CRYPTOCOCCUS NEOFORMANS CRYPTOCOCCUS NEOFORMANS DEFINITION Cryptococcus neoformans est une levure ronde ou ovalaire, capsulée, responsable de la cryptococcose, affection opportuniste survenant chez les patients immunodéprimés, principalement les sujets atteints de sida, à un stade avancé d’immunodépression. La localisation méningée est la plus fréquente, réalisant une méningoencéphalite subaiguë d’évolution très sévère. Au sein de l’espèce C. neoformans, la plus souvent incriminée en pathologie humaine, deux variétés peuvent être distinguées: la variété neoformans correspondant aux sérotypes A et D, cosmopolites, et la variété gattii, correspondant aux sérotypes B et C, absents de nos régions à climats tempérés. Le diagnostic est relativement aisé dans un contexte évocateur: il repose principalement sur la mise en évidence et l’isolement de levures capsulées dans le liquide céphalo-rachidien (LCR) et sur la recherche d’antigènes circulants dans le LCR et le sérum. Synonyme : Cryptocoque. BIOPATHOLOGIE EPIDEMIOLOGIE – CLINIQUE Dans nos pays, la variété neoformans est largement prédominante chez les patients immunodéprimés. La contamination s’effectue le plus souvent par voie aérienne, après inhalation de poussières de fientes de pigeons (ou de chauve-souris) contenant les spores du champignon. Elle peut également se produire par voie transcutanée, à partir du sol. La variété gattii est présente dans les fécès de koala se nourrissant de feuilles d’eucalyptus dans les forêts tropicales et subtropicales. La cryptococcose neuroméningée atteint dans 80 % des cas des patients séropositifs pour le VIH ayant un taux de lymphocytes CD4 effondré: c’est la mycose systémique la plus fréquente au cours du sida et la troisième cause d’infection opportuniste du système nerveux central après la toxoplasmose et les encéphalites virales à cytomégalovirus ou à VIH chez ces patients. Actuellement, les nouveaux traitements anti-rétroviraux utilisés freinent, voire interrompent l’évolution de la maladie. Les autres patients susceptibles de développer une cryptococcose neuroméningée sont les malades atteints de pathologies malignes (leucémies, lymphomes, tumeurs solides…), auto-immunes (sarcoïdose…) ou ayant été transplantés, traités au long cours par corticothérapie orale. Parfois, aucun facteur favorisant n’est identifié. Au plan clinique, la pathologie se manifeste principalement chez l’immunodéprimé, par des signes neurologiques de type céphalées, et parfois, des troubles du comportement, de la fièvre, un syndrome méningé… D’autres localisations sont possibles, notamment pulmonaires (porte d’entrée principale) ou cutanées (lésions ayant l’aspect de pustules ombiliquées évoquant un Molluscum contagiosum). Après diffusion sanguine des cryptocoques, des localisations osseuses, oculaires, cardiaques ou prostatiques peuvent être observées. INDICATIONS DE LA RECHERCHE Suspicion de cryptococcose chez un sujet immunodéprimé, le plus souvent chez un patient séropositif pour le VIH, à un stade avancé d’immunodépression (cf. signes cliniques évocateurs cidessus). RECOMMANDATIONS PREANALYTIQUES PRELEVEMENT Liquide céphalo-rachidien : diagnostic direct, culture, recherche de l’antigène. Sérum : recherche de l’antigène cryptocoque. Autres : urines, liquide de lavage bronchioloalvéolaire… QUESTIONS A POSER AU PATIENT Etes-vous séropositif pour le VIH ? Etes-vous traités par immunodépresseurs (Sandimmun®, Néoral®, Prograf®…) ou corticoïdes par voie orale (Hydrocortisone®, Dectancyl®…) au long cours ? CONSERVATION ET TRANSPORT LCR, sérum : conservation et transport à + 4 °C (examen urgent à traiter dans les meilleurs délais). METHODES DIAGNOSTIQUES - Examen microscopique direct entre lame et lamelle du culot de centrifugation du LCR, dans une goutte d’encre de chine diluée au 1/3 ou au 1/5e. D’autres prélèvements peuvent être utilisés pour rechercher et isoler la levure: sang, urines, liquide de lavage bronchiolo-alvéolaire, pus de lésions cutanées, biopsies… - Mise en culture sur milieu de Sabouraud simple ou Sabouraud-Chloramphénicol, sans cycloheximide (Actidione®), à + 37 °C. © 2012 Biomnis – PRÉCIS DE BIOPATHOLOGIE ANALYSES MÉDICALES SPÉCIALISÉES 1/2 CRYPTOCOCCUS NEOFORMANS - Recherche de l’antigène cryptocoque dans le LCR, le sérum (ou autres