu’il est essentiel de maintenir une diversité d’habitats pour permettre la dispersion
des espèces dans des paysages fragmentés et donc le maintien de la biodiversité végétale,
cette diversité pouvant être initiée par certaines pratiques, malgré une apparente perturbation.
Plusieurs facteurs, naturels ou anthropiques, sont prépondérants dans l’optimisation de la
biodiversité végétale, dans des espaces ruraux soumis à l’agriculture intensive. Chaque type
de végétation constitue des habitats favorables à certains groupements de plantes, dans
lesquels des facteurs particuliers s’expriment comme des modalités optimales, associées à une
forte diversité floristique. La connaissance de ces facteurs pour chaque type de végétation
permet de concevoir des bases de gestion conservatoire en vue de maintenir une biodiversité
végétale maximale, bases qui s’appuient sur les enseignements du passé, sur les impératifs du
présent et sur les ambitions du futur. Ces bases sont développées dans le prochain chapitre.
312
Chapitre 6
Gestion conservatoire, appliquée aux
paysages lauragais : valorisation des facteurs favorisant
la biodiversité végétale
« Conserver le patrimoine
biologique, c’est d’abord et
fondamentalement
sauvegarder la terre de nos
enfants et petits-enfants. »
(Barbault, 1993)
313
Le présent chapitre a pour objet de développer des bases de gestion conservatoire en vue de
permettre l’expression d’une biodiversité végétale maximale dans les paysages du Lauragais
haut-garonnais. Ces bases s’appuient sur la connaissance et la valorisation des facteurs,
naturels ou anthropiques, actuels et passés, mis en évidence pour chaque type de végétation,
qui se sont révélés favorables à la biodiversité végétale.
Les analyses menées tout au long de cette étude nous ont permis de montrer l’importance de
certains facteurs dans le dynamisme de la végétation et dans la composition floristique. La
biodiversité végétale, dans les paysages lauragais étudiés, s’est maintenue depuis plus d’un
siècle grâce à une diversité de pratiques anthropiques qui ont initié une hétérogénéité
particulière du paysage. Ces pratiques se conçoivent comme une gestion1 originale et
complexe de l’espace, qui les supportent. Nous avons vu que la gestion de l’espace avait
évolué depuis le XIXe siècle, sous l’impulsion de technologies et d’objectifs de production
nouveaux. Toutefois, il ressort de l’étude que la simplification de la gestion de l’espace
semble conduire progressivement au déclin de la biodiversité végétale, les gestions
simplifiées étant contraires à son maintien (Bunnell et al., 1999).
L’intérêt de plus en plus vif pour l’observation récréative de la nature a fait naître une
pression croissante en faveur de la protection des espèces contre les incidences directes des
activités humaines. Dorénavant, les citoyens exigent que des régions rurales socialement
équilibrées et économiquement viables produisent des produits agricoles plus sûrs et offrent
des paysages agréables, qu’elles offrent un environnement écologique de grande qualité et les
conditions nécessaires pour la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique.
L’approche systémique (Kropff et al., 2001), que nous avons suivie pour étudier les processus
en milieu rural, nous permet d’établir des bases de gestion de la biodiversité (Loevinsohn et
al., 2002). Nous nous proposons, pour chaque type de végétation identifié dans les paysages
ruraux du Lauragais, de définir des mesures de gestion qui soient en accord avec les objectifs
de développement et soucieux de conserver un patrimoine floristique, si ce n’est remarquable,
tout du moins riche et diversifié. Nous désignons de telles mesures sous le terme de « gestion
conservatoire2 ». La gestion conservatoire proposée doit permettre, au final, de choisir un
modèle d’utilisation de l’espace qui soit spatialement explicite, applicable à l’échelle
régionale et compréhensible pour les usagés et aménageurs (Farrow et al., 2001). Sa mise en
place permettra de concilier activités humaines et conservation du patrimoine naturel, en
recherchant une meilleure adéquation entre utilisation de l’espace et biodiversité.
W
Nous développons maintenant brièvement les fondements d’une gestion conservatoire, à la
suite de quoi, nous aborderons son application aux paysages lauragais.
1
Gestion Entretien conforme à des objectifs prédéfinis pour un territoire donné quelques soient ses fonctions
(Candebat, 1995).
2
Conserver Maintenir la pérennité d’un élément tout en autorisant son exploitation (Candebat, 1995).
314
I-
Fondements d’une gestion conservatoire dans les
paysages d’agriculture intensive
Dans le cadre de la Biologie de la Conservation, la sauvegarde de la flore passe désormais par
une gestion conservatoire des habitats. L’espace naturel est aujourd’hui déchiré entre
intensification et abandon, et il est nécessaire d’endiguer cette évolution qui peut sembler a
priori irréversible. Pour préserver au mieux le patrimoine floristique du Lauragais, il faut
savoir préserver les milieux les plus riches, qui, par méconnaissance, pourraient être dégradés
(Chaïb, 1999). De plus, il faut envisager les techniques de gestion écologiques les plus
appropriées à la conservation de milieux naturels dont un grand nombre est abandonné à une
mort lente. La préservation de la flore est souvent un élément de valorisation touristique et de
développement en milieu rural. Selon le nouveau cadre conceptuel de l’Écologie de la
réconciliation, l’objectif de la gestion conservatoire est de définir les voies de modification et
de diversification des habitats anthropiques afin qu’ils puissent abriter une grande variété
d’espèces sauvages, certaines formes d’exploitation de la terre étant compatibles avec les
besoins de nombreuses espèces (Rosenzweig, 2000). Une gestion conservatoire repose sur la
possibilité de fournir à la pratique, aux autorités, aux milieux politiques et à la société des
bases de décisions et des propositions de solutions, afin que le paysage puisse être géré de
manière durable :
-
comme milieu de vie pour l'homme,
comme espace vital pour les plantes,
comme fournisseur de matières premières naturelles.
Dans l’optique d’une gestion conservatoire, il n’y a pas d’état passé idéal à trouver (Barbault,
1994). Il convient de s’appuyer sur des éléments objectifs pour d’une part asseoir une science
de la conservation, d’autre part étayer une politique de gestion de la nature. La perspective de
gestion conservatoire s’intègre dans l’Aménagement du territoire, dans lequel s’exercent les
interventions collectives et volontaires sur le plan spatial et géographique (Tarlet, 1985). Il est
donc nécessaire de prendre en compte les conditions naturelles, culturelles, politiques et
économiques (Bosshard, 2000) et de pallier le manque de communication entre scientifiques
et gestionnaires. De plus, le développement durable du paysage rural doit se faire en
partenariat avec la population, l’Homme faisant partie intégrante de la gestion conservatoire
de la Nature (Volker, 1997 ; Parizeau, 1997). La biodiversité des écosystèmes peut être
maintenue sur le long terme, si ce n’est en revenant à des cultures et savoirs traditionnels, tout
du moins en s’en inspirant, les savoirs étant le résultat d’une coévolution sur le long terme des
sociétés et de leur milieu naturel. Le développement rural soutenable, garant d’une bonne
gestion de la biodiversité, est nécessairement un compromis entre ce qui est socialement
souhaité, économiquement intéressant, techniquement possible et écologiquement acceptable
(Lévêque, 1997). Ce développement exige de connaître les rapports que les sociétés
entretiennent avec leur environnement, comprendre les principes généraux du fonctionnement
et de la dynamique des systèmes anthropisés et des ressources exploitées, prévoir leurs
réponses à de nouvelles perturbations d’origine naturelle ou anthropique. La politique de
gestion conservatoire s’inscrit dans la perspective plus large du Développement Durable1 (cf.
encadré ci-dessous).
1
Développement durable Conciliation entre le développement économique et la protection de l’environnement
à long terme (Godard, 1994).
315
Le développement durable
D’après (Eybalin, 1999)
Le rapport présenté par Gro Harlem Bruntland en 1987 à la Commission mondiale sur
l’environnement et le développement a défini une nouvelle stratégie du développement basée
sur une utilisation économe et rationnelle des ressources naturelles et humaines. Ce rapport
introduit le concept de développement durable : un équilibre entre l’action économique,
l’environnement et l’équité sociale pour promouvoir
« un développement qui répond aux besoins du présent sans
compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ».
À l’image d’une gestion durable, la gestion conservatoire englobe, en plus de la dimension
écologique qui a pour but de maintenir constamment la ressource et sa biodiversité, une
dimension économique qui inclut la production de biens et services, et une dimension sociale
qui prend en compte la population dans les processus de décision concernant la gestion de
l’habitat et la distribution des bénéfices générés.
Le principe sur lequel se fonde la conservation, qui se rapporte à l’action de maintenir dans le
même état, évoque la difficulté apparente de réaliser l’action de conservation puisqu'elle se
heurte au dynamisme naturel des écosystèmes (Parizeau, 1997). Il convient donc d’adopter
une gestion des habitats qui vise à maintenir globalement ses principales caractéristiques
physico-chimiques. La gestion des habitats doit faire l’objet d’intervention dont le mode fera
appel à des techniques aujourd’hui classiques, d’autres plus subtiles (Olivier et al., 1995) :
-
-
Maintien d’écosystèmes secondaires par le développement d’activités nouvelles,
Restauration d’habitats non climaciques par le débroussaillage, le pâturage…mais
aussi, dans d’autres cas, par la suppression ou la régulation des activités humaines
jugées inopportunes,
Lutte contre les espèces exotiques envahissantes.
Il est fondamental de privilégier l’intégration des mesures de gestion des habitats au sein des
pratiques socio-économiques régulières. Aux niveaux régional et local, il faut compter sur les
administrations pour valoriser la gestion conservatoire, car elles ont la possibilité d’établir un
réel dialogue avec une variété d’acteurs dans la gestion des espaces et avec les citoyens en
général (Le Renard et al., 1998). En matière de biodiversité, les objectifs territoriaux
peuvent (OCDE, 1999 ; Conseil de l'Europe et al, 2002a) :
-
Protéger les éléments de la biodiversité les plus menacés en utilisant des
réglementations et des restrictions d’accès,
Mettre au point des solutions nouvelles qui font place à une utilisation durable
(agriculture durable),
Renforcer le réseau écologique,
Développer le tourisme rural et diffuser des informations sur les avantages que
procure la biodiversité,
Eliminer les mesures malencontreuses qui incitent à l’utilisation et à la mise en
valeur des terres.
