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ISSN 2253-0061 Dépôt légal 188-2012
SOMMAIRE
Actualité
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Mars 2014 N° 28
Santé-Mag: Magazine mensuel de la santé
Edité par Media Pub Santé
Adresse: Coopérative El Mehdia, Bt N°2, les Vergers,
Bir Mourad Raïs, Alger.
Tél./Fax: +213 (0) 21 44 91 11
Mob.: +213 (0) 550 95 46 53 / +213 (0) 661 49 57 23
Site web: www.santemag-dz.com
Email: [email protected]
Dr Ilyes Baghli: Nous avons présenté des solutions, à la tutelle...
Plus de 360 millions de sourds et malentendants, dans le monde
Pr Mahmoud Ait Kaci-Ahmed: L’illettrisme est un facteur aggravant la maladie d’Alzheimer
Pr Abderrezak Dahdouh: Les cancers urologiques connaissent une incidence...
Évènement
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Dr Mohamed-Salah Bali: Nous lançons un appel aux autorités....
Pr Kamel Bouzid: La CNAS doit nous donner les raisons du non-remboursement....
Pr Ahmed Bendib: Le plan cancer doit être inséré au système de santé reformé....
Pr Mohamed Oukkal: Le plan cancer insiste sur la prévention et le dépistage
Pr Rabah Ferhat: Sans une volonté politique, le plan cancer ne pourra rien régler
Pr Djamel Djennaoui: Une plus grande connaissance du cancer du nasopharynx...
Dossier
Directeur de la publication:
ACHOURI Abdelkader
Directeur de la rédaction:
ACHOURI Mohamed
Email: [email protected]
Coordinatrice de la rédaction:
ACHOURI Amina
Directrice technique:
ABDELATIF Rabea
Comité de rédaction:
AIT Tanina
MAYA Harcha
ZAHAF Loubna
NAHLIL Djaouida
SOLTANE Hania
BADREDINE Sawsen
RAMZY Chahra
HAMDI Rania
Secrétaire de la rédaction:
FORTAS Fifi
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Pr Abdelkrim Zerhouni: Le prélèvement d’organe ne peut se faire qu’après accord....
Pr Farid Haddoum: Le “tout hémodialyse” est en totale contradiction...
Pr Tahar Rayane: Il y a, donc, beaucoup de facteurs de risques....
Pr Antar Degaichia: Insuffisance rénale; sur le plan préventif, beaucoup reste à faire
Les spécialistes regrettent le sous-développement de la greffe rénale
Pr Mustapha Benmansour: La gravité de la maladie, la lourdeur du traitement...
Pr Abderrezak Dahdouh: La greffe rénale est un must, en matière de santé publique
Maladie de Berger
L’amyloïdose rénale
Pr Mohamed Benabadji: Les malades arrivent, souvent, dans nos services de néphrologie...
Recherches médicales
Approche diagnostique et thérapeutique de la dystrophie musculaire de Duchenne...
Lupus érythémateux disséminé (LED)
Les Biphosphonates et leur application, dans le cancer du sein métastatique
Conception: BRIKH Kamel
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Correction: GHARNAOUT Amar
42 Formulaire d’abonnement à Santé Mag
Comité scientifique:
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Pr Djellali Louafi
Pr Abdelkrim Zerhouni
Pr Farid Haddoum
Pr Tahar Rayane
Pr Mustapha Benmansour
Pr Abderazrak Dahdouh
Pr Mohamed Benabadji
Diagnostic et traitement de la carence en fer sans anémie
Thérapie ciblée, dans les cancers colorectaux métastatiques
... Vitrification des gamètes et ovocytes
EDITORIAL
Nous voici arrivés au terme de deux années de labeur, à l'issue desquelles
nous avons tenté de tenir deux paris importants:
1. inscrire, dans le champ de la communication, un magazine à
caractère médical, destiné à un public averti et susceptible, par
ailleurs, d’intéresser une communauté scientifique exigeante, prête
à l’écoute des découvertes dans son domaine, qui est celui des
pratiques médicales, ou dans les avancées pharmaceutiques.
2. couvrir l’actualité, au mieux, grâce à une équipe de journalistes
spécialisés, à travers ses différentes manifestations, en Algérie et
dans le monde et être à jour des dernières découvertes, en matière
de techniques de transplantation, de pratiques opératoires et de
traitements.
Au vu de l’audience, atteinte par Santé Mag, nous ne pouvons qu’être
satisfaits du travail accompli durant ces deux années de labeur.
Nous nous assignons, dès lors, pour cette troisième année qui se dessine,
l’objectif de toucher un lectorat aussi nombreux et large que possible,
grâce à une formule d’abonnement annuel (que vous retrouvez à partir
du n° 23 de notre magazine) et qui se promet de le faire parvenir,
mensuellement, à tous nos abonnés, quel que soit le lieu où ils se
trouvent; et ce, grâce à un système de distribution, qui est mis en œuvre
à partir du mois de janvier 2014.
Nous demeurerons fidèles à notre ligne éditoriale, qui consiste à suivre
les grands événements scientifiques et à être au fait des découvertes du
monde médical. Nous restons, ainsi, au contact des avancées médicales
et pharmaceutiques, nécessaires pour mieux soigner et mieux guérir.
Et dans tout cela, un seul baromètre: celui de nos lecteurs qui saura nous
encourager, nous en sommes convaincus – c’est un gage de pérennité
- à aller de l’avant, en s’inscrivant dans notre démarche de formule
d’abonnement et nous permettre, par la même, de les satisfaire toujours
plus et toujours mieux.
La rédaction
ACTUALITÉ
Dr Ilyes Baghli*, à Santé Mag,
"Nous avons présenté
des solutions, à la tutelle,
pour contrecarrer les effets néfastes
des poussières radioactives, sur la santé"
Propos recueillis par Tanina Ait
La presse française du 14 février 2014
a révélé l'étendue de la contamination
nucléaire, en Algérie, suite à l'essai
nucléaire du 13 février 1960,
à Reggane !
La contamination radioactive et son
impact sur la santé sont bien démontrés,
par les spécialistes, dans le domaine, qui
précisent, en outre, que les effets de la
radioactivité persistent plus de 100 ans
après les essais nucléaires.
La population du Sud algérien est la
plus exposée au risque de maladies
graves que celle des autres régions;
en raison des poussières radioactives,
toujours répandues dans les eaux
souterraines et la flore. Cela représente,
inévitablement, un danger pour la santé
humaine et animale.
Le Docteur Ilyes Baghli, président de
la Société algérienne de nutrition et de
médecine ortho-moléculaire, y revient,
dans cet entretien, accordé à Santé Mag
et surtout, propose des solutions, pour
contrecarrer ces effets néfastes, pour la
santé humaine.
Santé Mag: Existe-t-il un réel impact de
la radioactivité sur notre santé?
Dr Ilyes Baghli: Oui, les études ont montré que l'atteinte directe n'est que de
20%, alors que l'atteinte indirecte; par
l'eau, particulièrement, l'air, le bétail, les
aliments et les matériaux de construction représentent 80%.
Quelles sont, géographiquement, les
zones de l'Algérie les plus touchées par
ces irradiations ?
Toute l'Algérie est touchée par les radiations nucléaires; mais, surtout, les zones
où ont eu lieu les essais nucléaires français: Reggane, dans la wilaya d'Adrar !
A noter que le 1" essai du 13/02/2014
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Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
appelé ‘’Gerboise bleue’' était de 17 kilotonnes, alors que celle de Hiroshima du
06/08/1945 était de 15 kt et celle de
Nagazaki était de 17 kt.
Trois autres explosions furent effectuées, en ce lieu, par la suite:
01/04/1960 Gerboise blanche, moins
de 5 kt
27/12/1960 Gerboise rouge, moins de
5 kt
25/04/1961 Gerboise verte, moins de
5 kt.
In Ecker dans la wilaya de Tamanrasset !
Après le dernier essai atmosphérique
Gerboise verte, les 13 tirs souterrains,
qui suivirent, furent effectués plus au
sud, près d'In Ecker, dans le massif du
Hoggar. Quatre essais souterrains, sur
treize, n'ont pas été totalement contenus, ou confinés: Béryl du 01/05/1962,
Améthyste du 30/03/1963, Rubis du
20/10/1963 et Jade du 30/05/1965.
Les essais Béryl et Améthyste ont
conduit à une irradiation dépassant le
seuil réglementaire.
La France procédera, finalement, à 17
essais nucléaires dans le Sahara, de
1960 à 1966. Sans oublier, les essais
chimiques réalisés dans le champ de tir
B2-Namous à Hamaguir, dans la wilaya
de Bechar !
ACTUALITÉ
Quelle a été l'étendue de la contamination radioactive, en Algérie et
dans les pays limitrophes, suite à l'explosion nucléaire "Gerboise bleue"
du 13/02/1960 ?
Il faut savoir que, selon la cartographie,
déclassée, du secret-défense, par l'armée française, démontre les données
suivantes:
Le 14/02/1960: In Salah en Algérie,
Agadez au Niger et N'Djamena au Tchad
furent contaminées, en raison d'un vent
sud-est, le jour de l'explosion de la Gerboise bleue.
Le 15/02/1960: Yaoundé, au Cameroun,
fut contaminée.
Le 16/02/1960: Tamanrasset en Algérie, Niamey au Niger, Ougadougou au
Bukina Fasso furent contaminées.
Le 17/02/1960: Bamako du Mal, Abidjan en Côte d'Ivoire, Accra au Ghana et
Lagos au Nigéria furent contaminées.
Le 18/02/1960: Conakry de la Guinée
fut contaminée.
Le 19/02/1960: Tindouf en Algérie,
Nouakchout en Mauritanie, Tripoli en
Libye furent contaminées.
Le 20/02/1960: Ouargla en Algérie,
Dakar au Sénégal furent contaminées.
Le 21/02/1960: Béchar fut contaminée.
Le 24/02/1960: Alger, Oran, Tlemcen
en Algérie, Oujda, Fès au Maroc, Alicante en Espagne furent contaminées.
Le 25/02/1960: Rabat, Tétouane au
Maroc, Sétif, Constantine, Annaba en
Algérie, Bedja, Tunis en Tunisie, le sud
de la Sicile, le sud de la Corse et le sud
de l'Espagne furent contaminées.
Au soir du 25/02/1960: Toute l'étendue
de l'Algérie fut, totalement, contaminée.
Quelles sont les conséquences, à long
terme, de cette contamination?
Les conséquences des irradiations sont
désastreuses pour la faune, la flore,
l'homme et l'environnement. Faut-il le
rappeler, la demi-vie de l'uranium 235
est de 24 000 ans! D'ailleurs, sur le terrain, la radiation est toujours aussi forte,
plusieurs dizaines de fois plus forte que
la radioactivité naturelle. Différentes
pathologies dont les cancers (cancer
de la thyroïde, cancer du poumon, cancer du sein, leucémie) et certaines anomalies congénitales, etc. peuvent avoir
été induites par l'irradiation ainsi subie.
Des poussières radioactives, répandues
dans les eaux souterraines et la flore,
représentent un danger pour la santé
humaine et animale.
Existe-t-il d'autres formes de contaminations, néfastes pour la santé?
Les radiations provoquées par les
examens radiologiques peuvent être
source de rayonnements:
Radiographie d'un membre, l'équivalent d'un jour et demi.
Panoramique dentaire, l'équivalent de
4 jours.
Radiographie pulmonaire, l'équivalent de 7 jours.
Mammographie, l'équivalent de 20
jours.
Scanner du crâne et radiographie abdominale, l'équivalent de 300 jours.
Scanner du thorax, l'équivalent de
900 jours.
Scanner abdomino-pelvien, l'équivalent de 1500 jours.
Pour ceci, il est nécessaire d'aller vers
des supplémentations préventives
quotidiennes, pour assurer une médecine préventive à chaque citoyen, dans
un esprit serein et pour assurer une
réduction des pathologies chroniques
dégénératives, dues aux radiations
nucléaires et aux radiations radiologiques d'origine iatrogène; sans oublier
les effets de la pollution atmosphérique, due au monoxydes de carbone
et de la pollution électromagnétique,
due aux différents réémetteurs de télécommunications, qui nous permettent,
par contre, de vous communiquerces
recommandations:
Prendre soin de soi-même est possible,
loin d'un esprit de thématique tabou
mais dans un esprit de prévention, rigoureux et efficace.
Quelles sont les solutions, qu'ils ont proposées, pour prévenir les effets néfastes
des irradiations ?
Le protocole, présenté par Pr George
Birkmayer se base sur une dose, quotidienne, de 80 mg de NADH.
Le protocole, présenté par le Pr Atsuo
Yanagisawa se base sur une dose quotidienne de:
Vitamine C: de 3 à 12 grammes, selon
les zones et 25 grammes, pour les zones
hautement contaminés.
Vitamine E: 200 à 400 mg
Sélénium: 100 à 400 ug "microgrammes"
Acide lipoïque: 200 à 600 mg
Avez-vous proposé ces solutions, à la
tutelle ?
Oui, au ministère de la Santé et à la direction centrale de la Santé militaire.
Avez-vous des cas concrets à nous citer?
Il suffit de voir l'étendue de l'épidémie
des maladies chroniques dégénératives,
en Algérie, à type de sclérose en plaque,
maladie d'Alzheimer et cancer ! Dans
la pratique préventive, l'expérience
réalisée à Fukushima, au Japon, suite
à l'accident nucléaire de mars 2011, est
significatif:
Fukushima, au Japon, suite à l'accident
nucléaire du 13/03/2011, suite au séisme
et tsunami du 11/03/2011, où la vitamine
C, à 25 grammes, par voie intraveineuse,
a été administré à 16 employés, qui ont
eu, grâce à cette méthode et celles classiques, une préservation des facteurs
cancérigènes, par rapport au restes des
employés, qui n'ont eu recours qu'aux
méthodes classiques: tenue spéciale,
douche et nettoyage.
Y a- t-il des solutions, pour réduire leur
impact sur la santé?
Oui, car la principale source de contamination est tardive, constituant 80%
des nuisances radioactives. Il existe
un protocole préventif, présenté par la
SANMO, combinant le protocole japonais-américain et le protocole autrichien, adopté en Chine, pour améliorer
les moyens de prévention, vis à vis des
radiations nucléaires, par une supplémentation efficace.
Il reste entendu que votre Société savante, la SANMO, a reçu des sommités
en la matière, tels que les Professeurs
Thomas Levy, des Etats Unis, Atsuo
yanagisawa, du Japon, George Birkmayer, de l'Autriche, Gilbert Crussol, de
l'Espagne.
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
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ACTUALITÉ
Suite à ceci la JCIT (collège japonais de
thérapie intraveineuse), présidé par le Pr
Atsuo Yanagisawa et co-signé par le Pr
Burton Burkson; Thomas Edward Levy;
Ronald Hunnighake; Bradford Weeks;
Steven Hickey et Masachi Uwabu, le
29/03/2011, émit les recommandations
suivantes, pour la prévention, vis à vis
des radiations nucléaires:
Vitamine C: 1 à 3 grammes 3 à 4 fois
par jour,
ou
Vitamine C liposphérique: 1 à 2
grammes, deux fois par jour.
Acide alpha-lipoïque: 100 à 300 mg,
deux fois par jour.
Sélénium: 50 ug à 200 ug, deux fois
par jour.
Vitamine E: 100 à 200 mg, deux fois
par jour.
Pour ceux qui travaillent au niveau des
zones contaminées, en plus de ces recommandations, une perfusion de vitamine C, de 25 grammes, par voie intra-
veineuse.
Ce protocole a été approuvé par la SANMO, suite aux deux présentations du Pr
Atsuo Yanagisawa, Président de la JCIT
et de l'ISOM (Société internationale de
médecine ortho-moléculaire), dont la
SANMO est membre depuis février 2011,
lors des séminaires organisés à Alger, le
24 janvier 2013 et le 25 janvier 2014, en
présence des membres de la SANMO et
des médecins de la direction centrale de
la Santé militaire !
A ce protocole, 80 mg de NADH, ou coEnzyme1, ou vitamine B3 enrichie à l'hydrogène, élaborée grâce aux travaux du
Pr George Birkmayer, en Autriche, est,
également, préconisée; vu les études
ayant prouvé l'effet potentiel du NADH
sur la vitamine C et vice-versa, effectuées au niveau du laboratoire de biologie de l'université de Tlemcen, dirigé par
le Pr Hafida Merzouk et vu les études
effectués en Chine, qui ont prouvé l'efficacité du NADH, dans la protection vis à
vis des radiations nucléaires. La SANMO
préconise de combiner ces deux mé-
thodes, pour optimiser la prévention !
Existe-il une supplémentation nutritive
efficace de la vitamine C ?
Parmi la prévention alimentaire, les aliments riches en vitamine C restent insuffisants.
Pour assurer une protection optimum:
170 mg de vitamine C, par 100 grammes
de persil. 100 mg de vitamine C, par 100
grammes de kiwi. 55 mg de vitamine C,
par 100 grammes de fraise. 55 mg de
vitamine C, par 100 grammes d'orange.
Mais, il n'est pas évident d'atteindre la
dose de 3 grammes, minimum, par une
simple alimentation, car les besoins sont
élevé; mais, ceci, néanmoins, permet de
réduire le déficit !
La prévention et la prise de conscience
est la voie nécessaire, pour un lendemain meilleur, pour la santé du citoyen !
* Dr Ilyes Baghli,
président de la Société algérienne
de nutrition et de la médecine orthomoléculaire.
Plus de 360 millions de sourds et malentendants, dans le monde
Parmi les personnes qui ont besoin d'une aide auditive,
moins d'une sur 40 en dispose, dans le monde
A l'occasion de la Journée internationale de l'audition, qui se tient ce 3
mars, l'OMS publie les résultats d'une
enquête, selon lesquels 360 millions de
personnes souffrent d'une déficience
auditive, dans le monde. L'agence onusienne indique que de nombreux pays
ne disposent pas des capacités nécessaires, pour prévenir et prendre en
charge ces troubles.
Avec le vieillissement de la population,
la perte auditive touche plus d'individus
que jamais. Un tiers des plus de 65 ans
- soit 165 millions de personnes dans
le monde - sont atteints d'une perte
auditive. Mais, ce ne sont pas les seuls
touchés. Chez les enfants, les otites non
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Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
traitées figurent parmi les principales
causes de pertes auditives. Notamment,
dans les pays en voie de développement. Par ailleurs, certaines maladies infectieuses, comme la rubéole, les oreillons, ou encore, la méningite peuvent
être à l'origine de troubles auditifs sévères. Or, toutes ces maladies peuvent
être prévenues, par la vaccination.
PEU DE PAYS S'INTÉRESSENT À L'AUDITION
Les causes d'une baisse de l'audition
sont multiples. L'exposition à un bruit
excessif, les lésions de l'oreille, des traumatismes crâniens et le vieillissement
sont les plus courantes. Les troubles
génétiques et la prise de médicaments
sont, également, susceptibles de provoquer une perte auditive.
D'après l'Organisation mondiale de
la Santé (OMS), "seulement 32 des
76 pays, qui ont répondu à l'enquête,
ont mis au point des plans et des programmes, pour combattre les affections
auriculaires". Pour Etienne Krug, Directeur du département Prévention de la
violence, des traumatismes et du handicap de l'OMS, "les gouvernements et
les partenaires doivent investir en faveur
de la prise en charge de ces troubles de
l’audition. Il est indispensable de couvrir
l'ensemble de la population, y compris
les personnes défavorisées"
ACTUALITÉ
Pr Mahmoud Ait Kaci-Ahmed*, à Santé Mag:
"L’illettrisme est un facteur aggravant
la maladie d’Alzheimer"
Par Tanina Ait
En Algérie, la prévalence de la maladie d’Alzheimer n’est pas très connue,
contrairement à l’épilepsie, ou la
schizophrénie, dont les taux sont stables,
a indiqué le Professeur Mahmoud Ait
Kaci, lors d’une rencontre, à l’hôtel Hilton, qui a rassemblé des experts nationaux et étrangers.
Ce que l’on sait, en revanche, précise
le neurologue, est que si la maladie
d’Alzheimer existe, de par le monde,
dans notre pays, cette pathologie dépend, certes, de l’âge; mais, également,
aujourd’hui, de l’illettrisme, qui est un
facteur aggravant. Or, il faut dire qu’en
Algérie, l’école a n’été rendue obligatoire qu’à partir de 1962; aussi, ce facteur a plus d’impact chez nous, que
par ailleurs. En effet, les personnes
instruites se protègent, mieux que les
analphabètes, de cette maladie dégénérative, bien que les lésions existent chez
elles, également.
D’autres facteurs sont mis en cause,
comme le diabète et l’hypertension
artérielle, ajoute Monsieur Mahmoud Ait
Kaci. Or, ces deux pathologies sont très
répandues chez nous. De même, souligne le spécialiste, la pratique d’une activité physique protège la personne de
cette maladie; mais, peu de gens sont
adeptes du sport, dans notre pays.
En tout état de cause, l’expert préconise
une étude, en Algérie, pour connaitre la
prévalence de la maladie, qui doit être
très importante.
Concernant le diagnostic de L’Alzheimer, celui-ci est relativement facile,
dit-il. Tous les moyens sont disponibles;
en l’occurrence, la TDM, l’IRM et c’est
surtout, un diagnostic d’interrogatoire,
dont il s’agit. Lorsque la maladie est
soupçonnée, des tests neuropsychologiques sont effectués, lors des consultations ‘’mémoire’’. Le Pr Ait Kaci fera
rappeler, également, que ce genre de
consultation existe un peu partout, en
Algérie (au CHU de Bab El Oued, à l’EHS
Ait Idir, au CHU Mustapha et même, à
l’intérieur du pays).
La maladie d’Alzheimer, il y a quelques
années, était considérée comme une
maladie psychiatrique, que seuls les
psychiatres prenaient en charge et elle
était, en outre, considérée comme une
maladie incurable et jusqu’à l’heure
actuelle. Cependant, aujourd’hui, se
sont les neurologues qui la soignent, car
on sait que cette pathologie relève de
la neurologie. On commence à mieux
connaître cette maladie, même si elle
reste, encore, incurable, par absence
de moyens de traitement, souligne le
professeur en neurologie. En revanche,
des médicaments, pour retarder de
quelques années, la démence, liée à la
maladie, existent.
Au demeurant, la maladie commence
à être connue un peu de tous, car nous
constatons, au niveau de notre service,
que des enfants, par exemple, ramènent
leurs parents en consultation. En effet,
car contrairement à l’idée assez répandue, qui considère que l’Alzheimer est
une fatalité et qu’on n’y peut rien, les
nouvelles générations savent pertinemment, en revanche, que des moyens
existent, pour ralentir quelque peu la
progression de la pathologie et dispenser aux patients, par là même, une
meilleure qualité de vie, relativement,
conclut le spécialiste
* Pr Mahmoud Ait Kaci-Ahmed,
chef de service de neurologie,
à EHS Ali Ait Idir - Alger
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
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ACTUALITÉ
Pr Abderrezak Dahdouh*, à Santé Mag,
"Les cancers urologiques
connaissent une incidence,
sans cesse, en hausse"
Propos recueillis par Rania Hamdi
Dans cette interview, le Professeur
Abderrezak Dahdouh aborde la problématique de la prise en charge de la
maladie rénale et urologique. Il parle
de techniques innovantes, pratiquées
dans le service, qu’il dirige au CHU de
Constantine.
Santé Mag: Lors du forum de DKnews,
vous avez fait une présentation du service d'urologie et de transplantation
rénale du CHU de Constantine. Pouvezvous nous parler, davantage, des réalisations de ce service et de ses particularités
Pr A. Dahdouh: En fait, nous avons fait
une présentation concernant l’Etablissement hospitalier spécialisé d’uro-néphrologie Daksi, de Constantine, dont le
service d’urologie et de transplantation
rénale fait partie. Notre EHS d’uro-néphrologie est un modèle, jusqu’à maintenant, unique, en Algérie, avec deux
services complémentaires, sur le plan
clinique.
Il s’agit des services d’urologie et de
transplantation rénale et de néphrologie
et de dialyse, qui bénéficient de l’apport
précieux de cinq autres services, dans le
même établissement. Il s’agit des services d’anatomie et de cytologie pathologiques, d’imagerie médicale, de biochimie, de bactériologie et du centre de
transfusion sanguine (CTS).
Notre service d’urologie et de transplantation rénale assure la prise en
charge de toutes les pathologies, relevant de notre spécialité, avec les techniques modernes et mini-invasives.
Nous citerons, en particulier, la prise en
charge de la maladie lithiasique: bilan
diagnostique et étiologique, utilisant
les moyens les plus modernes (spectrophotométrie à l’infrarouge…); différentes modalités et techniques de traitement (traitement médical, traitement
chirurgical à ciel ouvert, endo-urolo6
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
gique, uretéroscopie rigide et souple,
néphro-lithotomie Per Cutanée avec
fragmentation des calculs par les ondes
de choc hydro-électriques, ou bien au
Laser, traitement par lithotripsie extracorporelle (LEC)…).
Nous citerons, également, la prise en
charge de tous les cancers urologiques,
qui connaissent une incidence sans
cesse en hausse, en raison de l’augmentation de l’espérance de vie, en Algérie,
ainsi que d’autres facteurs pré-disposant. Certains cancers urologiques, dont
le cancer de la prostate, le cancer de la
vessie et le cancer du rein sont classés
parmi les plus fréquents de l’homme
et posent un problème, réel, de santé
publique.
Les cancers urologiques de la région
sont pris en charge au niveau de notre
structure, pour le diagnostic, le traitement chirurgical et/ou oncologique. En
matière d’oncologie, notre unité d’urooncologie dispense tous les soins relatifs à cette pathologie: de la chimiothérapie jusqu’aux thérapies ciblées. Nous
citerons, également, la prise en charge
de la pathologie prostatique bénigne
et des troubles du bas appareil urinaire,
en général, où toutes les thérapies sont
dispensées: traitement médical, traitement chirurgical, traitement par résection endoscopique mono-polaire et
bipolaire, vaporisation de la prostate au
laser à diode, énucléation de la prostate
au laser Holmium Yag (Holep)….
La coeliochirurgie et la rétropérinéoscopie sont, également, des techniques
nouvellement pratiquées au niveau de
notre service, avec des résultats très satisfaisants, sur le plan du coût, du séjour
hospitalier et de la réinsertion socioprofessionnelle des patients.
Où en est la greffe rénale, à l'est du
pays? Combien d'insuffisants rénaux
recensez-vous, dans cette région ?
La structure de notre établissement est
tout à fait adéquate, pour la pratique
de la greffe rénale. En dépit de la disponibilité des plateaux techniques et
d’une équipe multidisciplinaire, toujours engagée, pour la pratique de la
transplantation rénale et le suivi des
ACTUALITÉ
malades greffés, le nombre de
donneurs vivants apparentés, à
l’est du pays, reste en deçà de nos
attentes. Pour cela, plus d’information et de sensibilisation sont
nécessaires.
Quant à la greffe rénale, à partir
des sujets en état de mort encéphalique, elle nécessite plus de
mobilisation, une volonté politique
affichée et plus d’engagement
de la part de l’Agence nationale
de greffe. Les premières greffes
rénales, à partir du cadavre, en
Algérie, remontent à 2002 et ont
été réalisées à Constantine.
Nous attendons, toujours, sa
pérennisation grâce à un cadre
juridique
et
réglementaire
convenable et une organisation médicale et extra-médicale
bien adaptée.
D’autant plus que le nombre d’insuffisants rénaux ne cesse d’augmenter et que la greffe rénale
reste le meilleur moyen thérapeutique, sur les plans médical, économique, social et familial. Rien
qu’au niveau de l’est algérien, on
recense plus de 6000 insuffisants
rénaux, actuellement, sous dialyse.
Vous avez affirmé, lors de la rencontre d'Alger, que vous rencontrez, de plus en plus, de cas de
lithiases dans les reins. Quelles en
sont les causes et l'impact sur la
santé ?
La lithiase urinaire connaît une
augmentation notable de sa prévalence et pose un réel problème
de santé publique et se répercute
négativement sur les secteurs
économiques, par l’absentéisme
causé et les incapacités partielles
causées aux cadres professionnels. Les causes sont, évidemment, les changements enregistrés dans les régimes alimentaires
des algériens et l’hygiène de vie.
Les moyens modernes, mini-invasifs, de traitement doivent être
développés et généralisés, pour
la prise en charge de ces lithiases,
afin de minimiser l’impact de cette
maladie lithiasique, sur le plan socioprofessionnel et économique.
Vous pratiquez, dans votre service, la technique de néphro-lithotomie percutanée.