prélèvements), par méthode d’agglutination de particules de latex sensibilisées par des anticorps polyclonaux spécifiques du polysaccharide capsulaire de C. neoformans. INTERPRETATION DES RESULTATS Le diagnostic repose sur la mise en évidence du champignon à l’examen direct, son isolement en culture ou la positivité de l’antigène cryptocoque dans le LCR et/ou le sérum. En pratique, la positivité de l’un au moins de ces trois examens conduit à poser le diagnostic de cryptococcose et à mettre en œuvre le traitement. DIAGNOSTIC DIRECT Après coloration à l’encre de chine, C. neoformans apparaît sous la forme d’une levure le plus souvent bourgeonnante, au sein d’une capsule formant un halo clair, doublant voire triplant le diamètre de la levure. Attention toutefois, la capsule peut apparaître très réduite chez un certain nombre de patients sidéens, voire être absente. Cet examen pose le diagnostic dans 90 % des cas. CULTURE C. neoformans pousse en 2 à 4 jours sous la forme de colonies blanches, bombées, lisses, brillantes et à bords nets, plus ou moins coulantes selon le sérotype; elles deviennent plus chamois crèmes ou ocres avec le temps. La variété gattii pousse mieux à + 30 °C. Parfois, la pousse est plus lente et il convient d’attendre un mois avant de rendre une culture négative. L’examen microscopique des colonies montre des levures plus ou moins bourgeonnantes ; les capsules peuvent être peu visibles, voire absentes. Outre l’aspect morphologique, le diagnostic de l’espèce C. neoformans est fondé sur : – l’hydrolyse de l’urée à + 37 °C en 1 à 4 heures (toutefois, il ne s’agit pas d’un caractère suffisant car d’autres espèces hydrolysent l’urée en moins de 4 heures, comme les Trichosporon, et certains cryptocoques sont déficients pour ce caractère) ; – la sensibilité à l’Actidione® (absence de croissance en présence d’Actidione®) ; – l’assimilation des sucres en milieu oxydatif : absence de croissance avec le lactose, le glycérol, le xylitol, et le mélibiose ; croissance variable avec l’arabinose, le cellobiose, le ribose et l’érythritol et positive avec l’inositol ; – activité phénoloxydasique positive (galerie Auxacolor® Biorad), spécifique de C. neoformans. Les deux variétés de C. neoformans peuvent être distinguées par sérotypage (en laboratoire spécialisé) ou par l’assimilation de la D-proline : négative pour la variété neoformans et positive pour la variété gattii. RECHERCHE D’ANTIGENES CIRCULANT (LCR, SERUM…) L’agglutination, visible à l’œil nu, a une bonne sensibilité pour le diagnostic de méningoencéphalite à cryptocoques ; elle permet également un suivi de la réponse au traitement et le dépistage d’éventuelles rechutes. Attention aux faux négatifs (début d’infection ou localisations cutanées pures) et aux faux positifs dans le sérum : patients atteints d’affections à composante auto-immune (lupus érythémateux systémique, sarcoïdose, sclérodermie…) ou recevant des perfusions de macroglobulines, présence d’autres micro-organismes (Trichosporon, Klebsielle, Pseudomonas) du fait de communautés antigéniques. ELEMENTS BIOLOGIQUES NON SPECIFIQUES La cryptococcose s’accompagne parfois d’une hyperprotéinorachie, d’une hypoglycorachie et, dans moins d’un cas sur deux, d’une hypercytorachie. Une hyponatrémie associée est considérée comme un facteur pronostique péjoratif. TRAITEMENT Il utilise une association d’amphotéricine B (Fungizone®) et de fluocytosine (Ancotil®) pendant environ 2 semaines, puis un relais par fluconazole (Béagyne®, Triflucan®) pendant environ 8 semaines à la dose de 400 mg en une prise/jour chez l’adulte. Un traitement d’entretien avec 200 mg/j de fluconazole est ensuite recommandé. L’efficacité du traitement est contrôlée par l’examen clinique et une recherche régulière de la levure par culture. La surveillance repose sur la recherche systématique de l’antigène cryptocoque, permettant de dépister précocement la survenue d’une rechute chez les patients immunodéprimés. . POUR EN SAVOIR PLUS Chabasse D., Brun S., Cryptococcus (agent de la cryptococcose), Encycl Med Biol, Elsevier, Paris, 2003. Guého E., Cryptococcus neoformans. In: Annales du contrôle national de qualité, Agence du médicament, Saint Denis, novembre 1996: 204-207. © 2012 Biomnis – PRÉCIS DE BIOPATHOLOGIE ANALYSES MÉDICALES SPÉCIALISÉES 2/2