316
Ces mesures doivent être intégrées à une planification écologique, qui prend en compte les
facteurs du milieu biophysique (relief, climat, eaux, sols, flore, faune) (Tarlet, 1985).
Si la biodiversité est négligée, c’est notamment parce que les acteurs omettent de prendre sa
valeur en considération. Il est donc nécessaire de recourir à des mesures d’incitation afin
d’internaliser l’ensemble des coûts de la perte de biodiversité dans les activités responsables,
et de fournir l’information, le soutien et les incitations qui conduisent à la préservation de la
diversité biologique (OCDE, 1999). Cependant, le principal problème de vérification du
respect des mesures réside dans la difficulté même de mesurer les pertes de biodiversité.
Aussi, les connaissances relatives aux interactions entre systèmes agricoles et biodiversité
doivent être accrues puisque la précieuse richesse de la diversité biologique et des paysages
issus de la longue interaction entre l’Homme et la Nature dépend fortement de la manière dont
la terre est cultivée et gérée (Conseil de l'Europe et al, 2002b).
Il peut sembler délicat de mettre en application une gestion conservatoire, car, de part sa
dénomination même, elle suppose des contraintes et restrictions aux activités humaines.
Toutefois, la mise en avant d’une telle gestion peut trouver des arguments convaincants
puisque, comme nous avons pu le révéler dans l’étude, les activités humaines, perturbatrices,
peuvent être un facteur important de biodiversité (cf. chapitres 3 et 4), qu’il convient de
valoriser (Hobbs et al., 1992 ; Pimentel, 1992). Il est donc avantageux de mettre en avant les
bénéfices que peuvent s’apporter mutuellement la biodiversité et les systèmes agricoles pour
valoriser une gestion conservatoire.
- Effets positifs de la biodiversité sur les agrosystèmes
La préservation de la biodiversité est un facteur déterminant de l’activité agricole. Les
paysages et la biodiversité constituent les services « positifs » de l’agriculture (Conseil de
l'Europe et al, 2002b). Suivant le cadre conceptuel de promouvoir les pratiques agricoles qui
conservent la biodiversité1, cette dernière est désormais reconnue comme une ressource
importante pour obtenir des accroissements durables de production : la diversité des espèces
et des variétés de plantes cultivées renforce la résilience2 de l’agriculture. Etant au cœur des
différents processus biologiques exploités par l’agriculture, la diversité biologique permet aux
agriculteurs de produire des biens alimentaires et non alimentaires, et des services. De plus,
l’utilisation durable de la biodiversité en agriculture contribue à modifier certaines pratiques.
Elle permet de réduire l’utilisation des insecticides en faisant appel aux insectes utiles3, de
diminuer les labours en accordant une plus large place à l’activité biologique des sols et de
maintenir les rendements en s’appuyant davantage sur la pollinisation. Les revenus et
bénéfices de la biodiversité peuvent prendre trois formes principales (Conseil de l'Europe et
al, 2002a) :
-
Avantage agronomique de l’agriculture intégrée (produire en augmentant le profit),
Revenus directs de la biodiversité (vente de bois provenant des haies par exemple),
Augmentation des prix de vente des produits agricoles issus d’une agriculture
respectueuse de l’environnement.
1
Voir à ce sujet la Stratégie Mondiale de la Biodiversité (Roche et al., 1992).
Cf. chapitre 1 pour la définition de ce terme.
3
Les espèces animales sauvages constituent des alliés naturels pour combattre les ennemis des cultures en
limitant les populations de ravageurs sans accroître les risques de pollution. C’est un des piliers de la lutte
biologique.
2
317
- Effets positifs des agrosystèmes sur la biodiversité
L’agriculture fournit à la collectivité des services multifonctionnels1. À côté des services
territoriaux (répartition équilibrée des activités), sociaux (source d’emploi, partage culturel,
fourniture de services récréatifs) et économiques (sécurité d’approvisionnement), les services
environnementaux au sens large consistent notamment en une préservation de la biodiversité,
des paysages et des sites. Afin de conserver leur caractère multifonctionnel, les
agroécosystèmes ont besoin d’un certain degré de biodiversité sans lequel l’exercice des
fonctions environnementales serait entravé (Conseil de l'Europe et al, 2002a). L’évolution de
l’activité agricole peut contribuer à l’enrichissement de la diversité biologique. Elle crée et
préserve des écosystèmes et des habitats particuliers (haies, fossés, prairies semi-naturelles,
zones humides).
Les problèmes scientifiques posés par la conservation de la biodiversité sont complexes car ils
nécessitent de (Schutz et al., 1996) :
-
Définir et évaluer la biodiversité aux échelles spatiales et temporelles idoines,
Appréhender l’organisation et le fonctionnement des écosystèmes en terme de
dynamique des populations, de peuplement, d’interaction,
Valider et diffuser les connaissances acquises auprès de gestionnaires de milieux
naturels qui auront à les traduire en termes concrets de gestion.
Un des points forts de la gestion conservatoire réside dans l’identification d’espaces naturels à
protéger, qui maximisent la représentation de la diversité régionale (Cabeza et al., 2001).
Actuellement, diverses organisations se sont engagées, dans le Lauragais haut-garonnais, dans
une démarche de gestion conservatoire qui repose sur le maintien ou la restitution de certains
espaces naturels et de certaines pratiques identifiées comme favorables à la biodiversité
végétale. Nous nous proposons maintenant d’avancer des recommandations pour une gestion
conservatoire des différents types de végétation que nous avons identifiés dans notre étude, et
sur lesquelles pourront s’assoire les décideurs et aménageurs de l’espace lauragais.
W
II -
Recommandations pour une gestion conservatoire
des paysages du Lauragais, en faveur de la biodiversité
Dans le cadre de la Biologie de la conservation, notre objectif est de développer des
recommandations appropriées pour éviter l’extinction des populations et des espèces, qui
s’appuient sur l’évaluation des impacts de l’action de l’Homme sur les habitats naturels, mis
1
Par « multifonctionnalité de l’agriculture », on entend que les agriculteurs ne produisent pas seulement de la
nourriture et des fibres, mais aussi des externalités positives et des biens publics tels que la provision de
paysages culturels et environnementaux (conservation de la diversité biologique, maintien et gestion des
éléments du paysage) et le maintien de la viabilité économique dans les régions périphériques (Pujol et al.,
1999).
318
en évidence dans notre travail. Nous cherchons à établir et proposer des mesures de gestion
conservatoire des paysages lauragais, pour chaque type de végétation décrit, en nous appuyant
sur les résultats obtenus dans l’étude. L’établissement de ces mesures requiert de prendre en
compte les caractéristiques du territoire, en parallèle aux objectifs et moyens de production
actuels. Pour chaque type de végétation, nous tentons de mettre en avant les modalités que
nous pouvons qualifier d’optimales puisque nous les avons identifiées comme étant associées
à une forte diversité floristique. L’analyse de la végétation et de sa composition nous a
notamment permis d’identifier des zones particulièrement riches en espèces qui s’avèrent très
importantes à préserver dans ces espaces fortement perturbés par les activités humaines. Ces
« hot-spots » locaux de biodiversité sont garants d’une certaine durabilité du monde rural (von
Wiren-Lehr, 2001). La préservation de la biodiversité végétale implique d’assurer le maintien
du plus grand nombre possible de populations distinctes d’une même espèce et de sauvegarder
le maximum d’habitats propres aux espèces menacées. Notamment, l’observation effectuée
que de petites surfaces peuvent renfermer une forte diversité en espèces met l’accent sur la
nécessité de conserver une diversité de surfaces. Nous orientons notre objectif dans une
conservation in situ dont l’une des principales justifications est de permettre à l’évolution des
systèmes de continuer d’affecter les espèces et les populations, une dynamique naturelle
pouvant conduire à des modifications considérables dans la composition et dans la structure
d’un écosystème (Heywood, 2000).
Dans une perspective de gestion conservatoire de l’espace rural, il convient de valoriser les
qualités écologiques du paysage rural à travers la diversité des unités paysagères et de leur
organisation spatiale, et la cohérence des connectivités entre composantes paysagères
similaires (Kuiper, 1997), points qui ont été mis en avant et discutés dans l’étude. Les
propositions suivantes de gestion conservatoire prennent donc en compte trois niveaux de
perception :
1- le paysage rural,
2- les composantes paysagères (parcelles),
3- les interactions entre composantes paysagères.
1-
Mise en valeur des paysages ruraux
Face à une nouvelle demande de l’utilisation de l’espace de la part des concitoyens, nous
pensons que les paysages ruraux doivent être redynamisés en tentant d’élargir leur fonction
principale à une convergence entre la fonction de production et la dimension récréative de
l’espace rural (Moulle, 1997). Les agriculteurs peuvent combiner des activités de production,
tout en jouant le rôle clé de l’entretien des espaces ruraux grâce à une multitude d’autres
usages (Burel et Baudry, 1999) : fonction sanitaire (rééquilibrage entre vie urbaine et rurale),
récréative (tourisme, loisir), sociale (retraités), esthétique (rôle de la nature) et patrimoniale
(Kovacshazy, 1993).
En Lauragais comme dans beaucoup d’autres régions de grande culture, la révolution
productiviste trouve aujourd’hui ses limites : risques de surproduction et dégradation des
écosystèmes. Une prise de conscience de la nécessité de préserver les ressources naturelles, la
qualité du paysage et des cadres de vie s’impose progressivement. Il convient de favoriser les
qualités écologiques du paysage agricole lauragais, à travers la diversité des unités paysagères
et de leur organisation spatiale, qui constituent un point fort de l’environnement lauragais
(Faget et al., 1999). Pour cela, chaque commune du Lauragais haut-garonnais devrait être
319
soucieuse de préserver ou de restaurer la diversité des unités paysagères. Des exemples de
communes qui se sont engagées dans de telles démarches et qui peuvent faire figure
d’exemple pour les autres communes seront évoquées par la suite. Pour assurer une
transmission dans le temps, une gestion durable du paysage rural doit se faire sur la base
d’une « cogestion intergénérationnelle ». La définition d’objectifs de gestion conservatoire
des paysages ruraux doit suivre plusieurs recommandations.