En quoi consiste-t-elle, exacte-
ment et quel est son intérêt ?
La néphro-lithotomie per cutanée
(NLPC) est une technique endourologique, qui consiste à aborder
le rein par voie per cutanée, sous
contrôle radioscopique et d’introduire un endoscope, afin de visualiser la lithiase à l’intérieur du rein,
de la fragmenter et de l’extraire,
en utilisant une source d’ondes
de choc extracorporelle (laser ou
hydro-électrique…).
Cette technique s’adresse, principalement, aux grosses lithiases
coralliformes, qui ne peuvent pas
être traitées par les autres procédés mini-invasifs et où la chirurgie
à ciel ouvert laisse des séquelles
sur le parenchyme rénal, qui entraîneraient sa détérioration, à
moyen ou à long terme.
Autant que vos confrères, vous
plaidez pour le développement de
la greffe rénale. Quels en sont les
freins, selon votre propre expérience ?
La greffe rénale représente le
meilleur moyen thérapeutique, le
moins coûteux, le plus efficace, le
mieux adapté et le mieux accepté.
Sa réalisation nécessite l’organisation du prélèvement à partir
du cadavre. Sur nos routes, nous
enregistrons, annuellement, plus
de 4000 morts, dans les accidents
de la circulation. Un ramassage
médicalisé, rapide et efficace de
ces accidentés pourrait diminuer
le nombre de décès et offrir aux
insuffisants rénaux une source
inépuisable de reins. L’Agence
Nationale de Greffe (ANG) doit
être plus dynamique et plus entreprenante, par l’élaboration d’un
programme national de greffes,
la mise en place d’un registre de
donneurs volontaires, l’établissement d’un fichier national des
insuffisants rénaux et son actualisation permanente et l’adéquation
d’un cadre juridique et réglementaire permettant de clarifier et
de faciliter les relations entre les
différents secteurs, qui doivent
participer à la réussite de ce programme national de greffe
* Pr Abderrezak Dahdouh,
chef du service urologie
et transplantation rénale,
EHS Daksi – Constantine.
Le diabète s'en prend,
aussi, à nos gencives
Un patient diabétique doit, impérativement, faire
contrôler ses gencives une à deux fois, par an.
Parmi les complications, liées au diabète de type
2, les parodontites sont, trop souvent, négligées.
Or, ces dernières peuvent être associées aux
maladies cardiovasculaires.
C'est le message qu'a souhaité faire passer
le Pr Philippe Bouchard, responsable de la parodontologie à l'hôpital Rothschild, à Paris, au cours
du congrès de la Société Francophone du Diabète.
Le diabète n'entraîne pas de manifestations sur les
dents elles-mêmes. Il n'est, donc, pas à l'origine de
caries, par exemple. Mais, deux maladies, présentes
au niveau de la bouche, y sont associées. Les gingivites, tout d'abord: des inflammations de la gencive, liées à la présence de bactéries. Mais, aussi,
les parodontites qui sont, en réalité, le stade le plus
avancée des gingivites. Dans ce cas, les bactéries
attaquent, directement, les tissus de soutien de la
dent. Le principal risque étant de la perdre ! Selon
le Pr Bouchard, "la prévalence des parodontites
augmente, en cas de diabète; qu'il soit de type 1,
ou de type 2". En effet, cette affection touche deux
fois plus les diabétiques que les non-diabétiques.
Autre constat, seuls les patients, dont le diabète
n'est pas équilibré, sont à risque de parodontites.
DES GENCIVES À SURVEILLER
Par ailleurs, le diabète aggrave les maladies affectant les gencives. "Il est indispensable que les diabétologues informent leurs patients du risque, augmenté, de maladies parodontales et de la nécessité
d'une visite, annuelle, chez le chirurgien-dentiste",
indique le Pr Bouchard. "Par ailleurs, les praticiens
doivent, également, faire ouvrir la bouche de leurs
patients et observer l'état de leurs gencives".
Pour le Pr Philippe Bouchard, "la parodontite est
une complication comme les autres. Elle doit être
surveillée, en tant que telle. Or, aujourd'hui, ce n'est
pas, forcément, le cas. Elle est considérée comme
peu grave. Pourtant, les relations entre maladies
parodontales et risques cardiovasculaires sont,
amplement, prouvées", insiste-t-il. Mais, pas seulement. Des études ont, en effet, montré que ces
affections des gencives peuvent être associées à
des cancers. A surveiller, donc, de très près...
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
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ÉVÈNEMENT
Dr Mohamed-Salah Bali*, à Santé Mag,
"Nous lançons un appel aux
autorités, pour mettre en place une
convention médicale entre la Cnas et
les centres de santé du secteur privé"
Entretien réalisé par Tanina Ait
Santé Mag: Vous venez d’ouvrir un
centre privé, dédié aux traitements du
cancer. Pouvez-vous nous en parler ?
Dr M. S. Bali: En effet, un nouveau
centre de radiothérapie a vu le jour, en
octobre 2013. Il dispose de deux accélérateurs de dernière génération et on a
commencé à traiter les malades atteints
de cancers.
Ce centre vient en appui au secteur public. Il dispose d’une capacité d’accueil
de 100 à 120 patients, par jour. C’est
un centre anti-cancer qui dispose d’un
8
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
service d’oncologie médicale, de radiothérapie, de chirurgie oncologique, d’un
plateau d’imagerie médicale, d’un laboratoire d’anatomo-pathologie et de biologie; donc, tout ce qui est nécessaire,
afin que le patient soit pris en charge
dès le diagnostic et suivi à toutes les
phases concernant le traitement en cancérologie.
Avez-vous rencontré des obstacles,
quant à la mise en œuvre de ce centre
anti-cancer, à l’est du pays ?
L’autorisation de mettre en route notre
projet date de 2007 et nous avons réussi à mettre en œuvre notre projet en
un temps record. En 2009, nous avons
entamé les travaux, qui ont pris fin en
2012. L’année 2013 a vu le démarrage
des traitements; ce, malgré toutes les
difficultés administratives, qui n’ont pas
manqué de se dresser.
Il est dit que votre centre est à la pointe
du progrès. Pouvez-vous nous en dire
plus ?
Effectivement, nous disposons de matériels de dernière génération. C’est, pour
ÉVÈNEMENT
la première fois, en Algérie, qu’existe
une machine équipée des moyens
relatifs à la technique Rapidal. On a
pu, donc, traiter nos patients avec des
technologies identiques à celle celles
utilisées aux Etats Unis, ou en Europe.
L’équipe médicale est-elle algérienne ?
Notre équipe médicale est, totalement,
algérienne. Bien-sûr, on a bénéficié de
6 formations, programmées à l’étranger, ainsi que sur site. Par ailleurs, des
experts étrangers sont venus nous
aider à mettre en place ces nouvelles
techniques sophistiquées et actuellement, nous sommes entièrement indépendants et tout le staff est algérien.
Les rendez-vous, en radiothérapie,
sont-ils obtenus en temps voulu ?
Pour les rendez-vous, on n’est pas saturé. Les malades sont pris en charge
dans la semaine; voire, dix jours. Ils
commencent leur traitement effectif et
ils sont satisfaits.
Quels sont les coûts des traitements
et sont–ils remboursés par la Sécurité
sociale ?
Les coûts s’élèvent à 30; voire, 50
millions de centimes, la cure de deux
mois. Cependant, la CNAS ne joue pas
le jeu et il n’y a pas, encore, de convention entre nos centres de soins et la Sécurité sociale. Alors, les malades bien
qu’assurés sociaux, par ailleurs, payent
de leur propre poche des traitements
forts coûteux et qui, malheureusement,
ne sont pas à la portée de tout citoyen
algérien.
Aussi, à partir de ce forum, organisé à
l’occasion de la Journée mondiale de
lutte contre le cancer, nous lançons
un appel aux autorités, pour penser
à mettre en place une convention.
Comme cela se fait dans d’autres pays;
en Tunisie et au Maroc, par exemple, où
les secteurs privé et public cohabitent,
en l’occurrence et le malade a la latitude de choisir le centre de traitement,
qui lui convient. Ainsi, lorsque la situation est saturée, au niveau des centres
de soins publics; alors, le malade sera
orienté vers le privé sans aucune difficulté, puisque les procédures conventionnelles existent. C’est la moindre
des choses
* Dr M.S Bali,
Medical Physicist, au centre privé
anti-cancer ‘’Athena’’,
de Constantine
Pr Kamel Bouzid*, à Santé Mag:
"La CNAS doit nous donner les
raisons du non-remboursement
de la radiothérapie, dans les
centres privés"
Propos recueillis par Tanina Ait
Santé Mag: Pouvons-nous dire que les
recommandations, que vous ne manquez jamais l’occasion d’exprimer, aussi
bien au niveau administratif que médical, sont prises en charge, dans la mise
en place du plan cancer ?
Pr. K. Bouzid: Oui, ce plan cancer, dont
nous avons demandé sa mise en place,
depuis déjà une vingtaine d’années, voit
son lancement aujourd’hui, puisque les
plus hautes autorités de l’Etat s’y investissent et ce grâce, notamment, à l’action
coordinatrice, du Professeur Zitouni, des
efforts de tout un chacun. Ce plan a été
présenté au premier Ministre et au président de la République. Il a été adopté
et maintenant, il faut l’appliquer. Auparavant, Il va falloir, nécessairement l’évaluer, parce que cela demande beaucoup
d’argent et le budgétiser, pour savoir où
iront les deniers publics; en l’occurrence.
Quels sont les principes de ce plan ?
Les trois grands principes de ce plan
sont:
premièrement, que les algériens atteints de cancer soient soignés de la
manière la mieux possible, sur tout le
territoire national;
deuxièmement, qu’ils soient soignés à
proximité de leur domicile;
troisièmement, il faut établir des
consensus, thérapeutiques, dans la prise
en charge.
De ce fait, la première conférence de
consensus aura lieu du 4 au 6 avril, à
Oran et elle réunira tous les acteurs,
impliqués dans la prise en charge des
malades atteints de cancer.
Pensez-vous que c’est le début de la fin
des disparités, en matière de prise en
charge des patients ?
Oui, c’est le début de la fin des disparités
et cela rejoint, donc, les deux principaux
grands axes de ce plan, qui sont: «que
les malades soient soignés de la même
manière possible, partout sur le territoire
national».
On peut, donc, être optimiste, pour une
application rigoureuse de ce plan ?
Oui, je rappelle, encore une fois, que
cela fait 20 ans depuis que nous nous
sommes attelés à ce travail et nous
avons demandé au chef de l’Etat de
s’impliquer, comme l’ont fait ses pairs du
reste du monde; notamment, en France,
aux Etats Unis, au Maroc, en Tunisie ….
On rejoint ces pays et on espère que
les choses iront mieux, dans un délai de
quelques mois; une année maximum.
Ceci est rassurant, pour le moyen et long
terme; mais, que faut-il faire, hic et nunc,
notamment, pour les malades qui n’arrivent pas à obtenir un rendez-vous en
radiothérapie, dans le secteur public ?
Faute d’équipements, les rendez-vous en
radiothérapie sont ridicules. Je pèse mes
mots: donner un rendez-vous à deux ans,
c’est ridicule; il vaut mieux ne pas donner
de rendez-vous. Pour le moment, nous
sommes, encore, dans la situation d’il y a
5, 6 ans et donner des rendez- vous dans
deux ans, comme c’est le cas à Oran,
c’est au-delà du ridicule; il vaut mieux ne
pas en donner.
Il y a deux structures privées, qui
viennent d’obtenir l’agrément et ont
commencé à exercer: une à Blida et une
autre à Constantine. Le problème de ces
structures privées est que les coûts des
traitements par radiothérapie sont à la
charge, entièrement, des patients, parce
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
99
ÉVÈNEMENT
que la Caisse de sécurité sociale ne joue
pas le jeu.
Pour donner une idée, c’est entre
500.000 et 1 million de DA, pour un traitement et l’algérien à revenu moyen ne
peut pas se le permettre. La CNAS ne
veut pas jouer le jeu, alors qu’elle a payé
des prises en charge dans des structures
privées à l’étranger. Je parle, en particulier, en France, sans rechigner, pour
certains et lorsqu’il s’agit de traitement,
tout simplement, en Algérie, elle s’oppose - et c’est le comble! - au remboursement des cures et des médicaments,
pour de simples citoyens, sous prétexte
que le cancer se soigne, exclusivement,
dans les hôpitaux; ce qui est faux !
On parle de prévention dans le plan cancer. Aussi, que peut assurer une bonne
prévention, quant à l’endiguement d’un
cancer; notamment, du sein ?
Pour le cancer du sein, c’est une prévention secondaire. Il y a d’autres cancers,
qui peuvent se prévenir de manière
primaire. C’est, en particulier, le cancer du col de l’utérus, qu’on prévient
facilement, par la vaccination contre le
virus à l’origine de ce cancer, qui est le
HPV et dans le plan cancer, il est prévu
d'introduire et de rendre obligatoire ce
vaccin chez toutes les jeunes filles, entre
11 et 15 ans, avant le premier rapport
sexuel. L’autre aspect de prévention,
c’est la lutte contre le tabac. A cet effet,
des textes de loi ont été promulgués et
l’Algérie a adhéré, en outre, à la convention internationale pour la lutte contre le
tabac; mais, malheureusement, il y a un
manque de rigueur, quant à leur application.
L’autre aspect préventif c’est, également, de préserver l’environnement, de
contrôler l’utilisation abusive des pesticides dans l’agriculture, qui sont des
produits chimiques toxiques et cancérigènes…
Par ailleurs, en ce qui concerne le cancer du sein, ceci passe par l’examen
clinique de la sage-femme et du médecin généraliste. Cet examen doit être
systématique, comme si l’on prenait sa
tension artérielle. Les seins de toutes
les femmes doivent être surveillés, pour
détecter, éventuellement, un nodule, ou
quelque chose de palpable. Faire, à ce
moment-là, une mammographie et que
la patiente rentre dans le circuit de traitement; car, lorsque le diagnostic se fait
tôt, la femme guérit systématiquement.
En outre, il y a lieu de pratiquer le dépistage, chez les familles à risque, car 10%
des cancers du sein surviennent dans le
terrain génétique. Ainsi, dès que le premier cas est noté dans la famille, il faut
faire des IRM, parce que la mammogra-
phie, chez les femmes jeunes, n’est pas
assez fiable, pour diagnostiquer, très
tôt, le cancer du sein et le guérir.
Un message ?
Je souhaiterai que lorsqu’on organise
des conférences de ce type et voir
tous les acteurs concernés; en particulier, ceux du ministère du Travail et
de la sécurité sociale, pour qu’ils nous
expliquent les contradictions citées plus
haut et surtout, s’expliquer sur les nondits qui circulent; à savoir: «ils ont un
cancer et ils vont mourir; alors, à quoi
bon …»
A cet effet, cela fait, maintenant, 5 ans je
n’ai pas vu les représentants de ces institutions, dans les réunions de ce genre.
Donc, mon message est: qu’ils viennent
dans nos réunions, pour qu’ils nous
donnent les raisons du non remboursement des médicaments pour traiter le
cancer, ainsi que la radiothérapie; alors
que, a contrario, l’hémodialyse, la chirurgie cardiaque sont remboursées et heureusement, d’ailleurs
* Pr K. Bouzid,
chef du service d’oncologie médicale au
Centre Pierre et Marie Curie (CPMC),
Hôpital Mustapha Bacha - Alger.
Découverte de la mutation génétique
causant une maladie rétinienne
L'équipe du Dr David Stanek, de l'Institut
de Génétique Moléculaire, de l'Académie
des Sciences, a publié les résultats de ses
recherches sur la rétinite pigmentaire,
une maladie héréditaire de la rétine, qui
peut conduire à la cécité et qui affecte,
environ, une personne sur 4000.
Cette maladie, qui peut être détectée à
partir de l'âge de 10 ans, environ, ne possède, toujours pas, de traitement efficace,
bien qu'étant relativement courante.
10
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
RÉTINE
Nous percevons le monde extérieur,
principalement, à travers nos yeux,
grâce à des cellules photosensibles,
situées sur la rétine. Chez une personne atteinte de rétinite pigmentaire, ces cellules meurent au cours du
temps, jusqu'à disparition complète de
l'acuité visuelle. Les causes de la maladie peuvent être différentes, mais sont,
principalement, dues à la mutation de
certains gènes impliqués dans la vision.
En fonction des gènes endommagés,
la maladie peut, ou non, se déclarer.
La maladie peut être, aussi, due à des
mutations présentes dans les gènes
impliqués dans l'épissage de l'ARN, un
des processus de base de la biologie
cellulaire. Cela représente la seconde
cause de rétinite pigmentaire.
Les chercheurs ont étudié les mutations du gène SNRNP200, qui code
pour la protéine BRR2, jouant un rôle
essentiel dans le processus d'épissage
de l'ARN.
Ils s'attendaient à ce que la protéine
mutée s'intègre mal dans le système d'épissage, mais il s'est avéré
au contraire que le mutant s'intégrait
très bien au système, agissant même
de manière plus efficace que la protéine non mutée. Cependant, le mutant
générait en plus des erreurs qui provoquaient la mort des cellules photosensible de la rétine.
Selon le Dr Stanek, il reste beaucoup de
travail à effectuer, pour décrire, correctement, les problèmes provoqués par
la protéine BRR2 mutée dans les cellules photosensibles de la rétine. Dans
le but de trouver un traitement efficace
à la rétinite pigmentaire, il est, en effet,
important de comprendre les processus affectés au niveau moléculaire
ÉVÈNEMENT
Pr Ahmed Bendib*, à Santé Mag:
"Le plan cancer doit être inséré
au système de santé reformé
et déterminer des priorités"
Propos recueillis par Tanina Ait
Santé Mag: Avez-vous, professeur, le
sentiment qu’aujourd’hui c’est le grand
jour, avec l’adoption du plan cancer ?
Pr. A. Bendib: Le plan cancer doit être
inséré au système de santé reformé et
cette réforme est une mesure qui peut
être prise rapidement. C’est un ensemble
de décisions à arrêter, comme l’affectation des médecins à travers le territoire
national, la facilitation du transport des
malades, d’une région à une autre du
pays, le cas échéant; car, ce n’est pas
normal qu’un malade prenne un taxi, ou
un car, pour se déplacer de Constantine
à Alger, par exemple, dans son état de
santé fragilisé, au risque de l’aggraver;
alors qu’une ambulance est, à l’évidence, un moyen plus approprié, pour
ce faire. Dans le même souci de performance, le déplacement des médecins
doit être assuré convenablement et la
logistique prise en charge efficacement.
En tout état de cause, le plan cancer doit
déterminer des priorités. Par exemple,
l’OMS énonce que les priorités, en matière de soins, pour la femme, c’est le
dépistage du cancer du sein et celui du
col de l’utérus. Ce sont les deux priorités
en l’occurrence. Il faut, donc, déterminer
ces priorités. Ensuite, comme l’a dit le
Professeur Kamel Bouzid, «il faut nommer un état-major, constitué d’éléments
connus de tous et où tout un chacun
aura un rôle à jouer, bien déterminé.»
Ceci est extrêmement important, car
l’homme est la ressource la plus précieuse. Ensuite, il faudra mobiliser, bien
entendu, les moyens matériels et financiers, comme supports à l’exécution du
plan cancer.
On voit, souvent, une disparité dans
les soins; c’est-à-dire, ceux qui ont des
connaissances peuvent prendre la place
d’autrui, comme cela est rapporté, souvent, à travers la presse. Qu’en est-il, au
juste ?
En principe, je dis bien en principe, dans
mon service de sénologie, au CPMC,
lorsqu’on est algérien, ou même étranger, pauvre ou riche, on est soigné de la
même manière, quel que soit son statut,
sa fonction, j’allais dire la couleur de sa
peau…. Maintenant, si vous parlez de la
situation dans l’ensemble du territoire
national, il est évident qu’on soigne
selon les moyens disponibles. Aussi, si
certains moyens viennent à manquer, le
malade doit être, nécessairement, être
orienté vers une autre structure, mieux
équipée en la matière.Ceci a, d’ailleurs,
été souligné par Maître Ben Braham,
qui a cité le cas français, où la loi oblige
de prodiguer aux malades des soins
en toutes circonstances et ce, par une
optimisation des moyens; autrement
dit, aucun malade ne doit être laissé
en déshérence, faute de moyens, dans
une structure donnée. Normalement,
cela devrait se passer ainsi, dans notre
pays. Aussi, pour palier certaines insuffisances, nous nous déplaçons, une
fois par mois, à Biskra, pour procéder
à des interventions chirurgicales sur
place, car les malades ne disposent
pas, toujours, de moyens nécessaires,
pour se déplacer à Alger.
C’est, donc, pour nous, une façon d’assurer une couverture médicale la plus
large et la plus harmonieuse possible
dans notre pays et supprimer, ainsi, des
disparités qui altèrent, malheureusement, la qualité des traitements
* Pr A. Bendib,
chef de service de sénologie au CPMC,
Hôpital Mustapha Bacha – Alger
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
1111
ÉVÈNEMENT
Pr Mohamed Oukkal*, à Santé Mag,
"Le plan cancer insiste
sur la prévention et le dépistage"
Propos recueillis par Tanina Ait
sera garanti et à moindre coût. C’est-àdire qu’on dépensera moins, pour traiter un cancer localisé, alors qu’un cancer au stade actif nécessitera plus de
moyens, pour des résultats médiocres
et le plan cancer insiste, justement, dans
son chapitre relatif à la prévention sur
le diagnostic précoce et le dépistage,
qui sont, donc, nécessaires; voire, obligatoires.
Les professionnels de la santé ne sont
pas tous unanimes, pour les dépistages.
Qu’en dites-vous ?
A un certain moment, beaucoup de professionnels disaient que ce n’était point
la peine de faire du dépistage, car on
diagnostiquera davantage de malades,
qui ne pourront pas, tous, être pris en
charge, faute de moyens. Nous nous inscrivons en faux contre cette vision des
choses, car ce sont ces mêmes malades,
que vous ne diagnostiquez pas maintenant, que vous allez avoir à traiter à
un stade plus évolué, avec des résultats
pas toujours satisfaisants. Alors, autant
les prendre au stade précoce de leur
maladie qui, parfois, ne nécessite que
la chirurgie, avec un taux plus élevé de
guérison.
Santé Mag: La communauté médicale
est–elle satisfaite du plan cancer ?
Pr M. Oukkal: Le plan cancer est une
très bonne chose et le seul souci reste
sa future application. Ce plan contient
des dispositions très intéressantes, tant
au plan de la prévention que du diagnostic, ou du traitement. S’il sera bien
appliqué, malades et médecins en tireront un grand bénéfice.
Les traitements, en chimiothérapie,
sont-ils disponibles ?
Actuellement, la majorité des traitements médicaux sont disponibles, dans
12
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
les CHU et les centres anti-cancer. Comparée, ne serait-ce qu’à l’année 2011, où
il y avait des pénuries catastrophiques
en molécules et pendant laquelle les patients en cherchaient, désespérément,
partout dans le pays et même à l’étranger, la situation s’est améliorée d’une
façon très importante et à l’exception
d’une pénurie de un ou deux médicaments, tout le reste est disponible.
Quels sont les chances de guérison,
lorsque le cancer est traité à un stade
précoce ?
Traiter les cancers au stade précoce et
dans ses formes localisées, le résultat
D’un point de vue général, à quel stade
le cancer est constaté, chez nous ?
Malheureusement, beaucoup de malades sont diagnostiqués à des stades
tardifs, qui reviennent très cher au budget et dont le pronostic vital est engagé.
Les malades ne consultent que lorsqu’ils
sont alarmés et étant donné que, dans
ces cas-là, les cancers sont symptomatiques, il est, déjà, trop tard. Il faut, donc,
renverser la vapeur. Ainsi, il faut diagnostiquer précocement, pour obtenir
un meilleur pourcentage de guérison et
à moindres frais. Comme dans le cas du
cancer du sein, une fois que la malade
palpe une boule au niveau de son sein,
ÉVÈNEMENT
son cancer a déjà évolué. Par contre,
si on faisait, systématiquement, le
dépistage avec mammographie, on
va diagnostiquer des cancers qui ne
sont pas palpables et à ce moment,
la guérison, avec le traitement, est
garantie.
C’est ce qui se passe dans d’autres
pays, comme en Europe, par
exemple, où la moyenne de la taille
tumorale, quand elle est découverte,
mesure seulement 1 cm de diamètre;
alors que chez nous, elle est de 4
cm, en moyenne, voire pire encore. Il
nous arrive de recevoir des tumeurs à
10 cm, au niveau du sein.
Par conséquent, le dépistage règle
beaucoup de problèmes. Aussi, je
pense que le plan cancer a bien
fait d’insister sur la prévention et
le dépistage. Ce sont les meilleurs
moyens, non pas pour éradiquer,
bien entendu, le cancer; mais, de
réduire, de façon importante, son
incidence et son impact négatif sur la
personne.
A quel moment de la maladie interviennent les soins de support ?
Les soins de support interviennent à
toutes les étapes de la maladie. Tout
au début, on pensait que seuls les malades au stade final de leur pathologie en avaient besoin; mais, il s’avère
que dès le diagnostic le malade, ainsi
que sa famille, ont besoin de soins de
support, avec un psychologue, dans
l’annonce du cancer, d’abord; ensuite,
il y a les traitements de la douleur.
Le traitement des symptômes de la
maladie et le traitement des effets
secondaires du traitement, lui-même,
font, également, l’objet de soins de
support. En fait, le but de ces soins
de support est d’améliorer la qualité
de vie du malade; car, dans ce cas-là,
il ne suffit pas de traiter seulement
la maladie, mais de préserver, également, la qualité de vie du patient et
ceci est très important.
Un message…
On espère, de tout cœur, que le plan
cancer soit appliqué et qu’il soit mis
en œuvre le plus tôt possible, pour
que les patients bénéficient, pleinement, de ses avancées
* Pr Mohamed Oukkal,
chef de service d’oncologie au CHU
Béni-Messous;
Pr Rabah Ferhat*, à Santé Mag:
"Sans une volonté politique, le plan
cancer ne pourra rien régler"
Propos recueillis par Tanina Ait
Santé Mag: Quels sont les problèmes liés
à la prise en charge des malades atteints
de cancer, dans la wilaya de Tizi-Ouzou ?
Pr. R. Ferhat: Les problèmes, rencontrés
à Tizi-Ouzou, ne sont pas différents des
autres régions du pays. Cependant, il y
a une particularité au niveau du CHU de
cette wilaya, où se trouvent un petit et
un grand service à qui on a donné un
rôle régional; c’est-à-dire, prendre en
charge un ensemble de 6 wilayate, avec
peu de personnel et uniquement 14 lits.
Enorme problème, donc.
Or, la bataille contre le cancer est une
course contre la montre, où le facteur
temps est un paramètre prépondérant.
Cette lutte se gagne en heures; voire,
en minutes, même. Prenons un exemple:
une femme qui se fait opérer d’un nodule
du sein et à qui on donne un rendezvous à 6 ou 8 semaines, pour la continuité des soins, cela ne sert à rien; car, la
tumeur aura le temps de métastaser. De
ce fait, je lance un appel aux autorités,
pour qu’elles revoient cette situation;
entre autres, les affectations des personnels. En effet, actuellement j’en suis à ma
5ème promotion de santé publique et
j’aimerais bien retenir quelques éléments
dans un souci d’assurer un meilleur
service.
Y a-t-il assez de médecins oncologues ?
La spécialité d’oncologie médicale est
une spécialité jeune. Elle date d’une
vingtaine d’années et jusqu’à présent, la
cancérologie est «noyée» dans les autres
pathologies; c’est-à-dire qu’elle n’est pas
enseignée comme une spécialité à part
entière. En effet, il n’y a pas, encore, de
module spécifique d’oncologie et c’est
pour cela que la Société algérienne
d’oncologie médicale demande d’introduire, dans la formation du médecin, ce
module; à l’instar de l’Orl, la pédiatrie, la
gynécologie… Pour donner plus de précisions à ce que nous préconisons, au
sein de la SAOM, citons un exemple: le
cancer du cavum est un cancer qui relève de l’Orl, mais les spécialistes en Orl
n’ont pas fait de module en cancérologie
et ne sont pas, par conséquent, au courant des dernières mises à jour. Ils font,
alors, des consultations, de la chirurgie;
mais, pas de la cancérologie.
Quelles sont les chances de succès du
plan cancer, dans notre pays ?
Le plan cancer, en lui-même, que cela
soit en France, aux Etats Unis ou ailleurs,
ne pourra rien régler si il n’y a pas une
volonté politique derrière et sans la mobilisation des professionnels de la santé.