- La définition des bases de gestion de l’espace doit prendre en compte les caractéristiques
physiques du territoire, en parallèle aux objectifs de production, selon les observations
établies dans le chapitre 5. Tout en respectant la zonation de l’utilisation de l’espace en
fonction des aptitudes des terrains à l’exploitation agricole (bonne exposition, faible pente),
révélée dans les différentes analyses, il est possible de maintenir ou d’établir une bonne
répartition d’éléments semi-naturels, linéaires (haies, talus, fossés, cours d’eau, bandes
herbeuses), ponctuels (arbres isolés, mares) et surfaciques (bosquets, vergers, étangs, prairies
et parcours extensifs, jachères, friches), suffisamment nombreux dans le paysage agricole,
pour maintenir une biodiversité maximale.
- Afin de soutenir la conservation de la diversité biologique, l’identification des zones de
grande valeur naturelle (comme les prairies, les pelouses) devrait être souhaitée pour
l’ensemble des communes du Lauragais haut-garonnais. À ce titre, on peut recommander de
laisser certains îlots exempts de toute intervention humaine pour accueillir une végétation
spécifique et constituer un réseau de sites de référence (Bioret, 2002) ; le gel des terres est
reconnu comme bénéfique à la vie sauvage et au paysage (Conseil de l'Europe et al, 2002a).
- À terme, certains sites peuvent faire l’objet d’une protection spéciale et venir enrichir un
réseau déjà en place dans la région Midi-Pyrénées : réserve naturelle, arrêté de biotope,
ZPS….
- Il convient par ailleurs de contrer les effets pervers des mutations techniques (motorisation,
sélection des espèces, artificialisation des milieux naturels et effort des pouvoirs publics en
faveur de la modernisation des exploitations). En parallèle, il faut développer les actions de
sensibilisation et soutenir des idées alternatives de mise en valeur, respectueuses de
l’écosystème (découverte du milieu, tourisme, utilisation de nouvelles techniques
d’exploitation rationnelle). Citons l’exemple de la rivière de la Saune où une piste de
promenade a été aménagée tout le long.
2-
Valorisation d’une diversité et d’une hétérogénéité des composantes
paysagères
Il est illusoire de vouloir conserver la plupart des espèces de plantes si le milieu dans lequel
elles vivent se dégrade. La protection des espaces est une priorité qui doit aller de paire avec
la conservation de la biodiversité (Lévêque, 1994a). L’affirmation d’une biodiversité
maximale est garantie par à une diversité de formations végétales et une hétérogénéité au sein
même de chaque formation. Selon des points de réflexion abordés dans l’étude, il faut à la fois
privilégier la conservation d’espèces considérées comme prioritaires et privilégier la
conservation d’une diversité maximale d’espèces. Pour se faire, nous avons vu qu’il était
préférable de favoriser une diversité d’habitats et de favoriser des habitats dispersés plutôt que
d’un seul tenant. Il peut également être intéressant de mettre en valeur le patrimoine naturel et
culturel (espaces de loisir, de promenade). Au niveau de l’écosystème, différents concepts
peuvent être mis en œuvre pour favoriser la biodiversité (Le Floc'h et al., 1995) :
320
-
-
-
La conservation consiste à maintenir un écosystème jugé remarquable de par sa
composition floristique, tout en conservant les activités anthropiques qui peuvent y
être pratiquées.
La restauration correspond à la transformation intentionnelle d’un milieu pour y
rétablir l’écosystème considéré comme indigène et historique, à condition que
l’écosystème ait conservé la capacité à « se restaurer » (cf. encadré).
La réhabilitation consiste à permettre à l’écosystème de retrouver ses fonctions
essentielles grâce à une intervention forte mais limitée dans le temps.
La réaffectation, ou réallocation, décrit ce qui se passe lorsqu’un écosystème est
transformé par l’Homme et qu’un nouvel usage en est fait.
Le rajeunissement permet de ramener volontairement un écosystème ayant atteint
son état de maturité vers un état plus jeune marqué, par exemple, par une plus
grande diversité de strates basses de végétation, une plus grande richesse
floristique, une production plus élevée…
La Biologie de la restauration
La restauration se base sur un état de référence équivalent à un état ancien et forme première
en liaison avec les usages sociaux actuels et futurs de l’objet (Alard, 2002). Elle passe par la
conservation (authenticité du site) et la création. L’état historique n’est pas une référence au
sens strict mais un calage pour élaborer les scénarii de gestion durable ou de restauration. Les
communautés étant partiellement naturelles (Barnaud, 1995), la restauration écologique vise
donc une restauration partielle et acceptable du point de vue écologique qui augmenterait
localement la diversité d’habitats pour un retour à un bon niveau de biodiversité (Bazin et al.,
2002). Toute opération de restauration passe par des processus écologiques différents
(Barbault, 1995 ; Le Floc'h et al., 1995 ; Chapuis et al., 1995 ; Blondel, 1995b). Si un système
peut par lui-même, retourner à son état initial suite à un changement par perturbation
(résilience1), toute perturbation n’entraîne pas nécessairement des modifications de
l’écosystème, ceci en raison de ses possibilités de résistance2 et de persistance3.
Pour chaque formation végétale, il convient de comprendre l’intérêt de la conservation, puis
de recommander les techniques et moyens à mettre en œuvre, appliquées au Lauragais hautgaronnais. Les types de formation concernés sont :
12345678-
Les cultures,
Les lieux incultes rudéralisés,
Les formations de bord des eaux,
Les prairies de fond de vallon,
Les pelouses sèches de coteaux,
Les fruticées,
Les bois,
Les haies.
1
Résilience Aptitude d’un système écologique à retourner à un état initial (Chapuis et al., 1995).
Résistance Capacité d’un système écologique à ne pas changer (Chapuis et al., 1995).
3
Persistance Possibilités d’un système écologique de retarder le changement (Chapuis et al., 1995).
2
321
2. 1 -
Les cultures
Intérêts d’une gestion conservatoire
Dans la problématique de la gestion conservatoire, l’agriculture occupe une place importante
puisque son impact sur la végétation est très sensible (Bonny, 1994). Cette végétation
renferme une valeur patrimoniale d’autant plus élevée qu’elle est menacée, comme nous
l’avons constaté, par des activités anthropiques intensifiées depuis le XIXe siècle (disparition
d’habitats comme les vignes, réduction de la diversité des plantes cultivées, désherbage
chimique, durée de culture de la céréale, monoculture, labour profond, rotation des cultures,
augmentation de la flore nitrophile par fertilisation, jachères moins fréquentes, etc.),
accentuées par la fusion des parcelles qui limitent les marges de culture. Les méthodes de
l’agriculture ‘moderne’ ont contribué à une quasi-uniformité des groupements d’adventices de
culture et à la disparition des messicoles.
Malgré la question récurrente de la protection des plantes d’origine anthropique comme les
messicoles, introduites il y a environ 6000 ans en Europe, et dont la survie ne dépend que de
l’Homme, les intérêts sont multiples de souhaiter leur maintien (Marzio et al, 1997). Elles
assurent un rôle dans les équilibres biologiques comme par exemple en tant que plantes
mellifères ; elles sont utilisées comme nourriture par les oiseaux et les insectes ; elles peuvent
renfermer des propriétés médicinales ; elles constituent une ressource génétique intéressante
pour l’agriculture et l’horticulture. Par ailleurs, ces espèces font partie historiquement et
culturellement de notre paysage rural, symbolisant une agriculture vivante, culturellement
riche et un environnement d’une certaine qualité. La plupart des messicoles en France sont en
régression et certaines ont déjà disparu. Pourtant, aucune espèce messicole au sens strict
n’appartient à la liste nationale des plantes protégées. Nous avons vu que d’anciennes
pratiques agricoles non intensives (par exemple au niveau de l’utilisation d’herbicides, du tri
de semences, du sarclage) sont bénéfiques à une diversité d’espèces messicoles. La discussion
déjà soulevée de la question de la conservation des espèces à intérêt patrimonial telle que la
flore ségétale, introduite (par exemple, la flore des champs de lin disparus) (Lambinon, 1998),
amène à considérer ces espèces comme des adaptations à des changements spatiaux et de ce
fait comme faisant partie intégrante de la biodiversité en présence.
Recommandations pour une gestion conservatoire
En accord avec les pratiques culturales actuelles du Lauragais haut-garonnais, analysées dans
nos deux sites d’étude, et dans un souci de réduction des effets nocifs de l’agriculture sur la
biodiversité végétale, nous pensons qu’il est possible de proposer des alternatives de culture,
comme les nouvelles méthodes d’agriculture durable (agriculture intégrée1, agriculture
biologique2) (Glaeser, 1997 ; Brossier, 2000), multifonctionnelles, compétitives sur le plan
économique, acceptables pour les agriculteurs et respectueuses de l’environnement
(Heywood, 2000). Ces mesures doivent être engagées et gérées par les acteurs et collectivités,
locaux. Pour aider les agriculteurs à faire la transition et à abandonner les pratiques non
viables, des incitations liées aux pratiques agricoles durables peuvent être envisagées. Par
exemple, les résultats obtenus de l’analyse de la flore de 1885 ont montré qu’un retour à un
principe de mixité traditionnel (polyculture-élevage), largement développé jusqu’au milieu du
XXe siècle dans le Lauragais, est à souhaiter. Ce principe est garant de la multifonctionnalité
1
L’agriculture intégrée consiste à utiliser les intrants de façon raisonnée, en tirant partie de toutes les
connaissances et de tous les moyens techniques disponibles pour atteindre le rendement optimal d’un point de
vue agronomique et économique.