On doit dire, en tant que médecins, que
nous devons œuvrer dans l’intérêt du
malade; d’autant plus que nos patients
ont la chance d’être pris en charge gratuitement. Cela est une spécificité algérienne.
Par exemple, nous disposons d’un traitement anti-cancer de dernière génération, depuis 2004, alors qu’en Tunisie
cela fait à peine 2 ans que ce pays a obtenu l’autorisation de le prescrire. Dernièrement, on a introduit une molécule
contre le cancer de la prostate de dernière génération, qui coûte 400.000 DA,
pour la cure d’un mois et cette dépense
est imputée sur le budget de l’hôpital.
C’est un grand effort.
Un mot pour conclure ?
Nous demeurons très optimistes et le
cancer, de nos jours, n’est plus un tabou,
ou «une maladie honteuse». Qui dit cancer, égal mort et les gens savent qu’il
existe, dorénavant, des perspectives
de guérison. Pour preuve, nous avons
réalisé, dernièrement, une campagne de
dépistage du cancer du sein et du col de
l’utérus aux Ouadhias, en Kabylie et en
deux jours, nous avons reçu plus de 400
femmes, venues se faire dépister
* Pr Rabah Ferhat,
chef de service d’oncologie médicale
au CHU de Tizi-Ouzou
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
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ÉVÈNEMENT
Pr Djamel Djennaoui*, à Santé Mag,
"Une plus grande connaissance
du cancer du nasopharynx va permettre
une meilleure connaissance des cancers,
en général"
Propos recueillis par Tanina Ait
l’alcool, comme dans les autres cancers.
Et enfin, troisièmement, ce qui fait,
encore, la particularité de ce cancer est
qu’il peut avoir une origine virale. Ceci
n’a pas, encore, été bien prouvé mais
nous avons des arguments très forts
pour une cause liée à un virus appelé
virus Epstein-Barr; mais, on ne connait
pas comment se produit le phénomène
pathologique. C’est-à-dire: est-ce que
c’est ce virus qui cause le cancer du nasopharynx, ou est-ce que ce virus s’associe à d’autres facteurs? Nous ignorons, effectivement, les causes exactes
de ce mécanisme.
Néanmoins, ce qui est certain est que ce
virus provoque des maladies bénignes,
dans certaines régions et dans les pays
d’Afrique du Nord, il donne des cancers.
Le cancer du nasopharynx, également
appelé cavum, touche la partie supérieure des voies respiratoires, située
juste après les cavités nasales. Cette
pathologie, peu fréquente chez les
Européens, est, en revanche, répandue
en Afrique du Nord. Les causes, exactes,
de cette répartition géographique
demeurent inconnues. La recherche
scientifique est orientée sur ce problème,
afin d’élucider les causes exactes de ce
cancer, dont le diagnostic est, malheureusement, souvent tardif. Le Professeur
Djamel Djenaoui nous en dit plus.
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Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
Santé Mag: Le cancer du nasopharynx
est-il répandu, dans notre pays?
Pr D. Djennaoui: Le cancer du nasopharynx, ou du cavum, a une particularité,
de par sa répartition géographique. Il
n’existe pas partout dans le mondeet
en Europe, en Amérique, en Afrique du
sud, on le voit rarement. En revanche,
il est répandu en Afrique du Nord, en
Egypte et dans la Corne de l’Afrique. Sa
présence est constatée, également, en
Chine; ainsi que dans les pays de l’Asie
du Sud Est, ceci d’une part; d’autre part,
dans ce type de cancer, il n y a pas de
relation, évidente, entre cette pathologie et les effets, dus au tabac ou à
Y a-t-il, éventuellement, un terrain génétiqueà cette pathologie?
Tout un mystère entoure cette maladie.
Il se peut qu’un problème génétique en
soit la cause. En effet, en Algérie, dans
une même fratrie, des cas de ce cancer
sont constatés, assez régulièrement.
Ainsi, le facteur génétique n’est pas à
exclure.
Peut-être, aussi, existe-t-il un problème
environnemental; c’est-à-dire, le cadre
de vie de la personne, son alimentation…. Pourquoi, par exemple, ce cancer est présent en Afrique du Nord et
en Asie, où les traditions culinaires sont,
quelque peu, particulières? On soupçonne, au demeurant, peut-être à tort,
la conservation des viandes, ou des
légumes, par le sel; mais, toujours est-il
que ces interrogations ne sont pas suivies de preuves. En revanche, l’énigme
reste entière; car, lorsque des indivi-
ÉVÈNEMENT
dus de ces pays émigrent en Europe ou
en Amérique, leurs descendances font
moins de cancer du cavum, après deux
ou trois générations. Par conséquent, le
mystère de ce cancer demeure, encore,
entier et suscite la curiosité des chercheurs.
Qu’en est –il de ce cancer, en Algérie?
En Algérie, nous avons, justement, un
programme de recherche, en collaboration avec une équipe française, très
avancée dans ce domaine et qui a, déjà,
publié- en l’occurrence - des publications
internationales.
C’est sûr que c’est un cancer passionnant, de par son intérêt scientifique; car,
ceci nous permettra, en fin de compte,
de comprendre le cancer dans sa globalité, car l’ensemble de ses causes sont
réunies: la génétique, l’environnement,
l’alimentation, les virus. Aussi, je reste
convaincu qu’une plus grande connaissance du cancer du cavum va autoriser
une meilleure connaissance des cancers, en général. En tout état de cause,
il est clair que le jour où on comprendra
d’où vient le cancer, on pourrait le guérir
d’une manière plus efficace.
Quelle est la prévalence de ce cancer,
dans notre pays?
Difficile de donner une prévalence, en
Algérie; car, le plus souvent, le diagnostic
n’est pas fait à temps; mais, on l’estime,
tout de même, à peu près, entre 2000
et 2500 nouveaux cas par anet ceci est
d’autant plus dramatique qu’il touche,
régulièrement, les enfants et adolescents, entre 10 et 20 ans. En outre, ce qui
nous préoccupe, c’est qu’un cancer traité
hypothèque l’avenir de ces jeunes, par
des incidences, fâcheuses, sur leur croissance, des troubles du squelette facial en subissant des rayons sur le visage -,
des problèmes dentaires…
C’est, vraiment, un traitement très lourd,
avec des effets secondaires importants.
Peut-on diagnostiquer ce cancer précocement?
Concernant le diagnostic précoce, nous
sommes, effectivement, en partenariat
avec un organisme européen, qui s’intéresse, justement, au dépistage du cancer
du cavum. En Europe, il est appelé: «le
dépistage des cancers de la tête et du
cou», parce que, dans ces pays, également, le diagnostic n’est pas fait assez
tôt. Aussi, pour pallier à cela, ils ont mis
en place un Programme européen de dépistage, auquel seront associés des chercheurs nord-africains. Nous avons été
particulièrement intéressés par cette initiative, car c’est, peut-être, une occasion,
pour nous, de sensibiliser trois types de
populations, dans ce cadre:
Il s’agit, d’abord, d’intéresser, évidemment, les médecins: généralistes, pédiatres, neurologues, psychiatres, ophtalmologues… Ces médecins sont, plus
ou moins, impliqués dans ces cancers de
la tête et du cou, par des conférences de
vulgarisations de ces affections. Ainsi,
lorsqu’on parle à un médecin généraliste
du cancer du cavum, par exemple, il en
a, déjà, entendu parler; mais, sans savoir,
toujours, ce qu’il en ressort. Il est, donc,
important de faire des conférences de
recyclage, de remise à niveau de toutes
les disciplines de la médecine.
La deuxième catégorie de population
qu’on voudrait cibler, ce sont tous les
paramédicaux, car ils jouent un rôle très
important; en l’occurrence, de par leur
présence, quasi-continue, auprès des
malades. Par conséquent, il importe que
l’infirmier sache que le mal de tête persistant et répétitif peut être un signe qui
doit emmener le malade à consulter.
Enfin, la troisième catégorie, qu’on aimerait associer à ce programme, c’est le
public et les médias, parce que les médias sont très importants, pour donner
l’information. Il ne faut pas, cependant,
créer une psychose et se dire que dès
qu’on a mal à la tête, c’est un cancer du
cavum. Aussi, faudra-t-il trouver un système de communication pertinent, pour
attirer l’attention de la population, sans
l’inquiéter. Des affiches et des spots, par
exemple, seront réalisés avec nos collègues français, qui ont beaucoup plus
d’expériences et on pourrait, alors, cibler
les salles d’attentes des médecins, les
Apc, les daïrate, les wilayate, les pharmacies, les écoles…
En tout état de cause, nous avons prévu
une réunion avec le président de l’Association française du cancer du cavum,
pour mettre en place ce programme et
nous avons besoin du soutien de tout
le monde; notamment, du ministère de
la Santé et de la presse, pour aller de
l’avant, parce que nous, les médecins,
ce qui nous intéresse est de faire le diagnostic précoce, pour guérir les malades,
avec des traitements moins lourds et
moins chers
* Pr Djamel Djennaoui,
chef de service ORL, du CHU Mustapha
Bacha. Président de la Société algérienne
d’ORL et président de la Commission
nationale des implants cochléaires.
Cancer du cavum
ou le cancer du
nasopharynx
Carcinome du nasopharynx
Le carcinome du nasopharynx est un
cancer se développant à partir des cellules épithéliales du nasopharynx. Il fait
partie des cancers des voies aérodigestives supérieures. Il s'agit du cancer
épithélial le plus fréquent chez l'adulte,
mais il commence dès l'enfance
puisqu'au Royaume-Uni l'incidence annuelle varie de 0,3,entre 0 et 14 ans, à
2 cas pour un million d'habitants entre
15 et 19 ans. Certaines populations ont
une incidence plus élevée, comme en
Chine et en Tunisie. Ce cancer est responsable d'un tiers des cancers du rhinopharynx. La première description de
ce cancer date de 1921.
Cette tumeur peut rester localisée ou
s'étendre vers la base du crâne, l'oropharynx, la cavité buccale et le palais.
Les métastases sont typiquement des
métastases ganglionnaires cervicales.
Ces métastases sont, souvent, le mode
de diagnostic de ce cancer; La biopsie donnant le diagnostic. Les autres
signes comprennent douleur, trismus,
otite, régurgitation nasale par parésie
nerveuse, perte de l'audition et paralysie de nerfs crâniens.
Plusieurs causes sont identifiées:
l'infection à virus d'Epstein-Barr, des
facteurs génétiques et des facteurs
environnementaux comme les nitrosamines.
Le traitement repose sur la radiothérapie, la chimiothérapie et l'utilisation
d'interféron.
Diagnostic
La biopsie fait le diagnostic. Une évaluation de l'extension est indispensable
permettant une prise en charge optimale.
Traitement
En raison de sa localisation, la chirurgie
ne fait pas partie des moyens de traitement de ce cancer.
La chimiothérapie est, actuellement,
considérée comme le meilleur traitement; notamment le Mertens protocol
NPC-91-GPOH (Society of Pediatric
Oncology and Hematology) qui comprend un traitement par interféron
après, la chimiothérapie et la radiothérapie.
La radiothérapie permet un contrôle
local de la maladie mais ne prévient
pas le risque de métastase
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
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DOSSIER
Pr Abdelkrim Zerhouni*, à Santé Mag,
"Le prélèvement d’organe
ne peut se faire qu’après accord
explicite du donneur, de son vivant,
en vérifiant le registre de refus"
Propos recueillis par Tanina Ait
Santé Mag: Comment peut-on évaluer
les différents stades d’un coma ?
Pr A. Zerhouni: Les différents stades du
coma sont évalués à travers l’échelle de
Glasgow, qui est cotée de 1à 15 points.
Trois critères sont testés et notés: la
réponse verbale, la réponse motrice et
l'ouverture des yeux. Chaque critère est
noté de 1 à 5.
Réponse verbale: orientée (5 points),
confuse (4 points), inappropriée (3
points), incompréhensible (2 points),
absente (1 point).
Ouverture des yeux: spontanée (4
points), au bruit (3 points), à la douleur
(2 points), absente (1 point).
Réponse motrice: obéit (6 points),
adaptée (5 points), orientée (4 points),
flexion réflexe (3 points), extension réflexe (2 points), absente (1 point).
Le total des trois notes obtenues (réponse verbale + réponse motrice + ouverture des yeux) donne une note finale.
Un score de 15 correspond à une
conscience normale.
Score de Glasgow de 3 à 8: traumatisme crânien grave concerne l’état
de mort encéphalique;
Score de Glasgow de 9 à 12: traumatisme crânien modéré;
Score de Glasgow de 13 à 15: traumatisme crânien bénin.
A quel moment le diagnostic de La mort
encéphalique est-t-il établi ?
Le diagnostic de la mort encéphalique
est:
Clinique: 3 critères cliniques nécessaires:
Absence totale de conscience et d’activité motrice spontanée;
Abolition de tous réflexes du tronc
cérébral;
Absence totale de ventilation spontanée.
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Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
Para-clinique:
2 EEG (électroencéphalogramme, qui
explore l’activité électrique corticale)
nuls et a-réactifs, à 4 h d’intervalle;
L’angiographie, ou angio-scanner, qui
montre l’arrêt de la circulation encéphalique
Le cœur de la personne en état de mort
cérébrale bat-il, encore et pendant combien de temps ?
Au cours d’un état de mort encéphalique, le maintien de la vascularisation
des organes est assurée, artificiellement, par le biais d’une respiration
assistée par un ventilateur et le cœur
par des médicaments, qui ont pour but
de maintenir une bonne perfusion des
organes, susceptibles d’être prélevés,
pour les empêcher de se détériorer.
Lorsque l’organe est prélevé sur cette
personne, est-elle, encore, branchée sur
des machines ?
Au moment du prélèvement, le donneur est stabilisé par la ventilation artificielle et par des médicaments à visée
cardiaque, pour ne pas perturber l’état
fonctionnel des organes.
La famille est toujours réticente, lorsqu’il
s’agit d’autoriser le prélèvement. Cela
relève-t-il de la culture et comment,
alors, briser ce tabou?
Effectivement, le prélèvement d’organe
ne peut se faire qu’après accord explicite
du donneur, de son vivant, en vérifiant le
registre de refus. Dans le cas contraire,
on s’oriente vers l’accord présumé des
parents, qui est difficile à obtenir, du fait
de la sacralisation du corps, liée plus à
une culture de société que des considérations religieuses. Cette désacralisation
passe par l’abord psychologique de la
famille, pour une préparation graduelle
au deuil, l’explication méthodique et
documentée, par le médecin coordinateur, de l’état clinique, irréversible, du
patient en état de mort encéphalique. Il
est vrai que, dans le contexte actuel de
notre société, l’intervention d’un imam
peut atténuer l’intensité de la douleur et
augmenter le capital-confiance
* Professeur Abdelkrim Zerhouni,
chef du service réanimation, hôpital
Maouche-Mohand Amokrane
(ex-CNMS), Clairval – Alger.
DOSSIER
Pr Farid Haddoum, à Santé Mag:
"Le “tout hémodialyse”
est en totale contradiction avec
les recommandations internationales"
Propos recueillis par Rania Hamdi
Fervent défenseur du droit des insuffisants rénaux à bénéficier de la meilleure
prise en charge thérapeutique, le Professeur Haddoum s’insurge contre la
politique sanitaire, qui met au, cœur de la
problématique, l’hémodialyse en centre et
néglige la greffe rénale. Il dresse un état
des lieux, sans complaisance.
Santé Mag: Quelle est la situation des
insuffisants rénaux, en Algérie ?
Pr Haddoum: La majorité des insuffisants
rénaux chroniques, qui sont parvenus
au stade terminal, est prise en charge
dans les centres publics, ou privés, pour
hémodialyse. Ils sont près de 90% à être
traités par la méthode d'hémodialyse en
centre. Une minorité est traitée par la
dialyse péritonéale, ou par la transplantation rénale. Tous les nouveaux patients,
qui nécessitent un traitement par dialyse -transplantation sont pris en charge
en Algérie, quel que soit leur âge, leurs
conditions socioéconomiques, sur tout le
territoire national.
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Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
On estime leur nombre à 1000 nouveaux
cas, par an, en Algérie. Ils viennent
s'ajouter aux 20.000 patients, déjà,
traités. Ainsi, le nombre de patients ne
cesse d'augmenter, en Algérie, d'année
en année. Le poids économique de la
dialyse ne cesse, également, de croître.
Ce qui nous interpelle tous et en premier lieu, les spécialistes en néphrologie. Pour le moment, les efforts financiers et médicaux sont tous dédiés - et
uniquement dédiés - au développement
des centres pour hémodialyse et ce, sur
tout le territoire national...
Pour l'instant, très peu d'efforts financiers sont consentis, pour un programme de dépistage et de prévention
des maladies rénales chroniques. C'est le cas, également, pour la dialyse
péritonéale et la transplantation rénale
qui ont, quasiment, disparu de l'offre de
soins pour les insuffisants rénaux algériens. Pourtant, ce sont les meilleures
méthodes, les moins coûteuses et les
plus utilisées, dans les pays riches et
tous les pays, dits occidentaux ! ...
Justement, puisque 90% de ces malades
sont en hémodialyse. D'après votre appréciation, est-ce que la prise en charge
est correcte? Le cas échéant, quelles sont
les failles ?
Le «tout hémodialyse» pratiqué dans
notre pays est en totale contradiction
avec les recommandations internationales des sociétés savantes de néphrologie, des agences de santé et des bonnes
pratiques en médecine. La transplantation rénale doit être la méthode la plus
utilisée, chez les patients insuffisants rénaux (50% d'entre-eux doivent en bénéficier). L'hémodialyse et la dialyse péritonéale vont prendre en charge les autres
50%, de façon harmonieuse. Cette dernière, la dialyse péritonéale est, très souvent, la seule méthode de dialyse, utilisée
dans de nombreux pays, aux côtés de la
transplantation. Dans de très nombreux
pays riches de l'Occident, l'hémodialyse
prend en charge moins de 10 % des patients, loin derrière la transplantation et
la dialyse péritonéale.
La transplantation rénale et la dialyse
péritonéale sont les méthodes les moins
coûteuses et elles sont pratiquées dans
les hôpitaux publics par de très rares
(trop rares !) équipes engagées ! Elles
ne disposent pas, toujours, des moyens
humains et financiers appropriés et indispensables à leur croissance. Tout le
contraire de l'hémodialyse, qui continue
à bénéficier d'importants soutiens financiers et humains; ce qui explique son
inflation galopante, en Algérie. L'hémodialyse coûte trois fois plus cher que la
dialyse péritonéale et cinq fois plus cher
que la transplantation rénale.
Vous avez affirmé, dans une récente
conférence publique, que l'Algérie ne
compte que 3 donneurs pour un million
d'habitants. Quelles en sont les causes ?
DOSSIER
La Transplantation rénale est une activité humaine. C'est une création médicale révolutionnaire de la deuxième moitié du XXème Siècle.
Ainsi, soigner l'Homme par l'Homme, remplacer
un tissu, un organe, une partie du corps grâce à un
DON, gratuit, de son prochain est l'une des plus
belles «aventures médicales» de tous les temps ! ...
Une «success story» dans tous les pays avancés et
malheureusement pas en Algérie, du moins pour le
moment !
L'activité de transplantation a «créé», en un demisiècle, deux citoyens «modernes»: le receveur de
greffe et le donneur d'organes et de tissus. Le receveur est un patient, qui souffre et qui espère une
guérison, ou le meilleur traitement possible. Pour
l'insuffisant rénal, le meilleur traitement demeure la
greffe rénale. Le donneur est un citoyen exceptionnel, qui fait DON de son vivant, ou à son décès, d'une
partie de son corps à son prochain, pour alléger
ses souffrances. C'est la plus belle preuve de notre
Humanité. Avec le succès des transplantations, une
culture du don d'organes est née, dans les très nombreux pays qui ont développé l'activité de transplantation. Le nombre de donneurs d'organes, par million d'habitants, en Europe et aux USA, est entre 35
et 60 donneurs. En Tunisie, il est de 12 donneurs par
million d’habitants; en Egypte, de 30 Donneurs par
million d’habitants. En Algérie, avec seulement 100 à
120 Transplantations rénales par année, le nombre
de donneurs est d'environ 3 donneurs par million
d’habitants (tous des donneurs vivants !). C'est un
des plus faibles pour les pays arabes, pour les pays
musulmans et en méditerranée! Les raisons sont
multiples; parmi-elles, les plus importantes, sont
de natures politiques, légales et financières. Nous
souhaitons un plus fort engagement politique, des
Lois pour encadrer et rendre obligatoire l'activité de
transplantation et enfin, un soutien financier conséquent et à la hauteur des besoins !
Quelle est votre propre vision, pour inverser la tendance, en faveur de la greffe d'organe ?
En 2013, en Algérie, notre pays a consenti, en dépenses de Santé, pour plus de 300 millions d'€, pour
la seule activité d'hémodialyse, 2 millions d'€, pour
la dialyse péritonéale et 500.000 €, seulement,
pour la transplantation rénale !
La LOI sanitaire algérienne date de 1985; soit, il y a
près de 30 ans. Elle a été salutaire, pour les transplantations rénales, qui ont débuté en 1986, en
Algérie. Elle doit être, maintenant, renouvelée et
s'adapter aux nouvelles exigences de notre temps
et de notre médecine. Nous espérons et attendons beaucoup de la nouvelle Loi sanitaire et nous appelons, de tous nos
vœux, à une réorientation harmonieuse des dépenses de Santé. Nous souhaitons un engagement politique et administratif plus marqué, en faveur des activités de
transplantation
* Pr Farid Haddoum,
chef de service néphrologie au CHU Néfissa Hamoud
(ex-Parnet) – Alger.
Pr Tahar Rayane*,
à Santé Mag:
"Il y a, donc, beaucoup
de facteurs de risques
sur lesquels agir, pour
diminuer le nombre
des maladies rénales"
Propos recueillis par Tanina Ait
Santé Mag: Vous êtes directeur
de l’Institut national du rein et
de la greffe d’organes. En quoi
consistent, exactement, les activités de votre institut?
Pr T. Rayane: Notre Institut à
trois missions importantes, à
savoir: une mission de formation,
une mission de soins de haut niveauet enfin, la troisième mission
est de développer la recherche
médicale, dans le domaine des
maladies rénales et des voies urinaires.
Ce dernier point très important;
car, nous sommes en train de
réfléchir, aussi, pour inclure des
programmes de prévention sanitaire. Pourquoi développer la
prévention? Parce qu’on considère que 10 à 30% des pathologies rénales peuvent être évitées,
si un programme national de prévention est appliqué, ou institué,
dans un pays.
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
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DOSSIER
Quelle est l’incidence et la prévalence
des insuffisances rénales, en Algérie?
Nous avons, en effet, certains
chiffres pour l’incidence, qui est
d’environ 95 à 108 nouveaux cas,
par million d’habitants; ce qui
correspond, à peu près, à 4000 nouveaux cas, chaque année et la prévalence, actuelle, des insuffisances rénales
chroniques au stade terminal, traitées,
est de 4060 malades, par un million
d’habitants.
Vous avez mentionné que 10 à 30 % de
ces insuffisances rénales sont évitables.
Lesquelles?
Toutes les insuffisances rénales, liées à
l’automédication;car, il est constaté que
les Algériens consomment beaucoup
de médicaments, sans se référer à leur
médecin traitant et cela peut entraîner des toxicités médicamenteuses.
La toxicité des produits de radiologie
de contraste lorsque, par exemple, on
veut faire une coronographie, ou une
urographie intraveineuse, est avérée. En
effet, ces produits sont très dangereux,
pour le rein et peuvent provoquer une
insuffisance rénale chronique terminale.
Or, ces traitements, justement, peuvent
être évités. On note, aussi, certaines
situations pathologiques, qui entraînent
une insuffisance rénale aigue, comme
les lithiases et comme nous le savons,
environ, 10% des algériens font des lithiases; 20 à 30% d’entre eux peuvent
faire une IRCT et donc, on peut agir,
en essayant de développer la lithotripsie, dans tout le territoire national. En
outre, notre alimentation en est responsable, aussi. Dans les colorants qu’on
consomme, il y a l’ochratoxine A, qui est
toxique pour le rein.
Par ailleurs, 10% des femmes enceintes
font, parfois, une hypertension artérielle gravidique, ou toxémie gravidique, qui se complique par une insuffisance rénale et dans ce cas, il y a un
rôle, très important, de prévention, pour
bien suivre ces grossesses. En plus,
il y a toutes les infections, comme les
angines mal soignées, chez les enfants
et qui peuvent donner des glomérulonéphrites, qui entraînent des insuffisances rénales.
Les risques professionnels, comme chez
les dentistes et les prothésistes, qui ne
se protègent pas, font des maladies
rénales secondaires au cilice.
Enfin, bien sûr, il ne faut pas oublier les
polluants, surtout les hydrocarbures.
Il y a, donc, beaucoup de facteurs de
risques, sur lesquels agir et notamment,
20
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
comme je le disais, pour diminuer ce
nombre en faisant de la prévention, au
lieu d’avoir 4000 nouveaux cas, par
an, on en aurait 3000 et 1000 seraient,
donc, évités.
Comment établir un vrai programme de
prévention?
Un vrai programme de prévention doit
s’appuyer sur un réseau. Ainsi, concernant l’insuffisance rénale chronique,
plus on la diagnostique tôt, plus on
n’arrive à la guérir; parfois, à la ralentir
médicalement. Il y a, donc, tout un programme thérapeutique qui doit se faire,
afin de transmettre tous ces messages,
à la population, afin qu’elle fasse attention, en surveillant son alimentation et
pour qu’elle évite l’automédication. A
ce propos, je dirais qu’il y a eu une épidémie de néphropathie, due aux analgésiques, en Suisse.
En effet, il y a une vingtaine d’années,
lorsque les horlogers de ce pays réparaient les montres, ils avaient mal à la
tête et prenaient beaucoup de paracétamol, pour calmer leurs douleurs, on
a remarqué, alors, qu’ils faisaient des
insuffisances rénales. Cependant après
des campagnes de sensibilisation très
importantes, les néphropathies, dues à
ces analgésiques, ont presque disparu.
Il y a, aussi, la néphropathie des Balkans
et lorsqu’ une enquête fut menée, il a
été établi qu’une toxine alimentaire, appelée l’Ochratoxine A, était responsable
de cette maladie. Cette toxine se trouve
dans le blé, les cacahuètes. Ici, également, toujours grâce à une campagne
de sensibilisation, la maladie a, presque,
disparu.
II reste certaines insuffisances rénales
chroniques, comme celles dues à des
plantes, en provenance de Chine, à
l’origine d’une épidémie, qui a eu lieu
à Bruxelles, où des femmes, pour maigrir, consommèrent ces herbes et ont
fait, alors des insuffisances rénales
secondaires. Heureusement, grâce à
l’intervention des pouvoirs publics et
des médias, l’importation de ces herbes
a été stoppée et la maladie a disparu,
en conséquence. En Algérie, ce type de
plante est, encore, importée sans aucun
contrôle et les gens les achètent dans
les souks et les marchés et donc, il y a
un travail à faire, aussi, dans ce sens.
Quelle est la prévalence de personnes
souffrant d’une insuffisance rénale,
dans notre pays?
Dans notre pays, nous avons 18.000 patients dialysés, 4. 000 nouveaux cas par
année, 8.000 patients en attentes d’une
greffe et parmi ces 8000, seuls 20% ont
un donneur potentiel familial, car la loi
algérienne, pour l’heure, exige que le
donneur soit un donneur apparenté du
premier degré.
Dans un premier temps, on voudrait
élargir le cercle des donneurs; c’est-àdire, modifier la loi 85-05 afin que le
conjoint, le cousin, les neveux, la bellefamille, la demi-sœur ou demi-frère,
puissent donner leurs organes.
Concernant les patients qui n’ont pas
de donneur potentiel, dans la famille
proche ou lointaine, la solution serait
d’attendre un organe prélevé sur une
personne en mort encéphalique. Le
gros problème, en Algérie, est que 90%
des familles, qui ont un proche en état
de mort encéphalique, refusent le prélèvement. Il y a donc un long travail de
sensibilisation à faire, pour que cette
pratique - autorisée par la Loi et la religion - soit exercée.
Il y a lieu, donc, de prévoir la distribution de la carte de donneur; d’établir un
registre national des personnes voulant
être prélevées et le registre de celles qui
ne le veulent pas. En quelque sorte, il
faut que la société s’exprime.
En tout état de cause, l’Institut du rein
a été créé pour favoriser la transplantation d’organe et les structures, pour ce
faire, existent; car, il faut remarquer que
le bilan des greffes, à partir d’organes
prélevé sur des personnes en état mort
encéphalique, reste très maigre
* Professeur Tahar Rayane,
directeur de l’Institut national du rein
et de la greffe d’organes.
DOSSIER
Pr Antar Degaichia*, à Santé Mag:
Insuffisance rénale:
"Sur le plan préventif, beaucoup reste à faire"
Interview réalisée par Chahra Ramzy
Santé Mag: L’insuffisance rénale est, souvent, diagnostiquée tard. Pourquoi ?
Pr A. Degaichia: Il est vrai que, dans
la majorité, pour ne pas dire dans la
quasi-totalité des cas, le diagnostic de
l’insuffisance rénale chronique est porté de façon tardive. Généralement, au
stade ultime; c’est-à-dire, terminal ou la
suppléance itérative est l’unique issue
thérapeutique; à savoir: l’hémodialyse,
la dialyse péritonéale (dialyse par les
poches) et la transplantation.
Ce retard, dans l’apport du diagnostic,
est, essentiellement, du à deux raisons:
premièrement, l’insuffisance rénale
chronique est une maladie silencieuse.
Elle évolue à bas bruit, avec l’absence
de symptômes cliniques, spécifiques
à l’organe. Majoritairement, les signes
cliniques d’appel de la maladie sont
extra-rénaux, tels que l’anémie, l’essoufflement (dyspnée), ou encore, des
chevilles enflées (œdèmes). Deuxièmement, à ces difficultés de diagnostic,
22
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
s’ajoute une autre; le rein malade, très
malade ne manifeste aucune souffrance,
aucune douleur, qui permet, au médecin, de mettre le doigt, directement, sur
le rein. Les deux principales maladies,
responsables de l’insuffisance rénale
chronique; à savoir, le diabète, dans plus
de 30% et l’HTA, dans plus de 25% de
cas, évoluent, également, silencieusement. Par voie de conséquence, le diagnostic est un diagnostic de laboratoire,
ou deux paramètres suffisent à étayer,
ou infirmer, la maladie. En l’occurrence,
la créatine dans le sang et sa clearance,
qui permettent d’évaluer le pouvoir
d’épuration des déchets azotés, par le
rein et la recherche d’albumine dans les
urines.
A combien estimez-vous le nombre d’algériens présentant un risque d’atteinte
rénale ?
Difficile de répondre, de façon précise, mais je vais tenter d’apporter des
éclaircissements, à partir de données
déjà connues et publiées. D’abord, chez
l’adulte: comme je l’ai, déjà, mentionné
plus haut, les sujets diabétiques et les
personnes hypertendues représentent, à
eux seuls, plus de 65% des patients, qui
arrivent en insuffisance rénale terminale
et traités par dialyse. Il faut mentionner,
au passage, qu’il existe plus de 10% de
diabétiques, par million d’habitants,
dans notre pays; soit, plus de 3,5 millions
et 35% d’hypertendus, par million d’habitants; soit, 12 millions d’hypertendus,
environ. L’obésité, présente, également,
un risque rénal. 17,5% de la population
est obèse. A cela s’ajoutent les calculs
rénaux récidivant, qui peuvent présenter une menace, pour la fonction rénale;
d’où, la recherche de la cause, qui doit
être un souci permanent.
Chez l’enfant, le risque rénal est dominé
par les uropathies malformatives congénitales, les glomérulopathies et secondairement, les maladies génétiques, qui
sont rares.
Comment évaluez-vous la prise en charge
de l’insuffisance rénale chronique?
Nous pouvons étudier ces questions
sous deux aspects: curatif et préventif.
Sur le plan curatif, la situation est meilleure que sur le plan préventif. Nous devons, quand-même, signaler, ou plutôt,
rappeler – car, nous le savons tous - la
prédominance du traitement par l’hémodialyse itérative, au prorata de la marginalisation de la dialyse péritonéale et la
transplantation.
Quant à la prévention de la maladie rénale chronique, malheureusement, nous
ne pouvons que constater l’absence de
programme, ou de stratégie, afin de
mettre à l’abri la population à risques,
ou du moins, l’éloigner, le plus tard possible, d’un traitement de suppléance, ou
de substitution. Cette stratégie ne peut
se faire que grâce à la création d’un registre, qu’on appelle ‘’registre-rein’’. Ce
DOSSIER
registre doit être créé, grâce à la collaboration, étroite, des néphrologues,
des épidémiologistes, des statisticiens
et bien-sûr, les ministères concernés
(santé, travail). Ce registre donnera
la photographie de la prévalence de
l’insuffisance rénale, à un stade donné. A partir de là, le politique, avec la
collaboration des acteurs concernés,
adoptera une stratégie et donc, un
programme de prévention nationale
de la maladie rénale.
En raison d’une pénurie d’organes, l’accès à la transplantation rénale reste le
grand combat des insuffisants rénaux.
Que faut-il faire, pour sortir du cercle
du «tout dialyse» ?
Chacun, à son niveau et selon sa
conviction, doit faire pour le mieux,
dans l’environnement qui est le sien.
Un environnement, pas trop facile, qui
n’est pas incitatif à la transplantation
rénale. Ceci dit, de plus en plus, la famille néphrologique prend conscience
de la gravité de la situation et réagit progressivement. Nous sommes
conscients des challenges et des défis
que nous devons affronter. Le politique, sensible à cette situation, avec
l’Institut du rein de Blida, qui ouvrira
ses portes en avril 2014, a promis la
transplantation de 500 cas par an.
Comment développer, justement, l’activité de la greffe rénale, dans notre
pays ?
C’est une importante et intéressante
question, à laquelle je vais répondre,
en quatre points:
1. La religion est claire, unanime et plus
que favorable à la transplantation; que
ce soit donneur vivant, ou donneur en
mort encéphalique.
2. L’Etat doit s’impliquer plus, par
des textes ou des lois, pour élargir le
cercle des donneurs vivants.
3. Les néphrologues doivent se mobiliser plus, pour mettre fin à la souffrance des personnes dialysées; surtout, les jeunes de moins de 50 ans,
pour les libérer de cette contrainte,
qui n’est pas, forcément, obligatoire;
lorsque, au bout du tunnel, il y a la
transplantation.
4. L’Etat, pour encourager et faire
réussir la transplantation rénale, doit,
impérativement, régulariser et équilibrer la dotation financière
* Pr Antar Degaichia,
néphrologue - CHU d’Annaba.
Prise en charge
de la maladie rénale, en Algérie :
Les spécialistes regrettent
le sous-développement
de la greffe rénale
Par Rania Hamdi
En 2013, la maladie rénale continue à inquiéter les professionnels de la Santé et
les patients. La médecine propose une thérapie adaptée à chaque cas posé par la
pathologie. Il n’en demeure pas moins qu’en Algérie, les autorités sanitaires misent,
encore, quasi-exclusivement sur l’hémodialyse, pourtant coûteuse (300 millions
d’euros dépensés, annuellement) et contraignante.
«La greffe rénale est devenue un besoin de
santé publique (…). On doit, absolument,
trouver une stratégie, pour réduire l’hémodialyse au profit de la transplantation», a
alerté le Professeur Zerhouni, chef de service réanimation à l’EHS Dr. Maouche (ex
CNMS), lors d’une rencontre publique sur la
maladie rénale.
Les statistiques livrées, sur le propos, sont,
en effet, édifiants. En 2002, l’Algérie comptait 4453 insuffisants rénaux. En 2010, le
nombre a grimpé à 13 400 malades. Il a atteint, en 2013, plus de 19 400 patients, dont
18 000 sont en hémodialyse, 400 en dialyse
péritonéale et 1000 greffés, suivis dans les
services de néphrologie. Selon les données
déclinées par les spécialistes nationaux, le
coût de la prise en charge d’un malade hémodialysé est estimé, aujourd’hui, à 19 000
euros par an, tandis que la dialyse péritonéale revient à 6 500 euros par an et par
malade et la greffe rénale à 4 500 euros par
an et par malade. L’Algérie a dépensé, en
l’occurrence, pour l’exercice 2013, quelques
300 millions d’euros pour l’hémodialyse,
deux (2) millions d’euros pour la dialyse
péritonéale et uniquement, 500 000 euros
pour la greffe rénale. Les chiffres sont tellement éloquents qu’il n’y a pas lieu de faire
le moindre commentaire.
«L’Algérie n’a pas choisi le meilleur mode
de prise en charge» a asséné le Professeur
Farid Haddoum, chef du service néphrologie au CHU Nafissa Hamoud (ex Parnet
d’Hussein Dey), qui défend, mordicus,
comme ses confrères d’ailleurs, l’option
de la transplantation rénale. «Le nombre
d’insuffisants rénaux, en attente de greffe,
ne cesse d’augmenter. Il y a des choix politiques à faire» a-t-il poursuivi. De l’avis de
beaucoup de praticiens, qui interviennent
dans la transplantation d’organe, il est impératif de sensibiliser davantage sur le don
d’organe, limité, dans la législation natio-
nale, aux personnes liées par une parenté
de premier degré (père, mère, enfants,
frères et sœurs, grands-parents). Là aussi,
les chiffres sont parlants. L’Algérie stagne
à trois donneurs par un million d’habitants,
alors que, pour la même proportion, l’Arabie saoudite est à 30 donneurs, la Syrie à 18
et l’Egypte à 12.
Le Professeur Zerhouni a fait un plaidoyer
pour la greffe rénale, en rappelant qu’avec
peu de moyens, le CNMS réalise la moitié
des performances du pays, dans le domaine. «Nous avons commencé en 2007,
avec deux blocs opératoires, une salle stérile et une équipe de praticiens. On a réussi
à pratiquer près de 400 greffes. En 2013,
nous avons fait un chiffre confortable de 68
transplantations», a-t-il rapporté, avant de
poursuivre: «la greffe rénale a 70 ans d’âge.
Nous n’avons rien à inventer. Il suffit d’appliquer les connaissances acquises».
La première transplantation rénale a été
réalisée, en 1986, au CHU Mustapha et la
seconde, une année après, au C.H.U. Benbadis de Constantine. A l’époque, l’Algérie
était, presque, au même niveau que les
pays occidentaux, qui ont démarré l’activité à peine une décennie auparavant. Il n’en
demeure pas moins que la pratique, qui
était appelée à prendre son envol rapidement, a stagné, jusqu’à amorcer une reculade importante. Les freins se sont accumulés, au fur-et-à-mesure que les autorités
compétentes se désintéressent de la greffe
rénale. Elles ont négligé, dès lors, le développement des centres de transplantation
rénale, en parallèle de l’arsenal thérapeutique de l’insuffisance rénale chronique
terminale, entre autres; soit, la néphrologie,
l’hémodialyse, l’anesthésie- réanimation, la
radiologie, l’anatomie pathologie, le centre
de transfusion sanguine, le laboratoire
H.L.A., la chirurgie urologique et vasculaire
périphérique
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
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23
DOSSIER
Pr Mustapha Benmansour*, à Santé Mag:
"La gravité de la maladie, la lourdeur
du traitement ont des répercussions
négatives sur le malade et sa famille"
Propos recueillis par Tanina Ait
presque, saturés. Cela témoigne de la
croissance de cette pathologie.
Comme nous sommes sur le terrain,
nous voyons des patients errer dans
les services de dialyse. Nous sommes
contents de les sauver, dans un premier
temps; puis, naissent des problèmes
de tout genre. L’Etat a investi dans des
infrastructures et n’a pas lésiné sur la
dépense, pour que les malades aillent
bien. Aussi, les conditions de dialyse de
notre pays n’ont rien à envier à ceux de
l’Europe; mais, il n y a pas que le traitement technique, pour que le patient soit
bien pris en charge par dialyse. Il faut,
également, tenir compte de la situation
sociale et psychologique du dialysé.
Santé Mag: Où en est la spécialité ‘’néphrologie’’, à Tlemcen ?
Pr M. Benmansour: Lorsque j’avais terminé ma formation en néphrologie, en
1984, j’avais ouvert un centre de néphrologie, au CHU de Tlemcen. Depuis
cette date, à nos jours, que s’est-il passé ? Eh ! bien l’état des lieux, à Tlemcen
comme partout ailleurs, il y a beaucoup
d’insuffisants rénaux. Pourquoi ? Parce
que nous avons beaucoup de médecins,
l’évolution et les besoins sociaux, la formation, l’aspiration des gens à la santé
ont fait que l’on découvre, de plus en
plus, de malades. Pendant 20 ans, nous
avons fonctionné avec le seul centre du
CHU de Tlemcen et maintenant, nous
avons, environ, 800 malades dialysés,
pour une population de 1 million d’habitants. Comme je le disais, nous étions à
un seul centre, pendant 20 ans et ces
10 ans dernières années, 10 nouveaux
centres ont été créés, aussi bien dans
les secteurs public que privé. Nonobstant cette augmentation de capacité de
traitement, la plupart des centres sont,
24
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
Pour revenir à vos propos quelle est la
situation sociale et psychologique de
ces malades dialysés ?
La gravité de la maladie, la lourdeur du
traitement ont, en effet, des répercussions, négatives, sur le malade et sa famille. Ainsi, il arrive que le patient perde
son emploi, du fait de la permanence
des soins et des conséquences dramatiques, qui entraînent que des familles
se disloquent, des drames humains auxquels on assiste; et puis, une espèce de
résignation l’emporte, alors à la longue.
On ne parle pas des personnes âgées,
ou des nourrissons; il s’agit, plutôt, de la
population active adulte, chez laquelle
des dépressions sont constatées, ainsi
que de l’agressivité; en raison, souvent,
de la perte de statut social et d’absence
de perspective positive, de par leur
dépendance à la machine. Aussi, on se
bat pour promouvoir la greffe du rein
comme seule issue à toutes ces âmes
en errance et en peine. Cependant et en
l’occurrence, nous ne pouvons déployer
que les moyens disponibles.
Quelles perspectives, pour ces malades?
Notre défi, en ce qui nous concerne, c’est
le problème de l’équipe multidisciplinaire.
Travailler ensemble - et comme on n’a
pas l’habitude de le faire -, c’est un sacré
effort à déployer, que d’assurer ses responsabilités dans un cadre collectif. Etant
convaincu, par ma qualité de néphrologue, que la dialyse n’est pas la solution
définitive aux malades il faut, donc, se
battre pour promouvoir la greffe et cela a
été l’objet des journées de sensibilisation,
à Tlemcen, qui ont vu la participation du
Professeur Aberkane et d’organismes religieux. Les malades, on les voit, attendent
des initiatives, dans ce sens.
Nous avons démarré le projet, en 2007. Le
problème qu’on avait, à Tlemcen, c’est que
les chirurgiens, qui étaient censés s’occuper de la greffe, ne le faisaient pas. Il fallait, donc, les motiver et les pousser à la
réaliser; mais, cela reste du volontarisme.
En effet, par exemple, de 2007 à 2011,
des chirurgiens, qui venaient d’Alger, en
ont réalisé; mais, pas assez suffisamment.
On a voulu passer à autre chose, donc et
depuis 2013, nous avons fait, à ce jour, 15
greffes. Cela parait énorme, mais ce n’est,
en fait, qu’une goutte dans l’océan. Nous,
ce que nous voulons, c’est que la greffe
rénale devienne une pratique courante.
On sait que cette activité doit exister;
alors, on ne peut pas rester à un stade minima. Aussi, les pouvoirs publics doivent
nous aider dans ce sens. C’est notre message, car il y aura, toujours, des malades
en hémodialyse; mais, que le pourcentage
de greffés soit moins anecdotique, que ce
qu’il est maintenant
* Pr Mustapha Benmansour,
chef du service néphrologie,
au CHU de Tlemcen.
DOSSIER
Pr Abderrezak Dahdouh*, à Santé Mag,
"La greffe rénale est un must,
en matière de santé publique"
Propos recueillis par Tanina Ait
Santé Mag: Quel est l’état des lieux
de la transplantation d’organes,
à Constantine ?
Pr A. Dahddouh: A Constantine, notre
institut du rein existe depuis 1988. C’est
le deuxième centre, dans l’ordre chronologique de transplantation rénale, en
Algérie. A Alger, la première transplantation rénale, à partir d’un donneur apparenté, s’est faite en 1986 et à Constantine,
une année après. Depuis cette date, nous
avons eu des hauts et des bas. Toujours
est-il que nous pouvons dire que les initiatives et la volonté de nos équipes font
que, globalement, les choses avancent.
Cette activité, que nous voulons pérenne, est, en effet, à mettre au crédit du
Professeur Aberkane, de nos immunologues, néphrologues, chirurgiens, anesthésistes et à laquelle nous participons,
également. Ce type d’opérations ne se
fait pas sans peine; mais, nous continuons à travailler, malgré tous les problèmes rencontrés. Le rythme n’est pas
très élevé et nous souhaitons qu’il le soit
davantage, étant donné que les compétences existent et sont sur place.
Par ailleurs, l’EHS Daksi de Constantine a été le premier centre à procéder
à la greffe rénale, à partir du cadavre.
Cette opération, réalisée en 2002,
a été un succès.
Malgré, donc, des compétences avérées,
le taux de greffe rénale est, en effet,
faible. Quelle explication pouvez-vous
donner?
La grève rénale est un must, en matière
de santé publique; elle est indispensable
à notre médecine, notre secteur sanitaire, nos ressources humaines. Elle est
incontournable, pour la mise à niveau
de tous ces volets de la médecine. Ce
qui l’entrave, c’est qu’il n y a pas eu de
Programme national de promotion de la
greffe d’organes.
l’extrême Est, du Sud au Nord et même
des étrangers de l’Afrique Subsaharienne. L’activité de la transplantation
d’organes, en général et du rein, en
particulier, n’est pas limitée dans l’espace.
L’idéal est de développer la transplantation à partir de l’individu en état de
mort encéphalique et à condition que
son HLA soit compatible avec celui
d’un patient en attente d’une greffe
habitant, par exemple, Maghnia. On
l’appellera pour qu’il en bénéficie.
Nous voyons, donc, que l’activité de
transplantation d’organes ne doit pas
être limitée dans l’espace et doit être,
pour tout le moins, nationale; quand
elle ne s’étalerait pas en Afrique du
nord; voire, en Europe.
D’ailleurs, en Europe, il y a Euro-transplant. Si on ne trouve de patient compatible avec le rein prélevé d’un cadavre, en France, on cherchera, alors,
dans le fichier Européen, pour trouver, éventuellement, un bénéficiaire
quelque part sur le continent; faire en
profiter un Allemand, le cas échéant.
Il y a une Agence nationale qui vient
d’être créée à Blida. Cette structure vat-elle améliorer les choses ?
L’Agence nationale du rein fait du sur
place, pour ne pas dire qu’elle n’existe
pas. Elle n’existe que sur décret et
toujours pas d’activités. Nous aimerions qu’un Programme national de
transplantation d’organes soit établi;
qu’il y ait, également, des structures
adéquates et bien adaptées, avec des
spécialités complémentaires, pour
prendre en charge ce genre d’activités
médicales.
Ce type de fichier va-t-il être établi
dans notre pays, à l’instar de l’Europe ?
On doit faire notre fichier maghrébin,
puisque c’est le procédé thérapeutique
le moins coûteux; donc, rentable au
plan économique. Ceci représente des
avantages, car il y a plus de chances,
en effet, de trouver preneur à une plus
grande échelle. La greffe permet, également, une excellente réhabilitation
et une meilleure qualité de vie au patient. C’est pourquoi nous demandons
à l’Etat de s’impliquer plus fortement,
par la mise en place, pour encourager
ce programme
Quel est le rayon d’action de Constantine, en matière de greffe rénale ?
Nous avons transplanté des malades
de toute l’Algérie: de l’extrême Ouest à
* Pr Abderrezak Dahdouh,
chef du service urologie
et transplantation rénale,
EHS Daksi – Constantine.
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
25
25
DOSSIER
Maladie de Berger
La maladie de Berger, également
appelée glomérulonéphrite à dépôts
mésangiaux d'IgA, ou simplement néphropathie à IgA est une maladie autoimmune atteignant les reins.
HISTORIQUE
La néphropathie à Ig A a été découverte
en 1966, par le Professeur Jean Berger,
de l’hôpital Necker à Paris, en utilisant
un sérum anti-IgA, sur des biopsies rénales de patients. Ses travaux (en collaboration avec Nicole Hinglais) ont été
publiés en 19681.
ÉPIDÉMIOLOGIE
La maladie de Berger touche, essentiellement, les jeunes adultes; mais, elle
peut, également, se développer chez les
enfants, ainsi que chez les adultes âgés.
Les hommes sont, plus souvent, atteints
que les femmes. Elle concerne 1 % de la
population mondiale2 et est la cause, la
plus fréquente, de glomérulonéphrite3.
Sa prévalence exacte est, cependant,
très
probablement,
sous-estimée,
puisque le diagnostic requiert une biopsie rénale, geste lourd. Ainsi, un dépôt
rénal d'Ig A est présent dans un rein
sur neuf, lors d'examens systématiques
en vue de transplantation4. L'incidence
semble plus élevée dans certains pays,
dont le Japon5.
MÉCANISMES
L'évolution de cette maladie se fait,
la plupart du temps, très lentement;
c’est-à-dire, sur plusieurs années. Dans
l'histoire du malade, une infection respiratoire haute (angine, pharyngite)
est diagnostiquée quelques jours avant
l'apparition de l'hématurie macroscopique, caractéristique de la maladie.
En cas d'infection, quelle qu'elle soit,
il y a production d'anticorps, censés
participer à la destruction de l'agent
infectieux. Dans la maladie de Berger,
comme dans d'autres maladies auto-immunes, les anticorps de type Ig A, normalement produits pour détruire les
agents infectieux, présentent une glycosylation aberrante6, qui modifie leurs
propriétés physicochimiques. Ils auront
tendance à se fixer aux cellules mésangiales du glomérule rénal. Dans le cas de
la maladie de Berger, le dépôt concerne,
uniquement, en monomères d'Ig A1,
sous classe des Ig A7. L'inflammation ré26
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
nale, qui en résulte, entraîne des lésions
du filtre rénal et une «fuite» des composants du sang vers l'urine, en particulier
des hématies. Le principal signe de la
maladie est, ainsi, l'apparition de sang
dans les urines, quelques jours après le
début d'une infection; que ce sang soit
visible (hématurie macroscopique), ou
non (hématurie microscopique).
Une production, excessive, d’Ig A circulant dans le sang peut entraîner l’agglutination d’Ig A. Elle va, par la suite, se
déposer dans le glomérule rénal, lors
de la filtration du sang par le rein. Cette
production excessive va entraîner une
inflammation du rein, qui va conduire à
la formation de cicatrices dans le rein,
et à une déformation de celui-ci. L’insuffisance rénale s’installe donc avec le
temps, au fur et à mesure.
Il existe des facteurs génétiques avec
des formes familiales. Le défaut de
glycosylation de l'Ig A1 a un caractère
héréditaire, mais le ou les gènes res-
ponsables n'ont pas été identifiés8. Des
mutations sur le chromosome 6, dans la
région codant pour le complexe majeur
d'histocompatibilité, augmenteraient
le risque de survenue de la maladie9,
de même que des délétions dans les
gènes CFHR1 etCFHR310.
ÉVOLUTION DE LA MALADIE
L'évolution est variable. La maladie est
classée en quatre stades:
Stade n°1: glomérulopathie mésangiopathique. Il représente, en France, 20 %
à 40 % des cas.
Stade n°2: glomérulonéphrite segmentaire et focale. Ces lésions touchent
moins de 30 % des cas de glomérules
(stade 2a) ou plus (stade 2b). Ce stade
est le plus fréquent, puisqu’il représente
30 % à 60 % des cas de biopsies.
Stade n°3: glomérulonéphrite proliférative diffuse mésangiale pure. Il représente 5 % à 20 % des cas.
Stade n°4: prolifération endo-extra-
DOSSIER
capillaire avec présence de croissants.
Ces lésions touchent moins de 50 %
des cas avec glomérules avec croissants
inférieur (stade 4a), et supérieur à 50 %
(stade 4b).
Un cinquième des malades atteignent
un stade d'insuffisance rénale avancée,
nécessitant un traitement par hémodialyse. Ces derniers ont, plus souvent, une protéinurie supérieure à 1
g/jour, une hypertension artérielle et
des lésions plus sévères sur la biopsie
rénale11. Le risque de développer une
insuffisance rénale, dans les 10 ans, est
inférieur à 10 %, si la fonction rénale est
normale à la découverte de la maladie5.
MANIFESTATIONS
Chez l'enfant et l'adulte jeune, les trois
quarts des cas se manifestent par
une hématurie macroscopique (urines
rouges, ou brunes), survenant à proximité d'un épisode infectieux ou digestif5. Chez l'adulte plus âgé, la maladie
est, fréquemment, découverte à l'occasion d'une complication (insuffisance
rénale, ou hypertension).
Un syndrome néphrotique est rare. Ce
syndrome se traduit par la présence
de protéines, (essentiellement de l’albumine), dans les urines. Il entraîne une diminution, importante, des protéines circulant dans le sang, une apparition
d’œdème, de troubles de la coagulation,
une augmentation des lipides dans le
sang, une hypertension artérielle et
une insuffisance rénale.
Une insuffisance rénale aiguë est présente dans 5 % des cas. Elle se manifeste par des œdèmes, une hypertension artérielle et une diminution de la
quantité d’urine émise (oligurie). Elle
peut s’accompagner de douleurs lombaires, une asthénie, un goût particulier
dans la bouche, des nausées après l'alimentation.
DIAGNOSTIC
L'histoire du patient et de sa famille est
primordiale. Une hématurie chez les parents et les grands-parents ainsi qu'une
surdité chez de jeunes adultes feront
suspecter un syndrome d'Alport ou une
hématurie familiale bénigne.
Il faut doser les antistreptolysines O
(ASLO) afin d'exclure une glomérulonéphrite post-streptococcique, qui peut
se présenter, également, sous la forme
d'une hématurie, environ dix jours après
l'infection à streptocoques (angine, par
exemple). Malgré tout, de nombreuses
infections, comme la mononucléose
infectieuse, peuvent, également, induire
une atteinte rénale, sans production
d'ASLO. Mais, l'hématurie, due à une
glomérulonéphrite post-infectieuse, finit,
toujours, par disparaître; contrairement
à celle d'une maladie de Berger, et c'est,
souvent, en surveillant l'évolution sur
plusieurs mois, qui permet de faire la différence. Le dosage des composantes C3
et C4 du complément est, aussi, essentiel, pour éliminer ce diagnostic. En effet,
dans les glomérulonéphrites post-infectieuses, le C3 est typiquement très bas,
alors qu'il est normal dans la maladie de
Berger.
Le taux sanguin d'IgA1 déficient en galactose est augmenté chez les patients,
mais ce test a une sensibilité et une spécificité imparfaite12. Une augmentation
de la fraction C3 activée du complément serait un facteur de gravité13, ainsi
qu'une élévation de l'uricémie14.
La biopsie rénale permet de porter le
diagnostic. L'examen en microscopie
optique peut montrer plusieurs types de
lésions, aspécifiques, cependant. L'examen en immunofluorescence montre
des dépôts caractéristiques d'Ig A. La
présence de dépôts de C4d serait de
bon pronostic15. La « classification d'Oxford » des résultats histologiques permet d'aider à évaluer le pronostic16.
Il faut rechercher des complications de
la maladie: recherche d'une protéinurie, d'une hypertension artérielle, d'une
insuffisance rénale.
Un examen cytobactériologique des
urines élimine une infection urinaire (qui
peut, parfois, donner une hématurie).
L'hémogramme permet de rechercher
une anémie, en cas d'hématuries majeures (ce qui est rare).
TRAITEMENT
La Société internationale de néphrologie a publié, en 2012, des recommandations, pour la prise en charge de la
maladie de Berger17.
Aucun traitement n'est nécessaire en
l'absence de protéinurie, d'hypertension
artérielle, ou d'insuffisance rénale.
La mise sous un inhibiteur de l'enzyme
de conversion, ou d'un antagoniste des
récepteurs de l'angiotensine. II est prioritaire pour contrôler l'hypertension artérielle, ainsi qu'une protéinurie17.
Les corticoïdes peuvent entraîner une
réduction des lésions sur la biopsie rénale18 et sont réservés, avec les immunosuppresseurs, aux formes évolutives.
Certaines équipes proposent une amygdalectomie, dans l'hypothèse d'une origine infectieuse mais l'efficacité n'en est
pas démontrée5.