2
L’agriculture biologique se fonde sur le choix de ne pas utiliser de produits de synthèse – engrais chimiques,
pesticides- pour privilégier l’usage de produits naturels – fumier, compost, substances minérales simples.
322
de l’agriculture, qui permet à un cortège de plantes ségétales plus grand de se développer
(Pointereau, 1999).
Tel est le cas des cultures de lin qui renfermaient une flore spécifique, aujourd’hui disparue
(Lolium remotum Schrank).
À l’image de l’agriculture dite « biologique », la gestion durable des agrosystèmes est
possible grâce à une utilisation limitée des engrais chimiques et des pesticides, en fonction
d’une densité seuil d’adventices (Doyle, 1997) et à une meilleure utilisation des ressources
naturelles (matière organique, organisation optimale de la rotation des cultures, couverture
maximale du sol, utilisation des auxiliaires des cultures1). Même si certains
indicateurs, comme les composants organiques dans le sol, ne révèlent pas toujours de
bénéfices des agrosystèmes gérés par des pratiques biologiques (Waldon et al., 1998), de
nombreux autres (Conseil de l'Europe et al, 2002a) aboutissent au constat d’un bénéfice
mutuel entre les agrosystèmes et la biodiversité (van Elsen, 1989 ; Baumann et al., 2002). Les
effets des pratiques en agriculture biologique sur la biodiversité sont multiples : une
diminution d’espèces nitrophiles et une augmentation des légumineuses, le déclin des
annuelles hivernales à longue durée de vie et l’augmentation des annuelles d’été à courte
durée de vie. Cependant, la conversion à l’agriculture biologique ne montre pas toujours les
bénéfices car les désherbages mécaniques et l’emploi des herbicides peuvent se faire sentir
pendant des années après la conversion (van Elsen, 2000).
Plusieurs exploitations du Lauragais haut-garonnais se sont converties depuis quelques années
à l’agriculture biologique. Sur la commune de Saint Félix Lauragais, la ferme équestre du
lieu-dit Magarre produit du fourrage biologique (avoine, blé) ; la richesse spécifique et
l’abondance en messicoles et d’adventices y est nettement au-dessus de la moyenne
(Belhacène, com. or.). Sur la commune de Mourville, la reconversion à l’agriculture
biologique a permis la réapparition en seulement un an de Nigelles de France (Nigella gallica
Jord.), espèce inscrite sur la liste de Protection nationale Annexe I (Ar. du 20-01-1982)
(vulnérable).
Nigella gallica Jord.
Parallèlement, les politiques doivent prendre la décision de supprimer progressivement les
subventions ayant des incidences négatives sur la biodiversité, constatées dans le Lauragais
haut-garonnais (primes pour les cultures irriguées, primes d’aide à l’intensification,
1
Par exemple, les carabes, coléoptères « carnassiers », guêpes microscopiques, coccinelles.
323
encouragement à une faible diversité des cultures, surproduction, conversion des terres
humides et boisées en cultures) (Donaldson et al., 1995 ; OCDE, 1996).
Afin d’intégrer les préoccupations liées à la biodiversité dans les politiques agricoles rurales
du Lauragais haut-garonnais, ces pratiques agricoles sont à encourager sur des sites témoins,
dans chaque commune (diversification des types de production, rotation régulière et allongée
des cultures qui limite la spécialisation de la flore adventice, labour peu profond non
destructeur des bulbes, utilisation moins intensive des intrants), en veillant au développement
des pratiques agricoles intensives actuelles jusqu’à un niveau raisonnable ou raisonné
(Conseil de l'Europe et al, 2002a ; Conseil de l'Europe et al, 2002b).
Dans plusieurs communes du Lauragais (Clermont Le Fort, Saint Léon, Gibel, Mongiscard,
Saint Félix Lauragais), des exploitants se sont dotés du tourisme à la ferme, activité non liée
directement à l’agriculture.
D’autres initiatives de protection ont été mises en place dans le Lauragais comme pour les
bordures de champs qui constituent, comme nous l’avons évoqué, de véritables ‘bandes de
conservation’.
Sur la commune de Montbrun Lauragais, une ancienne culture enfrichée colonisée par un
peuplement de Delphinium verdunense Balb., espèce inscrite sur la liste de Protection
nationale Annexe I (Ar. du 20-01-1982), est vouée prochainement à la construction d’un
lotissement. Afin de conserver l’espèce, il a été décidé en 2003, sur l’initiative de
l’association Isatis et en accord avec la mairie, de maintenir une bande de 10m de large avec
une culture « à l’ancienne » : semi annuel de céréale, pas de traitement, sol retourné une fois
par an.
Delphinium verdunense Balb. (Belhacène)
En s’inspirant des directives appliquées en agriculture biologique, les terres agricoles du
Lauragais peuvent remplir leur rôle de production et conjointement un nouveau rôle de
maintien de la diversité floristique, au niveau des terres agricoles. En particulier, il est
324
indispensable de reconstituer des écosystèmes accueillant, et ce, au niveau des territoires, bien
plus qu’au niveau des exploitations.
2. 2 -
Les lieux incultes rudéralisés
Intérêts d’une gestion conservatoire
Nous avons vu que les lieux incultes rudéralisés constituaient des zones d’accueil pour une
diversité de plantes. Leur végétation est d’ailleurs l’une des plus riches de la flore actuelle.
Ceci illustre leur rôle dans la conservation, au moins temporaire, d’espèces. Cette végétation,
fortement liée à l’intervention anthropique, renferme une valeur patrimoniale d’autant plus
élevée qu’elle est menacée par des activités anthropiques de plus en plus soutenues
(désherbage des bords de champs ou des murs de village, etc.). Ces activités ont entraîné, par
ailleurs, la rudéralisation de la flore, depuis le XIXe siècle.
Parmi ces espaces, les bords de route peuvent assurer diverses fonctions écologiques (Baudry
et al., 1995). Ils offrent des biotopes nouveaux par rapport au milieu environnant ou des
modes de gestion de l’espace différents et permettent des échanges entre milieux de même
nature (fonction de corridor). Les espèces rejetées par le milieu environnant surtout dans les
espaces anthropisés peuvent y trouver refuge. En plus de leur rôle de supports, de
stabilisateur, les bords de route ont un intérêt écologique non négligeable, étant constitués
d’éléments variés tels que les haies, bandes herbeuses, arbustives et même les sols nus qui
sont des lieux potentiels de succession écologique primaire, rares dans les paysages.
Recommandations pour une gestion conservatoire
À l’image des paysages lauragais haut-garonnais du XIXe siècle, le maintien d’une diversité
des habitats est une condition essentielle à satisfaire pour optimiser la biodiversité dans ces
types de milieu (murs, murets interchamps, talus, bords de champs, bords de route, chemins
terreux …). Comme nous avons pu l’étudier, l’existence de stations ouvertes et les apports
azotés favorisent la colonisation par certaines espèces (pionnières et ubiquistes, nitrophiles,
anémochores). Par ailleurs, nous avons vu que la richesse spécifique est élevée si l’entretien
pratiqué est faible (désherbages limités).
Les bords de route, qui renferment une végétation particulière, doivent être entretenus par
fauchage, sous peine d’enfrichement par une variété de ligneux, qui défavorisent le processus
de colonisation des espèces herbacées (plantes ou graines) par le vent. Mais ces pratiques
doivent être exécutées à certaines périodes, autorisant la production et la dispersion des
graines. Ces initiatives doivent être entreprises en collaboration avec les services de la DDE.
Sur l’initiative de l’association Isatis, un récent accord a été passé avec la VNF (Voie
Navigable de France) sur la protection d’une station à Tulipa sylvestris L. ssp. sylvestris,
espèce protégée au niveau national (Annexe I, art. du 31-08-1995). La station-refuge se situe
en bord du chemin de la piste cyclable, sur la commune de Montesquieu Lauragais. L’accord
repose sur la décision de ne pas désherber et de faucher après la fructification.
325
Tulipa sylvestris L. ssp.sylvestris (Belhacène)
Nous avons constaté sur nos deux sites d’étude que le trafic routier modifie le cortège
floristique de la végétation des bords de routes, en favorisant l’installation d’espèces
étrangères. Il contribue, en quelque sorte, à l’enrichissement de la biodiversité.
À ce titre, même s’il n’y a pas d’exemples actuels, les bords d’autoroute, en tant
qu’écosystèmes nouvellement créés, pourraient constituer des milieux d’accueil pour la flore
locale, par plantation et semis appropriés, tel que sur la récente autoroute A66 qui traverse le
Lauragais haut-garonnais.
2. 3 -
Les formations de bord des eaux
Intérêts d’une gestion conservatoire
Les formations de bord des eaux sont d’un grand intérêt comme valeur économique,
écologique et paysagère. En plus de leur rôle contre l’érosion, comme « tampon » des eaux
lessivées des cultures, contre l’envasement du lit des cours d’eau, elles constituent des milieux
naturels essentiels pour la conservation des espèces. D’autant plus qu’en tant que frontière
entre le milieu aquatique et terrestre, les formations de bord des eaux accueillent une flore
typique (espèces hygrophiles anémochores), adaptée aux variations du niveau de l’eau au fil
des saisons. Certaines espèces y trouvent un ultime refuge, face à l’urbanisation,
l’industrialisation et l’agriculture intensive. Elles peuvent aussi jouer le rôle de brise-vent en
limite de parcelles agricoles et offrent une ressource en bois.
De plus, les formations de bord des eaux sont d’une grande qualité paysagère et culturelle, en
enveloppant les cours ou plans d’eau d’un écrin de verdure, rompant la monotonie des
paysages agricoles lauragais.