En cas d'insuffisance rénale, la transplantation rénale peut être proposée:
la maladie peut récidiver sur le greffon
dans un tiers des cas; mais, le plus souvent, sans conséquence19, le traitement
par corticoïdes étant susceptible de
diminuer le risque de récidive20.
Notes et références
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N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
27
27
DOSSIER
L’amyloïdose rénale
RÉSUMÉ
L’amyloïdose est un terme, générique,
désignant des fibrilles formant des
dépôts extracellulaires. Plus d’une
quinzaine de types d’amyloïdose ont
été décrits. Les formes systémiques
primaires (AL) ou secondaires (AA)
sont, de loin, les plus fréquentes. Dans
l’amyloïdose systémique primaire, les
reins, le cœur et le tube digestif sont les
organes les plus souvent touchés. Dans
la forme secondaire, l’atteinte rénale
prédomine. Seule la biopsie permet
d’établir le diagnostic. Le traitement de
l’amyloïdose primaire est basé sur l’élimination des chaînes légères et l’arrêt
de leur production, par destruction du
clone lymphocytaire responsable. Dans
les formes secondaires, le traitement est
dirigé contre l’inflammation chronique,
à l’origine du processus. Globalement, le
pronostic est très sombre et dépend de la
sévérité de l’atteinte des organes cibles.
Chez les patients arrivés au stade de
la dialyse, le pronostic est, encore, plus
sombre.
brilles, dont la caractéristique principale
est la structure en feuillet bêta plissé,
qui les rend insolubles et résistantes à
la protéolyse.5
Plusieurs facteurs contribuent à leur
agrégation. La protéine peut avoir
une tendance naturelle à l’agrégation,
apparente dès que sa concentration
augmente. La composition des fibrilles
dépend de la maladie associée, ou de
l’atteinte clinique (Tableau 1). Dans la forme
primaire (AL), il s’agit de chaînes légères
(entières, ou uniquement les fragments
N terminaux), alors que dans la forme
secondaire, il s’agit de la serum amyloid
associated protein (SAA), une protéine
de la phase aiguë inflammatoire. Indépendamment de leur composition, ces
fibrilles sont, invariablement, associées
à une protéine plasmatique: la serum
amyloid protein (SAP).
COMPOSITION DES FIBRILLES, EN
FONCTION DE L’ATTEINTE CLINIQUE
L’amyloïdose AL peut être isolée (forme
AL, dite primaire), ou associée à une hémopathie à lymphocytes B (myélome,
MGUS (gammapathie monoclonale de
signification indéterminée), maladie de
Waldenström, lymphome B secrétant).
Concernant les patients atteints d’un
myélome multiple, une étude, portant
sur 4319 patients, a montré que seuls
47 d’entre eux (1,1%) ont développé une
amyloïdose.6 Les auteurs ont remarqué que tous
ceux qui ont développé une amyloïdose
avaient un rapport kappa/lambda < 1:2,
ce qui suggère que les chaînes lambda
sont associées à un risque, accru, de
développer cette complication.
De même, seul un petit nombre des
patients, atteints d’amyloïdose AL,
évoluent vers un myélome multiple. Ce
fait est illustré par l’observation d’une
série de 1596 patients. Parmi eux, seuls
six ont développé cette complication
(0,4%), dans un délai de 10 à 81 mois
après le diagnostic d’amyloïdose.7 Il est intéressant de noter que l’amyloïdose de ces patients touchait, principalement, la peau, le système nerveux,
ou les reins. Les patients, présentant
une atteinte cardiaque, ne survivent, généralement, pas assez longtemps, pour
progresser vers un myélome.
Pour les patients, atteints d’une MGUS,
le risque relatif de développer, à terme,
une amyloïdose AL, ou un myélome est
de 8,4 et 25, respectivement. Ceci équivaut à un risque de progression d’environ 1% par année, comme démontré
dans une cohorte de 1384 patients, suivis pendant quinze ans, en moyenne (de
0 à 35 ans).8 Durant l’étude, dix patients ont développé une amyloïdose AL et 75 un myélome multiple. La probabilité, cumulée,
de progression d’une MGUS vers une
de ces pathologies était de 10% à dix
INTRODUCTION
Le terme «amyloïdose» est introduit
dans la littérature médicale en 1845,
par Rudolph Virchow, lorsqu’il décrit
des dépôts se colorant, de la même
manière que la cellulose, avec l’iode.
Nous devons, ensuite, à Samuel Wilks,
la première description d’amyloïdose
primaire.1 Tableau 1: Composition des fibrilles en fonction de l’atteinte clinique
Il décrit, en 1856, un patient
Type d’amyloïdose
Dépôt
Maladie associée et/ou atteinte clinique
avec atteinte viscérale, ne
Amyloïdose (AL)
Ig Chaîne légères
Myélome multiple, MGUS, lymphome non hodgkinien ou idiopathique
souffrant ni de tubercusecondaire Ig chaîne lourdes
Polyarthrite rhumatoïde, RCUH, maladie de Crohn, spondylarthrose,
lose, ni de syphilis. En 1867, Amyloïdose
(AA)
Serum amyloid associated (SAA) Bechterew, fièvre méditerranéenne, tuberculose, syphilis,
Weber établit le lien entre
bronchiectasie et ostéomyélite
l’amyloïdose et le myélome Liée à la dialyse
Ig bêta-2-microglobuline
multiple.2 Le rouge Congo Héréditaire
ApoA2
Amyloïdose héréditaire rénale
– une teinture qui a, longTransthyrétine (TTR)
Amyloïdose héréditaire neuropathique et/ou cardiopathique
temps, servi à la coloration
Fibrinogène chaîne alpha
Amyloïdose néphropathique héréditaire
des textiles – est utilisé, dès
Lysosome
Amyloïdose néphropathique héréditaire
1920, par Bennhold.3 En
1992, Solomon et coll. Dé- Liée à l’âge
ApoAI
montrent, chez la souris, que
ANP
Amyloïdose liée à l’âge, isolée de l’oreillette
des perfusions de protéines Liée à l’organe
Amyloid precursor protein (APP) Maladie d’Alzheimer héréditaire ou sporadique
de Bence Jones, extraites de
Prion
Encéphalopathie spongiforme héréditaire ou sporadique
deux patients, provoquent
TGFB/kératoépitheline
Dystrophie cornéale familiale
une atteinte rénale, avec
Autre
Procalcitonine
Complication d’une tumeur à cellules C de la thyroïde
dépôts d’amyloïde.4
Islet amyloïde
Insulinome, diabète II
Pathologie
Prolactine
Prolactinome
L’amyloïdose est un terme
Insuline
Complication de l’utilisation de pompe à insuline
générique désignant des
Ig:
immunoglobines;
ANP:
atrial
natriuretic
peptide;
MGUS:
gammapathie
monoclonale de signification indéterminée;
dépôts extracellulaires de fiRCUH: rectocolite ulcéro-hémorragique; TGFb: transforming growth factor; ApoA: apolipoprotéine
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Santé-MAG
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DOSSIER
ans, 21% à vingt ans et 26% à 25 ans.
Les patients, avec une protéine monoclonale à IgM ou IgA, avaient le risque
le plus grand.
L’amyloïdose secondaire (AA) est une
complication de certaines maladies
inflammatoires chroniques. Historiquement, les infections chroniques
(tuberculose, bronchiectasies, syphilis,
ostéomyélite) étaient courantes. Avec
l’avènement des antibiotiques, les maladies auto-immunes (polyarthrite rhumatoïde, maladie de Bechterew, rectocolite ulcéro-hémorragique, maladie de
Crohn) sont devenues, proportionnellement, plus fréquentes. Une nouvelle
forme d’amyloïdose AA a été décrite, en
1985, chez des héroïnomanes.9 Elle est secondaire aux multiples abcès
que développent, souvent, ces patients
aux sites d’injection. Dans cette forme,
l’atteinte rénale est précoce et évolue
vers un syndrome néphrotique et une
insuffisance rénale rapidement progressive.9
INCIDENCE
L’amyloïdose est une maladie rare. Aux
Etats-Unis, il y a entre 1275 et 3200 nouveaux cas, par an.10 On la rencontre sur 2% des biopsies rénales. La prévalence des différents types
d’amyloïdose varie de manière géographique. Dans les pays dits développés,
le type AL est le plus courant alors que,
dans les pays en voie de développement
et ceux du pourtour méditerranéen, on
observe une prédominance du type AA.
PRÉSENTATION DE CAS
Cas clinique
Un patient de 71 ans est connu pour
une insuffisance rénale chronique (IRC)
(eGFR (estimated Glomerular Filtration
Rate) de l’époque 44 ml/min) et des
diarrhées chroniques, dont l’origine reste
inexpliquée, malgré de multiples investigations (trois œsophago-gastro-duodénoscopies (OGD), deux colonoscopies,
deux CT-abdominaux, IRM abdominopelviens et capsulographie du grêle) et
biopsies (duodénum, estomac, côlon,
rectum). On lui connaît, également, une
paraprotéinémie à IgG lambda stable, de
même qu’une dysesthésie aux membres
inférieurs, dont l’origine est, également,
indéterminée. Ce patient est hospitalisé,
pour aggravation de diarrhées chroniques et de l’IRC. A l’entrée, le patient
est hypertendu à 200/112 mmHg et présente des œdèmes très marqués des
membres inférieurs et supérieurs.
Le bilan néphrologique met en évidence
une clairance de la créatinine à 15 ml/
min, ainsi qu’une protéinurie de 8 g/24
heures, essentiellement constituée d’albumine. L’ultrason des voies urinaires
montre des reins de taille et de morphologie normales. La recherche d’une
paraprotéine ne montre que la gammapathie monoclonale à IgG lambda, déjà
connue. La biopsie rénale, en revanche,
révèle une amyloïdose avec d’abondants
dépôts glomérulaires, interstitiels et vasculaires (Figures 1 et 2). L’immunofluorescence ne révèle pas de dépôt de chaînes
légères kappa, ou lambda, dans ces
dépôts d’amyloïde. Une ponction biopsie de moelle démontre une très faible
population de plasmocytes atypiques,
évalués à 0,5% de la cellularité totale,
dont l’analyse suggère une monoclonalité lambda. Nous retenons le diagnostic
d’amyloïdose secondaire à une MGUS.
Nous complétons le bilan par un ultrason cardiaque, qui ne montre pas de
signe de dépôt amyloïde à ce niveau.
Une chimiothérapie par bortézomib,
melphalan et prednisone est débutée;
mais, malheureusement, très mal supportée, elle est, rapidement, abandonnée. La fonction rénale se maintient aux
environ de 15 ml/min de clairance, avec
une protéinurie massive. Le patient est
sévèrement dénutri et souffre d’une
acidose métabolique, probablement
mixte, sur diarrhées, tubulopathie et
insuffisance rénale, non corrigée malgré
6 g/jours de bicarbonate (Néphrotrans).
Dans ce contexte, un traitement, par
hémodialyse chronique, est instauré.
Le patient bénéficie, également, d’une
nutrition per-dialytique. Après avoir
«cassé» la fonction rénale, par soustraction volémique, le bilan à six mois
est satisfaisant, avec diminution de la
protéinurie, disparition des œdèmes
périphériques et amélioration de l’état
général.
CLINIQUE
Les manifestations cliniques dépendent
de la nature des précurseurs protéiques,
ainsi que de la quantité de dépôts d’amyloïde. Dans les formes les plus courantes
(AL et AA), les organes les plus touchés
sont les reins, le cœur et le tube digestif
(60% des patients).
Dans le rein, l’amyloïde se dépose aux
niveaux glomérulaire, vasculaire et tubulaire. A noter que les chaînes légères
lambda sont plus néphrotoxiques que les
chaînes kappa, pour une raison inconnue
et sont associées à un moins bon pronostic.11 75% des patients avec amyloïdose
A
B
Figure 1:
A. Dépôts d’amyloïde dans un glomérule rénal.
B. Coloration au rouge Congo.
Les dépôts d’amyloïde sont colorés en bleu pâle au
trichrome FAOG. Ces dépôts sont positifs pour le
rouge Congo (B). Ils sont présents dans le mésangium et la paroi des capillaires glomérulaires, dans
l’interstice et dans la paroi des artérioles.
Figure 2:
Dépôts d’amiyloïde vus au microscope électronique
La microscopie électronique met en évidence les
caractéristiques micro-fibrillaires (par opposition à
micro-tubulaires), l’aspect aléatoire de l’organisation de ces dépôts et permet de mesurer le diamètre
de ces dépôts (7-10 nm).
AL présentent une protéinurie asymptomatique12 ou un syndrome néphrotique franc.13 Les dépôts vasculaires et
tubulaires peuvent aboutir à une insuffisance rénale, lentement progressive,
sans protéinurie.14 Au niveau tubulaire,
on peut, parfois, observer une acidose
tubulaire de type I, ou un diabète insipide néphrogénique.9 Chez un tiers des
patients, les manifestations cardiaques
sont au premier plan.15 L’anomalie la plus courante sur l’ECG
est un bas voltage (50% des patients),
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
29
29
DOSSIER
un bloc atrio-ventriculaire de deuxième
ou troisième degré, une fibrillation auriculaire, ou des patterns de pseudoinfarctus.16 On observe, souvent, des
signes d’insuffisance cardiaque droite. A
l’échocardiographie, on peut mettre en
évidence un épaississement de la paroi
du ventricule gauche, accompagné de
dysfonction diastolique, qui progresse
vers une cardiopathie restrictive, avec
petites cavités ventriculaires et une apparence typiquement «scintillante» du
myocarde. Les atteintes restrictives sévères se manifestent par des syncopes
et sont associées à une mortalité augmentée à trois mois.17 La présence d’un
thrombus intracardiaque est très fréquente, notamment si le patient est en
fibrillation auriculaire, ou souffre d’une
dysfonction diastolique.10 Le risque de
thrombus est deux fois plus élevé, lors
d’amyloïdose AL (35% versus 18% dans
les autres types d’amyloïdose).10 L’anticoagulation prévient la formation
du thrombus cardiaque, mais augmente,
aussi, nettement, le risque hémorragique chez ces patients à haut risque;
10 de ce fait, la décision d’anti-coaguler
doit être prise, au cas par cas.
Au niveau du tube digestif, l’infiltration
de la muqueuse est très fréquente. Le
duodénum est touché dans 100% des
cas, l’estomac et le côlon dans 90%, et
l’œsophage dans 70%. Les manifestations cliniques peuvent inclure des saignements gastro-intestinaux, favorisés
par la friabilité de la muqueuse,18 des
vomissements, ou une malabsorption
(due soit à l’atrophie de la muqueuse
infiltrée, soit à une colonisation bactérienne). L’infiltration neuromusculaire
du tube digestif est plus rare et se caractérise, dans un premier temps, par
des contractions péristaltiques d’amplitude normale, mais avec des troubles de
la coordination. Avec le temps, l’amplitude du péristaltisme diminue, entraînant un transit ralenti, avec constipation
et gastroparésie. Dans d’autres cas, on
observe, au contraire, une dysmotilité
avec accélération du transit intestinal et
diarrhées, qui sont expliquées par une
neuropathie autonomique, favorisant
une progression rapide du chyme et des
sécrétions digestives.19 L’hépatomégalie, avec ou sans splénomégalie, est très fréquente.
L’atteinte neurologique est presque la
règle, avec des neuropathies mixtes
sensorielles, motrices et/ou autonomiques, se manifestant par une hypotension orthostatique.20 Un syndrome du tunnel carpien peut
30
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
être le premier signe clinique d’une
amyloïdose.
Sur le plan hématologique, une tendance, accrue, aux saignements est,
souvent, constatée. Elle s’explique par
le déficit de facteur de coagulation
(notamment le facteur X, qui est lié par
l’amyloïde), une hyperfibrinolyse et une
dysfonction plaquettaire.21 Parmi les
autres manifestations de l’amyloïde, on
notera, encore, l’infiltration de la langue
et, au niveau cutané, un purpura périorbitaire déclenché à la manœuvre de Valsalva, rare mais très caractéristique.
DIAGNOSTIC
Lorsque le diagnostic d’amyloïdose
AL est suspecté, on recherchera, dans
un premier temps, une gammapathie
monoclonale. L’électrophorèse des protéines plasmatiques, ou le dosage des
chaînes légères libres, dans les urines
de 24 heures, ou dans le sérum, permettent, aisément, de détecter un pic
monoclonal. A cet égard, il est important de noter, d’une part, que la valeur
normale augmente dans l’insuffisance
rénale, en raison de la baisse de filtration
des chaînes légères et que, d’autre part,
le rapport kappa/lambda, dont la valeur
normale est comprise entre 0,26 et 1,65,
augmente avec la progression d’une
insuffisance rénale et peut atteindre 3,1,
lors d’insuffisance rénale sévère. De fait,
un rapport normal bas, lors d’une insuffisance rénale, où la valeur attendue
est plutôt élevée, doit faire suspecter
une production monoclonale. La ponction biopsie de moelle permettra, le cas
échéant, de poser le diagnostic de myélome multiple.
Le diagnostic définitif ne peut être établi que par biopsie. Afin de réduire le
risque hémorragique, il est recommandé de débuter par l’aspiration de tissu
adipeux sous-cutané. Cette technique,
peu invasive et facilement réalisable, a
une sensibilité de 57-85% et une spécificité de 92-100%.22 Les biopsies rénales
et hépatiques ont une meilleure sensibilité (84 et 90%, respectivement), mais
sont plus invasives et requièrent un personnel spécialisé.
A l’examen histologique, les dépôts
d’amyloïde partagent les mêmes caractéristiques, quelle que soit leur composition. Les dépôts d’amyloïde se
colorent au rouge Congo et prennent
une couleur rouge ocre; ils apparaissent
en vert pomme à la lumière polarisée.
Cette réaction est produite par la structure en feuillet bêta plissé des fibrilles
d’amyloïdes. Au microscope électro-
nique, apparaissent des fibrilles d’environ 7 à 10 nm, non orientées, dites
«en tas d’aiguilles». Un examen immuno-histochimique sur du tissu fixé en
formol tamponné peut, également, se
faire, pour confirmer la nature amyloïde
des dépôts, en utilisant des anticorps
marqués et dirigés contre un épitope
commun à tous les types d’amyloïde.
Une fois le diagnostic d’amyloïdose
posé par les pathologistes, une typisation de ces dépôts doit être effectuée.
Cette typisation se fait par un deuxième
examen immuno-histochimique, ou par
immunofluorescence. Ces deux techniques utilisent des anticorps marqués
et dirigés contre un épitope des chaînes
légères (AL-amyloïdose primaire), ou
contre un épitope de la protéine SAA
(AA-amyloïdose secondaire), ou contre
la transthyrétine (TTR-amyloïdose familiale), ou encore contre une protéine
amyloïde de la maladie d’Alzheimer
(APP).
Les critères suivants, définis par l’International Myeloma Working Group,
doivent tous être remplis, pour poser le
diagnostic d’amyloïdose AL:
présentation clinique évocatrice;
plasmocytose médullaire, rapport anormal entre les chaînes légères kappa et
lambda, ou mise en évidence d’un pic
monoclonal, sur l’électrophorèse ou l’immunofixation;
coloration au rouge Congo positive
dans un tissu atteint;
mise en évidence de chaînes légères
dans les dépôts (immunohistochimie ou
cytométrie de flux).
Malheureusement, 2 à 3% des cas ne
remplissent pas les critères ci-dessus. Le
diagnostic d’amyloïdose AL doit, alors,
être posé avec précaution. En effet, des
cas sporadiques d’amyloïdose héréditaire peuvent être confondus avec une
amyloïdose AL, comme l’a montré une
étude sur 350 patients. Celle-ci a mis
en évidence 34 patients (10%) porteurs
d’un gène muté, avec, en fin de compte,
une amyloïdose héréditaire. Il est intéressant de noter que huit de ces patients
avaient, également, une discrète gammapathie monoclonale, responsable de
l’erreur diagnostique.23 Les mutations sur les gènes, gènes responsables d’amyloïdose héréditaire, ont,
souvent, une pénétrance variable; ce qui
explique que la plupart des anamnèses
familiales sont négatives.23
Les gènes, impliqués dans les amyloïdoses familiales, sont multiples; on
mentionnera l’amyloïdose familiale neuropathique, secondaire à l’accumulation
DOSSIER
de transthyrétine (TTR). Cette protéine,
servant à transporter la tyroxine et le
rétinol, est produite par le foie.
En Angleterre, afin de réduire le risque
d’erreur, tous les patients avec un diagnostic d’amyloïdose AL bénéficient
d’une analyse d’ADN. Ceci évite l’administration inappropriée de chimiothérapie et permet d’envisager une
transplantation hépatique, comme par
exemple dans l’amyloïdose familiale
neuropathique.23
TRAITEMENT ET ÉVOLUTION
Le traitement dépend, bien entendu,
du type d’amyloïdose. L’amyloïdose
AA est, en priorité, traitée en diminuant
l’inflammation sous-jacente, alors que
le traitement de l’amyloïdose AL est
dirigé contre le clone responsable. Le
traitement de choix, pour l’amyloïdose
héréditaire, dans laquelle la protéine
mutante est produite par le foie, est une
transplantation hépatique.
Les agents chimio-thérapeutiques les
plus souvent utilisés, pour traiter l’amyloïdose AL, sont les stéroïdes, la thalidomide et le melphalan ou le bortézomib
(Velcade), selon que l’amyloïdose est
associée, ou non, au myélome multiple.
Malheureusement, la chimiothérapie est
très toxique, chez ces patients fragiles et
la mortalité induite est de 11 à 27%, selon
les études.12 Ceci a entraîné une sélection plus rigoureuse des patients, excluant, notamment, tous ceux avec atteinte cardiaque.
Une deuxième option consiste en une
myélo-suppression, suivie d’une transplantation de cellules souches autologues, ou allogéniques. Cette méthode
permet d’induire une rémission à long
terme, mais est grevée d’une très haute
mortalité, allant de 20 à 40%.24
En dehors du blocage de la production
des chaînes légères, il n’y a, malheureusement, aucun traitement spécifique,
pour l’atteinte gastro-intestinale, rénale
ou cardiaque. L’usage de laxatifs et
d’agents prokinétiques est recommandé
pour la constipation, alors que les diarrhées répondent bien aux corticostéroïdes et à l’octréotide, dont il existe une
forme dépôt injectable.25 Concernant l’atteinte rénale, arrivé au
stade de l’insuffisance rénale terminale,
le traitement consiste en dialyses, ou
à une transplantation rénale. Bien que
le pronostic des patients, parvenus au
stade de la dialyse, soit réservé, une
transplantation rénale reste possible et la
survie du greffon est bonne. Un groupe
de 23 patients, atteints d’amyloïdose
AL, ou secondaire à la fièvre méditerranéenne, ont été greffés et suivis pendant
dix ans. Leur évolution a été comparée
à celle d’un groupe de patients greffés
pour une autre raison que l’amyloïdose.
La survie du greffon était de 80% dans
le groupe amyloïdose, contre 94% à
cinq ans dans l’autre groupe et de 66%,
contre 87% à dix ans.26
Il est très difficile de freiner la progression de cette maladie. Le temps moyen
entre le diagnostic et le début de la dialyse est de 29,5 mois et le temps de survie, en dialyse, est de 10,4 mois.11 La survie médiane est de quatre à six
mois, en présence d’une insuffisance cardiaque ou hépatique et de 1,1 an avec un
quelconque signe d’atteinte cardiaque
autre que l’insuffisance cardiaque. L’insuffisance cardiaque cause 51% des décès, alors que l’insuffisance rénale et les
infections sont responsables, chacune,
de 15% des décès.
De nouvelles molécules empêcheraient
la formation de fibrilles en inhibant, de
manière compétitive, la liaison de la SAP.
L’une d’elles porte le doux nom de R-1-(6(R-2-carboxy-pyrrolidin-1-yl)-6-oxohexanoyl) pyrrolidine-2-carboxylic acid.
Elle permettrait, également, de rompre
les liens entre les différentes molécules
de SAP, accélérant leur élimination par le
foie, et serait, donc, susceptible de faire
fondre les dépôts d’amyloïde.27 Cette
nouvelle substance n’est pas, encore,
disponible sur le marché.
PRONOSTIC
Les facteurs pronostiques sont au
nombre de trois: coexistence d’un
myélome multiple, atteinte cardiaque
et réponse au traitement. Les patients
atteints d’amyloïdose, avec un myélome multiple, répondent, rarement, à la
chimiothérapie (réponse complète chez
18% des patients) et cette réponse peut
être très lente (temps moyen: un an).28 De plus, leur survie moyenne est plus
courte que celle des patients atteints,
uniquement, d’amyloïdose: 14 et 32
mois, respectivement.28 Le pronostic s’assombrit, encore, si le
pourcentage de plasmocytes circulant
est de plus de 1% (la survie chute, alors,
de 31 à 13 mois), ou si la moelle contient
plus de 10% de plasmocytes (la survie
passe de 33 à 14 mois).28
Bien qu’une atteinte cardiaque ne soit
diagnostiquée que chez la moitié des
patients atteints d’amyloïdose, elle est,
souvent, la cause du décès. La sévérité
de l’atteinte cardiaque est corrélée à
la concentration sérique de N-terminal
brain nutriuretic peptide (NT-pro-BNP).
Le NT-pro-BNP a une sensibilité de 93%
et une spécificité de 90%, et une valeur
prédictive positive et négative de 93,3%
et 90,3%, respectivement.29 Une valeur
seuil de 152 pmol/l permet de distinguer
deux groupes, avec une survie très différente: neuf mois versus plus de deux ans.
La mortalité est de 7,6 par 100 patientsannée, pour le groupe en dessous de 152
pmol/l et de 72,2 par 100 patients-année,
pour le groupe en dessus. Le NT-proBNP peut, également, être utilisé, pour
suivre la réponse à la chimiothérapie.
La réponse au traitement constitue
le troisième facteur pronostique. Une
diminution de la protéinurie de plus de
50%, ou l’amélioration de la fonction
rénale de 25% permettent d’objectiver
la réponse rénale à la chimiothérapie,
tandis qu’une diminution de 50% des
immunoglobulines reflète la réponse
hématologique.24 La survie, moyenne,
des patients ayant atteint une réponse
hématologique, est de 66 mois et celle
des patients ayant une double réponse
(rénale et hématologique) est de 95
mois (l’étude est, encore, en cours).24
STRATÉGIE DE RECHERCHE ET CRITÈRES DE SÉLECTION
Les données, utilisées pour cette revue, ont été identifiées par une recherche Medline des articles publiés
en français, ou en anglais, depuis 1995,
dans le domaine de l’amyloïdose. Les
mots-clés utilisés pour la recherche ont
été: amyloidosis et kidney. La recherche
de littérature a été effectuée entre avril
et septembre 2011. Les articles ont été
inclus dans la liste des références s’ils
étaient jugés pertinents et étaient mentionnés dans le texte.
IMPLICATIONS PRATIQUES
Le diagnostic d’amyloïdose primaire
est, souvent, difficile au début de la maladie, lorsqu’un seul organe est atteint;
Le diagnostic ne peut être confirmé
que par une biopsie;
La prise en charge des patients, atteints d’amyloïdose primaire, est multidisciplinaire et implique, généralement,
l’interniste, l’oncologue, le néphrologue
et le cardiologue;
Dans les formes secondaires, le traitement dépend de la cause;
Le pronostic dépend de l’atteinte des
organes cibles et, en particulier, de
l’atteinte cardiaque dans la forme systémique primaire (AL). Le N-terminal brain
nutriuretic peptide (NT-pro-BNP) a une
valeur pronostique.
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
31
31
DOSSIER
Bibliographie
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marker of myocardial dysfunction in AL amyloidosis.
Circulation 2003; 107:2440-5. [*] à lire
[**] à lire absolument
INPHA-MédiS: au service de la sante
Le laboratoire INPHA-MédiS est une
société algérienne par actions, spécialisée dans l'industrie pharmaceutique
à usage humain, implantée à SidiKaci, dans la wilaya d'El Tarf.
Entrée en production en 2005, INPHAMédiS, dont le système de management est certifié ISO 9001 V8, dispose
d'installations et d'équipements de
haute technologie, dans la fabrication
des formes liquides de 8 millions d'unités, par an; des formes sèches de 12
millions d'unités, par an et des formes
stériles injectables (conditionnement)
32
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
de 5 millions d'unités, par an.
Le Président Directeur Général, le Dr.
Salim Habès affirmera: notre ambition est d'offrir une large gamme de
produits à haute valeur ajoutée, d'une
part et répondre à l'intérêt du patient,
d'autre part.