Recommandations pour une gestion conservatoire
Une diversité de formations (mares, petits plans d’eau, étang, lac, berges des ruisseaux et
fossés), par conservation ou restauration, est importante pour le maintien de la biodiversité
associée. De même, il convient de privilégier une diversité de situation, par des parcelles
concomitantes de différentes natures, qui est un facteur d’enrichissement de la flore. Les
recommandations en faveur de la diversité biologique, que l’on peut appliquer aux ripisylves,
doivent permettre, par un entretien rationnel, de conserver ou de restaurer une structure
hétérogène (diversité des strates arborées et arbustives, diversité des classes d’âges, richesse
326
en espèces ligneuses spontanées, arbres morts, préserver les arbustes du sous-bois et les
lianes). Le traitement en futaie irrégulière ou en taillis sous futaie peut être développé. La
limitation du développement des essences ‘exotiques’ (robinier…) s’oppose à une
banalisation du milieu.
Sur la commune de Nailloux, un projet de mise en Réserve Naturelle Volontaire du lac de la
Thésauque (article L.242-11 du Code Rural) est envisagé. Ce projet permettra de faire
apparaître l’intérêt écologique du site et de réglementer les activités de pêche, chasse,
agricoles et forestières, l’exécution de travaux et constructions, la circulation et le
stationnement (Le Renard et al., 1998). Cinq Réserves Naturelles Volontaires ont été créées
dans la région Midi-Pyrénées depuis 1990 (Nature Midi-Pyrénées, 2001).
Par ailleurs, nos analyses ont montré l’impact négatif d’une trop forte artificialisation des
milieux et de la dégradation de la végétation sur la typicité et la richesse de la flore. Il
convient donc d’adopter un entretien moins soutenu, en limitant les gyrobroyages, les
désherbages, le drainage, le calibrage des cours d’eau et les fauchages.
Les principes de gestion durable de la forêt alluviale peuvent être valorisés à travers sa
ressource pour une consommation locale : fournisseur de bois de chauffage ou de bois de
‘service’, espace de récréation (Traub et al., 2001).
Le long de la rivière de la Saune, une piste de promenade a été aménagée, en valorisant les
composantes biologiques du site.
Dans le cadre de la confluence Ariège-Garonne, le Sicoval et l’association Nature-MidiPyrénées mettent en place un vaste projet alliant protection et valorisation de ramiers, qui
s’étend de Vieille-Toulouse jusqu’à Clermont Le Fort. Le ramier de Goyrans, le plus riche en
terme de richesse spécifique au niveau de la flore et de la faune, et en terme de rareté
d’espèce, est axé sur une action naturaliste. Ce site renferme notamment l’espèce Utricularia
vulgaris L., inscrite sur la liste, en cours de validation, des espèces protégées de MidiPyrénées ; les autres ramiers sont axés sur un accueil touristique, de ballade et de maraîchage.
Utricularia vulgaris L. (dessin, V. Rolland)
327
2. 4 -
Les prairies de fond de vallon
Intérêts d’une gestion conservatoire
Des situations topographiques particulières (niveau hydrique, existence de crues) créent les
conditions nécessaires à l’installation d’un cortège floristique typique, s’enrichissant grâce
aux nuances de ces conditions mésologiques. Malgré leur origine anthropique, les
peuplements végétaux occupant ces espaces herbacés entretenus se sont révélés présenter une
biodiversité spécifique élevée, pouvant héberger un grand nombre d’espèces végétales dont
certaines ayant une forte valeur patrimoniale. Ces formations prairiales méritent à cet égard,
d’être conservées. Pourtant, les opérations d’aménagement territorial (défrichement et
retournement pour la céréaliculture, assèchement par régulation du débit des cours d’eau) et
les changements des pratiques agricoles (disparition des troupeaux) entraînent depuis
plusieurs années la disparition générale de cette végétation dans le Lauragais haut-garonnais.
D’après les résultats, les prairies de bas fond humide ne doivent leur existence et leur
maintien qu’à l’action de l’Homme. Le fauchage régulier est la condition sine qua non à leur
maintien et à la conservation de leur équilibre dynamique, sous peine d’enfrichement.
Recommandations pour une gestion conservatoire
La finalité de la gestion des peuplements prairiaux doit être de s’efforcer de conserver et/ou
de créer de manière artificielle des milieux transitoires, éventuellement d’accroître la
biodiversité spécifique en préconisant certaines interventions et aussi de préserver des espèces
de valeur patrimoniale (Delpech, 2001). Nous avons vu dans notre étude que de petites
surfaces peuvent contenir une diversité élevée en espèces. Cette observation met l’accent sur
la nécessité de conserver une diversité de surfaces.
Sur la commune de Nailloux comme dans d’autres communes du Lauragais haut-garonnais
(Ramonville, Saint-Orens), un projet d’un Arrêté Préfectoral de Protection de Biotope (R 21112 du Code Rural) dont la réglementation vise à limiter les activités qui pourraient porter
atteinte au biotope des espèces qu’il vise (Le Renard et al., 1998), et suivi par le
Conservatoire Botanique National de Midi-Pyrénées, est mis en place sur une prairie humide
contenant une espèce protégée nationalement, Bellevalia romana (L.) Reich.
La région Midi-Pyrénées compte à ce jour une soixantaine de sites protégés par APPB
(Nature Midi-Pyrénées, 2001).
Prairie humide à Bellevalia romana (L.) Reich. (Schwal)
Nous avons vu que la disparition des troupeaux était une cause majeure de la disparition des
prairies humides depuis plus d’un siècle. La revalorisation de l’élevage pourrait permettre à
328
ces milieux d’être conservés, comme fournisseurs de fourrage. De plus, nous avons montré
que les prairies pacagées du XIXe siècle renfermaient un cortège floristique typique, où les
espèces peuvent être disséminées par les troupeaux (Delpech, 2001). Toutefois, si le pâturage
permet le maintien de telles formations, nous avons vu qu’il entraîne une pression sur les
plantes, notamment en favorisant la dominance de certaines.
La prairie humide sur la commune de Nailloux doit son maintien à son rôle de production
fourragère pour des chevaux.
L’établissement de bioindicateurs végétaux (comme par exemple, la richesse en espèces
nitrophiles) pourrait permettre de tirer les informations sur la nature et l’intensité des facteurs
limitant de la production fourragère. Il a été démontré qu’une fertilisation raisonnée limitait le
développement de flores nitrophiles sur les prairies, au profit de flores plus diversifiées.
2. 5 -
Les pelouses sèches de coteaux
Intérêts d’une gestion conservatoire
Au carrefour d’influence atlantique, continentale et méditerranéenne, grâce à des conditions
de sol et d’exposition particulières (pentes relativement fortes, et position intermédiaire et
supérieure le long du versant), une flore remarquable et typique (espèces de prairie maigre et
xérophiles), se développe sur des milieux originaux : les pelouses sèches. D’après le chapitre
5, nous avons vu que ces formations spontanées pouvaient jouer le rôle, au moins temporaire,
d’habitats refuge pour des espèces rudérales et adventices, autrefois localisées dans les
cultures, rôle qui peut paraître essentiel à l’heure de l’utilisation intensive des herbicides dans
les parcelles agricoles et de la disparition progressive de la flore adventice des cultures. La
conservation de ces espèces ne peut être assurée que par une stabilité des pelouses en bloquant
la dynamique progressive de la végétation. Or, depuis la disparition des pratiques
agropastorales traditionnelles dès le début du XXe siècle, ces milieux sont abandonnés,
marginalisés et s'enfrichent. Une partie essentielle du patrimoine naturel et paysager du
Lauragais haut-garonnais est sur le point de se perdre. Le maintien d’une flore diversifiée
dépend aujourd’hui d’une intervention humaine sur ces milieux. À l’échelle nationale, la part
majoritaire des espèces rares ou menacées se rencontre aujourd’hui dans des habitats ouverts
en voie de fermeture (pelouse, fourrés) pour cause notamment de déprise agricole (Olivier et
al., 1995).
Recommandations pour une gestion conservatoire
Différentes solutions peuvent être envisagées pour conserver les pelouses des coteaux secs et
protéger sur le long terme leurs richesses naturelles (Dupuis et al., 2000). Ces solutions
reposent toutes sur l’intensité de l’intervention anthropique (fauchage, pâturage ou brûlage), à
l’image des pratiques anciennes. En particulier, les troupeaux favorisent la colonisation par
des espèces des milieux environnants, évitent l’embroussaillement et permettent aux plantes
recherchant une végétation rase, de se développer. Face aux pratiques actuelles, la plantation
d’espèces exotiques doit être limitée car elle dénature la typicité de ces formations. Par
ailleurs, les résultats de l’étude indiquent que la richesse spécifique et la composition typique
des pelouses sont liées à la surface disponible. Il convient donc de conserver ou de réhabiliter
certaines terres en pelouses.
329
Les pelouses de coteau apparues spontanément après l’aménagement du lac de la Thésauque
sur la commune de Nailloux illustrent un bel exemple de mise en valeur du site et de la
possibilité de réhabilitation de ces milieux.
Pelouse du lac de la Thésauque, Nailloux (Schwal)
Toutefois, ces milieux sont fortement colonisés par le brachypode, qui étouffe et bloque
l’installation d’un cortège floristique diversifié. Une prise de conscience progressive de ce
problème dans le Lauragais a permis à des initiatives d’entretien rationnel de l’espace par
fauche, de voir le jour.
Tel est l’exemple de l’initiative entreprise en 1999 sur la commune d’Avignonet Lauragais
par l’association Isatis de procéder à une ‘réouverture’ du milieu par fauche, afin de maintenir
une pelouse rase qui est peuplée par le remarquable Ophrys magniflora Melki & Geniez,
espèce protégée en France au plan national. Depuis, la mairie sollicitée a pris le relais en
affectant deux agents responsables de son entretien. Cette initiative est un bel exemple de
création d’emplois. A long terme, les initiateurs de ce projet souhaitent le retour à une activité
pastorale intense et courte.
Pelouse de coteau avant et après entretien (Belhacène)
Ophrys magniflora Melki & Geniez (Belhacène)
330
À l’image de cette initiative, des conventions peuvent être mises en place avec les
propriétaires qui souhaitent déléguer l’entretien et la mise en valeur de leurs coteaux,
notamment grâce à l’acquisition par les Organismes conservatoires (CREN, CBN…) des
terrains les plus sensibles. Afin d’étendre le pâturage sur les coteaux, il est souhaitable
d’associer les éleveurs à cette démarche, notamment en leur apportant un soutien technique
(mise à disposition de terrains, débroussaillage, pose de clôtures…).
2. 6 -
Les fruticées
Intérêts d’une gestion conservation
Ces formations, qui correspondent à des stades intermédiaires dans la dynamique progressive
aboutissant à la mise en place de la forêt caducifoliée, n’ont pas d’intérêt botanique élevé
puisqu’elles ne présentent pas d’espèces qui leur sont propres ou de valeur patrimoniale
élevée. Cette faible richesse est amplifiée par une représentation faible, en terme de surface.
En ce sens, leur gestion conservatoire ne nous semble pas prioritaire (résultats du chapitre 5).
De par une composition floristique commune aux autres formations, elles peuvent cependant
constituer des réservoirs temporaires de biodiversité.
Cette végétation est indirectement liée à l’activité anthropique, puisque c’est l’absence
d’entretien par fauchage ou pâturage des formations prairiales ou l’abandon de terres arables
qui permet son existence.
Recommandations pour une gestion conservation
Les recommandations que nous pouvons avancer pour leur gestion conservation se référent à
leur origine et leur situation topographique, ayant vu que la nature de la parcelle dont dérive la
fruticée et l’état hydrique du sol conditionnaient sa composition. Les rares fruticées présentes
sur les communes de Nailloux et de Préserville révèlent qu’un abandon de terres arables
permet un embuissonnement rapide par des arbustes, alors qu’un abandon du fauchage ou du
pâturage de formations prairiales permet l’installation d’un cortège de plantes herbacées
persistant, d’autant plus riche que la station présente des conditions hydriques de sol
déficientes. Un contrôle de la densité de la strate arbustive, par une éclaircie raisonnée, pourra
favoriser une diversité d’espèces herbacées, héliophiles.
Ces formations pourraient valoriser certains coteaux du Lauragais délaissés de l’agriculture,
en enrichissant la mosaïque paysagère, en fournissant du petit bois et en accueillant une
diversité d’oiseaux, composante de la faune souvent convoitée par les naturalistes.
2. 7 -
Les bois
Intérêts d’une gestion conservatoire
Les forêts comme la plupart des groupements végétaux étudiés, ont subi depuis des siècles
l’influence de l’Homme. Celui-ci les a conservé et façonné en fonction de ses besoins ; il a
transformé leur structure et leur aspect. Malgré cela, nous avons pu constater que les surfaces
boisées, même fortement perturbées, ont conservé en tout ou partie leurs flores, ligneuse et
herbacée, originelles, adaptées au terrain et au climat.
Les formations boisées constituent un des derniers éléments de nature dans les paysages
d’agriculture intensive du Lauragais haut-garonnais, qu’il est essentiel de préserver grâce à
331
une gestion écologique. La diminution, que nous avons observé, de la richesse spécifique de
l’intérieur des bois au cours du temps, parallèlement à l’augmentation de celle des lisières,
peut s’expliquer par l’atténuation de l’exploitation forestière (coupe, pâturage, ramassage du
mort-bois) depuis le début du XIXe siècle et l’augmentation de l’isolement et du
morcellement des taches. Ceci montre qu’une intervention anthropique raisonnée peut être
bénéfique à la diversité floristique et que les actions entreprises doivent privilégier les
formations boisées étendues.
Recommandations pour une gestion conservatoire
À partir de ce constat, trois recommandations peuvent être proposées pour assurer une gestion
écologique de la forêt (Conseil de l'Europe, 1999).
1- Développer une exploitation durable des bois
Les formations boisées actuellement peu exploitées représentent une ressource1 économique
peu valorisée. Pourtant, les forêts renferment d’importantes ressources renouvelables (Conseil
de l'Europe, 1999) et l’exploitation forestière, si elle est gérée de manière rationnelle et
durable, peut se révéler bénéfique à la biodiversité (Collectif, 1996). Nous avons vu que les
pratiques forestières (coupes successives, sélection, usage du sous-bois, maintien de bois mort
ou d’arbres sénescents, gestion de la structure d’âge), souvent multiséculaires, si elles ont
modifié la flore, aboutissent à des groupements apparemment stables et équilibrés, et
engendrent pour un même groupement forestier, écologiquement défini, des sylvofaciès
différents, présentant des strates arborées variées (chêne, frêne, robinier, sorbier) (Parks et al.,
1994), qui renferment un cortège floristique spécifique2 (Bertomeu et al., 2001). Une telle
forêt structurée par un mélange d’espèces d’arbres augmente la complexité des espaces vitaux
pour les espèces végétales et permet de créer les conditions d’une diversité biologique élevée
(Schutz et al., 1996). En parallèle de cette gestion, la conservation de bois non exploités est
importante (cf. discussion du chapitre 5) ; d’après la littérature, les sites qui ont été boisés en
continu depuis plus de quelques centaines d’années peuvent être plus riches en espèces
natives et contenir plus d’espèces rares que les bois d’origine récente (Thomas et al., 1997).
De plus, certaines plantes ont des affinités pour les groupements anciens alors que d’autres
ont des affinités pour les groupements récents (Peterken, 1996).
Face aux pratiques actuelles, nous recommandons donc pour chaque commune du Lauragais
d’identifier et de conserver les bois les plus anciens et d’exploiter de manière raisonnée les
autres bois. Par exemple, il serait très profitable pour la flore forestière de maintenir les
remarquables formations boisées sur la commune de Préserville, qui sont parmi les plus vastes
du Lauragais haut-garonnais.
1
Ressource Un élément devient une ressource à partir du moment où il est valorisé ou exploité, qu’il soit utilisé
tel quel, transformé ou réduit (Candebat, 1995).
2
On trouve après coupe un enrichissement et une banalisation des communautés, suivi d’un appauvrissement et
enfin d’un enrichissement lent avec des espèces plus spécialisées dans les stades plus âgés (Deconchat, 1999).
332
Bois, Préserville (Schwal)
L’action engagée du Sicoval, dans sa charte paysagère, de protéger toutes les zones boisées du
Lauragais (coupes à blanc interdites), illustre la volonté politique de préserver les milieux
boisés et leur cortège floristique.
Sur la commune de Clermont Le Fort, un chemin de randonnée aménagé le long du ruisseau
de Notre-Dame, en bas fond humide boisé, permet par éclaircie du sous-bois l’apparition
d’espèces herbacées forestières telles que le Lys jacinthe ou l’anémone fausse-renoncule.
Scilla lilio-hyacinthus L. en sous-bois (Schwal)
2- Offrir une diversité de surfaces et de formes
Le chapitre 5 a mis l’accent sur l’influence contestée de la surface des taches boisées sur la
composition floristique, une tache de grande surface n’étant pas forcément liée à une richesse
floristique supérieure (Parks et al., 1996 ; Spellerberg et al., 1996). La question de la
meilleure des solutions entre une surface large et plusieurs petites surfaces (< 10 ha) est
souvent soulevée dans les programmes de conservation (Soule et al., 1986 ; Schwartz et al.,
1997). Les auteurs avancent que si de grands sites supportent de plus grandes et stables
populations, des populations isolées (métapopulations) préservent les espèces des risques
d’extinction par des catastrophes locales. D’un côté, de larges sites procurent un habitat
suffisant pour des espèces avec des exigences d’aire qui ne peuvent être rencontrées dans de
petits sites. De l’autre côté, plusieurs petits sites favorisent une diversité et les interactions
d’espèces. La préservation de petites parcelles de populations intactes sera souvent plus suivie
pour le maintien de populations d’espèces rares ou en danger. Ainsi, il convient d’employer
une combinaison de grands et de petits sites pour conserver la biodiversité forestière.
333
Malgré la difficulté de mettre en évidence l’influence des composantes structurelles (distance,
forme, surface), l’étude a prouvé l’importance de la forme de la tache sur la composition
floristique. Il est préférable de maintenir des formes compactes car nous avons vu qu’elles
présentent une richesse spécifique et une richesse en espèces forestières plus grandes que des
formes irrégulières et limitent ainsi la fragmentation.
3- Restaurer des forêts dégradées
Une fois l’écosystème dégradé, il est souvent incapable de se reconstruire ; un seuil
d’irréversibilité écologique a été franchi de façon stricte (disparition d’espèces, réduction du
nombre d’individus d’une population au-dessous du seuil de viabilité) ou relative (disparition
d’habitats). Aussi, avant toute action de restauration de forêts dégradées, il est nécessaire de
faire disparaître le facteur de dégradation des milieux (impact de la sylviculture sur la
disparition de certains habitats (mares, clairières), fragilisation des structures au vent et
modification de l’état de surface des sols après exploitation) (Vallauri, 2000). Les actions de
restauration bien planifiées sur le long terme demandent un investissement important pour
activer les processus écologiques (restauration des sols, de la diversité des arbres et la
régénération naturelle, fermeture de la canopée, processus fonctionnels clés de l’écosystème).
L’action se base sur le fonctionnement de la nature, profitant de sa capacité à s’autorenouveler et n’intervenant que pour pallier ou accélérer à son profit la régénération naturelle.
Sur la commune de Nailloux comme dans beaucoup d’autres communes du Lauragais,
l’enrésinement pratiqué a créé un véritable désert écologique et un appauvrissement du sol qui
se fera sentir sur plusieurs années après l’arrêt de l’activité.
Boisement de conifères, Nailloux (Schwal)
Cependant des forêts dégradées peuvent être revalorisées par un aménagement raisonné.
L’exemple des plantations de peuplier sur la commune de Beaupuy aménagée sur une prairie
humide, montre qu’une plantation lâche, peu exploitée (pas de désherbage, pas de labour) et
où le réseau hydrique et les fossés ont été maintenus, permet le maintien d’une flore prairiale
diversifiée et remarquable comme en témoigne la présence de l’orchidée Dactylorhiza
incarnata (L.) Soó en grand nombre.
Dactylorhiza incarnata (L.) Soó (Belhacène)
334
Une bonne gestion écologique des forêts suppose d’investir dans les recherches et encourager
les échanges d’expérience et d’informations dans le but de définir une évaluation de la
situation et de l’évolution de la biodiversité des forêts et de proposer des mesures adéquates
de gestion.