Pour sa part, le directeur commercial,
M. Walid Wahdan soulignera: notre
souci est de répondre aux besoins du
marché algérien, en priorité et ouvrir
des perspectives internationales, dans
un proche avenir. A cet effet, nous nous
inscrivons dans la dynamique positive
du marché pharmaceutique, en met-
tant à la disposition du patient algérien et des professionnels de la santé,
différentes spécialités répondant à nos
besoins, en terme de santé publique et
se rapportant à un ensemble d'aire thérapeutiques, telles que la cardiologie,
le système nerveux central, l'urologie,
les anti-infectieux , les anti-inflammatoires, la diabétologie, la gastro-entérologie, l'allergologie.
Il convient de signaler que le laboratoire INPHA-MédiS, emploie 260
jeunes personnes (âge moyen de 31
ans), dont 40% sont des femmes
DOSSIER
Pr Mohamed Benabadji*, à Santé Mag,
"Les malades arrivent, souvent,
dans nos services de néphrologie,
à un stade final de la fonction rénale"
Propos recueillis par Tanina Ait
Santé mag: La maladie rénale est-elle
fréquente, en Algérie ?
Pr M. Benabadji: La maladie rénale, en
général, demeure toujours fréquente;
environ, 10% de la population. C’est-àdire, globalement, si on commence à
prendre en considération les indices de
l’atteinte rénale, comme la protéinurie,
l’hématurie, l’hypertension artérielle,
le diabète, qui sont les symptômes
d’une atteinte rénale et qui doivent
être confiés aux néphrologues. Malheureusement, lorsqu’on reçoit, dans
nos services de néphrologie, ce type de
malades, ils sont, toujours, à un stade
final de la fonction rénale. Cela pose
problème, car on est à la dernière roue
de la charrette; néanmoins, on essaye
de faire ce qu’on peut.
Y a-t-il suffisamment de place pour
prendre, dans un premier temps, en dialyse, tous ces patients?
Tout à fait. Tous les malades, en insuffisance rénale terminale, sont pris en
dialyse. Ce qui n’était pas évident il y a
quelques années, où les malades mouraient, faute de moyens. Cependant, la
dialyse n’est qu’une thérapie alternative.
C’est une solution d’attente au traitement de choix, qui est la greffe rénale;
notamment, lorsque nos malades sont
jeunes et la plupart sont jeunes, juste-
ment et c’est pour cela que nous souhaitons développer cette pratique, qui est
insuffisante.
ment d’organes sur le cadavre, bien que
nous souhaitions, à l’évidence, qu’il y ait
moins d’accidents de la route.
Les moyens existent-ils, pour développer la greffe d’organe, en général et la
greffe de rein, en particulier ?
On a tous les moyens de la développer;
mais, malheureusement, on est confronté à des tabous, dus à des pesanteurs
sociologiques. Par exemple, lorsqu’on
est en face d’un accidenté de la route,
qui est dans un coma irréversible, les
parents, paniqués et en plein désarroi,
refusent qu’on prélève les organes de
leur défunt et c’est ainsi qu’on perd des
possibilités, qui auraient pu être exploitées, au bénéfice de toute la population.
Si on prend en référence, au demeurant,
la population française, qu’on connait le
mieux: il y a eu 4000 décès, dus aux accidents de la route, en 2013, pour 60 millions d’habitants; soit, 9 morts par jour;
en Algérie, pays qui compte, environ, 40
millions d’habitants, il a été enregistré,
la même année, 4500 accidentés de la
route. Si on ne pouvait prélever que 500
cadavres (multiplié par deux reins), cela
ferait 1000 personnes sauvées de la dialyse; car, il est clair que, pour un malade
greffé, sa qualité de vie est meilleure et
pour le budget de l’Etat, cette pratique
est, nettement, plus économique.
On espère, donc, concrétiser le prélève-
Comment peut-on agir sur les mentalités, pour faire admettre l’utilité du don
d’organe, en pareille circonstance ?
Il faut expliquer aux gens, dans les
écoles, les mosquées, à travers les médias que lorsqu’on prélève un cadavre,
cela se fait proprement, dans un cadre
légal, digne et c’est une bonne action,
envers Dieu et les hommes. Ainsi, il faudrait qu’il y ait le consentement de tous
et cela nous encouragera, car on veut
bien être utile, dans notre métier, pour
le bien de tout le monde. Les accidents
de la route existent dans le monde entier et le prélèvement sur cadavre, aussi.
Un message ?
Ce que je veux dire, encore, c’est que
le prélèvement sur cadavre permet de
soigner 7 malades. Je m’explique: on
prend les deux reins, le cœur, le poumon, le foie, les intestins et le pancréas,
pour soigner le diabétique et cela est un
grand potentiel qu’il faudrait, absolument, exploiter
* Pr Mohamed Benabadji,
chef de service néphrologie,
au CHU de Béni-Messous – Alger.
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
33
33
RECHERCHES MÉDICALES
Approche diagnostique et
thérapeutique de la dystrophie
musculaire de Duchenne:
A propos de 09 cas
Par A.I. Tatai, A. Chekiri, A. Charrallah, M. Sadibelouiz*
naire, afin d’améliorer leur mode de vie.
09 garçons ont été recrutés à notre niveau, dans le cadre de bilan d’une myopathie de Duchenne, confirmé par la
biopsie musculaire et l’étude génétique,
ses patients ont bénéficié d’un corticothérapie depuis 2008, avant et après arrêt de la marche, la mesure de la fonction
motrice MFM a retrouvé un gain de 3 à 4
points, au bout de 06 mois de traitement
quotidien et une nette amélioration des
indices spirométriques.
Conclusion: La corticothérapie est la
seule médication, couramment utilisée,
pour décliner la faiblesse musculaire
chez les DMD, qui réduit les risques de
scoliose et stabilise la fonction respiratoire.
INTRODUCTION
La dystrophie musculaire de Duchenne
est une myopathie héréditaire progressive et d’évolution sévère, la plus fréquente, qui atteint une naissance sur
6000 naissances masculines, récessive
liée à l’X, causée par un trouble d’expression de la dystrophine, essentielle dans le
maintien de l’intégrité des fibres musculaires lors de la contraction.
La particularité diagnostique de cette
myopathie doit se baser sur des faits
marquants, qui jalonnent son développement, lors de la petite enfance: les types
de symptômes, l’âge de leur apparition,
les chutes fréquentes, l’âge d’arrêt de
la marche… Les aspects dystrophiques
tissulaires à la biopsie musculaire et
l’absence d’expression de la dystrophie à
l’immunohistochimie, les mutations des
exons au niveau du gène de cette protéine.
Depuis 2001, plusieurs schémas thérapeutiques ont été essayés: anabolisants
stéroïdes, coenzyme Q10, carnitine, antiinflammatoire et antioxydants et extrait
du thé vert, préconisé par certains praticiens. Seule la corticothérapie (prédnisone/déflazacort), au long court et précoce, a donné des résultats prometteurs.
L’objectif de cet article est de cerner
les difficultés de la prise en charge des
patients DMD, qui doit être multi-discipli34
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
Mots clés: dystrophie musculaire de Duchenne, corticothérapie, biopsie musculaire, multidisciplinaire, MFM.
La Dystrophie musculaire de Duchenne
représente la forme la plus connue des
dystrophinopathies, confirmée génétiquement, à la fin des années 1980, au
niveau du chromosome Xp21.2, par clonage positionnel; le gène de la protéine
sous-membranaire, nommée la dystrophine, jouant un rôle-clé dans la solidité
de la membrane musculaire, qui est manquante dans la forme du Duchenne.
L’histoire, naturelle, de la maladie affecte
les garçons dès les premiers mois de la
marche, souvent retardée et perturbée,
des faiblesses musculaires des ceintures,
puis en distale. Ces enfants auront besoin d’utiliser la chaise roulante à l’âge de
09 ans et développent, au fil des années,
des troubles respiratoires et des complications cardiaques, qui sont fatales.
L’apport de la géni-thérapie expérimentale, en cours et la prise en charge, multidisciplinaire et rigoureuse, ont permis de
changer le courant de l’histoire naturelle
de cette maladie; de telle condition qu’on
leur a permis une survie, jusqu’à la 3ème
décade, avec une meilleure qualité de vie.
PATIENTS ET MÉTHODE
Nous avons 09 patients, de sexe masculin, reçus à notre consultation externe,
venant de plusieurs régions de l’Algérie
(Est, Extrême sud-est, Sud-ouest algérien et des wilayate du Centre), sans
particularité régionale évidente et sont
âgés entre 06 et 15 ans (nés entre 1997
et 2006).
Evaluation de leur état, en fonction
des données anamnestiques
Notion de consanguinité:
Absence de notion de consanguinité,
dans 07 cas;
02 enfants sont issus d’un mariage
consanguin et seulement un cas présente un oncle maternel atteint de
DMD;
Les études ont montré que, dans 2/3
des cas, absence de cas similaire dans
la famille; ce qui retarde la confirmation
du diagnostic, d’une part et confirme
l’augmentation de l’incidence de nouvelles mutations, d’autre part. (réf 4)
Données de développement psychomoteur:
Notion de rareté de mouvements actifs fœtaux, retrouvé dans 03/09 cas,
rapportés par les parents;
Notion d’hypotonie néonatale: 04
cas/09;
Retard d’acquisition de la position
assise et debout: 03 cas/09;
Retard d’acquisition de la marche, de
18 mois jusqu’à 24 mois,est retrouvée
dans 06 cas, un cas non précisé et un
cas de marche acquise à l’âge de 13
mois, selon les parents;
01 cas de bronchiolite à répétition,
dès la première année de vie et un cas
de souffrance néonatale, de cause non
expliquée;
La notion de traumatismes, suite à des
chutes fréquentes, occasionnant un hématome extradural, chez l’un, à l’âge de
03 ans, et une fracture du fémur, à l’âge
de 04 ans, chez un autre;
Selon la littérature, le point commun
reste le retard à la marche, à 18 mois,
rapporté dans plusieurs études. (Réf 2)
RECHERCHES MÉDICALES
Motif de la première consultation:
Difficulté à la remontée des escaliers:
05 cas, dès l’âge de la marche;
Difficulté à la course et chutes fréquentes: 07 cas;
Difficulté à se relever de la position
assise: 05 cas;
Age du début des troubles, remarqué
par les parents: 03 ans, dans 5 cas; plus
de 05 ans, chez 04 patients;
Les troubles remarqués sont précoces
et ces enfants courent peu, ou pas du
tout.
Données de l’examen clinique à la première consultation:
L’âge de la première consultation, chez
un neurologue: environ, à l’âge de 5 ans.
02 patients, originaires du Sud algérien, sont venus portés par leurs parents;
Un autre, consultant à l’âge de 11 ans,
après arrêt de la marche et développement de rétractions, au niveau des genoux et des tendons d’Achille.
AGE DE LA PREMIÈRE
CONSULTATION
NOMBRE DE PATIENTS
De 0 à 03 ans
00
De 03 à 04 ans
02
De 05 à 6 ans
03
De 06 à 10 ans
02
Plus de 11 ans
02
Total
09
Tableau 01: âge de la première consultation, chez
un neurologue
On remarque le retard d’âge de la première consultation; spécialement pour
les enfants du Sud, qui sont les moins
médicalement assistés. (photo1)
DONNÉES CLINIQUES
Les données cliniques sont interprétées
en fonction de plusieurs paramètres:
l’histoire familiale, si consanguinité
existe; les éléments du développement
psychomoteur (marche après 18 ans,
digitigrade) et les éléments de l’activité
journalière (enfant court mal, ou pas du
tout; ne monte pas les escaliers; ne saute
pas pieds joints et la fréquence des
chutes), le testing musculaire et le score
fonctionel du MFM (réf 7) permettent de
classer l’état de l’enfant dans une des 03
phases de la fonction motrice: Progress
(4-6), plateau (4-8), décline (plus de 08
ans). Cette classification est essentielle
et décisionnelle, dans un but thérapeutique (Photo 2).
Sur le plan clinique: l’évaluation par le
testing musculaire, selon la classification internationale du Medical Research
Council, de 0 à 5: des muscles de la
ceinture pelvienne et scapulaire, les
cotations au premier examen clinique,
étaient entre 2 et 4, surtoutau niveau
des muscles de la ceinture pelvienne. 03
enfants, âgés respectivement de 06, 09
et 11 ans, étaient déjà non-autonomes à
leur déplacement et présentaient un déficit des muscles distaux des membres
inférieurs.
Généralement, l’atteinte des muscles
fléchisseurs du cou, les extenseurs du
poignet, les biceps et triceps, les quadriceps, ainsi que les jambier antérieurs,
sont plus atteints que les extenseurs du
cou, les fléchisseurs du poignet, des deltoïdes, ischio-jambiers, et les jumeaux
(réf 6);
L’hypertrophie des mollets est retrouvée, chez tous les cas;
2 cas de scoliose, par atteinte de la musculature axiale;
02 cas de rétractions achilléennes, avec
marche digitigrade et 02 cas de rétraction, au niveau des genoux;
Le signe de Gowers varie entre 05 à
20 secondes, de la position couchée à
la position assise, puis à la position debout, si possible.
SIGNES CLINIQUES
NOMBRE DE PATIENTS
NOMBRE DE PATIENTS
Déficit des muscles de
la ceinture pelvienne
09
Déficit des muscles de
la ceinture scapulaire
07
Hypertrophie des
mollets
09
Rétraction achilléennes
et des genoux
04
Scoliose
02
Marche dandinante
06
Signe de Gowers
06
Tableau 02: Résumant les données cliniques pour
chaque patient
L’évolution clinique est sévère et progressive. Le phénotype du DMD peut
être variable. Les déficits musculaires
atteignent, certes, les mêmes groupes
musculaires, chez les enfants atteints;
mais, à des degrés variables.
Evaluation du quotient intellectuel: QI
dans les normes, par rapport à l’âge,
chez 05 enfants;
03 cas de débilité légère, mais sont toujours scolarisés.
Biologie: Tous les patients ont bénéficié,
au moins, d’un dosage des taux de créatine kinases, qui sont très élevées (entre
10 et 25 fois la normale).
Données électro-myographiques:
Tous les patients ont bénéficié d’un
EMG, qui montre un tracé de type myo-
gène, sans particularité électrique évidente.
Biopsie musculaire: 08 patients ont bénéficié d’une biopsie musculaire, d’une
étude morphologique dans les 08 cas;
seulement 05 cas ont bénéficié d’une
immuno – histochimie.
L’examen microscopique du prélèvement biopsique, fixé à l’iso pentane refroidi à -160°C, retrouve une importante
inégalité du diamètre des fibres musculaires, au contour arrondi. Les noyaux
sont, le plus souvent, internalisés. Des
lésions de nécrose et régénération cellulaires sont observées. L’endomysium
et le périmysiumsont le siège d’une fibrose marquée. L'ensemble correspond
à un aspect dystrophique.
L'étude d’immunohistochimie effectuée
objective l'absence totale de la dystrophine (dys1, dys2 et dys3), avec présence de quelques fibres persistantes
(dys2). Présence du reste des protéines
membranaires, à savoir: alpha, béta,
gamma et delta sarcoglycanes, ainsi
que la dysferline.
PATIENT
01
RÉSULTAT GÉNÉTIQUE
Délétion 43,44, 45, 46, 47, 48, et 50
02
Délétion exon 45
03
Absence de délétion
04
Délétion 46, 47, 48, 50, 51,52
05
Délétion exon 50
06
Délétion 3, 4, 6, 8, 12, 13, 17,19
07
Délétion exon 50
08
Délétion exon 46, 47,48
09
Délétion exon 12, 13, 17, 19,43
Données génétiques: méthode Multiplex Polymérase Chain Reaction
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
35
35
RECHERCHES MÉDICALES
Il existe une discordance entre les données cliniques et le nombre de délétion du gène. Par exemple, le patient
N 4 présente un nombre important de
délétions, avec une clinique moins alarmante. Par contre, le N 5 présente une
seule délétion; or, cet enfant a perdu la
marche précocement. D’où, nous laisse
appuyer l’hypothèse d’absence de corrélation phénotype/génotype. (réf. 2)
Environ 213 cas de nouvelles mutations
ont été décrits, à ce jour. (réf. 6)
Multiplex PCR reste insuffisante, pour le
diagnostic génétique, qui ne couvre pas
tout le gène; d’où, l’intérêt de compléter
par les résultats de immunohistochimie,
qui montrent une absence, ou un faible
marquage aux anticorps Dys 1, Dys 2,
Dys 3.
Exploration fonctionnelle respiratoire:
faite avant l’initiation du traitement: en
se basant sur les indices de la capacité
vitale, VEMS et Rapport VEMS/CV.
04 patients ont pu bénéficier d’une
exploration fonctionnelle respiratoire,
avant l’initiation du traitement: un patient avait un syndrome obstructif léger,
01 présentait un syndrome restrictif, les
02 autres étaient dans les limites de la
normale.
L’enfant qui a un syndrome obstructif
léger a, déjà, perdu la marche à l’âge de
09 ans, avant l’initiation du traitement.
Exploration cardiaque: ECG et Echocardiographie- tous les bilans cardiologiques étaient dans les limites de la
normale.
PRISE EN CHARGE
Thérapeutique: les schémas
La corticothérapie est la seule médication, couramment utilisée, pour décliner
la faiblesse musculaire chez les DMD, qui
réduit les risques de scoliose et stabilise
la fonction respiratoire.
Tous les patients ont initié le traitement
corticoïde dès la confirmation diagnostique, même tardive. Certains étaient,
déjà, sur chaise roulante. Pour les plus
jeunes et toujours autonomes, une corticothérapie quotidienne, à dose de 0,75
mg/kg/jour de prédnisone, associée aux
adjuvants. Pour les plus grands, une corticothérapie discontinue de 10 jours par
mois (0,6 mg/kg par prise). Pour les non
autonomes, dose journalière 0,3 mg/
kg/j.
Surveillance:
Consultation tous les 02 mois, pour
scorer leur MFM (réf 7); surveillance des
effets secondaire du traitement; une
exploration fonctionnelle respiratoire, un
ECG, une échocardiographie et un den36
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
sitomètre osseux annuel.
Résultat:
Après un recul de 04 ans, 05 enfants
sont sur chaise roulante. Certes, un résultat décevant, mais 3 enfants étaient,
déjà, non autonomes, dès l’initiation du
traitement; 02 enfants chez qui on a
beaucoup hésité et donné un traitement
discontinu et qui ont perdu leur autonomie à 11 ans; un enfant a rapidement
régressé, suite à l’arrêt, volontaire, de
la corticothérapie, par ses parents mal
conseillés. Il n’avait que 08 ans.
Les 03 autres, chez qui le traitement
a été initié précocement entre 05 et 07
ans, sont âgés, maintenant, de 12, 10,
et 06 ans. Ils marchent toujours et ont
obtenu un gain de 03 à 04 points de leur
score Motor Function Mesure, remarqué
après 06 mois de traitement, une amélioration de leur capacité vitale fonctionnelle à l’EFR.
Les résultats densitométriques ont
été un peu décevants, avec l’apparition
d’une ostéopénie chez 05 patients; ce
qui nous a conduits à prescrire du calcium 1000 mg/jour, associé à la vitamine
D, ampoule buvable 100 000 U, mensuelle.
DISCUSSION
L’initiation du traitement doit être une
décision personnelle du clinicien, basée
sur l’état fonctionnel de son patient; de
façon préférable, lors de la phase progress (entre 4 et 6 ans), après avoir été
immunisé contre la varicelle;
Plusieurs schémas ont été publiés, depuis cette dernière décennie. L’utilisation de la prédnisone, ou le Déflazacort
(non commercialisé, en Algérie) de façon
journalière, à raison 0.75 mg/kg, pour la
première et 0,9 mg /kg, sur une durée
de 06 mois, a montré un ralentissement
de la progression du déficit moteur, par
rapport à de moindres doses et sur une
durée discontinue (2 jours sur 7; 10 jours
sur 20).
Le but est de continuer le traitement,
après l’arrêt de la marche, pour préserver une bonne force musculaire de la
ceinture scapulaire, réduire la scoliose et
de retarder la survenue de l’atteinte respiratoire et cardiaque, qui sont souvent
fatales.
En considérant les effets secondaires
(hirsutisme, acné, troubles du comportement, gain de poids, risque de
développer une cataracte…) réduire les
doses, si nécessaire à 0,30 mg / kg/j, ou
en shéma discontinu à forte dose, 2 jours
par semaine, ou faire des fenêtres thérapeutiques de 10 à 20 jours.
Les dernières études ont montré une
nette amélioration de la fraction d’éjection du ventricule gauche, après 06 à 12
mois, après traitement sous IEC inhibiteur de l’enzyme de conversion, seul ou
associé aux bêtabloqueurs, des chiffres
de 47% à 52%. (réf 7)
Par contre, la combinaison des 02 molécules ne montre aucune modification
des résultats; d’où, l’intérêt de les prescrire, au patient, à partir de 10 ans.
CONCLUSION
Malgré le modeste échantillon de cette
étude, cela a permis de découvrir cette
myopathie, qui a, longtemps, fait l’objet
de nombreuses publications et de travaux de recherche regroupant des centaines de praticiens et généticiens du
monde entier, TREAT-NMD et RAND,
dans l’espoir de retrouver l’issue thérapeutique de ce mal, qui tue nos enfants;
et nous, en tant que cliniciens, la nécessité de maîtriser notre clinique, pour
poser le diagnostic précocement et pour
une prise en charge efficace, permettant
à ces enfants quelques années de plus
de liberté de mouvements
Références
1) K.Bushby, J.Bourke, R.Bullok, M.Eagle,
M.Gibson, J.Quinby: The Multidisciplinary management of Duchenne Muscular Dystrophy, Currents Pediatrics 2005, 15, 292-300.
2) Gregory A. Cox, Yoshihide Sunada, Kevin. P,
Campbell et Jeffrey S. Chamberlain: Dp 71 can
restore the dystrophin associated glycoproteine
complex in muscle, Nature Genetics, Vol 8th,
December 1994.
3) Katharine Bushby, Richard Finkel, David J
Birnkart, Laura E case, Paula R Clemens, Linda
Cripe, Ajay Kaul et al: Diagnosis and management of Duchenne Muscular Dystrophy, part 1,
Review Published on line Nov 30, 2009, D01-101016/S1474.
4) C. Fernandez, C Halbert, A.Maves de Paula,
D. Figarella-Brauger, B.Chabrol, J-f Pellissier:
Dystrophies musculaires liées au gène DMD:
myopathie de Duchenne, myopathie de Becker,
formes féminines et atypies; EMC2010, 17-175B-10.
5) Neurology Medscape: Study co-author Dr
Hugh D Allen; Reuther Health; AMJ Cardiology
2012.
6) Dinesh G Nair, MD, PhD, Chief Edito Nicholas
Lorenzo: Dystrophinopathies Clinical Presentation, Neurology Mayo Clinic, 27 June 2012.
7) Motor Function Measure Scale.
* A.I. Tatai,
A. Chekiri,
A. Charrallah,
M. Sadibelouiz ,
Service de Neurologie, EHS Aït Idir,
Alger.
RECHERCHES MÉDICALES
Lupus érythémateux disséminé (LED)
DESCRIPTION
Le lupus, appelé aussi lupus érythémateux disséminé (LED), est un trouble
inflammatoire chronique, qui peut
atteindre n'importe quelle partie du
corps, y compris la peau, les articulations, les reins, le cœur, les poumons et
le système nerveux. Parmi les maladies
auto-immunes (maladies où le système
immunitaire d'une personne attaque les
tissus et les organes de la personne), le
lupus est une des plus courantes.
Le lupus est imprévisible et dure toute
la vie. Il touche, habituellement, les
femmes qui sont jeunes (de 18 à 40 ans),
mais les personnes plus jeunes, ou plus
âgées, ainsi que les hommes peuvent,
aussi, en être atteintes. Le ratio est de
12 femmes, contre 1 homme, pour les
personnes âgées de 15 à 40 ans. Le lupus
atteint 1 homme sur 10 000, 1 femme de
race blanche sur 1 000 et 1 femme de
descendance africaine sur 250.
Autrefois, seuls les cas les plus graves
étaient diagnostiqués, et les traitements
étaient très limités. En conséquence, le
taux de survie était faible. De nos jours,
les médecins savent reconnaître la maladie beaucoup plus tôt, y compris les cas
plus légers, et ils disposent de meilleurs
traitements, pour prendre en charge
cette affection. Ainsi, malgré l'absence
de moyens pour guérir le lupus, le taux
de survie, 10 ans après le diagnostic, se
situe à près de 90 %.
Néanmoins, les traitements existants
comportent, tous, des risques et des
effets secondaires. Les personnes, atteintes de lupus, doivent, parfois, choisir entre ces risques et les effets de leur
maladie. Dans certains cas, l'atteinte est
modérée, et un traitement minime est
requis.
CAUSES
Il est, généralement, accepté que le lupus est causé par des altérations du système immunitaire. La fonction normale
du système immunitaire est de combattre les bactéries et les virus, considérés comme des étrangers. Dans le
cas du lupus, le système immunitaire ne
reconnaît pas les constituants du corps
de la personne et produit des anticorps,
qui s'attaquent à ses tissus (des autoanticorps). Ce phénomène est qualifié
d'auto-immunité.
La cause exacte du lupus reste, à ce jour,
inconnue. De multiples facteurs entrent
en cause, dans l'établissement de la
maladie, dont l'hérédité et certains facteurs environnementaux. Il est, communément, admis que la lumière du soleil
peut en déclencher les symptômes.
Parmi les autres facteurs déclenchant,
on trouve les infections virales, le stress
causé par une maladie, parfois la grossesse et certains médicaments. Étant
donné le plus grand nombre de femmes
atteintes que d'hommes, il a été proposé que les estrogènes pouvaient y jouer
un rôle.
SYMPTÔMES ET COMPLICATIONS
Les symptômes du lupus peuvent ressurgir de temps à autre, puis disparaître
pendant un certain temps. La période
sans symptômes est qualifiée de rémission.
Le lupus peut être léger, ou grave, et
peut causer toute une variété de symptômes, y compris:
une douleur articulaire, une enflure
et une rougeur, qui peuvent apparaître
et disparaître. Elles affectent, couramment, les doigts et les poignets;
des éruptions cutanées, particulièrement le long du nez et des joues, appelées « érythème en papillon »;
de la fièvre;
une perte de poids;
une douleur à la poitrine, attribuable à
l'inflammation du cœur et des poumons
(sérosite);
une toux et des problèmes respiratoires;
une sensibilité aux rayons du soleil, qui
peut, parfois, se manifester en dépit de
l'emploi d'un écran solaire;
une fatigue inexpliquée;
le phénomène de Raynaud (les doigts
et les orteils deviennent bleus, puis
blancs, quand ils sont exposés au froid;
ils redeviennent rouges et chauds, au
fur et à mesure que la circulation sanguine redevient normale);
une perte de cheveux;
des maux de tête;
des pensées désordonnées, ou une
confusion;
une labilité émotionnelle (des émotions changeantes, ou incontrôlables,
ou des sautes d'humeur).
Les complications du lupus provoquent
une inflammation, qui peut toucher
d'autres parties du corps (tels que les
reins, le système nerveux central et le
cœur). Si des complications se manifestent, elles le font, habituellement, au
cours des quelques premières années,
qui suivent le diagnostic initial.
L'inflammation rénale, causée par le
lupus, n'entraîne généralement pas de
symptômes, au début; par conséquent,
bon nombre de personnes ne remarqueront rien, tant que le problème n'aura pas atteint un stade avancé. Une fois
le processus en cours, d'autres signes
peuvent se manifester, tels qu'un ballonnement, une enflure des chevilles et
des analyses de sang et d'urine anormales. Une insuffisance rénale peut finir
par se développer.
Le médecin exercera un suivi étroit,
afin de déceler tout signe d'un début
d'atteinte rénale, comme la présence de
protéines dans l'urine et d'autres anomalies.
Il arrive, souvent, que le lupus accélère, ou aggrave le processus d'athérosclérose (durcissement des artères); le
médecin pourrait, donc, également, surveiller la présence de facteurs de risque,
comme l'hypertension artérielle, une
augmentation du taux de cholestérol et
les signes de diabète. En outre, le médecin pourrait vous recommander de ne
pas fumer. Il est très important d'avoir
un traitement contre l'athérosclérose.