2. 8 -
Les haies
Intérêts d’une gestion conservatoire
Outre leur rôle de brise-vent, dans l’évapotranspiration, dans l’accroissement de la
productivité, dans la régulation du ruissellement de l’eau, dans l’alimentation des nappes ou
dans la lutte contre l’érosion des sols cultivés en zone de coteaux, et malgré leur origine
anthropique (Dajoz, 1985 ; Anonyme, 1995), nous avons vu que les haies sont des
écosystèmes associés à des talus et des fossés qui peuvent devenir, après une phase de
colonisation assez longue, des supports d’une grande diversité végétale et dont le cortège
floristique s’enrichit à partir des milieux environnants. Le rôle des haies intervient dans la
dispersion des espèces forestières (Burel et al., 1995).
À l’image des pratiques du XIXe siècle, les haies constituent une source de bois d’œuvre, de
chauffage, de piquets, ...de fourrage. Les feuilles, fleurs et fruits assurent un rôle esthétique de
la haie. Par ailleurs, les arbres structurent le paysage en constituant des limites de champs,
mettent en valeur le patrimoine bâti ou naturel, intègrent les constructions et installations.
Recommandations pour une gestion conservatoire
Comme les résultats le démontrent, une composition floristique optimale des haies doit
satisfaire à trois exigences : disposer de haies anciennes, composées de plusieurs strates de
végétation et situées dans des conditions d’humidité et d’acidité du sol variées. Afin de limiter
les risques d’invasions d’espèces exotiques, il est nécessaire de planifier la plantation des
essences de la haie en accord avec les conditions naturelles de la région.
Dans ce cadre, l’association ‘Arbre et paysages d’antan’ s’attache depuis plusieurs années à
réinstaller des haies dans le Lauragais haut-garonnais avec des essences locales dans les
différentes strates de végétation. Cette initiative n’est possible qu’avec la participation des
pépinières incitées à multiplier les essences locales.
Les haies plantées en espèces fruitières sont valorisées par les fruits qu’elles fournissent. Nous
avons souligné qu’un niveau zéro de gestion n’est pas une option appropriée dans le maintien
de la biodiversité des haies anciennes (Garbutt et al., 2002).
Les efforts de conservation doivent être accentués face aux actions de destruction de haies
anciennes, refuges pour certaines messicoles, comme la Nigelle de France disparue avec la
haie, sur la commune de Belbèze Lauragais (Belhacène, com. or.).
Pour remédier à la destruction des haies lors des remembrements successifs, le Conseil
général de la Haute-Garonne est maître d’œuvre depuis 1988 d’un programme d’aide aux
cotisants à la MSA souhaitant replanter des haies sur les terres agricoles (Canal 31, 2000).
Des techniciens du Conseil général dispensent aux agriculteurs un appui pour le bon
développement de la nouvelle haie : préparation du terrain, choix des essences en fonction de
la nature du sol, de son exposition et des objectifs recherchés, techniques de plantation et
335
d’entretien de la haie. Depuis le début de l’opération, le paysage haut-garonnais a vu naître
plus de 500 km de haies, avec en tête les cantons de Caraman et de Nailloux.
Haie replantée, Préserville. Cytise, troène du Japon, prunier, robinier
3-
Cohérence des connectivités entre composantes paysagères
Il convient d’assurer la cohérence des connectivités entre écosystèmes similaires, pour
permettre aux espèces de se déplacer dans la mosaïque paysagère. Il faut songer à gérer
l’ensemble du paysage et, pour faciliter la migration des espèces, leur offrir une hétérogénéité
d’habitats reliés entre eux. Comme l’avance l’écologue britannique Huntley, le but ultime doit
être de fournir un réseau de parcelles à travers lequel les espèces ajusteront de façon
dynamique leurs réponses aux changements de l’environnement (Ministère de l'Aménagement
du Territoire et de l'Environnement, 1998). Cette cohérence est nécessaire à supporter une
dynamique progressive de la végétation.
Comme nous l’avons démontré, pour certaines espèces, des milieux tels que les haies, les
accotements routiers, les lisières ou les berges peuvent assurer le nécessaire degré de
continuité entre des habitats diversifiés (corridors) (Heywood, 2000). Il convient donc de
maintenir, ou si ce n’est de restaurer, une diversité des éléments linéaires.
III -
Vers une réalité de la gestion conservatoire des
paysages du Lauragais
La société actuelle s’inquiète des menaces que l’agriculture intensive fait peser sur la santé,
l’emploi et la biodiversité. Sous sa forme actuelle, l’exploitation des écosystèmes ne garantit
pas leur viabilité à long terme et recèle des coûts cachés (Naeem et al., 1997). Un nouveau
336
défi s’ouvre aux décideurs, aux agriculteurs et aux consommateurs pour développer des
systèmes de production plus respectueux de l’environnement (agriculture raisonnée,
biologique) et privilégier une diversité de produits de qualité parmi les productions régionales
et locales. L'avenir de l’agriculture ne se résume pas à sa dimension productive. Elle est
également la garante d'une gestion équilibrée du territoire qui ne peut se passer de la
contribution essentielle des populations qu'elle fait vivre.
La mise en place d’une gestion conservatoire permettra au final de ralentir la dégradation du
patrimoine biologique du Lauragais haut-garonnais en suivant trois axes principaux (Lamotte,
1995) :
1- Conserver les paysages et les écosystèmes,
2- Assurer le maintien d’une diversité d’espèces aussi élevée que possible qui
s’accompagne d’une poursuite active de son étude,
3- Solliciter le maintien de la biodiversité génétique chez les plantes cultivées.
L’application de ces bases illustre plus généralement les compromis qu’il convient de trouver
entre protection de l’environnement et contraintes du développement économique (Lévêque,
1994a). À ce propos, nous avons souligné l’intérêt de mettre en place une stratégie
écosystémique1 de préférence à une approche spécifique (CNUED, 1992). La végétation est
ou doit être le milieu principal mais aussi le premier outil du « conservateur » (Polunin,
1967).
L’ensemble des concepts évoqués, appliqués au territoire lauragais, démontre que, parmi les
critères à privilégier dans la gestion ou la restauration d’un site, on peut prendre en compte
l’environnement de ce site (échelle du paysage), son histoire (écosystèmes « de référence »),
son importance patrimoniale (représentativité du pool d’espèces), son fonctionnement
(mécanismes d’assemblages) ou tout autre critère mesurant une dimension particulière de la
diversité biologique. Dans cette optique, on pourra miser dans certains cas sur la restauration
d’un système historique stable afin de conserver un patrimoine biologique au détriment de la
capacité d’accueil d’autres espèces. Dans d’autres cas, on pourra miser sur la création d’une
mosaïque dynamique qui permet la coexistence simultanée de plusieurs systèmes de
référence, en jouant sur les processus démographiques (extinction/colonisation). L’application
des bases proposées doit être soutenue par un suivi et une évaluation. Le suivi permettra de
recueillir des données relatives au déroulement du projet ; l’évaluation devra déboucher sur un
jugement de l’efficacité du projet (Bazin et al., 2002).
À l’heure où l’agriculture a besoin d’un relais pour assurer la conduite du développement
rural, les domaines du loisir, de l’éducation et de la santé semblent prometteurs pour les
espaces ruraux dont les populations devront anticiper les désirs des citadins en mal de nature
(Bontron, 1993). On reconnaît que la biodiversité produite par l’agriculteur a un prix qui
s’exprime, conformément à la théorie économique, de la façon suivante (Conseil de l'Europe
et al, 2002a) :
Prix unitaire de la biodiversité = (manque à gagner – revenus de la biodiversité)
+ prix des facteurs de production de la biodiversité
1
Définition Stratégie recourant, pour assurer la préservation et l’utilisation durable de la biodiversité, à des
méthodes qui prennent en compte l’ensemble de l’écosystème au lieu de se concentrer sur ses éléments
constitutifs (OCDE, 1999).
337
Ce prix doit être payé à l’agriculteur par le demandeur (et le bénéficiaire) de biodiversité,
c’est-à-dire la collectivité représentée par les pouvoirs publics. C’est dans une conciliation
d’un mode de rémunération des externalités positives de l’agriculture que les systèmes de
production agricole multifonctionnels pourront se développer de manière durable. Selon le
concept du renouveau rural, il faut inverser la tendance en trouvant, au sein du terroir, les
ressources propres à la renaissance de ses traditions et savoir-faire (Besset, 1999). Les
produits agricoles traditionnels peuvent trouver un second souffle et reconquérir une place de
moteur économique, garantissant un développement équilibré du territoire. Pour cela, il est
souhaitable de valoriser une image de qualité et d’authenticité, garante de la biodiversité.
338
Conclusion de l’étude de la dynamique de la
biodiversité végétale dans les paysages
d’agriculture intensive
339
L’analyse conjointe de l’évolution de l’organisation spatiale et de la diversité floristique dans
les paysages d’agriculture intensive, étayée par les données historiques et appuyée par les
connaissances acquises par la communauté scientifique, met en évidence l’érosion de la
biodiversité végétale. Conformément aux causes unanimement avancées par le monde
scientifique, cette érosion est principalement sous l’influence prépondérante de deux facteurs :
la dégradation des habitats qui se manifeste à travers leur disparition et leur fragmentation, et
les pratiques modernes qui dictent la distribution et la disponibilité des habitats naturels. Cette
étude a apporté une contribution à la connaissance des facteurs qui permettent à la
biodiversité végétale de s’exprimer dans des paysages anthropisés et dont l’importance a été
estimée par des méthodes statistiques. Parallèlement à son érosion, la biodiversité végétale,
évaluée au niveau de la flore, s’est banalisée.