DIAGNOSTIC
La recherche d'anticorps antinucléaires
(AAN) est l'analyse la plus importante,
pour diagnostiquer le lupus, car la plupart des personnes, atteintes du lupus,
présenteront un taux élevé d'anticorps
antinucléaires dans le sang. Par contre,
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
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37
RECHERCHES MÉDICALES
le diagnostic ne sera pas fondé, uniquement, sur les résultats du test pour les
AAN, parce que plusieurs personnes
peuvent avoir un résultat positif sans
être atteintes du lupus; en outre, le taux
d'AAN peut être élevé à cause d'autres
maladies auto-immunes. Dans le cas
d'une personne dont le test a donné
un résultat positif, mais qui ne présente
aucun signe clinique, ni aucune autre
anomalie aux analyses de laboratoire, la
probabilité d'avoir une forme complète
du lupus, au cours de la vie, est d'environ
5 %.
L'analyse des antécédents médicaux et
un examen physique contribueront, de
façon importante, au diagnostic final.
D'autres examens, tels que des épreuves
de la fonction rénale, des radiographies
des articulations et un examen d'imagerie par résonance magnétique (IRM), aideront à préciser l'étendue de l'atteinte.
En outre, des examens pour le cœur et
un électroencéphalogramme (un test
qui mesure l'activité électrique du cerveau) pourraient s'avérer nécessaires,
pour déceler le neurolupus (lupus qui
atteint le cerveau).
TRAITEMENT ET PRÉVENTION
Le traitement médicamenteux contre
le lupus dépend de sa gravité. Dans
certains cas, les médicaments peuvent
même ne pas s'avérer nécessaires.
Les médicaments couramment prescrits
sont:
des analgésiques, comme les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)
certains de ces médicaments sont
vendus sans ordonnance, mais consultez, d'abord, votre médecin, ou votre
pharmacien, avant de commencer à en
prendre un;
l'hydroxychloroquine*, souvent employée en association avec d'autres
médicaments, pour aider à maîtriser le
lupus;
les corticostéroïdes oraux constituent
le principal traitement, dans la plupart
des cas - ce type de médicament aide
à atténuer l'inflammation et les symptômes associés;
les immunosuppresseurs (par ex. le
cyclophosphamide, le mycophénolate,
l'azathioprine) empêchent le système
immunitaire de s'attaquer aux organes
et aux tissus du corps, et ils sont employés quand le rein, le cerveau, ou un
autre organe vital est touché.
Bien que tous ces médicaments s'avèrent
utiles et sauvent, parfois, la vie de la personne, ils peuvent, cependant, avoir des
effets secondaires très graves. Discutez,
38
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
sérieusement, avec votre médecin des
bienfaits et des risques du traitement.
Vous souhaiterez, peut-être, également,
discuter de vos médicaments avec un
professionnel de la santé, qui en connaît
bien l'usage; par exemple, un rhumatologue (médecin spécialisé dans le diagnostic et le traitement de l'arthrite et
d'autres maladies, qui touchent les articulations, les muscles et les os).
Les conseils ci-dessous pourraient aider
les personnes atteintes de lupus:
Consultez un rhumatologue. Les rhumatologues sont les médecins qui ont
le plus d'expérience et de connaissances
en matière de diagnostic et de prise en
charge du lupus sous toutes ses formes.
La grossesse déclenche, parfois, le lupus
ou peut l'aggraver s'il est, déjà, présent;
par contre, il se peut que la grossesse
n'ait aucun effet particulier sur le lupus.
Si vous êtes atteinte de lupus et que vous
planifiez une grossesse, ou si le lupus se
manifeste, pour la première fois, pendant
votre grossesse, vous devriez être suivie
à la fois par un obstétricien - ou un gynécologue - expérimenté dans les grossesses à risque et par un rhumatologue.
Accordez-vous beaucoup de temps,
pour le repos et la détente.
Faites l'apprentissage de méthodes de
gestion du stress.
Consultez, régulièrement, le médecin
et le dentiste.
Participez, régulièrement, à des
séances d'exercice d'intensité modérée.
Adoptez et maintenez un régime alimentaire équilibré et bon pour la santé.
Ne fumez pas.
Assurez-vous que votre taux de vitamine D atteint, largement, le taux recommandé.
Ne prenez aucun médicament en vente
libre sans, d'abord, demander conseil à
un professionnel de la santé.
Si vous prenez un corticostéroïde, ou
un autre immunosuppresseur, signalez
tout signe d'infection à votre médecin.
Évitez toute exposition, excessive, aux
rayons ultraviolets du soleil; portez un
chapeau, des lunettes de soleil et des
vêtements à manches longues, en plus
d'utiliser un écran solaire, qui offre un
facteur de protection solaire (FPS) d'au
moins 15 et qui protège contre les rayons
ultraviolets, tant A que B (UVA et UVB).
Envisagez de vous joindre à un groupe
de soutien, qui vous aidera à vous adapter à divers aspects de la maladie.
Informez-vous, le plus possible, au sujet du lupus
Les antipaludéens de synthèse:
Traitement de fond efficace dans les formes purement cutanées de la maladie, les petites poussées
avec sérites, arthrite, fièvre; ils sont sans effet sur
les autres localisations, en particulier rénales et
cérébrales.
Deux produits sont utilisés en France: L'hydroxychloroquine et la Chloroquine.La posologie est
comprise entre 200 et 400 mg. Il existe une toxicité oculaire potentielle, avec des
dépôts cornéens modérés, peu gênants, qui disparaissent à l'arrêt du traitement et surtout, une
rétinopathie de surcharge. Avant ce traitement, il faut, donc, réaliser un examen de la vision des couleurs et le répéter tous
les 6 mois, pendant les deux premières années.
Ensuite, surveillance annuelle.
Anti-inflammatoires et antalgiques:
Permettent de contrôler les phénomènes articulaires.
Corticoïdes locaux:
Dans les lupus subaigus et discoïdes.
La corticothérapie:
C'est la base du traitement du lupus. La posologie
sera fonction de la gravité des symptômes.
faibles doses: <0.5 mg/Kg
C'est la corticothérapie que l'on propose dans les
poussées minimes de la maladie (sérite), manifestation cutanée résistante aux autres traitements.
fortes doses: de 1 mg à 2.5mg/Kg
C'est la corticothérapie réservée aux atteintes
sévères rénales, ou cérébrales. A ces doses, les
effets secondaires, à court terme et à long terme
(risque cardio-vasculaire), sont majeurs.
Les bolus cortisoniques (15 mg/Kg) sont de plus
en plus employés, pour bloquer les lésions de vascularite, avec un relais per os.
Les immunosuppresseurs:
C'est le traitement des formes graves de LEAD. En
pratique, ils ne sont utilisés que dans les formes
néphrologiques graves, ou dans les formes où la
corticothérapie s'avère insuffisante.
Les produits utilisés sont l'azathioprine et le cyclophosphamide.
Ils nécessitent une surveillance étroite; d'autre
part, le cyclophosphamide est cancérigène.
Les plasmaphérèses:
Leur principe est d'éliminer de la circulation les
ICC, principales causes des vascularites, en remplaçant le plasma du malade par un plasma, ou de
l'albumine de donneur.
Il faut 5 à 10 séances, sur 2 à 3 semaines. Ce traitement est, non seulement, lourd mais coûteux et
__ graves; en particulier,
donc, réservé aux formes
rénales, neurologiques, ou myocardiques, en association avec les traitements précédents.
____________________________
* Tous les médicaments ont à la fois une dénomi-
nation commune (le nom générique) et un nom
de marque ou marque. La marque est l'appellation
qu'un fabricant choisit pour son produit (par ex.
Tylenol®). Le nom générique est le nom du médicament en médecine (par ex. l'acétaminophène).
Un médicament peut porter plusieurs noms de
marque, mais il ne possède qu'un seul nom générique. Cet article répertorie les médicaments par
leur nom générique. Pour de plus amples renseignements sur les noms de marque, consultez votre
médecin ou un pharmacien.
RECHERCHES MÉDICALES
Les Biphosphonates et leur application,
dans le cancer du sein métastatique
Dr N. Ameziane - Pr Louafi Djellali *
dissémination métastatique mais également des processus qui sont plus spécifiques au tissu osseux, à savoir l’invasion
des cellules tumorales dans l’environnement osseux, nidation des cellules tumorales dans la moelle osseuse et ostéomimétisme [5].
L’apparition de métastases osseuses
constitue un évènement majeur et fréquent dans l’évolution de plusieurs types
de cancers. Le pourcentage des patientes
avec un cancer du sein avancé et présentant des métastases osseuses est estimé
entre 65-80% [1].
De toutes les tumeurs solides, le cancer du
sein métastatique est celui qui présente
le taux le plus élevé de complications
osseuses.
L’objectif du traitement des métastases
osseuses se résume en trois points essentiels pour le patient : le soulager en luttant
contre la douleur, améliorer sa qualité de
vie et prolonger la survie.
Les patientes qui n’ont que des métastases osseuses ont davantage de complications que les patientes présentant
des métastases viscérales associées [4].
La survie médiane des patientes ne présentant que des métastases osseuses est
d’environ deux ans mais elle n’est que de
six mois en présence de métastases hépatiques [2,4]. Une étude de cohorte incluant
près de 36 000 nouveaux cas de cancer
du sein suivis jusqu’à neuf ans a montré
que la survie médiane des patientes ayant
des métastases osseuses était de 16 mois,
cette médiane de survie passe à seulement sept mois en cas de survenue d’une
complication osseuse [3,4].
Les métastases osseuses peuvent engendrer des douleurs sévères et invalidantes
parfois rebelles aux traitements antalgiques faisant appel à la chirurgie et la
radiothérapie.
PLUSIEURS TYPES DE MÉTASTASES OSSEUSES
Ces métastases osseuses sont très souvent ostéolytiques, c'est-à-dire du fait
d’une destruction osseuse importante, et
parfois ostéo-condensantes, et ce du fait
d’un excès de formation osseuse, on peut
également retrouver une association des
deux, dites métastases osseuses mixtes.
Cela s’explique par le fait que les cellules
tumorales sécrètent différents facteurs qui
perturbent le remodelage osseux.
En effet, elle est un réservoir de facteurs
de croissance et de calcium qui, une fois
libérés de la matrice en cours de dégradation, exercent une action mitogène sur les
cellules tumorales [5]. Il existe donc au site
de la métastase osseuse un cercle vicieux
où les phénomènes de résorption/formation osseuse et de prolifération tumorale
s’entretiennent mutuellement. Les mécanismes qui précèdent la survenue de ces
métastases osseuses font non seulement
intervenir des processus communs à toute
Traitements médicaux des métastases
osseuses :
Il existe une large gamme de médicaments
antalgiques et que l’on regroupe en trois
paliers, allant des antalgiques simples (1er
palier) indiqués dans le traitement des
douleurs légères aux antalgiques type
opioïdes mineurs (2ème palier) pour les
douleurs modérées et l’usage d’opioïdes
majeures (3ème palier) pour les douleurs
intenses et ne cédant pas aux antalgiques
des deux premiers paliers. En sachant que
l’on a souvent recours à des associations
médicamenteuses. Les douleurs dues aux
métastases osseuses sont souvent soulagées par les anti-inflammatoires non stéroïdiens. Devant des douleurs intenses, on
peut traiter un patient par des opioïdes
sans passer par les deux premiers paliers
afin de soulager au plus vite le patient de
sa souffrance.
En plus de ces traitements antalgiques, le
traitement des métastases osseuses passe
par l’usage de biphosphonates et qui ont
pour fonction d’agir directement au niveau
de l’os. Ce qui va permettre de traiter la
métastase osseuse donnant à la fois un effet antalgique et réduit les complications
secondaires à ces lésions osseuses.
Les biphosphonates font partie de l’arsenal thérapeutique dans la prise en charge
thérapeutique des cancers.
BIPHOSPHONATES
Les biphosphonates sont utilisés depuis
une dizaine d’années, et leur prescription
ne cesse d’augmenter.
Ils sont prescrits dans des cas relativement
bénins tels que la prévention de l’ostéoporose de la femme ménopausée, maladie
de Paget, algodystrophie, mais aussi dans
des cas plus sévères pour traiter des patients atteints de cancer avec métastases
osseuses.
L’incidence des évènements osseux a
nettement diminué aujourd’hui grâce à
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
39
39
RECHERCHES MÉDICALES
l’usage précoce et prolongé des bisphosphonates ainsi que le développement et
l’amélioration de l’efficacité des traitements anti-cancéreux [4].
L’efficacité des biphosphonates dans le
traitement des métastases osseuses est
basée sur l’incidence et le délai d’apparition
des évènements osseux (EVO) et le taux de
morbidité d’origine osseuse. L’événement
osseux se définit comme étant la survenue
d’une fracture pathologique, compression
médullaire, d’une hypercalcémie maligne
et la nécessité de recourir à une radiothérapie ou une chirurgie (cimentoplastie) [7].
Ce sont de petites molécules inorganiques
dérivés de l’acide phosphorique qui se lient
à une substance appelée hydroxyapatite
sur la surface des os endommagés entrainant une puissante inhibition de la résorption osseuse. Ils sont absorbés par les ostéoclastes, perturbent leur fonctionnement
et induisent leur apoptose (mort cellulaire)
[8]. Ils évitent donc la destruction osseuse
due aux ostéoclastes. Les biphosphonates
trouvent leur indication dans le traitement
de l’hypercalcémie maligne, métastases
osseuses associées ou non à une hypercalcémie, en complément du traitement spécifique de la tumeur primitive, mais aussi
dans le cadre de la prévention et le traitement de l’ostéoporose.
Certains biphosphonates s’administrent
par voie orale tels que l’Etidronate, Clordronate, Alendronate, Ibandronate, et d’autres
s’administrent par voie intraveineuse (IV)
tels que le Pamidronate, Ibandronate et
l’acide Zoledronique.
Un avis d’expert sur l’utilisation des biphosphonates dans le traitement des tumeurs
solides (Annals of Oncology, Mars 2008)
recommande l’utilisation de la voie intraveineuse par rapport à la voie orale du fait
de ses inconvénients, à savoir, leurs effets
indésirables digestifs et le risque d’une
mauvaise observance. La durée du traitement recommandée par voie IV est généralement de 2 ans, cette durée pouvant être
prolongée à 3 ans selon l’appréciation du
praticien.
Denosumab : Inhibition du RANK Ligand
dans le traitement des métastases osseuses :
L’ostéolyse tumorale est due à une stimulation considérable de la résorption osseuse
médiée par les ostéoclastes sous l’effet de
produits de sécrétion des cellules tumorales. Les cellules tumorales augmentent
l’expression et la sécrétion du RANKL par
les cellules de la lignée ostéoblastique et
les ostéocytes. Le RANKL augmente la
formation, l’activité et la survie des ostéoclastes, tandis que les produits de résorption de la trame osseuse vont stimuler la
croissance des cellules tumorales et leur
sécrétion de facteurs ostéolytiques, engen40
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
drant un « cercle vicieux » impliquant les
cellules tumorales, les cellules osseuses et
la trame osseuse [9].
Le dénosumab est un anticorps monoclonal humain anti-RANKL. En neutralisant
le RANKL, le dénosumab interrompt le
«cercle vicieux» de l’ostéolyse tumorale.
Le dénosumab inhibe tant la formation que
l’activité des ostéoclastes, ce qui aboutie
à une inhibition de la résorption osseuse
plus marquée que celle induite par les
bisphosphonates. De plus, en tant qu’anticorps circulant, le dénosumab diffuse dans
l’ensemble du tissu osseux, contrairement
aux bisphosphonates dont l’affinité pour
l’hydroxyapatite limite la pénétration intraosseuse. Par contre, contrairement aux
bisphosphonates, le dénosumab n’est pas
incorporé dans la matrice osseuse, par
conséquent son action inhibitrice sur la
résorption osseuse est plus transitoire [4,9].
BIPHOSPHONATES ET CANCER DU SEIN
Les biphosphonates ont prouvé leur efficacité dans la prise
en charge thérapeutique des métastases
osseuses de cancer du
sein. Un essai randomisé en double aveugle
de phase III conduit
chez 173 patientes présentant des métastases
osseuses d’un cancer
du sein, comparant
clodronate au placebo
(Paterson JCO 1993)
a démontré l’intérêt
du clodronate et ce en
réduisant le nombre d’épisodes d’hypercalcémie (28
vs 52, p<0.01), d’incidence
de fractures vertébrales (84
vs 124% patientes/années,
p<0.025) et une réduction en
nombre total d’évènement
squelettique morbide (216.6
vs 304.8, p<0.001).
Une méta-analyse regroupant neuf études randomisées chez 2 806 patientes
ayant un cancer du sein avec
métastases osseuses, comparant ces bisphosphonates
oraux ou intraveineux (clodronate, ibandronate, pamidronate, acide zolédronique)
versus placebo ou l’absence
de bisphosphonates vient
d’être récemment publiée
en 2012 [10]. Par rapport à un
placebo ou à l’absence de
bisphosphonate, les bisphosphonates diminuent le risque
d’événements osseux, que ce
soit avec le clodronate per os
(RR = 0,85; IC 95 %= 0,730,99; p = 0,04), l’ibandronate intraveineux
(RR = 0,80; IC 95 %= 0,67-0,96; p= 0,01),
le pamidronate intraveineux (RR = 0,77; IC
95 %= 0,69-0,87; p<0,001) ou l’acide zolédronique intraveineux (RR = 0,59; IC 95 %=
0,42-0,82; p= 0,001).
L’acide zolédronique diminue le taux d’événements osseux de 20 % par rapport au
pamidronate (RR = 0,80; p = 0,04) et de
30 % dans le sous-groupe de patientes avec
lésions ostéolytiques [8,11]. Les bisphosphonates retardent le délai d’apparition des
événements squelettiques et pour certains diminuent les douleurs osseuses et
améliorent la qualité de vie, mais ne modifient pas la survie.
Les effets des biphosphonates sur la douleur ont également été étudiés, nous citerons deux études, la première publiée par
Body JJ et al. (Br J Cancer 2004;90:113337) a démontré que le soulagement de la
douleur était significatif chez les patients
traités par Ibandronate IV par rapport au
RECHERCHES MÉDICALES
bras placébo, de même que pour la seconde étude publiée par Kohno N, et al. (J
Clin Oncol. 2005;23:3314-3321), qui retrouve
également un bénéfice significatif chez des
patients traités par l’Acide Zolédronique IV
par rapport aux patients du bras placébo.
Les essais contrôlés de phase III démontrent
que le dénosumab a une efficacité supérieure à celle de l’acide Zolédronique notamment dans le cancer du sein avec métastases osseuses, même si la survie n’est
pas améliorée et si le rapport coût/efficacité
doit être étudié davantage [12].
Une étude comparative randomisée de
phase III, en double insu, ayant inclus 2
046 patientes présentant un cancer du sein
métastatique au niveau squelettique, dont
un bras a été traité par le dénosumab (120
mg sous-cutané toutes les 4 semaines) et
le deuxième bras traité par l’acide zolédronique (4 mg en perfusion toutes les 4
semaines avec adaptation de la dose selon
la fonction rénale). Le critère principal
d’efficacité étant le délai de survenue de la
première complication osseuse était prolongé de 18% dans le groupe dénosumab
par rapport au groupe zolédronate (RR =
0,82; p<0,001 par un test de non-infériorité
et p = 0,01 par un test de supériorité). Le
délai médian pour que survienne le premier
évènement osseux était de 26,4 mois dans
le groupe zolédronate et n’était pas atteint
dans le groupe dénosumab. Une "analyse en
événements multiples" montra que la morbidité osseuse globale était diminuée de 23
% dans le groupe dénosumab (p= 0,001).
La survie globale était toutefois similaire
entre les deux groupes de patientes [4,13].
Une aggravation cliniquement significative
des douleurs osseuses était retardée chez
les patientes traitées par le dénosumab par
rapport au groupe zolédronate (9,7 mois
versus 5,8 mois; p = 0,002) [12] avec une
amélioration de la qualité de vie, indépendamment de l’amélioration des douleurs
osseuses [4,14].
Effets secondaires des biphosphonates :
Généralement bien tolérés, les bisphosphonates et le dénosumab sont occasionnellement associés à des effets secondaires,
parfois graves.
L’hypocalcémie induite par ces inhibiteurs
puissants de la résorption osseuse est le
plus souvent discrète et asymptomatique.
Les cas d’hypocalcémie sévère sont rares en
rapport généralement avec un déficit profond en vitamine D. Dans les essais comparatifs cités ci-dessus, l’hypocalcémie a été
plus souvent rapportée chez les patients
traités par dénosumab que par l’acide zolédronique (9,6 % versus 5,0 %), reflétant une
inhibition plus marquée de la résorption
osseuse [4]. Il est important d’administrer
des suppléments de calcium et de vitamine
D à tous les patients recevant un traitement
prolongé par l’acide zolédronique et dénosumab pour réduire le taux et le degré des
hypocalcémies.
Il est actuellement recommandé de mesurer
régulièrement la calcémie chez les patients
traités par dénosumab et l’acide zolédronique. Ce dernier étant potentiellement
néphrotoxique nécessitant un contrôle de
la fonction rénale avant chaque perfusion,
la surveillance de la fonction rénale n’est
pas nécessaire avec le dénosumab, dont
la pharmacocinétique ne dépend pas de la
fonction rénale.
L’ostéonécrose de la mâchoire (ONM) est
l’effet secondaire le plus redoutable d’un
traitement prolongé par zolédronate ou
dénosumab.
La présentation clinique de l’ONM est très
variable, allant d’une exposition osseuse
asymptomatique à la formation de séquestres osseux, surinfections difficilement
traitables ou fistules chroniques. Selon les
séries, la prévalence de l’ONM chez les patients cancéreux varie entre 1% et 10% lors
d’un traitement prolongé par bisphosphonates, le risque étant plus élevé chez les
patients ayant à la base un état bucco-dentaire défectueux.
Elle survient typiquement après une extraction dentaire mais elle peut aussi survenir
sans traumatisme évident. L’inhibition prolongée du remodelage osseux joue un rôle
clé dans la pathogenèse de l’ONM, causant
une absence de réparation des microfractures physiologiques induites par le stress
répété des forces masticatoires.
Dans les études comparatives entre le zolédronate et le dénosumab, davantage de cas
furent rapportés chez les patients traités
par dénosumab, mais l’analyse intégrée des
trois essais comparatifs incluant au total 5
372 patients ne montre pas de différence
statistiquement significative entre les deux
groupes thérapeutiques (1,8 % versus 1,3 %;
p = 0,13) [4,15].
Un examen dentaire complet suivi d’un traitement approprié doit être effectué avant
d’entamer un traitement par bisphosphonates ou dénosumab afin d’éviter autant
que possible les procédures invasives en
cours de traitement.
RECOMMANDATIONS PRATIQUES :
Il est actuellement recommandé de débuter
les bisphosphonates ou le dénosumab dès
le diagnostic de métastase osseuse dans le
cancer du sein au stade avancé afin de retarder la survenue de la première complication osseuse et par conséquent de réduire
la morbidité osseuse globale.
La supériorité du dénosumab a été démontrée dans le cancer du sein métastatique au
niveau osseux par rapport à l’acide zolédronique dans différentes études conduites de
façon rigoureuse et avec des critères d’effi-
cacité définis au préalable.
L’arrêt temporaire de l’acide Zolédronique
ou une réduction de la fréquence d’administration est recommandé par plusieurs
experts chez les patients dont la maladie
osseuse est bien contrôlée, mais ces recommandations ont des bases essentiellement empiriques [4, 16].
La pharmacocinétique du dénosumab n’est
pas en faveur d’un arrêt temporaire du traitement. Le maintien de l’efficacité clinique
du dénosumab requiert actuellement un
traitement continu, des études à long terme
sont en cours et elles devraient donner
davantage d’informations sur le rapport
bénéfices/risques d’une administration très
prolongée
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* Dr N. Ameziane - Pr Louafi Djellali,
Service d’oncologie médicale-CHU Oran.
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
41
41
RECHERCHES MÉDICALES
Trouble du comportement alimentaire:
l’anorexie mentale
Document co-rédigé par le Docteur Bouras Rym, psychiatre à l'EHS en psychiatrie DRID
Hocine et le Docteur Benyakhlef Nouria, professeur en psychiatrie, chef d'unité à l'EHS DRID
Hocine
INTRODUCTION
L’anorexie mentale a, longtemps, été
considérée comme une pathologie spécifiquement occidentale. En fait, elle ne
l’est pas; elle est, même, de plus en plus
fréquente, en Algérie.
L’approche de l’été et de sa «mode du
régime estival» est le moment idéal,
pour sensibiliser le public, les lectrices
en particulier, à cette pathologie, qui
apparaît, souvent, au décours d’un régime.
Mais, avant tout, définissons ce dont
on parle et faisons la part des choses
entre deux concepts, que les gens
confondent, fréquemment; l’anorexie et
l’anorexie mentale.
La première est un symptôme qui
consiste en une perte de l’appétit, qu’il
convient d’intégrer dans un cadre nosographique; alors que l’anorexie mentale
est une pathologie, qui consiste en une
conduite de restriction active de l’alimentation, touchant, principalement,
les jeunes femmes, entre 12 et 20 ans.
Pour poser le diagnostic d’anorexie
mentale, une triade de symptômes est
nécessaire:
L’anorexie: la spécificité de cette anorexie est qu’elle ne consiste pas en
une perte de l’appétit, mais d’une lutte
contre la faim. La jeune femme s’oblige
à ne pas manger, ou bien à manger de
toutes petites quantités de nourriture,
triée et choisie, pour sa valeur calorique
très faible. Il est à préciser qu’au bout de
plusieurs mois d’évolution, l’anorexique
ne ressent plus la faim; elle va essayer
de leurrer sa famille et son entourage
par des réponses évasives, telles que «je
n’ai pas faim» ou «j’ai mangé avant de
rentrer» ou «j’ai trop mangé à midi»…
donnant, ainsi, une impression de normalité.
L’amaigrissement: conséquence logique de cette restriction alimentaire
drastique, le poids est inférieur de 15%
au poids normal, ou IMC (indice masse
corporel) ≤ 17,5. L’aspect de la jeune
42
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
femme est cachectique et vieillot, Yeux
excavés, os saillant, peau sèche et rugueuse, effacement des formes féminines, joues creuses, cheveux ternes et
secs, ongles striés et cassants. Malgré
cela, l’anorexique banalise ses troubles,
ne se voit ni malade, ni maigre, mais
grosse. Pour maintenir ce poids, voire
même pour continuer à en perdre, l’anorexique va avoir recours à des «stratégies», comme des vomissements provoqués, quasi systématiques après chaque
repas, fut-il frugal, ou après une crise
de boulimie (ingurgitation massive et
rapide d’aliments, sans distinction dans
les saveurs); mais, aussi, le recours aux
laxatifs…
allant jusqu’à mettre le pronostic vital
en jeu. En effet, la mortalité par dénutrition peut atteindre 10%, nécessitant,
alors, leur hospitalisation en service de
réanimation; puis, en second lieu, en
service de psychiatrie. Malheureusement, ce n’est pas toujours le cas.
En effet, en raison du déni de l’anorexique de ses troubles et du sentiment
d’impuissance de la famille, face à ces
symptômes, souvent, une errance diagnostic s’ensuit, impliquant le gastroentérologue, l’interniste, ou encore,
l’endocrinologue, retardant, d’autant
plus, la prise en charge et augmentant,
par la même, les risques encourus par
l’anorexique.
L’aménorrhée: c’est-à-dire interruption
du cycle menstruel pendant, au moins,
trois mois.
Cette pathologie, qui touche, souvent,
des jeunes femmes intelligentes et sensibles, est le reflet d’une souffrance psychique, qui peut avoir de graves conséquences psychiques et somatiques,
CONCLUSION:
C’est pour cela qu’une prise en charge
précoce et adaptée, auprès d’un spécialiste de la santé mentale, tel un psychiatre, est indispensable, entre autres
pour guider ces jeunes femmes, en
souffrance, vers l’acceptation de soi et
la verbalisation de leurs émotions
RECHERCHES MÉDICALES
Diagnostic et traitement
de la carence en fer sans anémie
RÉSUMÉ
La carence en fer (CF) sans anémie
reste, souvent, non diagnostiquée, car
les symptômes sont attribués à l’anémie ferriprive. La ferritine en est le marqueur le plus spécifique: une valeur < 10
μg/l représente des réserves épuisées,
10-30 μg/l peuvent confirmer une CF,
30-50 μg/l peuvent indiquer une CF
fonctionnelle. Si les valeurs de CRP et
d’ALAT sont élevées, il faut interpréter
une valeur de ferritine élevée/normale
avec précaution. Si un traitement oral
n’apporte pas le succès escompté, ou
n’est pas toléré, un traitement intraveineux est justifié. Avec une ferritine < 10
μg/l, l’administration d’une dose cumulative totale de 1000 mg de fer doit être
envisagée, avec une ferritine de 10-30
μg/l, une dose cumulative totale de 500
mg de fer, et avec une ferritine de 30-50
mg/l, on peut administrer une première
dose de 200 mg de fer. La ferritine doit
être contrôlée après trois mois; au plus
tôt, deux semaines après le dernier traitement oral, ou huit à douze semaines
après la dernière injection intraveineuse.