De telles études s’avèrent à l’heure actuelle indispensables car, s’il est actuellement
clairement établi que la conservation de la biodiversité est une mesure prioritaire à mettre en
œuvre pour l’ensemble des activités humaines, les processus permettant son maintien sont
encore loin d’être complètement connus. La végétation employée pour évaluer la biodiversité
végétale et pour révéler les impacts des activités humaines sur la biodiversité végétale dans
les paysages agricoles intensifs, tels que ceux du Lauragais, s’est révélée constituer un
indicateur biologique original et approprié, reproductible à d’autres paysages. Cet indicateur
est important pour mettre en place une ‘durabilité paysagère’ (Paoletti, 1999). Par ailleurs,
l’harmonisation de l’information par regroupement s’est révélée être une étape incontournable
pour comparer des données disparates.
La variation de la flore du Lauragais dans le temps et dans l’espace démontre que la
biodiversité végétale traduit une expression potentiellement plus grande mais qu’elle est
réduite par les diverses pressions exercées sur le milieu. De ce fait, une analyse plus
exhaustive de la biodiversité mériterait de prendre en compte la faune et sa dynamique en
réponse à l’artificialisation du paysage. Par exemple, l’avifaune, responsable de la dispersion
d’un grand nombre de graines, et l’entomofaune, responsable de la pollinisation, pourraient
constituer des indicateurs biologiques supplémentaires dans la mise en évidence et la
compréhension des facteurs influençant la biodiversité dans les paysages d’agriculture
intensive.
Les paysages agricoles modernes expriment les usages actuels et passés de l’espace qui
marquent leur empreinte dans l’organisation spatiale des formations. Le paysage est apparu
comme un outil nouveau et précieux pour le diagnostic de l’état d’un territoire et comme une
donnée essentielle d’un projet d’aménagement, où l’échelle pertinente pour l’évaluation de la
biodiversité se révèle être à la fois la parcelle et le paysage (Bertrand, 1994). L’étude des
facteurs spatiaux qui constitue un champ d’investigation dans la compréhension de l’effet de
la fragmentation du paysage sur la flore et mis en évidence pour les taches boisées, doit être
élargie aux autres types de formations végétales comme les pelouses et les prairies.
Malgré une régression globale de la biodiversité végétale, la modernisation de l’agriculture
révèle des effets antagonistes sur la biodiversité dans les paysages ruraux. La simplification
de la gestion de l’espace et l’intensification des pratiques (drainage, défrichement, conversion,
désherbage) conduisent, en générale, progressivement au déclin de la biodiversité. Pourtant,
les territoires artificialisés du Lauragais haut-garonnais, marqués par une emprise humaine
ancienne, peuvent renfermer une diversité floristique remarquable, en favorisant la diversité
des habitats dans la mosaïque paysagère et la végétalisation. Cependant, ce précepte
atteindrait ses limites dans les paysages entièrement urbanisés, occupés par un seul type de
milieu artificialisé. À partir de ce cas extrême, et dans le cas des paysages d’agriculture
340
intensive, nous pouvons établir qu’il existe un gradient de biodiversité décroissant des
milieux naturels vers les milieux artificialisés, des paysages diversifiés vers des paysages
uniformes et des paysages ouverts vers des paysages fermés. Nous pouvons donc conclure
que les activités humaines, perçues comme des perturbations, peuvent être des facteurs
favorables ou préjudiciables à la conservation de la biodiversité.
Dans une perspective d’approfondissement de la recherche initiée, la prise en compte d’autres
sites d’étude appartenant au même territoire lauragais haut-garonnais pourrait permettre de
tester ce gradient. L’enrichissement de l’analyse multi-sites qui offre de remarquables
perspectives pour comprendre les facteurs locaux qui influencent la distribution de la
végétation, offrirait la possibilité de mettre en évidence d’autres facteurs ou de confirmer
certains facteurs responsables de la dynamique de la biodiversité végétale. Ces nouveaux sites
devraient présenter une nouvelle organisation spatiale du paysage. Par exemple, des sites
représentant des paysages très uniformes ou des paysages très fermés. Conjointement, la
poursuite l’étude de la variation de la flore sur les deux sites déjà retenus, en parallèle à
l’évolution des parcelles, permettrait de tester la validité des facteurs évalués comme
déterminants, en comparant la variation de la flore réelle à la dynamique attendue. Cette
poursuite pourrait permettre, à terme, d’envisager la mise en place d’une modélisation de la
dynamique de la biodiversité végétale.
La mise en évidence du rôle de certains milieux anthropisés comme réservoirs de biodiversité,
au moins temporairement, suggère l’importance de maintenir une diversité de milieux pour
permettre la dispersion des espèces dans des paysages fragmentés et donc le maintien de la
biodiversité végétale. En particulier, l’étude pourrait être poursuivie en prenant en compte les
corridors végétaux dont l’importance dans le processus de dispersion des espèces a été à
plusieurs reprises soulignée. En parallèle, il conviendrait également de mesurer deux autres
variables : la quantité de graines produites et la distance sur laquelle les graines sont capables
de se disperser. Cette distance pourrait être mesurée de deux façons : soit en considérant les
moyens de dispersion mis en jeu par la graine, soit en considérant les facteurs extérieurs de
dispersion (homme, animaux domestiques).
Une autre voix d’élargissement de l’étude serait de mettre en place des mesures du coût de la
perte de biodiversité qu’occasionnent les activités humaines, afin de sensibiliser les acteurs
responsables et de les inciter à internaliser ce coût dans les pratiques choisies. Par exemple,
cette mesure pourrait se baser sur les effets positifs de la biodiversité végétale sur les
agrosystèmes, déjà valorisés en agriculture biologique (accroissement durable de production
par la diversité d’espèces cultivées, fourniture de biens non alimentaires comme le bois des
haies et des services, diminution de l’emploi des herbicides par la valorisation des insectes
auxiliaires, diminution des labours par la valorisation de l’activité biologique des sols,
maintien des rendements en favorisant la pollinisation). Cette démarche pourrait être
complétée par l’établissement d’un questionnaire à l’attention des habitants, afin de connaître
leurs intérêts et attentes à la protection de la biodiversité.
Nous nous proposons de tester la démarche mise en place pour analyser la biodiversité, dans
des paysages développant d’autres types de culture : agriculture traditionnelle (polyculture,
élevage), agriculture biologique ou dans des paysages offrant d’autres conditions de milieu :
de montagne, … La confrontation des résultats obtenus pourrait mettre en avant d’autres
facteurs de maintien de la biodiversité végétale et enrichir, dans une plus large investigation,
la connaissance des facteurs responsables de la dynamique de la biodiversité végétale. En
particulier, la confrontation de nos résultats à ceux que nous pourrions obtenir en menant une
étude similaire sur des paysages soumis à une gestion durable (agriculture biologique)
permettrait d’asseoir les propositions que nous avons avancées pour une gestion conservatoire
des paysages d’agriculture intensive. À terme, la démarche retenue dans l’étude pourrait être
valorisée par la caractérisation des terroirs ruraux puisque certaines espèces traduisent, par
341
leur prédominance intemporelle, une typicité de la flore et retranscrivent les conditions
naturelles et la physionomie du paysage.
L’étude diachronique de la diversité floristique s’est révélée être une démarche
particulièrement séduisante dans la mise en place de bases de gestion conservatoire,
puisqu’elle témoigne de la flore passée, traduit la biodiversité actuelle et permet de juger de la
transmission future à garantir. La gestion des espèces et des écosystèmes sont deux aspects
complémentaires de la gestion de la biodiversité (Soule, 1987). La définition des bases de
gestion de l’espace qui prend en compte à la fois les caractéristiques du territoire et les
objectifs et moyens de production, doit s’inspirer des pratiques agricoles traditionnelles qui
peuvent offrir une plus grande diversité de milieux et des conditions plus appropriées à
l’épanouissement de la diversité biologique. La connaissance des espaces naturels et le
développement des rapports complexes du politique, de l’économie et de l’écologie doivent se
situer dans la continuité temporelle, fondée sur le renouvellement à long terme des ressources
naturelles, grâce à une « cogestion intergénérationnelle » (Kovacshazy, 1993). En parallèle, la
prise de conscience progressive des citoyens de l’importance de la préservation de la
biodiversité et leur manifestation sur le devant de la scène politique sont essentielles pour
faire entendre la cause de la biodiversité au niveau des instances responsables des prises de
décision. À cet effet, de nouveaux usages de l’espace rural doivent être proposés.
Dans le cadre de la Biologie de la conservation, une des finalités des actions de conservation
est de préserver le potentiel évolutif des espèces (Olivier et al., 1995). La préservation de ce
potentiel évolutif suppose que des actions de conservation soient mises en œuvre, beaucoup
plus tôt par rapport à ce qui est pratiqué actuellement. Toutefois, ces résultats sont à nuancer,
dans la mesure où toutes les espèces n’ayant pas les mêmes stratégies de colonisation,
n’exigent pas les mêmes effectifs pour se maintenir. Il conviendrait donc de pouvoir
déterminer des seuils concernant le nombre minimal d’individus et de populations d’une
espèce donnée ainsi que le degré de fragmentation de l’ensemble qui déterminera l’intensité
des flux géniques entre populations, pour que l’espèce puisse se maintenir sur le plan
démographique et sur le plan de sa variabilité génétique (Olivieri et al., 1992).
Munis des connaissances qualitatives (nature des espèces, facteurs) et quantitatives (richesse,
distribution spatiale, dynamique), les aménageurs ont désormais les informations qui
permettent de prévoir grossièrement comment le milieu est susceptible d’évoluer sous la
pression de la transformation qu’ils vont imposer. À l’heure actuelle, où la pression de
l’homme sur le milieu se fait de plus en plus sentir, il est possible de mettre en place des bases
de gestion conservatoire qui soient spatialement explicites, applicables à l’échelle régionale et
compréhensibles pour les usagés et aménageurs. Dans un monde de plus en plus tourné vers la
production de masses et l’uniformisation des cultures, on ne pourra véritablement
entreprendre l’application de bases durables de gestion qui concilieraient activités humaines et
Nature, sans avoir pu répondre auparavant de manière objective à la question posée par
l’écologue américain Rosenzweig : "Combien sommes-nous prêts à sacrifier pour préserver la
biodiversité ?".
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