INTRODUCTION
La carence en fer (CF) sans anémie
semble être une condition très courante, qui reste, souvent, non diagnostiquée. Les symptômes comme la fatigue,
les malaises, la faiblesse, ou la baisse
de concentration sont, généralement,
attribués à l’anémie ferriprive. Il existe,
aujourd’hui, des preuves cliniques, selon lesquelles ces symptômes peuvent,
également, provenir d’une CF sans anémie.1-4
En 2004, l’Organisation mondiale de
la santé (OMS) a identifié la CF sans
anémie comme un problème de santé
lié à la nutrition, qui est rencontré, couramment, dans le monde.5 Si elle n’est
pas traitée, elle peut affecter la santé
humaine. Même en Europe, la CF a été
identifiée comme l’un des principaux
troubles nutritionnels.6 Pourtant, il
n’existe, à ce jour, aucun critère permettant de diagnostiquer et de traiter la CF
sans anémie.
C’est pourquoi, un groupe de travail
suisse a été créé et a été chargé de définir des critères cliniques de la CF sans
anémie, en se basant sur des données
existantes. Dès que de nouvelles données cliniques seront disponibles, des
mises à jour seront publiées.
PATHOPHYSIOLOGIE DE LA CARENCE
EN FER
Rôle du fer
Le rôle occupé par le fer dans l’hémoglobine, pour le transport de l’oxygène
est bien connu. Cependant, le fer est,
également, impliqué dans de nombreuses autres fonctions «non hématologiques»: ainsi, il joue un rôle, important, dans l’utilisation de l’oxygène par
les enzymes de la chaîne respiratoire
dans les mitochondries et donc, dans la
production d’énergie.4 Le fer est, aussi,
l’atome central des enzymes régulateurs
de la production de neurotransmetteurs
et de la transcription de certains ARN
messagers.7, 8 La CF peut, donc, influencer le métabolisme des tissus en division, compromettre les fonctions cognitives, ainsi que la croissance des enfants
et des adolescents.
Le corps humain contient, environ, 2,5-4
g de fer, pour l’essentiel lié à l’hémoglobine et à la myoglobine (~ 2,4 g), mais
aussi stocké dans le foie (~ 1 g) et les
macrophages du système réticulo-endothélial (~ 0,6 g).9 Le fer est métabolisé
au rythme d’environ 1 mg, par jour. L’absorption est active dans le duodénum
et la partie supérieure du jéjunum. Les
femmes non ménopausées connaissent
une perte de fer supplémentaire, lors de
la menstruation (en moyenne, environ
1-2 mg/jour).9 Il peut, également, y avoir
perte de fer par le tractus gastro-intestinal secondairement à une maladie ou à
la prise de médicaments.
Prévalence de la carence en fer sans
anémie
La CF sans anémie est endémique,
même parmi la population des pays
développés, tels que la Suisse et est
plus courante que la CF avec anémie.10
Toutefois, il semble que les statistiques,
sur la prévalence de la CF sans anémie,
varient en fonction des régions.6 Ces
variations sont, probablement, secondaires à une divergence des définitions
de la CF et/ou des valeurs normales
appliquées dans les laboratoires.
Aux Etats-Unis par exemple, on a découvert que la CF sans anémie touchait
quelque 11-13% des femmes non ménopausées.2 Une étude française a mis en
évidence qu’environ 20% des femmes,
en âge de procréer, présentaient une CF
sans anémie (ferritine < 15 μg/l), alors
que 4%, seulement, étaient concernées
par une CF avec anémie.11
En Europe, la prévalence de la CF sans
anémie a été étudiée par Hercberg, en
2001 et les résultats ont varié de 4-33%,
les populations étudiées, dans certains
cas, étant petites.6
En Suisse, les chiffres sur la prévalence
de la CF sans anémie proviennent d’une
étude menée sur, environ, 8000 des 11
322 soldats de l’école de recrue, du premier semestre 2004. Dans cette population, à prédominance masculine, 7% des
recrues ont présenté une CF sans anémie, basée sur une ferritine < 30 μg/l.
Par comparaison, 0,1% seulement présentait une CF associée à une anémie.10
Preuves, signes et symptômes cliniques de la carence en fer sans anémie
Des études cliniques contrôlées ont mis
en évidence un lien, possible, entre la
CF sans anémie et la fatigue, 1une fonction cognitive diminuée3, 12 et les capacités physiques.2 Récemment, il a été
suggéré que la CF sans anémie jouait
un rôle dans le syndrome des jambes
sans repos.13 Des observations multiples
portent sur le rôle que semble jouer la
CF sans anémie sur l’alopécie et la fragilité des cheveux (cheveux cassants),
la labilité émotionnelle et l’aggravation des dépressions, surtout chez les
patientes postpartum.14-16 Une relation
avec la perlèche et la koïlonychie est
anecdotique et associe, souvent, ces
affections à l’anémie.
Fatigue
Dans le cadre d’une étude, Verdon et
coll. ont administré du fer sous forme
de sulfate ferreux (80 mg de fer élémentaire/jour; n=75), ou un placebo
(n=69), par voie orale, à 144 femmes
non anémiques, présentant une fatigue
non expliquée.1 Une majorité (85%) présentait une ferritine ≤ 50 μg/l, et 51%
N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
43
43
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RECHERCHES MÉDICALES
présentaient, même, une ferritine ≤ 20
μg/l au début du traitement. La fatigue
a été évaluée sur une échelle analogique
de dix points. Après un mois de traitement, environ 29% des femmes, qui
recevaient une préparation orale de fer,
ont relevé une diminution sensible de la
fatigue, contre 13% dans le groupe placebo. Une analyse des sous-groupes a
montré que seules les patientes, ayant
démarré le traitement avec une ferritine
faible (≤ 50 μg/l), ont vu leur état de
santé s’améliorer, suite au traitement.
A la fin du traitement, la ferritine était,
nettement, plus élevée dans le groupe
ayant reçu un traitement oral, que dans
le groupe de contrôle.
Fonction cognitive diminuée
Bruner et coll. ont étudié une population
urbaine d’adolescentes aux Etats-Unis
(CF sans anémie définie par une ferritine ≤ 12 μg/l).3 L’administration orale
de fer a eu une influence, significative,
sur l’apprentissage oral et la mémoire,
mais aussi, sur la ferritine moyenne (27,3
contre 12,1 μg/l dans le groupe placebo).
Murray-Kolb a étudié une population
similaire, qui présentait des CF sans
anémie et des CF avec anémie.12 Le
traitement de fer a, considérablement,
augmenté la ferritine et amélioré les
fonctions cognitives, dans la population
féminine étudiée. Les effets de la CF sur
la cognition ne semblent, donc, pas être
limités au cerveau en croissance.
Adaptation aérobie
Une étude randomisée, en double
aveugle et contrôlée par placebo, menée sur 41 femmes, a suggéré que la CF
sans anémie modifiait l’adaptation aérobie, ainsi que l’adaptation à l’effort. Ces
deux facteurs, qui influencent la capacité physique, étaient améliorés par un
apport complémentaire de fer, par voie
orale.2, 17
Syndrome des jambes sans repos
Le rôle, possible, de la CF dans le syndrome des jambes sans repos a été
analysé.13 Le syndrome peut être dû à
d’autres causes, mais une corrélation
avec une ferritine basse a été évoquée.18
Un traitement de ce syndrome, par du
fer, est toujours à l’étude.
Alopécie
Deux études récentes ont suggéré
qu’une ferritine basse pouvait constituer un facteur de risque, pour la chute
des cheveux, chez les femmes non
ménopausées.14, 19 Une autre étude, ré44
Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
cente, menée sur des femmes en bonne
santé, par ailleurs, n’a pourtant montré aucune corrélation entre la ferritine
et la chute des cheveux. Les groupes
avec une ferritine de 10-30 μg/l et > 30
μg/l ont montré une chute des cheveux
identique.20 D’autres études sont nécessaires, pour confirmer une relation entre
l’alopécie et la CF.
DIAGNOSTIC
Le diagnostic d’une CF sans anémie
repose sur deux points: la relation temporelle des symptômes associés à la
maladie (fatigue, fonction cognitive
et capacité physique diminuées) et les
analyses biologiques. Il faut, par ailleurs,
écarter les autres causes possibles de
ces symptômes, pour la plupart non
spécifiques.
Le critère de référence, pour une estimation de la quantité de fer, est la coloration de la moelle osseuse. L’aspiration,
ou la biopsie, de moelle osseuse est une
procédure médicale assez lourde et douloureuse, réservée à des cas spécifiques
et cette procédure n’est disponible que
dans certains centres spécialisés.
L’analyse sanguine initiale devrait inclure un hémogramme complet, la ferritine, la CRP et l’ALAT.5 La ferritine est
le marqueur le plus spécifique d’une
diminution des stocks de fer et permet
d’évaluer l’efficacité du traitement.21 Des
valeurs de CRP et d’ALAT normales indiquent que la ferritine mesurée reflète
l’état des réserves en fer. Des valeurs
élevées indiquent que la concentration
de ferritine peut avoir été influencée par
une inflammation, une infection, ou une
maladie hépatocellulaire concomitante.
Dans ce cas, il faut interpréter avec précaution une valeur de ferritine élevée,
ou normale, chez un patient symptomatique.22
Pour l’instant, aucune valeur limite, permettant de diagnostiquer une CF, n’a
été définie. Le débat, actuel, porte sur
la valeur de ferritine optimale, qui peut,
par ailleurs, varier d’un patient à l’autre.
Une ferritine < 10 μg/l représente des
réserves totalement épuisées. Une ferritine < 30 μg/l peut confirmer une CF.10
Une ferritine entre 30-50 μg/l peut indiquer une CF fonctionnelle.1
Un MCHC (concentration corpusculaire
moyenne en hémoglobine), et un MCV
(volume globulaire moyen) réduits
(taux normaux 330-360 g/l et 80-100
fL) sont les marqueurs, respectifs, de
l’hypochromie et de la microcytose
et signalent une érythropoïèse compromise, due à une CF. Leurs valeurs
s’obtiennent, généralement, par l’intermédiaire d’un hémogramme complet.
Les érythrocytes hypochromes (> 2%)
et réticulocytes hypochromes (MCHC<
30 pg) ont montré qu’ils étaient des
marqueurs sensibles de la CF, mais
ne peuvent être mis en évidence que
par certaines cellules de Malassez
automatisées.
Récemment, une analyse des récepteurs
solubles à la transferrine a fait l’objet de
discussions, afin de déterminer si leur
valeur sanguine pouvait confirmer le
diagnostic de CF sans anémie, chez les
patients présentant une inflammation.22
L’utilisation des récepteurs solubles à la
transferrine, dans cette population de
patients, requiert confirmation et, pour
l’instant, aucune valeur de référence ne
fait l’objet d’un consensus.
Si le patient présente une fatigue, ou
une diminution de sa capacité physique
et qu’une CF est soupçonnée, ou suggérée par des résultats biologiques, le
médecin est, d’abord, tenu de rechercher, soigneusement, une autre cause à
la fatigue; somatique ou psychosociale,
par exemple.
Avant de commencer le traitement, il
est indispensable de rechercher et, dans
la mesure du possible, de traiter les
causes possibles de la CF telles qu’une
hémorragie gastro-intestinale (secondaire à une tumeur maligne, à des médicaments, ou à des hémorroïdes, par
exemple), une maladie cœliaque, ou
d’autres syndromes de malabsorption
(achlorhydrie gastrique, gastrite autoimmune, infections à H. pylori), des
menstruations plus fortes, ou des dons
du sang. Quant au style de vie du patient, un régime végétarien est, en soi,
rarement suffisant, pour expliquer une
CF sans anémie. Néanmoins, chez les
personnes ayant un besoin en fer accru
(comme les enfants, les adolescents, les
femmes non ménopausées, ou les sportifs actifs), un régime végétarien peut
favoriser le développement d’une CF.
TRAITEMENT
L’augmentation du taux de ferritine, par
un complément de fer, a permis d’améliorer les symptômes liés à la CF, dans
diverses populations de patients. Le
traitement martial ne doit intervenir que
lorsque le diagnostic est confirmé et
que toutes les causes potentielles sont
investiguées et traitées. On dispose,
actuellement, de préparations de fer,
pour administration orale ou intraveineuse; elles diffèrent dans leur composition et leurs propriétés. Les deux types
RECHERCHES MÉDICALES
d’administration – intraveineuse et orale
– ont conduit à des taux d’hémoglobine
comparables, chez les patients anémiques.
Traitement par voie orale
L’administration de fer, par voie orale,
est la thérapie de base, pour traiter les
symptômes de CF et obtenir une augmentation de la ferritine. Le traitement
est économique et peut être efficace,
s’il est bien observé sur une période
suffisamment longue; généralement,
plusieurs mois. Toutefois, même si les
patients ont reçu des instructions détaillées, la longueur du traitement (nécessaire à cause d’une faible absorption
intestinale du fer) et les effets secondaires peuvent diminuer l’observance.
Une méta-analyse récente a montré que
l’administration d’une préparation de
Fe3+ est, sensiblement, mieux tolérée
que les préparations de Fe2+ et facilite
l’observance par le patient.23 On ne sait,
toutefois, pas si l’absorption du Fe3+ est
moins efficace que celle du Fe2+, ou si
l’absorption du fer, par les érythrocytes,
peut s’en trouver affectée; des discussions et des études à ce propos sont,
toujours, en cours.
Traitement intraveineux
Si un traitement oral n’apporte pas le
succès escompté, ou n’est pas toléré par
le patient, un traitement intraveineux
est justifié. Si le patient ne répond pas
au traitement oral, malgré une bonne
observance, le diagnostic de la CF et de
ses causes doit être revu, avant de passer au traitement intraveineux.
Chez les patients présentant des stocks
de fer très faibles (ferritine < 10 μg/l),
l’administration d’une dose cumulative
totale de 1000 mg de fer doit être envisagée.
Chez les patients présentant une ferritine de 10-30 μg/l, on préconise une
dose cumulative totale de 500 mg de
fer. Chez les patients symptomatiques
présentant une ferritine 30-50 μg/l, on
peut administrer une première dose de
200 mg de fer. La CF est uniquement
confirmée si le patient réagit au traitement sinon ce dernier doit être interrompu et le diagnostic révisé.
Le dosage doit être adapté à la situation
clinique du patient, c’est-à-dire à son
poids, à ses préférences, à une maladie
sous-jacente, à une possible hémorragie chronique et à la préparation de fer
intraveineuse utilisée.
Contrôle et suivi
L’objectif primaire de la substitution
martiale chez les patients présentant
une CF est le soulagement des symptômes. Si cet objectif ne peut être atteint, le patient doit se soumettre à des
examens complémentaires afin de réviser le diagnostic initial. Pour assurer une
reconstitution adéquate des stocks de
fer, il faut cibler une ferritine de 50-100
μg/l en tenant compte de la situation
clinique.
La ferritine des patients qui suivent
un traitement par voie orale doit être
contrôlée après trois mois. Avant le
contrôle, le traitement doit avoir été
interrompu pendant deux semaines au
moins. Chez les patients recevant un
traitement par voie intraveineuse, la
ferritine doit être contrôlée au plus tôt
huit à douze semaines après la dernière
injection. Un contrôle prématuré peut
montrer des valeurs faussement élevées
même si un tel dosage peut s’avérer nécessaire si les symptômes ne régressent
pas, voire s’aggravent après quelques
semaines. Dans tous les cas, la ferritine
doit être mesurée à la fin du traitement
pour exclure des pertes de fer chroniques.
Les patients qui présentent une perte
martiale chronique peuvent avoir besoin d’un complément de fer après la
thérapie initiale. Cette décision reste tributaire de l’appréciation du médecin et
de la situation clinique
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N°28 - Mars 2014 Santé-MAG
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RECHERCHES MÉDICALES
Thérapie ciblée, dans les cancers
colorectaux métastatiques
Dr Z. Behourah, Dr K. Rekai, Pr Djellali Louafi*
RÉSUMÉ
Dans le monde, le cancer colorectal est
le troisième cancer le plus fréquent,
chez l’homme et le deuxième, chez la
femme. En Algérie, il occupe le troisième rang, après le cancer du poumon et de la vessie, chez l’homme et le
cancer du sein et du col utérin, chez la
femme (INSP2007).
Le cancer colorectal est la seconde
cause de mortalité, dans le monde, par
cancer, chez les deux sexes.
Son pronostic a été transformé par le
développement des traitements chirurgicaux et médicaux plus actifs. La survie globale des patients, atteints par un
cancer colorectal métastatique (mCRC),
a augmenté de façon significative,
pour atteindre presque deux ans, en
moyenne, aujourd’hui.
Cet article résume les nouvelles thérapeutiques, dites ciblées, dans le cancer
colorectal métastatique.
INTRODUCTION
Au cours de ces dernières années, nous
avons été témoins d’une évolution,
majeure, dans le traitement des cancers colorectaux, d’une part par des
progrès chirurgicaux, notamment dans
le domaine de la chirurgie hépatique
et de la radiologie interventionnelle,
permettant de réaliser des métastasectomies hépatiques et d’autre part,
par l’introduction des traitements, dits
ciblés, grâce à l’identification de structures moléculaires comme l’epidermal
growth factor receptor (EGFR) et le vascular endothelial growth factor (VEGF),
ainsi que le développement d’anticorps
et d’inhibiteurs de ces structures, parmi
lesquelles le bévacizumab, le cétuximab
et le panitumumab. Ces agents ont été,
progressivement, introduits aux différentes étapes de la stratégie thérapeutique. D’autres molécules sont en cours
de développement.
Le bévacizumab (Avastin) n’est pas un
agent de chimiothérapie, mais fait partie des thérapies dites ciblées. Il s’agit
d’un anticorps monoclonal humanisé,
dirigé contre le VEGF. Le VEGF est une
molécule fortement impliquée dans la
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Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
stimulation de la néo-angiogenèse des
tumeurs (figure1). Tant dans les modèles
précliniques que chez les patients, l’administration de bévacizumab provoque
une régression vasculaire rapide. Son
utilisation a été approuvée dans le cancer colorectal métastatique, en 2004. Le
bévacizumab est, en général, très bien
toléré, mais il est nécessaire de contrôler l’apparition d’une hypertension artérielle, ou d’une protéinurie en cours de
traitement. Une augmentation du risque
thromboembolique existe, notamment,
chez des patients âgés et son utilisation,
chez des patients avec des antécédents
cardiovasculaires, doit être considérée
avec soin.
Figure 1: mécanismes d’action du bévacizumab
Le cétuximab (Erbitux) est, aussi, une
thérapie ciblée. C’est un anticorps monoclonal murin chimérique, dirigé contre
l’EGFR. Administré, seul, le cétuximab
a une activité anti-tumorale (figure2).
Il potentialise l’effet cytotoxique de la
chimiothérapie et de la radiothérapie.
Dans un essai thérapeutique, sur une population sélectionnée de malades ayant
un cancer colorectal métastatique, avec
un gène KRAS de type sauvage, le cétuximab, associé à une chimiothérapie,
a permis une amélioration, significative,
du taux de réponse objective et de la
survie globale.
L’effet secondaire le plus invalidant est
cutané, avec l’apparition d’une éruption
acnéiforme. Il ne s’agit pas d’une acné
classique. Son traitement nécessite une
prise en charge utilisant, parfois, des
tétracyclines systémiques. D’autres manifestations cutanées gênantes sont la
xérose et les paronychies douloureuses.
Le cétuximab est, actuellement, indiqué
dans le traitement du cancer colorectal
métastatique, avec gène KRAS de type
sauvage, exprimant le récepteur du facteur de croissance épidermique (EGFR),
en association à une chimiothérapie, ou
en monothérapie.
Le panitumumab (Vectibix) est un nouvel anticorps contre l'EGFR, complètement humanisé. Comme le cétuximab,
RECHERCHES MÉDICALES
le panitumumab a une efficacité antitumorale chez 8-13% des patients souffrant de cancer colorectal récidivant, ou
réfractaire aux traitements standards et
il a un effet positif sur la survie sans progression. En recherchant les marqueurs
biologiques permettant d'identifier les
patients pouvant profiter des anticorps
anti-EGFR, il est apparu que la mutation du gène KRAS était présente dans
30-50% des tumeurs colorectales et
conférait une résistance au traitement.
Le bénéfice semble être réservé aux
patients dont la tumeur ne présente
pas de mutation du gène KRAS. Du fait
du caractère humain de cet anticorps,
la tolérance est tout à fait bonne, sur
le plan du risque allergique et il n’est
pas associé à l’apparition d’anticorps
anti-panitumumab. La principale toxicité reste l’apparition d’un rash cutané.
Le développement du panitumumab se
poursuit en cancérologie digestive, pour
les cancers colorectaux KRAS sauvage, à
des stades moins avancés de la maladie
et en association avec des cytotoxiques
conventionnels.
association avec une chimiothérapie
de type FOLFIRI, exclusivement chez
des patients ayant reçu, en première
ligne, une chimiothérapie à base d’oxaliplatine. D’autres études sont en cours
et notamment, en première ligne, pour
évaluer ce médicament, dans le CCRm.
Comme pour le bevacizumab, il n’existe
pas de facteur prédictif d’efficacité de
l’aflibercept. Des études permettront,
probablement, d’individualiser des facteurs prédictifs d’efficacité de cet agent
anti-angiogénique.
Figure 3: mécanisme d’action de l’aflibercept
Figure 2: mécanismes d’action du cétuximab
et du panitumumab
RET, RAF-1, BRAF, BRAFV600E) et le
microenvironnement tumoral (PDGFR,
FGFR). Le régorafénib a montré son
efficacité, en termes de survie sans progression, survie globale et contrôle de la
maladie, dans une étude internationale
de phase III, dans laquelle, les patients
avaient un PS 0 ou 1, au moment de l’inclusion, étaient en échec de chimiothérapie à base de fluoropyrimidine (en association avec l’oxaliplatine ou l’irinotecan),
d’un traitement par anti-VEGF (bévacizumab) et par anti-EGFR (cetuximab
ou panitumumab), si porteurs de KRAS
de type sauvage. Une AMM européenne
a été délivrée le 26 août 2013, pour son
utilisation chez des patients porteurs de
cancer colorectal prétraités.
Conclusion:
Les progrès, obtenus durant ces dix dernières années, dans le traitement systémique du cancer colorectal, sont très
encourageants. Ils sont la conséquence
d'une meilleure utilisation des substances
classiques de chimiothérapie; mais, également, de l'utilisation de nouveaux
agents ciblant des structures moléculaires précises, comme le bévacizumab, le
cétuximab et le panitumumab.
Il existe des indicateurs prédictifs de réponse au traitement (KRAS sauvage pour
les AC anti-EGFR), mais la validation de
nouveaux marqueurs de réponse permettra un véritable traitement «à la carte»
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L’afliberecpt est le deuxième agent
anti-angiogénique (figure3) à obtenir
une AMM, en deuxième ligne, dans une
étude de phase III, pour des patients
avec CCRm. Son indication est, cependant, limitée à la deuxième ligne, en
* Dr Z. Behourah,
Dr K.Rekai,
Pr Djellali Louafi
Service Oncologie Médicale - CHU Oran.
Le régorafénib, Le régorafénib est un
agent oral, qui bloque de multiples protéines kinases, y compris les kinases
impliquées dans l’angiogenèse tumorale
(VEGFR1, 2, 3, TIE2), l’oncogenèse (KIT,
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RECHERCHES MÉDICALES
Pour prévenir la stérilité, induite par les effets
de chimiothérapie et radiothérapie:
Vitrification des gamètes et ovocytes
Par Rania Hamdi
Si la congélation des gamètes date de la
fin des années 60 et des embryons des
années 80, celle des ovocytes est une innovation; notamment, depuis le développement de la technique de vitrification.
Le procédé est important, car il préserve
le capital reproductif des personnes, qui
risquent de souffrir de stérilité, pour
cause de maladie (cancers), ou l’âge.
Le Dr. Nedir Chérif, gynécologue, nous
en parle, dans cette entrevue, accordée à
Santé Mag.
Certains types de cancers impactent
négativement sur la fertilité masculine,
en raison d’une atteinte importante
des gonades, notamment après le traitement par radiothérapie et chimiothérapie. Pour ne pas compromettre
les chances des jeunes patients, qui
se remettent de la maladie, d’avoir, un
jour, des enfants, la clinique Feriel, spécialisée dans la procréation médicalement assistée, a institué une banque de
spermes. «Nous proposons à ces jeunes
la vitrification de leur patrimoine reproductif afin de ne pas compromettre
leurs chances d’avoir un enfant, une fois
mariés. Ils signent, avec la clinique, un
contrat valide de trois années, à raison
de 3000 DA et on leur garde, pendant
cette durée, leurs spermatozoïdes» explique Dr. Cherif Nedir, gynécologue et
directeur général de cette clinique.
De la même manière, la structure propose aux jeunes femmes, non mariées
et ayant atteint un certain âge, la latitude de congeler leurs ovocytes, en
vue de les récupérer et les féconder
avec les spermatozoïdes de leurs futurs conjoints. «Il faut savoir que plus
on avance dans l’âge, plus la qualité
de l’ovocyte est mauvaise. Même si
on transfère des embryons de qualité, il y a, toujours, risque de ce qu’on
appelle l’aneuploïdie, c’est-à-dire, des
embryons qui ne sont pas bien formés
génétiquement. On peut faire, aussi, la
vitrification des parenchymes ovariens;
mais, techniquement, ce n’est pas,
encore, au point», soutient le gynécologue. En clair, à partir de 35 ans, la qualité des gamètes décroît. Cela entraîne
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Santé-MAG
N°28 - Mars 2014
une baisse, progressive, de la fertilité
et aussi, les possibilités d’obtenir une
grossesse, menée à terme. En vitrifiant
des ovules avant l’entame du processus de la détérioration des ovules, l’on
préserve leur qualité. Cette opération
est, aussi, particulièrement, utile pour
les femmes atteintes de cancer. «Si les
ovules sont vitrifiés, avant de recevoir
le traitement par chimiothérapie et radiothérapie, les possibilités d’avoir un
enfant, après la maladie, augmente de
façon exponentielle», s’accorde-t-on à
assurer.
Autant celle des ovules que des spermatozoïdes, la vitrification est une
technique de cryoconservation pour
les maintenir à base de froid, en réalisant une congélation ultrarapide, par
submersion dans du nitrogène liquide,
à -196 ºC. En se vitrifiant, les ovocytes
et les spermes gardent les caractéristiques qu’ils ont, au moment de leur
congélation. En Algérie, la technique est
dûment autorisée. Il n’en demeure pas
moins que le Docteur Nedir estime qu’il
est temps d’engager un débat éthique
sur la congélation et la gestion des embryons, et dans un sens plus large, sur
la procréation médicalement assistée,
pratiquée, dans le pays, depuis plus de
vingt ans. «Il y a quelques années, j’ai
posé la question à un ancien ministre,
pour savoir quel statut donner à un em-
bryon congelé. S’il y a décès d’un des
deux conjoints, ou divorce, comment
faire pour le détruire. Il a invoqué, alors,
l’obligation de réserve. Ce n’est pas une
réponse scientifique. Nous devons avoir
un cadre légal, pour la destruction des
embryons congelés. On doit, donc, leur
donner un statut juridique», recommande notre interlocuteur.
Jusqu’alors, la PMA est codifiée par des
textes règlementaires, qui énumèrent
quatre interdictions. Il est, de ce fait,
proscrit de faire un don de spermes
ou d’ovocytes, les mères porteuses et
le diagnostic préimplantatoire, pour le
choix du sexe. Au-delà de ces quatre
points, la PMA n’est encadrée par aucune loi spécifique. «Le ministère de
tutelle n’a jamais réuni les professionnels de la PMA, pour discuter des procédures légales et éthiques. Cela fait
14 ans que je pratique la PMA. J’ai eu
l’agrément n°1, à la fin des années 90»,
poursuit le praticien. Pourtant, eu égard
au taux important de stérilité et infertilité - environ 20% des couples mariés
n’arrivent pas à concevoir un enfant, naturellement -, la PMA est très sollicitée.
D’autant que l’on estime la proportion
de réussite à, environ, 30% des tentatives. En dix ans, l’équipe de la clinique
Feriel a obtenu près de 1500 naissances,
par assistance médicale
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